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DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (huitième chambre)

26 février 2024 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure de nullité – Marque de l’Union européenne figurative MATE MATE – Cause de nullité absolue – Caractère descriptif – Article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement (UE) 2017/1001 – Recours manifestement dépourvu de tout fondement en droit »

Dans l’affaire T‑505/23,

Thomas Henry GmbH, établie à Berlin (Allemagne), représentée par Mes O. Spieker, D. Mienert, J. Si-Ha Selbmann et K. Uzman, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. D. Gája, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO ayant été

Shanghai Chengzhi Enterprise Service Center, établie à Shanghai (Chine),

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de MM. A. Kornezov, président, G. De Baere (rapporteur) et D. Petrlík, juges,

greffier : M. V. Di Bucci,

vu la phase écrite de la procédure,

rend la présente

Ordonnance

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Thomas Henry GmbH, demande l’annulation de la décision de la quatrième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 21 juin 2023 (affaire R 2364/2022‑4) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 5 juillet 2019, la requérante a obtenu auprès de l’EUIPO, à la suite d’une demande déposée le 14 février 2019, l’enregistrement, sous le numéro 18022875, de la marque de l’Union européenne figurative suivante (ci-après la « marque contestée ») :

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3        Les produits pour lesquels la marque contestée a été enregistrée relèvent, notamment, de la classe 32 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Bières ; eaux minérales [boissons] ; eaux gazeuses ; boissons aux fruits ; jus ; sirops pour la fabrication de boissons ; préparations pour faire des boissons ; boissons sans alcool ; boissons sans alcool, en particulier à base de maté ; cola [boissons sans alcool] ; boissons caféinées ; boissons énergétiques contenant de la caféine ; boissons énergisantes ; boissons énergétiques à usage non médical ; boissons fermentées non alcooliques ».

4        Le 13 septembre 2021, Shanghai Chengzhi Enterprise Service Center a présenté à l’EUIPO une demande en nullité de la marque contestée pour tous les produits visés au point 3 ci-dessus, sur le fondement de l’article 59, paragraphe 1, sous a), du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1), lu conjointement avec l’article 7, paragraphe 1, sous b), c) et g), et l’article 7, paragraphe 2, du même règlement.

5        Par décision du 30 septembre 2022, la division d’annulation a accueilli la demande en nullité pour tous les produits visés au point 3 ci-dessus.

6        Le 29 novembre 2022, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’annulation.

7        Par la décision attaquée, la chambre de recours a rejeté le recours. Elle a considéré que, pour le public germanophone et hispanophone, la marque contestée était descriptive des produits relevant de la classe 32, visés au point 3 ci-dessus, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, lu conjointement avec l’article 7, paragraphe 2, du même règlement.

 Conclusions des parties

8        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

9        L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens si une audience de plaidoiries est organisée.

 En droit

10      Aux termes de l’article 126 du règlement de procédure du Tribunal, lorsqu’un recours est manifestement irrecevable ou manifestement dépourvu de tout fondement en droit, le Tribunal peut, sur proposition du juge rapporteur, à tout moment décider de statuer par voie d’ordonnance motivée, sans poursuivre la procédure.

11      En l’espèce, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier et décide, en application de cet article, de statuer sans poursuivre la procédure, et ce même si une partie a demandé la tenue d’une audience [ordonnance du 6 octobre 2015, GEA Group/OHMI (engineering for a better world), T‑545/14, EU:T:2015:789, point 13].

12      À l’appui de son recours, la requérante soulève, en substance, trois moyens tirés, le premier, du défaut de suspension de la procédure, le deuxième, de la violation de l’obligation de motivation et, le troisième, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001.

 Sur le premier moyen, tiré du défaut de suspension de la procédure

13      La requérante indique que, devant la chambre de recours, elle a fait valoir qu’une décision de l’EUIPO, relative à une autre marque dont elle est titulaire, concernait l’interprétation du terme « mate », faisait l’objet d’un recours devant le Tribunal et était susceptible d’être annulée. Le refus de la chambre de recours de suspendre la procédure constituerait un « abus d’autorité » et ne serait pas étayé.

