Language of document : ECLI:EU:T:2012:74

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

14 février 2012 (*)

« Recours en annulation – Règlement (CE) n° 530/2008 – Reconstitution des stocks de thon rouge – Fixation des TAC pour 2008 – Acte de portée générale – Défaut d’affectation individuelle – Irrecevabilité »

Dans l’affaire T‑366/08,

Federazione Nazionale delle Cooperative della Pesca (Federcoopesca), établie à Rome (Italie), et les huit autres requérants dont les noms figurent en annexe, représentés par Mes P. Cavasola, V. Cannizzaro et G. Micucci, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par Mme K. Banks et M. D. Nardi, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation du règlement (CE) n° 530/2008 de la Commission, du 12 juin 2008, établissant des mesures d’urgence en ce qui concerne les senneurs à senne coulissante pêchant le thon rouge dans l’océan Atlantique, à l’est de la longitude 45° O, et dans la Méditerranée (JO L 155, p. 9),

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de MM. S. Papasavvas, président, V. Vadapalas (rapporteur) et K. O’Higgins, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Faits à l’origine du litige

1        Les requérants, M. Salvatore Aniello Pappalardo, Pescatori La Tonnara Soc. coop., Fedemar Srl, I Ciclopi di Tudisco Matteo & C. Snc, Testa Giuseppe & C. Snc, Pescatori San Pietro Apostolo Srl, Camplone Arnaldo & C. Snc di Camplone Arnaldo & C., Valentino Pesca Snc di Ciaccio Luciano e Camplone Arnaldo & C. et la Federazione Nazionale delle Cooperative della Pesca (Federcoopesca), à l’exception du dernier d’entre eux, qui est une association professionnelle regroupant des associations d’opérateurs dans le secteur de la pêche, sont propriétaires de navires faisant partie de la flotte de pêche italienne autorisés à pratiquer la pêche du thon rouge à la senne coulissante. Des quotas leur ont été alloués pour l’année 2008, lesquels sont variables en fonction des quotas attribués à la République italienne.

2        En application de l’article 7 du règlement (CE) n° 2371/2002 du Conseil, du 20 décembre 2002, relatif à la conservation et à l’exploitation durable des ressources halieutiques dans le cadre de la politique commune de la pêche (JO L 358, p. 59), la Commission des Communautés européennes a, le 12 juin 2008, adopté le règlement (CE) n° 530/2008, établissant des mesures d’urgence en ce qui concerne les senneurs à senne coulissante pêchant le thon rouge dans l’océan Atlantique, à l’est de la longitude 45° O, et dans la Méditerranée (JO L 155, p. 9) (ci-après le « règlement attaqué »).

3        L’article 1er du règlement attaqué énonce :

« La pêche du thon rouge dans l’océan Atlantique, à l’est de la longitude 45° O, et dans la Méditerranée, par des senneurs à senne coulissante battant pavillon de la Grèce, de la France, de l’Italie, de Chypre et de Malte, ou enregistrés dans ces États membres, est interdite à compter du 16 juin 2008.

Il est également interdit de conserver à bord, de mettre en cage aux fins de l’engraissement ou de l’élevage, de transborder, de transférer ou de débarquer des poissons de ce stock capturés par ces navires à compter [de] cette date. »

4        L’article 3 du règlement attaqué se lit comme suit :

« 1. Sans préjudice des dispositions du paragraphe 2, à compter du 16 juin 2008, les opérateurs communautaires refusent les débarquements, les mises en cage à des fins d’engraissement ou d’élevage ainsi que les transbordements dans les eaux ou dans les ports communautaires de thon rouge capturé par des senneurs à senne coulissante dans l’océan Atlantique, à l’est de la longitude 45° O, et dans la Méditerranée.

[…] »

 Procédure et conclusions des parties

5        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 2 septembre 2008, les requérants ont introduit le présent recours.

6        Par acte séparé, déposé au greffe du Tribunal le 4 décembre 2008, la Commission a soulevé une exception d’irrecevabilité en vertu de l’article 114, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal.

7        Les requérants ont présenté leurs observations sur l’exception d’irrecevabilité le 19 janvier 2009.

8        Par ordonnance du 25 mars 2010, le président de la sixième chambre du Tribunal, les parties entendues, a ordonné la suspension de la procédure dans la présente affaire jusqu’au prononcé de la décision de la Cour mettant fin à l’instance dans l’affaire C‑221/09, AJD Tuna, et de la décision du Tribunal statuant sur la recevabilité dans les affaires T‑532/08, Norilsk Nickel Harjavalta et Umicore/Commission, et T‑539/08, Etimine et Etiproducts/Commission.

