Language of document : ECLI:EU:T:2009:269

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

10 juillet 2009 (*)

« FEOGA – Section ‘Garantie’ – Dépenses exclues du financement communautaire – Tabac brut – Obligation de motivation – Article 7, paragraphe 4, du règlement (CE) n° 1258/1999 »

Dans l’affaire T‑373/05,

République italienne, représentée par M. G. Aiello, avvocato dello Stato,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par Mme C. Cattabriga et M. L. Visaggio, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation partielle de la décision 2005/579/CE de la Commission, du 20 juillet 2005, écartant du financement communautaire certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du Fonds européen d’orientation et de garantie agricole (FEOGA), section « Garantie » (JO L 199, p. 84), en ce qu’elle exclut certaines dépenses effectuées par la République italienne dans le secteur du tabac brut,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (troisième chambre),

composé de M. J. Azizi, président, Mme E. Cremona (rapporteur) et M. S. Frimodt Nielsen, juges,

greffier : M. J. Palacio González, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 2 décembre 2008,

rend le présent

Arrêt

 Cadre juridique

 Réglementation relative au financement de la politique agricole commune

1        La réglementation de base relative au financement de la politique agricole commune est constituée, en ce qui concerne les dépenses effectuées à partir du 1er janvier 2000, par le règlement (CE) n° 1258/1999 du Conseil, du 17 mai 1999, relatif au financement de la politique agricole commune (JO L 160, p. 103), qui a remplacé le règlement (CEE) n° 729/70 du Conseil, du 21 avril 1970, relatif au financement de la politique agricole commune (JO L 94, p. 13), qui était applicable aux dépenses effectuées avant ladite date.

2        En vertu de l’article 1er, paragraphe 2, sous b), et de l’article 2, paragraphe 2, du règlement n° 1258/1999, la section « Garantie » du Fonds européen d’orientation et de garantie agricole (FEOGA) finance, dans le cadre de l’organisation commune des marchés agricoles, les interventions destinées à la régularisation de ces marchés, entreprises selon les règles communautaires.

3        L’article 7, paragraphe 4, du même règlement dispose :

« La Commission décide des dépenses à écarter du financement communautaire […] lorsqu’elle constate que des dépenses n’ont pas été effectuées conformément aux règles communautaires.

Préalablement à toute décision de refus de financement, les résultats des vérifications de la Commission ainsi que les réponses de l’État membre concerné font l’objet de notifications écrites, à l’issue desquelles les deux parties tentent de parvenir à un accord sur les mesures à prendre.

À défaut d’accord, l’État membre peut demander l’ouverture d’une procédure visant à concilier les positions respectives dans un délai de quatre mois, dont les résultats font l’objet d’un rapport communiqué à la Commission et examiné par elle avant qu’elle ne se prononce sur un éventuel refus de financement.

La Commission évalue les montants à écarter au vu, notamment, de l’importance de la non-conformité constatée. La Commission tient compte de la nature et de la gravité de l’infraction, ainsi que du préjudice financier causé à la Communauté […] »

4        En vertu de l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 1258/1999, les États membres sont tenus de prendre, conformément aux dispositions législatives, réglementaires et administratives nationales, les mesures nécessaires pour s’assurer de la réalité et de la régularité des opérations financées par le FEOGA, prévenir et poursuivre les irrégularités et récupérer les sommes perdues à la suite d’irrégularités ou de négligences. En outre, les États membres doivent informer la Commission des Communautés européennes des mesures prises à ces fins, et notamment de l’état des procédures administratives et judiciaires. En application du paragraphe 2 de cet article, « [à] défaut de récupération totale, les conséquences financières des irrégularités ou des négligences sont supportées par la Communauté, sauf celles résultant d’irrégularités ou négligences imputables aux administrations ou autres organismes des États membres ».

5        Les modalités de la procédure d’apurement des comptes du FEOGA demeurent fixées par le règlement (CE) n° 1663/95 de la Commission, du 7 juillet 1995, établissant les modalités d’application du règlement n° 729/70 en ce qui concerne la procédure d’apurement des comptes du FEOGA, section « Garantie » (JO L 158, p. 6), tel qu’il a été modifié.

6        Le document de la Commission n° VI/5330/97, du 23 décembre 1997, intitulé « Orientations concernant le calcul des conséquences financières lors de la préparation de la décision d’apurement des comptes du FEOGA-Garantie » (ci‑après le « document n° VI/5330/97 ») prévoit qu’une correction forfaitaire de 2 %, de 5 %, de 10 % ou de 25 %, voire plus, en fonction de l’importance des manquements constatés dans la mise en œuvre des contrôles, pourra être appliquée aux dépenses déclarées par un État membre, lorsque les informations à la disposition de la Commission ne permettent pas d’évaluer les pertes subies par la Communauté européenne du fait desdits manquements.

7        En particulier, le document nº VI/5330/97 prévoit, notamment, une correction :

–        à hauteur de 10 % des dépenses, lorsqu’un ou plusieurs contrôles clés ne sont pas effectués ou sont si mal ou si rarement réalisés qu’ils sont inefficaces pour déterminer l’éligibilité d’une demande ou prévenir les irrégularités et qu’il est donc raisonnablement permis de penser qu’il existe un risque élevé de pertes importantes pour le FEOGA ;

–        à hauteur de 5 % des dépenses, lorsque tous les contrôles clés sont effectués, mais sans respecter le nombre, la fréquence ou la rigueur préconisés par les règlements et qu’il peut donc raisonnablement être conclu que ces contrôles n’offrent pas le niveau attendu de garantie de régularité des demandes et que le risque de pertes pour le FEOGA est significatif.

  Réglementation relative au secteur du tabac brut

8        L’organisation commune de marché dans le secteur du tabac brut était régie, au moment des faits, par le règlement (CEE) n° 2075/92 du Conseil, du 30 juin 1992, portant organisation commune de marché dans le secteur du tabac brut (JO L 215, p. 70), tel que modifié, ainsi que par le règlement (CE) nº 2848/98 de la Commission, du 22 décembre 1998, portant modalités d’application du règlement nº 2075/92 en ce qui concerne le régime de primes, les quotas de production et l’aide spécifique à octroyer aux groupements des producteurs dans le secteur du tabac brut (JO L 358, p. 17), tel que modifié.

9        La réglementation en vigueur comportait, notamment, un régime de prime visant à contribuer au revenu du producteur et des mesures de maîtrise de la production.

 Régime de prime

10      Dans le cadre du régime de prime, l’octroi de la prime aux producteurs de tabac brut était soumis à certaines conditions spécifiées à l’article 5 du règlement n° 2075/92, dont la conclusion d’un contrat de culture avec une entreprise de première transformation de tabac.

11      En vertu de l’article 9, paragraphe 3, du règlement n° 2848/98, dans sa version applicable à la présente affaire :

« Le contrat de culture doit comporter au moins les éléments suivants :

[…]

e)      le lieu exact où le tabac est produit (zone de production […], province, commune, identification de la parcelle sur la base du système de contrôle intégré […]) ;

f)      la superficie de la parcelle en cause, à l’exclusion des chemins de service et des enclos ;

[…]

l)      l’engagement du producteur à transplanter le tabac sur la parcelle en cause, au plus tard le 15 juin de l’année de la récolte. Toutefois, avant cette date, le groupement de producteurs ou tout producteur individuel non membre d’un groupement de producteurs doit communiquer par lettre recommandée au transformateur ainsi qu’à l’organisme compétent de l’État membre tout retard de transplantation en précisant la cause et, le cas échéant, le changement de la parcelle. »

12      Aux termes de l’article 10, paragraphes 1 et 2, du règlement n° 2848/98, les contrats de culture « doivent être conclus, sauf en cas de force majeure, au plus tard le 30 mai de l’année de la récolte » et « doivent être remis pour enregistrement à l’organisme compétent au plus tard dix jours après la date limite fixée pour leur conclusion ».

