Language of document : ECLI:EU:T:2024:126

Affaire T390/20

(publication par extraits)

Scandlines Danmark ApS
et
Scandlines Deutschland GmbH

contre

Commission européenne

 Arrêt du Tribunal (première chambre élargie) du 28 février 2024

« Aides d’État – Financement public de la liaison fixe rail-route du détroit de Fehmarn – Aide accordée par le Danemark à Femern – Décision déclarant l’aide compatible avec le marché intérieur – Aide individuelle – Projet important d’intérêt européen commun – Nécessité de l’aide – Proportionnalité – Mise en balance des effets bénéfiques de l’aide avec ses effets négatifs sur les conditions des échanges et sur le maintien d’une concurrence non faussée – Communication sur les critères relatifs à l’analyse de la compatibilité avec le marché intérieur des aides d’État destinées à promouvoir la réalisation de projets importants d’intérêt européen commun »

1.      Aides accordées par les États – Examen par la Commission – Qualification de plusieurs interventions consécutives en tant qu’aide individuelle – Conditions – Interventions présentant entre elles des liens indissociables – Conséquence – Absence d’obligation de notification préalable de chacune des tranches versée au titre de l’aide individuelle

[Règlement du Conseil 2015/1589, art. 1er, e)]

(voir points 37-51, 62-64)

2.      Aides accordées par les États – Interdiction – Dérogations – Aides pouvant être considérées comme compatibles avec le marché intérieur – Aides contribuant à la réalisation d’un projet important d’intérêt européen – Octroi de plusieurs aides individuelles versées en plusieurs tranches destinées au financement d’un seul et même projet – Examen conjoint de la compatibilité desdites aides avec le marché intérieur – Admissibilité

[Art. 107, § 3, b), TFUE]

(voir points 52-61)

3.      Aides accordées par les États – Interdiction – Dérogations – Aides pouvant être considérées comme compatibles avec le marché intérieur – Aides contribuant à la réalisation d’un projet important d’intérêt européen – Projet important d’intérêt européen commun – Notion – Projet remplissant les critères généraux ainsi qu’un indicateur positif général prévus par la communication relative à la réalisation de projets importants d’intérêt européen commun – Inclusion

[Art. 107, § 3, b), TFUE ; communication de la Commission 2014/C 188/02, points 14-20]

(voir points 69, 70, 91-102)

4.      Aides accordées par les États – Interdiction – Dérogations – Aides pouvant être considérées comme compatibles avec le marché intérieur – Aides contribuant à la réalisation d’un projet important d’intérêt européen – Projet important d’intérêt européen commun – Critères – Cofinancement du projet par le bénéficiaire de l’aide

[Art. 107, § 3, b), TFUE ; communication de la Commission 2014/C 188/02, point 18]

(voir points 82-85)

5.      Aides accordées par les États – Interdiction – Dérogations – Aides pouvant être considérées comme compatibles avec le marché intérieur – Aides contribuant à la réalisation d’un projet important d’intérêt européen – Nécessité de l’aide – Effet incitatif de l’aide – Introduction d’une demande d’aide avant le début des travaux – Société à vocation spécifique créée par les pouvoirs publics pour réaliser un projet déterminé – Demande d’aide inhérente à la création de cette société

[Art. 107, § 3, b), TFUE ; communication de la Commission 2014/C 188/02, point 28]

(voir points 109-137)

6.      Aides accordées par les États – Interdiction – Dérogations – Aides pouvant être considérées comme compatibles avec le marché intérieur – Aides contribuant à la réalisation d’un projet important d’intérêt européen – Nécessité de l’aide – Appréciation à la lumière d’un scénario contrefactuel – Scénario contrefactuel consistant en l’absence de projet alternatif – Admissibilité – Conditions

[Art. 107, § 3, b), TFUE ; communication de la Commission 2014/C 188/02, point 29]

(voir points 141-163)

7.      Aides accordées par les États – Interdiction – Dérogations – Aides pouvant être considérées comme compatibles avec le marché intérieur – Aides contribuant à la réalisation d’un projet important d’intérêt européen – Nécessité de l’aide – Appréciation en l’absence de projet alternatif – Montant de l’aide ne devant pas dépasser le minimum nécessaire – Calcul du taux de rendement interne du projet – Détermination de la durée de vie pertinente du projet en tenant compte du comportement des investisseurs sur le marché

