Language of document : ECLI:EU:T:2012:582

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (huitième chambre)

6 novembre 2012(*)

« Intervention – Entité régionale – Absence d’intérêt à la solution du litige »

Dans l’affaire T‑57/11,

Castelnou Energía, SL, établie à Madrid (Espagne), représentée initialement par Me E. Garayar Gutiérrez, avocat, puis par Mes C. Fernández Vicién, A. Pereda Miquel et C. del Pozo de la Cuadra, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. E. Gippini Fournier et C. Urraca Caviedes, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenue par

E.ON Generación, SL,

par

Royaume d’Espagne,

par

Comunidad Autónoma de Castilla y León,

par

Federación Nacional de Empresarios de Minas de Carbón (Carbunión),

et par

Hidroeléctrica del Cantábrico, SA,

parties intervenantes,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision C (2010) 4499 de la Commission, du 29 septembre 2010, relative à l’aide d’État N 178/2010 notifiée par le Royaume d’Espagne en faveur de la production d’énergie électrique à partir de charbon indigène,

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de M. L. Truchot, président (rapporteur), Mme M. E. Martins Ribeiro et M. A. Popescu, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Faits et procédure

1        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 27 janvier 2011, la requérante, Castelnou Energía, SL, a introduit un recours tendant à l’annulation de la décision C (2010) 4499 de la Commission, du 29 septembre 2010, relative à l’aide d’État N 178/2010 notifiée par le Royaume d’Espagne en faveur de la production d’énergie électrique à partir de charbon indigène (ci-après la « décision attaquée »). Par cette décision, la Commission européenne a, en substance, autorisé le régime des aides prévues en faveur de la production d’énergie électrique à partir de charbon indigène par le Real Decreto 134/2010, de 12 de febrero, por el que se establece el procedimiento de resolución de restricciones por garantía de suministro y se modifica el Real Decreto 2019/1997, de 26 de diciembre, por el que se organiza y regula el mercado de producción de energía eléctrica (décret royal nº 134/2010, du 12 février 2010, établissant un mécanisme de restrictions visant à garantir l’approvisionnement et modifiant le décret royal nº 2019/1997, du 26 décembre 2010, qui organise et réglemente le marché de la production d’énergie électrique, BOE n° 51, du 27 février 2010, p. 19123), ainsi que le projet de modifications ayant conduit à l’adoption, postérieurement à la décision attaquée, du Real Decreto 1221/2010, de 1 de octubre, por el que se modifica el Real Decreto 134/2010 y se modifica el Real Decreto 2019/1997, de 26 de diciembre, por el que se organiza y regula el mercado de producción de energía eléctrica (décret royal nº 1221/2010, du 1er octobre 2010, portant modification du décret royal nº 134/2010 et modifiant le décret royal nº 2019/1997, du 26 décembre 2010, qui organise et réglemente le marché de la production d’énergie électrique, BOE n° 239, du 2 octobre 2010, p. 83983) (ci-après le « régime litigieux »).

2        Par l’instauration du régime litigieux, le Royaume d’Espagne vise, en substance, à favoriser la production d’énergie électrique à partir de charbon indigène afin d’apporter un soutien tant aux centrales thermiques espagnoles utilisant ledit charbon qu’aux mines de charbon espagnoles, qui seraient toutes menacées de fermeture si un tel régime n’était pas mis en place. À cet effet, certaines centrales de production d’énergie électrique seront obligées de s’approvisionner en charbon indigène, dont le prix est plus élevé que celui d’autres combustibles, et de produire certains volumes d’électricité à partir dudit charbon, et ce moyennant une compensation des coûts supplémentaires de production engendrés par de tels achats.

3        Par acte déposé au greffe du Tribunal le 3 mai 2011, la Comunidad Autónoma de Galicia a demandé à intervenir dans la présente affaire au soutien des conclusions de la requérante.

4        La demande d’intervention a été signifiée aux parties conformément à l’article 116, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal.

5        Par acte déposé au greffe du Tribunal le 1er juin 2011, la Commission a soulevé des objections à l’encontre de ladite demande d’intervention.

6        Par acte déposé au greffe du Tribunal le 2 juin 2011, la requérante a indiqué ne pas avoir d’objections à l’égard de la demande d’intervention.