14      Comme l’a indiqué la chambre de recours dans la décision attaquée, il y a lieu de considérer que la requérante fait référence à la procédure relative à la demande de marque de l’Union européenne verbale MATE MATE qui a fait l’objet de la décision de la première chambre de recours du 12 mai 2022 (affaire R 406/2021‑1). Le recours introduit par la requérante contre cette décision a été rejeté par le Tribunal dans son ordonnance du 31 mars 2023, Thomas Henry/EUIPO (MATE MATE) (T‑482/22, non publiée, EU:T:2023:185).

15      Dans la décision attaquée, la chambre de recours a relevé que la division d’annulation avait procédé à un examen du caractère descriptif de la marque contestée au regard des particularités de l’espèce et non sur le seul fondement de la décision de la première chambre de recours dans l’affaire R 406/2021‑1. Elle a ajouté que le Tribunal ayant confirmé cette décision dans son ordonnance du 31 mars 2023, MATE MATE (T‑482/22, non publiée, EU:T:2023:185), il n’y avait pas lieu de suspendre la procédure.

16      Il s’ensuit que, à la date d’adoption de la décision attaquée, le motif de suspension invoqué par la requérante n’était plus valable et que la chambre de recours a suffisamment justifié son refus de suspendre la procédure.

17      Partant, le premier moyen doit être rejeté comme étant manifestement non fondé.

18      Par ailleurs, il y a lieu de relever que, dans la requête, la requérante a demandé la suspension de la présente procédure pour le même motif.

19      Par décision du 17 octobre 2023, le président de la huitième chambre a rejeté cette demande de suspension. En effet, il suffit de constater que par ordonnance du 11 octobre 2023, Thomas Henry/EUIPO (C‑342/23 P, non publiée, EU:C:2023:761), la Cour n’a pas admis le pourvoi de la requérante contre l’ordonnance du 31 mars 2023, MATE MATE (T‑482/22, non publiée, EU:T:2023:185), et que, partant, la décision de la première chambre de recours dans l’affaire R 406/2021‑1 est devenue définitive.

 Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation

20      Aux termes de l’article 94, paragraphe 1, première phrase, du règlement 2017/1001, les décisions de l’EUIPO doivent être motivées. Cette obligation a la même portée que celle découlant de l’article 296, deuxième alinéa, TFUE, lequel exige que la motivation fasse apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’auteur de l’acte, sans qu’il soit nécessaire que cette motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait auxdites exigences devant cependant être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir arrêt du 28 juin 2018, EUIPO/Puma, C‑564/16 P, EU:C:2018:509, point 65 et jurisprudence citée).

21      En premier lieu, la requérante fait valoir que la chambre de recours n’a pas clairement indiqué si, pour apprécier le caractère descriptif de la marque contestée, elle s’était placée à la date pertinente, à savoir celle du dépôt de la demande d’enregistrement de cette marque, ni si son interprétation du mot « mate » concernait cette date ou une date ultérieure. La chambre de recours n’aurait donc pas démontré que la marque contestée était descriptive à la date pertinente.

22      Il suffit de constater que cet argument est manifestement non fondé. En effet, dans la décision attaquée, la chambre de recours a indiqué que la date pertinente aux fins de l’appréciation du caractère descriptif de la marque contestée était la date du dépôt de la demande d’enregistrement de celle-ci, à savoir le 14 février 2019. Elle a également conclu que la marque contestée était descriptive à la date du dépôt de sa demande d’enregistrement. Or, la requérante ne soulève aucun élément permettant de supposer que la chambre de recours se serait placée à une autre date pour apprécier le caractère descriptif de la marque contestée.

23      En toute hypothèse, cet argument est également inopérant dans la mesure où la requérante ne prétend pas que la signification du mot « mate » aurait évolué dans le temps et que l’appréciation du caractère descriptif de la marque contestée serait différente selon la date prise en compte.

24      En deuxième lieu, la requérante rappelle que, concernant l’examen d’un motif absolu de refus, une motivation globale n’est possible que pour les produits formant une catégorie suffisamment homogène. Elle fait valoir que la chambre de recours n’a pas expliqué pour quel motif les produits en cause formaient un groupe homogène, alors que la description de certains de ces produits n’indique pas qu’ils contiennent du yerba maté, mais d’autres ingrédients, tels que de la caféine. L’homogénéité du groupe de produits en cause qui ne contiennent pas du yerba maté serait insuffisamment motivée.

