Language of document : ECLI:EU:T:2012:517

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (troisième chambre)

3 octobre 2012 (*)

« Marque communautaire – Délai de recours – Tardiveté – Absence de cas fortuit – Absence de force majeure – Droit d’accès à un tribunal – Irrecevabilité manifeste »

Dans l’affaire T‑360/10,

Tecnimed Srl, établie à Vedano Olona (Italie), représentée par Mes M. Franzosi et V. Piccarreta, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. P. Bullock, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI ayant été

Ecobrands Ltd, établie à Londres (Royaume Uni),

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’OHMI du 14 juin 2010 (affaire R 1795/2008‑4), relative à une procédure de nullité entre Tecnimed Srl et Ecobrands Ltd,

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de M. O. Czúcz (rapporteur), président, Mme I. Labucka et M. D. Gratsias, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Faits et procédure

1        Le présent recours, introduit par la requérante, Tecnimed Srl, est dirigé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) du 14 juin 2010 (affaire R 1795/2008‑4), relative à une procédure de nullité introduite par la requérante à l’encontre de la marque communautaire verbale ZAPPER-CLICK, détenue par Ecobrands Ltd, pour une partie des produits désignés par ladite marque communautaire (ci-après la « décision attaquée »). Dans la décision attaquée, la chambre de recours a annulé la décision de la division d’annulation de l’OHMI du 28 octobre 2008 confirmant la nullité partielle de ladite marque communautaire pour tous les produits contestés.

2        La décision attaquée a été notifiée à la requérante le 16 juin 2010.

3        Par télécopie et par courrier électronique parvenus au greffe du Tribunal le 26 août 2010, la requérante a introduit une requête visant à obtenir l’annulation de la décision attaquée.

4        Le 30 août 2010, la requérante a déposé, au greffe du Tribunal, une requête dirigée contre la même décision et portant des signatures différentes de celles figurant sur la requête introduite le 26 août 2010.

5        Par lettre du 26 octobre 2010, le greffier du Tribunal a demandé à la requérante d’expliquer les raisons pour lesquelles les signatures sur la requête déposée au greffe le 30 août 2010 n’étaient pas identiques à celles apposées sur la requête parvenue au greffe par télécopieur et par courrier électronique le 26 août 2010. Le délai pour le dépôt de ces explications, a été fixé au 9 novembre 2010. Le 8 novembre 2010, la requérante a déposé par télécopie et par courrier électronique ses explications mais n’a jamais déposé d’original de ce document, qui n’a donc pas pu être pris en compte, car, conformément à l’article 43, paragraphe 6, du règlement de procédure du Tribunal, le Tribunal doit toujours disposer de l’original d’une pièce de procédure.

6        Le 14 février 2012, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 64 du règlement de procédure, le Tribunal a attiré l’attention de la partie requérante sur l’ordonnance du Tribunal du 29 novembre 2011, ENISA/CEPD (T‑345/11, non publiée au Recueil), et lui a demandé, compte tenu de la jurisprudence précitée, d’expliquer les raisons pour lesquelles les signatures figurant sur la télécopie et le courrier électronique, parvenus au Tribunal le 26 août 2010, n’étaient pas identiques à celles apposées sur la version originale de la requête, déposée au greffe du Tribunal le 30 août 2010. La requérante a déposé ses observations le 1er mars 2012. Également dans le cadre d’une mesure d’organisation de la procédure, l’OHMI a été invité à déposer ses observations sur celles déposées par la requérante. L’OHMI n’a pas déféré à cette demande.

 Conclusions des parties

7        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        confirmer la décision de la division d’annulation ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

8        L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

9        Aux termes de l’article 111 du règlement de procédure, lorsque le recours est manifestement irrecevable, le Tribunal peut, sans poursuivre la procédure, statuer par voie d’ordonnance motivée.

10      En l’espèce, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier et décide, en application de cet article, de statuer sans poursuivre la procédure.

11      Aux termes de l’article 263, sixième alinéa, TFUE, le recours en annulation doit être formé dans un délai de deux mois à compter, suivant le cas, de la publication de l’acte attaqué, de sa notification au requérant ou, à défaut, du jour où celui-ci en a eu connaissance. Conformément aux dispositions de l’article 102, paragraphe 2, du règlement de procédure, ce délai doit, en outre, être augmenté d’un délai de distance forfaitaire de dix jours.

