Language of document : ECLI:EU:T:2000:20

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

27 janvier 2000 (1)

«Fonds social européen — Recours en carence — Recevabilité — Recours enannulation — Décision de suspension de concours financiers — Certification parl'État membre — Erreur d'appréciation des faits — Confiance légitime — Droitsacquis — Sécurité juridique — Proportionnalité»

Dans les affaires jointes T-194/97 et T-83/98,

Eugénio Branco, Ld.a, établie à Lisbonne (Portugal), représentée parMe B. Belchior, avocat au barreau de Vila Nova de Gaia, ayant élu domicile àLuxembourg en l'étude de Me J. Schroeder, 6, rue Heine,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée, dans l'affaire T-194/97,par Mme A. M. Alves Vieira et M. K. Simonsson et, dans l'affaire T-83/98, parMme M. T. Figueira et M. Simonsson, membres du service juridique, en qualitéd'agents, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. C. Gómez de la Cruz,membre du service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,

partie défenderesse,

ayant pour objet, dans l'affaire T-194/97, une demande tendant à la constatationde la carence de la défenderesse, en ce qu'elle se serait illégalement abstenue destatuer sur la demande de paiement du solde des concours financiers accordés parle Fonds social européen dans les dossiers n° 870301 P1 et n° 870302 P3, et, dansl'affaire T-83/98, une demande d'annulation des décisions C (1998) 47 etC (1998) 48 de la Commission, du 17 février 1998, portant suspension desditsconcours,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE

DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (troisième chambre),

composé de MM. M. Jaeger, président, K. Lenaerts et J. Azizi, juges,

greffier: M. A. Mair, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite des audiences du 8 juillet 1999,

rend le présent

Arrêt

Cadre juridique

1.
    L'article 124, premier alinéa, du traité CE (devenu article 147, premier alinéa, CE)charge la Commission de l'administration du Fonds social européen (FSE).

2.
    Selon l'article 1er, paragraphe 2, sous a), de la décision 83/516/CEE du Conseil, du17 octobre 1983, concernant les missions du FSE (JO L 289, p. 38), celui-ciparticipe au financement d'actions de formation et d'orientation professionnelle. Envertu de l'article 5, paragraphe 1, de la même décision, le concours du FSE estoctroyé à raison de 50 % des dépenses éligibles, sans qu'il puisse toutefois dépasserle montant de la contribution financière des pouvoirs publics de l'État membreintéressé.

3.
    L'article 1er du règlement (CEE) n° 2950/83 du Conseil, du 17 octobre 1983,portant application de la décision 83/516 concernant les missions du FSE(JO L 289, p. 1, ci-après le «règlement n° 2950/83»), énumère les dépenses quipeuvent faire l'objet d'un concours du FSE.

4.
    L'agrément donné par le FSE à une demande de financement entraîne, enapplication de l'article 5, paragraphe 1, du règlement n° 2950/83, le versement, àla date prévue pour le début de l'action de formation, d'une avance égale à 50 %

du concours. En vertu du paragraphe 4 du même article, les demandes depaiement du solde contiennent un rapport détaillé sur le contenu, les résultats etles aspects financiers de l'action concernée; l'État membre certifie l'exactitudefactuelle et comptable des indications contenues dans les demandes de paiement.

5.
    Conformément à l'article 7, paragraphe 1, du règlement n° 2950/83, tant laCommission que l'État membre concerné peuvent contrôler l'utilisation duconcours. L'article 7 de la décision 83/673/CEE de la Commission, du 22 décembre1983, concernant la gestion du FSE (JO L 377, p. 1, ci-après la «décision 83/673»),prescrit à l'État membre enquêtant sur l'utilisation d'un concours, en raison d'uneprésomption d'irrégularité, d'avertir la Commission sans délai.

6.
    Enfin, selon les dispositions de l'article 6, paragraphe 1, du règlement n° 2950/83,lorsque le concours du FSE n'est pas utilisé dans les conditions fixées par ladécision d'agrément, la Commission peut suspendre, réduire ou supprimer ceconcours, après avoir donné à l'État membre concerné l'occasion de présenter sesobservations. Le paragraphe 2 de cet article dispose que les sommes versées quin'ont pas été utilisées dans les conditions fixées par la décision d'agrément donnentlieu à répétition, et que, dans la mesure où il verse à la Communauté les sommesà rembourser par les responsables financiers de l'action, l'État membre est subrogédans les droits de la Communauté.

Cadre factuel et procédural des litiges

7.
    La défenderesse a agréé, par décisions notifiées à la requérante par leDepartamento para os Assuntos do Fundo Social Europeu (département pour lesaffaires du Fonds social européen, ci-après le «DAFSE»), respectivement, les 31avril et 27 mai 1987, deux demandes de concours financiers de 11 736 792 PTE(dossier n° 870302 P3) et de 82 700 897 PTE (dossier n° 870301 P1) destinés à desprogrammes de formation.

