Language of document : ECLI:EU:T:2024:106

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

21 février 2024 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne figurative LA CRÈME LIBRE – Marque de l’Union européenne verbale antérieure LIBRE – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑765/22,

Azalee Cosmetics, établie à Paris (France), représentée par Me I. Tribouillet, avocate,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par MM. J. Ivanauskas et V. Ruzek, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

L’Oréal (UK) Ltd, établie à Londres (Royaume-Uni), représentée par Mes A. Ortiz López et M. Polo Carreño, avocates,

LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé de Mme K. Kowalik‑Bańczyk, présidente, MM. G. Hesse (rapporteur) et I. Dimitrakopoulos, juges,

greffier : M. G. Mitrev, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure,

à la suite de l’audience du 27 octobre 2023,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Azalee Cosmetics, demande l’annulation partielle de la décision de la première chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 7 octobre 2022 (affaire R 229/2022-1) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 12 juin 2020, la requérante a présenté à l’EUIPO une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne pour le signe figuratif suivant :

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3        La marque demandée désignait des produits et des services relevant des classes 3, 21, 35 et 44 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié.

4        Le 2 octobre 2020, l’intervenante, L’Oréal (UK) Ltd, a formé opposition à l’enregistrement de la marque demandée pour une partie des produits et des services visés par celle-ci.

5        L’opposition était fondée sur la marque de l’Union européenne verbale antérieure LIBRE, désignant les produits relevant de la classe 3 et correspondant à la description suivante : « Parfums ; eau de Cologne ; eaux de toilette ; eau de parfum ; déodorants à usage personnel ; préparations nettoyantes et parfumantes ; crèmes et lotions parfumées pour le corps ; huiles essentielles ; savons parfumés ».

6        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1).

7        Sur demande de la requérante, la liste des produits et des services visés par la marque demandée a fait l’objet d’une limitation, à la suite de laquelle les produits et les services visés correspondaient, pour les classes 3, 21, 35 et 44, notamment, à la description suivante :

–        classe 3 : « Crèmes cosmétiques pour le visage et le corps ; sérums à usage cosmétique ; huiles pour le corps et le visage ; laits de beauté ; eaux micellaires ; cosmétiques ; produits de beauté ; savons et gels ; savons à barbe ; baumes et lotions à usage cosmétique et capillaire ; produits de parfumerie ; eaux de toilette ; eaux de parfum ; déodorants à usage personnel (parfumerie) ; huiles essentielles ; maquillage ; produits de démaquillage ; masques de beauté ; bougies de massage à usage cosmétique ; préparations cosmétiques pour le soin de la peau ; préparations cosmétiques pour l’amincissement et le raffermissement ; préparations cosmétiques pour le soin des ongles ; préparations cosmétiques pour le soin des cheveux ; préparations cosmétiques pour le bain ; préparations cosmétiques pour le bronzage de la peau ; shampooings ; après-shampooings ; produits pour le soin des cheveux ; teintures et colorants pour cheveux ; produits de rasage ; dépilatoires ; cire à épiler ; vernis » ;

–        classe 21 : « Ustensiles cosmétiques ; nécessaires de toilette ; houppes à poudrer ; éponges de toilette ; éponges pour le maquillage ; pots à usage cosmétique » ;

–        classe 35 : « Services de vente au détail de crèmes cosmétiques pour le visage et le corps ; services de vente au détail de sérums à usage cosmétique ; services de vente au détail d’huiles pour le corps et le visage ; services de vente au détail de cosmétiques sous forme de laits ; services de vente au détail d’eaux micellaires ; services de vente au détail de cosmétiques ; services de vente au détail de produits de beauté ; services de vente au détail de savons et de gels ; services de vente au détail de savon à barbe ; services de vente au détail de baumes et lotions à usage cosmétique et capillaire ; services de vente de produits de parfumerie, d’eaux de toilette et d’eaux de parfum ; services de vente au détail de déodorants à usage personnel [parfumerie] ; services de vente au détail d’huiles essentielles ; services de vente au détail de produits de maquillage et de produits de démaquillage ; services de vente au détail de masques de beauté ; services de vente au détail de bougies de massage à usage cosmétique ; services de vente au détail de cosmétiques et de préparations pour le soin de la peau ; services de vente au détail de préparations cosmétiques pour l’amincissement et le raffermissement ; services de vente au détail de préparations cosmétiques pour le soin des ongles ; services de vente au détail de préparations cosmétiques pour le soin des cheveux ; services de vente au détail de préparations cosmétiques pour le bain ; services de vente au détail de préparations cosmétiques pour le bronzage de la peau ; services de vente au détail de shampooings et après-shampooings ; services de vente au détail de produits pour le soin des cheveux ; services de vente au détail de teintures et de colorants pour cheveux ; services de vente au détail de produits de rasage ; services de vente au détail de produits dépilatoires et de cire à épiler ; services de vente au détail de vernis ; services de vente au détail d’ustensiles cosmétiques ; services de vente au détail de nécessaires de toilette ; services de vente au détail de houppes à poudrer ; services de vente au détail d’éponges de toilette et d’éponges pour le maquillage ; services de vente au détail de pots à usage cosmétique » ;

–        classe 44 : « Hygiène et soins de beauté pour êtres humains ; instituts et salons de beauté ; salons de coiffure ; services de manucure ; services de visagistes ; conseils du domaine de l’esthétique ; services de conseil dans le domaine de la coiffure ; services de conseil dans le domaine de l’esthétique corporelle ; services de conseils dans le domaine du maquillage ».

8        Le 8 décembre 2021, la division d’opposition a, notamment, fait droit à l’opposition pour tous les produits et les services compris dans les classes 3, 21, 35 et 44 mentionnés au point 7 ci-dessus ainsi que pour le « dentifrice » relevant de la classe 3, les « brosses à cheveux; brosses à sourcils; brosses à dents; peignes; séparateurs d'orteils en mousse pour soins de pédicurie » relevant de la classe 21 et les « services de vente au détail de brosses à cheveux et de peignes; services de vente au détail de brosses à sourcils; services de vente au détail de brosses à dents; services de vente au détail de séparateurs d'orteils en mousse pour soins de pédicurie » relevant de la classe 35, sur le fondement de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

9        Le 7 février 2022, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’opposition, dans la mesure où l’opposition avait été accueillie.

