Language of document : ECLI:EU:C:2020:699

CONCLUSIONS DE L’AVOCATE GÉNÉRALE

MME JULIANE KOKOTT

présentées le 10 septembre 2020 (1)

Affaires jointes C473/19 et C474/19

Föreningen Skydda Skogen e.a.

contre

Länsstyrelsen i Västra Götalands län

[demande de décision préjudicielle formée par le Vänersborgs tingsrätt, mark- och miljödomstolen (chambre des affaires agricoles et environnementales du tribunal de première instance de Vänersborg, Suède)]

« Renvoi préjudiciel – Directive 2009/147/CE – Conservation des oiseaux sauvages – Directive 92/43/CEE – Conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages – Interdictions aux fins de la conservation des espèces protégées – Déboisement – État de conservation des espèces – Intention »






Table des matières


I. Introduction

II. Le cadre juridique

A. La convention de Berne

B. Le droit de l’Union

1. La directive « habitats »

2. La directive « oiseaux »

3. La directive sur la responsabilité environnementale

C. Le droit suédois

III. Les faits et la demande de décision préjudicielle

IV. Appréciation juridique

A. Espèces protégées par l’article 5 de la directive « oiseaux » (première question)

B. Sites de reproduction (quatrième et cinquième questions)

C. Les interdictions d’atteintes intentionnelles (deuxième question)

1. Sur les interdictions de tuer et de détruire

a) La directive « habitats »

b) La directive « oiseaux »

– aa) État de conservation de l’espèce

– bb) « Intention » au sens de la directive « oiseaux »

c) Conclusion intermédiaire

2. Sur les interdictions de perturber

a) La directive « oiseaux »

b) La directive « habitats »

D. Le niveau auquel doit être effectuée l’appréciation de l’état de conservation (troisième question)

V. Conclusion



I.      Introduction

1.        Les directives « habitats » (2) et « oiseaux » (3) contiennent des dispositions relatives aux sites protégés, mais requièrent également la protection de certaines espèces animales et végétales, y compris en dehors de zones protégées (4). Les régimes de protection permettent des dérogations dans des conditions d’interprétation stricte.

2.        La présente affaire confronte la Cour à des interrogations sur la protection des espèces, qui lui ont déjà été soumises sous une forme similaire, dans le contexte de la protection des sites. À cet égard, il avait été tenté, dans une large mesure sans succès, de recourir à des mesures visant à compenser les atteintes auxdits sites pour écarter l’application de la disposition protectrice. Or, de telles mesures compensatoires font partie des conditions d’une dérogation, laquelle est, en outre, subordonnée à une mise en balance et à un examen des solutions alternatives (5).

3.        En l’espèce, il s’agit, à présent, de savoir si l’application des interdictions en matière de protection des espèces peut être subordonnée à la condition que la mesure en cause affecte l’état de conservation de l’espèce concernée. Or, à tout le moins dans la directive « habitats », une dérogation est subordonnée expressément à un bon état de conservation. En outre, dans cette directive, les dérogations sont subordonnées à certains motifs et à un examen des solutions alternatives. En matière de protection des oiseaux, la situation est similaire.

4.        Toutefois, il convient en même temps de reconnaître que la protection des espèces, telle qu’interprétée par la Cour, peut nécessiter des restrictions à l’activité humaine très étendues. Il existe donc un intérêt légitime à éviter des restrictions disproportionnées.

5.        C’est pourquoi la présente affaire fournit une excellente occasion d’examiner davantage cette divergence d’intérêts.

II.    Le cadre juridique

A.      La convention de Berne

6.        L’article 6 de la convention de Berne (6) édicte des interdictions fondamentales en matière de protection des espèces :

« Chaque partie contractante prend les mesures législatives et réglementaires appropriées et nécessaires pour assurer la conservation particulière des espèces de faune sauvage énumérées à l’annexe II. Seront notamment interdits, pour ces espèces :

a)      toutes formes de capture intentionnelle, de détention et de mise à mort intentionnelle ;

b)      la détérioration ou la destruction intentionnelles des sites de reproduction ou des aires de repos ;

c)      la perturbation intentionnelle de la faune sauvage, notamment durant la période de reproduction, de dépendance et d’hibernation, pour autant que la perturbation ait un effet significatif eu égard aux objectifs de la présente convention ;

d)      la destruction ou le ramassage intentionnels des œufs dans la nature ou leur détention, même vides ;

e)      la détention et le commerce interne de ces animaux, vivants ou morts, y compris des animaux naturalisés et de toute partie ou de tout produit, facilement identifiables, obtenus à partir de l’animal, lorsque cette mesure contribue à l’efficacité des dispositions du présent article. »

7.        Des exceptions sont prévues à l’article 9, paragraphe 1, de ladite convention :

« À condition qu’il n’existe pas une autre solution satisfaisante et que la dérogation ne nuise pas à la survie de la population concernée, chaque partie contractante peut déroger aux dispositions des articles 4, 5, 6, 7 et à l’interdiction d’utilisation des moyens visés à l’article 8 :

–        dans l’intérêt de la protection de la flore et de la faune ;

–        pour prévenir des dommages importants aux cultures, au bétail, aux forêts, aux pêcheries, aux eaux et autres formes de propriété ;

–        dans l’intérêt de la santé et de la sécurité publiques, de la sécurité aérienne ou d’autres intérêts publics prioritaires ;

–        à des fins de recherche et d’éducation, de repeuplement, de réinstallation ainsi que pour l’élevage ;

–        pour permettre, dans des conditions strictement contrôlées, sur une base sélective et dans une certaine mesure de prise, la détention pour toute autre exploitation judicieuse de certains animaux et plantes sauvages en petites quantités. »

B.      Le droit de l’Union

1.      La directive « habitats »

8.        Aux termes de l’article 1er, sous i), de la directive « habitats », l’état de conservation d’une espèce décrit « l’ensemble des influences qui [...] peuvent affecter à long terme la répartition et l’importance [des] populations [des espèces concernées sur le site] visé à l’article 2.

L’état de conservation sera considéré comme “favorable”, lorsque :

–        les données relatives à la dynamique de la population de l’espèce en question indiquent que cette espèce continue et est susceptible de continuer à long terme à constituer un élément viable des habitats naturels auxquels elle appartient et

–        l’aire de répartition naturelle de l’espèce ne diminue ni ne risque de diminuer dans un avenir prévisible, et

–        il existe et il continuera probablement d’exister un habitat suffisamment étendu pour que ses populations se maintiennent à long terme. »

9.        Aux termes de l’article 1er, sous m), de cette directive, on entend par « spécimen » « tout animal ou plante, vivant ou mort, des espèces figurant à l’annexe IV et à l’annexe V, toute partie ou tout produit obtenu à partir de ceux‑ci ainsi que toute autre marchandise dans le cas où il ressort du document justificatif, de l’emballage ou d’une étiquette ou de toutes autres circonstances qu’il s’agit de parties ou de produits d’animaux ou de plantes de ces espèces ».

10.      L’article 2 de ladite directive énonce les objectifs de celle‑ci :

« 1.      La présente directive a pour objet de contribuer à assurer la biodiversité par la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages sur le territoire européen des États membres où le traité s’applique.

2.      Les mesures prises en vertu de la présente directive visent à assurer le maintien ou le rétablissement, dans un état de conservation favorable, des habitats naturels et des espèces de faune et de flore sauvages d’intérêt communautaire.

3.      Les mesures prises en vertu de la présente directive tiennent compte des exigences économiques, sociales et culturelles, ainsi que des particularités régionales et locales. »

11.      L’article 12 de la même directive établit les obligations fondamentales applicables à la protection des espèces :

« 1.      Les États membres prennent les mesures nécessaires pour instaurer un système de protection stricte des espèces animales figurant à l’annexe IV, point a), dans leur aire de répartition naturelle, interdisant :

a)      toute forme de capture ou de mise à mort intentionnelle de spécimens de ces espèces dans la nature ;

b)      la perturbation intentionnelle de ces espèces notamment durant la période de reproduction, de dépendance, d’hibernation et de migration ;

c)      la destruction ou le ramassage intentionnels des œufs dans la nature ;

d)      la détérioration ou la destruction des sites de reproduction ou des aires de repos.

2.      Pour ces espèces, les États membres interdisent la détention, le transport, le commerce ou l’échange et l’offre aux fins de vente ou d’échange de spécimens prélevés dans la nature, à l’exception de ceux qui auraient été prélevés légalement avant la mise en application de la présente directive.

[...] »

12.      L’article 16, paragraphe 1, de la directive « habitats » prévoit des dérogations à l’article 12 de cette directive :

« À condition qu’il n’existe pas une autre solution satisfaisante et que la dérogation ne nuise pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle, les États membres peuvent déroger aux dispositions des articles 12, 13, 14 et de l’article 15 points a) et b) :

a)      dans l’intérêt de la protection de la faune et de la flore sauvages et de la conservation des habitats naturels ;

b)      pour prévenir des dommages importants notamment aux cultures, à l’élevage, aux forêts, aux pêcheries, aux eaux et à d’autres formes de propriété ;

c)      dans l’intérêt de la santé et de la sécurité publiques, ou pour d’autres raisons impératives d’intérêt public majeur, y compris de nature sociale ou économique, et pour des motifs qui comporteraient des conséquences bénéfiques primordiales pour l’environnement ;

d)      à des fins de recherche et d’éducation, de repeuplement et de réintroduction de ces espèces et pour des opérations de reproduction nécessaires à ces fins, y compris la propagation artificielle des plantes ;

e)      pour permettre, dans des conditions strictement contrôlées, de manière sélective et dans une mesure limitée, la prise ou la détention d’un nombre limité et spécifié par les autorités nationales compétentes de certains spécimens des espèces figurant à l’annexe IV. »

13.      L’annexe IV, sous a), de cette directive mentionne, notamment, la grenouille des champs (Rana arvalis) comme une espèce animale d’intérêt communautaire qui doit être strictement protégée.