8.
    Le 24 juillet 1987, la requérante a perçu une avance en application de l'article 5,paragraphe 1, du règlement n° 2950/83.

9.
    Au début du mois de juillet 1988, soit à l'issue des formations qui se sont dérouléesdu 1er janvier au 31 décembre 1987, elle a introduit, auprès du DAFSE, desdemandes de paiement du solde des concours.

10.
    Le DAFSE a certifié l'exactitude factuelle et comptable des indications contenuesdans ces demandes, en application de l'article 5, paragraphe 4, du règlementn° 2950/83.

11.
    Le 22 août 1988, le DAFSE a demandé à l'Inspecçao Geral de Finanças(Inspection générale des finances, ci-après l'«IGF») d'effectuer, en application del'article 7, paragraphe 1, du règlement n° 2950/83, un contrôle de la demande de

paiement du solde.

12.
    L'IGF ayant conclu à l'existence d'irrégularités, le DAFSE a, par deux lettres du24 avril 1989, informé la défenderesse qu'il avait suspendu le versement du solde,en application de l'article 7 de la décision 83/673.

13.
    Le 16 mai 1989, l'IGF a remis son rapport à la police judiciaire pour information.

14.
    Le 30 juillet 1990, le DAFSE a informé la Commission que, sans préjudice desinformations communiquées dans les lettres du 24 avril 1989 et à la suite descontrôles effectués par l'IGF, il considérait que certaines dépenses étaientinéligibles. A cette occasion, la défenderesse a pris connaissance de l'enquêteeffectuée par l'IGF et de ses conclusions.

15.
    Par lettres du même jour, reçues le lendemain, le DAFSE a enjoint à la requérantede lui restituer dans un délai de dix jours les avances de 1 535 946 PTE (dossiern° 870302 P3) et de 4 399 475 PTE (dossier n° 870301 P1), versées par le FSE, etde 1 256 683 PTE (dossier n° 870302 P3) et de 3 599 570 PTE (dossiern° 870301 P1), payées par l'État portugais au titre de la contribution nationale.

16.
    Par lettre du 12 mai 1994, la requérante a demandé au DAFSE de l'informer desmotifs pour lesquels la défenderesse n'avait pas encore pris de décision sur cesdossiers.

17.
    Dans sa lettre du 25 mai 1994, le DAFSE a exposé à la requérante que laCommission estimait ne pas devoir prendre une décision de réduction de concoursou de non-paiement du solde lorsque, comme en l'espèce, l'autorité nationaledécide elle-même de réduire le concours.

18.
    Par lettre du 30 mai 1994, la requérante a demandé à la défenderesse la raisonpour laquelle elle n'avait pas encore pris de décision finale au sujet de ses dossiers.

19.
    Par lettre du 16 juin 1994, la défenderesse a répondu que les autorités portugaisesl'avaient avertie que les dossiers en cause faisaient l'objet d'une enquête, au titrede l'article 7 de la décision 83/673, en raison d'une présomption d'irrégularité.

20.
    Par requête du 22 juillet 1994, la requérante a demandé l'annulation d'une décisionprétendument prise par la défenderesse, notifiée par lettres du DAFSE et de laCommission, datées respectivement du 25 mai et du 16 juin 1994, portant, d'unepart, rejet d'une demande de paiement du solde des concours financiers accordéspar le FSE pour deux programmes de formation et, d'autre part, réduction de cesconcours financiers et répétition des avances versées par le FSE et l'État portugais.

21.
    Par arrêt du 11 juillet 1996, Branco/Commission (T-271/94, Rec. p. II-749), leTribunal a déclaré le recours irrecevable, au motif que la Commission n'avait passtatué sur la demande de paiement du solde.

22.
    Le 25 octobre 1996, la défenderesse a été informée de l'ouverture d'une procédured'enquête devant le Tribunal de Instrução Criminal da Comarca do Porto pourfraude dans l'obtention de subventions et détournement de celles-ci, en relationavec les actions de formation financées par le FSE.

23.
    Par lettre du 27 février 1997, parvenue à la Commission le 3 mars 1997, larequérante a mis la défenderesse en demeure de prendre une décision sur lademande de paiement du solde.

24.
    Le 17 avril 1997, la défenderesse a envoyé au DAFSE, pour chacun des dossierslitigieux, un projet de décision de suspension des concours.

25.
    La requérante en a reçu copie, le 5 mai 1997, par l'entremise du DAFSE.

26.
    Le 19 mai 1997, le DAFSE a réceptionné les observations de la requérante sur cesprojets, lesquelles ont été précisées et rectifiées dans une lettre adressée par larequérante à cet organisme le 21 mai 1997.

