Language of document : ECLI:EU:T:2023:859

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

20 décembre 2023 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne figurative WINE TALES RACCONTI DI VINO – Marque de l’Union européenne figurative antérieure WINE TALES – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑655/22,

Torre Oria, SL, établie à Derramador-Requena (Espagne), représentée par Mes A. González López-Menchero et V. Valero Piña, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par MM. A. Ringelhann et T. Klee, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

les autres parties à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Simone Giramondi, demeurant à Milan (Italie),

Damiano Antonelli, demeurant à Vignate (Italie),

représentés par Mes A. Parassina et A. Giovannardi, avocates,

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de MM. A. Kornezov, président, D. Petrlík et K. Kecsmár (rapporteur), juges,

greffier : M. V. Di Bucci,

vu la phase écrite de la procédure, notamment :

–        la mesure d’organisation de la procédure du 4 juillet 2023,

–        la réponse de la requérante déposée au greffe du Tribunal le 5 juillet 2023,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Torre Oria, SL, demande l’annulation partielle de la décision de la cinquième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 16 août 2022 (affaire R 822/2022‑5) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 11 février 2020, les parties intervenantes, MM. Simone Giramondi et Damiano Antonelli, ont présenté à l’EUIPO une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne pour le signe figuratif suivant :

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3        La marque demandée désignait les produits et services relevant des classes 21, 25, 33, 35, et 41 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 21 : « Tire-bouchons, électriques et non électriques » ;

–        classe 25 : « Vêtements ; chaussures ; chapellerie ; parties de vêtements, articles chaussants et articles de chapellerie » ;

–        classe 33 : « Boissons alcoolisées à l’exception des bières ; préparations alcooliques pour la fabrication de boissons » ;

–        classe 35 : « Publicité ; services de gestion commerciale ; administration commerciale ; services de tâches bureautiques (travaux de bureau) » ;

–        classe 41 : « Enseignement ; formation ; services de divertissement ; activités sportives et culturelles ».

4        Le 7 mai 2020, la requérante a formé opposition à l’enregistrement de la marque demandée pour une partie des produits et des services visés au point 3 ci-dessus, à savoir ceux relevant des classes 33 et 35.

5        L’opposition était fondée sur la marque de l’Union européenne figurative antérieure no 18154404 enregistrée le 1er octobre 2020 pour les produits suivants relevant de la classe 33 : « Vins ; vins effervescents » telle que reproduite ci-après : 

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6        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1).

7        Le 17 mars 2022, la division d’opposition a partiellement fait droit à l’opposition pour les « boissons alcoolisées à l’exception des bières » comprises dans la classe 33, au motif qu’il existait un risque de confusion. L’opposition a été rejetée à l’égard des autres produits et services relevant des classes 33 et 35.

8        Le 13 mai 2022, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’opposition.

9        Par la décision attaquée, la chambre de recours a partiellement annulé la décision de la division d’opposition dans la mesure où l’opposition avait été rejetée pour des « préparations alcooliques pour la fabrication de boissons » comprises dans la classe 33, au motif qu’il existait un risque de confusion en ce qui concerne ces produits. Concernant les services de « publicité ; services de gestion commerciale ; administration commerciale ; services de tâches bureautiques (travaux de bureau) » compris dans la classe 35, la chambre de recours a confirmé la décision de la division d’opposition.

 Conclusions des parties 

10      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler partiellement la décision attaquée, dans la mesure où l’opposition a été rejetée pour les services compris dans la classe 35 ;

–        rejeter la demande d’enregistrement de la marque demandée pour les services désignés relevant de la classe 35 ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

11      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens si une audience était organisée.

12      Les parties intervenantes concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme étant non fondé ;

–        confirmer la décision attaquée ;

–        autoriser l’enregistrement de la marque demandée pour les services relevant de la classe 35 ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit 

 Sur la compétence du Tribunal pour connaître de certains chefs de conclusions

13      Par son deuxième chef de conclusions, la requérante demande au Tribunal de rejeter la demande d’enregistrement de la marque de l’Union européenne sollicitée pour les services désignés relevant de la classe 35.

14      De même, les parties intervenantes concluent à ce qu’il plaise au Tribunal autoriser l’enregistrement de la marque demandée pour la classe 35, ainsi que cela avait été demandé devant l’EUIPO en date du 11 février 2020.