7        Le 26 septembre 2012, le président de la huitième chambre du Tribunal a déféré la demande d’intervention de la Comunidad Autónoma de Galicia au Tribunal en application de l’article 116, paragraphe 1, troisième alinéa, du règlement de procédure.

 En droit

8        Conformément à l’article 40, deuxième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, applicable à la procédure devant le Tribunal en vertu de l’article 53, premier alinéa, dudit statut, toute personne justifiant d’un intérêt à la solution d’un litige soumis au Tribunal, à l’exclusion des litiges entre États membres, entre institutions de l’Union ou entre États membres, d’une part, et institutions de l’Union, d’autre part, peut intervenir audit litige.

9        La notion d’intérêt à la solution du litige, au sens de ladite disposition, doit se définir au regard de l’objet même du litige et s’entendre comme un intérêt direct et actuel réservé aux conclusions elles-mêmes, et non comme un intérêt par rapport aux moyens et arguments soulevés (ordonnance de la Cour du 12 avril 1978, Amylum e.a./Conseil et Commission, 116/77, 124/77 et 143/77, Rec. p. 893, points 7 et 9, et ordonnance du Tribunal du 25 février 2003, BASF/Commission, T‑15/02, Rec. p. II-213, point 26). En effet, par « solution » du litige, il faut entendre la décision finale demandée au juge saisi, telle qu’elle serait consacrée dans le dispositif de l’arrêt. Il convient, notamment, de vérifier que l’intervenant est touché directement par l’acte attaqué et que son intérêt à la solution du litige est certain (voir ordonnance BASF/Commission, précitée, point 26, et la jurisprudence citée).

10      S’agissant en particulier des demandes en intervention présentées, comme en l’espèce, par des entités infra-étatiques, leur intérêt général à obtenir un résultat favorable pour la prospérité économique des entreprises établies sur leur territoire ne saurait à lui seul justifier une intervention au litige, pareil intérêt étant de caractère indirect et lointain (voir, en ce sens, ordonnance du président de la première chambre du Tribunal du 3 juin 1999, ACAV e.a./Conseil, T-138/98, non publiée au Recueil, point 20, et la jurisprudence citée).

11      C’est ainsi que, en matière d’aides d’État, l’intérêt à la solution du litige des entités infra-étatiques n’a été reconnu principalement que dans deux cas, premièrement, lorsque l’entité en cause dispense l’aide faisant l’objet de l’acte attaqué (ordonnances du président de la troisième chambre élargie du Tribunal du 8 novembre 1999, ESF Elbe-Stahlwerke Feralpi/Commission, T-6/99, non publiée au Recueil, du président de la cinquième chambre élargie du Tribunal du 18 février 2002, Sniace/Commission, T-88/01, non publiée au Recueil, et du président de la cinquième chambre élargie du Tribunal du 9 juillet 2003, Kahla/Thüringen Porzellan/Commission, T-20/03, non publiée au Recueil) et, deuxièmement, lorsque ladite aide est susceptible d’affecter directement et actuellement la situation économique de l’entité infra-étatique se trouvant à proximité géographique des bénéficiaires soit en provoquant la délocalisation de certaines entreprises implantées sur son territoire, soit en portant atteinte à la situation concurrentielle d’autres entreprises établies sur son territoire (ordonnance du président de la Cour du 6 mars 2003, Ramondín et Ramondín Cápsulas/Commission, C-186/02 P, non publiée au Recueil, point 9 ; ordonnances du président de la troisième chambre élargie du Tribunal du 10 avril 2002, Gobierno Foral de Navarra/Commission, T-225/01, non publiée au Recueil, point 7, et du président de la cinquième chambre du Tribunal du 9 janvier 2006, Confebask/Commission, T-265/01, non publiée au Recueil, point 8).