27.
    Par requête déposée au greffe du Tribunal le 30 juin 1997, la requérante aintroduit un recours en carence. L'affaire a été enregistrée sous le numéroT-194/97.

28.
    Le 17 juillet 1997, le DAFSE a informé la Commission qu'il approuvait pleinementles projets de décisions de suspension des concours.

29.
    Le 1er octobre 1997, la défenderesse a, par acte séparé, excipé de l'irrecevabilité durecours en carence, conformément à l'article 114, paragraphe 1, du règlement deprocédure du Tribunal. La requérante a déposé ses observations sur cette exceptionle 19 novembre 1997.

30.
    Le 26 novembre 1997, la Commission a eu connaissance de l'acte d'accusation desautorités judiciaires portugaises visant la requérante.

31.
    Le 17 février 1998, la Commission a pris les décisions de suspension des concoursfinanciers litigieuses.

32.
    Le 26 mai 1998, la requérante a formé un recours en annulation contre lesdécisions du 17 février 1998, portant suspension des concours financiers. L'affairea été enregistrée sous le numéro T-83/98.

33.
    Par ordonnance du 16 juillet 1998, le président de la cinquième chambre a joint aufond l'exception d'irrecevabilité soulevée dans l'affaire T-194/97.

34.
    Dans le cadre des affaires T-194/97 et T-83/98, le Tribunal a posé des questionsécrites aux parties, qui y ont répondu dans les délais impartis.

35.
    Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (troisième chambre) a ouvert laprocédure orale dans chacune des affaires. Les parties ont été entendues en leursplaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal aux audiencesdu 8 juillet 1999.

36.
    Au cours de celles-ci, les parties ont exprimé leur assentiment à la jonction desdeux affaires aux fins de l'arrêt.

Conclusions des parties

37.
    Dans l'affaire T-194/97, la partie requérante conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

    

—    constater la carence de la partie défenderesse;

    

—     condamner la partie défenderesse aux dépens.

38.
    La partie défenderesse conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

    

—     déclarer le recours irrecevable ou le rejeter comme étant sans objet ou,subsidiairement, non fondé;

    

—     condamner la partie requérante aux dépens.

39.
    La requérante conclut au rejet de l'exception d'irrecevabilité.

40.
    Dans l'affaire T-83/98, la partie requérante conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

—    annuler les décisions du 17 février 1998 portant suspension des concoursfinanciers;

—    condamner la partie défenderesse aux dépens.

41.
    La partie défenderesse conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

—    rejeter le recours;

—    condamner la partie requérante aux dépens.

Sur le recours en carence

Argumentation des parties

42.
    Premièrement, la requérante souligne avoir mis la défenderesse en demeure parlettre du 27 février 1997, parvenue à cette dernière le 3 mars 1997. Elle fait valoirque les projets de décisions de suspension des concours, envoyés au DAFSE le 17avril 1997, n'ont été portés à sa connaissance que le 5 mai 1997, date à laquelle le

délai de deux mois prévu à l'article 175, deuxième alinéa, du traité CE (devenuarticle 232, deuxième alinéa, CE) était expiré.

43.
    Deuxièmement, elle soutient que ni les projets de décisions de suspension du 17avril 1997 ni les décisions de suspension du 17 février 1998 ne constituent une prisede position au sens de l'article 175 du traité, puisqu'ils laissent subsister la carence.En effet, eu égard au délai de près de dix ans qui s'est écoulé depuis la demandede paiement du solde jusqu'à l'adoption de ces décisions, la requérante estime quela défenderesse était tenue de prendre une décision finale, à savoir une décisionde paiement du solde, de suppression des concours ou de réduction de ceux-ci.

44.
    Dans le cas contraire, la défenderesse pourrait laisser s'éterniser la procédureadministrative et, ainsi, reporter indéfiniment l'adoption de la décision finale surla demande de paiement du solde.

45.
    L'existence alléguée d'une procédure pénale devant la juridiction portugaise seraitsans pertinence en l'espèce. D'abord, une enquête serait menée chaque fois qu'unaudit révèle des indices d'irrégularités et elle ne donnerait pas nécessairement lieuà un jugement pénal. Ensuite, dans cette procédure, il ne serait fait état que deséléments contenus dans le rapport de l'IGF, déjà connus de la défenderesse. Enfin,cette dernière admettrait elle-même n'avoir eu connaissance de cette procédureque le 26 novembre 1997, date à laquelle la carence aurait été constituée depuislongtemps.

