Language of document : ECLI:EU:T:2023:318

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

7 juin 2023 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure de déchéance – Marque de l’Union européenne figurative medex – Usage sérieux de la marque – Article 18 et article 58, paragraphe 1, sous a), du règlement (UE) 2017/1001 – Qualification des produits pour lesquels l’usage sérieux a été démontré »

Dans l’affaire T‑419/22,

Medex, živilska industrija, d.o.o., établie à Ljubljana (Slovénie), représentée par Me N. Čuden, avocate,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. J. Ivanauskas, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO ayant été

Gerrit Cornelis Johan Stein, demeurant à Elp (Pays-Bas),

LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé de Mme K. Kowalik‑Bańczyk, présidente, MM. G. Hesse (rapporteur) et I. Dimitrakopoulos, juges,

greffier : M. V. Di Bucci,

vu la phase écrite de la procédure,

–        vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Medex, živilska industrija, d.o.o., demande l’annulation de la décision de la cinquième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 3 mai 2022 (affaire R 1361/2021-5) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 3 octobre 2011, la requérante a présenté à l’EUIPO une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne pour le signe figuratif suivant :

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3        La marque dont l’enregistrement a été demandé désignait les produits relevant des classes 3, 5 et 30 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié et correspondant, en ce qui concerne les produits en cause dans la procédure devant la chambre de recours, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 3 : « Produits cosmétiques ; dentifrices ; crèmes cosmétiques ; cosmétiques pour le soin de la peau ; pommades à usage cosmétique » ;

–        classe 5 : « Produits vitaminés ; additifs et compléments alimentaires pour la consommation humaine à usage médical et/ou thérapeutique ; tonics, compris dans cette classe, y compris les tonics à base de produits de la ruche et de plantes médicinales ; baumes à usage médical ; propolis (à usage médical) ; gelée royale (à usage médical) ; bonbons à usage pharmaceutique ; aliments diététiques à usage médical ; miel raffiné à usage médical et pharmaceutique ; onguents avec des compléments de miel à usage médical ; les produits précités contiennent éventuellement de l’amidon et/ou des dérivés d’amidon uniquement comme excipient ou stabilisateur » ;

–        classe 30 : « Miel ; miel aux fruits secs ; miel aux noix ; pâtisserie ; confiserie ; bonbons ; propolis pour l’alimentation humaine (produit d’apiculture) ; gelée royale pour l’alimentation humaine ; pâte à tartiner à base de miel ; les produits précités contiennent éventuellement de l’amidon et/ou des dérivés d’amidon uniquement comme excipient ou stabilisateur ».

4        Ladite marque a été enregistrée le 2 août 2012 en tant que marque de l’Union européenne.

5        Le 25 juin 2020, l’autre partie à la procédure devant l’EUIPO a présenté, sur le fondement de l’article 58, paragraphe 1, sous a), du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1), une demande en déchéance de la marque contestée, au motif que cette marque n’avait pas fait l’objet, pour les produits visées au point 3 ci-dessus, d’un usage sérieux.

6        Les 10, 11, 13 et 14 septembre 2020, la requérante a produit devant la division d’annulation une série de preuves de l’usage de la marque contestée.

7        Le 7 juin 2021, la division d’annulation a partiellement accueilli la demande en déchéance.

8        Le 5 août 2021, l’autre partie à la procédure a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’annulation. La portée de ce recours était limitée à la partie de la décision de la division d’annulation rejetant la demande en déchéance pour certains produits pour lesquels la marque contestée était enregistrée.

9        Par la décision attaquée, la cinquième chambre de recours de l’EUIPO a partiellement accueilli le recours au motif que l’usage sérieux de la marque contestée n’était pas prouvé pour certains des produits concernés et a prononcé la déchéance de cette marque avec effet à compter du 25 juin 2020 pour les produits relevant des classes 3, 5 et 30, et correspondant à la description suivante :

–        classe 3 : « Dentifrices » ;

–        classe 5 : « Onguents avec des compléments de miel à usage médical ; les produits précités contiennent éventuellement de l’amidon et/ou des dérivés d’amidon uniquement comme excipient ou stabilisateur » ;

–        classe 30 : « Pâtisserie à l’exception des biscuits ; propolis pour l’alimentation humaine (produit d’apiculture) ; gelée royale pour l’alimentation humaine ; les produits précités contiennent éventuellement de l’amidon et/ou des dérivés d’amidon uniquement comme excipient ou stabilisateur ».