25      Dans la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que, en ce qui concerne les « boissons sans alcool, en particulier à base de maté », compte tenu de la référence explicite au maté, la marque contestée était clairement descriptive. Elle a relevé que, en raison de leur nature, tous les autres produits en cause, en tant que boissons ou préparations pour faire des boissons, pouvaient également contenir du maté en tant qu’ingrédient. Elle a indiqué que, le maté ayant une teneur élevée en caféine, il convenait comme boisson énergétique ou comme base caféinée pour certains des produits en cause. Elle a également noté que le maté était un arôme populaire pour diverses boissons et que, par exemple, le maté était mélangé à de la bière artisanale alcoolique ou non alcoolique, ce qui était populaire et demandé pour ses effets euphoriques, antioxydants et revigorants.

26      Il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, d’une part, l’examen des motifs absolus de refus doit porter sur chacun des produits ou des services pour lesquels l’enregistrement de la marque est demandé et, d’autre part, que la décision par laquelle l’autorité compétente refuse l’enregistrement d’une marque doit, en principe, être motivée pour chacun desdits produits ou desdits services. Toutefois, s’agissant de cette dernière exigence, l’autorité compétente peut se limiter à une motivation globale pour tous les produits ou services concernés lorsque le même motif de refus est opposé pour une catégorie ou un groupe de produits ou de services. Une telle faculté ne s’étend qu’à des produits et à des services présentant entre eux un lien suffisamment direct et concret, au point qu’ils forment une catégorie ou un groupe de produits ou de services d’une homogénéité suffisante (voir arrêt du 17 mai 2017, EUIPO/Deluxe Entertainment Services Group, C‑437/15 P, EU:C:2017:380, points 29 à 31 et jurisprudence citée).

27      En outre, la répartition des produits et des services en cause en un ou en plusieurs groupes ou catégories doit être effectuée notamment sur la base des caractéristiques qui leur sont communes et qui présentent une pertinence pour l’analyse de l’opposabilité, ou non, à la marque demandée pour lesdits produits et services, d’un motif absolu de refus déterminé (arrêt du 17 mai 2017, EUIPO/Deluxe Entertainment Services Group, C‑437/15 P, EU:C:2017:380, point 33).

28      Or, le raisonnement de la chambre de recours est suffisant pour comprendre que les produits en cause, à l’exception de ceux dont la description indique expressément qu’ils contiennent du maté, constituent un groupe homogène défini en fonction de caractéristiques communes ayant une pertinence pour l’analyse du caractère descriptif de la marque contestée, à savoir qu’il s’agit de boissons ou de préparations pour faire des boissons qui sont susceptibles de contenir du maté comme ingrédient.

29      En outre, contrairement à ce que semble soutenir la requérante, la détermination d’une catégorie homogène de produits ne doit pas être effectuée uniquement au regard de la description des produits pour lesquels la marque contestée a été enregistrée. Ainsi, pour la détermination de caractéristiques communes des produits en cause, le fait que la description de certains de ces produits ne précise pas qu’ils contiennent du maté n’est pas pertinent.

30      Partant, le deuxième moyen doit être rejeté comme étant manifestement non fondé.

 Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001

31      La requérante soutient que la chambre de recours a conclu à tort que la marque contestée était descriptive des produits en cause, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001.

32      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, sont refusées à l’enregistrement les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci. En vertu de l’article 7, paragraphe 2, du même règlement, l’article 7, paragraphe 1, est applicable même si les motifs de refus n’existent que dans une partie de l’Union.

33      Pour qu’un signe tombe sous le coup de l’interdiction énoncée à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, il faut qu’il présente avec les produits ou les services en cause un rapport suffisamment direct et concret de nature à permettre au public pertinent de percevoir immédiatement, et sans autre réflexion, une description des produits et des services en cause ou d’une de leurs caractéristiques [voir arrêts du 12 janvier 2005, Deutsche Post EURO EXPRESS/OHMI (EUROPREMIUM), T‑334/03, EU:T:2005:4, point 25 et jurisprudence citée, et du 22 juin 2005, Metso Paper Automation/OHMI (PAPERLAB), T‑19/04, EU:T:2005:247, point 25 et jurisprudence citée].

34      L’appréciation du caractère descriptif d’un signe ne peut être opérée que, d’une part, par rapport aux produits ou aux services concernés et, d’autre part, par rapport à la compréhension qu’en a le public pertinent [voir arrêt du 25 octobre 2005, Peek & Cloppenburg/OHMI (Cloppenburg), T‑379/03, EU:T:2005:373, point 37 et jurisprudence citée].