10      Par la décision attaquée, la chambre de recours a rejeté le recours en ce qui concerne les produits et les services visés au point 7 ci-dessus, au motif qu’il existait un risque de confusion quant à l’origine des produits et des services désignés par les marques en conflit dans l’esprit du public pertinent.

 Conclusions des parties

11      La requérante conclut, en substance, à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée dans la mesure où la chambre de recours a rejeté le recours en ce qui concerne les produits et les services visés au point 7 ci-dessus ;

–        condamner l’EUIPO et l’intervenante aux dépens, ainsi qu’au remboursement de tous les frais encourus aux fins des procédures d’opposition et de recours.

12      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens, dans l’hypothèse où une audience serait prévue.

13      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

14      À l’appui du recours, la requérante soulève un moyen unique tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

15      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

16      Constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

17      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

18      Lorsque la protection de la marque antérieure s’étend à l’ensemble de l’Union européenne, il y a lieu de prendre en compte la perception des marques en conflit par le consommateur des produits et des services concernés sur ce territoire. Toutefois, il convient de rappeler que, pour refuser l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne, il suffit qu’un motif relatif de refus au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 existe dans une partie de l’Union [voir, en ce sens, arrêt du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 76 et jurisprudence citée].

 Sur le public et le territoire pertinents

19      Tout d’abord, aux points 34 à 43 de la décision attaquée, la chambre de recours a relevé que l’ensemble des produits et des services en cause s’adressaient au grand public. Elle a estimé que le niveau d’attention de ce public était au moins moyen pour les produits compris dans la classe 3 et les services compris dans la classe 35, moyen pour les produits compris dans la classe 21 et moyen à élevé, selon le degré de sophistication, pour les services relevant de la classe 44.

20      Ensuite, la chambre de recours a rappelé au point 40 de la décision attaquée que, dans l’appréciation globale du risque de confusion, c’est le groupe ayant le niveau d’attention le moins élevé qui doit être pris en considération. Dès lors, en l’espèce, il s’agirait du groupe dont le niveau d’attention est moyen.

21      Enfin, au point 45 de la décision attaquée, elle a considéré que l’appréciation du risque de confusion dépendait de la perception du public francophone de l’Union.

22      À cet égard, la requérante soutient, en substance, que le niveau d’attention du public pertinent est élevé, étant donné, d’une part, que ce public fait attention à la composition des produits qu’ils appliquent sur leur peau, et, d’autre part, que les produits de parfumerie de l’intervenante sont des produits de luxe. En outre, elle reproche à la chambre de recours d’avoir apprécié l’existence du risque de confusion par rapport au seul public francophone de l’Union, ce qui ne serait pas justifié, l’opposition étant fondée sur une marque de l’Union européenne.

23      L’EUIPO et l’intervenante contestent ces arguments.

24      En premier lieu, il y a lieu de constater que les produits et les services en cause sont essentiellement liés aux cosmétiques et aux soins, lesquels sont de consommation courante et s’adressent ainsi au grand public, avec un niveau d’attention moyen [voir arrêt du 29 mars 2023, Machková/EUIPO – Aceites Almenara (ALMARA SOAP), T‑436/22, non publié, EU:T:2023:167, point 33 et jurisprudence citée]. En outre, contrairement à ce que soutient la requérante, il ne ressort pas de la description des produits en cause qu’il s’agit de produits de luxe ou de produits d’une telle sophistication ou d’un tel prix que le public pertinent serait susceptible d’être particulièrement attentif à leur égard. Dans ces conditions, c’est à juste titre que la chambre de recours a constaté que les produits et les services en cause étaient destinés au grand public, lequel fait preuve, en substance, d’un niveau d’attention moyen pour de tels produits et services.

25      En tout état de cause, à supposer même qu’une partie du public ferait preuve d’un niveau d’attention plus élevé, c’est le groupe ayant le niveau d’attention le moins élevé qui doit être pris en compte [voir arrêt du 30 janvier 2019, Bekat/EUIPO – Borbet (ARBET), T‑79/18, non publié, EU:T:2019:39, point 23 et jurisprudence citée].

26      En second lieu, il convient de rappeler qu’il suffit, pour refuser l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne, qu’un motif relatif de refus au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 existe dans une partie de l’Union ou pour une partie non négligeable du public pertinent (voir point 18 ci-dessus). Il s’ensuit que la chambre de recours était fondée à limiter son appréciation du risque de confusion au public francophone de l’Union, ainsi qu’elle l’a expliqué au point 45 de la décision attaquée.

27      Dans ces circonstances, la requérante n’est pas fondée à soutenir que la chambre de recours a commis une erreur d’appréciation lors de la détermination du public pertinent et de son niveau d’attention.

 Sur la comparaison des produits et des services en cause

28      Pour apprécier la similitude entre les produits et les services en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire. D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les canaux de distribution des produits concernés [voir arrêt du 11 juillet 2007, El Corte Inglés/OHMI – Bolaños Sabri (PiraÑAM diseño original Juan Bolaños), T‑443/05, EU:T:2007:219, point 37 et jurisprudence citée].

 Sur la comparaison des produits relevant de la classe 3 visés par les marques en conflit

29      Premièrement, la chambre de recours a considéré, en substance, aux points 51 à 59 de la décision attaquée, que les « crèmes cosmétiques pour le corps ; cosmétiques ; produits de beauté ; préparations cosmétiques pour le soin de la peau ; préparations cosmétiques pour l’amincissement et le raffermissement ; préparations cosmétiques pour le bronzage de la peau ; produits de parfumerie ; eaux de toilette ; eaux de parfum ; déodorants à usage personnel (parfumerie) ; huiles essentielles ; huiles pour le corps et le visage ; savons et gels ; produits de rasage ; préparations cosmétiques pour le bain ; savons à barbe » visés par la marque demandée étaient identiques à certains des produits visés par la marque antérieure.