Conclusions des parties

10      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée en tant qu’elle a prononcé la déchéance de la marque de l’Union européenne contestée pour les produits relevant des classes 5 et 30 mentionnés dans le point 9 ci-dessus ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

11      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens dans l’hypothèse d’une convocation à une audience.

 En droit

12      La requérante invoque en substance deux moyens, tirés, le premier, de la violation de l’article 94, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 et, le second, de la méconnaissance de l’article 58, paragraphe 1, sous a) et paragraphe 2, du même règlement.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 94, paragraphe 1, du règlement 2017/1001

13      La requérante fait valoir que la chambre de recours a méconnu son obligation de motivation en considérant, notamment au point 94 de la décision attaquée, que la « propolis » et la « gelée royale », relevant de la classe 30, ne pouvaient pas être considérées comme des produits pour l’alimentation humaine, dès lors qu’ils étaient présentés comme ayant une finalité médicale spécifique. Selon la requérante, la chambre de recours a eu tort de considérer, dans ces circonstances, que ces produits n’étaient protégés que dans la classe 5. En outre, la requérante allègue qu’elle n’a pas pu prendre position au sujet de cette distinction avant l’adoption de la décision attaquée.

14      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

15      Premièrement, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 94, paragraphe 1, première phrase, du règlement 2017/1001, les décisions de l’EUIPO doivent être motivées.

16      Cette obligation de motivation a la même portée que celle découlant de l’article 296 TFUE, selon laquelle le raisonnement de l’auteur de l’acte doit apparaître de façon claire et non équivoque. Elle a pour double objectif de permettre, d’une part, aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise afin de défendre leurs droits et, d’autre part, au juge de l’Union d’exercer son contrôle sur la légalité de la décision. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée [arrêt du 7 juin 2017, Mediterranean Premium Spirits/EUIPO – G-Star Raw (GINRAW), T‑258/16, non publié, EU:T:2017:375, point 88].

17      Deuxièmement, l’article 94, paragraphe 1, deuxième phrase, du règlement 2017/1001, dispose que les décisions de l’EUIPO ne peuvent être fondées que sur des motifs ou des preuves au sujet desquels les parties ont pu prendre position.

18      Cette disposition consacre, dans le cadre du droit des marques de l’Union européenne, le principe général de protection des droits de la défense. En vertu de ce principe, les destinataires des décisions des autorités publiques qui affectent de manière sensible leurs intérêts doivent être mis en mesure de faire connaître utilement leur point de vue. Le droit d’être entendu s’étend à tous les éléments de fait ou de droit qui constituent le fondement de l’acte décisionnel, mais non à la position finale que l’administration entend adopter [voir arrêt du 20 octobre 2021, Square/EUIPO ($ Cash App), T‑211/20, non publié, EU:T:2021:712, point 34 et jurisprudence citée].

19      En l’espèce, il ressort notamment du point 94 de la décision attaquée, que la propolis et la gelée royale peuvent être protégées tant dans la classe 5 que dans la classe 30 et que les deux produits sont destinés à la consommation humaine. Selon la chambre de recours, la seule différence entre ces deux classes est que les produits compris dans la classe 30 n’ont pas de finalité médicale spécifique.

20      Au point 95 de ladite décision, la chambre de recours a considéré, à cet égard, que, dès lors que les preuves fournies par la requérante concernaient la propolis et la gelée royale, en tant que produits ayant des propriétés médicales ou sanitaires, l’usage sérieux de la marque contestée par rapport à ces deux produits pour l’alimentation humaine, protégés dans la classe 30, n’avait pas été démontré.

21      Il en résulte que la chambre de recours a exposé les motifs pour lesquels l’usage sérieux de la marque contestée pour la « propolis » et la « gelée royale » pour l’alimentation humaine, en tant que produits protégés dans la classe 30, n’avait pas été démontré selon elle. Ainsi qu’il ressort des points 61 à 69 ci-après, la requérante a été en mesure de contester cette conclusion de la chambre de recours et le Tribunal a pu exercer son contrôle de légalité. L’article 94, paragraphe 1, première phrase, du règlement 2017/1001 n’a donc pas été méconnu.