 Mesures de maîtrise de la production

13      Les mesures de maîtrise de la production consistaient essentiellement, en vertu de l’article 8 du règlement nº 2075/92, en la fixation d’un seuil de garantie global et maximal pour la Communauté et en la fixation de seuils de garantie spécifiques pour chaque État membre. Le respect de ces seuils était garanti par un régime de quotas de production distribués, en vertu de l’article 9, paragraphe 3, du règlement n° 2075/92, par les États membres aux producteurs. Le quota de production ainsi distribué à chaque producteur conditionnait le montant des aides que ce dernier pouvait percevoir en vertu du régime de prime.

 Contrôles et sanctions

14      Pour garantir le respect des dispositions relatives tant aux primes qu’aux mesures de maîtrise de la production, le titre VII du règlement nº 2848/98 prévoyait des obligations de contrôle précises pour les États membres ainsi qu’un système de sanctions pour les irrégularités constatées.

15      En particulier, aux termes de l’article 44, paragraphe 1, du règlement nº 2848/98, « les États membres instaurent un système de contrôle de façon à assurer la vérification efficace du respect des dispositions [des règlements n° 2075/92 et nº 2848/98] et prennent toutes les mesures supplémentaires nécessaires pour l’application de celles-ci ». En vertu du deuxième alinéa du paragraphe 1 du même article, ce système de contrôle comportait des contrôles administratifs, des contrôles sur place, des contrôles des livraisons du tabac en feuilles ainsi que des contrôles au stade de la première transformation et du conditionnement du tabac.

16      Aux termes de l’article 45, premier alinéa, du règlement nº 2848/98 :

« Les contrôles administratifs comprennent des contrôles croisés :

a)      relatifs aux parcelles déclarées en tabac et aussi avec la base de données prévue à l’article 2 du règlement (CEE) n° 3508/92 afin d’éviter tout double octroi injustifié d’aide au titre de la même récolte. La totalité des parcelles déclarées en tabac doit être assujettie à ces contrôles ;

[…] »

17      En vertu de l’article 46, paragraphe 1, sous a), du règlement nº 2848/98, les contrôles sur place, effectués de manière inopinée par les États membres après une analyse de risque, visent à vérifier les éléments figurant dans les contrats de culture, et notamment la superficie déclarée en tabac. La détermination de la superficie se fait par tout moyen approprié défini par l’autorité compétente et garantissant une exactitude de mesurage au moins équivalente à celle requise pour les mesurages officiels selon les dispositions nationales. Le paragraphe 3 du même article dispose que, « au cas où des visites sur place font apparaître des irrégularités significatives dans une zone de production ou partie de zone de production, les autorités compétentes effectuent des contrôles supplémentaires dans l’année en cours».

18      Les irrégularités constatées à l’occasion des contrôles effectués par les États membres doivent être sanctionnées par ceux-ci conformément à l’article 50 du règlement n° 2848/98, lequel, dans la version applicable au présent litige, énonce :

« 1. Si, lors du contrôle, il est constaté que le tabac n’a pas été transplanté sur la parcelle indiquée dans le contrat de culture au plus tard le 15 juin de l’année de la récolte, le producteur individuel perd :

a)      50 % de la prime pour la récolte en cours, si la transplantation est effectuée au plus tard le 30 juin suivant,

b)      tout droit à bénéficier de la prime pour la récolte en cours, si la transplantation est effectuée après le 30 juin suivant mais au plus tard le 30 juillet suivant.

Si le producteur individuel ne cultive pas de tabac ou si la transplantation est effectuée après le 30 juillet de l’année de récolte en cours, il perd tout droit à bénéficier de la prime pour la récolte en cours et à recevoir un quota de production pour la récolte suivante.

2. Si la superficie effectivement cultivée est inférieure de plus de 10 % par rapport à la superficie déclarée, la prime à verser au producteur concerné par la récolte en cours ainsi que le quota pour la récolte suivante seront réduits du double de la différence constatée.

2 bis. Sauf dans les cas d’application du paragraphe 2, si la parcelle où le tabac est produit est différente de la parcelle indiquée dans le contrat de culture enregistré, la prime à verser au producteur concerné par la récolte en cours est réduite de 5 %.

2 ter. Dans les cas d’application des sanctions visées aux paragraphes 1, 2 et 2 bis, lorsque le producteur individuel est membre d’un groupement de producteurs, l’aide spécifique du groupement de producteurs dont il est membre est réduite d’un montant égal à la moitié du montant de la réduction appliquée au producteur. Si lesdites sanctions sont appliquées pendant deux années consécutives, elles sont doublées à partir de la troisième année. »

19      Toutefois, aux termes du paragraphe 4, deuxième alinéa, de l’article 50 du règlement n° 2848/98, « les sanctions visées aux paragraphes 1 et 2 ne s’appliquent pas dans le cas où le producteur, ou le transformateur, a signalé par écrit aux organismes compétents les divergences avant la réalisation des contrôles et si, pour la détermination de la superficie, l’exploitant prouve qu’il s’est correctement basé sur des informations reconnues par l’autorité compétente pour déterminer la superficie de la parcelle en cause, à l’exclusion des chemins de service et des enclos ».

 Antécédents du litige

20      Du 22 au 26 janvier et le 8 février 2001, les services de la Commission ont procédé à une mission sur place afin de vérifier les contrôles effectués par les autorités italiennes pour garantir l’application des dispositions concernant l’organisation commune de marché dans le secteur du tabac brut (ci-après la « mission de contrôles sur place de 2001 »).

21      Par lettre du 9 août 2002 (AGR 19386), la Commission a communiqué les conclusions de cette mission aux autorités italiennes en soulevant certaines contestations concernant, notamment, les activités de contrôle des superficies dans le cadre de la campagne 2000 et, en particulier, l’application des sanctions prévues à l’article 50 du règlement nº 2848/98 ainsi que le contrôle et le respect des quotas de production.

22      Par note du 11 octobre 2002 (n° 1907), les autorités italiennes ont transmis aux services de la Commission leurs observations en joignant certains documents complémentaires, dont une liste nominative des producteurs sanctionnés pour les irrégularités constatées à l’occasion des contrôles effectués sur les superficies au titre de la campagne 2000.

23      Les réponses des autorités italiennes ayant été considérées comme insuffisantes par les services de la Commission, ces derniers, par lettre du 16 mai 2003 (AGR 1305), les ont convoquées à une réunion bilatérale, conformément à l’article 8, paragraphe 1, troisième alinéa, du règlement nº 1663/95.

24      Au cours de cette réunion bilatérale, le 5 juin 2003, dont le procès-verbal a été envoyé par note AGR 21396, du 5 août 2003, les services de la Commission ont, notamment, attiré l’attention sur certaines divergences constatées entre, d’une part, la liste nominative des producteurs qui, selon les autorités italiennes, avaient fait l’objet de sanctions pour irrégularités constatées à l’occasion des contrôles et, d’autre part, la liste des producteurs contrôlés, fournie par les autorités italiennes lors de la mission de contrôles sur place de 2001. Les services de la Commission ont donc invité les autorités italiennes à fournir des clarifications et des informations supplémentaires ainsi qu’à établir une cohérence entre ces deux documents.