12      Selon une jurisprudence constante, ce délai de recours est d’ordre public, ayant été institué en vue d’assurer la clarté et la sécurité des situations juridiques et d’éviter toute discrimination ou traitement arbitraire dans l’administration de la justice, et il appartient au juge de l’Union européenne de vérifier, d’office, s’il a été respecté (arrêt de la Cour du 23 janvier 1997, Coen, C‑246/95, Rec. p. I‑403, point 21 ; arrêt du Tribunal du 18 septembre 1997, Mutual Aid Administration Services/Commission, T‑121/96 et T‑151/96, Rec. p. II‑1355, points 38 et 39, et ordonnance ENISA/CEPD, précitée, point 11).

13      En l’espèce, la décision attaquée ayant été notifiée à la requérante le 16 juin 2010, il résulte du calcul des délais de procédure prévus à l’article 101, paragraphe 1, sous a) et b), et à l’article 102, paragraphe 2, du règlement de procédure, que le délai de recours expirait le 26 août 2010 à minuit, délai de distance inclus.

14      La requête a été transmise au greffe du Tribunal par télécopieur et par courrier électronique le 26 août 2010, c’est-à-dire avant l’expiration du délai de recours.

15      Toutefois, en application de l’article 43, paragraphe 6, du règlement de procédure, la date à laquelle une copie de l’original signé d’un acte de procédure parvient au greffe du Tribunal par télécopieur n’est prise en considération, aux fins du respect des délais de procédure, que si l’original signé de l’acte est déposé à ce greffe au plus tard dix jours après la réception de la télécopie. De plus, le paragraphe 3 des instructions pratiques aux parties prévoit que, en cas de divergence entre l’original signé et la copie précédemment déposée, seule la date de l’original signé est prise en considération.

16      En l’espèce, comme reconnu par la requérante, les signatures figurant au bas de la requête déposée au greffe le 30 août 2010 ne sont pas identiques à celle figurant sur la requête transmise par télécopie et par courrier électronique le 26 août 2010. Dans ces conditions, la date de dépôt de cette dernière ne peut pas être prise en compte aux fins du respect du délai de recours (ordonnance du président du Tribunal du 13 novembre 2001, F/Cour des comptes, T‑138/01 R, RecFP p. I‑A‑211 et II‑987, points 8 et 9, et ordonnance ENISA/CEPD, précitée, points 16 et 17).

17      Il s’ensuit que, conformément à l’article 43, paragraphe 6, du règlement de procédure, seule la date de dépôt de l’original signé, à savoir le 30 août 2010, doit être prise en compte aux fins du respect du délai de recours. Celui-ci ayant expiré le 26 août 2010 à minuit, il y a lieu de conclure que la requête a été déposée tardivement.

18      Dans ses observations du 1er mars 2012, la requérante fait état des circonstances ayant mené à la différence entre les signatures sur les documents en cause relevée au point 16 ci-dessus.

19      Elle explique, notamment, que, après l’envoi de la requête par télécopieur et courrier électronique au Tribunal le 26 août 2010, un de ses représentants, Me V. Piccareta, a personnellement organisé le lendemain, le 27 août 2010, la préparation de l’original et des copies à envoyer au Tribunal, avec l’aide de Mme C., collaboratrice du cabinet d’avocats à l’époque des faits. Comme confirmé, par ailleurs, par une déclaration de Mme C. jointe aux observations de la requérante du 1er mars 2012, en effectuant des copies de l’original, les dernières pages se sont coincées dans la photocopieuse et une tentative de les extraire de la machine a mené à leur destruction, la page de signature ayant notamment été froissée par la photocopieuse et déchirée en plusieurs morceaux lors de la tentative d’extraction, y inclus la partie comprenant les signatures. Étant donné que les pages déchirées n’ont pas pu être envoyées au Tribunal, Me Piccareta a été contraint de réimprimer l’original de la requête, de le signer et de le faire signer par MM. Franzosi, conformément à ce qui avait été fait précédemment avec la version de la requête transmise par télécopieur.