22      En outre, ayant été en mesure d’apporter des preuves de l’usage sérieux de la marque contestée pour les produits pour lesquels celle-ci a été enregistrée et de répondre aux arguments de l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours, il ne saurait être retenu que la requérante n’a pas eu l’occasion de s’exprimer sur ce point. La circonstance qu’elle ne souscrit pas à l’appréciation des preuves de la chambre de recours concerne l’examen au fond de l’affaire. La chambre de recours n’a donc pas non plus violé l’article 94, paragraphe 1, deuxième phrase, du règlement 2017/1001.

23      Il y a lieu de rejeter le premier moyen.

 Sur le second moyen, tiré  de la violation de l’article 58, paragraphe 1, sous a), et paragraphe 2, du règlement 2017/1001  

24      Le second moyen s’articule en trois branches, portant sur l’usage sérieux de la marque contestée pour, premièrement, les « onguents avec ajout de miel, à des fins médicales », deuxièmement la « pâtisserie » à l’exception des « biscuits » et, troisièmement, la « propolis pour l’alimentation humaine » et la « gelée royale pour l’alimentation humaine ».

25      Il y a lieu de rappeler que, aux termes de l’article 58, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001, le titulaire d’une marque de l’Union européenne est déclaré déchu de ses droits, sur demande présentée auprès de l’EUIPO ou sur demande reconventionnelle dans une action en contrefaçon, si, pendant une période ininterrompue de cinq ans, la marque n’a pas fait l’objet d’un usage sérieux dans l’Union européenne pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée et s’il n’existe pas de justes motifs pour le non-usage.

26      Une marque fait l’objet d’un usage sérieux lorsqu’elle est utilisée, conformément à sa fonction essentielle qui est de garantir l’identité d’origine des produits ou des services pour lesquels elle a été enregistrée, aux fins de créer ou de conserver un débouché pour ces produits et services, à l’exclusion d’usages de caractère symbolique ayant pour seul objet le maintien des droits conférés par la marque (voir, par analogie, arrêt du 11 mars 2003, Ansul, C‑40/01, EU:C:2003:145, point 43).

27      L’appréciation du caractère sérieux de l’usage de la marque doit reposer sur l’ensemble des faits et des circonstances propres à établir la réalité de l’exploitation commerciale de celle-ci, en particulier les usages considérés comme justifiés dans le secteur économique concerné pour maintenir ou créer des parts de marché au profit des produits ou des services protégés par la marque, la nature de ces produits ou de ces services, les caractéristiques du marché, l’étendue et la fréquence de l’usage de la marque [arrêt du 8 juillet 2004, Sunrider/OHMI – Espadafor (VITAFRUIT), T‑203/02, EU:T:2004:225, point 40 ; voir également, par analogie, arrêt du 11 mars 2003, Ansul, C‑40/01, EU:C:2003:145, point 43].

28      Quant à l’importance de l’usage qui a été fait de la marque antérieure, il convient de tenir compte, notamment, du volume commercial de l’ensemble des actes d’usage, d’une part, et de la durée de la période pendant laquelle des actes d’usage ont été accomplis ainsi que de la fréquence de ces actes, d’autre part [arrêts du 8 juillet 2004, MFE Marienfelde/OHMI – Vétoquinol (HIPOVITON), T‑334/01, EU:T:2004:223, point 35, et du 8 juillet 2004, VITAFRUIT, T‑203/02, EU:T:2004:225, point 41].

29      En vertu de l’article 10, paragraphes 3 et 4, du règlement délégué (UE) 2018/625 de la Commission, du 5 mars 2018, complétant le règlement 2017/1001, et abrogeant le règlement délégué (UE) 2017/1430 (JO 2018, L 104, p. 1), la preuve de l’usage d’une marque doit porter sur le lieu, la durée, l’importance et la nature de l’usage qui a été fait de la marque et se limite, en principe, à la production de pièces justificatives, comme des emballages, des étiquettes, des barèmes de prix, des catalogues, des factures, des photographies, des annonces dans les journaux, ainsi qu’aux déclarations écrites visées à l’article 97, paragraphe 1, sous f), du règlement 2017/1001 [voir, en ce sens, arrêts du 8 juillet 2004, VITAFRUIT, T‑203/02, EU:T:2004:225, point 37, et du 10 septembre 2008, Boston Scientific/OHMI – Terumo (CAPIO), T‑325/06, non publié, EU:T:2008:338, point 27].

