Language of document : ECLI:EU:T:2015:737

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre)

30 septembre 2015 (*)

« Marque communautaire – Enregistrement international désignant la Communauté européenne – Marque verbale GREASECUTTER – Motifs absolus de refus – Caractère descriptif – Absence de caractère distinctif – Article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement (CE) n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑610/13,

Ecolab USA, Inc., établie à Wilmington, Delaware (États-Unis), représentée par Mes G. Hasselblatt et V. Töbelmann, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. L. Rampini, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l’OHMI du 5 septembre 2013 (affaire R 1704/2012-2), concernant l’enregistrement international désignant la Communauté européenne de la marque verbale GREASECUTTER,

LE TRIBUNAL (première chambre),

composé de M. H. Kanninen, président, Mme I. Pelikánová et M. E. Buttigieg (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 21 novembre 2013,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 11 avril 2014,

vu le mémoire en réplique déposé au greffe du Tribunal le 13 août 2014,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans un délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et ayant dès lors décidé, sur rapport du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal du 2 mai 1991, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 17 novembre 2011, Ecolab Deutschland GmbH a obtenu, auprès du bureau international de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI), l’enregistrement international désignant la Communauté européenne de la marque verbale GREASECUTTER (ci-après l’« enregistrement international » ou la « marque demandée »). Le 19 janvier 2012, cet enregistrement a été notifié à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI).

2        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 3 et 5 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié.

3        Le 2 février 2012, l’OHMI a notifié à Ecolab Deutschland un refus provisoire ex officio de protection de la marque en cause dans l’Union européenne, conformément à l’article 5 du protocole relatif à l’arrangement de Madrid concernant l’enregistrement international des marques, adopté à Madrid le 27 juin 1989 (JO 2003, L 296, p. 22), et à la règle 113 du règlement (CE) n° 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d’application du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil sur la marque communautaire (JO L 303, p. 1), tel que modifié, pour certains des produits couverts par l’enregistrement international désignant la Communauté européenne qui correspondent, pour chacune des classes visées, à la description suivante :

–        classe 3 : « Préparations pour blanchir et autres substances pour lessiver ; préparations pour nettoyer, polir, récurer et abraser ; savons ; huiles essentielles, cosmétiques, lotions pour les cheveux ; dentifrices » ;

–        classe 5 : « Produits pharmaceutiques et vétérinaires ; produits hygiéniques pour la médecine ; substances diététiques à usage médical, aliments pour bébés ; désinfectants ; produits pour détruire la vermine ; fongicides, herbicides ».

4        Les motifs invoqués au soutien de ce refus étaient l’absence de caractère distinctif et le caractère descriptif de la marque en cause pour les produits concernés, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1).

5        Le 28 février 2012, à la suite d’un transfert de l’enregistrement international, la requérante, Ecolab USA, Inc., a succédé à Ecolab Deutschland en qualité de titulaire de la marque demandée.

6        Par décision du 20 juillet 2012, après que la requérante eut répondu aux objections soulevées dans la notification de refus provisoire, l’examinateur a confirmé, pour les produits visés au point 3 ci-dessus et pour les mêmes motifs que ceux précédemment avancés, le refus partiel de protection de la marque en cause dans l’Union.

7        Le 12 septembre 2012, la requérante a formé un recours contre cette décision auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009.

8        Par décision du 5 septembre 2013 (ci-après la « décision attaquée »), la deuxième chambre de recours de l’OHMI a partiellement fait droit au recours en ce qui concerne les « dentifrices » relevant de la classe 3 et les « produits pour détruire la vermine ; herbicides » relevant de la classe 5. En revanche, elle a confirmé la décision de l’examinateur en ce qui concerne les autres produits visés au point 3 ci-dessus au motif que la marque demandée était descriptive de ces produits au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009. En particulier, elle a considéré que le public pertinent anglophone qui serait mis en présence du terme « greasecutter » de la marque demandée pour désigner ces produits, comprendrait de façon immédiate et certaine que ceux-ci servent à dissoudre ou à réduire la graisse animale. Elle a indiqué en outre que, étant donné que le signe pour lequel l’enregistrement a été demandé était descriptif des caractéristiques des produits qu’il désigne, il était, de ce fait, nécessairement dépourvu de caractère distinctif au regard de ces mêmes produits, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