46.
    La défenderesse excipe de l'irrecevabilité du recours, en soulignant avoir prisposition, au sens de l'article 175 du traité en adressant, le 17 avril 1997, au DAFSE,des projets de décisions portant suspension des concours et en adoptant, le 17février 1998, des décisions de suspension desdits concours. Celles-ci seraientjustifiées par l'ouverture d'une procédure pénale ayant trait aux dossiers litigieux,actuellement pendante devant le Tribunal de Instrução Criminal da Comarca doPorto (n° 17937/95-OTDPRT-PR), et dans le cadre de laquelle la requérante auraitété mise en accusation pour fraude, le 2 avril 1997.

Appréciation du Tribunal

47.
    A l'effet de statuer sur les conclusions en carence, il y a lieu de vérifier si, aumoment de la mise en demeure de la Commission au sens de l'article 175 du traité,il pesait sur l'institution une obligation d'agir.

48.
    Aux termes de l'article 6, paragraphe 1, du règlement n° 2950/83, lorsqu'unconcours du FSE n'est pas utilisé dans les conditions fixées par la décisiond'agrément, la Commission peut suspendre, réduire ou supprimer ce concours.

49.
    Le législateur communautaire ayant distingué ces trois possibilités d'action de laCommission, il convient de considérer qu'elles visent chacune des hypothèses

spécifiques. Dès lors qu'il appartient à la Commission de statuer sur les demandesde paiement du solde [arrêt du Tribunal du 13 décembre 1995,Commission/Branco, T-85/94 (122), Rec. p. II-2993, point 23], dans un délairaisonnable, mais qu'il ne lui est possible de calculer le montant exact des dépenseséligibles qu'après avoir reçu un rapport détaillé sur l'action accomplie (arrêt duTribunal du 14 juillet 1997, Interhotel/Commission, T-81/95, Rec. p. II-1265, point43, et l'arrêt y cité), la décision de suspension ne peut intervenir que dans les casoù un tel calcul n'est pas encore possible.

50.
    La finalité de la faculté pour la Commission de suspendre un concours du FSE estdonc de permettre le gel du paiement du solde aussi longtemps qu'elle a desraisons sérieuses de soupçonner l'existence d'irrégularités dans l'utilisation duditconcours, avec, toutefois, l'obligation pour elle de prendre, dans un délairaisonnable, une décision finale sur la demande de paiement du solde, soit enordonnant le paiement intégral du solde, soit en réduisant ou en supprimant ceconcours. Une telle suspension permet d'éviter une éventuelle procédure derécupération des sommes indûment versées. En effet, si la décision finale est cellede supprimer les concours alors que des avances ont été versées au bénéficiairedesdits concours, il conviendra nécessairement d'engager une procédure derécupération des sommes réglées.

51.
    Dès lors que, en l'espèce, la Commission avait des doutes sérieux quant à larégularité de l'utilisation des concours à la suite du rapport de l'IGF, d'une part,et qu'une procédure diligentée contre le bénéficiaire des concours et ayant trait àcertaines opérations réalisées dans le cadre des projets financés était pendantedevant une juridiction pénale portugaise lors de la mise en demeure de laCommission, d'autre part, cette dernière n'était pas tenue de prendre une décisionfinale quant à la demande de paiement du solde, mais elle était fondée à suspendreles concours en application de l'article 6, paragraphe 1, du règlement n° 2950/83.

52.
    La requérante a invité la Commission, par lettre du 27 février 1997 reçue le 3 mars1997, à approuver la demande de paiement du solde. A la suite de cette invitationà agir, la défenderesse a adressé au DAFSE des projets de décisions de suspensiondes concours le 17 avril 1997 et a pris des décisions de suspension le 17 février1998.

53.
    Il y a lieu d'observer que, selon l'article 6, paragraphe 1, du règlement n° 2950/83,la Commission ne peut suspendre un concours qu'après avoir donné à l'Étatmembre concerné l'occasion de présenter ses observations. En outre, lacirconstance que, en vertu de cette disposition, l'État membre concerné doit êtrepréalablement consulté avant que la Commission adopte une décision desuspension, de réduction ou de suppression ne permet pas de conclure à la non-application d'un principe de droit communautaire aussi fondamental que celui quigarantit à toute personne le droit d'être entendue avant qu'une décision susceptiblede lui faire grief soit adoptée (arrêt de la Cour du 24 octobre 1996,Commission/Lisrestal e.a., C-32/95 P, Rec. p. I-5373, point 30). Or, une décision de

suspension de concours prive, à tout le moins provisoirement, l'intéressé del'intégralité du concours qui lui avait été initialement octroyé. Il subit, ainsi,directement les conséquences économiques d'une décision qui lui fait grief et doit,en conséquence, se voir, également, reconnaître le droit de présenter sesobservations avant l'adoption d'une décision de suspension de ce concours.