30      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner si la chambre de recours a conclu, à juste titre, à l’absence d’usage sérieux de la marque contestée pour les produits en cause pendant la période pertinente.

 Sur la première branche, tirée de l’usage sérieux de la marque contestée pour les « onguents avec ajout de miel, à des fins médicales »

31      La requérante soutient qu’elle a prouvé, à suffisance de droit, l’usage sérieux de la marque contestée pour les produits « onguents avec ajout de miel, à des fins médicales » compris dans la classe 5. Elle précise que l’usage sérieux de la marque contestée pour un baume à lèvres de la gamme elanosol, contenant du miel, a été prouvé. Premièrement, la requérante indique que ce baume à lèvres comporte, outre du miel, également du propolis, ingrédient dont l’usage médical a été confirmé par la chambre de recours au point 96 de la décision attaquée, et que de ce fait, ledit baume est destiné à la fois à un usage médical et cosmétique, ainsi que le confirme, selon elle, la présence d’autres ingrédients relevant de la classe 5. Deuxièmement, la requérante avance que les mots « onguent » et « baume » sont des synonymes. Troisièmement, elle met en relief la vente de son produit elanosol sos, un baume pour lèvres gercées ou abîmées, qui a de ce fait, selon elle, une finalité médicale, pour en conclure que le baume à lèvres elanosol est un « onguent avec ajout de miel à usage médical ».

32      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

33      La chambre de recours a considéré au point 85 de la décision attaquée, que le dossier ne comportait pas d’éléments de preuve pour ce qui concerne l’usage sérieux de la marque contestée pour les « onguents avec des compléments de miel à usage médical » relevant de la classe 5.

34      Il convient de constater que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur d’appréciation en concluant ainsi et que les arguments avancés par la requérante ne sont pas de nature à altérer cette conclusion.

35      La requérante soutient, en substance, que les baumes à lèvres elanosol peuvent être qualifiés d’« onguents avec des compléments de miel à usage médical » relevant de la classe 5.

36      À cet égard, il importe de relever que la requérante ne conteste pas la constatation de la chambre de recours selon laquelle les baumes à lèvres de la gamme elanosol relèvent de la classe 3, compte tenu de leur usage en tant que produits cosmétiques, visant plus particulièrement à hydrater, nourrir et protéger la peau. Pourtant, la requérante, soutient que ces baumes, qui sont selon elle équivalents aux onguents, appartiennent également et concomitamment à la classe 5, eu égard à leurs caractéristiques également médicamenteuses.

37      Toutefois, le principe est celui du classement d’un produit dans une seule classe selon sa fonction ou sa destination, alors que la situation particulière est celle du produit à usages multiples, ce dernier, par exception au principe précité, pouvant être classé dans plusieurs classes en considération de ses différentes fonctions ou destinations [arrêt du 10 novembre 2021, Monster Energy/EUIPO – Frito-Lay Trading Company (MONSTER et MONSTER ENERGY), T‑758/20 et T‑759/20, non publié, EU:T:2021:776, point 38].

38      Par ailleurs, il a déjà été jugé qu’il n’est pas suffisant qu’un produit ait des propriétés bénéfiques pour la santé en général pour être qualifié de « médicament », mais il doit à proprement parler avoir pour fonction de prévenir ou de guérir (arrêt du 15 novembre 2007, Commission/Allemagne, C‑319/05, EU:C:2007:678, point 64). Les produits médicamenteux sont en effet, par nature, destinés à être utilisés à des fins exclusivement médicales, à l’exclusion de produits qui peuvent être utilisés de manière indépendante à tout traitement médical, quand bien même ils peuvent être destinés à améliorer l’état de santé du consommateur et, dès lors, répondre à une finalité curative [voir, en ce sens, arrêt du 5 octobre 2020, SBS Bilimsel Bio Çözümler/EUIPO – Laboratorios Ern (apiheal), T‑53/19, non publié, EU:T:2020:469, points 52 et 62 et jurisprudence citée].

39      Il en découle que, contrairement à ce que la requérante soutient en substance, un produit cosmétique, relevant de la classe 3, destiné à être utilisé sur des lèvres, en vue de les protéger ou de les maintenir en bon état, ne peut pas être considéré également comme un produit médicamenteux, relevant de la classe 5, destiné à être utilisé à des fins exclusivement médicales.