[Art. 107, § 3, b), TFUE ; communication de la Commission 2014/C 188/02, point 30]

(voir points 168, 171, 176-178)

8.      Aides accordées par les États – Interdiction – Dérogations – Aides pouvant être considérées comme compatibles avec le marché intérieur – Aides contribuant à la réalisation d’un projet important d’intérêt européen – Proportionnalité de l’aide – Calcul du niveau maximal de l’aide en fonction du déficit de financement – Calcul du déficit de financement – Détermination de la durée de vie pertinente du projet en tenant compte du comportement des investisseurs sur le marché

[Art. 107, § 3, b), TFUE ; communication de la Commission 2014/C 188/02, point 31]

(voir points 169, 170, 179)

9.      Aides accordées par les États – Interdiction – Dérogations – Aides pouvant être considérées comme compatibles avec le marché intérieur – Aides contribuant à la réalisation d’un projet important d’intérêt européen – Aides sous forme de garantie ou de prêt – Exigence de limitation dans le temps des aides

[Art. 107, § 3, b), TFUE ; communication de la Commission 2014/C 188/02, point 36]

(voir points 195-206)

10.    Aides accordées par les États – Interdiction – Dérogations – Aides pouvant être considérées comme compatibles avec le marché intérieur – Aides contribuant à la réalisation d’un projet important d’intérêt européen – Proportionnalité de l’aide – Calcul du niveau maximal de l’aide en fonction du déficit de financement – Calcul du déficit de financement – Recettes et coûts pris en compte

[Art. 107, § 3, b), TFUE ; communication de la Commission 2014/C 188/02, point 31]

(voir points 218-247)

11.    Aides accordées par les États – Interdiction – Dérogations – Aides pouvant être considérées comme compatibles avec le marché intérieur – Aides au fonctionnement – Exclusion – Garanties étatiques et prêts d’État limités aux coûts de planification et de construction d’un projet important d’intérêt européen commun – Mesures constituant des aides à l’investissement

[Art. 107, § 3, b), TFUE]

(voir points 248-250)

12.    Aides accordées par les États – Procédure administrative – Détermination du montant de l’aide – Aides contribuant à la réalisation d’un projet important d’intérêt européen – Aides comportant des garanties d’État et des prêts d’État – Calcul du montant de l’aide – Montant de l’aide ne correspondant pas à la totalité des montants couverts par les prêts d’État et les prêts bénéficiant d’une garantie d’État – Montant de l’aide correspondant au montant du déficit de financement du projet en cause – Admissibilité

(Art. 107, § 1, TFUE ; communication de la Commission 2008/C 155/02, point 4.1)

(voir points 256-262, 264-271)

13.    Aides accordées par les États – Interdiction – Dérogations – Aides pouvant être considérées comme compatibles avec le marché intérieur – Aides contribuant à la réalisation d’un projet important d’intérêt européen – Proportionnalité de l’aide – Mise en balance des effets positifs de l’aide en matière de contribution à l’objectif d’intérêt européen commun avec ses effets négatifs en termes de distorsion de concurrence et d’incidence sur les échanges entre les États membres – Absence d’erreur manifeste d’appréciation commise par la Commission

[Art. 107, § 3, b), TFUE ; communication de la Commission 2014/C 188/02, points 41-43]

(voir points 279-327)

Résumé

Le Tribunal rejette le recours en annulation introduit par les compagnies maritimes Scandlines Danmark ApS et Scandlines Deutschland GmbH contre la décision de la Commission du 20 mars 2020 (1) par laquelle celle-ci a constaté que les mesures de soutien accordées par le Danemark à l’entreprise publique Femern A/S pour la planification, la construction et l’exploitation d’une liaison fixe rail-route du détroit de Fehmarn entre le Danemark et l’Allemagne constituent une aide d’État compatible avec le marché intérieur. Dans ce contexte, le Tribunal apporte des précisions sur les modalités de contrôle par la Commission de mesures d’aides faisant l’objet d’un versement en plusieurs tranches. Le Tribunal est également amené à contrôler l’application par la Commission de certains points de sa communication relative à la réalisation de projets importants d’intérêt européen commun (2) (ci-après la « communication PIIEC »).

En 2008, le Danemark et l’Allemagne ont signé un traité relatif à un projet de liaison fixe du détroit de Fehmarn consistant, d’une part, en un tunnel ferroviaire et routier immergé sous la mer Baltique entre le Danemark et l’Allemagne (ci-après la « liaison fixe ») et, d’autre part, en des connexions routières et ferroviaires vers l’arrière-pays danois.