12      En outre, il a également été admis, en matière de protection des ressources naturelles et de dumping, lorsque l’acte attaqué portait sur un secteur économique en particulier, que les entités infra-étatiques ayant démontré que leur structure économique et sociale dans son ensemble dépendait essentiellement des activités économiques du secteur affecté par l’acte attaqué disposaient d’un intérêt à la solution du litige (ordonnance du président de la cinquième chambre du Tribunal du 25 juin 1996, Area Cova e.a./Conseil, T-194/95, non publiée au Recueil, point 2, et ordonnance ACAV e.a./Conseil, précitée, points 15 et 18). Les décisions en matière d’aides d’État pouvant également porter sur un secteur économique en particulier, il y a lieu de considérer, à l’instar de la demanderesse en intervention et de la Commission, que cette jurisprudence est également applicable aux demandes en intervention d’entités infra-étatiques relatives à des régimes d’aides sectoriels, tels que celui en cause en l’espèce.

13      Les arguments avancés par la demanderesse en intervention visent en substance principalement à établir qu’elle se trouve dans cette troisième hypothèse, évoquée au point précédent, ainsi que dans la deuxième hypothèse mentionnée au point 11 ci-dessus.

14      Pour démontrer en premier lieu que sa demande en intervention remplit les conditions de la troisième hypothèse visée au point 12 ci-dessus et ainsi que la décision attaquée porte atteinte au secteur essentiel de l’économie galicienne que constitue l’énergie électrique produite à partir de sources autres que le charbon indigène, la demanderesse en intervention soutient que l’exécution de la décision attaquée conduirait inévitablement, d’une part, à l’arrêt total de l’activité des centrales thermiques situées à As Pontes de García Rodríguez et à Meirama qui utilisent du charbon importé ainsi que de la centrale thermique située à Sabón qui utilise du fioul et, d’autre part, à une réduction substantielle de l’activité des centrales opérant à cycles combinés qui sont situées en Galice ainsi qu’à leur probable fermeture.

15      En outre, la cessation ou la réduction substantielle de l’activité de ces centrales se répercuterait inévitablement sur d’autres activités industrielles directement liées à l’activité de production d’électricité. À cet égard, la demanderesse en intervention craint une réduction drastique de l’activité des ports de Ferrol et de La Corogne situés sur son territoire ainsi que des activités de transport et de maintenance, en ce qu’il ne serait plus nécessaire de procéder au déchargement du charbon importé, ni à son transport entre les ports de déchargement et les centrales, ni à la maintenance des centrales thermiques situées à As Pontes de García Rodríguez, à Meirama et à Sabón. Selon elle, la réduction de l’activité et, finalement, la cessation de l’activité des centrales opérant à cycles combinés pourrait également impliquer une réduction significative non seulement de la consommation de gaz, mais également de l’activité de l’usine de regazéification du gaz naturel liquéfié également située sur son territoire, à Mugardos.

16      La demanderesse en intervention soutient, enfin, que la cessation de l’activité de production des centrales thermiques situées à As Pontes de García Rodríguez, à Meirama et à Sabón ainsi que la réduction des activités d’autres secteurs économiques clés conduiraient à une perte d’emplois et à une baisse des investissements ainsi que des recettes fiscales.

17      Il doit être relevé tout d’abord que la demanderesse en intervention ne démontre pas que sa structure économique et sociale dépend essentiellement du secteur de l’énergie électrique produite à partir de sources autres que le charbon indigène qui serait affecté par la décision attaquée.

18      D’une part, la considération alléguée de l’ordonnance du président du Tribunal du 17 février 2011, Comunidad Autónoma de Galicia/Commission (T-520/10 R, non publiée au Recueil, point 82), selon laquelle « il paraît indéniable que l’exécution de [la décision attaquée] serait préjudiciable [à la demanderesse en intervention] », vise un préjudice uniquement « sous certains aspects » (point 82 de l’ordonnance), dont le président du Tribunal a estimé qu’il n’était pas établi qu’il portait sur un secteur économique d’importance cruciale pour la communauté autonome en cause et ainsi compromettait ses intérêts généraux (points 74 et 75 de l’ordonnance).