40      De surcroît, force est de relever, à l’instar de l’EUIPO, que la requérante n’a pas démontré que les baumes à lèvres de la gamme elanosol, y compris le baume à lèvres elanosol sos, destiné à être utilisé notamment sur des lèvres gercées ou abîmées, avaient un usage médical au sens de la jurisprudence citée au point 38 ci-dessus. Les preuves de l’usage sérieux de la marque contestée pour lesdits baumes à lèvres figurent notamment à l’annexe 4 produite par la requérante devant la division d’annulation. Cet élément de preuve comporte des images des baumes à lèvres elanosol, assorties d’un texte court indiquant, notamment, que ces baumes comportent du miel et de la cire d’abeilles qui nourrissent, hydratent et protègent les lèvres contre le froid et les rayons ultraviolets A et B. En outre, la requérante, elle-même, qualifie le baume à lèvres elanosol de cosmétique dans ses observations du 9 septembre 2020 devant la division d’annulation. La requérante a présenté, dans ces mêmes observations, le baume à lèvres comme un produit relevant de la classe 3. Les éléments de preuve apportés par la requérante et sa propre qualification desdits baumes ne comportent donc aucun indice qui démontre que les baumes à lèvres elanosol ou l’un d’eux sont destinés à être utilisés à des fins exclusivement médicales.

41      Le fait que ces baumes comportent des ingrédients qui peuvent être contenus également dans des produits relevant de la classe 5, ainsi que l’a fait valoir la requérante, ne suffit pas davantage à démontrer leur appartenance à cette classe. En effet, ainsi qu’il résulte notamment des preuves évoquées au point 40 ci-dessus, les baumes à lèvres commercialisés par la requérante sous la marque contestée sont avant tout destinés à être mis en contact avec les parties superficielles du corps humain en vue de les entretenir et de les embellir, ce qui est caractéristique des produits cosmétiques [voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2015, Australian Gold/OHMI – Effect Management & Holding (HOT), T‑611/13, EU:T:2015:492, point 46]. En revanche, ainsi qu’il résulte également du point 38 ci-dessus, les produits à usage médical relevant de la classe 5 sont en général destinés exclusivement à la prévention ou au traitement des problèmes médicaux, par exemple de la peau, ou aux soins de santé.

42      L’argument de la requérante selon lequel les mots « baume » et « onguent » sont des synonymes n’est pas de nature à mettre en cause ce qui précède.

43      La chambre de recours n’a donc pas commis d’erreur d’appréciation en considérant que l’usage de la marque contestée pour les « onguents avec ajout de miel, à des fins médicales » n’avait pas été prouvé à suffisance de droit.

44      Il s’ensuit que la présente branche du second moyen doit être rejetée.

 Sur la deuxième branche, tirée de l’usage sérieux de la marque contestée pour la « pâtisserie », à l’exception des « biscuits » de la classe 30

45      La requérante soutient, en substance, qu’elle a prouvé l’usage sérieux de la marque contestée pour les « biscuits » et que, de ce fait, elle a également prouvé l’usage sérieux par rapport à la catégorie plus large de la « pâtisserie » relevant de la classe 30.

46      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

47      La chambre de recours a considéré, au point 90 de la décision attaquée que, en ce qui concerne la « pâtisserie », le seul produit de cette catégorie qui a été identifié dans les éléments de preuve était les « biscuits ». Elle a précisé, au point 93 de ladite décision, qu’il existait de nombreux types de pâtisserie fabriqués en général à partir de farine, de sucre, de lait, de beurre, de poudre pour faire lever et d’œufs, qui pouvaient tous avoir une autre finalité ou destination. En outre, selon la définition retenue par la chambre de recours, la « pâtisserie » peut être sucrée ou salée. Les « biscuits » sont en général consommés en tant qu’en-cas à tout moment de la journée, souvent accompagnés d’une boisson chaude, tandis que d’autres types de « pâtisserie » peuvent être servis comme un repas ou un dessert. Ainsi, les « biscuits » constituent, selon la chambre de recours, une sous-catégorie bien délimitée des produits de « pâtisserie ».

48      Force est de constater, d’emblée, à l’instar des parties, que l’usage sérieux de la marque contestée a été prouvé pour le seul produit « biscuits », mais non pour les autres produits compris dans la catégorie « pâtisserie ». La requérante s’oppose pourtant à la conclusion de la chambre de recours selon laquelle les « biscuits » constituent une sous-catégorie autonome de la catégorie plus large de la « pâtisserie », de sorte que l’usage sérieux de la marque contestée pour les « biscuits » ne suffit pas pour établir l’usage sérieux de celle-ci par rapport à la « pâtisserie ».