25      En réponse à cette invitation, les autorités italiennes ont transmis, par note du 29 août 2003 (406/Dir), des informations et des éclaircissements complémentaires ainsi que, par courrier électronique, une seconde liste nominative de producteurs ayant fait l’objet de sanctions pour les irrégularités constatées à l’occasion des contrôles effectués sur les superficies au titre de la campagne 2000.

26      Toutefois, cette liste présentant, selon les services de la Commission, à nouveau des incohérences par rapport à la liste des producteurs contrôlés fournie par les autorités italiennes lors de la mission de contrôles sur place de 2001, ceux-ci, par lettre du 4 août 2004 (AGR 20667), ont fait part aux autorités italiennes du maintien de leur position et de leur intention de proposer une correction financière égale à 10 % des dépenses effectuées au titre de la campagne 2000 et déclarées par la République italienne en 2001 et en 2002.

27      Par lettre du 4 octobre 2004 (nº 329), les autorités italiennes ont saisi l’organe de conciliation en demandant l’ouverture de la procédure de conciliation selon les modalités prévues par la décision 94/442/CE de la Commission, du 1er juillet 1994, relative à la création d’une procédure de conciliation dans le cadre de l’apurement des comptes du FEOGA, section « Garantie » (JO L 182, p. 45). Dans ce contexte, en produisant une documentation complémentaire et des nouvelles informations détaillées, elles ont fait valoir que la législation communautaire avait été pleinement respectée.

28      En particulier, devant l’organe de conciliation, les autorités italiennes ont affirmé que, lors de la récolte de 2000, conformément au règlement n° 2848/1998, elles avaient effectué des contrôles sur place, de manière contradictoire, sur un échantillon de 2 165 producteurs. Pendant ces contrôles, elles auraient notamment relevé l’emplacement des cultures déclarées dans les contrats, procédé aux mesures qui y sont afférentes et, aussi, vérifié l’existence et la composition d’éventuelles autres parcelles de tabac mais non déclarées dans les contrats de culture. La comparaison entre les superficies déclarées et celles constatées, destinée à déterminer l’application de sanctions éventuelles, avait été effectuée de manière globale, au niveau de l’exploitation et non de la parcelle.

29      Selon les autorités italiennes, un premier traitement des informations recueillies lors des contrôles sur place, concernant uniquement les parcelles de tabac déclarées dans les contrats de culture des exploitations faisant partie de l’échantillon susmentionné, avait provisoirement permis de déterminer des sanctions d’importances diverses pour 507 producteurs (513 producteurs à la suite des corrections). Les autorités italiennes ont également indiqué que, l’éligibilité d’autres parcelles de tabac identifiées lors des contrôles sur place étant subordonnée à des opérations complexes telles que la vérification de la présence de ces parcelles dans d’autres déclarations de mise en culture, la vérification de l’existence de surdéclarations par rapport à la superficie cadastrale des parcelles constatées et l’analyse des titres de propriété des terrains, il avait fallu reporter à une période postérieure aux contrôles sur place la phase de vérification des conditions requises pour accueillir les demandes. En conséquence, un certain temps aurait été nécessaire pour déterminer l’ampleur des sanctions concernant la campagne en question.

30      Les autorités italiennes ont ensuite expliqué que, à l’issue de la phase provisoire décrite ci-dessus, elles avaient été saisies de 372 demandes de réexamen des sanctions (396 demandes de réexamen des sanctions à la suite des corrections). Une grande partie de ces demandes contenait des demandes d’application des dispositions de l’article 50, paragraphe 2 bis, du règlement n° 2848/98, au lieu des sanctions visées aux paragraphes 1 et 2 du même article. Au terme de l’instruction de ces 396 demandes de réexamen, le résultat était le suivant : dans 20 cas, les autorités italiennes avaient confirmé la sanction infligée précédemment ; dans 16 cas, elles avaient appliqué une sanction différente de celle infligée précédemment avec une pénalité inférieure à 100 %, mais supérieure à 5 % ; dans 300 cas, elles avaient mis en œuvre la pénalité de 5 % prévue par l’article 50, paragraphe 2 bis, du règlement n° 2848/98 ; dans 60 cas, elles avaient annulé la sanction infligée précédemment.

31      Les autorités italiennes ont également expliqué que, subséquemment, lorsque la sanction avait été confirmée ou remplacée par une pénalité supérieure à 5 %, ainsi que pour les producteurs qui n’avaient pas déposé de demande de réexamen, la prime versée et le quota attribué pour la campagne suivante avaient été réduits dans une proportion égale à la sanction infligée, tandis que pour les 300 producteurs pour lesquelles la sanction a été fixée à 5 %, la prime versée en fonction des quantités de tabac brut livrées au cours de la campagne 2000 avait été réduite de 5 %.

32      Le 30 mars 2005, l’organe de conciliation a rendu son rapport sur le dossier. Dans ce rapport, il a relevé que, au vu des informations nouvelles transmises par les autorités italiennes, il n’était pas possible de confirmer les conclusions initiales des services de la Commission selon lesquelles aucune sanction n’avait été imposée à la suite des contrôles exécutés ou que, tout au plus, des réductions de 5 % avaient été appliquées. Il a aussi indiqué qu’il y avait lieu de tenir compte du fait que les sanctions ne pouvaient être appliquées que dans le respect des exigences procédurales, incluant des voies de recours, et qu’il était conscient du fait que les autorités italiennes n’étaient pas en mesure de transmettre des informations définitives sur les sanctions mises en œuvre avant que les procédures qui y étaient relatives n’aient été menées à leur terme. Toutefois, il a signalé que, si certaines informations sur ce sujet semblaient avoir été fournies à deux occasions à la suite de la mission de contrôles sur place de 2001, il avait néanmoins quelques difficultés à comprendre pourquoi les autorités italiennes avaient différé la communication des informations les plus complètes jusqu’à la phase de la procédure de conciliation. Il a finalement conclu en invitant les services de la Commission à reconsidérer, sur la base des informations nouvelles à sa disposition, les raisons justifiant la correction envisagée et à adapter celle-ci en conséquence.

33      Par lettre du 4 mai 2005 (AGR 11278), les services de la Commission ont communiqué aux autorités italiennes leur position finale, laquelle a été intégralement reproduite dans le rapport de synthèse distribué aux délégations nationales et examiné par celles-ci au sein du comité de gestion du FEOGA.

34      Le 20 juillet 2005, la Commission a adopté la décision 2005/579/CE écartant du financement communautaire certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du FEOGA, section « Garantie » (JO L 199, p. 84, ci-après la « décision attaquée »), dans laquelle, en adhérant à la position de ses services exposée dans le rapport de synthèse, elle a appliqué à la République italienne une correction financière d’un montant de 16 568 665,50 euros, soit 5 % des dépenses déclarées en 2001 et en 2002 pour les primes octroyées dans le secteur du tabac brut au titre de la récolte 2000.

