Language of document : ECLI:EU:T:2024:32

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre élargie)

24 janvier 2024 (*)

« Union économique et monétaire – Union bancaire – Mécanisme de résolution unique des établissements de crédit et de certaines entreprises d’investissement (MRU) – Fonds de résolution unique (FRU) – Décision du CRU sur le calcul des contributions ex ante pour 2021 – Obligation de motivation – Droit d’être entendu – Principe de sécurité juridique – Droit à une protection juridictionnelle effective – Exception d’illégalité – Limitation des effets de l’arrêt dans le temps »

Dans l’affaire T‑348/21,

Volkskreditbank AG, établie à Linz (Autriche), représentée par Mes G. Eisenberger, A. Brenneis et J. Holzmann, avocats,

partie requérante,

contre

Conseil de résolution unique (CRU), représenté par MM. J. Kerlin, C. Flynn et D. Ceran, en qualité d’agents, assistés de Mes B. Meyring, T. Klupsch et S. Ianc, avocats,

partie défenderesse,

soutenu par

Parlement européen, représenté par MM. J. Etienne, M. Menegatti et Mme G. Bartram, en qualité d’agents,

et par

Conseil de l’Union européenne, représenté par M. J. Bauerschmidt, Mmes J. Haunold et A. Westerhof Löfflerová, en qualité d’agents,

parties intervenantes,

LE TRIBUNAL (huitième chambre élargie),

composé de MM. A. Kornezov, président, G. De Baere, D. Petrlík (rapporteur), K. Kecsmár et Mme S. Kingston, juges,

greffier : Mme S. Jund, administratrice,

vu la phase écrite de la procédure,

à la suite de l’audience du 2 mars 2023,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Volkskreditbank AG, demande l’annulation de la décision SRB/ES/2021/22 du Conseil de résolution unique (CRU), du 14 avril 2021, sur le calcul des contributions ex ante pour 2021 au Fonds de résolution unique (ci-après la « décision attaquée »), en ce qu’elle la concerne.

I.      Antécédents du litige

2        La requérante est un établissement de crédit établi en Autriche.

3        Par la décision attaquée, le CRU a fixé, conformément à l’article 70, paragraphe 2, du règlement (UE) no 806/2014 du Parlement européen et du Conseil, du 15 juillet 2014, établissant des règles et une procédure uniformes pour la résolution des établissements de crédit et de certaines entreprises d’investissement dans le cadre d’un mécanisme de résolution unique et d’un Fonds de résolution bancaire unique, et modifiant le règlement (UE) no 1093/2010 (JO 2014, L 225, p. 1), les contributions ex ante au Fonds de résolution unique (FRU) (ci-après les « contributions ex ante »), pour l’année 2021 (ci-après la « période de contribution 2021 »), des établissements relevant des dispositions combinées de l’article 2 et de l’article 67, paragraphe 4, de ce règlement (ci-après les « établissements »), dont la requérante.

4        Par avis de perception du 22 avril 2021 (ci-après l’« avis de perception »), la Finanzmarktaufsichtsbehörde (FMA, Autorité de surveillance des marchés financiers, Autriche), en sa qualité d’autorité de résolution nationale, au sens de l’article 3, paragraphe 1, point 3, du règlement no 806/2014, a enjoint à la requérante d’acquitter sa contribution ex ante pour la période de contribution 2021, telle qu’elle avait été fixée par le CRU.

II.    Décision attaquée

5        La décision attaquée comprend un corps qui est accompagné de trois annexes.

6        Le corps de la décision attaquée décrit le processus de détermination des contributions ex ante pour la période de contribution 2021, qui est applicable à tous les établissements.

7        Plus particulièrement, dans la section 5 de ladite décision, le CRU a déterminé le niveau cible annuel, mentionné à l’article 4 du règlement d’exécution (UE) 2015/81 du Conseil, du 19 décembre 2014, définissant des conditions uniformes d’application du règlement no 806/2014 en ce qui concerne les contributions ex ante au Fonds de résolution unique (JO 2015, L 15, p. 1), pour la période de contribution 2021 (ci-après le « niveau cible annuel »).

8        Le CRU a expliqué qu’il avait fixé ce niveau cible annuel à un huitième de 1,35 % du montant moyen des dépôts couverts, calculé trimestriellement, de l’ensemble des établissements en 2020 (ci-après le « montant moyen des dépôts couverts en 2020 »), tel qu’il avait été obtenu à partir des données communiquées par les systèmes de garantie des dépôts conformément à l’article 16 du règlement délégué (UE) 2015/63 de la Commission, du 21 octobre 2014, complétant la directive 2014/59/UE du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les contributions ex ante aux dispositifs de financement pour la résolution (JO 2015, L 11, p. 44).

9        Dans la section 6 de la décision attaquée, le CRU a décrit la méthode à suivre pour le calcul des contributions ex ante pour la période de contribution 2021. À cet égard, il a précisé, au considérant 59 de ladite décision, que, pour cette période, 13,33 % des contributions ex ante avaient été calculées sur la « base nationale », c’est-à-dire sur la base des données communiquées par des établissements agréés sur le territoire de l’État membre participant concerné (ci-après la « base nationale »), conformément à l’article 103 de la directive 2014/59/UE du Parlement européen et du Conseil, du 15 mai 2014, établissant un cadre pour le redressement et la résolution des établissements de crédit et des entreprises d’investissement et modifiant la directive 82/891/CEE du Conseil ainsi que les directives du Parlement européen et du Conseil 2001/24/CE, 2002/47/CE, 2004/25/CE, 2005/56/CE, 2007/36/CE, 2011/35/UE, 2012/30/UE et 2013/36/UE et les règlements du Parlement européen et du Conseil (UE) no 1093/2010 et (UE) no 648/2012 (JO 2014, L 173, p. 190), et conformément à l’article 4 du règlement délégué 2015/63. Le reste des contributions ex ante (à savoir 86,67 %) a été calculé sur la « base de l’union bancaire », c’est-à-dire sur la base des données communiquées par l’ensemble des établissements agréés sur le territoire de tous les États membres participant au mécanisme de résolution unique (MRU) (ci-après la « base de l’union » et les « États membres participants »), conformément aux articles 69 et 70 du règlement no 806/2014 et à l’article 4 du règlement d’exécution 2015/81.

10      Ensuite, le CRU a calculé les contributions ex ante des établissements, tels que la requérante, en suivant les phases principales suivantes.

11      Dans la première phase, le CRU a calculé, conformément à l’article 70, paragraphe 2, deuxième alinéa, sous a), du règlement no 806/2014, la contribution annuelle de base de chaque établissement, qui est proportionnelle au montant du passif de l’établissement concerné, hors fonds propres et dépôts couverts (ci-après le « passif net »), rapporté au passif net de l’ensemble des établissements agréés sur le territoire de tous les États membres participants. Conformément à l’article 5, paragraphe 1, du règlement délégué 2015/63, le CRU a déduit certains types de passifs du passif net de l’établissement à prendre en compte pour la détermination de cette contribution.

12      Dans la seconde phase du calcul de la contribution ex ante, le CRU a procédé à un ajustement de la contribution annuelle de base en fonction du profil de risque de l’établissement concerné, conformément à l’article 70, paragraphe 2, deuxième alinéa, sous b), du règlement no 806/2014. Il a évalué ce profil de risque sur la base des quatre piliers de risque mentionnés à l’article 6 du règlement délégué 2015/63, qui sont composés d’indicateurs de risque. Afin de classer les établissements selon leur niveau de risque, tout d’abord, le CRU a établi – pour chaque indicateur de risque appliqué pour la période de contribution 2021 – des bins (paniers) dans lesquels ont été regroupés les établissements, conformément à l’annexe I, sous le titre « Étape 2 », point 3, de ce règlement délégué. Les établissements appartenant au même bin se sont vu attribuer une valeur commune pour l’indicateur de risque donné, dite « valeur discrétisée ». En combinant les valeurs discrétisées pour chaque indicateur de risque, le CRU a calculé le « multiplicateur d’ajustement en fonction du profil de risque » de l’établissement concerné (ci-après le « multiplicateur d’ajustement »). En multipliant la contribution annuelle de base de cet établissement par le multiplicateur d’ajustement de celui-ci, le CRU a obtenu la « contribution annuelle de base ajustée en fonction du profil de risque » dudit établissement.

13      Ensuite, le CRU a additionné toutes les contributions annuelles de base ajustées en fonction des profils de risque pour obtenir un « dénominateur commun » utilisé pour calculer la part du niveau cible annuel que chaque établissement devait verser.

14      Enfin, le CRU a calculé la contribution ex ante de chaque établissement en répartissant le niveau cible annuel entre tous les établissements sur la base du ratio existant entre la contribution annuelle de base ajustée en fonction du profil de risque, d’une part, et le dénominateur commun, d’autre part.

15      L’annexe I de la décision attaquée contient une fiche individuelle pour chaque établissement soumis au versement des contributions ex ante, dont la requérante, qui comporte les résultats du calcul de la contribution ex ante de chacun de ces établissements (ci-après la « fiche individuelle »). Chacune de ces fiches expose le montant de la contribution annuelle de base de l’établissement concerné ainsi que la valeur de son multiplicateur d’ajustement, tant sur la base de l’union que sur la base nationale, en mentionnant, pour chaque indicateur de risque, le numéro du bin auquel ledit établissement a été assigné. En outre, la fiche individuelle expose des données qui sont utilisées pour le calcul des contributions ex ante de tous les établissements concernés et que le CRU a déterminées en additionnant ou en combinant les données individuelles de tous ces établissements. Enfin, cette fiche comporte les données déclarées par l’établissement concerné dans le formulaire de déclaration et utilisées dans le calcul de sa contribution ex ante.

16      L’annexe II de la décision attaquée comprend des données statistiques relatives au calcul des contributions ex ante pour chaque État membre participant, sous une forme résumée et agrégée. Cette annexe précise, notamment, le montant global des contributions ex ante à verser par les établissements concernés pour chacun de ces États membres. Par ailleurs, ladite annexe énumère, pour chaque indicateur de risque, le nombre de bins, le nombre d’établissements appartenant à chacun des bins ainsi que les valeurs minimales et maximales de ces bins. Dans le cas des bins relatifs à la base nationale, ces valeurs sont, pour des raisons de confidentialité, diminuées ou augmentées d’un montant aléatoire, la répartition originale des établissements étant maintenue.

17      L’annexe III de la décision attaquée, intitulée « Évaluation des commentaires soumis dans le cadre de la consultation sur les contributions ex ante au Fonds de résolution unique pour 2021 », examine les observations présentées par les établissements lors de la procédure de consultation menée par le CRU entre les 5 et 19 mars 2021 en vue de l’adoption de la décision attaquée.

III. Conclusions des parties

18      La requérante conclut, en substance, à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée, y compris ses annexes, en tant qu’elle la concerne ;

–        condamner le CRU aux dépens.

19      Le CRU conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme non fondé ;

–        condamner la requérante aux dépens ;

–        à titre subsidiaire, en cas d’annulation de la décision attaquée, maintenir les effets de ladite décision jusqu’à son remplacement ou, à tout le moins, pendant une période de six mois à compter de la date à laquelle le jugement sera définitif.

20      Le Parlement européen conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours en ce qu’il est fondé sur l’exception d’illégalité de la directive 2014/59 et du règlement no 806/2014 ;

–        condamner la requérante aux dépens.

21      Le Conseil de l’Union européenne conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

IV.    En droit

22      Dans sa requête, la requérante soulève cinq moyens, tirés :

–        le premier, d’une violation de l’article 1er, deuxième alinéa, TUE, des articles 15, 296 et 298 TFUE et des articles 42 et 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »), en raison du défaut de communication de la décision attaquée dans son intégralité ;

–        le deuxième, d’une violation de l’article 296, deuxième alinéa, TFUE et de l’article 41, paragraphe 1 et paragraphe 2, sous c), de la Charte, en raison de l’insuffisance de motivation de la décision attaquée ;

–        le troisième, d’une violation de l’article 41, paragraphe 1 et paragraphe 2, sous a), de la Charte, en raison du non-respect du droit d’être entendu ;

–        le quatrième, d’une exception d’illégalité des articles 4 à 7 et 9 ainsi que de l’annexe I du règlement délégué 2015/63, fondée sur la violation du droit à une bonne administration, du droit à une protection juridictionnelle effective, du principe de sécurité juridique, des articles 16, 17, 20 et 21 de la Charte, du principe de proportionnalité et de l’article 290 TFUE ;

–        le cinquième, d’une exception d’illégalité de la directive 2014/59 et du règlement no 806/2014, fondée sur la violation de l’article 1er, deuxième alinéa, TUE, des articles 15, 296 et 298 TFUE, des articles 16, 17, 41, 42 et 47 de la Charte, de l’obligation de motivation et du principe de sécurité juridique.

23      En outre, la requérante a soulevé, à l’audience, un sixième moyen, tiré de ce que le niveau cible annuel pour la période de contribution 2021 avait été fixé en violation de l’article 70, paragraphe 2, du règlement no 806/2014.

24      Il convient d’examiner d’abord les moyens par lesquels la requérante excipe de l’illégalité de la directive 2014/59, du règlement no 806/2014 et des articles 4 à 7 et 9 ainsi que de l’annexe I du règlement délégué 2015/63, puis les moyens portant directement sur la légalité de la décision attaquée.

A.      Sur les exceptions d’illégalité de la directive 2014/59, du règlement no 806/2014 et des articles 4 à 7 et 9 ainsi que de l’annexe I du règlement délégué 2015/63

1.      Sur le cinquième moyen, tiré d’une exception d’illégalité de la directive 2014/59 et du règlement no 806/2014

25      La requérante soutient que la directive 2014/59 et le règlement no 806/2014 sont incompatibles avec le droit primaire, en particulier avec l’article 1er, deuxième alinéa, TUE, les articles 15, 296 et 298 TFUE, les articles 16, 17, 41, 42 et 47 de la Charte ainsi que l’obligation de motivation et le principe de sécurité juridique. En effet, cette directive et ce règlement accorderaient à la Commission européenne une marge de manœuvre si large qu’ils habiliteraient cette dernière à adopter une méthode de calcul complexe, impliquant le recours à des données confidentielles d’un grand nombre d’établissements.

26      Le CRU, soutenu par le Parlement et le Conseil, considère que le cinquième moyen est irrecevable pour défaut de précision. D’une part, la requérante n’identifierait pas les droits fondamentaux et les valeurs de l’Union européenne qui auraient été violés par la directive 2014/59 et le règlement no 806/2014 ni l’étendue exacte de cette violation. D’autre part, la requérante ne préciserait pas quelles dispositions de ces actes seraient contraires au droit primaire. En tout état de cause, l’argumentation de la requérante ne serait pas fondée.

27      À cet égard, il convient de rappeler que, aux termes de l’article 76, sous d), du règlement de procédure du Tribunal, toute requête doit indiquer l’objet du litige ainsi que l’exposé sommaire des moyens et cette indication doit être suffisamment claire et précise pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal d’exercer son contrôle, le cas échéant, sans autre information à l’appui (arrêt du 7 mars 2017, United Parcel Service/Commission, T‑194/13, EU:T:2017:144, point 191).

28      Afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, il faut, pour qu’un recours soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels celui-ci se fonde ressortent, à tout le moins sommairement, mais d’une façon cohérente et compréhensible, du texte de la requête elle-même (voir arrêt du 25 janvier 2018, BSCA/Commission, T‑818/14, EU:T:2018:33, point 95 et jurisprudence citée). Des exigences analogues sont requises lorsqu’un grief est invoqué au soutien d’un moyen (voir arrêt du 25 mars 2015, Belgique/Commission, T‑538/11, EU:T:2015:188, point 131 et jurisprudence citée).

29      En particulier, la simple invocation du principe du droit de l’Union dont la violation est alléguée, sans indication des éléments de fait et de droit sur lesquels cette allégation se fonde, ne satisfait pas aux exigences de l’article 76, sous d), du règlement de procédure (voir arrêt du 7 novembre 2019, ADDE/Parlement, T‑48/17, EU:T:2019:780, point 22 et jurisprudence citée).

30      En effet, la partie requérante est tenue d’exposer d’une manière suffisamment systématique les développements relatifs à chaque moyen qu’elle présente, sans que le Tribunal puisse être contraint, du fait du manque de structure de la requête ou du manque de rigueur de cette partie, de reconstituer l’articulation juridique censée soutenir un moyen en rassemblant divers éléments épars de la requête, au risque de reconstruire ce moyen en lui donnant une portée qu’il n’avait pas dans l’esprit de ladite partie. En décider autrement serait contraire, à la fois, à une bonne administration de la justice, au principe dispositif ainsi qu’aux droits de la défense de la partie défenderesse [arrêt du 2 avril 2019, Fleig/SEAE, T‑492/17, EU:T:2019:211, point 44 (non publié), et ordonnance du 9 juillet 2019, Scaloni et Figini/Commission, T‑158/18, non publiée, EU:T:2019:491, point 30].

31      En l’espèce, il convient de relever que, contrairement aux allégations du CRU, le point 118 de la requête permet d’identifier les principes et dispositions du droit primaire qui ont été violés, selon la requérante, par la directive 2014/59 et le règlement no 806/2014.

32      En revanche, la requérante n’a pas identifié, avec suffisamment de clarté, les dispositions de la directive 2014/59 et du règlement no 806/2014 qui auraient violé ces principes et dispositions. Dans la requête, elle s’est bornée à indiquer qu’elle contestait la validité de celles des dispositions de cette directive et de ce règlement « qui impos[ai]ent d’une manière contraire aux droits fondamentaux et aux valeurs fondamentales de l’Union le régime des contributions imposé de manière contraignante par le règlement délégué [...] 2015/63 » et qui « n[’étai]ent pas susceptibles d’être interprétées conformément au droit primaire et d’être modifiées par un acte délégué ». Elle a ajouté à cet égard qu’il lui était impossible de déterminer quelles dispositions exactes de la directive 2014/59 ou du règlement no 806/2014 seraient illégales.

33      Or, une telle argumentation ne répond pas aux exigences de clarté et de précision prescrites par la jurisprudence citée aux points 27 à 30 ci-dessus.

34      En effet, conformément à cette jurisprudence, il n’appartient pas au Tribunal de reconstruire la présente exception d’illégalité en déduisant, sur la base des divers éléments présentés par la requérante au soutien de cette exception, les dispositions concrètes de la directive 2014/59 ou du règlement no 806/2014 qui pourraient éventuellement correspondre aux cas de figure évoqués par la requérante, tels qu’ils sont mentionnés au point 32 ci-dessus. En effet, une telle approche risquerait de reconstruire cette exception d’illégalité en lui donnant une portée qu’elle n’avait pas dans l’esprit de la requérante.

35      Ce défaut ne saurait être pallié par l’argumentation présentée par la requérante, pour la première fois, dans ses observations sur les mémoires en intervention du Parlement et du Conseil. En effet, d’une part, même si la requérante s’est référée dans ces observations, à titre d’exemple, à l’article 102 de la directive 2014/59 et à l’article 69 du règlement no 806/2014, ainsi qu’à l’intégralité de l’article 70 de ce règlement, elle a réitéré son argument selon lequel elle n’était pas en mesure de déterminer les dispositions de ladite directive ni dudit règlement qui étaient « susceptibles de n’être ni interprétées conformément au droit primaire ni modifiées par un acte délégué ». D’autre part, le fait d’admettre la recevabilité d’une exception d’illégalité soulevée pour la première fois dans les observations de la requérante sur les mémoires en intervention du Parlement et du Conseil se heurterait au principe de bonne administration de la justice, dès lors que l’objet même de ces mémoires en intervention était de répondre à l’exception d’illégalité telle qu’elle avait été soulevée dans la requête et dirigée à l’encontre des actes dont le Parlement et le Conseil sont les auteurs.

36      Par conséquent, le cinquième moyen est irrecevable pour défaut de clarté et de précision.

37      En tout état de cause, dans la mesure où l’argumentation de la requérante devrait être comprise en ce sens qu’elle conteste la validité de l’article 103, paragraphe 7, de la directive 2014/59, lu conjointement avec l’article 70, paragraphe 2, deuxième alinéa, sous b), du règlement no 806/2014, du fait que ces dispositions ont accordé à la Commission une marge d’appréciation trop étendue qui lui aurait permis d’établir un système excessivement complexe de calcul des contributions ex ante impliquant le recours à des données confidentielles d’un grand nombre d’établissements, une telle argumentation n’est pas fondée.