49      À cet égard, il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence, en ce qui concerne des produits ou des services rassemblés au sein d’une catégorie large, susceptible d’être subdivisée en plusieurs sous-catégories autonomes, il est nécessaire d’exiger du titulaire de la marque d’apporter la preuve de l’usage sérieux de cette marque pour chacune de ces sous-catégories autonomes (voir, en ce sens, arrêt du 16 juillet 2020, ACTC/EUIPO, C‑714/18 P, EU:C:2020:573, point 43).

50      Le critère de finalité ou de destination est un critère primordial dans la définition d’une sous-catégorie de produits ou de services [arrêts du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, EU:T:2007:46, point 29, et du 30 janvier 2015, Now Wireless/OHMI – Starbucks (HK) (now), T‑278/13, non publié, EU:T:2015:57, point 27].

51      Dans ces conditions, et eu égard aux éléments de preuve apportés par la requérante, la chambre de recours a pu considérer à bon droit que l’usage sérieux de la marque contestée avait été prouvé pour les produits « biscuits » en tant que sous-catégorie de produits autonome appartenant à la catégorie plus large de la « pâtisserie », au motif que la destination et la finalité des « biscuits » pouvaient différer de celles d’autres types de « pâtisserie ».

52      Les arguments de la requérante ne sont pas de nature à remettre en cause la conclusion de la chambre de recours.

53      Premièrement, l’argument selon lequel les « biscuits » sont indissociablement liés aux autres produits contenus dans la catégorie de la « pâtisserie », puisqu’ils sont concurrents, ont les mêmes canaux de distribution et sont élaborés à partir des mêmes ingrédients, ne saurait être retenu. Le Tribunal a déjà jugé, à cet égard, que les catégories telles que celles de la « pâtisserie », des « gâteaux » ou des « biscuits » étaient distinctes malgré leur fabrication à partir d’ingrédients similaires ou identiques [voir, en ce sens, arrêt du 1er septembre 2021, Bimbo Donuts Iberia/EUIPO – Hijos de Antonio Juan (DONAS DULCESOL), T‑697/20, non publié, EU:T:2021:526, point 40].

54      Certes, les facteurs énumérés par la requérante, à savoir la nature, le caractère concurrent ou encore les canaux de distribution des « biscuits » et des autres types de « pâtisserie » sont pertinents pour apprécier la similitude de produits dans le cadre de l’examen de l’existence d’un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 [voir, en ce sens, arrêt du 15 décembre 2010, Novartis/OHMI – Sanochemia Pharmazeutika (TOLPOSAN), T‑331/09, EU:T:2010:520, point 30 et jurisprudence citée], mais tel n’est pas le cas en l’espèce.

55      Deuxièmement, ainsi que le soutient la requérante, s’agissant de la finalité des produits, les « biscuits » peuvent également être consommés en tant que dessert. Cependant, il convient de considérer que la chambre de recours a considéré à juste titre, au point 93 de la décision attaquée, que les « biscuits » sont, en général, consommés en tant qu’en-cas à tout moment de la journée, et souvent servis avec des boissons telles que du lait, du café ou du thé, contrairement à d’autres types de produits de « pâtisserie » qui peuvent être servis comme un repas en soi ou principalement comme des desserts après un repas.

56      Troisièmement, la requérante avance qu’il existe une entrée spécifique dans la base de données harmonisée de l’EUIPO (Harmonised Database) pour indiquer le produit « pâtisseries » (pastries) et que la chambre de recours ne pouvait pas diviser les produits en sous-catégories s’il existait une entrée séparée dans ladite base de données. Il y a lieu d’observer à cet égard que, selon le site Internet de l’EUIPO, dont des captures d’écran ont été présentées par la requérante dans son annexe C.11 à la requête, cette base de données « contient plus de 70 000 termes à partir desquels [les] utilisateurs peuvent sélectionner les produits et services pour lesquels ils sollicitent une protection dans leurs demandes de marques ». Il convient de relever qu’il s’agit là d’un instrument de nature purement pratique et administrative proposant des noms de produits déjà acceptés par les autorités compétentes des États membres permettant d’accélérer la procédure de demande d’enregistrement d’une marque. Cet instrument est dépourvu de pertinence quant à la question de savoir si le produit « biscuits » constitue une sous-catégorie de la catégorie « pâtisserie », au sens de la jurisprudence citée au point 49 ci-dessus.