9        La composition des chambres du Tribunal ayant été modifiée, le juge rapporteur a été affecté à la cinquième chambre, à laquelle la présente affaire a, par conséquent, été attribuée.

10      Les décisions, dans l’attente desquelles la procédure dans la présente affaire a été suspendue, étant intervenues par ordonnances du Tribunal du 7 septembre 2010, Norilsk Nickel Harjavalta et Umicore/Commission (T‑532/08, non encore publiée au Recueil) et Etimine et Etiproducts/Commission (T‑539/08, non encore publiée au Recueil), et par arrêt de la Cour du 17 mars 2011, AJD Tuna (C‑221/09, non encore publié au Recueil), les parties ont été invitées à se prononcer sur les conséquences qu’elles tiraient de ces décisions pour la présente affaire. La Commission a soumis ses observations le 5 mai 2011.

11      Les requérants concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler le règlement attaqué ;

–        condamner la Commission aux dépens.

12      Dans l’exception d’irrecevabilité, la Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme irrecevable ;

–        condamner les requérants aux dépens.

13      Dans leurs observations sur l’exception d’irrecevabilité, les requérants concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter l’exception d’irrecevabilité ou, à titre subsidiaire, la joindre au fond ;

–        condamner la Commission aux dépens, y compris ceux afférents à l’exception d’irrecevabilité.

 En droit

14      En vertu de l’article 114, paragraphe 1, du règlement de procédure, si une partie le demande, le Tribunal peut statuer sur l’exception d’irrecevabilité sans engager le débat au fond. Conformément au paragraphe 3 du même article, la suite de la procédure est orale, sauf décision contraire du Tribunal. En l’espèce, le Tribunal estime qu’il est suffisamment éclairé par les pièces du dossier et qu’il n’y a pas lieu d’ouvrir la procédure orale.

15      La Commission considère que le recours est irrecevable au motif que les requérants ne sont pas individuellement concernés au sens de l’article 230, quatrième alinéa, CE, par le règlement attaqué. Les requérants, quant à eux, font valoir, tant dans la requête introductive d’instance que dans leurs observations sur l’exception d’irrecevabilité, qu’ils sont directement et individuellement concernés par le règlement attaqué.

16      À titre liminaire, s’agissant de la question de savoir s’il convient d’examiner la recevabilité du présent recours au regard de l’article 230 CE ou au regard de l’article 263 TFUE, il convient de rappeler que la question de la recevabilité d’un recours doit être tranchée sur la base des règles en vigueur à la date à laquelle il a été introduit et que les conditions de recevabilité d’un recours s’apprécient au moment de l’introduction du recours, à savoir au moment du dépôt de la requête. Dès lors, la recevabilité d’un recours introduit avant la date d’entrée en vigueur du traité FUE, le 1er décembre 2009, doit être appréciée sur le fondement de l’article 230 CE (voir ordonnances Norilsk Nickel Harjavalta et Umicore/Commission, précitée, points 70 et 72, et Etimine et Etiproducts/Commission, précitée, point 76, et la jurisprudence citée, et ordonnance du Tribunal du 15 décembre 2010, Albertini e.a./Parlement, T‑219/09 et T‑326/09, non encore publiée au Recueil, point 39).

17      En l’espèce, le recours ayant été introduit le 2 septembre 2008, il convient donc d’examiner sa recevabilité sur le fondement de l’article 230 CE.

18      Conformément à l’article 230, quatrième alinéa, CE, toute personne physique ou morale peut former, dans les mêmes conditions, un recours contre les décisions dont elle est le destinataire et contre les décisions qui, bien que prises sous l’apparence d’un règlement ou d’une décision adressée à une autre personne, la concernent directement et individuellement.

19      Selon une jurisprudence constante, cette disposition confère aux particuliers le droit d’attaquer, notamment, toute décision qui, bien qu’elle soit prise sous l’apparence d’un règlement, les concerne directement et individuellement. L’objectif de cette disposition est, notamment, d’éviter que, par le simple choix de la forme d’un règlement, les institutions de l’Union européenne puissent exclure le recours d’un particulier contre une décision qui le concerne directement et individuellement et de préciser ainsi que le choix de la forme ne peut changer la nature d’un acte (arrêt de la Cour du 17 juin 1980, Calpak et Società Emiliana Lavorazione Frutta/Commission, 789/79 et 790/79, Rec. p. 1949, point 7 ; ordonnances du Tribunal du 8 juillet 1999, Area Cova e.a./Conseil et Commission, T‑12/96, Rec. p. II‑2301, point 24 ; du 8 septembre 2005, Lorte e.a./Conseil, T‑287/04, Rec. p. II‑3125, point 36, et du 12 janvier 2007, SPM/Commission, T‑447/05, Rec. p. II‑1, point 61).