38      À cet égard, il ressort de la jurisprudence que l’article 290, paragraphe 1, second alinéa, première phrase, TFUE permet au législateur de l’Union de conférer à la Commission une marge d’appréciation pour exercer le pouvoir qu’il lui délègue, laquelle peut, en fonction des caractéristiques de la matière concernée, être plus ou moins étendue, étant entendu qu’une délégation de pouvoir au sens de l’article 290 TFUE – et toute marge d’appréciation éventuelle qu’elle implique – doit être encadrée par des limites fixées dans l’acte de base (voir, en ce sens, arrêt du 26 juillet 2017, République tchèque/Commission, C‑696/15 P, EU:C:2017:595, point 52).

39      Dans le domaine de la fixation des contributions ex ante, la Cour a par ailleurs reconnu que le législateur de l’Union disposait d’un large pouvoir d’appréciation puisque ce domaine impliquait, de sa part, des choix de nature politique, économique et sociale et qu’il était appelé à effectuer dans celui-ci des appréciations complexes. Ainsi, le législateur de l’Union a pu valablement faire le choix d’une méthode telle que celle résultant de la directive 2014/59 et du règlement no 806/2014, afin d’assurer une adaptation dynamique du financement du FRU aux évolutions du secteur financier, par la prise en compte comparative, en particulier, de la situation financière de chaque établissement (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, points 116 à 118).

40      Il en résulte, d’une part, que, en vue de garantir une telle adaptation dynamique du financement du FRU, le législateur de l’Union a pu habiliter la Commission à adopter un acte délégué qui préciserait la méthode de calcul des contributions ex ante résultant de la directive 2014/59 et du règlement no 806/2014, fondée sur la prise en compte comparative de la situation financière de chaque établissement, et ce en dépit d’une certaine complexité qu’une telle méthode implique. D’autre part, le législateur a pu conférer à la Commission une marge d’appréciation étendue pour préciser, dans un tel acte délégué, ladite méthode de calcul, à condition que cette marge soit encadrée par des limites suffisantes fixées dans les actes de base (voir, en ce sens, arrêt du 18 mars 2014, Commission/Parlement et Conseil, C‑427/12, EU:C:2014:170, point 38).

41      Le législateur de l’Union a prévu de telles limites, notamment, à l’article 103, paragraphe 7, de la directive 2014/59, par lequel il a habilité la Commission à préciser un volet de la méthode de calcul des contributions ex ante, à savoir la notion d’adaptation de ces contributions en fonction des profils de risque des établissements, tout en l’obligeant à tenir compte des facteurs énumérés dans ladite disposition afin de déterminer ces profils de risque.

42      Or, la requérante n’a pas soutenu, et encore moins démontré, que ces facteurs étaient inappropriés pour fixer de tels profils ni qu’ils étaient formulés de manière tellement imprécise que la marge d’appréciation de la Commission ne serait pas suffisamment encadrée au sens de la jurisprudence citée au point 38 ci-dessus.

43      Il en va d’autant plus ainsi que, conformément à l’article 115, paragraphe 5, de la directive 2014/59, l’acte délégué de la Commission précisant la notion d’adaptation des contributions en fonction du profil de risque des établissements n’entre en vigueur que si le Parlement ou le Conseil n’ont pas exprimé d’objections dans un délai de trois mois à compter de la notification de cet acte au Parlement et au Conseil ou si, avant l’expiration de ce délai, le Parlement et le Conseil ont tous deux informé la Commission de leur intention de ne pas exprimer d’objections.

44      Par conséquent, la requérante n’a pas établi que l’article 103, paragraphe 7, de la directive 2014/59, lu conjointement avec l’article 70, paragraphe 2, deuxième alinéa, sous b), du règlement no 806/2014, enfreignait l’obligation de motivation prévue à l’article 296 TFUE, le principe de sécurité juridique, l’article 1er, deuxième alinéa, TUE, les articles 15 et 298 TFUE ou les articles 16, 17, 41, 42 et 47 de la Charte ni le principe de sécurité juridique, au motif que ces dispositions avaient accordé à la Commission une marge d’appréciation trop étendue qui lui aurait permis d’établir un système complexe de calcul des contributions ex ante.

45      Dans ces circonstances, il convient de rejeter le cinquième moyen.

2.      Sur le quatrième moyen, tiré d’une exception d’illégalité des articles 4 à 7 et 9 ainsi que de l’annexe I du règlement délégué 2015/63

46      Par le quatrième moyen, la requérante soulève une exception d’illégalité à l’encontre des articles 4 à 7 et 9 ainsi que de l’annexe I du règlement délégué 2015/63. Ce moyen s’articule, en substance, autour de quatre branches, relatives, la première, à la violation du principe de sécurité juridique, la deuxième, à la violation du droit à une bonne administration, la troisième, à la violation du droit à une protection juridictionnelle effective et, la quatrième, à la violation du droit primaire par l’habilitation de la Commission à adopter le règlement délégué 2015/63.

47      Le CRU fait valoir que le quatrième moyen est irrecevable, car la requérante n’avance pas d’arguments concrets au soutien des illégalités alléguées, mais se fonde sur des allégations de nature purement générale et spéculative, ce qui ne permettrait pas au CRU d’y répondre de manière effective. En tout état de cause, ce moyen ne serait pas fondé.

a)      Sur la première branche, relative à la violation du principe de sécurité juridique

48      La requérante soutient que les articles 4 à 7 et 9 ainsi que l’annexe I du règlement délégué 2015/63 violent le principe de sécurité juridique en ce qu’ils ne permettent pas aux établissements de connaître avec exactitude l’étendue des obligations qu’ils leur imposent.

49      Plus particulièrement, la requérante ne serait pas en mesure de calculer par avance le montant de sa contribution ex ante et de prendre ses dispositions en conséquence. Cela s’expliquerait, d’une part, par le fait que ce montant dépendrait des données des autres établissements. D’autre part, le règlement délégué 2015/63 conférerait au CRU un pouvoir d’appréciation « considérable » que celui-ci exercerait en effectuant les classifications ad hoc des établissements dans des bins en fonction de leur profil de risque ou en adoptant des décisions internes qui ont précisé la méthodologie à suivre pour le calcul des contributions ex ante (ci-après les « décisions intermédiaires »), mais qui n’ont pas été publiées. Le règlement délégué 2015/63 ne présenterait ainsi pas le degré de précision nécessaire pour exclure un calcul arbitraire des contributions ex ante par le CRU.

50      À titre liminaire, il convient de relever que l’article 4 du règlement délégué 2015/63 prévoit que le CRU calcule la contribution ex ante que doit verser chaque établissement en proportion du profil de risque de l’établissement sur la base des informations fournies par celui-ci et en application de la méthode énoncée aux articles 4 à 13 de ce règlement délégué.

51      L’article 5 du règlement délégué 2015/63, intitulé « Ajustement au risque des contributions annuelles de base », indique, notamment, les passifs qui sont exclus du calcul de ces contributions. L’article 6 de ce règlement délégué énumère les piliers et indicateurs de risque que le CRU doit prendre en compte pour évaluer le profil de risque des établissements, tandis que l’article 7 dudit règlement délégué précise la pondération relative de chaque pilier de risque et indicateur de risque qui doit être appliquée par le CRU lorsqu’il évalue le profil de risque de chaque établissement.

52      Par ailleurs, l’article 9 du règlement délégué 2015/63, intitulé « Application de l’ajustement en fonction du profil de risque à la contribution annuelle de base », prévoit que le CRU calcule le multiplicateur d’ajustement sur la base des indicateurs de risque mentionnés à l’article 6 de ce règlement délégué conformément à la formule et aux procédures exposées à l’annexe I dudit règlement délégué et qu’il calcule la contribution annuelle de chaque établissement pour chaque période de contribution en multipliant la contribution annuelle de base par ce multiplicateur d’ajustement, conformément à la formule et aux procédures exposées à l’annexe I de ce même règlement délégué.

53      Enfin, l’annexe I du règlement délégué 2015/63 établit la procédure de calcul des contributions annuelles des établissements en plusieurs étapes.

54      Selon ces dispositions, l’ajustement de la contribution annuelle de base de chaque établissement en fonction de son profil de risque est fondé sur la comparaison des données individuelles de tous les établissements concernés. Or, le CRU considère que toutes ces données sont couvertes par le secret des affaires, de sorte qu’il ne peut pas les communiquer aux établissements dont la contribution ex ante est calculée dans la décision fixant le montant de ces contributions.

55      S’agissant, en premier lieu, du grief tiré de la prétendue violation du principe de sécurité juridique en raison de l’utilisation des données des autres établissements aux fins du calcul des contributions ex ante, l’argumentation de la requérante est suffisamment claire, si bien que ce grief est recevable.

56      Sur le fond, il convient de rappeler que le principe même de la méthode de calcul des contributions ex ante, tel qu’il ressort de la directive 2014/59 et du règlement no 806/2014, dont la validité n’a pas été valablement contestée par la requérante, implique l’utilisation, par le CRU, de données des autres établissements couvertes par le secret des affaires (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 114).

57      Dans ces conditions, le seul fait que la requérante ne puisse pas, en raison du fait que les données des autres établissements ne sont pas portées à sa connaissance, calculer, à l’avance, les contributions ex ante qu’elle doit ne constitue pas une violation du principe de sécurité juridique.

58      De même, la requérante ne saurait soutenir qu’une telle violation découle du fait que la méthode de calcul des contributions ex ante, prévue par le règlement délégué 2015/63, est fondée sur l’utilisation d’un grand nombre de données provenant d’un nombre élevé d’établissements, ce qui rendrait cette méthode complexe. En effet, d’une part, le nombre d’établissements concernés par ce calcul est déterminé par l’article 2 du règlement no 806/2014, dont la légalité n’a pas été contestée par la requérante. D’autre part, la Cour a déjà admis que le calcul de ces contributions pouvait être fondé sur la comparaison de la situation financière de tels établissements afin d’assurer une adaptation dynamique du financement du FRU aux évolutions du secteur financier et en vue de respecter le large pouvoir d’appréciation dont le législateur de l’Union doit disposer à cette fin (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, points 116 à 118).

59      Or, une telle comparaison est, par sa nature, complexe. Toutefois, le seul fait que la méthode de calcul des contributions ex ante adoptée par le législateur de l’Union soit considérée comme étant complexe ne signifie pas que celle-ci est contraire au principe de sécurité juridique.

60      Il s’ensuit que le présent grief doit être rejeté comme étant non fondé.

61      En ce qui concerne, en deuxième lieu, le grief tiré de la prétendue violation du principe de sécurité juridique en raison de l’absence de publication des décisions intermédiaires, l’argumentation de la requérante est suffisamment claire, de sorte que ce grief est recevable.

62      Sur le fond, il suffit de relever que l’éventuelle adoption ou absence d’accessibilité de telles décisions est imputable au CRU et n’est pas prévue par les articles 4 à 7 et 9 ni par l’annexe I du règlement délégué 2015/63.

63      Par conséquent, le présent grief doit être rejeté.

64      S’agissant, en troisième lieu, du grief tiré de la prétendue violation du principe de sécurité juridique en raison du fait que les articles 4 à 7 et 9 ainsi que l’annexe I du règlement délégué 2015/63 octroieraient une marge d’appréciation « considérable » au CRU, la requérante se limite à dresser une liste des éléments sur lesquels le CRU disposerait d’une telle marge d’appréciation, sans expliciter les raisons pour lesquelles toutes les dispositions contestées dudit règlement délégué violeraient le principe de sécurité juridique en accordant au CRU ladite marge d’appréciation. Cela étant, il ressort de l’argumentation de la requérante qu’elle conteste, en réalité, le fait que le règlement délégué 2015/63 octroie au CRU une marge d’appréciation trop étendue pour définir certains indicateurs de risque, ce qui serait contraire au principe de sécurité juridique. Dès lors, l’argumentation de la requérante, pour autant qu’elle vise les articles 6 et 7 de ce règlement délégué, est suffisamment claire, si bien que ce grief est recevable.

65      Sur le fond, il convient de relever que, aux termes des articles 6 et 7 du règlement délégué 2015/63, il incombe au CRU d’ajuster la contribution annuelle de base des établissements en tenant compte de quatre piliers de risque, chaque pilier étant composé d’indicateurs de risque qui, à leur tour, peuvent être composés de sous-indicateurs de risque.

66      Or, s’agissant des trois premiers piliers de risque mentionnés à l’article 6, paragraphe 1, sous a) à c), du règlement délégué 2015/63, la requérante n’a soumis au Tribunal aucun élément concret afin de contester leur légalité au motif de leur supposée contradiction avec le principe de sécurité juridique. En outre, en ce qui concerne le pilier de risque mentionné à l’article 6, paragraphe 1, sous d), de ce règlement délégué, dénommé « indicateurs de risque supplémentaires à déterminer par l’autorité de résolution » (ci-après le « pilier de risque IV »), la requérante n’a pas soutenu que l’indicateur de risque « mesure dans laquelle l’établissement a déjà bénéficié d’un soutien financier public exceptionnel », qui constitue l’un des indicateurs de risque du pilier de risque IV, manquerait en clarté et serait donc contraire à ce principe.

67      Dans ces conditions, il y a lieu d’en déduire que le présent grief vise la prétendue non-conformité avec le principe de sécurité juridique des indicateurs de risque du pilier de risque IV, à l’exception de l’indicateur de risque « mesure dans laquelle l’établissement a déjà bénéficié d’un soutien financier public exceptionnel ».

68      Ces précisions étant faites, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, le principe de sécurité juridique exige, d’une part, que les règles de droit soient claires et précises et, d’autre part, que leur application soit prévisible pour les justiciables, en particulier lorsqu’elles peuvent avoir des conséquences défavorables. Ledit principe exige, notamment, qu’une réglementation permette aux intéressés de connaître avec exactitude l’étendue des obligations qu’elle leur impose et que ces derniers puissent connaître sans ambiguïté leurs droits et leurs obligations et prendre leurs dispositions en conséquence (arrêts du 29 avril 2021, Banco de Portugal e.a., C‑504/19, EU:C:2021:335, point 51, et du 16 février 2022, Pologne/Parlement et Conseil, C‑157/21, EU:C:2022:98, point 319).

69      Pour autant, ces exigences ne sauraient être comprises comme s’opposant à ce qu’une institution de l’Union, dans le cadre d’une norme qu’elle adopte, emploie une notion juridique abstraite ni comme imposant qu’une telle norme abstraite mentionne les différentes hypothèses concrètes dans lesquelles elle est susceptible de s’appliquer, dans la mesure où toutes ces hypothèses ne peuvent pas être déterminées à l’avance par ladite institution (voir, par analogie, arrêts du 20 juillet 2017, Marco Tronchetti Provera e.a., C‑206/16, EU:C:2017:572, points 39 et 40, et du 16 février 2022, Pologne/Parlement et Conseil, C‑157/21, EU:C:2022:98, point 320).

70      En conséquence, une disposition d’un acte de l’Union ne viole le principe de sécurité juridique, en raison de son manque de clarté, que si elle présente une ambiguïté telle qu’elle ferait obstacle à ce que les justiciables puissent lever avec une certitude suffisante d’éventuels doutes sur la portée ou le sens de cette disposition (voir, en ce sens, arrêts du 14 avril 2005, Belgique/Commission, C‑110/03, EU:C:2005:223, point 31, et du 22 mai 2007, Mebrom/Commission, T‑216/05, EU:T:2007:148, point 108).

71      De même, le fait qu’un acte de l’Union confère un pouvoir d’appréciation aux autorités chargées de sa mise en œuvre ne méconnaît pas en soi l’exigence de prévisibilité, à la condition que l’étendue et les modalités d’exercice d’un tel pouvoir soient définies avec une netteté suffisante, eu égard au but légitime en jeu, pour fournir une protection adéquate contre l’arbitraire (voir arrêt du 16 février 2022, Pologne/Parlement et Conseil, C‑157/21, EU:C:2022:98, point 321 et jurisprudence citée).

72      Au regard de ces considérations, il convient d’examiner si la méthode de calcul des contributions ex ante, dans la mesure où elle est influencée par le pilier de risque IV, est définie avec suffisamment de précision pour que les justiciables puissent lever avec une certitude suffisante d’éventuels doutes quant à la portée ou au sens des dispositions relatives à ce pilier de risque.

73      À cet égard, il y a lieu de relever que la requérante ne fait pas valoir que les notions utilisées aux articles 6 et 7 du règlement délégué 2015/63 sont d’une ambiguïté telle qu’elle ne peut pas lever avec une certitude suffisante d’éventuels doutes sur leur portée ou leur sens.

74      En revanche, il convient de relever, à l’instar de la requérante, que les articles 6 et 7 du règlement délégué 2015/63 octroient une marge d’appréciation au CRU.

75      En effet, conformément à l’article 6, paragraphe 5, premier alinéa, du règlement délégué 2015/63, le pilier de risque IV se compose de trois indicateurs de risque, à savoir, premièrement, les « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité », deuxièmement, l’« éventuelle appartenance de l’établissement à un système de protection institutionnel » et, troisièmement, la « mesure dans laquelle l’établissement a déjà bénéficié d’un soutien financier public exceptionnel ».

76      Selon l’article 6, paragraphe 5, deuxième alinéa, du règlement délégué 2015/63, le CRU doit tenir compte, lorsqu’il détermine ces indicateurs de risque, « de la probabilité que l’établissement concerné soit mis en résolution et de la probabilité consécutive que le dispositif de financement pour la résolution soit utilisé à cette fin ».

77      Il ressort du libellé de l’article 6, paragraphe 5, deuxième alinéa, du règlement délégué 2015/63 que cette disposition octroie une marge d’appréciation au CRU s’agissant de la façon dont celui-ci doit « tenir compte », aux fins de la détermination desdits indicateurs de risque, « de la probabilité que l’établissement concerné soit mis en résolution et de la probabilité consécutive que le dispositif de financement pour la résolution soit utilisé à cette fin », car les critères indiqués dans ladite disposition doivent être précisés par le CRU pour pouvoir être appliqués à un cas particulier.

78      S’agissant du premier indicateur de risque qui relève du pilier de risque IV et qui est relatif aux activités de négociation, aux expositions hors bilan, aux instruments dérivés, à la complexité et à la résolvabilité de l’établissement, l’article 6, paragraphe 6, du règlement délégué 2015/63 prévoit plusieurs éléments que le CRU doit prendre en compte lors de la détermination de cet indicateur, dont certains peuvent conduire à augmenter le profil de risque de l’établissement concerné et d’autres à le diminuer.

79      Ainsi, les éléments pouvant entraîner une augmentation de ce profil de risque sont au nombre de quatre, à savoir, premièrement, « l’importance des activités de négociation par rapport à la taille du bilan, au niveau des fonds propres, au degré de risque des expositions et au modèle économique global de l’établissement », deuxièmement, « l’importance des expositions hors bilan par rapport à la taille du bilan, au niveau des fonds propres et au degré de risque des expositions », troisièmement, « l’importance du montant des instruments dérivés par rapport à la taille du bilan, au niveau des fonds propres, au degré de risque des expositions et au modèle économique global de l’établissement » et, quatrièmement, « la mesure dans laquelle […] le modèle économique et la structure organisationnelle de l’établissement sont jugés complexes ».

80      Les éléments pouvant entraîner une diminution dudit profil de risque sont au nombre de deux, à savoir « le montant relatif des instruments dérivés qui sont compensés par une contrepartie centrale » et « la mesure dans laquelle […] l’établissement peut faire l’objet d’une résolution rapide et sans obstacles juridiques ».

81      Il résulte du libellé de l’article 6, paragraphe 6, du règlement délégué 2015/63 que cette disposition octroie au CRU une marge d’appréciation s’agissant de l’« importance » que le CRU doit attacher aux « activités de négociation », aux « expositions hors bilan » et au « montant des instruments dérivés » et de l’articulation entre les différents éléments mentionnés dans cette disposition.

82      Ainsi, s’il ressort de l’article 6, paragraphe 6, du règlement délégué 2015/63 que, selon le premier sous-indicateur de risque mentionné par cette disposition, il convient de comparer l’importance des « activités de négociation » par rapport à la taille du bilan, au niveau des fonds propres, au degré de risque des expositions et au modèle économique global de l’établissement, ladite disposition ne contient pas de précisions concernant la mise en œuvre concrète de cette comparaison.

83      Il en va de même en ce qui concerne les deuxième et troisième sous-indicateurs de risque prévus à l’article 6, paragraphe 6, sous a), ii) et iii), du règlement délégué 2015/63.

84      S’agissant, par ailleurs, de la détermination de l’indicateur de risque « éventuelle appartenance de l’établissement à un système de protection institutionnel », il découle de l’article 6, paragraphe 7, du règlement délégué 2015/63 que le CRU doit tenir compte de l’adéquation du montant des fonds immédiatement disponibles avec celui des fonds nécessaires « pour permettre un soutien crédible et efficace de [l’établissement concerné] » et du degré de sécurité juridique ou contractuelle quant au fait que ces fonds « seront pleinement utilisés avant que le moindre soutien public extraordinaire puisse être demandé ».