30      Deuxièmement, au point 60 de la décision attaquée, la chambre de recours a estimé que les « crèmes cosmétiques pour le visage ; sérums à usage cosmétique ; laits de beauté ; eaux micellaires ; baumes et lotions à usage cosmétique et capillaire ; maquillage ; produits de démaquillage ; masques de beauté ; bougies de massage à usage cosmétique (à savoir, bougies à base d’huile solidifiée pour le corps contenant des ingrédients relaxants et nourrissants pour la peau ; lorsque la base des bougies est fondue, elles peuvent être utilisées pour masser) ; préparations cosmétiques pour le soin des ongles ; préparations cosmétiques pour le soin des cheveux ; shampooings ; après-shampooings ; produits pour le soin des cheveux ; teintures et colorants pour cheveux ; dépilatoires ; cire à épiler ; vernis » visés par la marque demandée présentaient une certaine similitude avec les « crèmes et lotions parfumées pour le corps » visées par la marque antérieure.

31      La requérante reproche à la chambre de recours d’avoir omis de prendre en compte le fait que les produits en cause relevant de la classe 3 visés par la marque demandée et ceux visés par la marque antérieure étaient différents de par leur nature, leur finalité et leur utilisation. En particulier, elle fait valoir que les produits en cause relevant de la classe 3 visés par la marque demandée sont censés traiter des problèmes spécifiques et rester sur la peau du consommateur pendant un certain temps, contrairement aux produits visés par la marque antérieure. Elle en conclut que les produits en cause ne sont ni concurrents ni complémentaires.

32      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

33      À cet égard, il convient de rappeler que des produits peuvent être considérés comme identiques lorsque les produits visés par la demande de marque sont inclus dans une catégorie plus générale visée par la marque antérieure [voir arrêt du 24 novembre 2005, Sadas/OHMI – LTJ Diffusion (ARTHUR ET FELICIE), T‑346/04, EU:T:2005:420, point 34 et jurisprudence citée]. Réciproquement, des produits peuvent également être considérés comme identiques lorsque les produits que désigne la marque antérieure sont inclus dans une catégorie plus générale visée par la demande de marque [arrêts du 23 octobre 2002, Institut für Lernsysteme/OHMI – Educational Services (ELS), T‑388/00, EU:T:2002:260, point 53, et du 25 novembre 2020, BRF Singapore Foods/EUIPO – Tipiak (Sadia), T‑309/19, non publié, EU:T:2020:565, point 139].

34      En l’espèce, en premier lieu, il convient de relever que les « crèmes et lotions parfumées pour le corps » couvertes par la marque antérieure relèvent des catégories plus larges des « crèmes cosmétiques pour le corps ; cosmétiques ; produits de beauté ; préparations cosmétiques pour le soin de la peau » visées par la marque demandée. Il en va de même pour les « savons parfumés » couverts par la marque antérieure et les « savons et gels ; produits de rasage ; préparations cosmétiques pour le bain ; savons à barbe » visés par la marque demandée. Dès lors, il convient de constater une identité entre ces produits.

35      En deuxième lieu, la description des « produits de parfumerie ; eaux de toilette ; eaux de parfum ; déodorants à usage personnel (parfumerie) » visés par la marque demandée est identique aux « parfums ; eau de Cologne ; eaux de toilette ; eau de parfum ; déodorants à usage personnel » visés par la marque antérieure. Il en va de même pour les « huiles essentielles » qui sont visées par les marques en conflit. Cette dernière catégorie inclut également les « huiles pour le corps et le visage » visées par la marque demandée. En ce qui concerne les « préparations cosmétiques pour l’amincissement et le raffermissement ; préparations cosmétiques pour le bronzage de la peau » visées par la marque demandée, ces produits sont inclus dans la catégorie plus large des «crèmes et lotions parfumées pour le corps » visées par la marque antérieure. Par conséquent, ces produits sont identiques.

36      En troisième lieu, dans la mesure où les « crèmes cosmétiques pour le visage ; sérums à usage cosmétique ; laits de beauté ; eaux micellaires ; baumes et lotions à usage cosmétique et capillaire ; maquillage ; produits de démaquillage ; masques de beauté ; bougies de massage à usage cosmétique (à savoir, bougies à base d’huile solidifiée pour le corps contenant des ingrédients relaxants et nourrissants pour la peau ; lorsque la base des bougies est fondue, elles peuvent être utilisées pour masser) ; préparations cosmétiques pour le soin des ongles ; préparations cosmétiques pour le soin des cheveux ; shampooings ; après-shampooings ; produits pour le soin des cheveux ; teintures et colorants pour cheveux ; dépilatoires ; cire à épiler ; vernis » visés par la marque demandée et les « crèmes et lotions parfumées pour le corps » visées par la marque antérieure sont des produits cosmétiques et de soin fabriqués par les mêmes entreprises et vendus par les mêmes canaux de distribution, il y a lieu de relever qu’il existe une similitude moyenne entre eux, ainsi qu’il a été constaté par la chambre de recours.

37      Ces conclusions ne sauraient être remises en cause par les arguments avancés par la requérante selon lesquels les produits visés par la marque antérieure sont destinés à créer uniquement un effet olfactif. En effet, la finalité desdits produits est également d’hydrater et de lubrifier la peau.

38      Par conséquent, l’argumentation de la requérante en ce qui concerne les produits relevant de la classe 3 doit être écartée.

 Sur la comparaison entre les produits relevant de la classe 21 visés par la marque demandée et les produits visés par la marque antérieure

39      La chambre de recours a conclu, aux points 65 à 69 de la décision attaquée, que les « ustensiles cosmétiques ; nécessaires de toilette ; houppes à poudrer ; éponges de toilette ; éponges pour le maquillage ; pots à usage cosmétique » visés par la marque demandée relevant de la classe 21 présentaient un faible degré de similitude avec les « crèmes et lotions parfumées pour le corps » visées par la marque antérieure.

40      La requérante soutient, d’abord, que les produits en cause ont une nature et une forme différentes, dans la mesure où les produits visés par la marque antérieure sont liquides, tandis que les produits relevant de la classe 21 mentionnés au point 39 ci-dessus sont solides. Ensuite, elle estime que ces premiers peuvent être utilisés seuls, contrairement aux produits visés par la marque demandée qui nécessitent l’utilisation d’autres produits. Enfin, elle fait valoir que les produits en cause ne sont ni concurrents ni complémentaires.