L’entreprise publique danoise Femern a été chargée du financement, de la construction et de l’exploitation de la liaison fixe. Ayant bénéficié d’injections de capitaux, de prêts garantis par l’État ainsi que de prêts accordés par le Danemark, Femern percevra les redevances des usagers à partir de la mise en service de la liaison fixe afin de rembourser sa dette.

Fin 2014, les autorités danoises ont notifié à la Commission le modèle de financement du projet de liaison fixe du détroit de Fehmarn. Sans ouvrir la procédure formelle d’examen, la Commission a décidé de ne pas soulever d’objections à l’égard des mesures notifiées (3).

Par arrêts du 13 décembre 2018 (4), le Tribunal a partiellement annulé cette décision. En ce qui concerne les financements publics accordés à Femern, le Tribunal a jugé que la Commission avait manqué à l’obligation qui lui incombait en vertu de l’article 108, paragraphe 3, TFUE d’ouvrir la procédure formelle d’examen en raison de l’existence de difficultés sérieuses.

Ayant ouvert la procédure formelle d’examen à la suite de ces arrêts, la Commission a considéré, par sa décision du 20 mars 2020, que les mesures consistant en des injections de capitaux et en une combinaison de prêts d’État et de garanties d’État accordées à Femern pour la planification, la construction et l’exploitation de la liaison fixe constituaient une aide d’État compatible avec le marché intérieur sur la base de l’article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE (5), en ce qu’elles étaient destinées à promouvoir la réalisation d’un projet important d’intérêt européen commun dans le respect du principe de proportionnalité.

Les compagnies maritimes Scandlines Danmark et Scandlines Deutschland ont saisi le Tribunal d’un recours en annulation de cette décision.

Appréciation du Tribunal

Au regard du fait que les garanties d’État et les prêts d’État en faveur de Femern avaient été octroyés par tranches successives versées en fonction de l’avancement du projet de liaison fixe, les requérantes reprochaient à la Commission d’avoir erronément considéré, dans la décision attaquée, que les différentes mesures de soutien financier pouvaient être regroupées en trois aides individuelles, à savoir une première aide sous forme d’injection de capitaux effectuée en 2005, une deuxième aide sous forme d’injection de capitaux, de garanties d’État et de prêts d’État accordés au titre d’une loi adoptée en 2009 (6) ainsi qu’une troisième aide sous forme de prêts d’État et de garanties d’État accordés au titre d’une loi adoptée en 2015 (7).

Sur ce point, le Tribunal relève que plusieurs interventions consécutives de l’État peuvent être regardées comme une seule intervention lorsqu’elles présentent, au regard notamment de leur chronologie, de leur finalité et de la situation de l’entreprise au moment de ces interventions, des liens tellement étroits entre elles qu’il est impossible de les dissocier. Cette condition étant remplie pour l’ensemble des financements accordés au titre de la loi adoptée en 2009 ainsi que pour ceux accordés au titre de la loi adoptée en 2015, la Commission n’avait pas commis d’erreur en les qualifiant d’aides individuelles. Il s’ensuit que la Commission n’était pas non plus tenue d’exiger que les autorités danoises lui notifient séparément chaque prêt d’État et chaque garantie d’État accordés à Femern au titre desdites lois.

Par ailleurs, dès lors que les trois aides individuelles accordées à Femern en 2005, en 2009 et en 2015 étaient destinées au financement d’un seul et même projet, la Commission n’a pas dépassé les limites de son pouvoir d’appréciation en examinant conjointement leur compatibilité avec le marché intérieur. C’est précisément en tenant compte de l’ensemble de ces aides que la Commission est en mesure d’évaluer leur effet sur la concurrence dans le cadre de l’examen d’une des dérogations prévues à l’article 107, paragraphe 3, TFUE, en particulier pour un projet important d’intérêt européen commun dont la réalisation implique le versement de financements publics sur une longue période.

Le Tribunal écarte, en outre, le moyen en annulation tiré d’une violation de l’article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE, résultant de ce que la Commission aurait erronément qualifié le projet en cause de projet d’intérêt européen commun et de ce qu’elle aurait conclu à tort au caractère nécessaire et proportionné de l’aide.