85      Il ressort du libellé de cette disposition que le CRU dispose d’une marge d’appréciation s’agissant du respect des conditions prévues par ladite disposition, lesquelles sont liées à l’adéquation des fonds disponibles du système de protection institutionnel concerné avec les fonds nécessaires au financement de l’établissement en cause et au degré de sécurité juridique ou contractuelle concernant ces fonds.

86      Il en va de même s’agissant de la pondération des différents indicateurs de risque dans le cadre du pilier de risque IV, prévue à l’article 7, paragraphe 4, du règlement délégué 2015/63.

87      En effet, bien que l’article 7, paragraphe 4, du règlement délégué 2015/63 indique de façon claire la pondération relative des trois indicateurs de risque qui composent le pilier de risque IV et qui sont mentionnés au point 75 ci-dessus, il ne ressort pas de cette disposition de quelle façon la pondération des différents sous-indicateurs de risque au sein des deux premiers indicateurs de risque doit être effectuée. En particulier, ladite disposition ne précise pas si cette pondération doit être répartie entre de tels sous-indicateurs de risque d’une manière proportionnelle. Ainsi, l’article 7, paragraphe 4, du règlement délégué 2015/63 confère un pouvoir d’appréciation au CRU s’agissant de déterminer la pondération des différents sous-indicateurs de risque constituant ces indicateurs de risque, lesquels doivent être pris en compte, conformément à l’article 6, paragraphes 5 à 7, du règlement délégué 2015/63.

88      Dans ces conditions, il convient d’examiner si l’article 6, paragraphes 5 à 7, et l’article 7, paragraphe 4, du règlement délégué 2015/63 peuvent être considérés, conformément à la jurisprudence citée au point 71 ci-dessus, comme des dispositions qui définissent avec une netteté suffisante l’étendue et les modalités d’exercice du pouvoir d’appréciation conféré au CRU, eu égard au but légitime en jeu, de sorte qu’elles fournissent une protection adéquate contre l’arbitraire et que les justiciables puissent lever avec une certitude suffisante d’éventuels doutes sur la portée ou le sens desdites dispositions.

89      Lorsqu’une disposition confère aux institutions ou aux organes de l’Union un pouvoir d’imposer des charges pécuniaires, il convient de déterminer au regard de tous les éléments pertinents si elle définit avec une netteté suffisante l’étendue et les modalités d’exercice d’un tel pouvoir, afin de permettre aux justiciables d’anticiper les conditions dans lesquelles une telle charge sera imposée (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 16 février 2022, Pologne/Parlement et Conseil, C‑157/21, EU:C:2022:98, points 319 à 321).

90      En particulier, il convient d’évaluer si un opérateur avisé peut, en recourant au besoin aux services d’un conseil juridique et économique, prévoir de manière suffisamment précise la méthode de calcul et l’ordre de grandeur de telles charges, étant entendu que le fait que cet opérateur ne puisse, à l’avance, connaître avec précision le niveau desdites charges que l’institution ou l’organe de l’Union imposera dans chaque espèce ne saurait constituer une violation du principe de sécurité juridique (voir, en ce sens et par analogie, arrêts du 17 juin 2010, Lafarge/Commission, C‑413/08 P, EU:C:2010:346, point 95, et du 18 juillet 2013, Schindler Holding e.a./Commission, C‑501/11 P, EU:C:2013:522, point 58 et jurisprudence citée).

91      À cet égard, il convient, notamment, d’apprécier si l’institution ou l’organe de l’Union sont guidés dans le cadre de l’exercice de leur pouvoir d’appréciation par certaines indications objectives qui permettent aux justiciables d’anticiper de manière suffisamment précise la méthode de calcul et l’ordre de grandeur des charges à imposer. Parmi ces indices figurent, notamment, les règles de conduite que l’institution ou l’organe de l’Union s’est lui-même imposées dans ce domaine et qui limitent son pouvoir d’appréciation (voir, en ce sens, arrêt du 17 juin 2010, Lafarge/Commission, C‑413/08 P, EU:C:2010:346, point 95). Cependant, de tels indices peuvent également découler de la pratique administrative constante, connue et accessible de cette institution ou de cet organe (voir, en ce sens, arrêt du 12 décembre 2012, Ecka Granulate et non ferrum Metallpulver/Commission, T‑400/09, non publié, EU:T:2012:675, point 31).

92      De même, une définition claire dans la réglementation applicable du résultat à atteindre peut constituer un indice pertinent pour les justiciables permettant d’anticiper la façon dont une institution ou un organe de l’Union exercera son pouvoir d’appréciation (voir, par analogie, arrêt du 4 mai 2016, Pillbox 38, C‑477/14, EU:C:2016:324, point 100). Il en va d’autant plus ainsi si la méthode ou le procédé concret aux fins de l’atteinte de ce résultat est prescrit par la réglementation en cause (voir, en ce sens, arrêt du 4 mai 2016, Pillbox 38, C‑477/14, EU:C:2016:324, point 101).

93      En l’espèce, il convient de relever, en premier lieu, que la réglementation applicable prévoit le résultat à atteindre, selon lequel les moyens financiers disponibles dans le FRU doivent atteindre le niveau cible final au terme de la période initiale de huit années à compter du 1er janvier 2016 (ci-après la « période initiale »), ainsi qu’une méthode pour atteindre ce résultat, ce qui réduit l’impact du pouvoir d’appréciation que le CRU exerce lors de la détermination des contributions ex ante. D’une part, le montant de la contribution ex ante de chaque établissement dépend du montant du niveau cible annuel qui est déterminé par le CRU sur la base de son estimation du montant qui correspond, au 31 décembre 2023, à au moins 1 % des dépôts couverts dans l’ensemble des États membres participants, en vertu de l’article 69, paragraphes 1 et 2, du règlement no 806/2014.

94      D’autre part, ainsi qu’il ressort du point 11 ci-dessus, la contribution ex ante de chaque établissement est déterminée, notamment, sur le fondement de la contribution annuelle de base qui est calculée à partir des montants des passifs nets des établissements concernés. Or, le CRU n’exerce aucun pouvoir d’appréciation concernant la détermination de ces montants. En outre, l’établissement concerné a connaissance du montant de ses passifs nets et il peut avoir accès au montant global des passifs nets des autres établissements, sans pouvoir exiger, en raison de la protection du secret des affaires, d’avoir accès aux données individuelles confidentielles d’autres établissements afin de vérifier le calcul desdits montants (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, points 114 à 125).

95      En second lieu, la contribution annuelle de base est ajustée au regard du profil de risque de l’établissement concerné, étant entendu que, conformément à l’article 9, paragraphe 3, du règlement délégué 2015/63, le multiplicateur d’ajustement est compris entre les valeurs 0,8 et 1,5.

96      Cet ajustement est calculé sur la base de l’appréciation des quatre piliers de risque prévus à l’article 6 du règlement délégué 2015/63. Or, ainsi qu’il a été relevé au point 66 ci-dessus, la requérante n’a soumis aucun élément au Tribunal pour démontrer le manque de clarté des trois premiers piliers de risque, ces piliers déterminant 80 % du profil de risque de chaque établissement, en vertu de l’article 7, paragraphe 1, dudit règlement délégué.

97      De même, la requérante n’a pas contesté un manque de clarté de l’indicateur de risque « mesure dans laquelle l’établissement a déjà bénéficié d’un soutien financier public exceptionnel », qui fait partie du pilier de risque IV et qui a, conformément à l’article 7, paragraphe 4, premier alinéa, sous c), du règlement délégué 2015/63, une pondération de 10 % au sein de ce pilier.

98      Il s’ensuit que les indicateurs de risque dont le manque de clarté est contesté par la requérante et pour lesquels le CRU exerce un certain pouvoir d’appréciation n’influent sur le profil de risque de l’établissement qu’à une hauteur qui se situe au-dessous de 20 %. En outre, l’impact de ces indicateurs sur le montant final de la contribution ex ante est davantage réduit par le fait que le CRU n’exerce aucun pouvoir d’appréciation concernant la détermination du montant de la contribution annuelle de base et que l’ajustement de cette contribution au profil de risque d’un établissement est nettement encadré dans une fourchette préalablement définie allant de 0,8 à 1,5, ainsi qu’il a été rappelé au point 95 ci-dessus.

99      Dans ces conditions, l’étendue et les modalités d’exercice du pouvoir d’appréciation que l’article 6, paragraphes 5 à 7, et l’article 7, paragraphe 4, du règlement délégué 2015/63 confèrent au CRU ne peuvent être considérées comme étant insuffisamment encadrées ou définies avec une netteté insuffisante, eu égard au but légitime en jeu, et ne peuvent donc être considérées comme ne fournissant pas une protection adéquate contre l’arbitraire.

100    Il en va d’autant plus ainsi que la requérante est un opérateur avisé qui peut, en recourant au besoin aux services d’un conseil juridique et économique, prévoir de manière suffisamment précise la méthode de calcul et l’ordre de grandeur de sa contribution ex ante.

101    Eu égard à ce qui précède, il y a lieu de conclure que la requérante n’a pas démontré que les articles 6 et 7 du règlement délégué 2015/63 violaient le principe de sécurité juridique.

102    Sur la base des considérations qui précèdent, il convient de rejeter la première branche du quatrième moyen.

b)      Sur la deuxième branche, relative à la violation du droit à une bonne administration

103    La requérante soutient que les articles 4 à 7 et 9 ainsi que l’annexe I du règlement délégué 2015/63 violent le droit à une bonne administration prévu à l’article 41 de la Charte.

104    Les dispositions contestées prévoiraient un système de fixation des contributions ex ante qui serait dépourvu de transparence et qui ne permettrait pas d’effectuer un calcul compréhensible et vérifiable de ces contributions. Le contrôle du calcul de ces contributions se heurterait notamment au fait que le CRU fait valoir de larges obligations de confidentialité au profit des autres établissements. En outre, le CRU jouirait de nombreux pouvoirs discrétionnaires dont l’exercice ne s’accompagnerait pas d’une justification compréhensible et vérifiable. Au surplus, le calcul desdites contributions serait effectué en parallèle pour plus de 3 500 établissements et reposerait sur une quantité « astronomique » de données. Le règlement délégué 2015/63 établirait ainsi en définitive une « boîte noire » qui serait totalement opaque et à laquelle n’auraient accès ni les autorités de résolution nationales ni les établissements soumis aux contributions ex ante.

105    Il en résulterait une violation de l’ensemble des droits qui constituent des expressions du droit à une bonne administration consacré à l’article 41, paragraphe 2, de la Charte, à savoir, premièrement, le droit de toute personne d’être entendue avant qu’une mesure individuelle qui l’affecterait défavorablement ne soit prise à son égard, deuxièmement, le droit d’accès de toute personne au dossier qui la concerne et, troisièmement, l’obligation incombant à l’administration de motiver ses décisions.

106    Sans qu’il soit nécessaire d’examiner si la présente branche est recevable au regard de la jurisprudence citée aux points 27 à 30 ci-dessus, il convient de constater qu’elle n’est, en tout état de cause, pas fondée.

107    À cet égard, il suffit de relever, d’une part, qu’aucun des éléments apportés par la requérante ne permet de constater que les articles 4 à 7 et 9 ou l’annexe I du règlement délégué 2015/63 empêchent le CRU de respecter les obligations qui lui incombent en vertu de l’article 41, paragraphe 2, sous a) à c), de la Charte en établissant, notamment, une procédure de consultation des établissements concernés avant l’adoption de la décision attaquée et en fournissant dans cette dernière une motivation suffisante.

108    D’autre part, l’argumentation avancée par la requérante au soutien de la présente exception d’illégalité repose sur les éléments qui se rapportent à la manière dont le CRU a appliqué le règlement délégué 2015/63 plutôt qu’à la légalité de celui-ci, à savoir sur le fait que le CRU n’a pas divulgué de données individuelles des autres établissements pour des raisons de confidentialité et qu’il n’a pas justifié à suffisance la manière dont il a exercé ses pouvoirs discrétionnaires.

109    Or, de tels griefs font l’objet du premier moyen, des troisième à cinquième branches du deuxième moyen ainsi que du troisième moyen, qui seront examinés ci-après.

110    Par conséquent, la présente branche doit être écartée.

c)      Sur la troisième branche, relative à la violation du droit à la protection juridictionnelle effective

111    La requérante fait valoir que les articles 4 à 7 et 9 ainsi que l’annexe I du règlement délégué 2015/63 violent le droit à une protection juridictionnelle effective, consacré à l’article 47, paragraphe 1, de la Charte.

112    En effet, dès lors que ces dispositions instaurent une méthode de calcul complexe et qu’elles impliquent l’utilisation des données des autres établissements que le CRU considère comme étant confidentielles, il serait impossible, même pour le Tribunal, de contrôler entièrement l’exactitude de la décision attaquée. Le Tribunal serait ainsi forcé de se fier à l’exactitude comptable des contributions ex ante telles qu’elles sont fixées par le CRU. Or, un système de contributions qui échappe de telle façon à un contrôle juridictionnel effectif serait en contradiction avec les droits fondamentaux garantis par l’Union, notamment avec le droit à la liberté d’entreprise consacré à l’article 16 de la Charte, le droit à la protection de la propriété garanti par l’article 17 de la Charte ainsi que le droit à un recours effectif et à une procédure équitable devant un tribunal indépendant et impartial, consacré à l’article 47, premier et deuxième alinéas, de la Charte. Dans le cadre d’un tel système, il ne serait pas non plus possible de garantir le respect des principes d’égalité de traitement, inscrit à l’article 20 de la Charte, de non-discrimination, inscrit à l’article 21 de la Charte, de proportionnalité et de sécurité juridique.

113    Pour ce qui est de la recevabilité de la présente branche, il ressort, à tout le moins sommairement, des allégations de la requérante qu’elle considère que, en raison de la complexité des dispositions dont elle excipe de l’illégalité, le juge de l’Union serait empêché d’effectuer correctement son contrôle. Un tel grief est suffisamment clair pour permettre au Tribunal de l’examiner.

114    Sur le fond, il y a lieu de relever que l’effectivité du contrôle juridictionnel garanti par l’article 47 de la Charte exige que l’intéressé puisse connaître les motifs sur lesquels est fondée la décision prise à son égard, soit par la lecture de la décision elle-même, soit par une communication de ces motifs faite sur sa demande, sans préjudice du pouvoir du juge compétent d’exiger de l’autorité en cause qu’elle communique lesdits motifs, afin de lui permettre de défendre ses droits dans les meilleures conditions possible et de décider en pleine connaissance de cause s’il est utile de saisir le juge compétent, ainsi que pour mettre ce dernier pleinement en mesure d’exercer le contrôle de la légalité de la décision en cause (voir arrêts du 26 avril 2018, Donnellan, C‑34/17, EU:C:2018:282, point 55, et du 24 novembre 2020, Minister van Buitenlandse Zaken, C‑225/19 et C‑226/19, EU:C:2020:951, point 43).

115    En outre, eu égard au principe du contradictoire, lequel fait partie des droits de la défense mentionnés à l’article 47 de la Charte, les parties à un procès doivent avoir le droit de prendre connaissance de toutes les pièces ou observations présentées au juge en vue d’influer sur sa décision et de les discuter. En effet, le droit fondamental à un recours juridictionnel effectif ne permet pas de fonder une décision juridictionnelle sur des faits et des documents dont les parties elles-mêmes, ou l’une d’entre elles, n’ont pas pu prendre connaissance et sur lesquels elles n’ont donc pas été en mesure de prendre position (voir arrêts du 4 juin 2013, ZZ, C‑300/11, EU:C:2013:363, points 55 et 56, et du 23 octobre 2014, Unitrading, C‑437/13, EU:C:2014:2318, point 21).

116    Cependant, dans certains cas exceptionnels, une autorité de l’Union peut s’opposer à la communication à l’intéressé des motifs précis et complets qui constituent le fondement d’une décision prise à l’encontre de celui-ci, en invoquant des raisons relevant de la protection des données confidentielles. Dans un tel cas, il est nécessaire de mettre en œuvre des techniques et des règles de droit permettant de concilier, d’une part, les considérations légitimes relatives à la protection de données confidentielles ayant été prises en considération pour l’adoption d’une telle décision et, d’autre part, la nécessité de garantir à suffisance au justiciable le respect de ses droits procéduraux, tels que le droit d’être entendu ainsi que le principe du contradictoire (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C-584/20 P et C-621/20 P, EU:C:2021:601, points 115 à 120 ; voir également, en ce sens et par analogie, arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 125).

117    Au regard de la nature spécifique des contributions ex ante, une telle conciliation doit être également effectuée dans le cas du calcul de ces contributions. En effet, ainsi qu’il ressort des considérants 105 à 107 de la directive 2014/59 et du considérant 41 du règlement no 806/2014, lesdites contributions visent à garantir, dans une logique d’ordre assurantiel, que le secteur financier procure des ressources financières suffisantes au MRU pour qu’il puisse remplir ses fonctions, tout en encourageant l’adoption, par les établissements concernés, de modes de fonctionnement moins risqués. Ainsi, le calcul des contributions ex ante repose, non sur l’application d’un taux à une assiette, mais, en application des articles 102 et 103 de la directive 2014/59 ainsi que des articles 69 et 70 du règlement no 806/2014, sur la définition d’un niveau cible final devant être atteint par la somme de ces contributions prélevées avant le 31 décembre 2023 (ci-après le « niveau cible final »), puis d’un niveau cible annuel devant être réparti entre les établissements agréés sur le territoire de tous les États membres participants (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 113).

118    Dès lors que le niveau cible final est défini comme devant s’élever à au moins 1 % du montant des dépôts couverts de l’ensemble de ces établissements et que la contribution annuelle de base de chaque établissement est calculée proportionnellement au montant de son passif net, rapporté au passif net cumulé de l’ensemble des établissements agréés sur le territoire de tous les États membres participants, il apparaît que le principe même de la méthode de calcul des contributions ex ante, tel qu’il ressort de la directive 2014/59 et du règlement no 806/2014, implique l’utilisation, par le CRU, de données couvertes par le secret des affaires (voir arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 114).

119    Or, les institutions et organismes de l’Union sont, en principe, tenus, en application du principe de protection du secret des affaires, qui constitue un principe général du droit de l’Union, lequel est, notamment, concrétisé à l’article 339 TFUE, de ne pas révéler aux concurrents d’un opérateur privé des informations confidentielles fournies par celui-ci (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, points 109 et 114 et jurisprudence citée).

120    Dans ces conditions, il appartenait à la Commission et au Conseil, lors de la mise en place du système de calcul des contributions ex ante par le règlement délégué 2015/63 et le règlement d’exécution 2015/81, de concilier le respect du secret des affaires avec le principe de protection juridictionnelle effective, de sorte que les données couvertes par ce secret ne puissent pas être communiquées aux intéressés et qu’elles ne puissent pas, notamment, être incluses dans la motivation des décisions fixant le montant des contributions ex ante.

121    Cette caractéristique du système de calcul des contributions ex ante n’empêche pas pour autant l’exercice d’un contrôle juridictionnel effectif par le juge de l’Union.

122    En effet, d’une part, rien dans les articles 4 à 7 et 9 ni dans l’annexe I du règlement délégué 2015/63 ne s’oppose à ce que, conformément à l’article 88, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement no 806/2014, le CRU divulgue, lors de l’adoption de sa décision fixant les contributions ex ante, des informations confidentielles obtenues dans le cadre de son activité sous une forme résumée ou agrégée, de telle sorte que les établissements concernés ne puissent être identifiés (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 136).

123    D’autre part, lorsque la motivation d’une telle décision doit être limitée en vue d’assurer la protection des données confidentielles, il appartient à l’auteur de cette décision, en cas de recours devant les juridictions de l’Union mettant en cause ces données, de se justifier devant ces dernières dans le cadre de l’instruction contentieuse (voir, en ce sens, arrêts du 1er juillet 2008, Chronopost et La Poste/UFEX e.a., C‑341/06 P et C‑342/06 P, EU:C:2008:375, point 110, et du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 145).

124    Le cas échéant, afin d’exercer un contrôle juridictionnel effectif conforme aux exigences de l’article 47 de la Charte, les juridictions de l’Union peuvent solliciter du CRU la production de données susceptibles de justifier les calculs dont l’exactitude est contestée devant elles, en assurant, en tant que de besoin, la confidentialité de ces données (arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 146).