20      La requérante fait valoir, en outre, que le département du cabinet d’avocats au sein duquel travaillent lesdits représentants utilise une photocopieuse de la plus haute qualité et les investissements réalisés pour l’entretenir sont considérables, comme confirmé par une facture d’entretien s’élevant à 7 544,35 euros, TVA incluse, pour l’année 2010 et ainsi que confirmé, par ailleurs, par la déclaration d’une ancienne employée du cabinet d’avocats en cause également jointe aux observations du 1er mars 2012.

21      À cet égard, il y a lieu de considérer que, en fournissant ces explications, la requérante invoque l’existence d’un cas fortuit ou de force majeure faisant obstacle à toute déchéance tirée de l’expiration du délai de recours, en application de l’article 45, second alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, applicable à la procédure devant le Tribunal en vertu de l’article 53 dudit statut.

22      Il convient de rappeler que les notions de force majeure et de cas fortuit, au sens de l’article 45 du statut de la Cour, comportent, outre un élément objectif relatif aux circonstances anormales et étrangères à l’intéressé, un élément subjectif tenant à l’obligation, pour l’intéressé, de se prémunir contre les conséquences de l’événement anormal en prenant des mesures appropriées sans consentir des sacrifices excessifs. En particulier, l’intéressé doit surveiller soigneusement le déroulement de la procédure et, notamment, faire preuve de diligence afin de respecter les délais prévus (voir arrêt de la Cour du 22 septembre 2011, Bell & Ross/OHMI, C‑426/10 P, non encore publié au Recueil, point 48, et la jurisprudence citée ; ordonnance ENISA/CEPD, précitée, point 20). À cet égard, la préparation, la surveillance et la vérification des pièces de procédure à déposer au greffe relèvent de la responsabilité de son représentant (arrêt Bell & Ross/OHMI, précité, point 50 ; ordonnance ENISA/CEPD, précitée, point 20).

23      En l’espèce, la requérante fait valoir que le fait que la page de signature de l’original de la requête se soit retrouvée coincée et déchirée dans une photocopieuse de pointe et de haute qualité constitue un événement extrêmement anormal et concerne un dysfonctionnement mécanique qui dépasse le domaine du contrôle et de la prévisibilité de l’utilisateur à qui l’on ne peut que demander de fournir un service d’entretien approprié de la photocopieuse. Le fait d’exiger des précautions supplémentaires reviendrait à imposer des sacrifices excessifs.

24      Contrairement à ce que soutient la requérante, ces circonstances ne démontrent pas qu’elle a fait preuve de la diligence requise afin de respecter les délais prévus au sens de la jurisprudence citée au point 22 ci-dessus. En effet, même si le blocage exceptionnel d’une photocopieuse de haute qualité bien entretenue constitue un élément relatif à des circonstances extérieures, il ne saurait être nié que, en procédant à la préparation des copies de l’original de la requête et à l’envoi de celui-ci par courrier le jour suivant le dernier jour utile du délai de recours, la requérante ne s’est pas prémunie contre les conséquences d’un événement anormal en prenant des mesures appropriées, car, à ce moment, il lui était devenu impossible de réparer les effets d’une détérioration de l’original signé de la requête lors de sa reproduction par l’envoi d’une nouvelle page de signature par télécopie ou courrier électronique avant l’expiration du délai de recours. Or, la lecture des textes pertinents, notamment celle du paragraphe 3 des instructions pratiques aux parties, aurait dû l’amener, en professionnel diligent et avisé, à faire en sorte que l’original signé de la requête soit expédié sans retard, immédiatement après l’envoi de la copie.

25      Il s’ensuit que la requérante n’a pas établi l’existence d’un cas fortuit ou de force majeure au sens de l’article 45 du statut de la Cour.

26      Il y a encore lieu d’examiner les arguments de la requérante avancés dans ses observations du 1er mars 2012, qui, selon elle, même s’il devait être considéré que les conditions d’application de l’article 45 du statut de la Cour n’ont pas été satisfaites, ôtent toute pertinence à la différence entre les signatures sur les documents en cause telle que relevée au point 16 ci-dessus.