41      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

42      Selon une jurisprudence constante, les produits complémentaires sont ceux entre lesquels existe un lien étroit, en ce sens que l’un est indispensable ou important pour l’usage de l’autre, de sorte que les consommateurs peuvent penser que la responsabilité de ces produits incombe à la même entreprise (voir arrêt du 22 janvier 2009, easyHotel, T‑316/07, EU:T:2009:14, point 57 et jurisprudence citée).

43      À cet égard, il y a lieu de relever que les produits relevant de la classe 21 mentionnés au point 39 ci-dessus sont des ustensiles qui possèdent une fonction complémentaire aux « crèmes et lotions parfumées pour le corps » couvertes par la marque antérieure, en ce qu’ils ne peuvent pas être utilisés sans ces dernières. En outre, ils peuvent être achetés dans les mêmes endroits, ils s’adressent au même public pertinent et peuvent être fabriqués par les mêmes producteurs [voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 16 décembre 2015, CareAbout/OHMI – Florido Rodríguez (Kerashot), T‑356/14, non publié, EU:T:2015:978, point 37].

44      Toutefois, ainsi que l’admet l’EUIPO, les produits en cause ont une nature, une destination et une utilisation différentes.

45      Partant, il convient de conclure que, compte tenu du lien de complémentarité susmentionné, la chambre de recours n’a commis aucune erreur d’appréciation en considérant que les produits en cause étaient faiblement similaires.

 Sur la comparaison entre les services relevant de la classe 35 visés par la marque demandée et les produits visés par la marque antérieure

46      La chambre de recours a relevé, aux points 74 à 77 de la décision attaquée, que les services relevant de la classe 35 visés au point 7 ci-dessus étaient similaires au moins à un faible degré aux produits couverts par la marque antérieure.

47      La requérante estime qu’une similitude entre les services relevant de la classe 35 visés au point 7 ci-dessus et les produits relevant de la classe 3 désignés par la marque antérieure est exclue dans la mesure où, de par leur nature, les services sont intangibles alors que les produits sont tangibles. À l’appui de cet argument, la requérante invoque également les directives de l’EUIPO.

48      L’EUIPO et l’intervenante contestent cette argumentation.

49      À cet égard, il importe de rappeler que les principes applicables à la comparaison des produits s’appliquent également à la comparaison entre les produits et les services. Certes, du fait de leur nature même, les produits sont généralement différents des services, mais il n’en demeure pas moins qu’ils peuvent être complémentaires ou que les services peuvent avoir le même objet ou la même destination que les produits et se trouver, de ce fait, en concurrence avec ces derniers. Il s’ensuit que, dans certaines circonstances, une similitude peut être constatée entre des produits et des services [arrêt du 27 octobre 2005, Éditions Albert René/OHMI – Orange (MOBILIX), T‑336/03, EU:T:2005:379, point 66].

50      En particulier, ainsi que l’a retenu à juste titre la chambre de recours, il existe entre des produits et les services de vente au détail qui portent sur ces produits une similitude qui tient à l’existence entre eux d’un lien de complémentarité [voir, en ce sens, arrêt du 7 octobre 2015, CBM/OHMI – Aeronautica Militare (TRECOLORE), T‑365/14, non publié, EU:T:2015:763, point 34 et jurisprudence citée].

51      En outre, les services de vente au détail des produits visés par la demande de marque qui sont identiques et moyennement similaires aux produits visés par la marque antérieure doivent être considérés comme étant moyennement similaires aux produits respectifs visés par la marque antérieure. Les services de vente en détail des produits visés par la demande de marque qui sont faiblement similaires aux produits visés par la marque antérieure doivent être considérés comme étant faiblement similaires à ces derniers produits [arrêt du 28 novembre 2019, Runnebaum Invest/EUIPO – Berg Toys Beheer (Bergsteiger), T‑736/18, non publié, EU:T:2019:826, point 91].

52      En l’espèce, premièrement, il y a lieu de relever que, compte tenu du fait que les « crèmes cosmétiques pour le corps ; cosmétiques ; produits de beauté ; préparations cosmétiques pour le soin de la peau ; savons et gels ; produits de rasage ; préparations cosmétiques pour le bain ; savons à barbe ; produits de parfumerie ; eaux de toilette ; eaux de parfum ; déodorants à usage personnel (parfumerie) ; huiles essentielles ; huiles pour le corps et le visage ; préparations cosmétiques pour l’amincissement et le raffermissement ; préparations cosmétiques pour le bronzage de la peau » sont identiques à certains des produits visés par la marque antérieure, ainsi qu’il a été constaté aux points 34 et 35 ci-dessus, les « services de vente au détail » des premiers doivent eux-mêmes être considérés comme présentant un degré moyen de similitude, et non un degré de similitude au moins faible, avec les seconds, conformément à la jurisprudence mentionnée au point 51 ci-dessus. 

53      Deuxièmement, conformément à la même jurisprudence, dans la mesure où les « crèmes cosmétiques pour le visage ; sérums à usage cosmétique ; laits de beauté ; eaux micellaires ; baumes et lotions à usage cosmétique et capillaire ; maquillage ; produits de démaquillage ; masques de beauté ; bougies de massage à usage cosmétique (à savoir, bougies à base d’huile solidifiée pour le corps contenant des ingrédients relaxants et nourrissants pour la peau ; lorsque la base des bougies est fondue, elles peuvent être utilisées pour masser) ; préparations cosmétiques pour le soin des ongles ; préparations cosmétiques pour le soin des cheveux ; shampooings ; après-shampooings ; produits pour le soin des cheveux ; teintures et colorants pour cheveux ; dépilatoires ; cire à épiler ; vernis » sont similaires à un degré moyen à certains des produits visés par la marque antérieure, ainsi qu’il a été constaté au point 36 ci-dessus, les « services de vente au détail » des premiers doivent eux-mêmes être considérés comme présentant un degré moyen de similitude, et non un degré de similitude au moins faible, avec les seconds.