125    En outre, en procédant à un examen de l’ensemble des éléments de droit et de fait fournis par le CRU, il incombe au juge de l’Union de vérifier le bien-fondé des raisons invoquées par celui-ci pour s’opposer à la communication des données utilisées aux fins du calcul de la contribution ex ante (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 126).

126    S’il s’avère que les raisons invoquées par le CRU s’opposent effectivement à la communication d’informations ou d’éléments de preuve produits devant le juge de l’Union, il est nécessaire de mettre en balance de manière appropriée les exigences liées au droit à une protection juridictionnelle effective, en particulier au respect du principe du contradictoire, et celles découlant de la protection du secret des affaires (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 128).

127    Il découle de ce qui précède que le calcul des contributions ex ante sur la base de données couvertes par le secret des affaires, conformément aux articles 4 à 7 et 9 ainsi qu’à l’annexe I du règlement délégué 2015/63, sans que lesdites données soient mises à la disposition des intéressés, n’implique pas en soi que ces dispositions soient incompatibles avec le principe de protection juridictionnelle effective.

128    En ce qui concerne, enfin, l’argument de la requérante tiré de la complexité du calcul des contributions ex ante, le seul fait que la méthode de calcul de ces contributions soit considérée comme étant complexe n’empêche pas l’exercice d’un contrôle juridictionnel effectif par le juge de l’Union. En particulier, ni les articles 4 à 7 et 9 ni l’annexe I du règlement délégué 2015/63 ne font obstacle à ce que le Tribunal prenne, parmi les mesures prévues, notamment, dans son règlement de procédure, celles qu’il juge nécessaires afin d’exercer un tel contrôle.

129    Dans ces conditions, il convient de rejeter la présente branche comme n’étant pas fondée.

d)      Sur la quatrième branche, tirée de la méconnaissance, par la Commission, du cadre d’habilitation établi par la réglementation de base et du principe d’égalité de traitement

130    La requérante fait valoir, en substance, que, lors de l’adoption du règlement délégué 2015/63, la Commission était tenue, conformément à l’article 290, paragraphe 1, TFUE, de compléter ou de modifier le cadre établi par le législateur de l’Union dans les bases juridiques d’habilitation dudit règlement délégué, à savoir dans la directive 2014/59 et dans le règlement no 806/2014, afin d’instaurer un système de calcul des contributions ex ante qui serait compatible avec le droit primaire, notamment avec le principe d’égalité de traitement.

131    À cet égard, il existerait des différences flagrantes entre le calcul de la composante de la contribution ex ante calculée sur la base nationale, d’une part, et celui de la composante de cette contribution calculée sur la base de l’union, d’autre part. Dans ces conditions, la méthode de calcul définie par le règlement délégué 2015/63 aurait dû atténuer les inégalités de traitement entre les établissements agréés dans les différents États membres. Comme ce règlement délégué ne l’a pas fait, il serait contraire au principe d’égalité de traitement.

132    Par ailleurs, le caractère invérifiable du calcul des contributions ex ante prévu par le règlement délégué 2015/63, tenant au fait que l’ajustement en fonction du profil de risque s’effectue sur la base des données confidentielles des autres établissements, prises en compte de manière interdépendante, n’aurait été imposé ni par la directive 2014/59 ni par le règlement no 806/2014. En effet, le système choisi par la Commission aurait pu être moins complexe, à l’instar du régime des contributions aux dépenses administratives du CRU, contributions que ce dernier perçoit conformément à l’article 65, paragraphe 3, du règlement no 806/2014 et qui seraient fixées selon une procédure plus simple et, partant, plus transparente.

133    Sans qu’il soit nécessaire d’examiner la recevabilité de la présente branche, il y a lieu de constater que, en tout état de cause, celle-ci n’est pas fondée.

134    En effet, s’agissant, premièrement, de l’argument tiré de ce que le règlement délégué 2015/63 viole le principe d’égalité de traitement en ce qu’il n’a pas « modifié » le système de calcul des contributions ex ante établi par la directive 2014/59 et le règlement no 806/2014 de manière à rendre ce système compatible avec ledit principe, il convient de rappeler que, lorsque le législateur de l’Union confère à la Commission, dans un acte législatif, un pouvoir délégué en vertu de l’article 290, paragraphe 1, TFUE, cette dernière est appelée à adopter des règles qui complètent ou modifient des éléments non essentiels de cet acte (arrêt du 18 mars 2014, Commission/Parlement et Conseil, C‑427/12, EU:C:2014:170, point 38).

135    Il résulte des termes « compléter ou modifier » que les deux catégories de pouvoir délégué prévues à l’article 290, paragraphe 1, TFUE se distinguent nettement. En effet, la délégation d’un pouvoir de « compléter » un acte législatif ne vise qu’à autoriser la Commission à concrétiser cet acte. Lorsque celle-ci exerce un tel pouvoir, son mandat est limité au développement en détail, dans le respect de l’intégralité de l’acte législatif arrêté par le législateur, des éléments non essentiels de la réglementation concernée que le législateur n’a pas définis (arrêt du 17 mars 2016, Parlement/Commission, C‑286/14, EU:C:2016:183, points 40 et 41).

136    En l’espèce, le règlement délégué 2015/63 a été adopté sur le fondement de l’article 103, paragraphe 7, de la directive 2014/59, qui habilite la Commission à « préciser » l’adaptation des contributions ex ante au profil de risque. Or, le verbe « préciser » doit être entendu comme visant à « compléter » l’acte législatif, notamment afin de prendre en considération des éléments techniques (voir, par analogie, arrêt du 17 mars 2016, Parlement/Commission, C‑286/14, EU:C:2016:183, points 47 et suivants).

137    Il en résulte que la Commission ne disposait pas, lors de l’adoption du règlement délégué 2015/63, de la compétence pour modifier le cadre fixé par la directive 2014/59 et le règlement no 806/2014 quant à la méthode de calcul des contributions ex ante.

138    Dans ce contexte, pour ce qui est de l’argument de la requérante selon lequel le caractère prétendument invérifiable du calcul des contributions ex ante n’aurait été imposé ni par la directive 2014/59 ni par le règlement no 806/2014, il ressort de la jurisprudence citée aux points 117 et 118 ci-dessus que le principe même de la méthode de calcul des contributions ex ante, tel qu’il ressort de la directive 2014/59 et du règlement no 806/2014, implique l’utilisation, par le CRU, de données couvertes par le secret des affaires ne pouvant pas être reprises dans la motivation de la décision attaquée (arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, points 113 et 114).

139    En ce qui concerne, deuxièmement, l’argument tiré de ce que le règlement délégué 2015/63 viole le principe d’égalité de traitement en ce qu’il n’a pas « complété » le système de calcul des contributions ex ante établi par la directive 2014/59 et le règlement no 806/2014 de manière à rendre ce système compatible avec ledit principe, il y a lieu de rappeler que l’article 103, paragraphe 7, de cette directive a habilité la Commission à préciser la notion d’adaptation des contributions ex ante en fonction du profil de risque des établissements « en tenant compte de tous les éléments [énumérés dans cette disposition] ».

140    Or, à supposer même que l’argument de la requérante soit interprété en ce sens qu’elle reproche à la Commission une erreur d’appréciation lors de la mise en œuvre de l’article 103, paragraphe 7, de la directive 2014/59, la requérante n’explique pas, à suffisance de droit, les raisons pour lesquelles la Commission aurait dépassé les limites de son pouvoir d’appréciation.

141    Quant à la disparité entre la composante de la contribution ex ante calculée sur la base nationale et la composante de cette contribution calculée sur la base de l’union, troisièmement, il y a lieu, tout d’abord, de constater que la coexistence de ces deux composantes résulte de l’article 8, paragraphe 1, du règlement d’exécution 2015/81, qui a également prévu un mécanisme dit de « phasing‑in », c’est-à-dire de diminution progressive de l’importance de la première composante au profit de la seconde jusqu’à la disparition complète de la première.

142    Ensuite, les différences de calcul entre ces deux composantes découlent directement des bases de calcul différentes prévues par l’article 103 de la directive 2014/59 et par les articles 69 et 70 du règlement no 806/2014, auxquels renvoie l’article 8, paragraphe 1, du règlement d’exécution 2015/81. En outre, cette dernière disposition a été adoptée par le Conseil postérieurement à l’adoption du règlement délégué 2015/63. Or, la requérante n’a contesté ni la validité de cet article 8, paragraphe 1, du règlement d’exécution 2015/81 ni celle de l’article 103 de la directive 2014/59 ou des articles 69 et 70 du règlement no 806/2014, en ce que ces dispositions prévoient les deux composantes du calcul des contributions ex ante.

143    Enfin, la directive 2014/59 et le règlement no 806/2014 ne confèrent aucun pouvoir de délégation à la Commission pour harmoniser, dans un acte délégué, la méthode de calcul de la composante de la contribution ex ante calculée sur la base nationale et celle de la composante de cette contribution calculée sur la base de l’union. Par conséquent, la Commission n’avait pas la compétence pour effectuer une telle harmonisation dans le règlement délégué 2015/63.

144    Il découle de tout ce qui précède que la quatrième branche du quatrième moyen doit être écartée, de même que le quatrième moyen dans son intégralité.

B.      Sur les moyens portant sur la légalité de la décision attaquée

1.      Sur le deuxième moyen, tiré d’une violation des formes substantielles en raison de l’insuffisance de motivation de la décision attaquée

145    La requérante fait valoir que la décision attaquée ne satisfait pas aux exigences de l’obligation de motivation découlant de l’article 296, deuxième alinéa, TFUE et de l’article 41, paragraphe 1 et paragraphe 2, sous c), de la Charte.

146    Le deuxième moyen s’articule, en substance, autour de cinq branches.

a)      Observations liminaires

147    L’article 296, deuxième alinéa, TFUE dispose que les actes juridiques sont motivés. De même, le droit à une bonne administration, consacré à l’article 41 de la Charte, prévoit l’obligation, pour les institutions, les organes et les organismes de l’Union, de motiver leurs décisions.

148    La motivation d’une décision d’une institution, d’un organe ou d’un organisme de l’Union revêt une importance toute particulière, en tant qu’elle permet à l’intéressé de décider en pleine connaissance de cause s’il entend introduire un recours contre cette décision ainsi qu’à la juridiction compétente d’exercer son contrôle, et qu’elle constitue donc l’une des conditions de l’effectivité du contrôle juridictionnel garanti par l’article 47 de la Charte (voir arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 103 et jurisprudence citée).

149    Une telle motivation doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et au contexte dans lequel il a été adopté. À cet égard, il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où le caractère suffisant d’une motivation doit être apprécié au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée et, en particulier, de l’intérêt que les personnes concernées par l’acte peuvent avoir à recevoir des explications. Par conséquent, un acte faisant grief est suffisamment motivé dès lors qu’il est intervenu dans un contexte connu de l’intéressé, qui lui permet de comprendre la portée de la mesure prise à son égard (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 104 et jurisprudence citée).

150    Afin d’examiner si cette motivation est suffisante en ce qui concerne une décision fixant les contributions ex ante, il convient de rappeler, premièrement, qu’il ne saurait être déduit de la jurisprudence de la Cour que la motivation de toute décision d’une institution, d’un organe ou d’un organisme de l’Union mettant à la charge d’un opérateur privé le paiement d’une somme d’argent doit nécessairement comprendre l’intégralité des éléments permettant à son destinataire de vérifier l’exactitude du calcul du montant de cette somme d’argent (voir arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 105 et jurisprudence citée).

151    Deuxièmement, les institutions, les organes et les organismes de l’Union sont, en principe, tenus, en application du principe de protection du secret des affaires, qui constitue un principe général du droit de l’Union, lequel est, notamment, concrétisé à l’article 339 TFUE, de ne pas révéler aux concurrents d’un opérateur privé des informations confidentielles fournies par celui-ci (voir arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 109 et jurisprudence citée).

152    Troisièmement, considérer que la motivation de la décision du CRU fixant des contributions ex ante doit nécessairement permettre aux établissements de vérifier l’exactitude du calcul de leur contribution ex ante impliquerait, nécessairement, d’interdire au législateur de l’Union d’instituer un mode de calcul de cette contribution intégrant des données dont le caractère confidentiel est protégé par le droit de l’Union et, partant, de réduire de manière excessive le large pouvoir d’appréciation dont doit disposer, à cette fin, ce législateur, en l’empêchant, notamment, d’opter pour une méthode susceptible d’assurer une adaptation dynamique du financement du FRU aux évolutions du secteur financier, par la prise en compte comparative, en particulier, de la situation financière de chaque établissement agréé sur le territoire d’un État membre participant (arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 118).

153    Quatrièmement, s’il résulte de ce qui précède que l’obligation de motivation pesant sur le CRU doit être mise en balance, en raison de la logique du système de financement du FRU et du mode de calcul établi par le législateur de l’Union, avec l’obligation du CRU de respecter le secret des affaires des établissements concernés, il n’en demeure pas moins que cette dernière obligation ne doit pas être interprétée à ce point extensivement qu’elle vide l’obligation de motivation de sa substance (arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 120).

154    Toutefois, il ne saurait être considéré, dans le cadre de la mise en balance de l’obligation de motivation avec le principe de protection du secret des affaires, que motiver une décision mettant à la charge d’un opérateur privé le paiement d’une somme d’argent sans lui fournir l’intégralité des éléments permettant de vérifier avec exactitude le calcul du montant de cette somme d’argent porte nécessairement, dans tous les cas, atteinte à la substance de l’obligation de motivation (arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 121).

155    S’agissant de la décision du CRU fixant des contributions ex ante, l’obligation de motivation doit être considérée comme étant respectée lorsque les personnes concernées par cette décision, tout en ne se voyant pas transmettre de données couvertes par le secret des affaires, disposent de la méthode de calcul utilisée par le CRU et d’informations suffisantes pour comprendre, en substance, de quelle façon leur situation individuelle a été prise en compte, aux fins du calcul de leur contribution ex ante, au regard de la situation de l’ensemble des autres établissements concernés (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 122).

156    Dans un tel cas, ces personnes sont, en effet, en mesure de vérifier si leur contribution ex ante a été fixée de manière arbitraire, en méconnaissant la réalité de leur situation économique ou en utilisant des données relatives au reste du secteur financier dépourvues de plausibilité. Lesdites personnes peuvent, dès lors, comprendre les justifications de la décision fixant leur contribution ex ante et évaluer s’il apparaît utile d’introduire un recours contre cette décision, de sorte qu’il serait excessif d’exiger du CRU qu’il communique chacun des éléments chiffrés sur lesquels s’appuie le calcul de la contribution ex ante de chaque établissement concerné (arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 123).

157    Il résulte de ce qui précède que le CRU n’est pas, notamment, tenu de fournir à un établissement les données lui permettant de vérifier, de manière complète, l’exactitude de la valeur du multiplicateur d’ajustement, puisque cette vérification supposerait de disposer de données couvertes par le secret des affaires relatives à la situation économique de chacun des autres établissements concernés (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 135).

158    En revanche, il incombe au CRU de publier ou de transmettre aux établissements concernés, sous une forme agrégée et anonymisée, les informations relatives à ces établissements, utilisées pour calculer cette contribution, dans la mesure où ces informations peuvent être communiquées sans porter atteinte au secret des affaires (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 166).

159    Parmi les informations devant ainsi être mises à la disposition des établissements figurent, notamment, les valeurs limites de chaque bin et celles des indicateurs de risque s’y rapportant, sur la base desquelles la contribution ex ante des établissements a été adaptée au profil de risque de ceux-ci (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 167).

160    C’est au regard de ces considérations qu’il convient d’examiner les arguments de la requérante développés dans le cadre du deuxième moyen.

b)      Sur la première branche, relative à la motivation de la détermination du niveau cible annuel

161    Selon la requérante, la décision attaquée n’est pas dûment motivée en ce qui concerne la détermination du niveau cible annuel. La raison pour laquelle le CRU n’a pas retenu, au regard des répercussions économiques de la pandémie de COVID‑19 sur le secteur bancaire, un niveau cible annuel moins élevé, à l’instar des années précédentes, ne serait, notamment, pas claire.

162    À cet égard, le CRU se serait limité à des affirmations stéréotypées et générales ainsi qu’à une énumération d’indicateurs à prendre en compte lors de la détermination du niveau cible annuel, sans expliquer comment il avait évalué ces indicateurs. En particulier, il n’aurait pas expliqué de quelle façon il avait apprécié les éventuels effets procycliques des contributions ex ante sur la situation financière des établissements et les conséquences de cette appréciation sur la détermination du niveau cible annuel.

163    Par conséquent, la décision attaquée ne permettrait pas à la requérante d’apprécier si la fixation du niveau cible annuel à un huitième de 1,35 %, au lieu de 1 %, du montant moyen des dépôts couverts en 2020 respecte l’exigence de la réglementation applicable selon laquelle le niveau cible annuel ne devrait pas dépasser un huitième du niveau cible final.

164    Le CRU rétorque qu’il doit nécessairement s’appuyer, compte tenu du caractère à la fois prospectif et exhaustif du calcul du niveau cible final, sur certaines hypothèses et sur son expertise pour effectuer des projections lors de la détermination d’un tel niveau à chaque période de contribution. Par ailleurs, il ressortirait des considérants 43 à 48 de la décision attaquée que le CRU a dûment tenu compte de la pandémie de COVID-19 dans son analyse de la phase du cycle économique et des effets procycliques potentiels que les contributions ex ante pouvaient avoir sur la situation financière des établissements.

165    En outre, la requérante méconnaîtrait le caractère dynamique du niveau cible final, qui découlerait du fait que la somme des dépôts couverts utilisée comme valeur de référence à la fin de la période initiale ne sera, par nature, connue que le 31 décembre 2023 et ne peut être que pronostiquée avant cette date. À cet égard, la décision attaquée serait suffisamment motivée, même sans indication explicite d’un montant précis du niveau cible final. En effet, il ressortirait de cette décision que, à partir d’avril 2021, les dépôts couverts devaient continuer à augmenter jusqu’à la fin de la période initiale. Il devrait donc être clair pour la requérante que la fixation du niveau cible annuel à un huitième de 1 % du montant moyen des dépôts couverts en 2020 n’aurait pas permis de respecter l’exigence prévue à l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014 d’atteindre, à la fin de la période initiale, un niveau cible final d’au moins 1 % des dépôts couverts.

166    À titre liminaire, il convient de rappeler que, conformément à l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014, au terme de la période initiale, les moyens financiers disponibles dans le FRU doivent atteindre le niveau cible final, qui correspond à au moins 1 % du montant des dépôts couverts de l’ensemble des établissements agréés sur le territoire de tous les États membres participants.

167    Selon l’article 69, paragraphe 2, du règlement no 806/2014, au cours de la période initiale, les contributions ex ante doivent être réparties aussi uniformément que possible dans le temps jusqu’à ce que le niveau cible final mentionné au point 166 ci-dessus soit atteint, mais en tenant dûment compte de la phase du cycle d’activité et de l’incidence que les contributions procycliques peuvent avoir sur la position financière des établissements.

168    L’article 70, paragraphe 2, du règlement no 806/2014 précise que, chaque année, les contributions dues par l’ensemble des établissements agréés sur le territoire de tous les États membres participants ne dépassent pas 12,5 % du niveau cible final.

169    En ce qui concerne le mode de calcul des contributions ex ante, l’article 4, paragraphe 2, du règlement délégué 2015/63 prévoit que le CRU détermine leur montant sur la base du niveau cible annuel, compte tenu du niveau cible final, et sur la base du montant moyen des dépôts couverts de l’année précédente, calculé trimestriellement, pour tous les établissements agréés sur le territoire de tous les États membres participants.

170    De même, selon l’article 4 du règlement d’exécution 2015/81, le CRU calcule la contribution ex ante pour chaque établissement sur la base du niveau cible annuel, qui doit être établi au regard du niveau cible final et conformément à la méthode exposée dans le règlement délégué 2015/63.

171    En l’espèce, ainsi qu’il ressort du considérant 48 de la décision attaquée, le CRU a fixé, pour la période de contribution 2021, le montant du niveau cible annuel à 11 287 677 212,56 euros.

172    Aux considérants 36 et 37 de la décision attaquée, le CRU a expliqué, en substance, que le niveau cible annuel devait être déterminé sur la base d’une analyse portant sur l’évolution des dépôts couverts au cours des années précédentes, sur toute évolution pertinente de la situation économique ainsi que sur une analyse portant sur les indicateurs relatifs à la phase du cycle d’activité et sur les effets que des contributions procycliques auraient sur la situation financière des établissements. Par la suite, le CRU a considéré approprié de fixer un coefficient qui était fondé sur cette analyse et sur les moyens financiers disponibles dans le FRU (ci-après le « coefficient »). Le CRU a appliqué ce coefficient à un huitième du montant moyen des dépôts couverts en 2020, aux fins d’obtenir le niveau cible annuel.