2.      La directive « oiseaux »

14.      Le considérant 10 de la directive « oiseaux » requiert, notamment, que certaines espèces d’oiseaux soient maintenues à un « niveau satisfaisant » :

« En raison de leur niveau de population, de leur distribution géographique et de leur taux de reproduction dans l’ensemble de la Communauté, certaines espèces peuvent faire l’objet d’actes de chasse, ce qui constitue une exploitation admissible, pour autant que certaines limites soient établies et respectées, ces actes de chasse devant être compatibles avec le maintien de la population de ces espèces à un niveau satisfaisant. ».

15.      L’article 1er de cette directive en définit le champ d’application :

« 1.      La présente directive concerne la conservation de toutes les espèces d’oiseaux vivant naturellement à l’état sauvage sur le territoire européen des États membres auquel le traité est d’application. Elle a pour objet la protection, la gestion et la régulation de ces espèces et en réglemente l’exploitation.

[...] »

16.      L’article 2 de ladite directive énonce l’obligation fondamentale des États membres en ce qui concerne la conservation des espèces d’oiseaux :

« Les États membres prennent toutes les mesures nécessaires pour maintenir ou adapter la population de toutes les espèces d’oiseaux visées à l’article 1er à un niveau qui corresponde notamment aux exigences écologiques, scientifiques et culturelles, compte tenu des exigences économiques et récréationnelles. »

17.      Pour certaines espèces figurant à l’annexe I de la directive « oiseaux » ainsi que pour les oiseaux migrateurs, l’article 4 de cette directive prévoit la création de zones de protection spéciale. Parmi les espèces figurant à l’annexe I, la juridiction de renvoi indique que le grand tétras (Tetrao urogallus) est concerné. Il convient peut-être de considérer les populations suédoises de pic épeichette (Dryobates minor) et de roitelet huppé (Regulus regulus) comme des oiseaux migrateurs.

18.      L’article 5 de la directive « oiseaux » énonce des interdictions :

« Sans préjudice des articles 7 et 9, les États membres prennent les mesures nécessaires pour instaurer un régime général de protection de toutes les espèces d’oiseaux visées à l’article 1er et comportant notamment l’interdiction :

a)      de les tuer ou de les capturer intentionnellement, quelle que soit la méthode employée ;

b)      de détruire ou d’endommager intentionnellement leurs nids et leurs œufs et d’enlever leurs nids ;

c)      de ramasser leurs œufs dans la nature et de les détenir, même vides ;

d)      de les perturber intentionnellement, notamment durant la période de reproduction et de dépendance, pour autant que la perturbation ait un effet significatif eu égard aux objectifs de la présente directive ;

[...] »

19.      L’article 9, paragraphe 1, de cette directive autorise des dérogations aux interdictions énoncées à l’article 5 de cette directive :

« 1.      Les États membres peuvent déroger aux articles 5 à 8 s’il n’existe pas d’autre solution satisfaisante, pour les motifs ci‑après :

a)      —      dans l’intérêt de la santé et de la sécurité publiques,

—      dans l’intérêt de la sécurité aérienne,

—      pour prévenir les dommages importants aux cultures, au bétail, aux forêts, aux pêcheries et aux eaux,

—      pour la protection de la flore et de la faune ;

b)      pour des fins de recherche et d’enseignement, de repeuplement, de réintroduction ainsi que pour l’élevage se rapportant à ces actions ;

c)      pour permettre, dans des conditions strictement contrôlées et de manière sélective, la capture, la détention ou toute autre exploitation judicieuse de certains oiseaux en petites quantités. »

3.      La directive sur la responsabilité environnementale

20.      L’article 2, point 1, sous a), de la directive 2004/35/CE  (7) définit la notion de « dommage environnemental » par rapport aux espèces protégées :

« les dommages causés aux espèces et habitats naturels protégés, à savoir tout dommage qui affecte gravement la constitution ou le maintien d’un état de conservation favorable de tels habitats ou espèces ; l’importance des effets de ces dommages s’évalue par rapport à l’état initial, en tenant compte des critères qui figurent à l’annexe I.

[...] »

21.      Aux termes de l’article 5, paragraphe 1, de la directive sur la responsabilité environnementale, les dommages environnementaux doivent être évités :

« Lorsqu’un dommage environnemental n’est pas encore survenu, mais qu’il existe une menace imminente qu’un tel dommage survienne, l’exploitant prend sans retard les mesures préventives nécessaires. »

C.      Le droit suédois

22.      L’article 4 de l’Artskyddsförordningen (2007:845) (décret sur la protection des espèces) transpose les interdictions prévues à l’article 12 de la directive « habitats » et à l’article 5 de la directive « oiseaux » :

« Sont interdits en ce qui concerne les oiseaux sauvages, ainsi que les espèces animales sauvages marquées du signe “N” ou “n” dans l’annexe 1 au présent décret :

1.      la capture ou mise à mort intentionnelle d’animaux ;

2.      la perturbation intentionnelle d’animaux, notamment durant la période de reproduction, de dépendance, d’hibernation et de migration de ceux‑ci ;

3.      la destruction ou le ramassage intentionnels des œufs dans la nature, et

4.      la détérioration ou la destruction des sites de reproduction ou des sites de repos des animaux.

Les interdictions s’appliquent à tous les stades de la vie des animaux.

Le premier alinéa n’est pas applicable en ce qui concerne la chasse aux oiseaux et aux mammifères. Celle-ci se voit appliquer les dispositions d’un contenu analogue de la loi no 259 de 1987 sur la chasse, et du décret no 905 de 1987 sur la chasse. Le premier alinéa n’est pas davantage applicable en ce qui concerne la pêche. Celle‑ci se voit appliquer les dispositions d’un contenu analogue du décret no 1716 de 1994 relatif aux activités de pêche et d’aquaculture, ainsi qu’au secteur de la pêche. »

23.      L’annexe 1 du décret sur la protection des espèces contient la liste de toutes les espèces figurant aux annexes I à III de la directive « oiseaux » et aux annexes II, IV et V de la directive « habitats ». C’est pourquoi, parmi les espèces mentionnées en l’espèce, le grand tétras (Tetrao urogallus) et la grenouille des champs (Rana arvalis) y figurent.

24.      Dans cette annexe du règlement sur la protection des espèces, les espèces figurant à l’annexe IV de la directive « habitats », telles que la grenouille des champs (Rana arvalis), mentionnée en l’espèce, sont marquées par le signe « N ». Une espèce marquée par le signe « n » exige une protection stricte à la suite d’une évaluation nationale effectuée par la Suède ou en raison d’un engagement international. Une telle espèce ne figure pas à l’annexe IV de la directive « habitats ».

25.      Conformément à l’article 14 du décret sur la protection des espèces, l’administration provinciale peut, au cas par cas, autoriser une dérogation aux interdictions prévues à l’article 4 de ce décret.

III. Les faits et la demande de décision préjudicielle

26.      Dans les deux affaires, il s’agit d’une demande de déboisement auprès de l’administration des forêts d’une zone forestière située dans la commune suédoise de Härryda. Ces mesures conduisent à l’abattage de l’ensemble des arbres sur les différentes surfaces, à l’exception d’un nombre limité d’arbres devant être conservés conformément aux lignes directrices de l’administration des forêts.

27.      Dans la zone forestière, les espèces d’oiseaux suivantes ont leur habitat : le pic épeichette (Dryobates minor ou Dendrocopos minor), le grand tétras (Tetrao urogallus), la mésange boréale (Poecile montanus ou Parus montanus), le roitelet huppé (Regulus regulus) et la mésange noire (Periparus ater ou Parus ater). La grenouille des champs (Rana arvalis) peut également être trouvée dans l’environnement.

28.      Selon les rapports établis par la Suède dans le cadre des directives oiseaux (8) et habitats (9), l’état de conservation de la grenouille des champs est favorable dans cet État membre, et les populations de pics épeichettes, de grands tétras et mésanges noires sont stables. En revanche, les populations de roitelets huppés et de mésanges boréales déclinent modérément.

29.      Lesdites espèces utilisent très probablement le site pour leur reproduction. Les déboisements, selon le moment auquel ils interviennent dans le cycle de vie de chaque espèce, ont pour effet de perturber ou de tuer des spécimens de ces espèces. Les œufs se trouvant sur le site au moment du déboisement sont détruits.

30.      L’administration des forêts, en sa qualité d’autorité de tutelle, a adopté des lignes directrices spécifiques concernant les mesures de précaution à prendre et a estimé que le déboisement n’était pas contraire aux interdictions du décret sur la protection des espèces, si les lignes directrices étaient respectées. Les lignes directrices de l’administration des forêts concernant les mesures de précaution ne sont pas juridiquement contraignantes et ne constituent que des recommandations.

31.      Le 22 décembre 2016, Föreningen skydda Skogen (association de protection de la forêt) et Göteborgs Ornitologiska Förening (association ornithologique de Göteborg) ont demandé au Länsstyrelsen i Västra Götalands län (administration provinciale de Västra Götaland) qui est l’autorité de surveillance de la province conformément au décret sur la protection des espèces, d’intervenir concernant la déclaration de déboisement et les lignes directrices spécifiques de l’administration des forêts (affaire C‑473/19). Le 17 janvier 2018, Naturskyddsföreningen i Härryda (association de protection de la nature de Härryda) et l’association ornithologique de Göteborg ont adressé une autre demande à l’administration provinciale (affaire C‑474/19).

32.      Les associations considèrent que, nonobstant les lignes directrices de l’administration des forêts, le déboisement enfreint des interdictions prévues par le décret sur la protection des espères.

33.      L’administration provinciale estime qu’il n’est pas nécessaire de procéder à un examen exceptionnel au titre de ce décret. Cela implique que, de l’avis de l’administration provinciale, les mesures ne sont pas contraires aux interdictions édictées par le décret sur la protection des espèces, dès lors que les mesures de prévention prévues par les lignes directrices spécifiques sont prises.

34.      Les associations ont contesté devant la juridiction de renvoi la décision de l’administration provinciale de ne pas prendre de mesures de surveillance. À titre principal, elles demandent à la juridiction d’annuler la décision de l’administration provinciale et de juger que les mesures d’exploitation forestière envisagées ne sont pas autorisées au motif qu’elles violent des interdictions prévues par le décret sur la protection des espèces.