54      Troisièmement, compte tenu du fait que les « ustensiles cosmétiques ; nécessaires de toilette ; houppes à poudrer ; éponges de toilette ; éponges pour le maquillage ; pots à usage cosmétique » relevant de la classe 21 sont faiblement similaires à certains des produits visés par la marque antérieure, ainsi qu’il a été relevé au point 45 ci-dessus, les « services de vente au détail » des premiers doivent eux-mêmes être considérés comme présentant un faible degré de similitude avec eux, conformément à la jurisprudence mentionnée au point 51 ci-dessus.

55      Quatrièmement, en ce qui concerne les directives de l’EUIPO, il ressort de la jurisprudence qu’elles ne constituent pas des actes juridiques contraignants pour l’interprétation des dispositions du droit de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 19 décembre 2012, Leno Merken, C‑149/11, EU:C:2012:816, point 48).

56      Partant, il convient de conclure que, concernant la comparaison entre les services relevant de la classe 35 et certains des produits visés par la marque antérieure, ceux-ci sont similaires à un degré variant de faible à moyen.

 Sur la comparaison entre les services relevant de la classe 44 visés par la marque demandée et les produits visés par la marque antérieure

57      La chambre de recours a considéré, d’une part, aux points 80 à 82 de la décision attaquée, que les services d’ « hygiène et soins de beauté pour êtres humains ; instituts et salons de beauté ; salons de coiffure ; services de manucure ; services de visagistes » étaient complémentaires des « crèmes et lotions parfumées pour le corps ; savons parfumés » couverts par la marque antérieure et que les centres et les salons de beauté proposaient souvent des produits de beauté à leurs clients. Dès lors, elle a conclu que ces services et ces produits en cause étaient similaires à un faible degré.

58      D’autre part, aux points 83 à 85 de la décision attaquée, la chambre de recours a estimé que les « conseils du domaine de l’esthétique ; services de conseil dans le domaine de la coiffure ; services de conseil dans le domaine de l’esthétique corporelle ; services de conseils dans le domaine du maquillage » incluaient des indications sur les types de produits cosmétiques à utiliser et avaient les mêmes canaux de distribution que les produits visés par la marque antérieure. Elle a conclu que, compte tenu du fait que ces produits et ces services étaient complémentaires, il existait une faible similitude entre eux.

59      La requérante soutient que les services en cause n’ont pas la même finalité que les produits couverts par la marque antérieure. En outre, elle conteste leur complémentarité, étant donné que les services en cause sont fournis dans des salons de beauté ou des bureaux, à savoir aux endroits où les produits visés par la marque antérieure ne sont pas vendus.

60      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

61      En l’espèce, il suffit de constater, à l’instar de la chambre de recours, qu’il existe un rapport de complémentarité entre les produits relevant de la classe 3 couverts par la marque antérieure et les services relevant de la classe 44 visés par la marque demandée. Ces produits et ces services partagent le même objet général, à savoir prodiguer des soins d’hygiène et de beauté. Les services en cause visés par la marque demandée constituent une vaste catégorie ayant pour objet de laver, de purifier et d’embellir le corps humain, ou de donner des conseils à cet égard. De même, les « crèmes et lotions parfumées pour le corps », les « parfums » et les « savons parfumés » sont destinés à être mis en contact avec le corps humain en vue de le nettoyer, de le parfumer, de le protéger, de l’embellir ou de le maintenir en bon état. En outre, le libellé utilisé pour désigner les services d’ « hygiène et soins de beauté pour êtres humains » visés par la marque demandée est très large et comprend, notamment, les soins pour lesquels peuvent être utilisés les produits relevant de la classe 3 couverts par la marque antérieure [voir, en ce sens, arrêt du 21 décembre 2021, Dr. Spiller/EUIPO – Rausch (Alpenrausch Dr. Spiller), T‑6/20, non publié, EU:T:2021:920, point 85].

62      Dès lors, il y a lieu de conclure, à l’instar de la chambre de recours, que les produits et les services en cause sont similaires à un faible degré.

 Sur la comparaison des signes

63      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

64      En l’espèce, la marque demandée est une marque figurative composée de trois éléments verbaux écrits en caractères légèrement stylisés noirs et en majuscules, à savoir l’article défini « la » et les termes « crème » et « libre », ce dernier étant écrit à l’envers.

65      La marque antérieure est une marque verbale composée du seul terme « libre ».

66      Avant de traiter la question de la similitude des marques en conflit sur les plans visuel, phonétique et conceptuel, il y a lieu d’examiner l’appréciation de leurs éléments distinctifs et dominants telle qu’effectuée par la chambre de recours.

 Sur les éléments distinctifs et dominants des marques en conflit

67      En premier lieu, s’agissant de la marque demandée, la chambre de recours a conclu, tout d’abord, aux points 106 et 107 de la décision attaquée, que l’expression « la crème » figurant dans la marque demandée était dépourvue de caractère distinctif pour les produits et les services pour lesquels elle avait été demandée, à l’inverse du terme « libre » dont la signification, sans lien avec des produits cosmétiques, rendait cet élément distinctif pour les produits et les services en cause.

68      Ensuite, la chambre de recours a constaté, au point 108 de la décision attaquée, que le message véhiculé par l’expression « la crème libre », considérée dans son ensemble, possédait un caractère distinctif minimal pour les produits et les services en cause, à l’exception des produits qui pouvaient prendre la forme d’une crème. Cette appréciation de la chambre de recours n’est pas contestée par la requérante.

69      Enfin, la chambre de recours a estimé, au point 109 de la décision attaquée, que la marque demandée ne contenait aucun élément susceptible d’être considéré comme visuellement dominant par rapport aux autres, compte tenu, en substance, de la police identique utilisée pour chacun de ses éléments verbaux. Cette appréciation n’est pas non plus contestée par la requérante.

70      En second lieu, en ce qui concerne la marque antérieure, il est constant entre les parties qu’elle ne contient qu’un seul élément verbal, lequel est distinctif.

71      Ainsi, la requérante se limite à remettre en cause les conséquences que la chambre de recours a tirées de ces appréciations lors de l’examen de la similitude des marques en conflit.

 Sur la comparaison visuelle

72      La chambre de recours a constaté, au point 127 de la décision attaquée, que les signes en conflit présentaient un faible degré de similitude sur le plan visuel.