173    Le CRU a exposé la démarche suivie pour fixer le coefficient aux considérants 38 à 47 de la décision attaquée.

174    Au considérant 38 de la décision attaquée, le CRU a constaté une tendance constante à la hausse des dépôts couverts pour tous les établissements des États membres participants. En particulier, le montant moyen de ces dépôts, calculé trimestriellement, s’élevait pour l’année 2020 à 6,689 billions d’euros.

175    Aux considérants 40 et 41 de la décision attaquée, le CRU a présenté l’évolution pronostiquée des dépôts couverts pour les trois années restantes de la période initiale, à savoir de 2021 à 2023. Il a estimé que les taux annuels de croissance des dépôts couverts jusqu’à la fin de la période initiale se situeraient entre 4 % et 7 %.

176    Aux considérants 42 à 45 de la décision attaquée, le CRU a présenté une évaluation de la phase du cycle d’activité et de l’effet procyclique potentiel que les contributions ex ante pourraient avoir sur la situation financière des établissements. Pour ce faire, il a indiqué avoir tenu compte de plusieurs indicateurs, tels que la prévision de croissance du produit intérieur brut de la Commission et les projections de la Banque centrale européenne (BCE) à cet égard ou le flux de crédit du secteur privé en pourcentage du produit intérieur brut.

177    Au considérant 46 de la décision attaquée, le CRU a conclu que, s’il était raisonnable de s’attendre à la poursuite de la croissance des dépôts couverts au sein de l’union bancaire, le rythme de cette croissance serait inférieur à celui de l’année 2020. À cet égard, le CRU a indiqué, au considérant 47 de la décision attaquée, avoir adopté une « approche prudente » en ce qui concernait les taux de croissance des dépôts couverts pour les années à venir jusqu’à 2023.

178    Au regard de ces considérations, le CRU a fixé, au considérant 48 de la décision attaquée, la valeur du coefficient à 1,35 %. Il a ensuite calculé le montant du niveau cible annuel, en multipliant le montant moyen des dépôts couverts en 2020 par ce coefficient et en divisant le résultat de ce calcul par huit, conformément à la formule mathématique suivante, figurant au considérant 48 de ladite décision :

« Cible0 [montant du niveau cible annuel] = Total dépôts couverts2020 * 0,0135 * ⅛ = EUR 11 287 677 212,56 ».

179    Lors de l’audience, le CRU a cependant indiqué qu’il avait déterminé le niveau cible annuel pour la période de contribution 2021 comme suit.

180    Premièrement, sur la base d’une analyse prospective, le CRU a fixé le montant des dépôts couverts de l’ensemble des établissements agréés sur le territoire de tous les États membres participants, pronostiqué pour la fin de la période initiale, à environ 7,5 billions d’euros. Pour aboutir à ce montant, le CRU a pris en compte le montant moyen des dépôts couverts en 2020, à savoir 6,689 billions d’euros, un taux de croissance annuel des dépôts couverts de 4 % ainsi que le nombre de périodes de contribution restantes jusqu’à la fin de la période initiale, à savoir trois.

181    Deuxièmement, conformément à l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014, le CRU a calculé 1 % de ces 7,5 billions d’euros pour obtenir le montant estimé du niveau cible final devant être atteint le 31 décembre 2023, à savoir environ 75 milliards d’euros.

182    Troisièmement, le CRU a déduit de ce dernier montant les ressources financières déjà disponibles dans le FRU en 2021, c’est-à-dire environ 42 milliards d’euros, pour obtenir le montant qu’il restait à percevoir pendant les périodes de contribution restantes avant la fin de la période initiale, à savoir de 2021 à 2023. Ce montant s’élevait à environ 33 milliards d’euros.

183    Quatrièmement, le CRU a divisé ce dernier montant par trois pour le répartir uniformément entre lesdites trois périodes de contribution restantes. Le niveau cible annuel pour la période de contribution 2021 a été ainsi fixé au montant mentionné au point 171 ci-dessus, à savoir environ 11,287 milliards d’euros.

184    Le CRU a également affirmé, lors de l’audience, qu’il avait rendu publics des éléments d’information sur lesquels avait été fondée la méthode décrite aux points 180 à 183 ci-dessus et qui auraient permis à la requérante de comprendre la méthode par laquelle le niveau cible annuel avait été déterminé. En particulier, il a précisé qu’il avait publié sur son site Internet, en mai 2021, c’est-à-dire après l’adoption de la décision attaquée, mais avant l’introduction du présent recours, une fiche descriptive dénommée « Fact Sheet 2021 » (ci-après la « fiche descriptive »), qui indiquait le montant estimé du niveau cible final. De même, le CRU a affirmé que le montant des moyens financiers disponibles dans le FRU était également disponible sur son site Internet ainsi que par le biais d’autres sources publiques, et ce bien avant l’adoption de la décision attaquée.

185    Afin d’examiner si le CRU a respecté son obligation de motivation en ce qui concerne la détermination du niveau cible annuel, il convient tout d’abord de rappeler qu’un défaut ou une insuffisance de motivation constitue un moyen d’ordre public pouvant, voire devant, être soulevé d’office par le juge de l’Union (voir arrêt du 2 décembre 2009, Commission/Irlande e.a., C‑89/08 P, EU:C:2009:742, point 34 et jurisprudence citée). Par conséquent, le Tribunal peut, voire doit, prendre en compte également d’autres défauts de motivation que ceux invoqués par la requérante, et ce, notamment, lorsque ceux-ci se révèlent au cours de la procédure.

186    À cette fin, les parties ont été entendues, au cours de la phase orale de la procédure, sur tous les éventuels défauts de motivation dont serait entachée la décision attaquée en ce qui concerne la détermination du niveau cible annuel. En particulier, interrogé expressément et à plusieurs reprises à cet égard, le CRU a décrit, étape par étape, la méthode qu’il avait réellement suivie pour déterminer le niveau cible annuel pour la période de contribution 2021, telle qu’elle est exposée aux points 180 à 183 ci-dessus.

187    En ce qui concerne, ensuite, le contenu de l’obligation de motivation, il ressort de la jurisprudence que la motivation d’une décision prise par une institution ou un organe de l’Union doit être, notamment, dépourvue de contradictions pour permettre aux intéressés de connaître les motifs réels de cette décision, en vue de défendre leurs droits devant la juridiction compétente, et à cette dernière d’exercer son contrôle (voir, en ce sens, arrêts du 10 juillet 2008, Bertelsmann et Sony Corporation of America/Impala, C‑413/06 P, EU:C:2008:392, point 169 et jurisprudence citée ; du 22 septembre 2005, Suproco/Commission, T‑101/03, EU:T:2005:336, points 20 et 45 à 47, et du 16 décembre 2015, Grèce/Commission, T‑241/13, EU:T:2015:982, point 56).

188    De même, lorsque l’auteur de la décision attaquée fournit certaines explications concernant les motifs de celle-ci au cours de la procédure devant le juge de l’Union, ces explications doivent être cohérentes avec les considérations exposées dans cette décision (voir, en ce sens, arrêts du 22 septembre 2005, Suproco/Commission, T‑101/03, EU:T:2005:336, points 45 à 47, et du 13 décembre 2016, Printeos e.a./Commission, T‑95/15, EU:T:2016:722, points 54 et 55).

189    En effet, si les considérations exposées dans la décision attaquée ne sont pas cohérentes avec de telles explications fournies lors de la procédure juridictionnelle, la motivation de la décision concernée ne remplit pas les fonctions rappelées aux points 148 et 149 ci-dessus. En particulier, une telle incohérence empêche, d’une part, les intéressés de connaître les motifs réels de la décision attaquée, avant l’introduction du recours, et de préparer leur défense à leur égard et, d’autre part, le juge de l’Union d’identifier les motifs ayant servi de véritable support juridique à cette décision et d’examiner leur conformité aux règles applicables.

190    Enfin, il y a lieu de rappeler que, lorsque le CRU adopte une décision fixant les contributions ex ante, il doit porter à la connaissance des établissements concernés la méthode de calcul de ces contributions (voir arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 122).

191    Il doit en aller de même pour la méthode de détermination du niveau cible annuel, ce montant revêtant une importance essentielle dans l’économie d’une telle décision. En effet, ainsi qu’il ressort de l’article 4 du règlement d’exécution 2015/81, le mode de calcul des contributions ex ante consiste en la répartition dudit montant entre tous les établissements concernés, de sorte qu’une augmentation ou une réduction de ce même montant entraîne une augmentation ou une réduction correspondante de la contribution ex ante de chacun de ces établissements.

192    Il ressort de ce qui précède que, si le CRU est tenu de fournir aux établissements, par le biais de la décision attaquée, des explications concernant la méthode de détermination du niveau cible annuel, ces explications doivent être cohérentes avec les explications fournies par le CRU pendant la procédure juridictionnelle et portant sur la méthode réellement appliquée.

193    Or, tel n’est pas le cas dans la présente affaire.

194    En effet, il convient tout d’abord de relever que la décision attaquée a exposé, au considérant 48, une formule mathématique qu’elle a présentée comme étant à la base de la détermination du niveau cible annuel. Or, il s’avère que cette formule n’intègre pas les éléments de la méthode réellement appliquée par le CRU, telle qu’explicitée lors de l’audience. En effet, ainsi qu’il ressort des points 180 à 183 ci-dessus, le CRU a obtenu le montant du niveau cible annuel, dans le cadre de cette méthode, en déduisant du niveau cible final les moyens financiers disponibles dans le FRU, en vue de calculer le montant qu’il restait à percevoir jusqu’à la fin de la période initiale et en divisant ce dernier montant par trois. Or, ces deux étapes du calcul ne trouvent aucune expression dans ladite formule mathématique.

195    Par ailleurs, cette constatation ne saurait être remise en cause par l’affirmation du CRU selon laquelle il a publié, en mai 2021, la fiche descriptive, qui contenait une fourchette indiquant les éventuels montants du niveau cible final et, sur son site Internet, le montant des moyens financiers disponibles dans le FRU. En effet, indépendamment de la question de savoir si la requérante avait effectivement connaissance de ces montants, ces derniers n’étaient pas, à eux seuls, de nature à lui permettre de comprendre que les deux opérations mentionnées au point 194 ci-dessus avaient été effectivement appliquées par le CRU, étant précisé, au surplus, que la formule mathématique prévue au considérant 48 de la décision attaquée ne les mentionnait même pas.

196    Des incohérences similaires affectent également la manière dont a été fixé le coefficient de 1,35 %, qui joue pourtant un rôle primordial dans la formule mathématique mentionnée au point 178 ci-dessus. En effet, ce coefficient pourrait être compris en ce sens qu’il est fondé, parmi d’autres paramètres, sur la croissance pronostiquée des dépôts couverts pendant les années restantes de la période initiale. Or, comme le CRU l’a reconnu lors de l’audience, ce coefficient a été fixé de manière à pouvoir justifier le résultat du calcul du montant du niveau cible annuel, c’est-à-dire après que le CRU a calculé ce montant en application des quatre étapes exposées aux points 180 à 183 ci-dessus et, notamment, par la division par trois du montant issu de la déduction des moyens financiers disponibles dans le FRU du niveau cible final. Or, cette démarche ne ressort aucunement de la décision attaquée.

197    En outre, il convient de rappeler que, selon la fiche descriptive, le montant du niveau cible final estimé se situait dans une fourchette comprise entre 70 et 75 milliards d’euros. Or, cette fourchette s’avère incohérente avec la fourchette du taux de croissance des dépôts couverts comprise entre 4 % et 7 % figurant au considérant 41 de la décision attaquée. En effet, le CRU a indiqué à l’audience que, aux fins de la détermination du niveau cible annuel, il avait tenu compte du taux de croissance des dépôts couverts de 4 % – qui était le taux le plus bas de la seconde fourchette – et qu’il avait ainsi obtenu le niveau cible final estimé de 75 milliards d’euros – qui constituait la valeur la plus élevée de la première fourchette. Il s’avère ainsi qu’il existe une discordance entre ces deux fourchettes. En effet, d’une part, la fourchette portant sur le taux d’évolution des dépôts couverts comprend également des valeurs supérieures au taux de 4 %, dont l’application aurait pourtant abouti à un montant estimé du niveau cible final supérieur à ceux inclus dans la fourchette relative à ce niveau cible. D’autre part, il est impossible pour la requérante de comprendre la raison pour laquelle le CRU a inclus dans la fourchette afférente audit niveau cible des montants inférieurs à 75 milliards d’euros. En effet, pour y aboutir, il aurait été nécessaire d’appliquer un taux en deçà de 4 %, qui n’est pourtant pas compris dans la fourchette relative au taux de croissance des dépôts couverts. Dans ces conditions, la requérante n’était pas en mesure de déterminer la manière dont le CRU avait utilisé la fourchette portant sur le taux d’évolution de ces dépôts pour aboutir au calcul du niveau cible final estimé.

198    Il s’ensuit que, en ce qui concerne la détermination du niveau cible annuel, la méthode réellement appliquée par le CRU, telle qu’explicitée lors de l’audience, ne correspond pas à celle décrite dans la décision attaquée, de sorte que les motifs réels, au regard desquels a été fixé ce niveau cible, ne pouvaient être identifiés sur la base de la décision attaquée ni par les établissements ni par le Tribunal.

199    Eu égard à ce qui précède, il y a lieu de constater que la décision attaquée est entachée de vices de motivation en ce qui concerne la détermination du niveau cible annuel.

200    Par conséquent, il convient d’accueillir la première branche du deuxième moyen. Compte tenu des enjeux juridiques et économiques de la présente affaire, il est pourtant dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice de poursuivre l’examen des autres moyens du recours.

c)      Sur la deuxième branche, relative à l’absence de publication par le CRU des décisions intermédiaires

201    La requérante soutient qu’elle n’a pas eu la possibilité de prendre connaissance des décisions intermédiaires sur lesquelles reposerait la décision attaquée, ce qui contribuerait à l’opacité du processus suivi par le CRU. L’absence de publication de ces décisions entraînerait ainsi un défaut de motivation de la décision attaquée. En effet, en l’absence de divulgation de ces décisions, la requérante n’aurait pas la possibilité de vérifier les considérations du CRU, notamment dans des domaines dans lesquels ce dernier dispose d’une large marge d’appréciation, comme ce serait le cas pour la détermination du niveau cible final, les corrections des données et les limitations imposées au recours aux engagements de paiement irrévocables (ci-après les « EPI »). Ce manque de transparence violerait l’obligation de motivation.

202    Le CRU considère que la deuxième branche n’est pas fondée.

203    Il ressort de la jurisprudence que la motivation figurant dans la décision fixant des contributions ex ante doit être considérée comme étant insuffisante lorsque cette motivation repose, s’agissant de certains éléments pour lesquels le CRU doit fournir une motivation, uniquement sur d’autres actes juridiques, tels que les décisions intermédiaires, que le CRU a adoptées aux fins de préciser et, dans certains cas, compléter certains aspects de la fixation desdites contributions, mais qu’il n’a pas publiées ou autrement communiquées aux établissements (voir arrêts du 28 novembre 2019, Hypo Vorarlberg Bank/CRU, T‑377/16, T‑645/16 et T‑809/16, EU:T:2019:823, points 194 et 199, et du 28 novembre 2019, Portigon/CRU, T‑365/16, EU:T:2019:824, points 171 et 176).

204    En l’espèce, le CRU a produit, en réponse à une mesure d’instruction du Tribunal du 9 novembre 2022, les décisions intermédiaires qui étaient pertinentes pour le calcul des contributions ex ante pour la période de contribution 2021. Ces décisions, qui ont été ensuite signifiées à la requérante dans leur version non confidentielle, comportent, notamment, des positions internes qui étaient adressées au personnel du CRU en vue de le guider dans le processus de calcul des contributions ex ante.

205    Toutefois, ainsi qu’il ressort du résumé de la décision attaquée aux points 5 à 17 ci-dessus, celle-ci comporte une motivation concernant la fixation des contributions ex ante pour la période de contribution 2021. Il en est ainsi, notamment, de tous les aspects du calcul de ces contributions mentionnés par la requérante au soutien de la présente branche.

206    En outre, la requérante n’a identifié aucun élément figurant dans les décisions intermédiaires qui n’a pas été repris dans la décision attaquée elle-même et qui aurait été pris en compte aux fins de la détermination des contributions ex ante pour la période de contribution 2021.

207    Par conséquent, rien n’indique que l’existence des décisions intermédiaires ait eu une incidence quelconque sur l’étendue des informations dont la requérante disposait afin de pouvoir vérifier la légalité de la fixation de sa contribution ex ante et de la contester devant le juge de l’Union. En particulier, ainsi qu’il ressort de l’examen des autres branches du deuxième moyen, la requérante a pu comprendre tous les éléments du calcul de la contribution ex ante, à l’exception de la détermination du niveau cible annuel, sur la seule base de la décision attaquée.

208    Partant, la décision attaquée se distingue de la décision du CRU fixant les contributions ex ante qui faisait l’objet des affaires ayant donné lieu aux arrêts du 28 novembre 2019, Hypo Vorarlberg Bank/CRU (T‑377/16, T‑645/16 et T‑809/16, EU:T:2019:823), et du 28 novembre 2019, Portigon/CRU (T‑365/16, EU:T:2019:824). En effet, cette dernière décision ne comportait pas, notamment, d’indications concernant la détermination par le CRU du pilier de risque IV, de telles indications ne figurant que dans les décisions intermédiaires en cause dans ces affaires (arrêts du 28 novembre 2019, Hypo Vorarlberg Bank/CRU, T‑377/16, T‑645/16 et T‑809/16, EU:T:2019:823, point 195, et du 28 novembre 2019, Portigon/CRU, T‑365/16, EU:T:2019:824, point 172).

209    Enfin, la requérante n’a pas expliqué comment – compte tenu des considérations figurant aux points 205 à 207 ci-dessus – la publication des décisions intermédiaires lui aurait permis d’exercer, dans de meilleures conditions, ses droits devant les juridictions de l’Union ni comment une telle publication aurait permis à ces dernières d’exercer plus efficacement leur contrôle.

210    Dans ces conditions, la seule absence de publication ou de communication des décisions intermédiaires ne saurait, en elle-même, entraîner un défaut de motivation de la décision attaquée.

211    Par conséquent, il convient de rejeter la deuxième branche comme n’étant pas fondée.

d)      Sur la troisième branche, relative à la motivation de la décision attaquée en ce qui concerne l’absence d’application de certains indicateurs de risque

212    La requérante soutient que la décision attaquée ne fournit pas de motivation suffisante en ce qui concerne l’absence d’application de certains indicateurs de risque aux fins du calcul des contributions ex ante pour la période de contribution 2021.

213    En effet, le CRU n’aurait pas appliqué, dans cette décision, quatre indicateurs et sous-indicateurs de risque que le règlement délégué 2015/63 prévoit pourtant aux fins de la fixation des contributions ex ante, à savoir l’indicateur « ratio de financement net stable » (ci-après l’« indicateur RFNS »), l’indicateur « fonds propres et engagements ou passifs éligibles détenus par l’établissement au-delà de l’exigence minimale de fonds propres et d’engagements ou passifs éligibles » (ci-après l’« indicateur EMEE ») et les sous-indicateurs « complexité » et « résolvabilité ».

214    À défaut d’informations suffisantes, il serait impossible de savoir dans quelle mesure l’absence d’application desdits indicateurs et sous-indicateurs de risque s’est répercutée de manière positive ou négative sur la contribution ex ante de la requérante. En tout état de cause, la raison pour laquelle un établissement, tel que la requérante, devrait être pénalisé du fait qu’un autre établissement n’a pas communiqué certaines données de la manière requise, ce qui a conduit à l’absence d’application des indicateurs et sous-indicateurs de risque concernés, ne serait pas claire.

215    Le CRU conteste l’argumentation de la requérante.

216    Il convient de relever, tout d’abord, que l’article 20, paragraphe 1, du règlement délégué 2015/63 prévoit que « [l]orsque les informations requises au titre d’un indicateur de risque spécifique visé à l’annexe II [de ce règlement délégué] ne font pas partie des exigences d’information prudentielle, visées à l’article 14 [dudit règlement délégué], applicables pour l’exercice de référence, cet indicateur de risque ne s’applique pas tant que cette exigence d’information prudentielle n’est pas devenue applicable ».

217    En l’espèce, le CRU a indiqué, aux considérants 21 à 29 de la décision attaquée, qu’il n’avait pas appliqué les indicateurs RFNS et EMEE ni les sous-indicateurs « complexité » et « résolvabilité » au motif que, au moment de l’adoption de cette décision, les informations requises au titre de ces indicateurs et sous-indicateurs de risque n’étaient pas disponibles sous une forme harmonisée pour tous les établissements.