35.      Dans ces circonstances, le Vänersborgs tingsrätt, mark- och miljödomstolen (chambre des affaires agricoles et environnementales du tribunal de première instance de Vänersborg, Suède) a décidé de surseoir à statuer et d’adresser à la Cour, dans chacune des affaires C‑473/19 et C‑474/19, les questions suivantes :

« 1)      L’article 5 de la directive [“oiseaux”] doit-il être interprété en ce sens qu’il exclut une pratique nationale impliquant que l’interdiction ne concerne que les espèces qui sont énumérées à l’annexe I de la même directive, ou qui sont menacées à un certain niveau ou dont la population montre une tendance à baisser à long terme ?

2)      Les notions de “mise à mort/perturbation/destruction intentionnelle” utilisées à l’article 5, points a) à d), de la directive “oiseaux” et à l’article 12, paragraphe 1, sous a) à c), de la directive [“habitats”] doivent-elles être interprétées en ce sens qu’elles s’opposent à une pratique nationale impliquant que, lorsque l’objet d’une certaine activité est manifestement autre que la mise à mort ou la perturbation d’espèces (par exemple, activités d’exploitation forestière ou d’occupation des sols), l’activité doit, pour que l’interdiction opère, faire naître un risque d’incidence négative sur l’état de conservation des espèces ?

Les première et deuxième questions sont notamment fondées sur les considérations suivantes :

–      le fait que l’article 5 de la directive “oiseaux” concerne la protection de toutes les espèces d’oiseaux visées par son article 1er, paragraphe 1,

–      la manière dont la directive “habitats” définit la notion de “spécimen” en son article 1er, point m),

–      le fait que la question de l’état de conservation d’une espèce ne semble se poser qu’au niveau de la possibilité de dérogation prévue, respectivement, à l’article 16 de la directive “habitats” (les dérogations étant subordonnées à la condition qu’il n’existe pas une autre solution satisfaisante et qu’elles ne nuisent pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle) et à l’article 9 de la directive “oiseaux” (les dérogations ne pouvant pas être incompatibles avec ladite directive, dont l’article 2 impose aux États membres de prendre toutes les mesures nécessaires pour maintenir la population de toutes les espèces visées à l’article 1er à un niveau qui corresponde notamment aux exigences écologiques, scientifiques et culturelles).

3)      Si la deuxième question, en l’un quelconque de ses aspects, appelle comme réponse que la mise en œuvre de l’interdiction suppose l’appréciation de dommages à un niveau autre que celui des individus, l’appréciation doit-elle être effectuée à l’une des échelles suivantes ou à l’un des niveaux suivants :

a)      une certaine partie de la population, géographiquement circonscrite dans les limites, par exemple, du département, de l’État membre ou de l’Union européenne,

b)      la population locale concernée (isolée biologiquement d’autres populations de la même espèce),

c)      la métapopulation concernée, ou

d)      toute la population de l’espèce dans la région biogéographique concernée de l’aire de répartition de celle‑ci ?

4)      La notion de “détérioration/destruction” des sites de reproduction des animaux, telle qu’utilisée à l’article 12, paragraphe 1, sous d), de la directive “habitats”, doit-elle être interprétée en ce sens qu’elle s’oppose à une pratique nationale impliquant que, dans l’hypothèse où la permanence de la fonctionnalité écologique (PFE) dans l’habitat naturel de l’espèce concernée dans une zone particulière est, malgré les précautions prises, perdue par détérioration, destruction ou dégradation, que ce soit directement ou indirectement, par l’effet de l’activité en question considérée isolément ou cumulativement avec d’autres, l’interdiction n’opère qu’à partir du moment où l’état de conservation de l’espèce concernée risque de se dégrader à l’un quelconque des niveaux visés à la troisième question ?

5)      Si la quatrième question, en l’un quelconque de ses aspects, appelle une réponse négative, c’est‑à‑dire que la mise en œuvre de l’interdiction suppose l’appréciation de dommages à un niveau autre que l’habitat naturel dans la zone particulière, l’appréciation doit-elle être effectuée à l’une des échelles suivantes ou à l’un des niveaux suivants :

a)      une certaine partie de la population, géographiquement circonscrite dans les limites, par exemple, du département, de l’État membre ou de l’Union européenne,

b)      la population locale concernée (isolée biologiquement d’autres populations de la même espèce),

c)      la métapopulation concernée, ou

d)      toute la population de l’espèce dans la région biogéographique concernée de l’aire de répartition de celle‑ci ?

Les deuxième et quatrième questions de la juridiction de céans incluent la question de savoir si la protection stricte prévue par les directives cesse de s’imposer en ce qui concerne les espèces pour lesquelles l’objectif de la directive (état de conservation favorable) a été atteint. »

36.      La Cour a joint les deux affaires. Les associations de protection de l’environnement requérantes, le gouvernement tchèque et la Commission européenne ont présenté des observations écrites.

IV.    Appréciation juridique

37.      L’article 5, sous a) à d), de la directive « oiseaux » et l’article 12, paragraphe 1, sous a) à c), de la directive « habitats » imposent aux États membres d’adopter des règles de protection des espèces visées interdisant certaines atteintes intentionnelles. Il doit notamment être interdit de tuer et de capturer [article 5, sous a), de la directive « oiseaux »], de détruire ou de ramasser des œufs dans la nature [article 5, sous c), de la directive « oiseaux » et article 12, paragraphe 1, sous c), de la directive « habitats »], de détruire, d’endommager ou d’enlever des nids d’oiseaux [article 5, sous b), de la directive « oiseaux »], de ramasser des œufs d’oiseaux dans la nature et de les détenir, même vides [article 5, sous c), de la directive « oiseaux »], ainsi que de perturber les oiseaux [article 5, sous d), de la directive « oiseaux » et article 12, paragraphe 1, sous b), de la directive « habitats »]. Seule l’interdiction de détériorer ou de détruire des sites de reproduction ou des aires de repos prévue à l’article 12, paragraphe 1, sous d), de la directive « habitats » ne présuppose aucune intention (10).

38.      La demande de décision préjudicielle porte, en définitive, sur le point de savoir s’il est possible de subordonner ces interdictions à la condition que l’état de conservation des espèces concernées soit défavorable ou aggravé par l’action concernée. De telles conditions, bien qu’elles résultent de dispositions et de la jurisprudence suédoises, ne trouvent pas, pour la plupart, de fondement dans le texte des directives « oiseaux » et « habitats ». Dès lors, elles sont, au moins en partie, douteuses.

39.      Toutefois, ces conditions constituent, au moins en théorie, une tentative raisonnable d’éviter que la protection des espèces prévue par le droit de l’Union ne limite excessivement les activités humaines. Le risque de telles restrictions ressort de la jurisprudence de la Cour, qui a interprété la notion d’« intention », du moins en ce qui concerne les interdictions de la directive « habitats », en ce sens qu’en relève également l’acceptation de l’atteinte interdite. Si cette interprétation est transposée sans réserve à la directive « oiseaux », cela risque effectivement d’imposer des restrictions importantes à l’activité humaine.

40.      En témoigne, notamment, la réponse à la première question, par laquelle il convient de préciser que la protection des espèces au titre de la directive « oiseaux » couvre toutes les espèces d’oiseaux d’Europe (sous A). En revanche, la protection des sites de reproduction prévue par la directive « habitats », évoquée par les quatrième et cinquième questions, apparaît un peu moins conflictuelle. Rien que par son libellé, cette disposition est la seule à ne pas viser des atteintes intentionnelles, cependant elle ne concerne que les espèces plus rares protégées par la directive « habitats » (sous B). Toutefois, ce qui est déterminant, c’est l’interprétation des interdictions d’atteintes intentionnelles, qui fait l’objet de la deuxième question (sous C). Enfin, concernant la troisième question, il convient de rappeler les constatations relatives à l’appréciation de l’état de conservation d’une espèce établies récemment par la Cour dans le second arrêt relatif à la chasse au loup (Lupus lupus) en Finlande (11) (sous D).

A.      Espèces protégées par l’article 5 de la directive « oiseaux » (première question)

41.      Par la première question, la juridiction de renvoi cherche à savoir si l’article 5 de la directive « oiseaux » vise uniquement les espèces figurant à l’annexe I de cette directive, ou menacées à quelque niveau que ce soit, ou dont la population est en déclin à long terme. D’après la demande de décision préjudicielle, la juridiction de renvoi et les autorités suédoises compétentes considèrent que la Suède n’a transposé l’article 5 de la directive « oiseaux » qu’en ce qui concerne ces espèces d’oiseaux.

42.      Néanmoins, comme le présume la juridiction de renvoi, l’article 5 de la directive « oiseaux » a une portée bien plus large. En effet, en vertu de cette disposition, un régime de protection est nécessaire pour assurer la protection de toutes les espèces d’oiseaux visées à l’article 1er de cette directive. Ces espèces sont toutes les espèces d’oiseaux vivant naturellement à l’état sauvage sur le territoire européen des États membres auquel le traité est applicable (12).

43.      D’après le libellé de l’article 5, il importe peu que les espèces figurent ou non à l’annexe I de la directive « oiseaux ». En effet, selon l’article 4, paragraphe 1, de cette directive, les espèces figurant à l’annexe I doivent faire l’objet de mesures de conservation spéciale, c’est‑à‑dire de mesures supplémentaires concernant leur habitat. En outre, la directive « oiseaux » comporte des dispositions de protection générale, telles que l’article 5, mais aussi les articles 2 et 3, qui couvrent toutes les espèces d’oiseaux d’Europe.

44.      De même, il est indifférent, aux fins de l’article 5 de la directive « oiseaux », que des espèces d’oiseaux soient menacées à quelque niveau que ce soit ou que leur population soit en déclin à long terme. Au contraire, la République tchèque rappelle à juste titre que les obligations de protection existent avant même qu’une diminution du nombre d’oiseaux soit constatée ou que le risque d’extinction d’une espèce d’oiseaux protégée se soit concrétisé (13).