35      Les motifs de cette correction financière ont été résumés au point B.5.2 dudit rapport de synthèse auquel la décision attaquée fait référence. Il ressort de ce rapport, notamment de son point B.5.2.5, que, selon les services de la Commission, au cours de la procédure bilatérale, les autorités italiennes n’ont jamais présenté d’éléments de fait ou de droit susceptibles de répondre aux contestations formulées. En outre, les informations fournies à la suite de la réunion bilatérale du 5 juin 2003 n’ont pas été prises en considération parce qu’elles n’étaient pas cohérentes avec les données concernant le paiement de primes aux producteurs. Selon lesdits services, ce n’est qu’au cours de la procédure de conciliation que les autorités italiennes ont fourni des éléments indiquant qu’elles avaient donné suite aux contrôles effectués sur les superficies déclarées au titre de la récolte 2000.

36      Ensuite, les services de la Commission ont relevé qu’il résultait de ces dernières informations que les sanctions appliquées par les autorités italiennes à l’issue des contrôles effectués sur les superficies déclarées au titre de la récolte 2000 concernaient, dans la plupart des cas (300 sur 513), des irrégularités relatives à un changement de parcelle, pour lesquelles l’article 50 du règlement n° 2848/98 prévoyait une réduction de 5 % de la prime.

37      Toutefois, selon les services de la Commission, les résultats des contrôles effectués sur les superficies déclarées au titre de la récolte 2000, fournis par les autorités italiennes lors de la mission de contrôles sur place de 2001, n’avaient montré aucun changement de parcelle. En outre, premièrement, ce grand nombre d’irrégularités, concernant des changements de parcelle, aurait dû être relevé bien plus tôt, soit par le biais des contrôles administratifs croisés qui, selon l’article 45 du règlement nº 2848/98, devaient être effectués pour toutes les demandes de prime, soit, du moins, à l’occasion des contrôles sur place sur les superficies déclarées au titre de la récolte en question. Deuxièmement, conformément à l’article 9, paragraphe 3, sous l), du règlement nº 2848/98, tout changement de parcelle aurait dû être notifié à l’organisme compétent par lettre recommandée au plus tard le 15 juin de l’année de la récolte. L’échantillon pour le contrôle sur place devait par conséquent tenir compte d’éventuelles notifications, si bien que, au moment du contrôle, les changements de parcelle auraient déjà dû être pris en considération.

38      Compte tenu de ces éléments, les services de la Commission ont conclu que les informations fournies par les autorités italiennes lors de la procédure de conciliation ne suffisaient pas à prouver l’application systématique des sanctions prévues à l’article 50 du règlement nº 2848/98. Cependant, ils ne pouvaient pas écarter l’hypothèse selon laquelle, dans certains cas, les sanctions appliquées par les autorités italiennes correspondaient à des changements de parcelle qui n’avaient pas été identifiés au cours des contrôles sur place. Selon eux, les informations nouvelles avaient donc prouvé que certaines sanctions avaient été appliquées à l’issue des contrôles sur place, mais n’avaient pas démontré l’application systématique des sanctions prescrites par la législation.

39      Par ces motifs et compte tenu de l’invitation de l’organe de conciliation à réexaminer la correction financière proposée, les services de la Commission ont modifié leurs conclusions et ont donc décidé que, en l’espèce, les déficiences reprochées aux autorités italiennes justifiaient la correction financière de 5 % des dépenses effectuées au titre de la campagne 2000.

 Procédure et conclusions des parties

40      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 26 septembre 2005, la République italienne a introduit le présent recours.

41      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (troisième chambre) a décidé d’ouvrir la procédure orale et, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 64 de son règlement de procédure, a posé par écrit des questions aux parties, qui y ont déféré dans les délais impartis.

42      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal à l’audience du 2 décembre 2008.

43      La République italienne conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée en ce qui la concerne ;

–        condamner la Commission aux dépens.

44      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la République italienne aux dépens.

 En droit

45      Au soutien de son recours, la République italienne fait valoir deux moyens, le premier, tiré du défaut de motivation de la décision attaquée au regard de l’article 253 CE et, le second, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 4, du règlement n° 1258/1999.

 Sur le premier moyen, tiré du défaut de motivation de la décision attaquée

 Arguments des parties

46      La République italienne considère que la décision attaquée viole l’article 253 CE dans la mesure où elle ne comporte aucune motivation tant en fait qu’en droit afférente à la correction financière forfaitaire appliquée par la Commission. Elle ne mentionnerait aucune règle particulière dont la violation serait rapportée pour justifier la correction financière de 5 %. Elle ne comporterait aucune indication du raisonnement suivi par la Commission et elle n’expliquerait nullement les raisons pour lesquelles les informations complémentaires fournies par la République italienne ont été jugées insuffisantes pour justifier une révision intégrale de ladite correction financière.

47      La République italienne fait valoir que, d’après une jurisprudence constante, la motivation prescrite par l’article 253 CE doit être suffisante compte tenu de l’acte en cause et doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution dont émane l’acte de manière à permettre aux intéressés de connaître les raisons de la mesure adoptée et au juge d’exercer son contrôle. Or, la simple affirmation au considérant 4 de la décision attaquée, selon laquelle une partie des dépenses ne remplit pas les conditions posées par la législation communautaire serait trop générique pour constituer une base juridique valable pour la décision attaquée. Cela vaudrait également pour le rapport de synthèse de la Commission, auquel la décision attaquée renvoie, dans lequel il est indiqué que « certaines catégories de sanctions n’ont pas été appliquées avec la rigueur prescrite par la législation ». En effet, il ne serait pas possible de déterminer quelles infractions à la réglementation en vigueur ont été concrètement constatées et dans quelle mesure l’État membre aurait commis des erreurs dans l’application de cette réglementation.

48      Selon la République italienne, la Commission devait mentionner dans la décision attaquée les raisons qui l’ont amenée à procéder à son égard à une correction financière de 5 % des dépenses effectuées au titre de la campagne 2000. La décision attaquée ne comportant aucune indication de ce genre, la République italienne considère qu’elle est entachée d’une absence totale de motivation.

49      La Commission conclut au rejet des arguments de la République italienne.

 Appréciation du Tribunal

50      Selon une jurisprudence constante, la motivation exigée à l’article 253 CE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et faire apparaître d’une façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction communautaire d’exercer son contrôle. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 253 CE doit être appréciée au regard non seulement du libellé de cet acte, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir arrêt de la Cour du 7 septembre 2006, Espagne/Conseil, C‑310/04, Rec. p. I‑7285, point 57, et la jurisprudence citée).

51      Dans le contexte particulier de l’élaboration des décisions relatives à l’apurement des comptes du FEOGA, selon une jurisprudence bien établie, la motivation d’une décision doit être considérée comme suffisante dès lors que l’État destinataire a été étroitement associé au processus d’élaboration de cette décision et qu’il connaissait les raisons pour lesquelles la Commission estimait ne pas devoir mettre à la charge du FEOGA la somme litigieuse (voir arrêts de la Cour du 21 mars 2002, Espagne/Commission, C‑130/99, Rec. p. I‑3005, point 126, et du 14 avril 2005, Portugal/Commission, C‑335/03, Rec. p. I‑2955, point 84, et la jurisprudence citée).

52      À cet égard, il convient, d’abord, de relever que le point B.5.2 du rapport de synthèse, auquel la décision attaquée renvoie de façon explicite, indique clairement le raisonnement suivi par la Commission pour l’adoption de la décision attaquée. Ledit rapport contient un résumé détaillé de la procédure administrative qui s’est déroulée devant les services de la Commission ainsi que des différents griefs avancés à l’encontre de la République italienne pendant cette procédure. En particulier, ce rapport identifie spécifiquement les dispositions dont la violation a été reprochée aux autorités italiennes, la nature et la gravité de l’infraction reprochée, ainsi que le « risque financier très considérable » auquel le FEOGA a été exposé en conséquence des violations reprochées (voir, notamment, points B.5.2.1, B.5.2.3, B.5.2.4 et B.5.2.5 du rapport de synthèse).