218    Plus particulièrement, s’agissant de l’indicateur RFNS, le CRU a relevé qu’« aucune norme contraignante harmonisée en matière de RFNS n’[était] appliquée dans [l’Union] et [qu’il] n’a[vait] donc pas été en mesure d’identifier des indicateurs au niveau national ». Quant à l’indicateur EMEE, le CRU a précisé que, « parce que les exigences relatives à l’EMEE [avaient] dans l’ensemble été mises en œuvre de manière progressive, [il] ne dispos[ait] pas de données lui permettant d’appliquer cet indicateur au niveau de chaque établissement contribuant au [FRU] ». En ce qui concerne les sous-indicateurs « complexité » et « résolvabilité », le CRU a exposé que « les données requises pour [ces sous-indicateurs] n[’étaient] pas disponibles sous une forme harmonisée pour tous les établissements des États membres participants pour l’année de référence 2019 ».

219    Une telle motivation permet à la requérante de comprendre les motifs pour lesquels le CRU n’a pas appliqué les indicateurs et sous-indicateurs de risque concernés et remplit ainsi les exigences énoncées par la jurisprudence citée aux points 148 et 149 ci-dessus.

220    Par ailleurs, il résulte du libellé même de l’article 20, paragraphe 1, du règlement délégué 2015/63 que cette disposition ne permet pas au CRU de tenir compte des répercussions de l’absence d’application d’un indicateur de risque sur le montant de la contribution ex ante de chaque établissement. Par conséquent, la requérante ne saurait reprocher au CRU de ne pas avoir fait apparaître de telles considérations dans la décision attaquée.

221    Partant, il y a lieu d’écarter la troisième branche du deuxième moyen.

e)      Sur la quatrième branche, relative à la motivation de la décision attaquée en ce qui concerne certains choix discrétionnaires du CRU dans le cadre de la fixation des paramètres du calcul des contributions ex ante

222    La requérante fait valoir, en substance, que la motivation de la décision attaquée est insuffisante en ce qu’elle ne précise pas la manière dont le CRU a exercé la marge d’appréciation qui lui a été conférée par le règlement délégué 2015/63 et qui porte sur plusieurs aspects du calcul des contributions ex ante.

223    En particulier, le CRU disposerait d’un large pouvoir d’appréciation pour la fixation du montant des EPI et les raisons pour lesquelles il a limité la part des EPI à 15 % du montant des contributions ex ante individuelles des établissements concernés ne seraient pas claires.

224    De plus, il ressortirait de l’article 6, paragraphe 5, du règlement délégué 2015/63 et des considérants 94 à 101, 106, 108 et 112 de la décision attaquée que le CRU dispose d’une marge d’appréciation pour définir des indicateurs de risque supplémentaires et rééchelonner les différents indicateurs de risque en cas d’absence d’application de certains de ces indicateurs. À cet égard, le cadre juridique n’offrirait pas une clarté suffisante sur la méthode de calcul des contributions ex ante et sur les critères déterminants de cette méthode.

225    Le CRU conteste l’argumentation de la requérante.

226    À cet égard, il convient de relever que, aux considérants 145 à 153 de la décision attaquée, le CRU a exposé, de façon détaillée et circonstanciée, les raisons pour lesquelles il avait limité le recours aux EPI à 15 % du montant des contributions ex ante individuelles des établissements concernés. Or, la requérante n’a pas précisé en quoi ces explications seraient insuffisantes pour comprendre les motifs qui avaient amené le CRU à imposer une telle limite. Par conséquent, l’argumentation de la requérante ne contient aucun élément de nature à démontrer que la décision attaquée serait insuffisamment motivée à cet égard.

227    Il en va de même pour ce qui est des indicateurs de risque supplémentaires, des rééchelonnements des différents indicateurs de risque ainsi que des autres aspects du calcul mentionnés par la requérante. En effet, le CRU a précisé, aux considérants 98 à 101 de la décision attaquée, la manière dont il avait défini les indicateurs et sous-indicateurs de risque appliqués dans le pilier de risque IV. Il a également exposé, aux considérants 20 à 29 et 94 à 96 de la décision attaquée, les motifs pour lesquels il avait estimé nécessaire de ne pas appliquer certains indicateurs de risque (voir points 217 et 218 ci-dessus) et de procéder aux rééchelonnements des différents indicateurs de risque qui en résultaient. Enfin, le CRU a indiqué, aux considérants 108 et 112 de la décision attaquée, la manière dont il avait rééchelonné les indicateurs de risque bruts conformément à l’annexe I, sous le titre « Étape 3 », du règlement délégué 2015/63 et la façon dont il avait appliqué un signe négatif ou positif à chaque indicateur de risque conformément à l’annexe I, sous le titre « Étape 4 », de ce règlement délégué. Or, la requérante n’a pas précisé les raisons pour lesquelles la motivation figurant aux considérants susmentionnés de la décision attaquée ne serait pas suffisante.

228    Enfin, la requérante fait valoir que le règlement délégué 2015/63 n’est pas suffisamment clair en ce qui concerne la méthode de calcul des contributions ex ante et les critères déterminants de cette méthode. À supposer que ce grief puisse être interprété en ce sens que, par celui-ci, la requérante excipe de l’illégalité des articles 4 à 7 et 9 ainsi que de l’annexe I de ce règlement délégué, cette dernière n’explique pas en quoi consisterait l’illégalité de ces dispositions. À cet égard, l’affirmation de la requérante, aucunement étayée, selon laquelle ledit règlement délégué confère au CRU une marge d’appréciation considérable ne suffit pas, à elle seule, pour contester la légalité desdites dispositions.

229    Dans ces conditions, il convient d’écarter la quatrième branche du deuxième moyen.

f)      Sur la cinquième branche, relative à la motivation de la décision attaquée en ce qui concerne d’autres aspects du calcul de la contribution ex ante de la requérante

230    La requérante soutient que la décision attaquée viole l’obligation de motivation au motif que la manière dont le CRU a calculé sa contribution ex ante n’est pas transparente et compréhensible.

231    Le CRU conteste l’argumentation de la requérante.

1)      Sur le caractère prétendument incompréhensible et invérifiable du calcul des contributions ex ante

232    Premièrement, la requérante fait valoir que la décision attaquée se résume à des considérations générales sur la méthode de collecte de données et de calcul des contributions ex ante. Ainsi, le texte de cette décision ne contiendrait aucun élément en rapport avec le calcul concret de la contribution ex ante de la requérante. Plus particulièrement, les annexes de ladite décision ne contiendraient que des résultats finaux, ce qui rendrait le calcul de cette contribution incompréhensible et invérifiable. Les données figurant dans ces annexes seraient d’ailleurs dénuées de pertinence, car non probantes, et n’auraient aucune valeur explicative et justificative en raison des fluctuations inexplicables de certaines valeurs d’une année à l’autre. De ce fait, le Tribunal et les autorités de résolution nationales seraient incapables de contrôler le calcul effectué par le CRU. Ainsi, l’Autorité de surveillance des marchés financiers n’aurait pas motivé, dans l’avis de perception, le calcul de la contribution ex ante, mais aurait simplement renvoyé à la décision attaquée. De même, elle aurait confirmé qu’elle ne comprenait pas elle-même cette décision.

233    À cet égard, ainsi qu’il a été relevé au point 15 ci-dessus, l’annexe I de la décision attaquée contient la fiche individuelle de la requérante, qui expose non seulement les données communes déterminées par le CRU en additionnant ou en combinant les données de tous les établissements, mais aussi toutes les données individuelles de la requérante utilisées dans le calcul de sa contribution ex ante, telles que le montant de sa contribution annuelle de base, les valeurs de ses indicateurs de risque ainsi que son classement dans les bins respectifs en fonction de ces valeurs. En outre, il ressort de l’annexe II de cette décision que la requérante était informée du nombre de bins correspondant à chaque indicateur de risque ainsi que des valeurs limites de ces bins. Conformément à la jurisprudence citée au point 159 ci-dessus, la requérante était donc, notamment, en mesure de vérifier, au regard des données de l’annexe I de ladite décision, lues conjointement avec les données de l’annexe II de cette même décision, si elle avait été placée dans les bins corrects par rapport à l’ensemble des autres établissements.

234    Il en va d’autant plus ainsi que le CRU a transmis à la requérante, avant l’adoption de la décision attaquée, un outil de calcul des contributions ex ante afin qu’elle puisse effectuer à l’avance le calcul de sa contribution ex ante. Cet outil contenait, d’une part, les algorithmes utilisés par le CRU pour effectuer les calculs préliminaires et, d’autre part, les données communes déterminées par le CRU en additionnant ou en combinant les données individuelles de tous les établissements concernés. Ainsi, la requérante, en insérant ses données individuelles dans les champs appropriés dudit outil, a pu calculer, étape par étape, sa contribution ex ante individuelle, conformément aux calculs préliminaires effectués par le CRU sur les contributions ex ante pour la période de contribution 2021.

235    Il est vrai que, en ce qui concerne les données des autres établissements utilisées par le CRU dans le cadre des étapes de calcul des contributions ex ante, telles qu’elles sont définies à l’annexe I du règlement délégué 2015/63, portant sur la « discrétisation des indicateurs » (étape 2), l’« intégration du signe affecté » (étape 4) et le « calcul des contributions annuelles » (étape 6), les annexes I et II de la décision attaquée ne contiennent que les données communes déterminées par le CRU en additionnant ou en combinant les données individuelles de tous les établissements concernés. Cependant, il découle de la jurisprudence citée au point 157 ci-dessus que le CRU n’est pas tenu de fournir aux établissements le calcul complet utilisé pour obtenir ces données communes, dès lors que cela supposerait de divulguer des données couvertes par le secret des affaires relatives à la situation économique de chacun des autres établissements concernés.

236    Enfin, l’affirmation de la requérante selon laquelle les données figurant dans les annexes de la décision attaquée sont dépourvues de toute « valeur explicative et justificative » en raison des fluctuations prétendument incompréhensibles, d’une année à l’autre, de certaines valeurs, ne saurait prospérer. En effet, le seul fait que certaines valeurs, qui sont obtenues en additionnant ou en combinant les données d’un grand nombre d’établissements, puissent varier d’une année à l’autre ne saurait remettre en question la crédibilité, pour les établissements concernés, de toutes les données figurant aux annexes I et II de la décision attaquée.

237    Deuxièmement, la requérante fait valoir que le calcul de sa contribution annuelle de base et de son multiplicateur d’ajustement est incompréhensible. À cet égard, la valeur de ce multiplicateur serait excessivement élevée, malgré les notations internationales excellentes de la requérante, son profil de risque meilleur que la moyenne de celui des établissements concernés et son modèle économique d’une complexité relativement réduite. En particulier, la requérante ne serait pas en mesure de comprendre les raisons pour lesquelles le niveau de son multiplicateur d’ajustement calculé sur la base de l’union est élevé, [confidentiel] (1).

238    À cet égard, il convient de relever que la valeur du multiplicateur d’ajustement découle d’un calcul qui est fondé sur la méthode décrite à l’annexe I du règlement délégué 2015/63 et qui est détaillé aux considérants 93 à 121 de la décision attaquée ainsi que dans la fiche individuelle de la requérante, qui fait partie de l’annexe I de cette décision. Or, la requérante n’a soumis au Tribunal aucun élément concret par lequel elle viserait à démontrer un caractère incompréhensible ou incohérent de cette méthode et des données figurant auxdits considérants de la décision attaquée ou dans la fiche individuelle.

239    En tout état de cause, étant donné que les indicateurs de risque, tels qu’ils sont détaillés aux considérants 93 à 100 de la décision attaquée, sont pondérés au sein de chacun des quatre piliers de risque et que ces quatre piliers de risque sont, eux aussi, pondérés, certains indicateurs de risque ont un poids moins important pour le résultat du calcul du multiplicateur d’ajustement que les autres. [confidentiel] Dans ces conditions, la requérante a tort de soutenir que la valeur de son multiplicateur d’ajustement serait inexplicablement élevée.

240    Troisièmement, la requérante fait valoir que la décision attaquée n’est pas suffisamment motivée en ce qu’elle ne permet pas de comprendre pour quelle raison sa contribution ex ante pour la période de contribution 2021 a augmenté de [confidentiel] par rapport à celle correspondant à la période de contribution 2020, alors que le montant des dépôts couverts en Autriche n’a augmenté que de 5,08 %, que le montant de ses dépôts couverts n’a augmenté que de [confidentiel], que son multiplicateur d’ajustement calculé sur la base de l’union [confidentiel], que le montant final des contributions ex ante pour l’ensemble de l’union bancaire n’a augmenté que de 13 % et que son activité commerciale est demeurée identique.

241    À cet égard, il ressort de la jurisprudence citée au point 149 ci-dessus que la motivation d’un acte de l’Union ne doit pas spécifier tous les éléments de fait et de droit pertinents. En particulier, l’obligation de motivation qui pèse sur le CRU ne va pas jusqu’à lui imposer une obligation de justifier les raisons pour lesquelles une contribution ex ante a augmenté par rapport à l’année précédente.

242    Par ailleurs, il découle de l’économie de la méthode de calcul des contributions ex ante que le montant de celles-ci dépend, notamment, du montant des dépôts couverts de l’ensemble des établissements agréés sur le territoire de tous les États membres participants ainsi que du profil de risque de tous ces établissements. Dès lors, contrairement à ce que semble soutenir la requérante, l’augmentation de sa contribution ex ante d’une année à l’autre ne sera pas nécessairement proportionnelle à l’augmentation des dépôts couverts en Autriche, de ses dépôts couverts ou de son multiplicateur d’ajustement.

243    Dans ces conditions, les raisons exactes qui ont conduit à l’augmentation de la contribution ex ante de la requérante, malgré les circonstances mentionnées par cette dernière, ne peuvent être considérées comme des informations sans lesquelles il ne serait pas possible de comprendre de quelle façon sa situation individuelle a été prise en compte aux fins du calcul de sa contribution ex ante au sens de la jurisprudence citée aux points 150 à 159 ci-dessus.

244    Quatrièmement, la requérante soutient que l’assignation des établissements aux bins est inintelligible et qu’elle produit des distorsions considérables ainsi que des résultats erronés. En particulier, la raison pour laquelle le même nombre d’établissements n’a pas été attribué à chaque bin dans le cadre de l’indicateur de risque « ratio de levier » ne serait pas précisée. La répartition des établissements dans les bins serait également incompréhensible en ce qui concerne l’indicateur de risque « actifs pondérés en fonction du risque du marché, divisés par les fonds propres de base de catégorie l », qui relève du pilier de risque IV, car les établissements ne seraient pas davantage répartis dans ce bin d’une manière égale et justifiable. Il en va de même en ce qui concerne d’autres indicateurs de risque, tels que l’indicateur « actifs pondérés en fonction du risque du marché, divisés par le total de l’actif ». Ainsi, il serait impossible d’apprécier de manière définitive si la définition des bins et la répartition des établissements dans ces bins ont été correctement établies par le CRU et si le classement de la requérante est réaliste.

245    Plus concrètement, le CRU aurait dû divulguer, éventuellement sous une forme anonymisée, les données de chaque établissement utilisées pour le calcul des indicateurs bruts, pour que la requérante puisse vérifier si des établissements ayant fourni des données comparables avaient été assignés à des bins similaires.

246    À cet égard, s’agissant, tout d’abord, de la motivation de la décision attaquée quant au fait que le même nombre d’établissements n’a pas été attribué à chaque bin en ce qui concerne l’indicateur de risque « ratio de levier », il convient de relever que le CRU a suffisamment expliqué, au considérant 106 de la décision attaquée, les motifs d’une telle répartition, en indiquant que celle-ci visait à éviter que des établissements présentant la même valeur pour un indicateur de risque brut soient assignés à des bins différents, de sorte que des établissements présentant la même valeur pour un tel indicateur ont été assignés au même bin, ce qui a pu conduire à ce qu’un nombre différent d’établissements soit attribué à chaque bin.

247    Ensuite, compte tenu de la jurisprudence citée aux points 150 à 159 ci-dessus, la requérante soutient à tort que le CRU aurait dû lui permettre de vérifier, de manière complète, la détermination du nombre de bins et l’assignation des établissements à ces bins, puisqu’une telle approche impliquerait que des données des autres établissements couvertes par le secret des affaires lui aient été communiquées.

248    À cet égard, il y a lieu d’ajouter que, contrairement à ce que soutient la requérante, le CRU n’est pas tenu de divulguer, pour chaque établissement concerné, l’intégralité des données qui lui ont été fournies par ce dernier ni son assignation aux différents bins au sein de chaque indicateur de risque, en se limitant à remplacer le nom de chaque établissement par un pseudonyme. En effet, ainsi que le CRU l’a expliqué, sans être sérieusement contredit sur ce point, un tel procédé ne pourrait pas garantir que les établissements ne puissent pas être identifiés à partir des données ainsi communiquées. Il n’est effectivement pas exclu que certains établissements, même pseudonymisés, puissent néanmoins être identifiés en raison des données individuelles qui ont déjà été rendues publiques, notamment dans le cas des grands établissements et des États membres ne comptant que quelques établissements.

249    Au demeurant, les griefs de la requérante concernant d’autres prétendues distorsions dans la répartition par bins au sein des différents piliers de risque, même à les supposer recevables au regard de la jurisprudence citée aux points 27 à 30 ci-dessus, relèvent d’une question de fond, et non de la motivation de la décision attaquée.

2)      Sur l’absence de fourniture des données individuelles des autres établissements

250    La requérante fait valoir que la motivation de la décision attaquée est insuffisante en ce qu’elle ne fournit pas les données individuelles des autres établissements, sans lesquelles il lui serait impossible de contrôler le calcul de sa contribution ex ante. Les données communiquées par les établissements conformément à l’annexe II du règlement délégué 2015/63 ne seraient pas, en réalité, des données confidentielles, car elles seraient accessibles au public ou résulteraient d’informations publiées,  telles que des rapports d’activité de ces établissements.

251    Ainsi, le CRU n’aurait pas soigneusement mis en balance l’obligation de motivation et l’exigence de protection du secret des affaires, en prévoyant, par exemple, une procédure de consultation des dossiers adéquate qui aurait permis une communication complète des données utilisées dans le calcul des contributions ex ante. Dès lors, la requérante a invité le Tribunal à demander au CRU de présenter tous les documents pertinents pour ce calcul.

252    Dans sa réplique, la requérante considère que le CRU n’a pas respecté les exigences au titre de l’obligation de motivation définies par la Cour dans l’arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU (C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601), car il ne lui aurait pas fourni tous les éléments du calcul de sa contribution ex ante qu’il aurait pu transmettre sans violer le secret des affaires. À cet égard, la Cour ne se serait pas livrée à une énumération limitative de tous les éléments que le CRU doit divulguer.

253    Selon la requérante, il incomberait tout d’abord au CRU de démontrer le caractère confidentiel de chaque donnée qu’il n’a pas divulguée et qui est nécessaire pour vérifier le calcul des contributions ex ante.

254    Ensuite, en ce qui concerne la protection du secret des affaires, il n’existerait, pour certaines des données non communiquées par le CRU, aucun risque d’atteinte aux intérêts des établissements concernés résultant de leur transmission. Tel serait le cas, par exemple, des multiplicateurs d’ajustement de chaque établissement.

255    Par ailleurs, les données sur lesquelles se fonde le calcul des contributions ex ante pour la période de contribution 2021 dateraient de l’année 2019, soit près de trois ans avant l’adoption de la décision attaquée, de sorte qu’elles auraient perdu tout caractère confidentiel. En effet, les données déclarées par les établissements fluctueraient fortement d’une année à l’autre et seraient, de ce fait, dépourvues d’intérêt pratique pour l’appréciation de la position économique des établissements.

256    Enfin, les données qui ne permettent pas d’identifier les établissements, y compris toutes les données agrégées utilisées dans les différentes étapes du calcul des contributions ex ante, devraient en tout état de cause être divulguées. Le CRU aurait pu, notamment, communiquer le total du passif de chaque établissement ainsi que son multiplicateur d’ajustement en effaçant le nom de l’établissement concerné, sans divulguer de données confidentielles. Ainsi, les établissements auraient pu effectuer une comparaison avec d’autres établissements de taille similaire, afin d’évaluer si l’ajustement en fonction du profil de risque correspondait à leur situation économique réelle et de vérifier l’affectation des établissements aux bins.