45.      C’est pourquoi la Cour a jugé très tôt qu’il est incompatible avec l’article 5 de la directive « oiseaux » d’exclure certaines espèces d’oiseaux de la protection (14) ou de limiter cette protection aux espèces du patrimoine biologique national (15). En outre, elle a déjà appliqué cette disposition à différentes espèces ne remplissant aucune des conditions posées par la législation suédoise, telles que les corneilles (Corvus corone corone et Corvus corone cornix), les étourneaux (Sturnus vulgaris) et des merles (Turdus merula) (16), des hérons cendrés (Ardea cinerea) et des cormorans (Phalacrocorax carbo) (17), ou encore différentes espèces de pinsons (18).

46.      Il y a donc lieu de répondre à la première question que les articles 1er et 5 de la directive « oiseaux » imposent aux États membres d’adopter des régimes de protection de toutes les espèces d’oiseaux vivant naturellement à l’état sauvage sur le territoire européen des États membres auquel le traité est applicable. Des régimes de protection couvrant uniquement des espèces figurant à l’annexe I de cette directive ou des espèces menacées à quelque niveau que ce soit ou dont la population est en déclin à long terme ne répondent pas à ces exigences.

B.      Sites de reproduction (quatrième et cinquième questions)

47.      Par sa quatrième question, la juridiction de renvoi cherche à savoir si l’interdiction de toute détérioration ou destruction des sites de reproduction des animaux, prévue à l’article 12, sous d), de la directive « habitats », est limitée aux cas de figure où la permanence de la fonctionnalité écologique dans l’habitat naturel de l’espèce concernée dans une zone particulière est, malgré les précautions prises, perdue, et où, en même temps, l’état de conservation de l’espèce concernée risque de se détériorer. En outre, il est demandé si l’application de l’interdiction est exclue dans le cas où l’espèce se trouve dans un état de conservation favorable. La cinquième question vise à préciser à quel niveau il convient d’apprécier l’état de conservation.

48.      Dans la présente affaire, il n’est pas nécessaire de déterminer si l’interdiction ne s’applique que lorsque la destruction ou la détérioration des sites de reproduction s’accompagnent de la perte de la permanence de la fonctionnalité écologique. La Commission a développé cette interprétation de l’interdiction énoncée à l’article 12, paragraphe 1, sous d), de la directive « habitats » dans son document d’orientation (19), mais la Cour ne s’est pas encore prononcée sur ce point. S’il apparaît que la juridiction de renvoi fait sienne cette lecture, cette dernière n’est pas pertinente pour la solution du litige au principal, dès lors que la demande de décision préjudicielle repose sur la prémisse que cette condition est remplie dans l’affaire au principal.

49.      Plutôt, il s’agit seulement de savoir quelle est l’importance de l’état de conservation de l’espèce concernant l’application de l’interdiction de destruction ou de détérioration des sites de reproduction. En effet, la jurisprudence suédoise exposée dans la demande de décision préjudicielle ne fait application de cette interdiction qu’en présence d’un risque d’incidences sur l’état de conservation de ces espèces sur le site.

50.      Il convient de rappeler que l’article 12, paragraphe 1, sous d), de la directive « habitats » impose aux États membres de prendre les mesures nécessaires pour instaurer un système de protection stricte des espèces animales figurant à l’annexe IV, sous a), de la même directive, dans leur aire de répartition naturelle, interdisant la détérioration ou la destruction des sites de reproduction ou des aires de repos.

51.      S’agissant de cette interdiction, en n’interdisant pas exclusivement les actes intentionnels, contrairement à ce qui est prévu à l’article 12, paragraphe 1, sous a) à c), de la directive « habitats », le législateur de l’Union a démontré sa volonté de conférer aux sites de reproduction ou aux aires de repos une protection accrue contre les actes causant leur détérioration ou leur destruction (20).

52.      La transposition de cette disposition impose aux États membres non seulement l’adoption d’un cadre législatif complet, mais également la mise en œuvre de mesures concrètes et spécifiques de protection. De même, le système de protection stricte suppose l’adoption de mesures cohérentes et coordonnées, à caractère préventif. Un tel système de protection stricte doit donc permettre d’éviter effectivement la détérioration ou la destruction des sites de reproduction ou des aires de repos des espèces animales figurant à l’annexe IV, sous a), de la directive « habitats » (21).

53.      Selon le libellé de la disposition, cette interdiction s’applique, que l’atteinte affecte ou non l’état de conservation d’une population. Au contraire, la Cour a déjà jugé que la stabilité d’une population (22) ainsi que son importance (23) ne sont pas déterminantes concernant l’effet de l’interdiction.

54.      En outre, la juridiction de renvoi souligne à juste titre que l’état de conservation est déterminant surtout aux fins de l’octroi d’une dérogation au titre de l’article 16 de la directive « habitats ». En effet, une dérogation au titre de cette disposition suppose que celle‑ci ne nuise pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle. Ainsi que le soutient la Commission, il serait donc contradictoire de subordonner l’application même des interdictions prévues à l’article 12, paragraphe 1, de la directive « habitats » à une menace de dégradation de l’état de conservation de l’espèce concernée. En effet, si tel était le cas, une dérogation ne devrait jamais être accordée, de sorte que l’article 16 de cette directive serait privé de tout effet utile.

55.      Ainsi, l’interdiction de destruction ou de détérioration des sites de reproduction d’animaux prévue à l’article 12, sous d), de la directive « habitats » ne requiert pas que l’état de conservation de la population de l’espèce concernée soit menacé par l’action en cause. Un état de conservation favorable de l’espèce concernée n’affecte pas l’interdiction.

56.      C’est pourquoi il n’y a pas lieu de répondre à la cinquième question, relative au niveau auquel doit être apprécié l’état de conservation aux fins de l’application de l’article 12, paragraphe 1, sous d), de la directive « habitats ».

C.      Les interdictions d’atteintes intentionnelles (deuxième question)

57.      Par la deuxième question, la juridiction de renvoi s’interroge sur le sens à donner aux notions de « mise à mort », de « perturbations » ou de « destruction intentionnelles » au sens de l’article 5, sous a) à d), de la directive « oiseaux » et de l’article 12, paragraphe 1, sous a) à c), de la directive « habitats ». En particulier, la Cour est appelée à déterminer si ces notions sont compatibles avec une pratique nationale selon laquelle, lorsqu’une mesure poursuit manifestement un but autre que celui d’abattre ou de perturber des espèces (par exemple des mesures d’exploitation forestière ou de viabilisation), la mesure doit risquer d’avoir une incidence négative sur l’état de conservation des espèces pour que les interdictions trouvent à s’appliquer. En outre, il est demandé si l’interdiction est exclue dans le cas où l’espèce se trouve dans un état de conservation favorable. La troisième question a pour objet de préciser à quel niveau il convient d’apprécier l’état de conservation.

58.      Pour répondre à ces questions, il y a lieu de distinguer entre la mise à mort et la destruction, d’une part, et la perturbation, d’autre part, ainsi qu’entre les deux directives.

1.      Sur les interdictions de tuer et de détruire

59.      Il convient de déterminer si les interdictions de mise à mort, prévues à l’article 5, sous a), de la directive « oiseaux » et à l’article 12, sous a), de la directive « habitats » ainsi que de destruction des œufs (et des nids d’oiseaux), prévues à l’article 5, sous b), de la directive « oiseaux » et à l’article 12, sous c), de la directive « habitats », dépendent de l’état de conservation des espèces concernées. En revanche, l’interdiction de collecte et de détention des œufs prévue à l’article 5, sous c), de la directive « oiseaux » n’est pas pertinente en l’espèce et n’appelle donc pas de plus amples développements.

a)      La directive « habitats »

60.      Conformément à l’article 12, paragraphe 1, sous a) et c), de la directive « habitats », les États membres interdisent toute forme de mise à mort intentionnelle des spécimens d’espèces protégées prélevés dans la nature ainsi que toute destruction intentionnelle de leurs œufs.

61.      Si, concernant ces interdictions, la notion d’« intention » était comprise comme visant uniquement l’atteinte volontaire aux espèces protégées, il n’y aurait pas lieu de se prononcer plus avant sur cette question préjudicielle. En effet, la présente affaire ne concerne que des mesures qui ont manifestement une finalité autre que celle de tuer des espèces (ou de détruire leurs œufs).

62.      Toutefois, comme nous l’avons suggéré (24), la Cour a jugé, en ce qui concerne la mise à mort, que la condition d’intention est remplie lorsqu’il est établi que l’auteur de l’acte a voulu ou, à tout le moins, accepté (25) la mise à mort d’un spécimen d’une espèce animale protégée. Les actes par lesquels une atteinte est acceptée ont, en règle générale, d’autres objectifs que cette atteinte.

63.      Les affaires dans lesquelles cette interprétation a été développée illustrent cela assez clairement. Il s’agissait de savoir si la chasse au collet du renard (Vulpes vulpes) pouvait enfreindre les interdictions de protection de la loutre (Lutra lutra) (26) et si certaines mesures de construction ainsi que des activités de loisirs et de pêche pouvaient être considérées comme des perturbations intentionnelles d’une espèce de tortue marine, la caouanne (Caretta caretta) (27). Enfin, cette jurisprudence trouve son origine dans un autre arrêt, dans lequel la Cour a reproché à certaines activités de loisirs de perturber la tortue marine susmentionnée (28), sans se préoccuper expressément de la notion d’« intention ».

64.      Certes, cette jurisprudence ne concerne que les interdictions de mise à mort et de perturbation visées à l’article 12, paragraphe 1, sous a) et b), de la directive « habitats ». Cependant, il n’y a pas lieu de donner une interprétation différente de la notion d’« intention » concernant la destruction d’œufs.

65.      Il s’ensuit que les mesures d’exploitation forestière litigieuses sont bien susceptibles d’enfreindre les interdictions prévues à l’article 12, paragraphe 1, sous a) et c), de la directive « habitats ». Il convient donc d’examiner s’il est possible de subordonner l’existence d’une telle violation à l’état de conservation des espèces concernées.