73      La requérante conteste cette conclusion en faisant valoir, en substance, que la présence de l’élément « libre » dans les deux signes ne peut pas l’emporter sur les importantes différences entre eux, portant notamment sur la longueur et la représentation des signes. Ceci serait d’autant plus vrai que ledit élément est placé à la fin de la marque demandée et que le public pertinent aura des difficultés à le lire, du fait qu’il est écrit à l’envers. À l’appui de ses arguments, elle invoque l’arrêt du 27 novembre 2007, Gateway/OHMI – Fujitsu Siemens Computers (ACTIVY Media Gateway) (T‑434/05, non publié, EU:T:2007:359, points 44 et 45), dans lequel le Tribunal avait jugé que les signes concernés n’étaient pas similaires sur le plan visuel.

74      L’EUIPO et l’intervenante contestent ces arguments.

75      À cet égard, certes, le public pertinent a tendance à lire de gauche à droite et de haut en bas. Il n’en demeure pas moins, tout d’abord, que le terme « libre » n’est composé que de cinq lettres et est, donc, relativement court. Ensuite, la police utilisée pour cet élément est identique à celle utilisée pour l’expression « la crème ». Enfin, le terme « libre » fait partie du vocabulaire français de base. Par conséquent, l’élément « libre » reste clairement lisible par le public francophone malgré son effet inversé et le fait qu’il est précédé de l’expression « la crème », ainsi qu’il a été relevé par la chambre de recours.

76      Partant, compte tenu de la coïncidence de l’élément « libre » dans les deux signes, ainsi que du fait que la marque antérieure est constituée de ce seul élément, il ne peut être valablement soutenu que les marques en conflit ne présentent aucun degré de similitude, même faible, sur le plan visuel.

77      Par ailleurs, s’agissant de l’arrêt invoqué par la requérante, il y a lieu de constater que les considérations mises en exergue par la requérante dans cet arrêt ne sauraient être transposées au cas d’espèce.

78      En effet, l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 27 novembre 2007, ACTIVY Media Gateway (T‑434/05, non publié, EU:T:2007:359), concernait l’enregistrement de la marque de l’Union européenne verbale ACTIVY Media Gateway, alors que les marques verbales antérieures étaient composées d’un seul mot de sept lettres, à savoir le mot « gateway ». Le Tribunal avait considéré que l’élément « activy », de par son positionnement en première place dans la marque demandée, et de par sa reproduction en lettres majuscules, en ressortait de manière claire. Il avait également constaté qu’il constituait l’élément distinctif et dominant de la marque demandée, d’un point de vue visuel (arrêt du 27 novembre 2007, ACTIVY Media Gateway, T‑434/05, non publié, EU:T:2007:359, points 44 et 45).

79      Dans le cadre de la présente affaire, les trois éléments verbaux de la marque demandée sont écrits en majuscules, ainsi qu’il a été relevé au point 64 ci-dessus. Ces éléments sont écrits dans la même police de caractères et les lettres ont la même taille, à l’exception de la lettre « a » qui apparaît légèrement plus petite. En outre, la chambre de recours a conclu que la marque demandée ne contenait, à la différence du cas dont la requérante se prévaut, aucun élément susceptible d’être considéré comme visuellement dominant par rapport aux autres, ce qui n’est pas contesté par la requérante, ainsi qu’il a été relevé au point 69 ci-dessus. Par conséquent, dans la mesure où le cas d’espèce diffère du cas dont la requérante se prévaut en ce qui concerne les éléments distinctifs et dominants des marques en conflit, la requérante n’est pas fondée à faire valoir que les deux cas sont similaires.

80      Dès lors, c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu que les marques en conflit présentaient un faible degré de similitude sur le plan visuel.

 Sur la comparaison phonétique

81      La chambre de recours a considéré, aux points 129 à 131 de la décision attaquée, qu’il existait un degré moyen de similitude phonétique entre les marques en conflit.

82      La requérante conteste cette conclusion de la chambre de recours et soutient que, puisque les signes seront prononcés avec des structures et des rythmes très différents, ils ne sauraient présenter des similitudes phonétiques. La requérante ajoute que le terme « libre » étant écrit à l’envers dans la marque demandée, le public pertinent, et notamment la partie non francophone de celui-ci, aura des difficultés à le prononcer.

83      L’EUIPO et l’intervenante réfutent ces allégations.

84      À titre liminaire, étant donné que la chambre de recours a limité son examen du risque de confusion à la perception de la partie francophone du public pertinent, il convient d’écarter l’argument de la requérante concernant les consommateurs non francophones.

85      S’agissant de l’argument concernant les difficultés des consommateurs de prononcer le terme « libre », celui-ci doit être écarté pour les raisons exposées au point 75 ci-dessus.

86      S’agissant du prétendu rythme différent dans lequel les signes seraient prononcés, ainsi qu’il a été relevé à juste titre par la chambre de recours, bien que le public pertinent prononcera l’expression « la crème » lorsqu’il se référera à la marque demandée, il percevra tout de même la présence du terme « libre » dans les deux marques et le prononcera de façon identique. Ni le nombre différent de syllabes entre les signes ni leurs différences au niveau du rythme ne sauraient remettre en cause cette constatation.

87      Partant, il y a lieu de conclure, à l’instar de la chambre de recours que, compte tenu de la prononciation identique du terme commun « libre », qui par ailleurs constitue la marque antérieure et l’élément le plus distinctif de la marque demandée, les marques en conflit présentent un degré moyen de similitude sur le plan phonétique.

 Sur la comparaison conceptuelle

88      La chambre de recours a constaté que, sur le plan conceptuel, les marques en conflit étaient similaires au moins à un degré moyen.

89      La requérante fait grief à la chambre de recours d’être arrivée à cette conclusion en examinant, en réalité, séparément la signification de l’expression « la crème » et celle du terme « libre ». À ce titre, elle rappelle qu’il ressort de l’enquête, déposée en tant qu’annexe A.3 à la requête, qu’elle avait réalisée auprès de 1 000 consommateurs francophones, que 67 % de ces consommateurs avaient perçu l’expression « la crème » et le terme « libre » comme étant indissociables. Selon la requérante, la marque demandée, prise dans son ensemble, renverrait au concept unique et amusant d’une crème libre, qui serait dépourvu de toute signification. À cet égard, la requérante invoque également une décision de la chambre de recours, du 30 novembre 2020, concernant le signe CUISINE LIBRE.