54.
    Il s'ensuit que la Commission ne saurait prendre de décisions de suspension qu'auterme d'une procédure comportant plusieurs phases, dont l'une est constituée parl'envoi de projets de décisions de suspension tant à l'État membre concerné qu'aubénéficiaire des concours. Si de tels projets, en tant que mesures intermédiairesdont l'objectif est de préparer des décisions, ne sont pas susceptibles de faire l'objetd'un recours en annulation (voir, dans un contexte différent, arrêt de la Cour du18 mars 1997, Guérin automobiles/Commission, C-282/95 P, Rec. p. I-1503, point34, et l'arrêt y cité), ils constituent, néanmoins, des prises de position mettant finà la carence. Ces projets assurent le respect des droits de la défense du bénéficiairedu concours et de l'État membre concerné lors d'une procédure pouvant débouchersur des décisions de suspension de concours, elles-mêmes susceptibles de fairel'objet d'un recours en annulation. Par ces projets, la défenderesse a donc faitconnaître son intention de prendre des décisions de suspension tout en exprimantimplicitement son refus d'approuver, à tout le moins momentanément, la demandede paiement du solde.

55.
    Afin d'apprécier si l'institution mise en demeure d'agir a pris position dans le délaide deux mois prescrit à l'article 175, deuxième alinéa, du traité, il convient devérifier si la prise de position de l'institution a été portée à la connaissance del'auteur de la mise en demeure dans les deux mois suivant la réception parl'institution de ladite mise en demeure. En effet, cette prise de position aprécisément pour objet de répondre à l'invitation à agir et de porter cette réponseà la connaissance de la personne à l'origine de cette invitation à agir. Elle modifiela position juridique de cette personne en ce qu'elle met fin à la carence. Or, pourêtre en mesure de défendre ses droits lors de la procédure administrative, à la suitede la prise de position de l'institution, la personne concernée doit avoir été miseen mesure de prendre connaissance de son contenu. Dès lors, la carence prend finnon pas le jour où l'institution prend effectivement position, mais à la date deréception de la prise de position par l'auteur de la mise en demeure. C'est donccette dernière date qu'il convient de prendre en considération pour apprécier si ledélai de deux mois prescrit par l'article 175, deuxième alinéa, du traité CE a étérespecté.

56.
    En l'espèce, la défenderesse ayant reçu la mise en demeure d'agir le 3 mars 1997alors que les projets de décisions de suspension des concours ne sont parvenus àla requérante que le 5 mai 1997, le délai de deux mois prescrit par l'article 175,deuxième alinéa, du traité n'a pas été respecté.

57.
    Il y a lieu, toutefois, de constater que la requérante a introduit son recours en

carence le 30 juin 1997, après avoir reçu lesdits projets de décisions. Ces derniersdevant être considérés comme des prises de position, au sens de l'article 175 dutraité (voir ci-dessus point 54), la requérante n'avait plus d'intérêt à faire constaterune carence, puisque celle-ci avait cessé d'exister. En effet, un arrêt du Tribunalqui, dans un tel cas de figure, constaterait la carence de l'institution ne pourraitdonner lieu aux mesures d'exécution visées à l'article 176, premier alinéa, du traité(devenu article 233, premier alinéa, CE) (voir, à propos d'un recours en annulation,ordonnance du 13 juin 1997, TEAM et Kolprojekt/Commission, T-13/96, Rec.p. II-983, point 28).

58.
    Il résulte de ce qui précède que le recours en carence est irrecevable (arrêt de laCour du 1er avril 1993, Pesqueras Echebastar/Commission, C-25/91, Rec. p. I-1719,points 11 à 13).

Sur le recours en annulation

59.
    La requérante invoque cinq moyens d'annulation, tirés, premièrement, d'uneviolation du règlement n° 2950/83, deuxièmement, d'une erreur d'appréciation desfaits, troisièmement, d'une violation des principes de protection de la confiancelégitime et de sécurité juridique, quatrièmement, d'une violation de droits acquiset, cinquièmement, d'une violation du principe de proportionnalité.

Sur le premier moyen, tiré d'une violation du règlement n° 2950/83

Argumentation des parties

60.
    La requérante relève que, au cours du mois d'octobre 1988, le DAFSE a,conformément à l'article 5, paragraphe 4, du règlement n° 2950/83, certifiél'exactitude factuelle et comptable des indications contenues dans sa demande depaiement du solde. Or, après transmission de cette certification à la Commission,toute intervention de l'État membre concerné, dans le traitement du dossier, seraitdépourvue de fondement légal. En effet, la réglementation applicable, et plusparticulièrement le règlement n° 2950/83, ne prévoirait pas la possibilité pour cedernier de procéder à un «réexamen» du dossier et de modifier la certification,comme l'a fait, en l'espèce, le DAFSE.