257    Au considérant 88 de la décision attaquée, le CRU a observé que « les secrets d’affaires des établissements – c’est-à-dire toutes les informations concernant l’activité professionnelle des établissements qui, en cas de divulgation à un concurrent et/ou à un public plus large, pourraient porter gravement atteinte aux intérêts des établissements – [étaient] considérés comme des informations confidentielles ». Il a ajouté que, « [d]ans le cadre du calcul des contributions ex ante […], les informations individuelles fournies par les établissements par l’intermédiaire de leurs formulaires de [déclaration] […], sur lesquelles [il] s’appu[yait] pour calculer leur contribution ex ante, [étaient] considérées comme des secrets d’affaires ».

258    En outre, aux considérants 90 à 92 de la décision attaquée, le CRU a relevé qu’il lui était interdit de « divulguer les points de données de chaque établissement, qui constitu[aie]nt la base des calculs dans [ladite décision] », alors qu’il était autorisé à « divulguer les points de données agrégés et communs, dans la mesure où ces données [étaient] cumulées ». Cela étant, les établissements bénéficiaient, selon ladite décision, d’une « transparence totale quant au calcul de leur [contribution annuelle de base] et de leur multiplicateur d’ajustement » pour les étapes de calcul de cette contribution qui portaient sur le « calcul des indicateurs bruts » (étape 1), le « rééchelonnement des indicateurs » (étape 3) et le « calcul de l’indicateur composite » (étape 5). En outre, les établissements étaient en mesure d’obtenir des « points de données communs utilisés indifféremment par le CRU pour tous les établissements ajustés en fonction de leur profil de risque » pour les étapes de calcul portant sur la « discrétisation des indicateurs » (étape 2), l’« intégration du signe affecté » (étape 4) et le « calcul des contributions annuelles » (étape 6).

259    À cet égard, il convient de rappeler, en premier lieu, que le principe même de la méthode de calcul des contributions ex ante, tel qu’il ressort de la directive 2014/59 et du règlement no 806/2014, implique l’utilisation, par le CRU, de données couvertes par le secret des affaires ne pouvant pas être reprises dans la motivation de la décision de fixation des contributions ex ante (arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 114).

260    En second lieu, contrairement à ce que soutient la requérante, l’obligation de motivation n’impose pas au CRU de faire figurer, dans la décision attaquée, des considérations détaillées démontrant, le caractère confidentiel de chaque catégorie de données fournies par les établissements.

261    En effet, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence citée au point 149 ci-dessus, il n’est pas exigé que la motivation d’un acte spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où le caractère suffisant d’une motivation doit être apprécié au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée et, en particulier, de l’intérêt que les personnes concernées par l’acte peuvent avoir à recevoir des explications.

262    Or, d’une part, il découle des considérations figurant au considérant 88 de la décision attaquée que le CRU a considéré que l’ensemble des données déclarées par chaque établissement était couvert, dans sa globalité, par le secret des affaires, puisque la divulgation de ces données à un concurrent ou à un public plus large pourrait porter gravement atteinte aux intérêts de l’établissement concerné.

263    D’autre part, étant donné que la requérante a fourni ses propres données aux fins du calcul des contributions ex ante, conformément à l’article 14 du règlement délégué 2015/63, elle avait une pleine connaissance de la nature et des caractéristiques générales de chaque catégorie de ces données. Elle était ainsi, notamment, à même d’évaluer dans quelle mesure chacune de ces catégories de données pouvait comporter des informations confidentielles.

264    Dans ces conditions, la requérante disposait d’informations suffisantes pour comprendre et, le cas échéant, contester les raisons pour lesquelles le CRU avait considéré que les données individuelles des autres établissements étaient couvertes par le secret des affaires. Elle pouvait, notamment, contester, au regard de la nature et des caractéristiques générales de chaque catégorie de ces données, l’appréciation du CRU figurant au considérant 88 de la décision attaquée, selon laquelle lesdites données avaient un caractère secret et leur divulgation pouvait porter gravement atteinte aux intérêts de l’établissement concerné. Ainsi, elle disposait de tous les éléments nécessaires pour pouvoir contester le non-respect par le CRU des exigences dégagées par la Cour concernant la mise en balance de l’obligation de motivation avec le principe de protection du secret des affaires, telles qu’elles sont rappelées aux points 155, 158 et 159 ci-dessus.

265    Troisièmement, les éléments de preuve que la requérante a soumis au Tribunal ne suffisent pas pour démontrer que les données individuelles des établissements ne sont pas, en réalité, des données confidentielles, car elles se trouveraient dans le domaine public.

266    À cet égard, d’une part, la requérante a indiqué, au soutien de son argument, qu’un grand nombre de données communiquées par les établissements seraient divulguées lors des tests de résistance publiés par l’Autorité bancaire européenne (ABE), par exemple « des données sur le capital (capitaux propres, fonds propres, ratio de fonds propres de base, etc.), le taux d’endettement, ainsi que divers montants de position de risque (risque de crédit, titrisation, risque de marché, risque d’exploitation, etc.) ». En outre, l’ABE réaliserait, selon la requérante, des exercices annuels de transparence à l’échelle de l’Union, dans le cadre desquels cette autorité publierait notamment « les données détaillées de chaque établissement quant à leur position de marché, les montants des positions de risque [ou] les ratios de fonds propres ».

267    Il convient cependant de relever que le test de résistance mené par l’ABE en 2018 à l’échelle de l’Union et les exercices annuels de transparence, auxquels se réfère la requérante, ne portent que sur un nombre circonscrit d’établissements ainsi que sur un nombre restreint de données, bien moins nombreuses que celles communiquées dans le cadre du calcul des contributions ex ante, ce que la requérante a d’ailleurs reconnu à l’audience. Ainsi, la requérante n’a pas démontré que les données publiées dans le cadre des activités de l’ABE concernaient tous les établissements soumis à l’obligation de verser des contributions ex ante.

268    D’autre part, la requérante s’est référée au fait que les exercices annuels de transparence évoqués au point 267 ci-dessus visaient à compléter les publications des données par les établissements eux-mêmes sur la base, notamment, des articles 431 à 455 du règlement (UE) no 575/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, concernant les exigences prudentielles applicables aux établissements de crédit et aux entreprises d’investissement et modifiant le règlement (UE) no 648/2012 (JO 2013, L 176, p. 1), ainsi que de l’article 106 de la directive 2013/36/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, concernant l’accès à l’activité des établissements de crédit et la surveillance prudentielle des établissements de crédit et des entreprises d’investissement, modifiant la directive 2002/87/CE et abrogeant les directives 2006/48/CE et 2006/49/CE (JO 2013, L 176, p. 338). Or, à cet égard, la requérante s’est contentée d’un simple renvoi à ces dispositions, sans expliquer quelles données individuelles concrètes des établissements utilisées lors du calcul des contributions ex ante se trouvaient obligatoirement, sur la base de ces dispositions, dans le domaine public au moment de l’adoption de la décision attaquée.

269    Par ailleurs, la requérante n’a pas soutenu, et encore moins démontré, que toutes les données utilisées pour la détermination d’au moins un indicateur de risque, dont le calcul requérait la combinaison de plusieurs catégories de données, étaient dans le domaine public au moment de l’adoption de la décision attaquée.

270    Quatrièmement, le fait que les données utilisées pour le calcul des contributions ex ante pour la période de contribution 2021 se rapportent à l’année 2019 ne signifie pas que ces données n’étaient plus, au moment de l’adoption de la décision attaquée, couvertes par le secret des affaires. De même, il n’est pas établi que la divulgation, par la décision attaquée, de l’ensemble des données déclarées par chaque établissement n’était pas susceptible, du seul fait de l’écoulement du temps, de porter atteinte au secret des affaires. À cet égard, la seule circonstance selon laquelle ces données subissent des fluctuations d’une année à l’autre ne permet pas d’établir que lesdites données avaient perdu, avant l’adoption de la décision attaquée, leur caractère confidentiel.

271    En outre, il découle, certes, de la jurisprudence de la Cour que, lorsque les informations qui ont pu constituer des secrets d’affaires à une certaine époque datent de cinq ans ou plus, elles sont considérées, en principe, du fait de l’écoulement du temps, comme étant historiques et comme ayant perdu, de ce fait, leur caractère confidentiel, à moins que, exceptionnellement, la partie qui se prévaut de ce caractère ne démontre que, en dépit de leur ancienneté, ces informations constituent encore des éléments essentiels de sa position commerciale ou de celles de tiers concernés (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 19 juin 2018, Baumeister, C‑15/16, EU:C:2018:464, point 54 et jurisprudence citée). Néanmoins, les données utilisées pour le calcul des contributions ex ante pour la période de contribution 2021 dataient, au moment de l’adoption de la décision attaquée, de moins de trois ans.

272    Cinquièmement, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel le CRU aurait dû divulguer, sous une forme anonymisée, les valeurs du multiplicateur d’ajustement et du total du passif de chaque établissement, il ressort de la jurisprudence citée aux points 150 à 159 ci-dessus que, s’agissant des données des autres établissements, le CRU est tenu de mettre à la disposition de l’établissement concerné des informations suffisantes pour que celui-ci puisse comprendre, en substance, de quelle façon sa situation individuelle a été prise en compte, aux fins du calcul de sa contribution ex ante, au regard de la situation de l’ensemble des autres établissements. Plus concrètement, il incombe au CRU de publier ou de transmettre audit établissement, sous une forme agrégée et anonymisée, les informations relatives aux établissements utilisées pour calculer cette contribution, dans la mesure où ces informations peuvent être communiquées sans porter atteinte au secret des affaires.

273    Or, indépendamment de la question de savoir si, au moment de l’adoption de la décision attaquée, les valeurs du total du passif et du multiplicateur d’ajustement de chaque établissement étaient couvertes par le secret des affaires, il est à noter, d’une part, que le total du passif de chaque établissement constitue une donnée nécessaire pour la première phase du calcul des contributions ex ante, à savoir la détermination de la contribution annuelle de base, conformément à l’article 70, paragraphe 2, deuxième alinéa, sous a), du règlement no 806/2014, étant entendu que cette contribution doit, par la suite, être ajustée en fonction du profil de risque de chaque établissement sur la base d’autres données individuelles des établissements. D’autre part, le multiplicateur d’ajustement constitue une valeur intermédiaire résultant de plusieurs étapes de calcul des contributions ex ante et intégrant tous les indicateurs de risque utilisés par le CRU lors de ce calcul. Ce multiplicateur représente ainsi le profil de risque global de chaque établissement, qui est basé sur tous les indicateurs de risque et qui n’a, au demeurant, aucun lien direct avec le montant du total du passif de l’établissement.

274    Dans ces conditions, la divulgation des valeurs du total du passif et du multiplicateur d’ajustement de chaque établissement n’aurait pas permis, sans divulguer toutes les autres données individuelles des établissements, d’atteindre l’objectif, recherché par la requérante, d’effectuer une comparaison entre sa situation et celle des autres établissements de taille similaire afin de vérifier le calcul de sa contribution annuelle de base ajustée en fonction de son profil de risque. De même, contrairement à ce que soutient la requérante, la divulgation de ces seules valeurs n’aurait pas permis de vérifier l’assignation des établissements aux bins.

275    Par conséquent, la valeur du multiplicateur d’ajustement et le total du passif de chaque établissement ne peuvent être considérés comme des éléments sans lesquels les établissements ne peuvent pas comprendre, en substance, de quelle façon leur situation individuelle a été prise en compte au regard de la situation de l’ensemble des autres établissements concernés.

276    Eu égard à tout ce qui précède, il y a lieu de rejeter l’argument de la requérante selon lequel la décision attaquée est insuffisamment motivée en ce qu’elle ne fournit pas de données individuelles des autres établissements permettant de vérifier le calcul de sa contribution ex ante.

3)      Sur les disparités entre les États membres participants en ce qui concerne le rapport entre la composante du montant total des contributions ex ante des établissements de l’État membre calculée sur la base nationale et la composante dudit montant calculée sur la base de l’union

277    La requérante soutient que la décision attaquée ne justifie pas, s’agissant du montant total des contributions ex ante de tous les établissements agréés sur le territoire de chaque État membre participant, les disparités entre ces États membres en ce qui concerne le rapport entre, d’une part, la composante de ce montant calculée sur la base nationale et, d’autre part, la composante dudit montant calculée sur la base de l’union. En effet, pour certains desdits États membres, la composante relevant de la base nationale est plus élevée, à des degrés variables, que la composante relevant de la base de l’union, et inversement pour d’autres. En outre, l’analyse des valeurs agrégées permettrait de présumer que certains États membres financent la majeure partie des contributions calculées sur la base de l’union.

278    À cet égard, il y a lieu d’observer que le CRU a expliqué, au considérant 60 de la décision attaquée, que « [p]our le calcul de la partie des contributions annuelles relevant de la base nationale, [...] le niveau cible utilisé pour ce calcul [avait été] défini sur une base nationale en tenant compte uniquement des dépôts couverts des établissements de crédit agréés sur le territoire de l’État membre participant concerné », tandis que les données des établissements agréés sur le territoire des autres États membres participants n’avaient pas été prises en compte.

279    En revanche, selon le considérant 61 de la décision attaquée, « [p]our le calcul de la partie des contributions annuelles [relevant de la base de l’union] [...], le niveau cible annuel est défini sur la base des dépôts couverts de tous les établissements de crédit établis dans les États membres participants ».

280    Il en découle que les disparités et écarts évoqués par la requérante s’expliquent par la circonstance selon laquelle le calcul des contributions ex ante sur la base nationale et le calcul de ces contributions sur la base de l’union se fondent chacun sur des données différentes. Dans ces conditions, l’obligation de motivation pesant sur le CRU ne va pas jusqu’à lui imposer d’expliquer davantage les différences entre le calcul des contributions sur la base nationale et le calcul des contributions sur la base de l’union.

4)      Sur la motivation concernant les corrections des données des autres établissements

281    La requérante fait valoir, en substance, que la décision attaquée ne permet pas aux établissements de vérifier l’impact des corrections des données des autres établissements sur le calcul des contributions ex ante pour la période de contribution 2021, car le CRU ne divulgue pas, notamment, le nombre d’établissements qui ont notifié des données ayant été corrigées par la suite ni les répercussions que les corrections ont eues sur le montant des contributions ex ante. À cet égard, les calculs du CRU seraient propices à l’erreur. En fait, certains établissements auraient même indiqué qu’ils avaient « peut-être » communiqué des données incorrectes, ce qui signifierait que le calcul du CRU est basé sur des données inexactes. Même si les corrections éventuelles peuvent être prises en compte a posteriori dans la période de contribution suivante, les établissements ne seraient pas informés de telles corrections et des motifs de ces dernières, ce qui renforcerait l’opacité et le caractère non vérifiable des calculs des contributions ex ante. Ainsi, la différence entre, d’une part, le montant de ces contributions calculé pour la période de contribution 2021 et ajusté pour les établissements nouvellement surveillés et, d’autre part, le montant final de ces contributions après déduction de celles fixées pour la période de contribution 2015 et des ajustements résultant des retraitements et des révisions de données manquerait de transparence.

282    À cet égard, il découle de la jurisprudence citée aux points 150 à 159 ci-dessus que la décision attaquée ne doit pas nécessairement comprendre l’intégralité des éléments permettant à son destinataire de vérifier l’exactitude du calcul de sa contribution ex ante. Or, la communication des corrections effectuées a posteriori concernant d’autres établissements ou des motifs de ces dernières impliquerait la communication à la requérante de données des autres établissements couvertes par le secret des affaires.

283    S’agissant, ensuite, de l’absence d’information, dans la décision attaquée, sur le nombre d’établissements concernés par lesdites corrections, la requérante n’a pas expliqué en quoi une telle information lui aurait été nécessaire pour comprendre de quelle façon sa situation individuelle avait été prise en compte par le CRU aux fins du calcul de sa contribution ex ante pour la période de contribution 2021.

284    Pour ce qui est de l’argumentation concernant la prétendue propension à l’erreur dans le calcul des contributions ex ante ainsi que l’utilisation par le CRU de données erronées, celle-ci relève d’une question de fond, et non de la motivation de la décision attaquée. Par ailleurs, la requérante n’a soumis au Tribunal aucun élément concret qui permettrait à ce dernier d’examiner une telle argumentation sur le fond.

285    Eu égard à ce qui précède, il y a lieu de rejeter la cinquième branche du deuxième moyen.

g)      Conclusion sur le deuxième moyen

286    Il ressort de tout ce qui précède qu’il convient d’accueillir la première branche du deuxième moyen et de rejeter les deuxième à cinquième branches de celui-ci.

2.      Sur le troisième moyen, tiré d’une violation de l’article 41, paragraphe 1 et paragraphe 2, sous a), de la Charte en raison du non-respect du droit d’être entendu

287    La requérante soutient que la procédure de consultation organisée par le CRU préalablement à l’adoption de la décision attaquée n’a pas respecté son droit d’être entendue, consacré à l’article 41, paragraphe 1 et paragraphe 2, sous a), de la Charte, car elle ne lui aurait pas permis de présenter, de manière effective, d’observations sur le calcul de sa contribution ex ante.

288    En effet, la période de deux semaines au cours de laquelle ladite procédure a eu lieu serait insuffisante pour s’exprimer sur le projet de décision attaquée et les statistiques agrégées ainsi que pour vérifier et analyser ces derniers, d’autant plus que les données communiquées ne seraient pas suffisantes pour vérifier le processus de calcul et le montant de la contribution ex ante de la requérante. À cet égard, les données de chaque établissement servant de base au calcul des données communes, qui sont déterminantes pour la répartition de chaque établissement dans les bins et donc pour le classement des établissements en fonction de chaque indicateur de risque, n’auraient pas été divulguées. Par conséquent, le CRU n’aurait pas permis à la requérante de s’exprimer sur les questions matérielles et juridiques pertinentes pour sa contribution ex ante ni de vérifier l’exactitude de cette contribution. Par ailleurs, même si le CRU a mis à disposition de la requérante, avant l’adoption de la décision attaquée, un outil de calcul interactif des contributions ex ante, cet outil ne permettrait pas non plus aux établissements d’apprécier si leur ajustement en fonction du profil de risque est plausible par rapport à l’ensemble des autres établissements et si leur situation économique a été correctement évaluée.

289    En outre, la procédure de consultation aurait été menée de façon purement formelle, ce qui serait notamment démontré par le fait que le CRU n’aurait tenu compte d’aucune des observations formulées par les établissements. Les doutes exprimés par certains établissements auraient été écartés, à plusieurs reprises, par le CRU au moyen d’une référence au cadre juridique et à la motivation de la décision attaquée.

290    Les vices susmentionnés seraient d’autant plus sérieux que le CRU disposerait d’une marge d’appréciation considérable dans la fixation des contributions ex ante, si bien que le respect du droit d’être entendu revêtirait une importance particulière.

291    Le CRU conteste l’argumentation de la requérante.

292    Le droit d’être entendu, consacré à l’article 41, paragraphe 2, sous a), de la Charte, garantit à toute personne la possibilité de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours de la procédure administrative et avant l’adoption de toute décision susceptible d’affecter de manière défavorable ses intérêts (voir arrêt du 22 novembre 2012, M., C‑277/11, EU:C:2012:744, point 87 et jurisprudence citée).

293    En l’espèce, avant l’adoption de la décision attaquée, le CRU a mené, entre les 5 et 19 mars 2021, une procédure de consultation dans le cadre de laquelle il a communiqué un projet de décision attaquée aux établissements concernés et les a invités, par le biais d’un formulaire en ligne, à saisir leurs commentaires sur le contenu de ce projet.

294    En outre, le CRU a communiqué aux établissements concernés les documents suivants :

–        un outil de calcul interactif qui leur permettait de calculer leurs contributions ex ante pour la période de contribution 2021 sur la base des résultats de ses calculs intermédiaires ;

–        son avis SRB/ES/2021/13, du 3 mars 2021, concernant son calcul préliminaire des contributions ex ante au FRU pour la période de contribution 2021 et le lancement des consultations avec les établissements ;

–        un document intitulé « Statistiques agrégées » comprenant les statistiques des calculs relatifs à tous les établissements sous une forme résumée et collective ;

–        des orientations sur la manière de calculer les contributions ex ante pour la période de contribution 2021 à l’aide de l’outil de calcul.

295    Dans ce contexte, d’une part, il ressort de la jurisprudence citée aux points 150 à 159 ci-dessus que, contrairement à ce que soutient la requérante, le CRU n’était pas tenu de lui communiquer l’intégralité des documents et des données relatives à chaque établissement en vue de lui permettre de vérifier, de manière complète, l’exactitude du calcul de sa contribution ex ante. En particulier, le CRU n’était pas obligé de lui communiquer les documents qui contenaient les données individuelles des autres établissements et qui étaient couverts par le secret des affaires.