35      Dans la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que le public pertinent était composé du grand public germanophone et hispanophone, étant donné que l’élément verbal répété « mate » avait une signification pour ce public. La requérante ne conteste pas cette appréciation.

36      Dans la décision attaquée, la chambre de recours a relevé que la marque contestée se composait des éléments verbaux « mate » et « mate », placés sur deux lignes et stylisés en caractères noirs gras, encadrés par une étiquette stylisée comportant deux petites étoiles, l’une au-dessus et l’autre au-dessous des éléments verbaux. Elle a indiqué que le mot « mate » était un terme allemand et espagnol et que, selon un dictionnaire allemand, il désignait, notamment, « un thé préparé à partir des feuilles caféinées torréfiées de la plante yerba maté » et, selon un dictionnaire espagnol, « une infusion de yerba maté généralement consommée seule et parfois accompagnée d’herbes médicinales ou aromatiques ». Elle a considéré que ces significations du mot « mate » étaient ordinaires et dépourvues d’ambiguïté.

37      Elle a relevé que la requérante ne remettait pas en cause ces significations et a conclu que le mot « mate » serait compris par le public germanophone ou hispanophone comme faisant référence au maté, à savoir une sorte de thé ou d’infusion préparés à base de yerba maté ou un ingrédient servant à la préparation de certaines boissons.

38      La chambre de recours a considéré que, compte tenu de la signification claire de l’élément verbal répété « mate », la marque contestée, en ce qui concernait les produits en cause, qui étaient tous des bières, des boissons non alcoolisées et des boissons énergétiques, était comprise comme faisant référence au fait que ces produits étaient soit de la yerba maté (une sorte de thé ou d’infusion préparé avec de la yerba maté), soit à base de yerba maté (la yerba maté étant utilisée comme ingrédient dans la préparation de toutes ces boissons et boissons énergétiques).

39      La chambre de recours a conclu que la marque contestée était descriptive au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001 pour tous les produits en cause, en ce qu’elle désignait une de leurs caractéristiques, à savoir qu’ils étaient du maté ou en contenaient comme ingrédient. Elle a relevé que ce message clair, direct et explicite décrivait l’espèce des produits en cause. Elle a ajouté que la combinaison de l’élément verbal répété « mate » et de la stylisation du signe ne créait pas une impression suffisamment éloignée de celle que produiraient les éléments verbaux pris séparément.

40      Les arguments de la requérante ne sont manifestement pas susceptibles de remettre en cause l’appréciation de la chambre de recours.

41      Premièrement, la requérante fait valoir que la chambre de recours n’a pas tenu compte des nuances syntaxiques et sémantiques créées par le signe MATE MATE. Le mot « mate » aurait plusieurs significations dans différentes langues, notamment en anglais, et sa répétition créerait un signe original et identifiable.

42      À cet égard, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, un signe verbal doit se voir opposer un refus d’enregistrement, en application de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, si, en au moins une de ses significations potentielles, il désigne une caractéristique des produits ou des services concernés (voir ordonnance du 31 mars 2023, MATE MATE, T‑482/22, non publiée, EU:T:2023:185, point 21 et jurisprudence citée).

43      Ainsi que le Tribunal l’a déjà jugé, dans la mesure où la requérante ne conteste pas que le mot « mate » peut désigner, en allemand et en espagnol, un ingrédient tiré de l’infusion de yerba maté entrant dans la composition d’une boisson, ses arguments visant à établir que ce mot pourrait avoir d’autres significations sont inopérants (ordonnance du 31 mars 2023, MATE MATE, T‑482/22, non publiée, EU:T:2023:185, point 22).

44      En outre, le Tribunal a relevé que le signe verbal MATE MATE ne comportait aucune structure grammaticale originale ou inhabituelle permettant de le percevoir autrement que comme la simple répétition du même mot ou de le comprendre comme ayant une signification propre ou comme constituant un jeu de mots. Dans la mesure où le public pertinent hispanophone ou germanophone comprend le mot « mate » en relation avec les produits et les services en cause comme signifiant « maté », le signe demandé sera perçu comme une simple répétition de ce mot (ordonnance du 31 mars 2023, MATE MATE, T‑482/22, non publiée, EU:T:2023:185, point 30).