66.      Ainsi qu’il a déjà été constaté dans le contexte de l’interdiction de détérioration des sites de reproduction énoncée à l’article 12, paragraphe 1, sous d), de la directive « habitats », il ressort du libellé de cette disposition que l’état de conservation des espèces n’affecte pas l’interdiction, mais importe uniquement concernant les dérogations prévues à l’article 16 de cette directive. Il en va de même, en principe (29), des autres interdictions énoncées à cet article 12, paragraphe 1, ainsi que la Cour l’a déjà reconnu indirectement en ce qui concerne l’interdiction de mise à mort au sens de ladite disposition, sous a) (30).

67.      S’agissant, en particulier, de l’interdiction de mise à mort des spécimens d’espèces prévue à l’article 12, paragraphe 1, sous a), de la directive « habitats », cela est confirmé par le fait que la notion de « spécimen », telle que définie à l’article 1er, sous m), de cette directive, vise effectivement chaque animal individuellement.

68.      En revanche, l’interdiction de destruction d’œufs prévue à l’article 12, paragraphe 1, sous c), de la directive « habitats » ne vise pas expressément des spécimens individuels. Il n’en demeure pas moins que, par nature, une telle interdiction ne peut guère être comprise différemment en l’absence de mention d’un seuil de déclenchement. La supposition d’un seuil de minimis concernant cette interdiction est d’ailleurs contredite par l’exception prévue à l’article 16, paragraphe 1, sous e), de la directive « habitat », qui permet « la prise ou la détention d’un nombre limité et spécifié par les autorités nationales compétentes de certains spécimens des espèces figurant à l’annexe IV », mais impose des conditions supplémentaires à cet égard. Cette dérogation serait superflue si l’interdiction du prélèvement d’œufs n’était pas applicable à de petites quantités.

69.      Ainsi, les interdictions de mise à mort et de destruction prévues à l’article 12, paragraphe 1, sous a) et c), de la directive « habitats » ne sont pas subordonnées à la condition que la mesure en cause risque d’avoir une incidence négative sur l’état de conservation de chaque espèce animale. Un état de conservation favorable de l’espèce concernée n’exclut pas non plus l’application de ces interdictions.

b)      La directive « oiseaux »

–       aa)      État de conservation de l’espèce

70.      S’agissant de l’article 5 de la directive « oiseaux », la situation est, à première vue, similaire. Ainsi, concernant les interdictions de tuer [sous a)] et de détruire ou de détériorer les nids et les œufs [sous b)], à l’instar de l’article 12, paragraphe 1, de la directive « habitats », rien n’indique que celles‑ci soient liées à l’état de conservation. Au contraire, elles doivent, par nature, porter sur chaque spécimen, dès lors qu’aucun seuil n’est indiqué.

71.      La supposition d’un seuil de minimis se heurte également à une dérogation, inscrite à l’article 9, paragraphe 1, sous c), de la directive « oiseaux ». Cette dérogation autorise spécifiquement l’exploitation de certains oiseaux en petites quantités et comporte également d’autres conditions.

72.      En outre, c’est à juste titre que la juridiction nationale évoque, également en ce qui concerne l’article 5 de la directive oiseaux, l’idée, déjà pertinente dans le contexte de la directive « habitats », que toutes les dérogations aux interdictions dépendent de l’état de conservation de l’espèce concernée. Certes, cette position ne trouve aucun fondement dans le texte de l’article 9 de la directive « oiseaux ». Toutefois, selon le considérant 10 de cette directive, les dérogations au titre dudit article 9 ne peuvent être mises en œuvre que si la garantie existe que la population des espèces concernées est maintenue à un « niveau satisfaisant » (31). Récemment, la Cour y a expressément vu une analogie avec l’article 16 de la directive « habitats » (32).

73.      Cette conclusion est conforme à l’article 9 de la convention de Berne, qui est transposé par l’article 9 de la directive « oiseaux » (33) et qui doit donc être pris en compte lors de l’interprétation de cette dernière disposition (34). En effet, conformément à cette convention, une dérogation aux interdictions comparables prévues par celle‑ci ne doit pas nuire à l’existence de la population concernée.

74.      Ainsi, un peu comme avec la directive « habitats », il serait, en principe (35), également contradictoire dans le cadre de la directive « oiseaux », de prendre en compte le risque d’atteinte à l’état de conservation de l’espèce concernée déjà en tant que condition d’application des interdictions prévues à l’article 5 de cette directive et, partant, de rendre pratiquement impossible l’application de la dérogation.

–       bb) « Intention » au sens de la directive « oiseaux »

75.      Néanmoins, il convient de se demander en l’espèce si ces interdictions visent des mesures qui, à l’évidence, poursuivent une finalité différente de celle de tuer des espèces ou de détruire leurs nids et œufs.

76.      La réponse à cette question est moins évidente qu’en ce qui concerne l’article 12 de la directive « habitats », en l’absence, jusqu’à présent, de constatations expresses similaires de la Cour concernant la notion d’« intention » au sens de l’article 5 de la directive « oiseaux ».

77.      Toutefois, un peu comme dans la première affaire, concernant la tortue marine, dans l’arrêt relatif à la forêt de Białowieża, la Cour s’est déjà opposée à l’abattage d’arbres endommagés, morts ou moribonds, parce que de telles actions avaient été identifiées, dans un plan d’exploitation du site protégé concerné, comme un danger potentiel pour des espèces d’oiseaux qui y sont particulièrement protégées (36). C’est pourquoi elle a qualifié cette mesure de destruction ou d’endommagement intentionnels de nids et d’œufs et d’enlèvement de nids [article 5, sous b), de la directive « oiseaux »], ainsi que de perturbation intentionnelle, notamment, durant la période de reproduction et de dépendance [article 5, sous d)] (37). Il paraît improbable que les mesures en cause aient eu pour but ces atteintes portées aux oiseaux.

78.      Ainsi, dans la mesure où, même en ce qui concerne l’article 5 de la directive « oiseaux », la Cour ne se base pas sur une interprétation stricte de la notion d’« intention », il semble s’imposer à l’esprit de transposer à l’article 5 de la directive « oiseaux » l’interprétation donnée à cette notion concernant les interdictions quasi identiques énoncées à l’article 12, paragraphe 1, de la directive « habitats ». C’est d’ailleurs la position défendue par la Commission dans le cadre de la présente procédure.

79.      Or, les conséquences d’une telle approche iraient bien au-delà de celle d’une telle interprétation de l’article 12, paragraphe 1, de la directive « habitats ».

80.      La protection des espèces par la directive « habitats » est limitée à quelques espèces, généralement (38) très rares. Ces espèces étant rares, il est nécessaire de protéger strictement chacun des spécimens, ce que l’article 12 de la directive « habitats » exprime clairement par l’expression « système de protection stricte » (39). Toutefois, en même temps, en raison de la rareté de ces espèces, les conflits ne sont pas non plus très fréquents.

81.      En revanche, ainsi que nous l’avons vu (40), les interdictions édictées à l’article 5 de la directive « oiseaux » s’appliquent à tous les oiseaux d’Europe, y compris donc aux espèces courantes, que l’on rencontre presque partout. Et il est difficile d’affirmer que des atteintes à ces espèces ne sont pas acceptées par des sociétés modernes. Au contraire, il est notoire que ces espèces sont sérieusement affectées par les activités humaines les plus diverses, telles que la construction de bâtiments (41) ou la circulation routière (42).

82.      Ainsi, dès l’adoption de la directive « oiseaux », le législateur a précisé que celle‑ci ne visait pas à protéger de manière inconditionnelle chaque oiseau. Au contraire, conformément à l’article 2 de ladite directive, il s’agit d’assurer le maintien ou le rétablissement, dans un état de conservation conforme aux exigences écologiques, scientifiques et culturelles, compte tenu des exigences économiques et récréationnelles.

83.      Or, la préservation des espèces courantes n’exige pas, en règle générale, des interdictions qui interviennent dès lors qu’une atteinte est simplement acceptée. S’il existe des espèces dont la survie dépend de telles interdictions, les espèces courantes le sont justement parce que les activités humaines ne mettent pas en danger leur survie.

84.      Lorsque les populations de certaines espèces plus fréquentes déclinent malgré tout, il est souvent plus important de conserver leurs habitats et de les gérer de manière appropriée. En effet, de tels déclins interviennent généralement à la suite de modifications de l’utilisation humaine de ces habitats. En revanche, faire jouer les interdictions prévues à l’article 5 de la directive « oiseaux » dès l’apparition des atteintes visées dans cette disposition serait moins approprié afin de préserver ces populations et, partant, ne serait pas le moyen le moins contraignant.

85.      Ces considérations sont bien présentes dans la directive « oiseaux ». Ainsi, l’article 5 de cette directive exige non pas un système de protection stricte, mais un régime général de protection des oiseaux d’Europe. Une obligation supplémentaire de protection de l’habitat naturel des espèces courantes est énoncée à l’article 3 de la directive « oiseaux » (43). L’habitat des espèces rares et particulièrement vulnérables, ainsi que des oiseaux migrateurs, devrait, en vertu de l’article 4 de cette directive « oiseaux », lu conjointement avec les articles 6 et 7 de la directive « habitats », bénéficier d’une protection accrue, notamment par la création de zones spéciales de conservation. Si certaines activités devaient effectivement menacer l’état de conservation d’espèces d’oiseaux, l’article 2, point 1, sous a), et l’article 5 de la directive sur la responsabilité environnementale s’appliqueraient de manière complémentaire.

86.      En outre, à la différence de la directive « habitats », la directive « oiseaux » ne prévoit pas de régime dérogatoire approprié pour mettre en balance les intérêts en présence. Alors que la première permet des assouplissements pour toutes les raisons impératives d’intérêt public majeur imaginables [article 16, paragraphe 1, sous c)], la seconde envisage seulement, en dehors de raisons très précises, dans des conditions strictement contrôlées et de manière sélective, une exploitation judicieuse de certains oiseaux en petites quantités [article 9, paragraphe 1, sous c).