57      Partant, il y a lieu de rejeter la deuxième branche du second moyen.

  Sur la troisième branche, tirée de l’usage sérieux de la marque contestée pour la « propolis pour l’alimentation humaine » ainsi que pour la « gelée royale pour l’alimentation humaine »

58      La requérante soutient que la chambre de recours a commis une erreur d’appréciation en considérant que l’usage sérieux de la marque contestée n’avait pas été établi à suffisance de droit pour la « propolis pour l’alimentation humaine » ainsi que pour la « gelée royale pour l’alimentation humaine » relevant, toutes les deux, de la classe 30. Elle estime que ses produits comestibles contenant de la propolis et de la gelée royale peuvent relever de la classe 5 ou de la classe 30, lorsqu’ils n’ont pas de finalité médicale.

59      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

60      La chambre de recours a considéré, aux points 94 et 95 de la décision attaquée, que la « propolis pour l’alimentation humaine (produit d’apiculture) » et la « gelée royale pour l’alimentation humaine » sont protégées tant dans la classe 5 que dans la classe 30. Selon elle, la propolis et la gelée royale, qu’elles soient protégées dans les classes 5 ou 30, sont à l’évidence destinées à la consommation humaine, la seule différence étant que la propolis et la gelée royale comprises dans la classe 30 n’ont pas de finalité médicale spécifique. Elle a estimé qu’il n’existait aucune preuve de l’usage sérieux de la marque contestée pour la « propolis » et la « gelée royale » en tant que produits alimentaires purs, dès lors que les éléments de preuve produits concernaient exclusivement la propolis ou la gelée royale incluant également des vitamines et d’autres ingrédients, ayant des propriétés médicales ou sanitaires, disponibles sous forme de pastilles, gouttes, sprays, gélules ou ampoules qui, selon les propres indications de la requérante, sont recommandées pour renforcer la santé ou traiter des problèmes médicaux.

61      Il convient de relever, d’emblée, que, selon les notes explicatives relatives à la classification de Nice, « [l]a classe 30 comprend essentiellement les denrées alimentaires d’origine végétale, à l’exception des fruits et légumes, préparées ou conservées pour la consommation ainsi que les adjuvants destinés à l’amélioration du goût des aliments ». Or, « [c]ette classe ne comprend pas notamment les compléments alimentaires ». Selon lesdites notes explicatives, la classe 5 « comprend essentiellement les produits pharmaceutiques et autres préparations à usage médical ou vétérinaire » et englobe, entre autres, « les compléments alimentaires en tant que compléments d’un régime alimentaire normal ou en tant qu’apports pour la santé ».

62      Force est de relever que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur d’appréciation en tirant la conclusion exposée au point 60 ci-dessus et que les arguments et les éléments de preuve apportés par la requérante ne suffisent pas à remettre en cause cette conclusion.

63      L’argument principal de la requérante selon lequel les produits qu’elle commercialise, pour lesquels l’usage sérieux de la marque contestée a été prouvé, comportaient de la propolis ou de la gelée royale et étaient en partie médicamenteux, une autre partie étant destinée à l’alimentation humaine, ne convainc pas. Certes, l’EUIPO admet que la propolis et la gelée royale peuvent en principe avoir des applications différentes et être utilisées à des fins médicales ou en tant qu’aliments purs. Toutefois, en fonction de leur destination, ces produits doivent relever soit dans la classe 5, lorsqu’ils sont destinés à être utilisés à des fins médicales ou en tant que compléments alimentaires, soit dans la classe 30, lorsqu’ils sont destinés à être utilisés en tant que denrées alimentaires.

64      Toutefois, la requérante n’a pas établi que ses produits comportant de la propolis ou de la gelée royale pouvaient être considérés comme des « denrées alimentaires » relevant de la classe 30 de la classification de Nice.