20      Le critère de distinction entre un règlement et une décision doit être recherché dans la portée générale ou non de l’acte en question (ordonnance de la Cour du 12 juillet 1993, Gibraltar et Gibraltar Development/Conseil, C‑168/93, Rec. p. I‑4009, point 11 ; voir ordonnance du Tribunal du 11 septembre 2007, Honig-Verband/Commission, T‑35/06, Rec. p. II‑2865, point 39, et la jurisprudence citée). Un acte a une portée générale s’il s’applique à des situations déterminées objectivement et s’il produit des effets juridiques à l’égard de catégories de personnes envisagées de manière générale et abstraite (arrêts du Tribunal du 11 septembre 2002, Pfizer Animal Health/Conseil, T‑13/99, Rec. p. II‑3305, point 82, et Alpharma/Conseil, T‑70/99, Rec. p. II‑3495, point 74 ; voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 6 octobre 1982, Alusuisse Italia/Conseil et Commission, 307/81, Rec. p. 3463, point 9).

21      Toutefois, il n’est pas exclu que, dans certaines circonstances, les dispositions d’un acte normatif s’appliquant à la généralité des opérateurs économiques intéressés puissent concerner individuellement certains d’entre eux (arrêt de la Cour du 25 juillet 2002, Unión de Pequeños Agricultores/Conseil, C‑50/00 P, Rec. p. I‑6677, point 36 ; voir également, en ce sens, arrêts de la Cour du 16 mai 1991, Extramet Industrie/Conseil, C‑358/89, Rec. p. I‑2501, point 13, et du 18 mai 1994, Codorníu/Conseil, C‑309/89, Rec. p. I‑1853, point 19). Dans une telle hypothèse, un acte de l’Union pourrait alors à la fois revêtir un caractère normatif et, à l’égard de certains opérateurs économiques intéressés, un caractère décisionnel (arrêts du Tribunal du 13 novembre 1995, Exporteurs in Levende Varkens e.a./Commission, T‑481/93 et T‑484/93, Rec. p. II‑2941, point 50 ; du 12 juillet 2001, Comafrica et Dole Fresh Fruit Europe/Commission, T‑198/95, T‑171/96, T‑230/97, T‑174/98 et T‑225/99, Rec. p. II‑1975, point 101 ; du 3 février 2005, Comafrica et Dole Fresh Fruit Europe/Commission, T‑139/01, Rec. p. II‑409, point 107, et ordonnance SPM/Commission, précitée, point 66).

22      Selon une jurisprudence constante, une personne physique ou morale autre que le destinataire d’un acte ne saurait prétendre être concernée individuellement, au sens de l’article 230, quatrième alinéa, CE, que si elle est atteinte, par l’acte en cause, en raison de certaines qualités qui lui sont particulières ou d’une situation de fait qui la caractérise par rapport à toute autre personne et, de ce fait, l’individualise d’une manière analogue à celle dont le destinataire le serait (arrêts de la Cour du 15 juillet 1963, Plaumann/Commission, 25/62, Rec. p. 197, 223 ; Codorníu/Conseil, précité, point 20, et Unión de Pequeños Agricultores/Conseil, précité, point 36). À défaut de remplir cette condition, aucune personne physique ou morale n’est, en tout état de cause, recevable à introduire un recours en annulation contre un règlement (arrêt Unión de Pequeños Agricultores/Conseil, précité, point 37, et ordonnance SPM/Commission, précitée, point 67).

23      En outre, s’agissant de la question de savoir si les requérants sont individuellement concernés, il y a lieu de rappeler qu’il est de jurisprudence constante que la possibilité de déterminer, avec plus ou moins de précision, le nombre ou même l’identité des sujets de droit auxquels s’applique une mesure n’implique nullement que ces sujets doivent être considérés comme étant concernés individuellement par cette mesure, tant qu’il est constant que cette application s’effectue en vertu d’une situation objective de droit ou de fait définie par l’acte en cause (ordonnance de la Cour du 24 mai 1993, Arnaud e.a./Conseil, C‑131/92, Rec. p. I‑2573, point 13, et arrêt de la Cour du 23 avril 2009, Sahlstedte.a./Commission, C‑362/06 P, Rec. p. I‑2903, point 31).

24      Le présent recours ayant pour objet l’annulation d’un règlement de la Commission, il convient de déterminer si le règlement attaqué revêt une portée générale et si les requérants sont concernés individuellement par celui-ci.