61.
    L'État membre concerné devrait examiner s'il existe des irrégularités avant deprendre l'acte de certification. Dans l'hypothèse contraire, il effectuerait une faussecertification. Saisi de la demande de paiement du solde, le DAFSE n'aurait puprendre qu'une des deux décisions suivantes: soit conclure à l'authenticité deséléments présentés et procéder à la certification de ceux-ci, soit constater leurinexactitude et, dans ce cas, refuser la certification. En certifiant la demande depaiement du solde, il aurait donc définitivement approuvé les indications contenuesdans cette demande.

62.
    La requérante fait valoir enfin que le réexamen susvisé a été réalisé par l'IGF,

alors que celle-ci ne serait ni habilitée à contrôler les actions financées par le FSEni techniquement en mesure de se prononcer sur l'application de la réglementationcommunautaire.

63.
    La défenderesse conteste l'argumentation de la requérante en se référant à l'arrêtdu Tribunal du 15 septembre 1998, Branco/Commission (T-142/97, Rec. p. II-3567).

Appréciation du Tribunal

64.
    Dans la mesure où il confirme l'exactitude factuelle et comptable des indicationscontenues dans les demandes de paiement du solde, l'État membre est responsablevis-à-vis de la Commission des certifications qu'il fournit.

65.
    Par ailleurs, en vertu de l'article 2, paragraphe 2, de la décision 83/516, les Étatsmembres intéressés garantissent la bonne fin des actions financées par le FSE. Enoutre, en vertu de l'article 7, paragraphe 1, du règlement n° 2950/83, la Commissionpeut procéder à des vérifications des demandes de paiement du solde, «sanspréjudice des contrôles effectués par les États membres».

66.
    Force est de constater que ces obligations et pouvoirs des États membres ne fontl'objet d'aucune limitation dans le temps.

67.
    En conséquence, dans un cas comme celui de l'espèce, où l'État membre a déjàcertifié l'exactitude factuelle et comptable des indications contenues dans lademande de paiement du solde, ledit État peut encore modifier son appréciation,lorsqu'il estime être confronté à des irrégularités qui ne s'étaient pas révéléesprécédemment.

68.
    Enfin, rien ne s'oppose à ce qu'une autorité comme le DAFSE ait recours à unorganisme spécialisé en audit comptable et financier, tel que l'IGF, afin de l'aiderà contrôler l'exactitude factuelle et comptable des indications contenues dans unedemande de paiement du solde.

69.
    Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré d'une violation du règlementn° 2950/83 doit être rejeté (arrêts du Tribunal du 16 juillet 1998,Proderec/Commission, T-72/97, Rec. p. II-2847, points 61 à 74, etBranco/Commission, cité au point 63 ci-dessus, points 44 à 50).

Sur le deuxième moyen, tiré d'une erreur d'appréciation des faits

Argumentation des parties

70.
    La requérante affirme avoir rigoureusement respecté les dispositions du règlementn° 2950/83 ainsi que les conditions d'utilisation des concours imposées par laCommission dans les décisions d'agrément. Il n'existerait aucune raison pour que

les concours accordés soient «réduits».

71.
    Le rapport de l'IGF, sur lequel se fondent les décisions litigieuses, serait erroné etse réduirait à des conjectures sur l'inéligibilité de certaines dépenses, concernantle taux horaire de la rémunération des stagiaires, la sous-traitance confiée à E. B.— Contabilidade e Estudos Económicos, Ld.a, les amortissements et l'équipementinformatique faisant l'objet d'un leasing.

72.
    Selon la défenderesse, l'argumentation de la requérante est totalement sans objet,puisque la Commission n'a pas encore pris de décision définitive, les décisionslitigieuses portant seulement suspension des concours. Toutefois, elle réfutel'argumentation de la requérante sur la base des éléments contenus dans le rapportde l'IGF.

Appréciation du Tribunal

73.
    Ainsi qu'il résulte de l'article 6, paragraphe 1, du règlement n° 2950/83, laCommission peut suspendre, réduire ou supprimer un concours du FSE lorsqu'iln'est pas utilisé dans les conditions fixées par la décision d'agrément.

74.
    Par ailleurs, il résulte des déclarations d'acceptation des décisions d'agrément quela bénéficiaire des concours s'est expressément engagée à respecter, dans le cadrede l'utilisation desdits concours, les dispositions nationales et communautairesapplicables.

75.
    A cet égard, le droit portugais et le droit communautaire subordonnant l'utilisationdes fonds publics à une exigence de bonne gestion financière, la Commission peutsuspendre, réduire ou supprimer un concours du FSE lorsque celui-ci n'a pas étéutilisé en conformité avec ladite exigence (voir ci-dessus points 48 à 50).