27      En premier lieu, la requérante fait valoir que lesdites différences ne devraient pas mener à la conclusion que les documents en cause ne soient pas identiques. À cet égard, elle invoque, d’une part, le fait que l’original envoyé par courrier et la copie transmise par télécopieur sont identiques en ce qui concerne le contenu et les aspects formels à l’exception des signatures et de la mention relative au fait que la copie est identique à l’original ainsi que, d’autre part, la circonstance que les signatures sont authentiques et ont été apposées par les avocats auxquels elle a conféré un mandat de représentation. Elle soutient également que des signatures sont par définition manuscrites et que, par conséquent, deux signatures ne seront jamais parfaitement identiques, bien qu’elles soient toutes les deux authentiques et apposées par la même personne. Elle invoque, par ailleurs, la jurisprudence de la Corte suprema di cassazione (Cour de cassation italienne) selon laquelle il n’est pas nécessaire que l’original et la copie d’une requête soient formellement identiques pour ce qui est de la signature, mais qu’il est tout à fait possible que la copie comporte une signature différente de celle figurant sur l’original, à condition que l’auteur des deux signatures soit le même. Au soutien d’une application par analogie de ladite jurisprudence, elle fait référence au principe de l’équivalence.

28      Cette argumentation ne saurait prospérer. En effet, il ressort de la jurisprudence rappelée au point 16 ci-dessus que le Tribunal considère que la seule différence entre les signatures apposées sur la copie de la requête déposée par télécopie et sur la version originale déposée ensuite mène à considérer qu’il ne s’agit pas de documents identiques et qu’en cas de différence, même formelle, entre la copie et l’original, l’article 43, paragraphe 6 du règlement de procédure ne permet pas de retenir la date de réception de la télécopie ou du courrier électronique comme date de dépôt de la requête.

29      S’agissant de l’argument tiré de la jurisprudence de la Corte suprema di cassazione, il doit être rejeté, car il ressort d’une jurisprudence constante que la procédure devant le Tribunal est régie exclusivement par le règlement de procédure [voir, par analogie, arrêt du Tribunal du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, Rec. p. II‑43, point 23]. Par ailleurs, à cet égard, le principe de l’équivalence, selon lequel les modalités procédurales des recours destinés à assurer la sauvegarde des droits que les justiciables tirent du droit de l’Union européenne ne doivent pas être moins favorables que celles concernant des recours similaires de nature interne (voir arrêt de la Cour du 13 mars 2007, Unibet, C‑432/05, Rec. p. I‑2271, point 43, et la jurisprudence citée) ne peut être utilement invoqué par la requérante. Ledit principe concerne la protection des justiciables devant les juridictions nationales en vue du maintien du droit de l’Union tandis que le recours en l’espèce concerne une action directe exercée par une personne privée devant le juge de l’Union.

30      En deuxième lieu, la requérante avance que l’exigence d’une identité de tous les éléments formels de la copie de la requête et de ceux de l’original signé est contraire à celle de la certification par l’avocat d’une copie comme étant une copie conforme à l’original.

31      Force est de relever que cet argument confond le rôle joué par la certification d’une copie d’un acte de procédure déposé au greffe du Tribunal comme étant conforme à l’original au sens de l’article 43, paragraphe 1, du règlement de procédure et l’exigence de l’absence de différences, même mineures, entre le contenu de la version de la requête déposée par fax et celui de la version originale déposée par la suite, au sens de l’article 43, paragraphe 6, du règlement de procédure. En effet, la certification de la conformité d’une copie par rapport à un acte de procédure original est un acte postérieur à la finalisation de ce document et externe par rapport à son contenu, une copie certifiée d’un original restant une copie de l’original. Par contre, l’identité des signatures sur la version de la requête envoyée par fax et de celles de l’original envoyé par la suite concerne l’authenticité de la version originale dudit acte de procédure par rapport à une version de ce même acte envoyée par télécopie ou courrier électronique.

32      En dernier lieu, la requérante fait valoir, en substance, que le fait de considérer son recours comme étant irrecevable au motif que les signatures figurant sur la copie et celles figurant sur l’original de la requête ne sont pas parfaitement identiques viole son droit à une protection juridictionnelle effective, tel que prévu à l’article 6 de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci-après la « CEDH ») et à l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (JO 2007, C 303, p. 1). Elle invoque, à cet égard, l’arrêt Unibet, précité, notamment en ce qui concerne l’application du principe d’effectivité, ainsi que la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme.