25      À cet égard, les requérants soutiennent, en substance, qu’ils sont concernés en raison de certaines qualités qui leur sont particulières ou d’une situation de fait qui les caractérise par rapport à toute autre personne. Selon eux, le règlement attaqué porte atteinte à leur situation juridique non pas en raison de circonstances objectives, mais précisément en raison de leurs qualités personnelles. Le règlement attaqué ne s’adresserait pas à un ensemble indifférencié de destinataires, mais aux seuls opérateurs pratiquant la pêche du thon rouge à la senne coulissante. Or, cette activité ne serait pas ouverte à n’importe quel opérateur concerné, mais serait formellement réservée, par le biais de mesures d’autorisation, à des sujets bien déterminés. Ils ajoutent que la Commission était informée, au moment où elle a adopté le règlement attaqué, que celui-ci allait affecter un cercle fermé de sujets, en révoquant ou en suspendant, seulement à leur égard, l’exercice d’une activité économique qui leur était réservée. Le règlement attaqué ne serait donc pas un acte ayant une portée générale, mais devrait être considéré comme une série de décisions individuelles s’adressant à chacun des opérateurs autorisés à exercer la pêche du thon rouge dans les zones et pendant les périodes indiquées.

26      Les requérants prétendent également, en substance, qu’ils sont individuellement concernés par le règlement attaqué dès lors qu’ils sont titulaires d’un permis de pêche spécial et qu’un quota de pêche individuel leur a été attribué.

27      S’agissant de la portée du règlement attaqué, il convient de relever que ledit règlement n’a pas été arrêté au vu de la situation particulière des propriétaires de navires faisant partie de la flotte de pêche italienne autorisés à pratiquer la pêche du thon rouge à la senne coulissante, et auxquels ont été attribués des quotas individuels. Il s’applique, au contraire, à des situations déterminées objectivement et comporte des effets juridiques à l’égard de catégories de personnes envisagées de manière générale et abstraite. Le règlement attaqué revêt dès lors un caractère général (ordonnance du Tribunal du 30 novembre 2009, Veromar di Tudisco Alfio & Salvatore e.a./Commission, T‑313/08 à T‑318/08 et T‑320/08 à T‑328/08, non publiée au Recueil, point 45).

28      Quant à la question de savoir si les requérants sont concernés individuellement par le règlement attaqué, il suffit de rappeler que le Tribunal a déjà jugé que des requérants, propriétaires de navires faisant partie de la flotte de pêche italienne et autorisés à pratiquer la pêche du thon rouge à la senne coulissante, auxquels ont été attribués des quotas individuels, et qui se trouvaient donc dans une situation identique à celle des requérants dans la présente affaire, n’étaient concernés par le règlement attaqué qu’en leur qualité objective de pêcheurs de thon rouge utilisant une certaine technique de pêche dans une zone déterminée, au même titre que tout autre opérateur économique se trouvant dans une situation identique (ordonnance Veromar di Tudisco Alfio & Salvatore e.a./Commission, précitée, point 48).

29      En l’espèce, le fait, même à le supposer établi, que les requérants fassent partie d’un cercle fermé ne suffit pas à démontrer que ces derniers seraient individuellement concernés par le règlement attaqué. À cet égard, il y a lieu de rappeler que la possibilité de déterminer, avec plus ou moins de précision, le nombre ou même l’identité des sujets de droit auxquels s’applique une mesure n’implique nullement que ces derniers doivent être considérés comme étant concernés individuellement par cette mesure, tant qu’il est constant que cette application s’effectue, comme en l’espèce, en vertu d’une situation objective de droit ou de fait définie par l’acte en cause (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 22 novembre 2001, Antillean Rice Mills/Conseil, C‑451/98, Rec. p. I‑8949, point 52 ; ordonnance de la Cour du 25 avril 2002, Galileo et Galileo International/Conseil, C‑96/01 P, Rec. p. I‑4025, point 38 ; arrêt Sahlstedt e.a./Commission, précité, point 31, et ordonnance du Tribunal du 7 juillet 2011, Acetificio Marcello de Nigris/Commission, T‑351/09, non encore publiée au Recueil, point 66).

30      Il s’ensuit que les requérants, qui, à l’exception de la Federcoopesca, sont dans une situation identique à celle des requérants dans les affaires ayant donné lieu à l’ordonnance Veromar di Tudisco Alfio & Salvatore e.a./Commission, précitée, en ce qu’elle est notamment régie par le même règlement attaqué, ne sont pas individuellement concernés par ledit règlement.

31      Cette conclusion ne saurait être infirmée par l’argument des requérants selon lequel, s’il ne leur était pas permis de soumettre à un juge la question de la légalité du règlement attaqué, cela serait contraire au droit à une protection juridictionnelle effective.