87.      Dès lors, il ne nous paraît pas opportun de transposer sans restriction l’interprétation donnée à la notion d’« intention » au sens de l’article 12, paragraphe 1, de la directive « habitats » à la notion d’« intention » au sens de l’article 5 de la directive « oiseaux ».

88.      Toutefois, eu égard aux constatations établies dans l’arrêt concernant la forêt de Białowieża (44), il est également exclu d’éviter une telle conclusion en étendant les interdictions prévues à l’article 5, sous a) et b), de la directive « oiseaux » uniquement aux atteintes voulues aux oiseaux, mais en excluant totalement, en revanche, les atteintes seulement acceptées. Cette conclusion serait également inappropriée lorsque des espèces rares et fortement menacées sont affectées, car, concernant ces espèces rares, en pratique, l’étendue des interdictions reste limitée, alors que la contribution positive à l’état de conservation de ces espèces peut être significative.

89.      Un juste équilibre entre les activités concernées et les objectifs de la directive« oiseaux » consiste plutôt à faire relever des atteintes acceptées de ces interdictions seulement dans la mesure où cela est nécessaire à la lumière de l’objectif défini à l’article 2 de cette directive. Dès lors, il faut accepter que cette interprétation soit plus complexe à appliquer, puisqu’elle exige une prise en compte de l’état de conservation des espèces d’oiseaux. En tout état de cause, une telle interprétation correspond, en définitive, à l’application large des interdictions dans l’arrêt relatif à la forêt de Białowieża, dès lors que cette affaire concernait des espèces d’oiseaux très rares sur un site désigné aux fins de leur protection spécifique (45).

90.      Ainsi, les interdictions de tuer et de détruire prévues à l’article 5, sous a) et b), de la directive « oiseaux » ne supposent pas, en principe, que la mesure en cause risque d’avoir une incidence négative sur l’état de conservation de l’espèce animale concernée. Un état de conservation favorable de l’espèce concernée n’exclut pas non plus l’application de ces interdictions. Toutefois, lorsque l’atteinte aux oiseaux n’est pas intentionnelle, mais seulement acceptée, les interdictions prévues à l’article 5, sous a) et b), de la directive « oiseaux » ne s’appliquent que dans la mesure nécessaire pour maintenir ou adapter ces espèces à un niveau qui corresponde notamment aux exigences écologiques, scientifiques et culturelles, au sens de l’article 2 de cette directive, tout en tenant compte des exigences économiques et récréationnelles.

91.      À titre surabondant, il convient de rappeler que les interdictions doivent être formulées de manière claire, notamment lorsqu’elles sont de nature pénale (46). Dès lors, il incombe aux États membres de préciser en conséquence les interdictions prévues à l’article 5, sous a) et b), de la directive « oiseaux » lors de leur transposition en droit national. Des règles appropriées doivent être adoptées à cet effet. En outre, il est souvent nécessaire de donner des indications précises sur les comportements qui sont interdits et sur les lieux où une diligence particulière s’impose.

c)      Conclusion intermédiaire

92.      Ainsi, les interdictions de tuer et de détruire prévues à l’article 5, sous a) et b), de la directive « oiseaux » et à l’article 12, paragraphe 1, sous a) et c), de la directive « habitats » n’impliquent pas que la mesure en cause risque d’avoir une incidence négative sur l’état de conservation de l’espèce animale concernée. Un état de conservation favorable de l’espèce concernée n’exclut pas non plus l’application de ces interdictions.

93.      Toutefois, lorsque l’atteinte aux oiseaux n’est pas voulue, mais seulement acceptée, les interdictions prévues à l’article 5, sous a) et b), de la directive « oiseaux » ne s’appliquent que dans la mesure nécessaire pour maintenir ou adapter ces espèces à un niveau qui corresponde notamment aux exigences écologiques, scientifiques et culturelles, au sens de l’article 2 de cette directive, tout en tenant compte des exigences économiques et récréationnelles.

2.      Sur les interdictions de perturber

94.      En ce qui concerne l’interdiction de perturber, il semble qu’il y ait une différence entre les directives « oiseaux » et « habitats ». Toutefois, en définitive, les deux interdictions doivent être interprétées de manière similaire en ce sens que l’état de conservation des espèces concernées est important.

a)      La directive « oiseaux »

95.      Conformément à l’article 5, sous d), de la directive « oiseaux », l’interdiction de perturber des espèces d’oiseaux, notamment pendant la période de reproduction et de dépendance, ne s’applique que pour autant que la perturbation ait un effet significatif eu égard aux objectifs de la directive. Une telle restriction s’impose à cet égard, justement parce que l’expérience montre que l’on accepte déjà de perturber les oiseaux lorsque l’on se déplace dans leurs habitats, par exemple lors de promenades, sur le chemin du travail ou encore sur son propre balcon.

96.      Conformément à son article 1er, la directive « oiseaux » a pour objet la protection de toutes les espèces d’oiseaux d’Europe. À cette fin, conformément à l’article 2 de cette directive, les États membres doivent maintenir ou rétablir les populations de ces espèces à un niveau qui corresponde notamment aux exigences écologiques, scientifiques et culturelles, compte tenu des exigences économiques et récréationnelles.

97.      À cet égard, bien que les États membres disposent d’une marge d’appréciation, sous réserve de dispositions spécifiques (47), les considérants 3, 5, 7, 8 et surtout 10 de ladite directive montrent que les États membres doivent maintenir les populations de toutes les espèces d’oiseaux sauvages dans l’Union à un « niveau satisfaisant » (48).

98.      Toutefois, l’état de conservation n’est que l’un des éléments qui sont importants aux fins de l’appréciation d’une perturbation. Le libellé même de l’article 5, sous d), de la directive « oiseaux » montre que l’objectif est, en tout état de cause, d’éviter des perturbations pendant la période de reproduction et de dépendance. Cette précision est utile, car les périodes de reproduction et de dépendance ont une importance cruciale pour l’état de conservation. Il n’en demeure pas moins que des perturbations ne sont interdites pendant ces périodes que si elles sont significatives. Tel est le cas, à tout le moins, lorsque la perturbation affecte directement les oiseaux rares pendant la période de reproduction ou de dépendance. Ainsi, la Cour a déjà jugé que des déboisements affectant un habitat important pour les espèces rares peuvent constituer une perturbation interdite (49).

99.      Puisque, dès lors, l’interdiction en tant que telle intègre les incidences sur l’état de conservation de l’espèce concernée, à cet égard, il n’y a pas lieu de nuancer la notion d’« intention » par rapport à la directive « habitats ».

100. Ainsi, en vertu de l’article 5, sous d), de la directive « oiseaux », les perturbations doivent être interdites dès lors qu’elles ont un effet significatif sur l’objectif de maintenir ou de rétablir un niveau satisfaisant des populations des espèces d’oiseaux et, notamment, lorsqu’elles nuisent à des oiseaux rares pendant la période de reproduction ou de dépendance.

b)      La directive « habitats »

101. Dans la directive « habitats », l’objectif est formulé de manière analogue à la directive « oiseaux ». En effet, conformément à l’article 2, paragraphe 2, de la directive « habitats », celle‑ci vise à assurer le maintien ou le rétablissement, dans un état de conservation favorable, des espèces de faune et de flore sauvages d’intérêt communautaire. Dans le même temps, conformément à l’article 2, paragraphe 3, de cette directive, les mesures prises en vertu de la directive doivent tenir compte des exigences économiques, sociales et culturelles ainsi que des particularités régionales et locales.

102. Toutefois, à la différence de l’article 5, sous d), de la directive « oiseaux », l’interdiction de perturbation prévue à l’article 12, paragraphe 1, sous b), de la directive « habitats » n’est pas expressément liée aux objectifs de cette directive et, en particulier, à l’état de conservation des espèces concernées. Cependant, l’analogie réside dans le fait que l’interdiction s’applique notamment pendant les périodes de reproduction, de dépendance, d’hivernage et de migration. Ces périodes sont considérées comme particulièrement sensibles du point de vue des perturbations (50), de sorte qu’elles revêtent en règle générale une importance particulière pour l’état de conservation des espèces. En outre, il apparaît qu’il doit être interdit de perturber les espèces, alors qu’en vertu de l’article 12, paragraphe 1, sous a), et de la définition de l’article 1er, sous m), de la directive « habitats », l’interdiction de mise à mort vise chaque spécimen des espèces protégées.

103. Ainsi, la Commission propose, non pas, certes, dans la présente affaire, mais dans son document d’orientation, de ne considérer comme une perturbation que l’activité qui affecte les chances de survie, le succès de reproduction ou la capacité de reproduction d’une espèce protégée ou qui conduit à la réduction de l’espace occupé (51).

104. Comme en matière de protection des oiseaux, une telle restriction est nécessaire pour éviter que l’interdiction de perturbation ne restreigne de manière excessive les activités humaines, sans tenir compte des exigences économiques, sociales et culturelles visées à l’article 2, paragraphe 3, de la directive « habitats ». S’il est vrai que l’on rencontre moins souvent les espèces d’animaux protégées figurant à l’annexe IV, sous a), de cette directive que les espèces d’oiseaux largement répandues, il n’apparaît ni nécessaire ni approprié que l’homme, pour exclure toute perturbation, doive toujours éviter ces espèces dès qu’il s’aperçoit qu’il se trouve à proximité de celles‑ci. Or, de telles rencontres peuvent se produire justement avec des chauves-souris ou certains amphibiens et papillons.

105. La jurisprudence existante relative à la violation de l’interdiction de perturbation peut également être comprise en ce sens. Certes, la Cour a également souligné que la stabilité d’une population ainsi que le niveau de celle‑ci n’excluent pas l’application de l’interdiction de perturber. Cependant, les affaires relatives à la tortue marine caouanne (Caretta caretta) concernaient des activités sur des sites protégés déterminés en raison de leur importance majeure pour ces espèces (52), alors que l’arrêt relatif à la protection des vipères (Vipera schweizeri) sur l’île de Milos avait pour objet un site essentiel pour cette espèce (53). L’arrêt relatif au système de protection de la couleuvre à collier de Chypre concernait quant à lui un site dont il n’est pas contesté qu’il aurait dû être protégé (54). Sur de tels sites, des obligations de vigilance renforcée sont tout à fait adéquates pour éviter des perturbations.