19      D’autre part, les données chiffrées fournies par la demanderesse en intervention sont insuffisantes. Ainsi, la demanderesse en intervention fait état du nombre d’employés des centrales susvisées (546), et plus largement du nombre total de personnes employées par des entreprises exerçant des activités connexes à celles des centrales (environ 3 000), ainsi que des recettes fiscales engendrées par l’ensemble de ces activités (plus de 13 millions d’euros par an). Elle ne fournit toutefois aucune preuve de ces données chiffrées, ni n’indique leurs sources, alors qu’il incombe en principe à la personne qui allègue des faits au soutien d’une demande d’apporter la preuve de leur réalité [voir ordonnance du président de la Cour du 25 janvier 2008, Provincia di Ascoli Piceno et Comune di Monte Urano, C-461/07 P(I), non publiée au Recueil, point 9, et la jurisprudence citée]. Elle ne rapporte pas davantage ces données chiffrées respectivement à la population active de la communauté autonome et à son budget total, de sorte qu’il n’est pas possible de déterminer l’importance du secteur en cause pour la structure économique et sociale de la Communauté autonome de Galice dans son ensemble.

20      Il peut être relevé à cet égard, en tout état de cause, que la Commission a précisément procédé à un tel calcul en rapportant le nombre d’emplois invoqué à la population active de la Galice et a obtenu un pourcentage compris entre 0,05 % et 0,3 % de ladite population, qui est à l’évidence insuffisant pour établir que le secteur touché constitue un secteur essentiel pour la demanderesse en intervention (voir, en ce sens, s’agissant d’un secteur représentant 1 % du produit intérieur brut et de l’emploi d’une communauté autonome, ordonnance du président du Tribunal du 10 juillet 2000, Federación de Cofradías de Pescadores de Guipúzcoa/Conseil, T-54/00 R, Rec. p. II-2877, point 17). Il en résulte que, par son allégation relative aux emplois affectés par la décision attaquée, la demanderesse en intervention fait en réalité valoir l’intérêt général que peut avoir une entité infra-étatique à obtenir un résultat favorable pour la prospérité économique des entreprises établies sur son territoire et, par voie de conséquence, sur le niveau de l’emploi dans l’aire géographique où celles-ci exercent leurs activités, lequel ne saurait à lui seul justifier une intervention au litige (voir, en ce sens, ordonnance ACAV e.a./Conseil, précitée, point 20, et la jurisprudence citée).

21      Ensuite et à titre surabondant, la demanderesse en intervention ne démontre pas davantage que le secteur économique en cause, voire les secteurs économiques en cause, seraient affectés par la décision attaquée dans la mesure alléguée. En effet, elle se limite à affirmer que les centrales susvisées devront réduire substantiellement, voire geler leurs activités, en se fondant sur la conclusion d’un rapport de la Comisión Nacional de Energía, joint en annexe à la demande en intervention, selon laquelle le régime litigieux autorisé par la décision attaquée « pourrait entraîner l’arrêt complet des centrales fonctionnant au charbon d’importation […] et une réduction significative des cycles combinés ».

22      Outre le fait que cette conclusion ne fait pas état des centrales fonctionnant au fioul dont la demanderesse en intervention allègue pourtant également la fermeture, il y a lieu de relever que la Comisión Nacional de Energía ne mentionne pas les nombreux facteurs indépendants du régime litigieux qui peuvent influer, ainsi que le souligne à juste titre la Commission, sur la fermeture ou le maintien en activité des centrales n’utilisant pas du charbon indigène, tels que l’évolution de la demande d’électricité.

23      La conclusion tirée du rapport susvisé par la demanderesse en intervention est par ailleurs remise en cause par plusieurs éléments. D’abord, ledit rapport lui-même évoque l’arrêt de la production des centrales utilisant du charbon d’importation en exceptant le cas où l’électricité produite par ces centrales serait nécessaire pour garantir la sécurité de l’approvisionnement électrique. Le régime litigieux n’a en effet pas remis en cause le système dit « des restrictions techniques » qui oblige les centrales d’As Pontes de García Rodríguez et de Meirama à fournir de l’électricité à la demande de l’opérateur technique du système de production et de distribution d’électricité, Red Eléctrica España. Ce système a représenté en 2008 et 2009, selon les données officielles communiquées par le ministère de l’Industrie espagnol, entre 30 et 40 % de la production de ces deux centrales.