 Conclusions des parties

9        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

10      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

11      À l’appui de son recours, la requérante invoque deux moyens, tirés, respectivement, le premier, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 et, le second, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du même règlement.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009

12      Par son premier moyen, la requérante conteste, en substance, le caractère descriptif de la marque demandée. Elle fait valoir que c’est à tort que la chambre de recours a considéré que le public pertinent comprendrait la marque demandée, considérée dans son ensemble, comme faisant référence à des produits dissolvant ou réduisant la graisse animale. En outre, elle soutient que, même si tel était le cas, certains des produits pour lesquels l’enregistrement a été refusé ne sont, en tout état de cause, pas des dégraissants ou des préparations pour récurer.

13      L’OHMI conteste les arguments de la requérante.

14      À cet égard, il convient de rappeler qu’aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, sont refusées à l’enregistrement « les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci ».

15      Selon la jurisprudence, cette disposition poursuit un but d’intérêt général, lequel exige que les signes ou les indications descriptives des caractéristiques de produits ou de services pour lesquels l’enregistrement a été demandé puissent être librement utilisés par l’ensemble des opérateurs économiques offrant de tels produits ou services (voir, en ce sens, arrêts du 23 octobre 2003, OHMI/Wrigley, C‑191/01 P, Rec, EU:C:2003:579, point 31, et du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, Rec, EU:C:2011:139, point 37).

16      Par l’emploi, dans ladite disposition, des termes « l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci », le législateur de l’Union a, d’une part, indiqué que ces termes devaient tous être considérés comme étant des caractéristiques de produits ou de services et, d’autre part, précisé que cette liste n’était pas exhaustive, toute autre caractéristique de produits ou de services pouvant également être prise en compte (arrêt Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, point 15 supra, EU:C:2011:139, point 49).

17      Le choix, par le législateur de l’Union, du terme « caractéristique » met en exergue le fait que les signes visés par ladite disposition ne sont que ceux qui servent à désigner une propriété, facilement reconnaissable par les milieux intéressés, des produits ou des services pour lesquels l’enregistrement est demandé. Ainsi, un signe ne saurait être refusé à l’enregistrement sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 que s’il est raisonnable d’envisager qu’il sera effectivement reconnu par les milieux intéressés comme une description de l’une desdites caractéristiques (voir arrêt Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, point 15 supra, EU:C:2011:139, point 50 et jurisprudence citée).

18      La jurisprudence a encore précisé que, aux fins de l’application de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, il convenait d’examiner, au regard de la signification pertinente du signe verbal en cause, s’il existait, du point de vue du public pertinent, un rapport suffisamment direct et concret entre ledit signe et les produits ou les services pour lesquels l’enregistrement était demandé, qui était de nature à permettre audit public de percevoir immédiatement, et sans autre réflexion, une description des produits et des services en cause ou d’une de leurs caractéristiques [voir, en ce sens, arrêts du 28 juin 2012, XXXLutz Marken/OHMI, C‑306/11 P, EU:C:2012:401, point 79, et du 7 juillet 2011, Cree/OHMI (TRUEWHITE), T‑208/10, EU:T:2011:340, point 14 et jurisprudence citée].

19      Dès lors, le caractère descriptif doit être apprécié, d’une part, par rapport aux produits et aux services pour lesquels l’enregistrement a été demandé et, d’autre part, par rapport à la perception qu’en a le public pertinent [voir arrêt du 12 juin 2007, MacLean-Fogg/OHMI (LOKTHREAD), T‑339/05, EU:T:2007:172, point 32 et jurisprudence citée].