106. Or, l’interprétation de l’interdiction de perturbation en fonction de l’objectif de la directive « habitats » ne fait pas que limiter l’application de cette interdiction à des cas de perturbation isolés et, en définitive, insignifiants de certains spécimens. Elle suggère également, en contrepartie, que l’interdiction de perturbation protège des habitats importants des espèces, et ce que des spécimens particuliers s’y trouvent justement ou non, qu’il y existe des sites de reproduction et des aires de repos ou non ou que des sites protégés y soient déterminés ou non. En effet, une dégradation ou une destruction de l’habitat est susceptible, à la lumière précisément des objectifs de la directive, de perturber de manière significative l’espèce concernée, indépendamment de ces facteurs.

107. Ainsi, l’interdiction de perturbation prévue à l’article 12, paragraphe 1, sous b), de la directive « habitats » doit être limitée aux actes qui sont particulièrement susceptibles d’affecter l’état de conservation des espèces protégées, notamment dans les lieux qui ont une importance particulière pour ces espèces ou les lieux où celles‑ci subiraient des nuisances en période de reproduction, de dépendance, d’hivernage et de migration.

D.      Le niveau auquel doit être effectuée l’appréciation de l’état de conservation (troisième question)

108. Étant donné que, à tout le moins en ce qui concerne les interdictions de perturbation et pour partie les autres interdictions prévues par la directive « oiseaux », l’état de conservation de l’espèce concernée importe, il y a lieu de répondre à la troisième question, relative au niveau auquel doit être effectuée l’appréciation.

109. Les constatations les plus récentes contenues dans le second arrêt relatif à la protection du loup en Finlande sont utiles à cet effet. Dans cette affaire, il s’agissait d’apprécier l’état de conservation de l’espèce concernée lors de l’octroi d’une dérogation au titre de l’article 16 de la directive « habitats ». Si l’on transpose les constatations qui y sont faites à l’examen d’une nuisance, celui‑ci doit être fondé sur des critères définis de manière à assurer la préservation à long terme de la dynamique et de la stabilité sociale de l’espèce visée (55).

110. Ce faisant, il convient de prendre en considération tant le territoire de l’État membre que les régions biogéographiques concernées afin de déterminer, dans un premier temps, l’état de conservation des populations des espèces concernées et, dans un second temps, les conséquences géographiques et démographiques que les perturbations sont susceptibles d’avoir sur celui‑ci (56).

111. À cet égard, l’évaluation de l’impact d’une nuisance au niveau du territoire d’une population locale est généralement nécessaire en vue de déterminer son incidence sur l’état de conservation de la population en cause à plus grande échelle. Par ailleurs, l’état de conservation d’une population à l’échelle nationale ou biogéographique dépend également de l’incidence cumulée des différentes dérogations affectant des zones locales (57).

112. Ainsi, dans la mesure où l’application des interdictions prévues à l’article 5 de la directive « oiseaux » et à l’article 12, paragraphe 1, de la directive « habitats » dépend de l’état de conservation des populations de l’espèce concernée, celui‑ci doit être évalué au niveau du territoire de l’État membre concerné ou, le cas échéant, au niveau de la région biogéographique visée lorsque les frontières de cet État membre chevauchent plusieurs régions biogéographiques, ou encore si l’aire de répartition naturelle de l’espèce l’exige et, dans la mesure du possible, sur le plan transfrontalier (58).

V.      Conclusion

113. Eu égard à ce qui précède, nous proposons à la Cour de répondre de la manière suivante au Vänersborgs tingsrätt, mark- och miljödomstolen (chambre des affaires agricoles et environnementales du tribunal de première instance de Vänersborg, Suède) 

1)      Les États membres sont tenus, en vertu des articles 1er et 5 de la directive 2009/147/CE du Parlement européen et du Conseil, du 30 novembre 2009, concernant la conservation des oiseaux sauvages, telle que modifiée par la directive 2013/17/UE du Conseil, du 13 mai 2013, d’adopter des règles visant à la protection de toutes les espèces d’oiseaux vivant naturellement à l’état sauvage sur le territoire européen des États membres auquel le traité est applicable. Des régimes de protection couvrant uniquement des espèces figurant à l’annexe I de cette directive ou des espèces menacées à un niveau quelconque ou dont la population est en déclin à long terme ne répondent pas à ces exigences.

2)      L’interdiction de destruction ou de détérioration des sites de reproduction d’animaux figurant à l’annexe IV, sous a), prévue à l’article 12, paragraphe 1, sous d), de la directive 92/43/CEE du Conseil, du 21 mai 1992, concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages, telle que modifiée par la directive 2013/17/UE du Conseil, du 13 mai 2013, n’exige pas que l’état de conservation des populations de l’espèce concernée soit menacé par l’acte en cause. Un état de conservation favorable de l’espèce concernée n’affecte pas l’interdiction.

3)      Les interdictions de mise à mort et de destruction prévues à l’article 5, sous a) et b), de la directive 2009/147, telle que modifiée par la directive 2013/17, et à l’article 12, paragraphe 1, sous a) et c), de la directive 92/43, telle que modifiée par la directive 2013/17, ne supposent pas que la mesure en cause risque d’avoir une incidence négative sur l’état de conservation de chaque espèce animale. Un état de conservation favorable de l’espèce concernée n’affecte pas non plus cette interdiction.

Toutefois, lorsque l’atteinte aux oiseaux est non pas voulue, mais seulement acceptée, les interdictions prévues à l’article 5, sous a) et b), de la directive 2009/147, telle que modifiée par la directive 2013/17, ne s’appliquent que dans la mesure nécessaire pour maintenir ou rétablir les populations de ces espèces à un niveau qui corresponde notamment aux exigences écologiques, scientifiques et culturelles, au sens dudit article 2, tout en tenant compte des exigences économiques et récréationnelles.

4)      Conformément à l’article 5, sous d), de la directive 2009/147, telle que modifiée par la directive 2013/17, les perturbations doivent être interdites lorsqu’elles ont un effet significatif sur l’objectif de maintenir ou de rétablir un niveau satisfaisant des populations des espèces d’oiseaux et, notamment, lorsqu’elles nuisent aux oiseaux rares pendant la période de reproduction ou de dépendance.

L’interdiction de perturbation prévue à l’article 12, paragraphe 1, sous b), de la directive 92/43, telle que modifiée par la directive 2013/17, est limitée aux actes qui sont particulièrement susceptibles d’affecter l’état de conservation des espèces protégées, en particulier dans les lieux qui ont une importance particulière pour ces espèces et les lieux où celles‑ci subiraient des nuisances en période de reproduction, de dépendance, d’hivernage et de migration.

5)      Dans la mesure où l’application des interdictions prévues à l’article 5 de la directive 2009/147, telle que modifiée par la directive 2013/17, et à l’article 12, paragraphe 1, de la directive 92/43, telle que modifiée par la directive 2013/17, dépend de l’état de conservation des populations de l’espèce concernée, celle‑ci doit être évaluée par référence au territoire de l’État membre concerné ou, si les frontières de cet État membre se chevauchent avec plusieurs régions biogéographiques ou lorsque l’aire de répartition naturelle de l’espèce l’exige, par rapport à la région biogéographique concernée et, dans la mesure du possible, de manière transfrontalière.


1      Langue originale : l’allemand.


2      Directive 92/43/CEE du Conseil, du 21 mai 1992, concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages (JO 1992, L 206, p. 7), telle que modifiée par la directive 2013/17/UE du Conseil, du 13 mai 2013 (JO 2013, L 158, p. 193) (ci-après la « directive “habitats” »).


3      Directive 2009/147/CE du Parlement européen et du Conseil, du 30 novembre 2009, concernant la conservation des oiseaux sauvages (JO 2010, L 20, p. 7), telle que modifiée par la directive 2013/17/UE du Conseil, du 13 mai (JO 2013, L 158, p. 193) (ci-après la « directive “oiseaux” »).


4      Voir, en dernier lieu, arrêt du 11 juin 2020, Alianța pentru combaterea abuzurilor (C‑88/19, EU:C:2020:458).


5      Voir arrêts du 15 mai 2014, Briels e.a. (C‑521/12, EU:C:2014:330) ; du 21 juillet 2016, Orleans e.a. (C‑387/15 et C‑388/15, EU:C:2016:583) ; du 26 avril 2017, Commission/Allemagne (C‑142/16, EU:C:2017:301), et du 7 novembre 2018, Coöperatie Mobilisation for the Environment e.a. (C‑293/17 et C‑294/17, EU:C:2018:882).


6      Convention relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel de l’Europe, signée le 19 septembre 1979 à Berne (JO 1982, L 38, p. 3), ratifiée au nom de la Communauté européenne par la décision 82/72/CEE, du Conseil, du 3 décembre 1981 (JO 1982, L 38, p. 1) (ci-après la « convention de Berne »).


7      Directive du Parlement européen et du Conseil du 21 avril 2004 sur la responsabilité environnementale en ce qui concerne la prévention et la réparation des dommages environnementaux (JO 2004, L 143, p. 56), telle que modifiée par la directive 2013/30/UE du Parlement européen et du Conseil, du 12 juin 2013 (JO 2013, L 178, p. 66) (ci-après la « directive sur la responsabilité environnementale »).


8      https://nature-art12.eionet.europa.eu/article12/summary, consulté le 30 juillet 2020.


9      https://circabc.europa.eu/sd/a/fad548dd-b8e0-4cc0-ae2f-266eb603671a/SE_Annex%20I%20Article%2017%20National%20Summary.docx, p. 12, consulté le 30 juillet 2020.


10      Arrêts du 20 octobre 2005, Commission/Royaume‑Uni (C‑6/04, EU:C:2005:626, points 73 à 79) ; du 10 janvier 2006, Commission/Allemagne (C‑98/03, EU:C:2006:3, point 55), et du 2 juillet 2020, Magistrat der Stadt Wien (Grand hamster) (C‑477/19, EU:C:2020:517, point 49).