15      Ces chefs de conclusions peuvent être compris comme visant à ce que le Tribunal réforme la décision attaquée, au sens de l’article 72, paragraphe 3, du règlement 2017/1001, en adoptant la décision que la chambre de recours aurait dû prendre, conformément aux dispositions dudit règlement.

16      Or, la chambre de recours ne peut être amenée à se prononcer que sur certaines des conditions d’enregistrement de la marque de l’Union européenne, à savoir soit sur la conformité de la demande d’enregistrement aux dispositions dudit règlement, soit sur le sort de l’opposition dont celle-ci peut faire l’objet. Dès lors, la chambre de recours n’est pas compétente pour connaître d’une demande visant à ce qu’elle refuse ou autorise l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne. Dans ces circonstances, il n’appartient pas davantage au Tribunal de connaître d’une demande de réformation visant à ce qu’il modifie la décision d’une chambre de recours en ce sens [voir, en ce sens, arrêts du 12 avril 2011, Euro-Information/OHMI (EURO AUTOMATIC PAYMENT), T‑28/10, EU:T:2011:158, point 13 et jurisprudence citée, et du 7 juin 2023, Laboratorios Ern/EUIPO – BRM Extremities (BIOPLAN), T‑543/22, non publié, EU:T:2023:320, points 13 et 14 et jurisprudence citée].

17      Dans ces conditions, il y a lieu de rejeter le deuxième chef de conclusions de la requérante et le troisième chef de conclusions des parties intervenantes pour cause d’incompétence.

18      Les parties intervenantes sollicitent également, par leur deuxième chef de conclusions, la confirmation de la décision attaquée.

19      Or, étant donné que « confirmer » la décision attaquée équivaut à rejeter le recours, il y a lieu d’appréhender le deuxième chef de conclusions des parties intervenantes comme tendant, en substance, au rejet du recours [voir arrêt du 13 décembre 2016, Apax Partners/EUIPO – Apax Partners Midmarket (APAX), T‑58/16, non publié, EU:T:2016:724, point 15 et jurisprudence citée].

 Sur le fond

 Sur la recevabilité des preuves nouvelles au regard de la procédure précontentieuse

20      L’EUIPO relève que les preuves produites dans l’annexe A.6 de la requête, ainsi que les deux captures d’écran du site Internet des parties intervenantes représentées aux pages 5 et 6 de la requête, n’ont pas été déposées dans le cadre de la procédure devant l’EUIPO et, donc, ont été présentés pour la première fois devant le Tribunal. Ces éléments seraient dès lors irrecevables.

21      À cet égard, il convient de relever qu’un recours porté devant le Tribunal en vertu de l’article 72, paragraphe 2, du règlement 2017/1001 vise au contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours. Dans le cadre dudit règlement, en application de son article 95, ce contrôle doit se faire au regard du cadre factuel et juridique du litige tel qu’il a été porté devant la chambre de recours [voir arrêt du 1er février 2005, SPAG/OHMI – Dann et Backer (HOOLIGAN), T‑57/03, EU:T:2005:29, point 17 et jurisprudence citée]. Il s’ensuit que le Tribunal ne saurait annuler ou réformer la décision objet du recours pour des motifs qui apparaîtraient postérieurement à son prononcé (arrêts du 11 mai 2006, Sunrider/OHMI, C‑416/04 P, EU:C:2006:310, point 55, et du 13 mars 2007, OHMI/Kaul, C‑29/05 P, EU:C:2007:162, point 53).

22      Dès lors, la fonction du Tribunal n’est pas de réexaminer les circonstances de fait à la lumière des preuves présentées pour la première fois devant lui. En effet, l’admission de ces preuves est contraire à l’article 188 du règlement de procédure du Tribunal, selon lequel les mémoires des parties ne peuvent pas modifier l’objet du litige devant la chambre de recours. Partant, les preuves produites pour la première fois devant le Tribunal doivent être déclarées irrecevables, sans qu’il soit nécessaire de les examiner [voir arrêt du 14 mai 2009, Fiorucci/OHMI – Edwin (ELIO FIORUCCI), T‑165/06, EU:T:2009:157, point 22 et jurisprudence citée].