20      En outre, il convient de rappeler que, pour qu’une marque constituée d’un néologisme ou d’un mot résultant d’une combinaison d’éléments soit considérée comme descriptive au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, il ne suffit pas qu’un éventuel caractère descriptif soit constaté pour chacun de ces éléments. Un tel caractère doit également être constaté pour le néologisme ou le mot lui-même. Cependant, une marque constituée d’un néologisme ou d’un mot composé d’éléments dont chacun est descriptif des caractéristiques des produits ou des services pour lesquels l’enregistrement est demandé est elle-même descriptive des caractéristiques de ces produits ou de ces services au sens de cette disposition, sauf s’il existe un écart perceptible entre le néologisme et la simple somme des éléments qui le composent. Cela suppose que, en raison du caractère inhabituel de la combinaison par rapport auxdits produits ou services, le néologisme crée une impression suffisamment éloignée de celle produite par la simple réunion des indications apportées par les éléments qui le composent, de sorte qu’il prime la somme desdits éléments. À cet égard, l’analyse du terme en cause au regard des règles lexicales et grammaticales appropriées est également pertinente (voir, en ce sens, arrêts du 25 février 2010, Lancôme/OHMI, C‑408/08 P, Rec, EU:C:2010:92, points 61 et 62 et jurisprudence citée, et TRUEWHITE, point 18 supra, EU:T:2011:340, point 16 et jurisprudence citée).

21      Il y a dès lors lieu d’apprécier si le signe verbal GREASECUTTER est, du point de vue du public pertinent, descriptif des produits pour lesquels l’enregistrement a été refusé.

22      En ce qui concerne le public pertinent, il convient de confirmer le constat de la chambre de recours dans la décision attaquée selon lequel celui-ci est, en l’espèce, eu égard aux produits concernés, composé tant de professionnels que de consommateurs moyens. La marque demandée étant composée de termes provenant de la langue anglaise, c’est également à bon droit que la chambre de recours a constaté que l’appréciation de son caractère descriptif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 doit donc s’effectuer au regard du public anglophone de l’Union. À cet égard, il suffit de rappeler que l’article 7, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009 énonce que le paragraphe 1 dudit article est applicable même si les motifs de refus n’existent que dans une partie de l’Union (voir, en ce sens, arrêts LOKTHREAD, point 19 supra, EU:T:2007:172, point 41 et jurisprudence citée, et TRUEWHITE, point 18 supra, EU:T:2011:340, point 18 et jurisprudence citée).

23      Il y a lieu ensuite, aux fins de l’application de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, d’examiner, sur la base d’une signification donnée du signe verbal en cause, s’il existe, du point de vue du public pertinent, un rapport suffisamment direct et concret entre le signe GREASECUTTER et les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé au sens de la jurisprudence rappelée au point 18 ci-dessus.

24      À cet égard, il convient de constater, à l’instar de la chambre de recours, que le terme « greasecutter » est composé d’une juxtaposition des deux mots distincts provenant de la langue anglaise « grease » et « cutter ».

25      S’agissant de la signification qu’il convient d’attribuer à la marque demandée, la chambre de recours s’est référée, au point 21 de la décision attaquée, à des définitions provenant du Collins Concise Dictionary des mots qui la composent, à savoir, d’une part, du mot « grease », signifiant « graisse animale à l’état fondu », et, d’autre part, du mot « cutter », signifiant « personne ou objet qui coupe, en particulier, personne qui coupe du tissu pour fabriquer des vêtements ». Elle a en outre indiqué que le mot « to cut », par exemple tel qu’utilisé dans l’expression « to cut fat » (dissoudre de la graisse), signifiait, selon la même source, notamment, « dissoudre » ou « décomposer » et que le mot « greasy » était également utilisé pour désigner quelque chose qui ressemble à de la graisse, comme des « cheveux gras » ou une « peau grasse ».

26      La chambre de recours a considéré, aux points 22 et 23 de la décision attaquée, que la marque demandée ne pouvait être comprise par le public pertinent que comme étant une combinaison des deux éléments descriptifs la composant avec une signification ne dépassant pas celle desdits éléments séparément. Ainsi, selon elle, la marque demandée, prise dans son ensemble, permet immédiatement aux consommateurs de savoir, sans autre réflexion, que les produits visés par la demande d’enregistrement sont des produits qui coupent (dissolvent) ou réduisent la graisse animale ou l’état graisseux et est ainsi directement descriptive de leur nature, de leur qualité ou de leur destination.