33      Ainsi que rappelé au point 37 de l’arrêt Unibet, précité, le principe de la protection juridictionnelle effective constitue un principe général du droit de l’Union, qui découle des traditions constitutionnelles communes aux États membres, qui a été consacré par les articles 6 et 13 de la CEDH et qui a également été réaffirmé à l’article 47 de la charte des droits fondamentaux, énonçant, en son premier alinéa, que toute personne dont les droits et libertés garantis par le droit de l’Union ont été violés a droit à un recours effectif devant un tribunal dans le respect des conditions prévues audit article.

34      Par ailleurs, il ressort de l’article 52, paragraphe 3, de la charte des droits fondamentaux que, dans la mesure où elle contient des dispositions relatives à des droits correspondant à des droits garantis par la CEDH, le sens et la portée de ces droits sont les mêmes que ceux que leur confère ladite convention.

35      À cet égard, la requérante ne saurait utilement invoquer le principe d’effectivité, selon lequel les modalités procédurales des recours destinés à assurer la sauvegarde des droits que les justiciables tirent du droit de l’Union ne doivent pas rendre pratiquement impossible ou excessivement difficile l’exercice des droits conférés par l’ordre juridique de l’Union (voir arrêt Unibet, précité, point 43, et la jurisprudence citée). En effet, comme le principe de l’équivalence (point 29 ci-dessus), le principe d’effectivité concerne la protection des justiciables devant les juridictions nationales s’agissant des droits qu’ils tirent du droit de l’Union.

36      S’agissant du droit de la requérante à une protection juridictionnelle effective, l’article 6, paragraphe 1, de la CEDH garantit aux justiciables un droit effectif d’accès à un tribunal. Ce droit n’est toutefois pas absolu et se prête à des limitations implicitement admises, notamment quant aux conditions de recevabilité d’un recours, car il appelle de par sa nature même une réglementation par l’État, lequel jouit à cet égard d’une certaine marge d’appréciation. Ces limitations ne sauraient restreindre l’accès à un tribunal ouvert à un justiciable de manière ou à un point tels que son droit s’en trouve atteint dans sa substance même. Enfin, elles doivent tendre à un but légitime et il doit exister un rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé (voir Cour eur. D. H., arrêt Levages Prestations Services c. France du 23 octobre 1996, Recueil des arrêts et décisions, 1996‑V, § 40, et arrêt Marcovic e.a. c. Italie du 14 décembre 2006, Recueil des arrêts et décisions, 2006‑XIV, § 99).

37      À cet égard, il doit être rappelé que l’article 43, paragraphe 6, du règlement de procédure prévoit que la réception, par le greffe du Tribunal, de la copie de la requête par télécopieur est assimilée au dépôt de l’original de la requête, à condition que cet original y soit effectivement déposé dans les dix jours. Le respect de cette condition implique, logiquement, que la version adressée au greffe du Tribunal par télécopieur soit la photographie de cet original et non un document présentant le même contenu sous une autre forme. Comme rappelé ci-dessus, cette exigence est exposée clairement dans les instructions pratiques aux parties, dont le paragraphe 3 prévoit, notamment, que l’original signé doit être expédié sans retard, immédiatement après l’envoi de la copie, sans y apporter de corrections ou de modifications, mêmes mineures, et que, en cas de divergence entre l’original signé et la copie précédemment déposée, seule la date du dépôt de l’original signé est prise en considération.

38      Il doit également être rappelé que l’article 43, paragraphe 6, du règlement de procédure, en intégrant les techniques de communication modernes, allège les contraintes imposées aux parties requérantes s’agissant du respect des délais de recours.

39      Par ailleurs, les parties requérantes sont tenues de se montrer vigilantes quant au respect des règles procédurales.