45      Deuxièmement, la requérante soutient que la chambre de recours n’a pas suffisamment démontré que le mot « mate » serait compris comme signifiant que les produits en cause sont soit du yerba maté, soit en contiennent. La chambre de recours aurait ignoré son argument selon lequel les produits en cause, à l’exception des « boissons sans alcool, en particulier à base de maté », n’ont aucun lien avec la plante yerba maté ou toute autre plante servant à préparer du thé. Elle fait valoir que le signe MATE MATE ne décrit pas clairement et directement l’espèce, à savoir la nature même des produits en cause, ou leur qualité, dans le sens de qualité supérieure. Le fait que ce signe permettrait tout au plus de décrire les caractéristiques essentielles des produits en cause de manière vague et abstraite ne serait pas suffisant pour lui conférer un caractère descriptif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001.

46      Il suffit de constater que le Tribunal a déjà jugé que le signe verbal MATE MATE sera immédiatement compris par le public pertinent comme faisant référence au maté, à savoir une sorte de thé ou d’infusion préparés à base de yerba maté ou un ingrédient servant à la préparation de certaines boissons (ordonnance du 31 mars 2023, MATE MATE, T‑482/22, non publiée, EU:T:2023:185, point 46).

47      Or, la requérante ne conteste pas que le maté est un ingrédient susceptible d’entrer dans la composition de certaines boissons.

48      À cet égard, comme le relève l’EUIPO, l’argument de la requérante selon lequel certains produits contiendraient de la caféine et non du maté doit être rejeté dans la mesure où il est notoire que le yerba maté contient de la caféine.

49      Dès lors, la chambre de recours a constaté à juste titre que, par rapport aux produits en cause, l’élément verbal « mate mate » contenait un message clair et explicite, à savoir qu’il s’agissait de boissons ou de préparations pour faire des boissons qui avaient pour ingrédient du maté.

50      Contrairement à ce que soutient la requérante, il n’est pas nécessaire pour qu’un signe soit considéré comme descriptif, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, qu’il désigne la nature même ou la qualité des produits en cause. Il suffit que le public pertinent le perçoive immédiatement et sans autre réflexion comme décrivant une des caractéristiques des produits (ordonnance du 31 mars 2023, MATE MATE, T‑482/22, non publiée, EU:T:2023:185, point 47), à savoir, en l’espèce, qu’il s’agit de boissons contenant ou susceptibles de contenir du maté.

51      De plus, pour autant que la requérante reproche à la chambre de recours d’avoir ignoré que la description des produits relevant de la classe 32 pour lesquels la marque contestée a été enregistrée, à l’exception des « boissons sans alcool, en particulier à base de maté », ne spécifie pas qu’ils contiennent du maté et que la marque contestée ne saurait donc être descriptive d’une caractéristique de ces produits, il y a lieu de relever que la marque contestée a été enregistrée pour des catégories de boissons ou des préparations pour faire des boissons, définies de manière large et pouvant englober des boissons contenant du maté.

52      À cet égard, il suffit de rappeler que, selon la jurisprudence, la reconnaissance du caractère descriptif d’une marque s’applique non seulement aux produits pour lesquels elle est directement descriptive, mais également à la catégorie plus large à laquelle appartiennent ces produits en l’absence de limitation adéquate opérée par le demandeur de marque [voir arrêt du 21 novembre 2018, PepsiCo/EUIPO – Intersnack Group (Exxtra Deep), T‑82/17, EU:T:2018:814, point 43 et jurisprudence citée]. Par ailleurs, le fait qu’un signe soit descriptif pour une partie seulement des produits ou des services relevant d’une catégorie mentionnée en tant que telle dans la demande d’enregistrement n’empêche pas que ce signe soit refusé à l’enregistrement. En effet, si, dans un tel cas, le signe en question était enregistré en tant que marque de l’Union européenne pour la catégorie visée, rien n’empêcherait son titulaire de l’utiliser également pour les produits ou les services de cette catégorie pour lesquels il est descriptif [voir arrêt du 22 juin 2017, Biogena Naturprodukte/EUIPO (ZUM wohl), T‑236/16, EU:T:2017:416, point 58 et jurisprudence citée].

53      Troisièmement, la requérante fait valoir que la chambre de recours n’a pas suffisamment pris en compte les éléments graphiques de la marque contestée. Elle considère que la conception graphique de la marque contestée serait suffisamment originale pour ne pas être simplement ornementale. Elle indique que les éléments verbaux sont placés sur deux lignes et dans une police de caractères particulière, que la forme du signe représente une étoile et évoque un insigne militaire, que, grâce à sa symétrie axiale, horizontale et verticale, le signe donnerait une impression structurée et qu’il en ressort une illusion d’un signe en trois dimensions.