23      Cependant, il ressort de l’examen du dossier et de la réponse de la requérante à une question écrite posée par le Tribunal dans le cadre de mesures d’organisation de la procédure que les deux captures d’écran figurant aux pages 5 et 6 de la requête ont bien été soumises dans le cadre du recours formé par la requérante devant la chambre de recours (pages 83 et 84 du dossier administratif de l’EUIPO) sans que cette dernière les déclare irrecevables. Il en va de même pour les captures d’écran relatives à la présentation de services fournis par les parties intervenantes et reproduits aux pages 40 et 41 de l’annexe A.6 de la requête (page 83 du dossier administratif de l’EUIPO). Il y a donc lieu de considérer que ces éléments de preuve ont été soumis et admis lors de la procédure administrative devant l’EUIPO, de sorte qu’ils doivent être déclarés comme étant recevables.

24      En revanche, en ce qui concerne les captures d’écran du site Internet des parties intervenantes sur les sujets « About us, we are Winetales » (page 38 de l’annexe A.6 de la requête), « What do we do » (page 39 de l’annexe A.6 de la requête), « Maximum Cellars » (page 42 de l’annexe A.6 de la requête) et « Contact us » (page 43 de l’annexe A.6 de la requête), dès lors que ces dernières ont été produites pour la première fois devant le Tribunal, il convient de les écarter comme étant irrecevables.

 Sur le moyen unique tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001

25      À l’appui de son moyen unique tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, la requérante conteste la conclusion de la chambre de recours selon laquelle les services visés par la marque demandée, compris dans la classe 35 ne sont pas similaires aux produits couverts par la marque antérieure, à savoir les « vins ; vins effervescents » compris dans la classe 33. Selon la requérante, ces produits et services sont complémentaires. À cet égard, la requérante affirme que la chambre de recours n’a pas tenu compte des circonstances particulières de l’espèce.

26      L’EUIPO et les parties intervenantes contestent cette argumentation.

27      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

28      Constitue un risque de confusion, le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

29      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

30      À cet égard, il convient de rappeler que, pour apprécier la similitude entre les produits ou les services en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire. D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les canaux de distribution des produits concernés [voir arrêt du 14 mai 2013, Sanco/OHMI – Marsalman (Représentation d’un poulet), T‑249/11, EU:T:2013:238, point 21 et jurisprudence citée].

31      C’est à la lumière de ces considérations qu’il y a lieu d’apprécier si la chambre de recours a, à juste titre, considéré que, s’agissant des marques en conflit, il n’existait pas, dans l’esprit du public pertinent, de risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 pour les services relevant de la classe 35 visés par la marque demandée.

32      À titre liminaire, les parties ne contestent pas les conclusions de la chambre de recours selon lesquelles, premièrement, le public pertinent, pour apprécier le risque de confusion, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, est celui de l’Union européenne, l’appréciation se concentrant sur la partie italophone du public, deuxièmement, les produits et services comparés s’adressent à la fois au grand public et à des clients professionnels disposant de connaissances ou d’une expertise professionnelles spécifiques et, troisièmement, le niveau d’attention du public peut donc varier de moyen à élevé, en fonction du prix, de la fréquence d’achat, de la nature spécialisée ou des conditions générales des produits et des services achetés.

33      En premier lieu, la requérante reproche à la chambre de recours de ne pas avoir constaté que les produits visés par la marque antérieure, relevant de la classe 33, et les services visés par la marque demandée, compris dans la classe 35, étaient similaires. À cet égard, selon la requérante, la chambre de recours aurait dû considérer que le terme anglais de base « wine » (vin) était inclus dans la marque demandée, tout comme la représentation d’un verre de vin rouge, ce qui indiquerait que les services de la marque demandée sont spécifiquement destinés au secteur vitivinicole. La requérante reproche également à la chambre de recours de ne pas avoir pris en compte que les parties intervenantes utilisaient déjà, pour un site Internet, un nom de domaine composé de l’élément verbal de la marque antérieure  et que, ainsi qu’en témoignerait le contenu dudit site Internet, l’activité de celles-ci était exclusivement dirigée vers le secteur vitivinicole.