27      Cette conclusion de la chambre de recours doit être approuvée.

28      À cet égard, il convient également de relever, ainsi que l’avance à juste titre l’OHMI, que, quand bien même le terme « greasecutter » n’existe pas, en tant que tel, ni en anglais, ni dans les autres langues des États membres de l’Union, ainsi que le fait valoir la requérante, il constitue un néologisme au sens de la jurisprudence rappelée au point 20 ci-dessus composé de mots anglais facilement identifiables par le public anglophone, surtout dans la mesure où ils forment une expression compréhensible car conforme aux règles grammaticales anglaises et qui n’est pas inhabituelle dans la structure de cette langue (voir, en ce sens et par analogie, arrêt TRUEWHITE, point 18 supra, EU:T:2011:340, point 22 et jurisprudence citée).

29      La conclusion de la chambre de recours ne saurait être remise en cause par les arguments de la requérante.

30      Premièrement, la requérante objecte, d’une part, que le verbe anglais « to cut » est un synonyme du verbe anglais « to dissolve » (dissoudre). D’autre part, elle fait valoir que la marque demandée ne contient pas, en tout état de cause, le verbe « to cut », mais le terme « cutter », lequel fait référence à un tailleur ou à un objet qui coupe ou qui taille.

31      À cet égard, il convient de rappeler que, pour qu’un signe verbal soit descriptif, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement nº 207/2009, il suffit qu’en au moins une de ses significations potentielles il désigne une caractéristique des produits ou des services concernés [voir, en ce sens, arrêt du 12 avril 2011, Euro-Information/OHMI (EURO AUTOMATIC PAYMENT), T‑28/10, Rec, EU:T:2011:158, point 50 et jurisprudence citée].

32      En l’espèce, la requérante admet que le terme « cutter » désigne non seulement un tailleur, mais également un objet qui coupe. Par ailleurs, ce terme est, en langue anglaise, un substantif constitué à partir du verbe « to cut ». C’est ainsi à bon droit que la chambre de recours s’est référée à l’une des significations possibles de ce verbe comme signifiant « dissoudre » ou « décomposer », surtout compte tenu de sa signification en tant que partie de l’expression « to cut fat » (dissoudre de la graisse). Il s’ensuit qu’une des significations possibles de la marque demandée, considérée dans son ensemble, est celle retenue par la chambre de recours, à savoir, celle visant à désigner un objet ou un produit qui coupe (dissout) ou réduit une graisse ou l’état graisseux.

33      En outre, il convient de rappeler que le seul fait invoqué par la requérante qu’il puisse exister d’autres termes décrivant de manière encore plus précise les caractéristiques des dégraissants ou des préparations pour récurer, tels que « degreaser » (dégraissant), « grease remover » (détachant pour graisse) ou « scouring preparations » (préparations pour récurer) ne suffit pas à exclure l’application de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 à la marque verbale demandée, eu égard à l’intérêt général poursuivi par cette disposition tel que rappelé au point 15 ci-dessus [voir, en ce sens, arrêt du 16 avril 2015, Drogenhilfe Köln Projekt/OHMI (Rauschbrille), T‑319/14, EU:T:2015:208, point 23 et jurisprudence citée].

34      Deuxièmement, c’est en vain que la requérante conteste les références faites par la chambre de recours aux résultats de recherches que l’examinateur avait effectuées sur Internet visant à démontrer que le terme « greasecutter » était utilisé sur le marché pour désigner des produits nettoyants ou dégraissants. En effet, selon la jurisprudence, il n’est pas nécessaire que le signe visé par la demande d’enregistrement soit déjà connu en tant qu’indication descriptive, mais il suffit qu’il puisse être utilisé de manière descriptive pour qu’il relève du motif absolu de refus prévu à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009. Il n’est ainsi pas nécessaire, pour la chambre de recours, d’apporter une preuve que ce signe est effectivement utilisé de manière descriptive [voir, en ce sens, arrêts Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, point 15 supra, EU:C:2011:139, point 38 et jurisprudence citée, et du 12 janvier 2005, Wieland-Werke/OHMI (SnTEM, SnPUR, SnMIX), T‑367/02 à T‑369/02, Rec, EU:T:2005:3, point 40].