76.
    L'application de l'article 6, paragraphe 1, du règlement n° 2950/83 pouvantimpliquer la nécessité de procéder à une évaluation de situations factuelles etcomptables complexes, l'institution dispose d'un large pouvoir d'appréciation dansle cadre de cette évaluation. Le contrôle du juge communautaire sur cesappréciations doit être limité à la vérification du respect des règles de procédure,de l'exactitude matérielle des faits retenus pour opérer le choix contesté, del'absence d'erreur manifeste d'appréciation de ces faits ou de l'absence d'undétournement de pouvoir (arrêt Branco/Commission, cité au point 63 ci-dessus,points 64 à 67).

77.
    Le contrôle de légalité portant, en l'espèce, sur des décisions de suspension deconcours, il n'y a pas lieu d'examiner si les appréciations contenues dans le rapportde l'IGF sont fondées, mais si la Commission a commis une erreur manifested'appréciation en estimant qu'il existait des indices d'irrégularités justifiant laditesuspension. Dès lors, à supposer même que certaines des appréciations contenuesdans le rapport de l'IGF ayant motivé les décisions litigieuses soient erronées, ces

dernières ne seraient pas, de ce seul fait, entachées d'une erreur manifested'appréciation.

78.
    La condition de l'existence d'indices d'irrégularités, pour justifier une suspensiondes concours, est manifestement remplie lorsque, comme en l'espèce, uneprocédure diligentée contre la bénéficiaire des concours et ayant trait à certainesopérations réalisées dans le cadre des actions financées par le FSE, était pendantedevant une juridiction pénale au moment de l'adoption des décisions de suspension.

79.
    Le moyen doit donc être rejeté.

Sur le troisième moyen, tiré d'une violation des principes de protection de la confiancelégitime et de sécurité juridique

Argumentation des parties

80.
    La requérante fait valoir que le DAFSE a transmis sa demande de paiement dusolde à la défenderesse dès le mois d'octobre 1988, alors que celle-ci n'a pris lesdécisions litigieuses qu'en février 1998. Ce délai de presque dix ans aurait créé,chez elle, une confiance légitime dans l'approbation par la Commission de sademande, telle que certifiée par le DAFSE.

81.
    La requérante souligne que la Commission doit prendre toute décision dans undélai raisonnable. Elle ne pourrait pas laisser s'éterniser la procédure administrativeet, ainsi, reporter indéfiniment l'adoption de la décision finale sur la demande depaiement du solde, sous peine de violer les principes de protection de la confiancelégitime et de sécurité juridique.

82.
    En l'espèce, le délai de près de dix ans qui s'est écoulé depuis la demande depaiement du solde jusqu'à l'adoption des décisions litigieuses serait excessivementlong et violerait le principe de sécurité juridique.

83.
    Selon la requérante, la défenderesse était tenue de prendre une décision finale depaiement du solde, de suppression ou de réduction des concours, au lieu de lessuspendre, ce qui, de fait, était déjà le cas depuis plusieurs années (voir ci-dessuspoint 43).

84.
    L'existence alléguée d'une procédure pénale devant une juridiction portugaise seraitsans pertinence en l'espèce (voir ci-dessus point 45). Du reste, en se référant àl'acte d'accusation, qui figure en copie à l'annexe 4 du mémoire en défense, ladéfenderesse violerait le secret judiciaire. Cette pièce doit être écartée du dossierselon la requérante.

85.
    La défenderesse conclut au rejet du moyen. La suspension des concours seraitjustifiée par l'ouverture d'une procédure pénale ayant trait aux dossiers litigieux,

actuellement pendante (voir ci-dessus point 46), et dans le cadre de laquelle larequérante a été mise en accusation pour fraude, le 2 avril 1997.

86.
    Elle ajoute que, à supposer même que la certification du DAFSE ait suscité chezla requérante une confiance légitime que le solde lui serait payé, les décisionslitigieuses ne la privent pas de ce droit, puisqu'elles se limitent à porter suspensiondes concours.

Appréciation du Tribunal

87.
    La suspension d'un concours financier initialement octroyé ne préjuge en rien dela décision finale que la Commission prendra sur le paiement du solde. Il s'ensuitqu'une décision de suspension ne prive pas le bénéficiaire du concours du droit derecevoir le montant intégral du solde conformément à sa demande, s'il s'avère quele concours a effectivement été utilisé dans le respect des conditions imposées parla décision d'agrément.

88.
    Par conséquent, les décisions litigieuses ne sont pas de nature à violer le principede protection de la confiance légitime.