296    D’autre part, la requérante n’a, notamment, pas contesté qu’elle était informée de la méthodologie suivie pour le calcul de la contribution ex ante pour la période de contribution 2021 ainsi que du résultat provisoire de sa contribution ex ante à payer, de sorte qu’elle était en mesure de remplir le formulaire fourni par le CRU en faisant utilement valoir ses observations concernant chacune des étapes de ce calcul.

297    Dans ces conditions, rien n’indique que la requérante n’a pas eu accès aux éléments qui constituaient le fondement du calcul de sa contribution ex ante et que le CRU était tenu de lui communiquer.

298    Par ailleurs, la requérante avait la possibilité de prendre position sur ces éléments par le biais du formulaire en ligne mentionné au point 293 ci-dessus. Elle pouvait ainsi présenter ses observations sur les choix discrétionnaires du CRU dans le cadre du calcul de sa contribution ex ante, tels que la détermination du niveau cible annuel ou la précision de certains indicateurs de risque du pilier de risque IV, et elle était en mesure de calculer provisoirement sa contribution ex ante en utilisant l’outil de calcul fourni par le CRU.

299    À cet égard, il découle de la jurisprudence de la Cour qu’un formulaire prévu pour que les personnes concernées puissent porter leur point de vue à la connaissance de l’autorité compétente est, en principe, de nature à permettre à celles-ci de s’exprimer de manière circonstanciée sur les éléments devant être pris en compte par l’autorité compétente et d’exposer, si elles le jugent utile, des informations ou des appréciations différentes de celles déjà soumises à l’autorité compétente (voir, par analogie, arrêt du 9 février 2017, M, C‑560/14, EU:C:2017:101, points 39 et 40).

300    Tel est le cas en l’espèce.

301    En effet, dans le cadre de la procédure de consultation, le CRU a invité les établissements à formuler, d’une part, des observations sur treize sujets prédéfinis qui leur donnaient la possibilité de faire des commentaires sur plusieurs aspects du calcul des contributions ex ante, y compris la méthode et les résultats de ce calcul. D’autre part, dans le cadre du thème 14, les établissements pouvaient soulever toute autre question qu’ils jugeaient pertinente pour le calcul de la contribution ex ante pour la période de contribution 2021 et qui n’était pas déjà couverte par les thèmes prédéfinis. En conséquence, la requérante avait la possibilité de soumettre des observations sur chaque élément dudit calcul ou de la procédure d’élaboration de ce même calcul.

302    S’agissant, en outre, du délai imparti pour soumettre des observations dans le cadre de la procédure de consultation, en l’occurrence deux semaines, d’une part, il y a lieu de relever que la requérante n’a pas expliqué dans quelle mesure ce délai aurait violé son droit d’être entendue. À cet égard, elle s’est bornée à affirmer qu’il était « utopique » de supposer que le projet de décision et les statistiques agrégées pouvaient être vérifiés et analysés dans un laps de temps aussi bref, sans faire référence à des aspects concrets de ces documents ni à des difficultés pratiques qui l’auraient empêchée de soumettre ses observations, dans le délai imparti, sur les éléments qui constituaient le fondement du calcul de sa contribution ex ante, tels que ceux mentionnés aux points 296 et 298 ci-dessus. Le seul élément concret que la requérante a mentionné dans ce contexte est le fait que les données communiquées par le CRU n’étaient pas suffisantes pour vérifier le processus de calcul et le montant de sa contribution ex ante. Or, ainsi qu’il a été constaté aux points 295 à 297 ci-dessus, il n’a pas été démontré que le CRU était tenu de communiquer à la requérante d’autres documents que ceux mentionnés au point 294 ci-dessus, si bien que ce fait ne permet pas d’établir que le délai de deux semaines était insuffisant au regard du droit d’être entendu.

303    D’autre part, la requérante est soumise à l’obligation de verser les contributions ex ante depuis 2016, de sorte que la période de contribution 2021 était la sixième à laquelle elle participait. Il en découle que, lors de la procédure de consultation menée par le CRU, elle possédait déjà une bonne connaissance du processus de calcul de ces contributions. Dans ces conditions, en l’absence de circonstances particulières invoquées par la requérante, rien n’indique que le délai imparti pour soumettre des observations était insuffisant.

304    En ce qui concerne, enfin, les réponses du CRU aux observations formulées par les établissements, la requérante n’a identifié aucune observation spécifique à laquelle le CRU n’aurait pas répondu.

305    Par ailleurs, le seul fait que le CRU ait finalement décidé de ne pas modifier la décision attaquée par rapport au projet de décision qu’il avait communiqué aux établissements, pour donner suite à leurs observations, ne permet pas de démontrer que la procédure de consultation a violé le droit d’être entendue de la requérante. En effet, conformément à ce que le Tribunal a déjà jugé (voir, en ce sens, arrêt du 25 mars 2015, Slovenská pošta/Commission, T‑556/08, non publié, EU:T:2015:189, point 89), une telle circonstance relève d’un désaccord sur le bien-fondé de l’appréciation du CRU, mais ne saurait constituer une violation du droit d’être entendus de ces établissements.

306    Par conséquent, l’argumentation de la requérante ne permet pas de démontrer que cette dernière n’a pas eu la possibilité de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur tous les éléments de fait ou de droit qui constituaient le fondement de la décision attaquée.

307    Eu égard à ce qui précède, il convient d’écarter le troisième moyen.

3.      Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 1er, deuxième alinéa, TUE, des articles 15, 296 et 298 TFUE et des articles 42 et 47 de la Charte, en raison du défaut de communication de la décision attaquée dans son intégralité

308    La requérante soutient que la décision attaquée viole l’obligation de motivation prévue à l’article 296 TFUE, le droit à un recours effectif prévu à l’article 47 de la Charte, l’exigence d’une administration européenne ouverte et proche des citoyens inscrite à l’article 1er, deuxième alinéa, TUE et aux articles 15 et 298 TFUE ainsi que le droit d’accès aux documents prévu à l’article 42 de la Charte et à l’article 15 TFUE, car cette décision ne lui a pas été communiquée dans son intégralité dès lors que le CRU n’a pas porté à sa connaissance les décisions intermédiaires prises en compte lors du calcul des contributions ex ante.

309    En effet, la requérante aurait reçu uniquement par extraits le résultat final du montant de sa contribution ex ante ainsi que « les valeurs moyennes, des écarts types et des données agrégées ». Ainsi, elle ne se serait pas vu communiquer, d’une part, les calculs effectués par le CRU, y compris les données ayant fondé ces calculs ni, d’autre part, les informations permettant de déterminer quels établissements étaient concernés par l’obligation de payer cette contribution et quels étaient les indicateurs de risque qui leur correspondaient. Or, les données non communiquées constitueraient un élément central de la décision attaquée, seraient nécessaires pour comprendre et vérifier le calcul de la contribution ex ante de la requérante et auraient une incidence directe sur le montant de celle-ci.

310    Le CRU conteste l’argumentation de la requérante.

311    Il est constant que l’Autorité de surveillance des marchés financiers a communiqué à la requérante la décision attaquée dans la mesure où celle-ci la concernait, en annexant à l’avis de perception le corps de cette décision, la fiche individuelle de la requérante ainsi que les annexes II et III de cette même décision.

312    Dans la mesure où, par le présent moyen, la requérante fait valoir que la décision attaquée était incomplète, ce moyen porte en réalité sur le défaut de motivation de celle-ci. Un tel grief ayant été examiné dans le cadre du deuxième moyen aux points 145 à 286 ci-dessus, il n’y a pas lieu de l’examiner à titre autonome dans le cadre du présent moyen.

313    Il en va de même s’agissant du grief relatif à la non-divulgation des décisions intermédiaires, en ce qu’il est tiré d’une violation de l’obligation de motivation, un tel grief ayant été examiné dans le cadre du deuxième moyen aux points 203 à 210 ci-dessus.

314    En ce qui concerne les griefs relatifs au droit à un recours effectif, au droit d’accès aux documents et à l’exigence d’une administration européenne ouverte et proche des citoyens, la requérante se contente, dans sa requête, d’énumérer les dispositions du droit primaire qui énoncent ces droits, sans avancer d’argumentation qui viserait à démontrer en quoi consiste la violation de ces derniers. D’ailleurs, même lors de l’audience, la requérante n’a pas fourni davantage de précisions concernant la portée de ces griefs.

315    Dans ces conditions, et eu égard aux considérations figurant aux points 145 à 286 ci-dessus, il convient de rejeter le premier moyen.

4.      Sur le sixième moyen, tiré d’une violation de l’article 70, paragraphe 2, du règlement no 806/2014

316    Dans son mémoire en réplique, la requérante a fait valoir – dans le cadre de son argumentation avancée au soutien du deuxième moyen, tiré du défaut de motivation de la décision attaquée – que, en fixant le niveau cible annuel à environ 11,287 milliards d’euros, le CRU avait violé l’article 102 de la directive 2014/59, l’article 69, paragraphes 1 et 2, et l’article 70 du règlement no 806/2014 ainsi que les articles 3 et 4 du règlement délégué 2015/63. En effet, la requérante aurait appris, par le biais de la décision SRB/ES/2022/18 du CRU, du 11 avril 2022, sur le calcul des contributions ex ante pour 2022 au FRU, que le CRU s’était fondé sur un niveau cible final de 80 milliards d’euros, alors que l’article 70, paragraphe 2, du règlement no 806/2014 prévoit que les contributions ex ante dues par l’ensemble des établissements ne doivent pas dépasser annuellement 12,5 % du niveau cible final.

317    De même, à l’audience, la requérante a invoqué un moyen tiré de ce que, en fixant le niveau cible annuel pour la période de contribution 2021 à environ 11,287 milliards d’euros, le CRU avait violé l’article 70, paragraphe 2, du règlement no 806/2014, tout en réitérant que la décision attaquée devait être annulée pour défaut de motivation en ce qui concernait la détermination de ce niveau cible.

318    Selon le CRU, le présent moyen doit être rejeté comme étant irrecevable pour cause de tardiveté. En effet, en mai 2021, soit avant l’introduction du présent recours, le CRU aurait publié, sur son site Internet, une fiche descriptive contenant le montant pronostiqué du niveau cible final, sous la forme d’une fourchette comprise entre 70 et 75 milliards d’euros. Ce moyen serait, en tout état de cause, non fondé.

319    À l’audience, la requérante a soutenu que le présent moyen était recevable, en faisant valoir que, au moment de l’introduction du recours, elle ne disposait pas d’informations indiquant que la décision attaquée était susceptible d’être contraire à l’article 70, paragraphe 2, du règlement no 806/2014.

320    À cet égard, conformément à l’article 84, paragraphe 1, du règlement de procédure, la production de moyens nouveaux en cours d’instance est interdite, à moins que ces moyens ne se fondent sur des éléments de droit et de fait qui se sont révélés pendant la procédure ou qu’ils ne constituent l’ampliation d’un moyen énoncé antérieurement, directement ou implicitement, dans la requête introductive d’instance et qui présente un lien étroit avec celui-ci (voir, en ce sens, arrêt du 5 octobre 2020, HeidelbergCement et Schwenk Zement/Commission, T‑380/17, EU:T:2020:471, point 87 et jurisprudence citée).

321    En l’espèce, d’une part, la requérante n’a soulevé la prétendue violation de l’article 70, paragraphe 2, du règlement no 806/2014 que dans son mémoire en réplique et à l’audience. En outre, l’argumentation présentée à l’appui du présent moyen ne constitue pas une ampliation des motifs déjà invoqués dans la requête, ce que la requérante ne soutient d’ailleurs pas.

322    D’autre part, il n’est pas contesté que le montant du niveau cible final pronostiqué par le CRU aux fins de la fixation des contributions ex ante pour la période de contribution 2021 était disponible sur le site Internet du CRU dès le mois de mai 2021. Ainsi, tout comme dans les affaires ayant donné lieu aux arrêts du 22 janvier 2015, Teva Pharma et Teva Pharmaceuticals Europe/EMA (T‑140/12, EU:T:2015:41, points 38 à 48), et du 21 mai 2015, Rubinum/Commission (T‑201/13, non publié, EU:T:2015:311, points 23 à 26), la requérante était en mesure, au moment de l’introduction du recours, à savoir le 21 juin 2021, de connaître les éléments de fait sur lesquels se fondait l’argumentation soulevée dans le cadre du présent moyen.

323    Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’argument de la requérante, soulevé à l’audience, selon lequel la publication du montant du niveau cible final dans la fiche descriptive n’était pas suffisante pour l’informer valablement du montant pronostiqué du niveau cible final. Il suffit de relever à cet égard que, sur son site Internet, le CRU publie systématiquement, à chaque période de contribution, des données générales sur les divers éléments du calcul des contributions ex ante ainsi que les différents documents relatifs à la procédure de calcul de ces contributions. Par ailleurs, les documents fournis aux établissements dans le cadre de la consultation menée par le CRU entre les 5 et 19 mars 2021, mentionnée au point 293 ci-dessus, ont été, eux aussi, mis à la disposition de ces établissements sur ce site Internet. La requérante, en tant qu’opérateur avisé assujetti au versement des contributions ex ante depuis 2016, ne saurait donc soutenir que la publication de la fiche descriptive sur le site Internet du CRU n’était pas appropriée pour qu’elle soit informée valablement du montant pronostiqué du niveau cible final.

324    Eu égard à ce qui précède, le présent moyen n’est pas fondé sur des éléments de droit ou de fait qui se sont révélés pendant la procédure et constitue donc un moyen nouveau, qui doit être rejeté comme étant irrecevable.

325    Par ailleurs, à supposer que le présent moyen soit recevable, le Tribunal ne serait pas en mesure d’en apprécier le bien-fondé. En effet, ainsi qu’il ressort des points 166 à 199 ci-dessus, la décision attaquée est entachée d’un défaut de motivation concernant la détermination du niveau cible annuel pour la période de contribution 2021 et doit être annulée pour ce motif. Or, un tel défaut de motivation empêche le Tribunal d’examiner le bien-fondé du sixième moyen.

C.      Conclusion

326    Compte tenu du bien-fondé de la première branche du deuxième moyen, il y a lieu d’annuler la décision attaquée, en ce qu’elle concerne la requérante.

D.      Sur la limitation dans le temps des effets de l’arrêt

327    Le CRU demande au Tribunal de maintenir, en cas d’annulation de la décision attaquée, les effets de celle-ci jusqu’à son remplacement ou, à tout le moins, pendant une période de six mois à compter de la date à laquelle l’arrêt est devenu définitif.

328    La requérante s’oppose à cette demande, en soutenant que le CRU n’a fourni aucun motif susceptible de justifier de faire peser sur elle les conséquences négatives d’un acte annulé dans l’attente de l’adoption d’une nouvelle décision.

329    Il convient de rappeler que, aux termes de l’article 264, second alinéa, TFUE, le juge de l’Union peut, s’il l’estime nécessaire, indiquer ceux des effets d’un acte annulé qui doivent être considérés comme étant définitifs.

330    À cet égard, il ressort de la jurisprudence que, eu égard à des motifs ayant trait à la sécurité juridique, les effets d’un tel acte peuvent être maintenus, notamment lorsque les effets immédiats de son annulation entraîneraient des conséquences négatives graves et que la légalité de l’acte attaqué est contestée non pas en raison de sa finalité ou de son contenu, mais pour des motifs de violation des formes substantielles (voir arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 175 et jurisprudence citée).

331    En l’espèce, la décision attaquée a été prise en violation des formes substantielles. En revanche, le Tribunal n’a pas constaté, dans la présente procédure, d’erreur affectant la légalité au fond de cette décision.

332    En outre, à l’instar de ce que la Cour a jugé dans l’arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU (C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 177), il convient de constater que prononcer l’annulation de la décision attaquée sans prévoir le maintien de ses effets jusqu’à ce qu’elle soit remplacée par un nouvel acte serait de nature à porter atteinte à la mise en œuvre de la directive 2014/59, du règlement no 806/2014 et du règlement délégué 2015/63, qui constituent une partie essentielle de l’union bancaire, laquelle contribue à la stabilité de la zone euro.

333    Dans ces circonstances, il y a lieu de maintenir les effets de la décision attaquée, en ce qu’elle concerne la requérante, jusqu’à l’entrée en vigueur, dans un délai raisonnable qui ne saurait dépasser six mois à compter de la date du prononcé du présent arrêt, d’une nouvelle décision du CRU fixant la contribution ex ante au FRU de la requérante pour la période de contribution 2021.

V.      Sur les dépens

334    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Le CRU ayant succombé, il y a lieu de le condamner à supporter ses propres dépens ainsi que ceux de la requérante, conformément aux conclusions de cette dernière.

335    Conformément à l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, le Parlement et le Conseil supporteront leurs propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre élargie)

déclare et arrête :

1)      La décision SRB/ES/2021/22 du Conseil de résolution unique (CRU), du 14 avril 2021, sur le calcul des contributions ex ante pour 2021 au Fonds de résolution unique est annulée en ce qu’elle concerne Volkskreditbank AG.

2)      Les effets de la décision SRB/ES/2021/22, en ce qu’elle concerne Volkskreditbank, sont maintenus jusqu’à l’entrée en vigueur, dans un délai raisonnable qui ne saurait dépasser six mois à compter de la date du prononcé du présent arrêt, d’une nouvelle décision du CRU fixant la contribution ex ante au Fond de résolution unique de cet établissement pour l’année 2021.

3)      Le CRU supportera, outre ses propres dépens, ceux exposés par Volkskreditbank.

4)      Le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne supporteront leurs propres dépens.

Kornezov

De Baere

Petrlík

Kecsmár

 

      Kingston

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 24 janvier 2024.

Signatures

Table des matières


I. Antécédents du litige

II. Décision attaquée

III. Conclusions des parties

IV. En droit

A. Sur les exceptions d’illégalité de la directive 2014/59, du règlement no 806/2014 et des articles 4 à 7 et 9 ainsi que de l’annexe I du règlement délégué 2015/63

1. Sur le cinquième moyen, tiré d’une exception d’illégalité de la directive 2014/59 et du règlement no 806/2014

2. Sur le quatrième moyen, tiré d’une exception d’illégalité des articles 4 à 7 et 9 ainsi que de l’annexe I du règlement délégué 2015/63

a) Sur la première branche, relative à la violation du principe de sécurité juridique

b) Sur la deuxième branche, relative à la violation du droit à une bonne administration

c) Sur la troisième branche, relative à la violation du droit à la protection juridictionnelle effective

d) Sur la quatrième branche, tirée de la méconnaissance, par la Commission, du cadre d’habilitation établi par la réglementation de base et du principe d’égalité de traitement

B. Sur les moyens portant sur la légalité de la décision attaquée

1. Sur le deuxième moyen, tiré d’une violation des formes substantielles en raison de l’insuffisance de motivation de la décision attaquée

a) Observations liminaires

b) Sur la première branche, relative à la motivation de la détermination du niveau cible annuel

c) Sur la deuxième branche, relative à l’absence de publication par le CRU des décisions intermédiaires

d) Sur la troisième branche, relative à la motivation de la décision attaquée en ce qui concerne l’absence d’application de certains indicateurs de risque

e) Sur la quatrième branche, relative à la motivation de la décision attaquée en ce qui concerne certains choix discrétionnaires du CRU dans le cadre de la fixation des paramètres du calcul des contributions ex ante

f) Sur la cinquième branche, relative à la motivation de la décision attaquée en ce qui concerne d’autres aspects du calcul de la contribution ex ante de la requérante

1) Sur le caractère prétendument incompréhensible et invérifiable du calcul des contributions ex ante

2) Sur l’absence de fourniture des données individuelles des autres établissements

3) Sur les disparités entre les États membres participants en ce qui concerne le rapport entre la composante du montant total des contributions ex ante des établissements de l’État membre calculée sur la base nationale et la composante dudit montant calculée sur la base de l’union

4) Sur la motivation concernant les corrections des données des autres établissements

g) Conclusion sur le deuxième moyen

2. Sur le troisième moyen, tiré d’une violation de l’article 41, paragraphe 1 et paragraphe 2, sous a), de la Charte en raison du non-respect du droit d’être entendu

3. Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 1er, deuxième alinéa, TUE, des articles 15, 296 et 298 TFUE et des articles 42 et 47 de la Charte, en raison du défaut de communication de la décision attaquée dans son intégralité

4. Sur le sixième moyen, tiré d’une violation de l’article 70, paragraphe 2, du règlement no 806/2014

C. Conclusion

D. Sur la limitation dans le temps des effets de l’arrêt

V. Sur les dépens


*      Langue de procédure : l’allemand.


1 Données confidentielles occultées.