24      Ensuite, la Commission a joint en annexe à ses observations sur la demande en intervention un communiqué de presse du ministère de l’Industrie espagnol, non remis en cause par la demanderesse en intervention, qui indique qu’une réunion s’est tenue le 21 octobre 2010, en présence du ministre de l’Industrie, du secrétaire d’État à l’Énergie, du secrétaire général aux Transports, du ministère de l’Équipement et des Transports, et de dirigeants de Gas Natural Fenosa et d’Endesa, dans le but d’analyser l’impact du régime litigieux sur la situation des centrales d’As Pontes de García Rodríguez et de Meirama. Selon ce communiqué, au cours de ladite réunion, les entreprises propriétaires de ces deux centrales, à savoir Endesa et Gas Natural Fenosa, se sont engagées à les maintenir en activité et à y conserver les emplois, ainsi qu’à examiner des formules permettant de garantir un minimum d’activité, y compris le transport. Il ressort du même communiqué que le ministre a également rappelé lors de cette réunion qu’« As Pontes et Meirama sont deux sites essentiels pour le système espagnol de production et de distribution d’électricité, aujourd’hui comme dans le futur bouquet énergétique prévu pour 2020, et que le régime litigieux n’impliquerait en aucun cas leur fermeture ».

25      Il peut être relevé à cet égard que, les centrales concernées ayant fait l’objet récemment d’importants investissements, soit pour les créer, soit pour les moderniser – que détaille d’ailleurs la demanderesse en intervention dans sa demande –, elles pourraient, comme le fait observer la Commission, être rentables à partir de 2014, date d’échéance du régime litigieux dont la durée d’application est limitée à quatre ans.

26      La fermeture alléguée des centrales susvisées étant par conséquent purement hypothétique, il en va de même des répercussions en chaîne invoquées par la demanderesse en intervention sur les activités portuaires, de transport, de maintenance, de l’usine de regazéification de Mugardos, ainsi que sur les emplois et les recettes fiscales. Il peut par ailleurs être ajouté à cet égard, comme le relève la Commission, que quand bien même les centrales fonctionnant au charbon importé seraient fermées, le régime litigieux prévoit l’utilisation par les centrales au charbon indigène d’une certaine proportion de charbon importé pour améliorer leur rendement (de 10 % à plus de 50 %), de sorte qu’il sera toujours nécessaire d’importer du charbon qui transitera par les ports de Galice et qui devra être transporté vers les centrales implantées en Galice.

27      Il résulte de ce qui précède que la demanderesse en intervention n’a pas établi que sa structure économique et sociale dépendait essentiellement d’un secteur qui serait affecté par la décision attaquée.

28      Pour démontrer en second lieu que sa demande en intervention remplit les conditions de la deuxième hypothèse visée au point 11 ci-dessus et ainsi que l’aide en cause porte atteinte à la situation concurrentielle des entreprises établies sur son territoire en favorisant des entreprises implantées sur des territoires géographiquement proches, la demanderesse en intervention soutient que, dans la mesure où le régime litigieux autorisé par la décision attaquée a pour effet de privilégier l’activité de production énergétique de centrales concurrentes situées dans d’autres régions espagnoles, le secteur de l’électricité de Galice subirait un désavantage concurrentiel par rapport à d’autres communautés autonomes espagnoles où se trouveraient des centrales thermiques favorisées par l’aide octroyée par le Royaume d’Espagne.

29      Il y a lieu de relever que la seconde hypothèse jurisprudentielle d’admission de l’intervention d’une entité infra-étatique, exposée au point 11 ci-dessus, vise en substance le cas dans lequel une entité territoriale publique entend soutenir les conclusions d’une partie contestant la légalité de mesures prises par une autre entité territoriale publique limitrophe, plus particulièrement un régime d’aides visant à créer, sur le territoire de cette dernière entité, des conditions plus favorables pour les entreprises afin d’y attirer celles qui sont établies sur le territoire de la première entité (ordonnance Provincia di Ascoli Piceno et Comune di Monte Urano, précitée, point 17). Or, la situation caractérisant la présente demande en intervention ne correspond pas à une telle hypothèse. En effet, le présent litige ne porte pas sur un acte dont la nature et le contenu opposent directement les intérêts d’une entité territoriale publique à ceux d’une autre entité territoriale publique limitrophe, dès lors que le régime litigieux est un régime national qui bénéficie à dix centrales réparties sur le territoire espagnol et qui ainsi en défavorise d’autres, elles aussi réparties sur le territoire national. En particulier, dans toutes les communautés autonomes dans lesquelles sont implantées des centrales bénéficiaires du régime litigieux, et notamment celles limitrophes au territoire de la demanderesse en intervention, se trouvent également des centrales qui n’en bénéficient pas. Le désavantage concurrentiel invoqué par la demanderesse en intervention serait ainsi subi par certaines centrales par rapport à d’autres et non par une communauté autonome par rapport à une autre, de sorte qu’il ne permet pas d’établir son intérêt à la solution du litige.