35      En conséquence, les références faites par la chambre de recours aux résultats de recherches sur Internet de l’usage du terme « greasecutter » doivent être considérées comme purement illustratives et non comme ayant une valeur déterminante pour établir le caractère descriptif de la marque demandée. En effet, dans le cadre de l’examen qui doit être effectué par l’OHMI, ce dernier doit vérifier, au cas par cas, sous le contrôle du Tribunal, si, au regard des produits ou des services visés, la marque demandée est, notamment, descriptive, de sorte que cet examen ne saurait dépendre du résultat d’une recherche effectuée sur Internet [arrêt du 27 février 2015, Universal Utility International/OHMI (Greenworld), T‑106/14, EU:T:2015:123, point 35]. Les arguments de la requérante par lesquels elle réfute la référence faite par la chambre de recours aux résultats de recherches sur Internet effectuées par l’examinateur afin de contester le caractère descriptif de la marque demandée doivent donc être rejetés comme inopérants.

36      Troisièmement, c’est également en vain que la requérante soutient que, même en admettant la signification de la marque demandée retenue dans la décision attaquée, celle-ci n’est, en tout état de cause, pas descriptive des produits concernés.

37      À cet égard, il convient de relever que la liste des produits concernés englobe nécessairement, du fait du caractère abstrait et général des produits visés, les produits particulièrement destinés, du fait de leur nature, de leur composition, de leur conditionnement ou de leurs effets, à enlever de la graisse ou à réduire l’état graisseux. Ainsi, contrairement à ce que fait valoir la requérante, la finalité des « préparations pour blanchir » de la classe 3 est, ainsi que l’avance l’OHMI, de lessiver, de laver, de rendre propre, de sorte qu’elles ont pour effet de faire disparaître ou d’enlever d’éventuelles impuretés graisseuses. Il en est de même en ce qui concerne les « préparations pour polir et abraser » relevant de la même classe. S’il est vrai, ainsi que le fait valoir la requérante, que ces derniers produits sont principalement destinés à rendre une surface lisse, une telle action a nécessairement pour effet d’enlever toute impureté, y compris, éventuellement, de la graisse. Concernant les « huiles essentielles » relevant également de la classe 3, c’est à tort que la requérante prétend qu’elles sont utilisées uniquement pour leurs propriétés fragrantes. En effet, certaines huiles essentielles ayant des propriétés antiseptiques ou antibactériennes, elles sont utilisées à des fins dégraissantes ou désinfectantes. En outre, contrairement à ce que soutient la requérante, les « cosmétiques » et les « lotions pour les cheveux » relevant de la classe 3 peuvent avoir pour effet d’enlever l’excès de sébum produit par la peau, ainsi que le soutient l’OHMI. Ces considérations sont également valables, en substance, à l’égard des « désinfectants » relevant de la classe 5, lesquels, par leur nature et leur destination, ont pour effet de purifier ou de stériliser, notamment par enlèvement ou par réduction de l’état graisseux. Il en va de même des « fongicides », lesquels, certes, ont pour finalité principale d’éradiquer les champignons parasites, ainsi que le fait valoir la requérante. Toutefois, un tel effet implique nécessairement l’assainissement de l’environnement concerné, notamment, par enlèvement des impuretés telles que la graisse ou l’état graisseux. Enfin, parmi les « produits pharmaceutiques  et vétérinaires », les « substances diététiques à usage médical » et les « aliments pour bébés » relevant de la classe 5, certains sont particulièrement destinés, du fait de leur nature, de leur composition ou de leurs effets, à faire face à un état de santé caractérisé par la production excessive de sébum par la peau, par le surpoids ou l’obésité, ou par d’autres conditions nécessitant l’utilisation des produits médicaux, diététiques ou nutritionnels ayant pour effet d’éliminer ou de réduire le gras ou la graisse.

38      En conséquence, il est raisonnable d’envisager que la marque demandée sera effectivement reconnue par les milieux intéressés comme une description de l’une des caractéristiques de ces produits au sens de la jurisprudence rappelée aux points 17 et 18 ci-dessus. La requérante n’ayant procédé devant l’OHMI à aucune limitation de sa demande de marque de manière à en exclure les produits servant à dissoudre ou à réduire la graisse, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que les produits pour lesquels l’enregistrement a été refusé comportaient nécessairement de tels produits et qu’elle a, partant, conclu que la marque demandée était descriptive au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 [voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 30 janvier 2015, Siemag Tecberg Group/OHMI (Winder Controls), T‑593/13, EU:T:2015:58, point 45].