65      En effet, ce qui concerne la propolis, la requérante se borne à faire valoir que la « propolis en solution d’alcool, gouttes » (présentée à l’annexe C.3 à la requête) ne contient pas de vitamines ou d’autres ingrédients ayant des propriétés médicinales ou sanitaires, mais constitue simplement une bouteille contenant une solution de propolis dans de l’alcool avec un applicateur de gouttes. La chambre de recours a considéré, au point 81 de la décision attaquée, que lesdites gouttes comportaient de la « propolis à usage médical », relevant de la classe 5. C’est sous cet angle que la chambre de recours a examiné les éléments de preuve apportés par la requérante et a conclu que l’usage sérieux de la marque contestée avait été prouvé pour ce produit. La requérante semble contester cette conclusion en soutenant qu’elle n’a revendiqué aucune propriété médicale pour ledit produit, qui doit être considéré comme de la « propolis pour la consommation humaine », relevant de la classe 30.

66      Or, la propolis ne se consomme généralement pas pour sa saveur, particulièrement amère, et est avant tout utilisée en raison de ses propriétés curatives et cicatrisantes. Les produits contenant de la propolis peuvent en effet être utilisés comme anti-infectieux, compte tenu de leurs propriétés antibactériennes, antivirus et antifongiques, comme anti-inflammatoires et comme produits cicatrisant et assainissant les plaies dans le cadre d’un usage dermatologique [voir, en ce sens, arrêt du 5 octobre 2020, SBS Bilimsel Bio Çözümler/EUIPO – Laboratorios Ern (apiheal), T‑53/19, non publié, EU:T:2020:469, point 52].

67      Même à supposer, ainsi que l’affirme la requérante, que son produit « propolis en solution d’alcool, gouttes » ne contienne pas d’ingrédient doté de propriétés médicinales, celui-ci ne saurait être considéré comme un produit destiné à l’alimentation, eu égard aux considérations figurant au point 61 ci-dessus. En effet, dans la mesure où la requérante qualifie elle-même ce produit (produit de propolis n’étant pas à l’état pur, mais issu d’une procédure de transformation) de complément alimentaire (« food supplement » – voir annexe C.3 à la requête), il constitue plutôt un « complément alimentaire » relevant de la classe 5, qu’un aliment relevant de la classe 30. De surcroît, la requérante recommande la propolis (voir annexe A.10 produite devant la division d’annulation de l’EUIPO) pour prévenir et guérir des inflammations des muqueuses buccales et des gencives et pour traiter des infections de la gorge.

68      S’agissant de la gelée royale, la requérante indique que la gelée royale bébé  et la gelée royale fraîche dans son état pur sont des produits alimentaires, commercialisés sous des formes non médicamenteuses. Or, la requérante confirme la constatation de la chambre de recours selon laquelle ces produits sont recommandés pour renforcer le système immunitaire et les qualifie elle-même de compléments alimentaires (voir annexe C.3 à la requête), ce qui implique qu’il s’agit plutôt de produits relevant de la classe 5, que des aliments relevant de la classe 30 (voir point 61 ci-dessus). En fait, la requérante accepte que les propriétés et fonctions de ces produits peuvent avoir pour effet de les placer dans la classe 5 (voir point 83 de la requête).

69      Dans la mesure où la requérante argue que lesdits produits peuvent relever, à la fois, des classes 5 et 30, il convient de relever que, comme indiqué au point 37 ci-dessus, le principe est celui du classement d’un produit dans une seule classe. Or, la requérante n’est pas parvenue à établir une exception à cette règle, par rapport aux produits en cause, eu égard à leurs usages multiples et caractéristiques particulières.

70      Par conséquent, il n’a pas été établi que la chambre de recours a commis une erreur d’appréciation en considérant qu’il n’existait aucune preuve de l’usage de la marque de l’Union européenne contestée pour les produits « propolis pour l’alimentation humaine » et « gelée royale pour l’alimentation humaine », relevant de la classe 30.

71      Il résulte de ce qui précède que la troisième branche du second moyen n’est pas fondée et que, partant, il y a lieu de rejeter le second moyen dans son intégralité.

72      Il résulte de tout ce qui précède qu’il y a lieu de rejeter le recours.

 Sur les dépens

73      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Bien que la requérante ait succombé, l’EUIPO n’a conclu à la condamnation de celle-ci aux dépens qu’en cas d’une convocation à une audience. En l’absence d’organisation d’une audience, il convient de décider que chaque partie supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Chaque partie supportera ses propres dépens.

Kowalik-Bańczyk

Hesse

Dimitrakopoulos

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 7 juin 2023.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.