30      Il résulte de ce qui précède que la demanderesse en intervention n’a pas établi qu’elle disposait d’un intérêt à la solution du litige au sens de la jurisprudence citée aux points 11 et 12 ci-dessus.

31      L’intérêt à la solution du présent litige de la demanderesse en intervention ne résulte pas davantage de son prétendu intérêt à présenter des observations dans le cadre de la procédure formelle d’examen du régime litigieux par la Commission au titre de l’article 108, paragraphe 2, TFUE. La demanderesse en intervention précise à cet égard que s’il était fait droit au recours de la requérante, la Commission serait tenue d’ouvrir la procédure formelle d’examen, ce qui l’obligerait à permettre aux parties intéressées au sens de l’article 1er, sous h), du règlement (CE) nº 659/1999 du Conseil, du 22 mars 1999, portant modalités d’application de l’article [108 TFUE] (JO L 83, p. 1), au nombre desquelles elle se trouverait, de présenter des observations.

32      Il y a lieu de relever que la demanderesse en intervention avance pour établir sa qualité de partie intéressée au sens du règlement n° 659/1999 certains des éléments allégués au soutien de l’application à son égard de la troisième hypothèse jurisprudentielle de reconnaissance de l’intérêt à la solution du litige des entités infra-étatiques (voir points 14 à 16 ci-dessus). Elle fait valoir en effet que la décision attaquée constituerait un obstacle à l’exercice de ses compétences en matière énergétique en obligeant les opérateurs sur lesquels s’exercent ces compétences à quitter le marché ou à réduire substantiellement leurs activités du fait de la fermeture ou de la réduction substantielle de l’activité des quatre centrales implantées sur son territoire. Or, il ressort des considérations précédentes que la demanderesse en intervention n’a établi ni que la fermeture ou la réduction substantielle des activités des centrales concernées seraient la conséquence du régime litigieux (voir points 21 à 26 ci-dessus), ni l’importance des conséquences économiques négatives qui en résulteraient sur son économie (voir points 18 à 20 et 26 ci-dessus). Ainsi, à supposer même que sa qualité de partie intéressée au sens du règlement n° 659/1999 suffise à établir son intérêt à la solution du présent litige, la demanderesse en intervention n’a pas établi, en l’état des éléments fournis dans le cadre de la présente instance, disposer d’une telle qualité et partant l’intérêt à la solution du présent litige qui en découlerait.

33      Par conséquent, faute pour la Comunidad Autónoma de Galicia d’avoir établi l’existence d’un intérêt direct et actuel à la solution du litige, sa demande en intervention doit être rejetée.

 Sur les dépens

34      En vertu de l’article 87, paragraphe 1, du règlement de procédure, il est statué sur les dépens dans l’arrêt ou l’ordonnance qui met fin à l’instance. La présente ordonnance mettant fin à l’instance à l’égard de Comunidad Autónoma de Galicia, il convient de statuer sur les dépens afférents à sa demande d’intervention.

35      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Comunidad Autónoma de Galicia ayant succombé en sa demande, il y a lieu de la condamner à supporter ses propres dépens ainsi que ceux de la Commission, conformément aux conclusions de cette dernière. La requérante n’ayant pas formulé de conclusions à cet égard, il y a lieu de décider qu’elle supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

ordonne :

1)      La demande d’intervention de la Comunidad Autónoma de Galicia est rejetée.

2)      La Comunidad Autónoma de Galicia supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la Commission européenne afférents à la demande d’intervention.

3)      Castelnou Energía, SL supportera ses propres dépens afférents à la demande d’intervention.

Fait à Luxembourg, le 6 novembre 2012.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       L. Truchot


* Langue de procédure : l’espagnol.