53      Ainsi, contrairement à ce que prétend la République italienne, la décision attaquée, loin d’être entachée d’une absence totale de motivation, fait apparaître d’une façon claire et non équivoque les raisons qui ont amené la Commission à appliquer la correction financière de 5 % aux dépenses effectuées par la République italienne au titre de la campagne 2000 tout en permettant au Tribunal d’exercer son contrôle et à la République italienne de défendre ses droits.

54      Par ailleurs, il ressort du dossier que, dès sa première lettre aux autorités italiennes, la Commission a informé celles-ci des contestations sur lesquelles elle a ensuite fondé sa décision, à savoir celles concernant l’application des sanctions prévues par l’article 50 du règlement n° 2848/98 aux irrégularités constatées à l’occasion des contrôles effectués par les autorités italiennes. La Commission a ensuite réitéré ses objections tout au long de la procédure administrative, celle-ci ayant estimé, à plusieurs reprises, que les informations fournies par la République italienne étaient contradictoires et insuffisantes.

55      En effet, il ressort de la lettre AGR 19386, du 9 août 2002, que la Commission a explicitement affirmé que, « pour l’ensemble des irrégularités constatées, les autorités italiennes n’[avaient] pas présenté les preuves attestant l’application des sanctions prévues par le règlement […] n° 2848/98 et notamment par son article 50 ». Ces objections ont ensuite été examinées lors de la réunion bilatérale du 5 juin 2003, ainsi que cela ressort du procès-verbal de cette réunion. À la suite de cette réunion bilatérale, les services de la Commission ont également invité les autorités italiennes à fournir des clarifications et des informations complémentaires concernant, notamment, l’application des sanctions prévues par l’article 50 du règlement n° 2848/98. Dans la lettre AGR 20667, du 4 août 2004, lesdits services ont également affirmé qu’ils estimaient que les autorités italiennes n’avaient pas encore prouvé avoir donné suite aux contrôles effectués en infligeant les sanctions appropriées et que, par conséquent, ils envisageaient d’appliquer une correction financière de 10 %.

56      Par la suite, les objections des services de la Commission concernant l’application des sanctions prévues par l’article 50 du règlement n° 2848/98 ont été examinées dans le cadre de la procédure de conciliation. À la suite de cette procédure, en considération des nouvelles informations fournies par les autorités italiennes, les services de la Commission ont estimé nécessaire de réduire la portée de l’infraction reprochée. En effet, si lesdits services avaient initialement reproché aux autorités italiennes l’absence de preuve de l’application du régime des sanctions prévu par le règlement n° 2848/98 dans son intégralité, à la lumière de ces nouvelles informations, ils ont limité leur grief au défaut d’application systématique du régime des sanctions, ce qui justifiait l’imposition d’une correction financière de 5 % et non plus une correction financière de 10 % (voir point B.5.2.5 du rapport de synthèse). Enfin, les objections des services de la Commission ont été exposées en détail dans la position finale de la Commission contenue dans la lettre AGR 11278, du 4 mai 2005, reprise dans le rapport de synthèse, auquel la décision attaquée renvoie explicitement.

57      À la lumière de ces considérations, force est donc de constater que la République italienne a eu connaissance tout au long de la procédure administrative des raisons pour lesquelles la Commission estimait ne pas devoir mettre à la charge du FEOGA la somme litigieuse et que, par conséquent, la République italienne a été étroitement associée à l’élaboration de la décision attaquée.

58      En conclusion, eu égard à tout ce qui précède, il convient de rejeter le moyen tiré du défaut de motivation.

 Sur le second moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 4, du règlement n° 1258/1999.

 Arguments des parties

59      La République italienne considère que la décision attaquée a été adoptée en violation de l’article 7, paragraphe 4, du règlement n° 1258/1999.

60      D’une part, elle soutient que la Commission a violé cette disposition, dans la mesure où la décision attaquée n’identifierait pas les dépenses qui n’auraient pas été effectuées conformément à la législation communautaire, les dispositions communautaires qui auraient été violées, la nature et la gravité de l’infraction dont il lui a été fait grief ainsi que le préjudice financier causé à la Communauté.

61      D’autre part, elle fait valoir une violation de cette disposition, en ce que la décision attaquée apparaît comme intrinsèquement en contradiction avec la constatation du fait que les autorités italiennes auraient quand même fourni, pendant la procédure d’instruction, toutes les informations « dont la prétendue absence avait justifié que le pourcentage de la [correction] forfaitaire soit évalué initialement à 10 % ».

62      Dans la réplique, la République italienne explique que les arguments développés par la Commission à l’appui de la correction financière sont fondés sur des éléments de caractère fortement inductif qui tourneraient autour d’un unique argument, à savoir l’insuffisance des dernières informations que les autorités italiennes ont transmises pendant la procédure administrative. Il ressortirait tant du rapport de synthèse que du mémoire en défense que la Commission a estimé ces informations insuffisantes du fait de l’impossibilité d’expliquer le nombre élevé de réductions de 5 % de la prime appliquées aux producteurs pour des changements de parcelles lorsque les contrôles n’avaient révélé aucun changement de parcelle.

63      Toutefois, selon la République italienne, la Commission n’a pas produit d’éléments de preuve susceptibles d’étayer des doutes sérieux et raisonnables sur l’exactitude des contrôles effectués par les autorités nationales. La République italienne conteste l’élément factuel utilisé comme moyen de preuve par la Commission en ce que celui-ci serait dépourvu de tout fondement. À cet égard, elle produit un dossier qui reproduirait fidèlement les données reportées sur tous les procès-verbaux rédigés par les contrôleurs italiens et qui comprend les procès-verbaux concernant les cas d’application de la réduction de 5 % de la prime. L’analyse des données contenues dans ce dossier mettrait clairement en évidence que, pour les producteurs concernés, la parcelle sur laquelle le tabac avait été produit était différente, en totalité ou en partie, de celle qui figurait dans le contrat de culture. Ces producteurs auraient ainsi été sanctionnés, au sens de l’article 50, paragraphe 2 bis, du règlement n° 2848/98, par une réduction de 5 % de la prime. Sur la base de ces données, la République italienne réfute donc l’affirmation de la Commission selon laquelle, d’après les procès-verbaux, les contrôles n’avaient détecté aucun cas de changements de parcelles. Selon elle, les éléments de fait produits démontrent au contraire l’efficacité de ses contrôles.

64      La Commission fait valoir, à titre liminaire, que le premier et le second moyens avancés par la République italienne dans la requête, bien que présentés séparément, tendraient tous deux à contester la motivation de la décision attaquée. La République italienne n’ayant invoqué dans la requête que des violations de nature formelle, elle aurait donc renoncé à mettre en cause le fond de la décision attaquée. Par conséquent, les griefs relatifs au bien‑fondé de la correction financière appliquée soulevés par la République italienne dans la réplique constitueraient un moyen nouveau irrecevable au sens de l’article 48, paragraphe 2, du règlement de procédure. En tout état de cause, la Commission rejette, tant en fait qu’en droit, tous les arguments de la République italienne.