54      Dans la décision attaquée, la chambre de recours a relevé que la stylisation des éléments verbaux « mate mate » était minimale et simple, que la forme de l’étiquette qui les encadrait était purement décorative et courante et que les étoiles situées au-dessus et au-dessous des éléments verbaux étaient ornementales. Elle a considéré que la combinaison de l’élément verbal répété « mate » et de la stylisation du signe ne créait pas une impression qui rendait la combinaison suffisamment éloignée de celle que produiraient les éléments verbaux pris séparément. Elle a conclu que le public pertinent reconnaîtrait immédiatement et sans effort intellectuel dans la marque contestée une référence à la plante de maté et donc une caractéristique de la bière, des boissons sans alcool et des boissons énergétiques.

55      S’agissant des marques composées de plusieurs éléments verbaux et figuratifs, il y a lieu de rappeler que, afin d’apprécier le caractère descriptif d’une marque complexe, il faut non seulement examiner les différents éléments dont la marque est composée, mais aussi la marque dans son ensemble, de sorte que ladite appréciation doit se fonder sur la perception globale de cette marque par le public pertinent [voir arrêt du 5 novembre 2019, APEDA/EUIPO – Burraq Travel & Tours General Tourism Office (SIR BASMATI RICE), T‑361/18, non publié, EU:T:2019:777, point 36 et jurisprudence citée ; voir également, en ce sens, arrêt du 8 mai 2008, Eurohypo/OHMI, C‑304/06 P, EU:C:2008:261, points 41 et 42].

56      Or, il ressort de la décision attaquée que, contrairement à ce que soutient la requérante, la chambre de recours a tenu compte de la représentation graphique de la marque contestée dans son appréciation du caractère descriptif de celle-ci.

57      En outre, la requérante se contente de faire valoir que les éléments graphiques de la marque contestée sont originaux et contribuent au caractère distinctif de la marque contestée. En revanche, elle ne soulève aucun argument permettant d’établir que les éléments graphiques sont de nature à faire naître une incertitude quant à la signification de l’élément verbal « mate mate » ou à détourner la perception du public pertinent de son message descriptif des produits en cause.

58      Quatrièmement, la requérante reproche, en substance, à la chambre de recours de ne pas avoir tenu compte d’une autre marque de l’Union européenne enregistrée, qui indiquerait la capacité de la marque contestée à être enregistrée.

59      À cet égard, la chambre de recours a relevé que la requérante avait fait référence à la marque de l’Union européenne figurative MATE MATE Authentic Flavour, enregistrée en 2017, en indiquant, d’une part, que le fait que cette marque ait été enregistrée n’empêchait pas sa nullité ultérieure et, d’autre part, qu’elle contenait des éléments figuratifs qui n’étaient pas présents dans la marque contestée. Elle a également rappelé que, en tout état de cause, selon la jurisprudence, la légalité des décisions des chambres de recours doit être appréciée uniquement sur le fondement du règlement 2017/1001, tel qu’interprété par le juge de l’Union, et non sur le fondement d’une pratique décisionnelle antérieure et qu’elle n’était pas liée par les décisions des instances inférieures de l’EUIPO.

60      Il suffit de constater que la requérante ne soulève aucun argument de nature à remettre en cause cette appréciation de la chambre de recours et qu’elle n’explique pas de quelle manière cette autre marque serait pertinente pour apprécier le caractère descriptif de la marque contestée.

61      Partant, le troisième moyen doit être rejeté comme étant manifestement non fondé.

62      Il ressort de l’ensemble de ce qui précède que le recours doit être rejeté comme étant manifestement dépourvu de tout fondement en droit.

 Sur les dépens

63      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

64      Bien que la requérante ait succombé, l’EUIPO n’a conclu à la condamnation de celle-ci aux dépens qu’en cas d’organisation d’une audience. En l’absence d’organisation d’une audience, il convient de décider que chaque partie supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

ordonne :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Chaque partie supportera ses propres dépens.

Fait à Luxembourg, le 26 février 2024.

Le greffier

 

Le président

V. Di Bucci

 

A. Kornezov


*      Langue de procédure : l’anglais.