39      Quatrièmement, la requérante soutient, en substance, que la chambre de recours aurait dû prendre en compte le fait que la marque GREASECUTTER Plus a été enregistrée par le United States Patent and Trademark Office (USPTO, Office des brevets et des marques des États-Unis) pour des produits relevant de la classe 3. Selon la requérante, même si la chambre de recours n’est pas liée par les décisions adoptées dans les autres États membres ou dans des pays tiers, de tels enregistrements antérieurs seraient néanmoins pertinents pour apprécier le caractère enregistrable d’une marque, en particulier si l’enregistrement antérieur a eu lieu, comme en l’espèce, dans un pays de même langue que celle sur laquelle l’OHMI a fondé ses objections. De tels enregistrements seraient de nature à démontrer que la marque demandée est susceptible de remplir la fonction essentielle d’une marque, qui est celle de l’indication d’origine des produits visés.

40      En outre, la requérante invoque les enregistrements en tant que marques communautaires des signes GreaseShield et Grease Guardian, pour certains produits relevant de la classe 7, et GREASE FIGHT, pour certains produits relevant de la classe 3.

41      S’agissant de l’argument relatif à l’enregistrement de la marque GREASECUTTER Plus aux États-Unis, il suffit de rappeler que le régime communautaire des marques est un système autonome, constitué d’un ensemble de règles et poursuivant des objectifs qui lui sont spécifiques, son application étant indépendante de tout système national [voir, en ce sens, arrêts du 5 décembre 2000, Messe München/OHMI (electronica), T‑32/00, Rec, EU:T:2000:283, point 47, et du 21 janvier 2009, giropay/OHMI (GIROPAY), T‑399/06, EU:T:2009:11, point 46]. L’OHMI et, le cas échéant, le juge de l’Union ne sont donc pas liés par une décision intervenue dans un État membre, voire dans un pays tiers, admettant le caractère enregistrable d’un signe en tant que marque nationale. Les enregistrements d’ores et déjà effectués dans des États membres ou dans des pays tiers ne constituent que des éléments qui, sans être déterminants, peuvent seulement être pris en considération [voir, en ce sens, arrêt du 21 avril 2004, Concept/OHMI (ECA), T‑127/02, Rec, EU:T:2004:110, point 70]. Tel est le cas même si une telle décision a été prise dans un pays appartenant à la zone linguistique dans laquelle la marque verbale en cause trouve son origine [voir, en ce sens, arrêt du 15 septembre 2009, Wella/OHMI (TAME IT), T‑471/07, Rec, EU:T:2009:328, point 35]. De telles considérations s’appliquent, a fortiori, en ce qui concerne des motifs pour lesquels il a été décidé d’admettre ou non l’enregistrement de tel ou tel signe et les éventuelles considérations retenues notamment par l’USPTO lors de l’enregistrement de la marque GREASECUTTER Plus [voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 18 novembre 2014, Think Schuhwerk/OHMI – Müller (VOODOO), T‑50/13, EU:T:2014:967, point 52].

42      Par ailleurs, sur le fond, et pour autant que la requérante invoque les enregistrements des autres marques communautaires, il convient de rappeler que l’OHMI est tenu d’exercer ses compétences en conformité avec les principes généraux du droit de l’Union. Si, eu égard aux principes d’égalité de traitement et de bonne administration, l’OHMI doit prendre en considération les décisions déjà prises sur des demandes similaires et s’interroger avec une attention particulière sur le point de savoir s’il y a lieu ou non de décider dans le même sens, l’application de ces principes doit toutefois être conciliée avec le respect du principe de légalité. Au demeurant, pour des raisons de sécurité juridique et, précisément, de bonne administration, l’examen de toute demande d’enregistrement d’une marque doit être strict et complet afin d’éviter que des marques ne soient enregistrées ou maintenues de manière indue. C’est ainsi qu’un tel examen doit avoir lieu dans chaque cas concret. En effet, l’enregistrement ou le maintien d’une marque en tant que marque communautaire dépend de critères spécifiques, applicables dans le cadre des circonstances factuelles du cas d’espèce, destinés à vérifier si la marque en cause ne relève pas d’un motif de refus [voir, en ce sens, arrêts Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, point 15 supra, EU:C:2011:139, points 73 à 77 et jurisprudence citée, et du 8 novembre 2012, Hartmann/OHMI (Nutriskin Protection Complex), T‑415/11, EU:T:2012:589, point 36].