 Appréciation du Tribunal

65      En vertu d’une jurisprudence constante, il appartient à la Commission, aux fins de prouver l’existence d’une violation des règles de l’organisation commune des marchés agricoles, non de démontrer d’une façon exhaustive l’insuffisance des contrôles effectués par les administrations nationales ou l’irrégularité des chiffres transmis par elles, mais de présenter un élément de preuve du doute sérieux et raisonnable qu’elle éprouve à l’égard de ces contrôles ou de ces chiffres. Cet allégement de l’exigence de la preuve pour la Commission s’explique par le fait que c’est l’État membre qui est le mieux placé pour recueillir et vérifier les données nécessaires à l’apurement des comptes du FEOGA et auquel il incombe, en conséquence, de présenter la preuve la plus détaillée et complète de la réalité de ses contrôles ou de ses chiffres et, le cas échéant, de l’inexactitude des affirmations de la Commission (arrêts de la Cour du 11 janvier 2001, Grèce/Commission, C‑247/98, Rec. p. I‑1, points 7 à 9 ; du 6 mars 2001, Pays-Bas/Commission, C‑278/98, Rec. p. I‑1501, points 39 à 41, et du 19 juin 2003, Espagne/Commission, C‑329/00, Rec. p. I‑6103, point 68).

66      La Cour a par ailleurs itérativement jugé que l’État membre concerné, pour sa part, ne saurait infirmer les constatations de la Commission sans étayer ses propres allégations par des éléments établissant l’existence d’un système fiable et opérationnel de contrôle (voir arrêt de la Cour du 9 juin 2005, Espagne/Commission, C‑287/02, Rec. p. I‑5093, point 54, et la jurisprudence citée).

67      Dans la pratique de la Commission, confirmée par la jurisprudence, lorsqu’il n’est pas possible d’évaluer précisément les pertes subies par la Communauté, puisque les informations fournies par l’enquête ne permettent pas de les évaluer, à partir d’une extrapolation de ces pertes, par des moyens statistiques ou par référence à d’autres données vérifiables, une correction forfaitaire peut être envisagée (voir document n° VI/5330/97, p. 9, et arrêts de la Cour du 18 septembre 2003, Royaume‑Uni/Commission, C‑346/00, Rec. p. I‑9293, point 53, et du 24 avril 2008, Belgique/Commission, C‑418/06 P, non encore publié au Recueil, point 136).

68      En outre, selon la jurisprudence, la gestion du financement du FEOGA repose principalement sur les administrations nationales chargées de veiller à la stricte observation des règles communautaires. Par ailleurs, ce régime, fondé sur la confiance entre les autorités nationales et les autorités communautaires, ne comporte aucun contrôle systématique de la part de la Commission, que celle-ci serait d’ailleurs matériellement dans l’impossibilité d’assurer. Seul l’État membre est donc en mesure de connaître et de déterminer avec précision les données nécessaires à l’élaboration des comptes du FEOGA, la Commission ne jouissant pas de la proximité nécessaire pour obtenir les renseignements dont elle a besoin auprès des agents économiques (arrêts de la Cour du 1er octobre 1998, Irlande/Commission, C‑238/96, Rec. p. I‑5801, point 30 ; du 24 janvier 2002, France/Commission, C‑118/99, Rec. p. I‑747, point 37, et du 7 octobre 2004, Espagne/Commission, C‑153/01, Rec. p. I‑9009, point 133).

69      C’est à la lumière de ces principes qu’il y a lieu d’analyser les différents griefs avancés par la République italienne à l’encontre de la décision attaquée dans le cadre de son second moyen.

70      En premier lieu, la République italienne fait valoir que la Commission a violé l’article 7, paragraphe 4, du règlement n° 1258/1999 en ce que la décision attaquée n’aurait pas identifié les dispositions communautaires qui auraient été violées, la nature et la gravité de l’infraction et le préjudice financier causé à la Communauté. À cet égard, il convient de rappeler que l’article 7, paragraphe 4, du règlement n° 1258/1999 prévoit explicitement que, pour évaluer le montant des dépenses à écarter en raison de leur non‑conformité aux règles communautaires, la Commission doit tenir compte de la nature et de la gravité de l’infraction ainsi que du préjudice financier causé à la Communauté.

71      Or, force est de constater qu’il ressort du dossier de la procédure administrative non seulement que la Commission a effectivement identifié les dispositions communautaires qui avaient été violées, mais également qu’elle a pris en considération, dans l’évaluation de la correction financière à appliquer, tant la nature et la gravité de l’infraction reprochée que le préjudice financier causé à la Communauté (voir, notamment, points B.5.2.1, B.5.2.3, B.5.2.4 et B.5.2.5 du rapport de synthèse). La République italienne ne saurait donc invoquer à cet égard une violation de l’article 7, paragraphe 4, du règlement n° 1258/1999 de la part de la Commission. En outre, sans préjudice des considérations qui suivent, il y a lieu de relever que la République italienne n’a pas contesté l’analyse de la Commission concernant la nature et la gravité de l’infraction reprochée et le préjudice financier causé à la Communauté, mais elle s’est bornée à faire valoir que la décision attaquée « ne comport[ait] ni l’une ni l’autre de ces informations ». Au vu de ce qui précède, il y a lieu de rejeter ce grief.

72      En deuxième lieu, en ce qui concerne le grief tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 4, du règlement n° 1258/1999 en raison de l’absence d’identification dans la décision attaquée des dépenses qui n’auraient pas été effectuées conformément à la législation communautaire, il ressort du dossier que les informations discordantes fournies par la République italienne au cours de la procédure administrative (à cet égard, voir spécifiquement points 78 à 81 ci-dessous) ne permettaient pas, en l’espèce, à la Commission de constater avec certitude dans quels cas la République italienne avait appliqué la sanction appropriée et dans quels cas elle ne l’avait pas fait.

73      Ainsi, dans le rapport de synthèse, la Commission a affirmé que, si les éléments avancés par les autorités italiennes au cours de la procédure administrative ne permettaient pas de confirmer une application systématique des sanctions prévues par la réglementation pertinente, elle ne pouvait toutefois pas « exclure l’hypothèse que, dans certains cas, les sanctions appliquées par [la République italienne] correspond[ai]ent effectivement aux changements de parcelle qui n’avaient pas été relevés au moment des contrôles sur place » (voir point B.5.2.5 du rapport de synthèse).

74      Partant, la Commission n’était pas en mesure d’identifier précisément les dépenses qui n’avaient pas été effectuées conformément à la législation communautaire ni, par conséquent, d’évaluer précisément les pertes subies par la Communauté. C’est justement pour cette raison qu’elle a décidé, conformément à la jurisprudence citée au point 67 ci-dessus, d’appliquer une correction financière calculée sur une base forfaitaire. Il s’ensuit que la République italienne ne saurait reprocher à la Commission de n’avoir pas identifié les dépenses qui n’avaient pas été effectuées conformément à la législation communautaire et que, dès lors, ses arguments à cet égard doivent également être rejetés.

75      En troisième lieu, en ce qui concerne les griefs concernant le fondement de l’analyse de la Commission en l’espèce, il y a lieu de vérifier, conformément à la jurisprudence mentionnée aux points 65 et 66 ci-dessus, tout d’abord, si la Commission pouvait légitimement nourrir des doutes sérieux et raisonnables au regard de l’application systématique par les autorités italiennes des sanctions prévues par le règlement n° 2848/98 et, ensuite, si le gouvernement italien a démontré l’inexactitude des appréciations de la Commission.