90      L’EUIPO et l’intervenante contestent ces arguments.

91      À cet égard, premièrement, il convient de relever que l’expression « la crème libre » dans la marque demandée forme une unité conceptuelle autonome, ainsi qu’il a été relevé par la chambre de recours.

92      Deuxièmement, compte tenu du fait que les signes partagent le terme « libre », c’est à juste titre que la chambre de recours a relevé qu’ils véhiculaient tous les deux le concept de liberté.

93      Troisièmement, l’expression « la crème », par ailleurs peu distinctive pour les produits et les services désignés par la marque demandée, n’affaiblit pas ladite similitude conceptuelle. En effet, la signification du terme « libre » n’est pas modifiée par l’adjonction de l’expression « la crème ».

94      Quatrièmement, l’argument de la requérante, fondé sur son enquête, selon lequel l’expression « la crème » et le terme « libre » seraient indissociables, confirme les considérations qui précèdent. Quand bien même le concept d’une crème libre, pris dans son ensemble, est dépourvu de signification, il n’en demeure pas moins que cette expression est composée de l’article « la », du terme « crème », qui est peu distinctif, et du terme « libre », qui fait clairement allusion à la notion de liberté.

95      Cinquièmement, s’agissant de la décision de la chambre de recours concernant le signe CUISINE LIBRE invoquée par la requérante, il convient de rappeler que, dans le cadre de son contrôle de légalité, le Tribunal n’est pas lié par la pratique décisionnelle de l’EUIPO [voir arrêt du 7 septembre 2022, Völkl/EUIPO – Marker Dalbello Völkl (International) (Völkl), T‑155/21, non publié, EU:T:2022:518, point 32 et jurisprudence citée].

96      Partant, il y a lieu de conclure, à l’instar de la chambre de recours, que les signes présentent un degré moyen de similitude sur le plan conceptuel.

 Sur le caractère distinctif de la marque antérieure

97      Ainsi qu’il découle du considérant 11 du règlement 2017/1001, l’appréciation du risque de confusion dépend de nombreux facteurs et notamment de la connaissance qu’a le public de la marque sur le marché en cause. Comme le risque de confusion est d’autant plus étendu que le caractère distinctif de la marque s’avère important, les marques qui ont un caractère distinctif élevé, soit intrinsèquement, soit en raison de la connaissance qu’en a le public, jouissent d’une protection plus étendue que celles dont le caractère distinctif est moindre (voir, par analogie, arrêts du 11 novembre 1997, SABEL, C‑251/95, EU:C:1997:528, point 24 ; du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 18, et du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, EU:C:1999:323, point 20).

98      Pour déterminer le degré de caractère distinctif d’une marque, il convient d’en apprécier globalement l’aptitude plus ou moins grande à identifier les produits ou les services pour lesquels elle a été enregistrée comme provenant d’une entreprise déterminée. Il convient de prendre en considération les qualités intrinsèques de la marque, y compris le fait qu’elle est ou non dénuée de tout élément descriptif des produits ou des services pour lesquels elle a été enregistrée, ainsi que d’autres critères, notamment l’intensité, l’étendue géographique et la durée de l’usage de cette marque (voir arrêt du 24 novembre 2005, ARTHUR ET FELICIE, T‑346/04, EU:T:2005:420, points 55 et 56 et jurisprudence citée).

99      Aux points 141 à 144 de la décision attaquée, la chambre de recours a indiqué que, puisque l’intervenante n’avait pas fait valoir explicitement que sa marque présentait un caractère particulièrement distinctif en raison d’un usage intensif ou d’une renommée, l’appréciation du caractère distinctif de la marque antérieure reposait sur son caractère distinctif intrinsèque. À cet égard, la chambre de recours a estimé que la marque antérieure n’avait, pour le public pertinent, pas de signification en lien avec les produits couverts par celle-ci. Dès lors, elle a considéré que son caractère distinctif était normal.

100    La requérante soutient, en substance, que la marque antérieure possède un faible caractère distinctif, compte tenu du fait qu’il existerait plusieurs marques comprenant le terme « libre » et désignant des produits compris dans la classe 3.

101    L’EUIPO et l’intervenante contestent ces arguments.

102    En ce qui concerne les affirmations de la requérante selon lesquelles le terme « libre » figurerait dans la dénomination de nombreuses marques couvrant les mêmes produits, il y a lieu de constater que, selon la jurisprudence, le facteur pertinent aux fins de contester le caractère distinctif d’un élément consiste dans sa présence effective sur le marché et non dans des registres ou des bases de données [arrêt du 8 mars 2013, Mayer Naman/OHMI – Daniel e Mayer (David Mayer), T‑498/10, non publié, EU:T:2013:117, point 77].

103    En l’espèce, la requérante a produit au soutien de ses affirmations les annexes A.3 et A.7 à la requête. Toutefois, en premier lieu, l’annexe A.3 à la requête consiste en une enquête portant sur les signes en conflit et leur perception par les personnes interrogées. Elle ne contient, donc, pas de données pertinentes en ce qui concerne le caractère distinctif de la marque antérieure. En second lieu, l’annexe A.7 à la requête contient uniquement des exemples de marques françaises et de l’Union européenne couvrant des produits relevant de la classe 3, sans aucune information supplémentaire sur leur usage effectif. Dès lors, les preuves soumises par la requérante ne sont pas suffisantes pour prouver l’usage effectif desdites marques contenant le terme « libre » dans leur dénomination.

104    Par conséquent, il n’y a pas lieu de remettre en cause la conclusion de la chambre de recours selon laquelle la marque antérieure possédait un caractère distinctif moyen.

 Sur le risque de confusion

105    L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement (arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, VENADO avec cadre e.a., T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 74).