43      En l’espèce, la chambre de recours a conclu, sur la base d’un examen complet en tenant compte de la perception du public pertinent, et eu égard aux caractéristiques de la marque demandée et aux produits concernés, que cette marque était descriptive. Ainsi qu’il ressort de l’examen effectué aux points 22 à 38 ci-dessus, en l’espèce, le principe de légalité justifiait que l’enregistrement de cette marque soit refusé sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 209/2007. Partant, dès lors que la légalité de la décision attaquée concernant le caractère non enregistrable de la marque demandée en tant que marque communautaire pour les produits visés est établie directement sur la base de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, il ressort de la jurisprudence citée au point 42 ci-dessus qu’elle ne peut pas être remise en cause du simple fait que la chambre de recours n’aurait pas pris en compte, en l’espèce, le fait que le signe GREASECUTTER Plus a été enregistré aux États-Unis, ni qu’elle n’aurait pas suivi une certaine pratique décisionnelle de l’OHMI, à la supposer établie.

44      Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que le premier moyen doit être rejeté.

 Sur le second moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009

45      La requérante soutient que la marque demandée présente un caractère distinctif pour les produits concernés. La motivation de la chambre de recours se limiterait à l’affirmation que le public pertinent comprendra la marque demandée comme une description des produits visés. Or, les arguments qu’elle avance pour contester le caractère descriptif de la marque demandée auraient permis, selon la requérante, de démontrer que cette marque n’était pas dépourvue de caractère distinctif.

46      L’OHMI conteste la position de la requérante.

47      Or, eu égard aux considérations exposées aux points 22 à 43 ci-dessus, il importe de constater qu’il n’y a pas lieu d’examiner le second moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, dès lors qu’il suffit qu’un des motifs absolus de refus s’applique pour que le signe ne puisse être enregistré comme marque communautaire [arrêt du 19 septembre 2002, DKV/OHMI, C‑104/00 P, Rec, EU:C:2002:506, point 29 ; voir, également, arrêts du 26 octobre 2000, Community Concepts/OHMI (Investorworld), T‑360/99, Rec, EU:T:2000:247, point 26 et jurisprudence citée, et du 9 juillet 2008, Coffee Store/OHMI (THE COFFEE STORE), T‑323/05, EU:T:2008:265, point 49].

48      En tout état de cause, s’agissant de la violation alléguée de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, il convient de rappeler que le chevauchement entre les motifs absolus de refus implique, en particulier, qu’une marque verbale descriptive des caractéristiques de produits ou de services est, de ce fait, susceptible d’être dépourvue de caractère distinctif à l’égard de ces mêmes produits ou services, sans préjudice d’autres raisons pouvant justifier cette absence de caractère distinctif (voir ordonnance du 18 mars 2010, CFCMCEE/OHMI, C‑282/09 P, Rec, EU:C:2010:153, point 52, et arrêt Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, point 15 supra, EU:C:2011:139, point 46 et jurisprudence citée).

49      En l’espèce, il a déjà été constaté que la chambre de recours a correctement considéré que la marque demandée était descriptive à l’égard des produits visés.

50      C’est donc à juste titre que la chambre de recours a conclu à l’absence de caractère distinctif de la marque demandée.

51      Il ressort de l’ensemble de ce qui précède que le second moyen invoqué par la requérante doit également être écarté et que, par conséquent, il y a lieu de rejeter le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

52      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Ecolab USA, Inc. est condamnée aux dépens.

Kanninen

Pelikánová

Buttigieg

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 30 septembre 2015.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.