32      Certes, les particuliers doivent pouvoir bénéficier d’une protection juridictionnelle effective des droits qu’ils tirent de l’ordre juridique de l’Union (arrêts de la Cour Unión de Pequeños Agricultores/Conseil, précité, point 39, et du 1er avril 2004, Commission/Jégo-Quéré, C‑263/02 P, Rec. p. I‑3425, point 29). En effet, le droit à une telle protection constitue un principe général de droit qui découle des traditions constitutionnelles communes aux États membres et qui a, d’ailleurs, été consacré par les articles 6 et 13 de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950, puis réaffirmé par l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (JO 2007, C 303, p. 1), à laquelle l’article 6, paragraphe 1, TUE a reconnu une valeur identique à celle des traités (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 13 mars 2007, Unibet, C‑432/05, Rec. p. I‑2271, point 37). Toutefois, l’invocation du droit à une protection juridictionnelle effective ne saurait conduire à remettre en cause les conditions posées à l’article 230 CE, sauf à ce que le juge de l’Union outrepasse les compétences qui lui sont dévolues par les traités (voir, en ce sens, arrêts de la Cour Unión de Pequeños Agricultores/Conseil, précité, point 44, et du 10 septembre 2009, Commission/Ente per le Ville vesuviane et Ente per le Ville vesuviane/Commission, C‑445/07 P et C‑455/07 P, Rec. p. I‑7993, point 65, et voir, en ce sens, ordonnance Veromar di Tudisco Alfio & Salvatore e.a./Commission, précitée, point 49).

33      S’agissant de la Federcoopesca, il y a lieu de rejeter l’argument des requérants selon lequel elle est recevable à introduire un recours en annulation contre le règlement attaqué au motif qu’elle est compétente pour agir en vue de la protection des intérêts de ses adhérents.

34      En effet, il convient de rappeler que la recevabilité des recours en annulation formés par des associations a été admise dans trois types de situations, à savoir, premièrement, lorsqu’une disposition légale reconnaît expressément aux associations professionnelles une série de facultés à caractère procédural, deuxièmement, lorsque l’association représente les intérêts d’entreprises qui seraient elles-mêmes recevables à agir et, troisièmement, lorsque l’association est individualisée en raison de l’affectation de ses intérêts propres en tant qu’association, notamment parce que sa position de négociatrice a été affectée par l’acte dont l’annulation est demandée (ordonnances du Tribunal du 30 septembre 1997, Federolio/Commission, T‑122/96, Rec. p. II‑1559, point 61, du 8 décembre 1998, ANB e.a./Conseil, T‑38/98, Rec. p. II‑4191, point 25, et du 23 novembre 1999, Unión de Pequeños Agricultores/Conseil, T‑173/98, Rec. p. II‑3357, point 47).

35      Or, force est de constater que les requérants ne se prévalent ni de la première ni de la troisième des hypothèses évoquées ci-dessus. Quant à la deuxième hypothèse, il ressort des points qui précèdent que les requérants, qui sont membres de cette association, ne sont pas recevables à agir en ce qu’ils ne sont pas individuellement concernés par le règlement attaqué. Par conséquent, la Federcoopesca ne saurait être considérée comme étant elle-même recevable à former un recours en annulation contre le règlement attaqué.

36      Il s’ensuit que le recours doit être rejeté comme irrecevable, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les arguments des requérants relatifs à leur affectation directe.

 Sur les dépens

37      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Les requérants ayant succombé, il y a lieu de les condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

ordonne :

1)      Le recours est rejeté comme irrecevable.

2)      Federazione Nazionale delle Cooperative della Pesca (Federcoopesca) et les huit autres requérants dont les noms figurent en annexe supporteront leurs propres dépens ainsi que ceux exposés par la Commission européenne.

Fait à Luxembourg, le 14 février 2012.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       S. Papasavvas

Annexe

Salvatore Aniello Pappalardo, demeurant à Cetara (Italie),

Pescatori La Tonnara Soc. coop., établie à Cetara,

Fedemar Srl, établie à Cetara,

I Ciclopi di Tudisco Matteo & C. Snc, établie à Catane (Italie),

Testa Giuseppe & C. Snc, établie à Catane,

Pescatori San Pietro Apostolo Srl, établie à Cetara,

Camplone Arnaldo & C. Snc di Camplone Arnaldo & C., établie à Pescara (Italie),

Valentino Pesca Snc di Ciaccio Luciano e Camplone Arnaldo & C., établie à Pescara,


* Langue de procédure : l’italien.