106    La chambre de recours a considéré, en substance, que les signes en conflit avaient, dans leur ensemble, un degré de similitude moyen, étant donné qu’un élément non négligeable de la marque demandée correspondait à l’ensemble de la marque antérieure. Compte tenu du caractère distinctif intrinsèque normal de la marque antérieure et du fait que des produits et des services en cause étaient identiques ou similaires à des degrés divers, la partie francophone du public pertinent, ayant un niveau d’attention moyen, serait susceptible de penser qu’ils ont la même origine. Il existerait donc un risque de confusion, qui pourrait également conduire à une association, ledit public pouvant penser que les produits et les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement.

107    La requérante conteste l’existence d’un risque de confusion. Premièrement, les signes en conflit seraient différents. Deuxièmement, la marque demandée devrait être appréciée comme un tout et le public pertinent ne garderait pas à l’esprit le terme « libre ». Troisièmement, la marque antérieure possèderait un caractère distinctif faible, étant donné qu’il existerait de nombreuses marques comprenant le terme « libre » dans leur dénomination. Quatrièmement, le niveau d’attention des consommateurs des produits de la marque antérieure serait élevé, de sorte qu’ils ne confondraient pas les signes en conflit, comme en témoignerait l’enquête déposée en tant qu’annexe A.3.

108    En premier lieu, s’agissant de la similitude des signes, il convient de renvoyer aux considérations figurant aux points 72 à 96 ci-dessus.

109    En deuxième lieu, compte tenu du fait que le terme « libre » est facilement reconnaissable et constitue le seul élément distinctif de la marque demandée, la requérante n’est pas fondée à soutenir que celui-ci ne restera pas dans l’esprit du public pertinent.

110    En troisième lieu, s’agissant du caractère distinctif de la marque antérieure, il y a lieu de rappeler que, ainsi qu’il a été établi aux points 102 à 104 ci-dessus, la requérante n’a pas démontré que ledit caractère distinctif avait été affaibli par l’usage effectif sur le marché d’autres signes composés du terme « libre » pour des produits relevant de la classe 3.

111    En quatrième lieu, ainsi qu’il a été relevé aux points 24 et 25 ci-dessus, le niveau d’attention du public pertinent est moyen.

112    Dès lors, compte tenu du fait que les produits et les services en cause sont soit identiques soit similaires à des degrés divers, du caractère distinctif normal de la marque antérieure et de la faible similitude sur le plan visuel et de la similitude moyenne sur les plans phonétique et conceptuel entre les marques en conflit, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur d’appréciation en estimant qu’il existait un risque que le public pertinent, qui faisait preuve d’un niveau d’attention moyen, puisse attribuer la même origine commerciale aux produits et aux services revêtus des marques en conflit.

113    Ces constatations ne sauraient être remises en cause par l’enquête, présentée dans l’annexe A.3, produite par la requérante afin de démontrer l’absence, dans l’esprit du public pertinent, de confusion entre les marques en conflit. Les données qui y sont présentées ont été collectées entre le 25 janvier et le 2 février 2022, sur la base de quatre questions. L’échantillon de personnes interrogées est composé de 1 000 consommateurs français, provenant de diverses catégories socio-professionnelles.

114    D’emblée, il convient de rappeler que selon une jurisprudence constante, le principe qui prévaut en droit de l’Union est celui de la libre appréciation des preuves, dont il découle, notamment, que le seul critère pertinent pour apprécier la force probante des éléments régulièrement produits réside dans leur crédibilité [arrêt du 13 mai 2020, Divaro/EUIPO – Grendene (IPANEMA), T‑288/19, non publié, EU:T:2020:201, point 41].

115    Dans le cas présent, 20 % des personnes interrogées ont répondu par l’affirmative à la question de savoir si elles percevaient un lien entre les marques en conflit. En outre, 28 % des personnes interrogées ont répondu qu’elles considéraient que les signes appartenaient aux mêmes entreprises.

116    En l’espèce, premièrement, il convient tout d’abord de relever que l’enquête en cause n’a pas été effectuée dans les conditions objectives dans lesquelles les marques en conflit se présentent ou se présenteraient, sur le marché. Ensuite, conformément à la jurisprudence, lors de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de tenir compte de la circonstance que le consommateur moyen n’a que rarement la possibilité de procéder à une comparaison directe des différentes marques mais doit se fier à l’image non parfaite qu’il en a gardée en mémoire (arrêt du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, EU:C:1999:323, point 26). Enfin, lors de l’enquête en question, les participants ont été confrontés uniquement aux marques en conflit.

117    Deuxièmement, la quatrième question de l’enquête, à savoir celle de savoir si selon la perception des personnes interrogées les signes en conflit appartenaient à la même société ou à deux sociétés différentes, porte en substance sur l’existence d’un risque de confusion. Toutefois, afin d’apprécier l’existence dudit risque, il résulte de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, qu’il convient de prendre en compte la perception du public pertinent par rapport aux produits et aux services en cause. En l’espèce, il convient d’observer que les participants à l’enquête ne disposaient d’aucune information sur les produits et les services visés par les signes en conflit. Partant, les résultats de cette question ne peuvent pas être considérés comme pertinents.

118    Troisièmement, indépendamment de la valeur probante de l’enquête, force est de constater que, comme le fait valoir l’EUIPO et l’intervenante à juste titre, le pourcentage de 28 %, à savoir la part des participants ayant estimé que les signes en conflit appartenaient aux mêmes entreprises, n’est pas négligeable pour l’appréciation de l’existence d’un risque de confusion.

119    Partant, compte tenu des considérations énoncées aux points 115 à 118 ci-dessus, il convient de conclure que les résultats de l’enquête produite par la requérante ne sont pas de nature à infirmer les conclusions de la chambre de recours.

120    Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, et sans qu’il soit besoin de se prononcer sur l’argument de l’EUIPO tiré de l’irrecevabilité de l’annexe A.1, le moyen unique invoqué par la requérante au soutien de ses conclusions ne devant être accueilli, il y a lieu de rejeter le recours.

 Sur les dépens

121    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

122    La requérante ayant succombé et une audience ayant été tenue, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Azalee Cosmetics est condamnée aux dépens.

Kowalik-Bańczyk

Hesse

Dimitrakopoulos

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 21 février 2024.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.