34      En l’espèce, premièrement, comme le soutient, à juste titre, l’EUIPO, le fait que la marque demandée comporte l’élément verbal « wine » et la représentation d’un verre de vin n’a aucune incidence sur la comparaison des produits et des services en cause. En effet, cette comparaison doit être effectuée, comme il découle de la jurisprudence reflétée au point 30 ci-dessus, non pas par rapport aux signes en conflit, mais en tenant compte des facteurs pertinents, énumérés audit point 30, qui caractérisent le rapport entre ces produits ou ces services, ainsi que cela est indiqué, à juste titre, aux points 38 et 48 de la décision attaquée.

35      Deuxièmement, il convient de relever que, aux fins de l’appréciation de l’existence d’un risque de confusion, seule la description des produits et des services pour lesquels l’enregistrement de la marque a été demandé est pertinente. En revanche, l’utilisation, envisagée ou effectuée, de cette marque ne peut être prise en compte, dès lors que l’enregistrement ne comporte pas une limitation en ce sens. Il s’ensuit que l’utilisation concrète qu’a fait de son signe le titulaire de la marque demandée n’est pas susceptible de modifier les produits ou les services pris en compte aux fins des appréciations sous-tendant la conclusion relative à l’existence d’un risque de confusion, telles la définition du public pertinent et de son niveau d’attention ou la similitude entre lesdits produits ou services dans l’esprit de ce public [voir arrêt du 4 mai 2022, Fidelity National Information Services/EUIPO – IFIS (FIS), T‑237/21, non publié, EU:T:2022:267, point 29 et jurisprudence citée].

36      En l’espèce, la demande d’enregistrement de la marque demandée pour des services compris dans la classe 35 est générale en ce qu’elle vise des services de « publicité ; services de gestion commerciale ; administration commerciale ; services de tâches bureautiques (travaux de bureau) » et n’est donc pas indicative d’une utilisation limitée au secteur vitivinicole.

37      À cet égard, le fait que les services de « publicité ; services de gestion commerciale ; administration commerciale ; services de tâches bureautiques (travaux de bureau) », relevant de la classe 35 et couverts par la marque demandée, puissent être notamment fournis dans le but d’assurer la promotion, la publicité, la gestion et l’administration d’entreprises qui fabriquent les produits de la requérante, tels que des vins relevant de la classe 33, ne signifie pas qu’il existe nécessairement un lien entre eux, étant donné que les services relevant de la classe 35 et couverts par la marque demandée peuvent être fournis pour une infinité de produits de nature très diverse [voir, par analogie, arrêt du 30 septembre 2016, Flowil International Lighting/EUIPO – Lorimod Prod Com (Silvania Food), T‑430/15, non publié, EU:T:2016:590, point 25].

38      Ainsi, alors que les produits relevant de la classe 33, visés par la marque antérieure, désignent les produits « Vins et vins effervescents », les services visés par la marque demandée compris dans la classe 35, repris au point 36 ci-dessus, consistent à soutenir ou à aider d’autres entreprises à exercer ou à améliorer leurs activités. Partant, c’est à bon droit que la chambre de recours a estimé que les services visés par la marque demandée relevant de la classe 35 différaient des produits visés par la marque antérieure compris dans la classe 33, notamment en raison de leur nature, de leur destination ou de leur utilisation.

39      Troisièmement, il convient de considérer, à l’instar de la chambre de recours, que les produits et services concernés ne partagent pas les mêmes canaux de distribution. En effet, compte tenu des fortes différences constatées entre les produits et services concernés, il ne saurait être conclu que le consommateur estimerait qu’ils puissent être vendus ou fournis dans les mêmes lieux.

40      En deuxième lieu, la requérante fait grief à la chambre de recours de ne pas avoir tenu compte de la complémentarité des produits et des services en cause. À cet égard, elle reproche à la chambre de recours de ne pas avoir pris en considération le fait que le processus de conception d’une étiquette de vin constituerait la première étape de la production et de la vente de vins par les établissements vinicoles, entraînant un risque de confusion pour le consommateur. Ensuite, le fait que les étiquettes élaborées par les parties intervenantes soient apposées sur des bouteilles de vin, vendues dans les mêmes points de vente spécialisés que le vin commercialisé sous la marque antérieure, serait de nature à faciliter la perception par le consommateur concerné des liens étroits entre les services visés par la marque demandée et les produits visés par la marque antérieure et à renforcer l’impression que la responsabilité de leur fabrication incombe à la même entreprise. Enfin, selon la requérante, ce serait à titre de précaution que les parties intervenantes ont demandé l’enregistrement de la marque demandée non seulement pour les services en cause compris dans la classe 35, mais également pour des produits compris dans la classe 33, parce qu’ils considéraient qu’il s’agissait d’une classe de produits complémentaire à leur activité.