Premièrement, en ce qui concerne la qualification du projet de liaison fixe de projet d’intérêt européen commun au sens de l’article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE, le Tribunal rappelle que la notion d’« intérêt européen commun » prévue à cette disposition doit être interprétée de manière stricte et qu’une initiative n’est qualifiée de projet d’intérêt européen commun que lorsqu’elle fait partie d’un programme transnational européen, soutenu conjointement par différents gouvernements d’États membres ou lorsqu’elle relève d’une action concertée de différents États membres en vue de lutter contre une menace commune.

La notion d’« intérêt européen commun » a, en outre, été précisée par la Commission dans la communication PIIEC, laquelle énonce les critères cumulatifs généraux à satisfaire pour qu’un projet puisse relever de cette notion, ainsi que des indicateurs positifs justifiant une approche plus favorable de la Commission aux fins de la qualification en tant que projet d’intérêt européen commun, parmi lesquels figure celui du cofinancement du projet par un fonds de l’Union.

Or, dès lors que le projet de liaison fixe remplissait les critères cumulatifs généraux énoncés dans la communication PIIEC et que ce projet avait, de plus, bénéficié d’un financement de l’Union, la Commission a pu valablement conclure, sur le fondement de ces seuls critères et indicateurs, que le projet de liaison fixe présentait un intérêt européen commun.

Deuxièmement, s’agissant du caractère nécessaire de l’aide, le Tribunal précise que, dans le contexte de l’article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE, l’aide destinée à promouvoir la réalisation d’un projet important d’intérêt européen commun doit, pour être compatible avec le marché intérieur, revêtir un effet d’incitation sur les entreprises bénéficiaires. À cette fin, il doit être démontré que, en l’absence de l’aide projetée, l’investissement destiné à la réalisation du projet en cause ne serait pas effectué. À cet égard, le Tribunal rappelle que la constatation du défaut de nécessité d’une aide peut notamment découler du fait que le projet aidé a déjà été entamé, voire achevé, par l’entreprise intéressée avant que la demande d’aide ne soit transmise aux autorités compétentes, ce qui exclut que l’aide concernée puisse jouer un rôle incitatif (critère de l’antériorité de la demande).

Sur ce dernier point, le Tribunal entérine l’argumentation de la Commission selon laquelle, en l’espèce, le critère de l’antériorité de la demande était rempli du fait que la demande d’aide était inhérente à la création de Femern. À cet égard, le Tribunal souligne que, en tant que société à vocation spécifique créée par les pouvoirs publics pour réaliser le projet de liaison fixe, Femern est tributaire des financements publics jusqu’à la mise en service de la liaison fixe. En outre, dès lors que la Commission pouvait examiner conjointement la compatibilité avec le marché intérieur de l’ensemble des financements octroyés à Femern depuis sa création, le critère de l’antériorité de la demande n’avait pas à être vérifié pour chacune des trois aides individuelles.

La Commission n’avait pas non plus commis d’erreur en considérant que le scénario contrefactuel pris en compte, conformément à la communication PIIEC, aux fins de l’appréciation de la nécessité de l’aide notifiée, consistait en l’absence de projet alternatif. Plus particulièrement, les requérantes et les parties intervenantes n’ont pas démontré qu’il existait un projet alternatif réalisable sans aide d’une échelle ou d’une taille comparable ou apportant des bénéfices équivalents à ceux escomptés par le projet de liaison fixe.

Le Tribunal écarte, en outre, le grief selon lequel la Commission aurait commis des erreurs manifestes d’appréciation en se fondant sur une durée de vie de 40 ans pour effectuer tant le calcul du taux de rendement interne du projet de liaison fixe (nécessité de l’aide) que le calcul du déficit de financement (proportionnalité de l’aide), alors que le projet de liaison fixe aurait une durée de vie de 120 ans.

À cet égard, le Tribunal rappelle, d’une part, que, conformément au paragraphe 30 de la communication PIIEC, en l’absence de projet alternatif, la Commission doit vérifier que le montant de l’aide n’excède pas le minimum nécessaire pour que le projet bénéficiant de l’aide soit suffisamment rentable, étant précisé que tous les coûts et avantages escomptés concernés doivent être pris en considération pendant la durée de vie du projet. Cette référence à la durée de vie devant être comprise comme visant la durée de vie économique du projet d’investissement et non de l’infrastructure sur un plan technique, la Commission n’a pas commis d’erreur en se référant aux comportements des investisseurs sur le marché concerné pour calculer le taux de rendement interne sur la base d’une durée de vie économique de l’investissement de 40 ans.