76      S’agissant des doutes éprouvés par la Commission à l’égard des contrôles effectués par les autorités italiennes, il convient de rappeler que, à la suite des informations fournies pendant la procédure de conciliation, les doutes que les services de la Commission nourrissaient quant à l’application systématique par les autorités italiennes des sanctions prévues par le règlement n° 2848/98 se fondaient, en substance, sur la constatation qu’il n’y avait pas eu d’explication pour le nombre très élevé de réductions de 5 % de la prime qui ont été appliquées aux producteurs pour des changements de parcelles, alors que les résultats des contrôles sur place effectués par les autorités italiennes pour la campagne 2000, fournie par les autorités italiennes lors de la mission de contrôles sur place de 2001, n’avaient mis en évidence aucun cas de changement de parcelle. En outre, d’une part, vu leur nombre élevé, ces changements de parcelles auraient dû, selon la Commission, apparaître à un stade bien antérieur de la procédure de contrôle, à savoir au cours des contrôles administratifs croisés, qui, en vertu de l’article 45, sous a), du règlement n° 2848/98, devaient être effectués, par le biais du système de contrôle intégré, sur la totalité des parcelles faisant l’objet d’une demande de prime, même avant l’exécution des contrôles sur place. D’autre part, si les changements de parcelle avaient été effectivement dûment notifiés aux autorités compétentes au sens de l’article 9, paragraphe 3, sous l), du règlement n° 2848/98, alors lesdits changements auraient dû être déjà pris en considération lors de la sélection de l’échantillon de producteurs à soumettre au contrôle sur place (voir point B.5.2.5 du rapport de synthèse).

77      Toutefois, la République italienne conteste l’affirmation de la Commission selon laquelle les contrôles sur place n’avaient permis de détecter aucun cas de changements de parcelles. Il convient donc de vérifier si, eu égard aux informations fournies par les autorités italiennes au cours de la procédure administrative, la Commission pouvait légitimement considérer que les contrôles sur place n’avaient permis de détecter aucun cas de changements de parcelles.

78      À cet égard, il y a lieu, d’abord, de relever qu’il ne ressort aucunement de la première liste des producteurs sanctionnés, fournie par les autorités italiennes lors de la mission de contrôles sur place de 2001, que les contrôles sur place effectués par les autorités italiennes avaient permis de détecter des changements de parcelle. Bien au contraire, l’analyse de cette liste amène plutôt à conclure que les contrôles sur place n’avaient pas permis de détecter de changements de parcelle du fait qu’aucun producteur n’avait initialement été sanctionné avec la réduction de 5 % de la prime, sanction prévue par l’article 50, paragraphe 2 bis, du règlement n° 2848/98 pour le cas de changement de parcelle.

79      Ensuite, il convient d’observer que, tant dans la deuxième liste des producteurs sanctionnés, jointe à la lettre n° 1907, du 11 octobre 2002, que dans la troisième liste des producteurs sanctionnés jointe à la note 406/Dir, du 29 août 2003, il apparaît que les autorités italiennes ont appliqué la sanction prévue pour le cas de changement de parcelle à de nombreux producteurs. Cependant, ces documents ne contenaient aucune explication quant aux contradictions existant entre ces listes en ce qui concerne les sanctions appliquées. En effet, alors que la première liste ne mentionnait aucune sanction consistant en une réduction de 5 % de la prime, les deuxième et troisième listes mentionnaient que les sanctions bien plus lourdes appliquées à un certain nombre de producteurs avaient été remplacées par une sanction consistant en une réduction de 5 % de la prime prise en application de l’article 50, paragraphe 2 bis, du règlement n° 2848/98.

80      Ce n’est que dans la lettre n° 329, du 4 octobre 2004, par le biais de laquelle les autorités italiennes ont saisi l’organe de conciliation, que celles-ci ont donné une explication plus détaillée et circonstanciée au regard des informations fournies au cours de la procédure administrative. Cependant, force est de constater que, même dans cette lettre, les autorités italiennes n’ont pas donné d’explication pour lesdites réductions des sanctions.

81      À la lumière de ces considérations, il y a donc lieu de conclure que, sur la base des informations contradictoires fournies par les autorités italiennes au cours de la procédure administrative, les services de la Commission ne pouvaient pas être en mesure de conclure définitivement sur la question de savoir si les contrôles sur place effectués par lesdites autorités avaient ou non détecté des changements de parcelle. En effet, les autorités italiennes avaient, dans un grand nombre de cas, modifié la sanction imposée, en appliquant la sanction moins grave prévue à l’article 50, paragraphe 2 bis du règlement n° 2848/98, sans fournir toutefois d’explication pour ces modifications. Les services de la Commission pouvaient donc, sur la base des informations disponibles, nourrir des doutes sérieux et raisonnables à l’égard de l’application systématique par les autorités italiennes des sanctions prévues par le règlement n° 2848/98.

82      Afin de démontrer l’inexactitude des appréciations de la Commission, la République italienne a produit en annexe à la réplique un dossier contenant les extraits de tous les procès‑verbaux rédigés par les autorités italiennes lors des contrôles sur place dans les cas d’application de la réduction de 5 % de la prime en application de l’article 50, paragraphe 2 bis du règlement n° 2848/98. Il ressortirait de ce dossier que, dans lesdits cas, la parcelle sur laquelle la culture de tabac avait été constatée, aurait été différente, totalement ou partiellement, de celle figurant dans le contrat de culture et que, par conséquent, les autorités italiennes auraient à bon droit appliqué dans ces cas la sanction prévue par l’article 50, au paragraphe 2 bis, du règlement n° 2848/98.

83      Il y a toutefois lieu de constater que ce dossier ne contient pas les procès‑verbaux rédigés par les contrôleurs lors des contrôles sur place, mais seulement un tableau daté du mois de septembre 2004 – à savoir plus de trois ans après la réalisation desdits contrôles sur place – qui contient un résumé, premièrement, des déclarations du producteur, deuxièmement, des résultats des contrôles sur place et, troisièmement, de la conclusion tirée par les autorités italiennes après le réexamen de la situation à la suite des recours introduits par les producteurs concernés. En outre, dudit dossier ne ressortent ni la nature, l’objet ou la portée de ce réexamen ni les nouvelles constatations ou analyses sur la base desquelles les autorités italiennes ont décidé de réduire les sanctions initialement appliquées aux producteurs en question.

84      En réponse aux questions du Tribunal lors de l’audience, la République italienne a finalement apporté des clarifications sur la façon dont les autorités italiennes ont effectué les contrôles pour la campagne 2000. En substance, elle a affirmé que, à la suite des contrôles sur place, les autorités italiennes avaient effectué un premier traitement provisoire des informations recueillies lors desdits contrôles. Ce premier traitement aurait concerné uniquement les parcelles indiquées dans les contrats de culture. D’autres parcelles sur lesquelles de la culture de tabac avait éventuellement été détectée, mais qui n’avaient pas été déclarées dans les contrats de culture, n’auraient pas fait l’objet de ce premier traitement. À l’issue de ce premier traitement, des sanctions auraient été déterminées. Toutefois, dans la mesure où ces sanctions ne tenaient compte que de ce premier traitement provisoire des informations, les cas de changements de parcelle n’auraient pas été considérés lors de cette première phase. Par conséquent, en attente des analyses supplémentaires, les autorités italiennes auraient décidé, par prudence, d’infliger initialement la sanction maximale.