41      À cet égard, il y a lieu de rappeler que les produits ou les services complémentaires sont ceux entre lesquels il existe un lien étroit, en ce sens que l’un est indispensable ou important pour l’usage de l’autre, de sorte que les consommateurs peuvent penser que la responsabilité de la fabrication de ces produits ou de la fourniture de ces services incombe à la même entreprise (voir arrêt du 22 janvier 2009, easyHotel, T‑316/07, EU:T:2009:14, points 57 et 58 et jurisprudence citée).

42      Lors de l’examen de la question de savoir si le consommateur s’attendait généralement à un lien entre les produits ou les services, il convient de tenir compte de la réalité économique sur le marché telle qu’elle existe à l’heure actuelle [arrêt du 16 janvier 2018, Sun Media/EUIPO – Meta4 Spain (METAPORN), T‑273/16, EU:T:2018:2, points 41 et 42] .

43      D’une part, sans qu’il soit nécessaire d’examiner si la conception d’une étiquette de vin par une société de publicité pour un producteur de vin peut être considérée comme faisant partie du processus de production, puis de vente du vin, il convient de constater que le fait qu’un service puisse être utilisé à une étape de la production ou de l’emballage d’un produit final ne signifie pas que le public pertinent supposera que le service contesté et le produit final sont proposés par la même entreprise et sont donc complémentaires [voir, en ce sens et par analogie, arrêts du 6 avril 2017, Nanu-Nana Joachim Hoepp/EUIPO – Fink (NANA FINK), T‑39/16, EU:T:2017:263, point 89, et du 25 septembre 2018, Grendene/EUIPO – Hipanema (HIPANEMA), T‑435/17, non publié, EU:T:2018:596, point 71 et jurisprudence citée].

44      En l’espèce, il convient donc d’écarter le fait que les consommateurs puissent penser que la responsabilité de la fabrication des produits concernés et la fourniture des services concernés incombent à la même entreprise.

45      D’autre part, contrairement à ce que soutient la requérante, le simple fait que la marque demandée vise, outre des services compris dans la classe 35, également des produits compris dans la classe 33, ne démontre pas qu’il existe entre eux un lien étroit au sens de la jurisprudence citée au point 41 ci-dessus.

46      Eu égard à ce qui précède, la requérante n’a pas démontré que les produits visés par la marque antérieure étaient indispensables ou importants pour l’usage des services désignés par la marque demandée ou que la fourniture desdits services était indispensable ou importante pour l’utilisation des produits désignés par la marque antérieure.

47      Il ressort de tout ce qui précède que les services compris dans la classe 35, visés par la marque demandée, et les produits relevant de la classe 33, visés par la marque antérieure, sont différents. Partant, dans la mesure où l’une des conditions nécessaires à la constatation de l’existence d’un risque de confusion en application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, à savoir la similitude des produits et des services en cause, n’est pas remplie, c’est à bon droit que la chambre de recours a conclu à l’absence de risque de confusion et a rejeté l’opposition pour les services relevant de la classe 35 visés par la marque demandée.

48      En conséquence, il y a lieu de rejeter le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

49      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

50      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens exposés par les parties intervenantes, conformément aux conclusions de cette dernière. En revanche, l’EUIPO n’a conclu à la condamnation de la requérante aux dépens que dans l’hypothèse où une audience serait tenue, il convient donc, en l’absence d’organisation d’une audience, de décider que l’EUIPO supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Torre Oria, SL supportera, outre ses propres dépens, ceux exposés par MM. Simone Giramondi et Damiano Antonelli.

3)      L’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) supportera ses propres dépens.

Kornezov

Petrlík

Kecsmár

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 20 décembre 2023.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.