D’autre part, conformément au paragraphe 31 de la communication PIIEC, le montant maximal de l’aide est déterminé en fonction du déficit de financement, qui correspond à la différence entre les flux de trésorerie positifs et les flux de trésorerie négatifs sur la durée de vie de l’investissement. Or, comme l’analyse du déficit de financement vise à déterminer dans quelle mesure le projet pourrait être financé aux conditions du marché, il ne saurait être reproché à la Commission d’avoir pris en compte, pour effectuer cette analyse, la durée dont un investisseur raisonnable dans ce projet aurait tenu compte, estimée à 40 ans.

Troisièmement, en ce qui concerne le caractère proportionné de l’aide, le Tribunal relève, tout d’abord, que les requérantes ne sauraient reprocher à la Commission d’avoir méconnu l’exigence de limitation dans le temps des aides sous forme de garantie ou de prêt, telle qu’énoncée dans la communication PIIEC, dès lors que la décision attaquée précise, d’une part, que, au plus tard seize ans après l’ouverture de la liaison fixe, tous les prêts bénéficiant d’une garantie devront avoir été clôturés et tous les prêts d’État devront avoir été remboursés et, d’autre part, que les autorités danoises ne sont pas autorisées à octroyer à Femern de tels prêts et garanties pour un montant qui excéderait le montant maximal garanti fixé à 69,3 milliards de DKK (environ 9,3 milliards d’euros).

Ensuite, la Commission n’a pas sous-estimé les recettes de Femern afin d’augmenter artificiellement le déficit de financement. D’une part, la communication PIIEC n’exige pas que les recettes couvrent l’intégralité des coûts du projet. D’autre part, les requérantes et les parties intervenantes n’ont pas apporté la preuve qu’une structure des prix pour le trafic routier différente de celle retenue par la Commission entraînerait automatiquement un accroissement des recettes en raison de l’élasticité de la demande et de la concurrence sur le marché.

Enfin, la Commission n’a pas méconnu la communication PIIEC en incluant des coûts d’exploitation de la liaison fixe dans les coûts admissibles pour le calcul du déficit de financement. En effet, l’inclusion de ces coûts dans les flux de trésorerie négatifs du projet de liaison fixe n’a pas pour effet l’octroi d’une aide au fonctionnement, dès lors que les recettes d’exploitation de cette liaison fixe, qui devraient également être prises en compte au titre des flux de trésorerie positifs, dépassent largement les coûts d’exploitation. De plus, aucun élément de nature à remettre en cause les explications de la Commission au soutien de l’inclusion de ces coûts dans l’analyse du déficit de financement n’a été apporté.

Compte tenu de l’ensemble de ces considérations, le Tribunal rejette le recours en annulation de la décision attaquée.


1      Décision C(2020) 1683 final de la Commission, du 20 mars 2020, concernant l’aide d’État SA.39078 - 2019/C (ex 2014/N) mise à exécution par le Danemark en faveur de Femern A/S (JO 2020, L 339, p. 1).


2      Communication de la Commission, du 20 juin 2014, sur les critères relatifs à l’analyse de la compatibilité avec le marché intérieur des aides d’État destinées à promouvoir la réalisation de projets importants d’intérêt européen commun (JO 2014, C 188, p. 4).


3      Décision C(2015) 5023 final, relative à l’aide d’État SA.39078 (2014/N) (Danemark), concernant le financement du projet de liaison fixe du détroit de Fehmarn (JO 2015, C 325, p. 5).


4      Arrêts du 13 décembre 2018, Scandlines Danmark et Scandlines Deutschland/Commission (T‑630/15, non publié, EU:T:2018:942) et du 13 décembre 2018, Stena Line Scandinavia/Commission (T‑631/15, non publié, EU:T:2018:944).


5      En vertu de cette disposition, les aides destinées à promouvoir la réalisation d’un projet important d’intérêt européen commun peuvent être considérées comme compatibles avec le marché intérieur.


6      Loi no 285, concernant la planification de la liaison fixe du détroit de Fehmarn et des liaisons avec l’arrière-pays danois, du 15 avril 2009.


7      Loi no 575, relative à la construction et à l’exploitation de la liaison fixe du détroit de Fehmarn et des liaisons vers l’arrière-pays danois, du 4 mai 2015.