85      Ce ne serait que, consécutivement à un second traitement des informations recueillies lors des contrôles sur place, à la suite de demandes de réexamen des sanctions présentées par les producteurs sanctionnés que les cas de changements de parcelle auraient été pris en considération pour la détermination des sanctions. Lors de ce second traitement, il aurait été tenu compte des parcelles qui n’avaient pas été déclarées dans les contrats de culture, mais sur lesquelles les contrôleurs avaient décelé de la culture de tabac lors des contrôles sur place. Ce réexamen aurait comporté des opérations complexes telles que la vérification de la présence de ces parcelles dans d’autres déclarations de mise en culture, la vérification de l’existence de surdéclarations par rapport à la superficie cadastrale des parcelles constatées ou l’analyse des titres de propriété des terrains. Enfin, à l’issue de ce second traitement, des sanctions définitives, y compris celles prévues par l’article 50, paragraphe 2 bis, du règlement n° 2848/98, auraient été appliquées.

86      À cet égard, il y a lieu de constater que, même après ces explications, le dossier produit en annexe à la réplique ne constitue pas une preuve détaillé et complète, telle que requise par la jurisprudence, de l’existence d’un système fiable et opérationnel de contrôle et n’est ainsi pas en mesure de dissiper définitivement les doutes exprimés par la Commission. En effet, le Tribunal considère que la procédure suivie par les autorités italiennes en l’espèce, telle que décrite par la République italienne lors de l’audience, présente des anomalies susceptibles de laisser subsister des doutes quant à une application systématique des sanctions prévues par le règlement n° 2848/98.

87      Il convient d’abord de relever que la République italienne a affirmé dans sa réponse aux questions écrites du Tribunal que les autorités italiennes ont effectué un contrôle unique auprès de tous les producteurs. Elle a donc confirmé que lesdites autorités n’ont pas effectué d’autres contrôles auprès desdits producteurs qui leur auraient donné, éventuellement, la possibilité de modifier leurs constatations initiales. Or, selon la procédure suivie, telle que décrite par la République italienne lors de l’audience, bien que ces contrôles uniques aient initialement permis de détecter plusieurs cas de changements de parcelles chez de nombreux producteurs, les autorités italiennes auraient quand même décidé d’appliquer initialement une sanction beaucoup plus lourde que celle prévue pour le cas de changement de parcelle. Ces autorités auraient ensuite attendu que les producteurs concernés introduisent des demandes de réexamen avant de déterminer la sanction définitive. Force est donc de constater que, ce faisant, les autorités italiennes n’ont pas tenu compte, dans la détermination initiale de la sanction, de certaines données essentielles qui étaient pourtant déjà à leur disposition, à savoir les constatations de changement des parcelles résultant des contrôles sur place. La République italienne n’a pas fourni d’explication convaincante pour cette façon d’agir.

88      En outre, et plus précisément, s’il n’y a pas eu plusieurs contrôles sur place successifs, les contrôleurs, lors du contrôle unique auprès de chaque producteur, auraient dû avoir déjà constaté non seulement qu’il y avait de la culture de tabac dans une ou plusieurs autres parcelles non déclarées, mais aussi que dans ces parcelles non déclarées la quantité de tabac cultivée était exactement égale à la différence constatée entre la quantité de tabac déclarée et la quantité de tabac cultivée sur la parcelle déclarée. Or, si cela avait déjà été constaté lors des contrôles sur place, ce qui devrait être le cas selon la version des faits offerte par la République italienne lors de l’audience, force est de constater que, lors de la détermination initiale de la sanction, les autorités italiennes disposaient déjà d’informations extrêmement précises. Par conséquent, l’approche prétendument suivie par les autorités italiennes consistant en l’imposition aux cas de changements de parcelle d’une sanction initiale nettement plus lourde apparaît encore moins vraisemblable.

89      En tout état de cause, force est de constater que la République italienne n’a fourni aucunement la preuve de la façon de procéder qu’elle a exposée à l’audience. Au vu des considérations exposées au point 83 ci‑dessus, le dossier produit en annexe à la réplique ne permet pas d’étayer à suffisance de droit la réalité de la procédure suivie par les autorités italiennes en l’espèce, telle que décrite par la République italienne lors de l’audience. À cet égard, il convient en outre de relever que, à la suite d’une question écrite spécifique du Tribunal, la République italienne a soutenu avoir produit ce dossier pendant la procédure administrative, ce qui a été contesté à l’audience par la Commission. Or, la République italienne n’a nullement prouvé ses allégations à cet égard. Il y a également lieu de relever que la République italienne n’a jamais produit ni pendant la procédure administrative ni devant le Tribunal les copies des procès-verbaux des contrôles sur place effectués par les contrôleurs. Ces documents auraient pourtant permis d’avoir des informations plus précises sur les résultats effectifs desdits contrôles sur place.

90      Par ailleurs, ainsi que le fait valoir la Commission, la République italienne n’a nullement expliqué pourquoi la procédure suivie par les autorités italiennes en l’espèce, telle qu’elle l’a décrite lors de l’audience, n’a pas été communiquée aux services de la Commission lors de la mission de contrôles sur place de 2001 ou, au moins, au cours de la procédure administrative. Or, une telle communication incombait aux autorités italiennes en vertu de l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 1258/1999.

91      Enfin, il y a lieu aussi de constater que la République italienne n’a pas contesté les autres considérations sur lesquelles se fondaient les doutes de la Commission, à savoir, d’une part, la circonstance que les changements des parcelles auraient dû, du moins partiellement, apparaître au stade des contrôles administratifs croisés prévus par l’article 45, sous a), du règlement n° 2848/98 et, d’autre part, la circonstance que lesdits changements des parcelles auraient dû être notifiés au sens de l’article 9, paragraphe 3, sous l), du règlement n° 2848/98 (voir point 76 ci‑dessus). À cet égard il convient de relever que, selon la jurisprudence, les contrôles administratifs précèdent les inspections sur place et doivent être effectués de manière à permettre aux autorités nationales de tirer toutes les conclusions possibles, certitudes ou doutes, quant au respect des conditions de l’octroi des aides et primes (arrêt de la Cour du 14 avril 2005, Espagne/Commission, C‑468/02, non publié au Recueil, point 40 ; voir également, en ce sens, arrêt de la Cour du 3 octobre 1996, Allemagne/Commission, C‑41/94, Rec. p. I‑4733, point 17).

92      Il y a donc lieu de conclure que la République italienne n’a pas présenté la preuve détaillée et complète de l’absence de fondement des doutes sérieux et raisonnables que la Commission éprouvait à l’égard de l’application systématique du régime des sanctions prévu par le règlement n° 2848/98. À la lumière de ces considérations, le second moyen doit être rejeté.

93      Eu égard à tout ce qui précède, il y a lieu de rejeter le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

94      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La République italienne ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      La République italienne est condamnée aux dépens.

Azizi

Cremona

Frimodt Nielsen

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 10 juillet 2009.

Table des matières


Cadre juridique

Réglementation relative au financement de la politique agricole commune

Réglementation relative au secteur du tabac brut

Régime de prime

Mesures de maîtrise de la production

Contrôles et sanctions

Antécédents du litige

Procédure et conclusions des parties

En droit

Sur le premier moyen, tiré du défaut de motivation de la décision attaquée

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

Sur le second moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 4, du règlement n° 1258/1999.

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

Sur les dépens


* Langue de procédure : l’italien.