40      Dans ces circonstances, si l’article 43, paragraphe 6, du règlement de procédure, tel qu’interprété, par ailleurs, par le paragraphe 3 des instructions aux parties, constitue, certes, une limitation au droit d’accès à un tribunal, cette limitation ne constitue pas une atteinte à la substance même de ce droit, ce d’autant que, comme il a déjà été relevé au point 37 ci-dessus, les règles en cause sont claires et ne présentent pas de difficulté d’interprétation particulière (voir, en ce sens et par analogie, ordonnance de la Cour du 16 octobre 2010, Internationale Fruchtimport Gesellschaft Weichert/Commission, C‑73/10 P, Rec. p. I‑11535, point 56).

41      Est également pertinente dans ce contexte, la circonstance selon laquelle, en l’espèce, la violation de l’article 43, paragraphe 6, du règlement de procédure est uniquement due à un comportement du conseil de la requérante, qui, ainsi qu’il a été relevé ci-dessus, ne peut être considéré comme un cas fortuit ou de force majeure, qui permettrait de déroger aux règles relatives aux délais de recours.

42      En outre, s’agissant du rapport de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé, la condition tenant à l’identité de la version communiquée par télécopie avec l’original de la requête déposé au greffe du Tribunal, qui découle de l’article 43, paragraphe 6, du règlement de procédure, a un double objectif.

43      D’une part, ladite condition a pour but de garantir que la possibilité de saisir le juge de l’Union par un des nouveaux modes de communication, prévue à l’article 43, paragraphe 6, du règlement de procédure, ne remette pas en cause le caractère impératif des délais de procédure ni les exigences de sécurité juridique et d’égalité entre les justiciables, que ces délais visent à assurer. En effet, comme rappelé au point 12 ci-dessus, lesdits délais et leur application répondent à l’exigence de sécurité juridique et à la nécessité d’éviter toute discrimination ou tout traitement arbitraire dans l’administration de la justice.

44      D’autre part, la condition tenant à l’identité de la version communiquée par télécopie avec l’original de la requête déposé au greffe du Tribunal vise à permettre à ce dernier, lorsque l’original de la requête lui est remis, de vérifier la parfaite similitude de celle-ci avec la version communiquée par télécopie par un simple examen rapide et superficiel, sans examen poussé de leurs contenus.

45      Il y a alors lieu d’examiner si le fait de considérer, comme en l’espèce, que la seule différence entre les signatures apposées sur la copie de la requête déposée par télécopie et celles apposées sur la version originale déposée par la suite mène à considérer qu’il ne s’agit pas de documents identiques relève d’un rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et les objectifs décrits aux points 43 et 44 ci-dessus.

46      À cet égard, même si la divergence ne porte pas sur la substance de la requête communiquée dans les délais de recours et qu’il ne s’agit pas non plus, par ailleurs, d’une modification apportée au contenu dactylographié du document, il n’en résulte pas moins qu’une différence formelle telle que celle constatée en l’espèce peut faire douter de l’identité des deux versions en présence et obliger le greffe du Tribunal à vérifier celle-ci dans le détail, page par page. Par ailleurs, considérer qu’une simple différence dans l’exécution des signatures n’est pas suffisamment importante pour inspirer un tel doute mène à faire des arbitrages cas par cas entre les types de différences formelles à autoriser, ce qui peut compromettre, in fine, l’objectif d’égalité de traitement des parties requérantes face au caractère impératif des délais de procédure.

47      Dès lors, l’interprétation de l’article 43, paragraphe 6, du règlement de procédure, telle que retenue en l’espèce, évitant au greffe du Tribunal de devoir procéder, d’une part, à une comparaison minutieuse du contenu de la copie de la requête envoyée par télécopieur ou par courrier électronique avant l’expiration du délai de recours avec celui de l’original signé de l’acte cas où une différence formelle est constatée et, d’autre part, à des arbitrages au cas par cas s’agissant de différences formelles compromettant, ou pas, l’identité de versions successives d’actes de procédure, ne crée pas un rapport déraisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé.

48      Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que le recours doit être rejeté comme manifestement irrecevable.

 Sur les dépens

49      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombée, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

ordonne :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Tecnimed Srl est condamnée aux dépens.

Fait à Luxembourg, le 3 octobre 2012.

Le greffier

 

      Le président

E. Coulon

 

      O. Czúcz


* Langue de procédure : l’anglais.