11      Arrêt du 10 octobre 2019, Luonnonsuojeluyhdistys Tapiola (C‑674/17, EU:C:2019:851).


12      Arrêts du 8 juillet 1987, Commission/Belgique (247/85, EU:C:1987:339, points 6 et 7) ; du 26 janvier 2012, Commission/Pologne (C‑192/11, non publié, EU:C:2012:44, point 33), et du 17 avril 2018, Commission/Pologne (Forêt de Białowieża) (C‑441/17, EU:C:2018:255, point 251).


13      Arrêts du 2 août 1993, Commission/Espagne (C‑355/90, EU:C:1993:331, point 15) ; du 13 juin 2002, Commission/Irlande (C‑117/00, EU:C:2002:366, point 15), et du 17 avril 2018, Commission/Pologne (Forêt de Białowieża) (C‑441/17, EU:C:2018:255, points 262 et 263).


14      Arrêts du 8 juillet 1987, Commission/Belgique (247/85, EU:C:1987:339, points 21 et 22), et du 27 avril 1988, Commission/France (252/85, EU:C:1988:202, points 10 et 11).


15      Arrêts du 27 avril 1988, Commission/France (252/85, EU:C:1988:202, point 15) ; du 12 juillet 2007, Commission/Autriche (C‑507/04, EU:C:2007:427, points 102 et 103), et du 26 janvier 2012, Commission/Pologne (C‑192/11, non publié, EU:C:2012:44, point 25).


16      Arrêt du 12 juillet 2007, Commission/Autriche (C‑507/04, EU:C:2007:427, points 332 et suiv.) ; voir également nos conclusions dans cette affaire (C‑507/04, EU:C:2007:8, points 119 et 120, ainsi que points 141 et 142).


17      Arrêt du 26 janvier 2012, Commission/Pologne (C‑192/11, non publié, EU:C:2012:44, point 63).


18      Arrêt du 21 juin 2018, Commission/Malte (C‑557/15, EU:C:2018:477).


19      Commission européenne, Document d’orientation sur la protection stricte des espèces animales d’intérêt communautaire en vertu de la directive « Habitats » 92/43/CEE (2007), chapitre 2, points 71 à 79 (p. 49 à 51 de la version en langue française).


20      Arrêts du 10 janvier 2006, Commission/Allemagne (C‑98/03, EU:C:2006:3, point 55), et du 2 juillet 2020, Magistrat der Stadt Wien (Grand hamster) (C‑477/19, EU:C:2020:517, point 27).


21      Arrêts du 9 juin 2011, Commission/France (C‑383/09, EU:C:2011:369, points 19 à 21) ; du 15 mars 2012, Commission/Chypre (C‑340/10, EU:C:2012:143, points 60 et 62) ; du 17 avril 2018, Commission/Pologne (Forêt de Białowieża) (C‑441/17, EU:C:2018:255, point 231), et du 2 juillet 2020, Magistrat der Stadt Wien (Grand hamster) (C‑477/19, EU:C:2020:517, point 20).


22      Arrêts du 30 janvier 2002, Commission/Grèce (C‑103/00, EU:C:2002:60, point 31) ; du 16 mars 2006, Commission/Grèce (C‑518/04, non publié, EU:C:2006:183, point 21), et du 10 novembre 2016, Commission/Grèce (C‑504/14, EU:C:2016:847, point 148).


23      Arrêt du 17 avril 2018, Commission/Pologne (Forêt de Białowieża) (C‑441/17, EU:C:2018:255, point 237).


24      Voir nos conclusions dans l’affaire Commission/Espagne (C‑221/04, EU:C:2005:777, points 49 et 50) et dans l’affaire Commission/Grèce (C‑504/14, EU:C:2016:105, point 126).


25      Arrêts du 18 mai 2006, Commission/Espagne (C‑221/04, EU:C:2006:329, point 71), et du 10 novembre 2016, Commission/Grèce (C‑504/14, EU:C:2016:847, point 159).


26      Arrêt du 18 mai 2006, Commission/Espagne (C‑221/04, EU:C:2006:329, points 72 et 73).


27      Arrêt du 10 novembre 2016, Commission/Grèce (C‑504/14, EU:C:2016:847, point 114, ainsi que points 157 et 158).


28      Arrêt du 30 janvier 2002, Commission/Grèce (C‑103/00, EU:C:2002:60, points 36 et 39).


29      Voir, cependant, concernant l’interdiction de perturbation, points 101 et suiv. des présentes conclusions.


30      Arrêt du 17 avril 2018, Commission/Pologne (Forêt de Białowieża) (C‑441/17, EU:C:2018:255, points 231, 237 et 238).


31      Arrêts du 27 avril 1988, Commission/France (252/85, EU:C:1988:202, point 28) ; du 16 octobre 2003, Ligue pour la protection des oiseaux e.a. (C‑182/02, EU:C:2003:558, point 17), et du 8 juin 2006, WWF Italia e.a. (C‑60/05, EU:C:2006:378, point 32).


32      Arrêt du 23 avril 2020, Commission/Finlande (Chasse printanière à l’eider à duvet mâle) (C‑217/19, EU:C:2020:291, point 84).


33      Rapport 1997‑1998 (article 9/2) – Convention relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel de l’Europe (présenté par la Commission), SEC(2001) 515 final.


34      Voir, concernant d’autres conventions internationales, arrêts du 24 novembre 1992, Poulsen et Diva Navigation (C‑286/90, EU:C:1992:453, point 9) ; du 3 septembre 2008, Kadi et Al Barakaat International Foundation/Conseil et Commission (C‑402/05 P et C‑415/05 P, EU:C:2008:461, point 291) ; du 21 décembre 2011, Air Transport Association of America e.a. (C‑366/10, EU:C:2011:864, point 123), et du 11 juillet 2018, Bosphorus Queen Shipping (C‑15/17, EU:C:2018:557, point 44).


35      Voir, cependant, concernant l’interdiction de perturbation, points 95 et suiv. des présentes conclusions.


36      Arrêt du 17 avril 2018, Commission/Pologne (Forêt de Białowieża) (C‑441/17, EU:C:2018:255, points 253 et 254).


37      Arrêt du 17 avril 2018, Commission/Pologne (Forêt de Białowieża) (C‑441/17, EU:C:2018:255, point 259).


38      Toutefois, Möckel, S., « 35 Jahre Europäische Vogelschutzrichtlinie », Natur und Recht, 2014, p. 381 (387), évoque à juste titre les chauves-souris, très répandues, dont les espèces relèvent toutes de la protection stricte de la directive « habitats ».


39      Voir nos conclusions dans l’affaire Commission/Espagne (C‑221/04, EU:C:2005:777, point 50).


40      Voir point 41 des présentes conclusions.


41      Voir Machtans, C., Wedeles, C., et Bayne, E., « A first estimate for Canada of the number of birds killed by colliding with building windows », Avian Conservation and Ecology, 8.2 (2013), p. 5.


42      Voir, notamment, Slater, F. M., « An assessment of wildlife road casualties – the potential discrepancy between numbers counted and numbers killed », Web Ecology, 3.1 (2002), p. 33.


43      Arrêt du 13 juin 2002, Commission/Irlande (C‑117/00, EU:C:2002:366, points 15 et suiv.).


44      Voir point 77 des présentes conclusions.


45      Arrêt du 17 avril 2018, Commission/Pologne (Forêt de Białowieża) (C‑441/17, EU:C:2018:255, point 18).


46      Voir nos conclusions dans l’affaire Tronex (C‑624/17, EU:C:2019:150, points 51 et 52, ainsi que jurisprudence citée).


47      Voir arrêts du 8 juillet 1987, Commission/Belgique (247/85, EU:C:1987:339, point 8), et Commission/Italie (262/85, EU:C:1987:340, point 8), ainsi que du 19 janvier 1994, Association pour la protection des animaux sauvages e.a. (C‑435/92, EU:C:1994:10, point 20).


48      Voir arrêts du 27 avril 1988, Commission/France (252/85, EU:C:1988:202, point 28) ; du 16 octobre 2003, Ligue pour la protection des oiseaux e.a. (C‑182/02, EU:C:2003:558, point 17), et du 23 avril 2020, Commission/Finlande (Chasse printanière à l’eider à duvet mâle) (C‑217/19, EU:C:2020:291, point 68), ainsi que conclusions de l’avocat général Geelhoed dans l’affaire WWF Italia e.a. (C‑60/05, EU:C:2006:116, point 50), et nos conclusions dans l’affaire Commission/Irlande (C‑418/04, EU:C:2006:569, points 111 et 112).


49      Arrêt du 17 avril 2018, Commission/Pologne (Forêt de Białowieża) (C‑441/17, EU:C:2018:255, points 251 et suiv.).


50      Voir document d’orientation de la Commission (cité en note 19 des présentes conclusions, chapitre 2, point 41, p. 39 de la version en langue française).


51      Cité en note 19 des présentes conclusions, chapitre 2, point 39 (p. 39 de la version en langue française).


52      Arrêt du 30 janvier 2002, Commission/Grèce (C‑103/00, EU:C:2002:60, point 17), et nos conclusions dans l’affaire Commission/Grèce (C‑504/14, EU:C:2016:105, points 1 et 13).


53      Arrêt du 16 mars 2006, Commission/Grèce (C‑518/04, non publié, EU:C:2006:183, point 15).


54      Arrêt du 15 mars 2012, Commission/Chypre (C‑340/10, EU:C:2012:143, points 16 et 18, ainsi que 63 et 65).


55      Arrêt du 10 octobre 2019, Luonnonsuojeluyhdistys Tapiola (C‑674/17, EU:C:2019:851, point 57).


56      Arrêt du 10 octobre 2019, Luonnonsuojeluyhdistys Tapiola (C‑674/17, EU:C:2019:851, point 58).


57      Arrêt du 10 octobre 2019, Luonnonsuojeluyhdistys Tapiola (C‑674/17, EU:C:2019:851, point 59).


58      Arrêt du 10 octobre 2019, Luonnonsuojeluyhdistys Tapiola (C‑674/17, EU:C:2019:851, point 61).