89.
    La requérante se prévaut également d'une violation du principe de sécuritéjuridique en raison du dépassement d'un délai raisonnable pour la prise desdécisions litigieuses. Le caractère raisonnable dudit délai doit s'apprécier, enl'espèce, en fonction du temps qui s'est écoulé entre le prononcé de l'arrêtCommission/Branco, cité au point 49 ci-dessus, point 23, et l'adoption des décisionslitigieuses, le 17 février 1998. En effet, dans son arrêt du 13 décembre 1995, leTribunal a clairement déclaré que c'est la Commission qui statue sur les demandesde paiement du solde et que c'est à elle — et à elle seule — qu'incombe le pouvoirde réduire un concours financier du FSE, conformément à l'article 6, paragraphe1, du règlement n° 2950/83. A partir de cette date, la Commission n'a pu ignorerqu'il lui appartenait de statuer, au titre d'une compétence exclusive, sur lesdemandes de paiement de solde qui lui étaient soumises, soit en ordonnant lepaiement intégral dudit solde, soit en prenant des décisions de suspension, deréduction ou de suppression de concours.

90.
    Compte tenu de l'existence d'indices d'irrégularités dans l'utilisation des concoursoctroyés et du fait que la Commission ne disposait pas d'informations suffisantespour calculer le montant exact des dépenses éligibles au 13 décembre 1995, celle-ciaurait pu et dû préparer rapidement des projets de décisions de suspension desconcours. Or, la défenderesse n'a envoyé de tels projets au DAFSE que le 17 avril1997, alors que leur élaboration ne nécessitait pas un travail de grande ampleur niune longue procédure. En conséquence, le délai de plus de seize mois séparant leprononcé de l'arrêt du 13 décembre 1995, précité, de l'envoi de ces projets estexcessif.

91.
    Si le dépassement d'un délai raisonnable peut, dans certaines circonstances,

entraîner l'annulation d'une décision, il ne saurait en aller de même dans le casd'un recours en annulation dirigé contre des décisions de suspension de concours.En effet, si elles étaient annulées au seul motif de leur tardiveté, la défenderessene pourrait, du fait qu'elle ne dispose toujours pas des éléments permettant decalculer les dépenses éligibles, qu'adopter de nouvelles décisions de suspension desconcours en application de l'article 176 du traité. Dans ces circonstances, unedécision d'annulation serait dénuée de toute utilité. Il s'ensuit qu'il n'y a pas lieud'annuler les décisions litigieuses pour violation du principe de sécurité juridiqueen raison du dépassement d'un délai raisonnable pour l'adoption de ces dernières.

Sur le quatrième moyen, tiré d'une violation de droits acquis

Argumentation des parties

92.
    Se référant aux conclusions de l'avocat général M. Darmon sous l'arrêt de la Courdu 7 mai 1991, Interhotel/Commission (C-291/89, Rec. p. I-2257), la requérantesoutient que les décisions d'agréments des demandes de concours ont créé dans sonchef des droits subjectifs et plus particulièrement le droit d'exiger le paiementintégral des concours.

93.
    La défenderesse conteste l'argumentation de la requérante en se référant à l'arrêtBranco/Commission, cité au point 63 ci-dessus (points 97 et 105 à 107).

Appréciation du Tribunal

94.
    S'il est vrai qu'une décision d'agrément fait naître dans le chef du bénéficiaire d'unconcours du FSE un droit d'exiger le paiement de celui-ci, il ne peut en être ainsique dans l'hypothèse où le concours a été utilisé dans le respect des conditionsfixées par les décisions d'agrément.

95.
    Dans le cas d'espèce, il existe des indices sérieux d'irrégularités selon lesquels larequérante n'aurait pas respecté ces conditions, situation justifiant la suspension desconcours.

96.
    Les décisions de suspension ne préjugeant pas de la décision finale de ladéfenderesse sur la demande de paiement du solde, elles ne privent pas larequérante du droit de recevoir le montant intégral du solde conformément à sademande, s'il s'avère que les concours ont été utilisés dans le respect rigoureux desconditions imposées par les décisions d'agrément.

97.
    Il s'ensuit que le moyen tiré d'une violation de droits acquis doit être rejeté.

Sur le cinquième moyen, tiré d'une violation du principe de proportionnalité

Argumentation des parties

98.
    Selon la requérante, la défenderesse a violé le principe de proportionnalité en nerespectant pas son engagement de rembourser, en exécution des décisionsd'agrément, les dépenses exposées par la requérante dans le cadre des actions deformation menées.

99.
    La défenderesse objecte que, compte tenu, d'une part, des doutes exprimés par lesautorités portugaises dès 1989 sur la régularité de certaines opérations réalisées parla requérante dans le cadre desdites actions et, d'autre part, de la procédure pénaleen cours, une autre décision que la suspension eût été prématurée.

Appréciation du Tribunal

100.
    Dans le cas d'espèce, les suspensions opérées par la Commission sont directementliées aux indices sérieux d'irrégularités dont les autorités portugaises lui ont faitpart dès 1989 et ne préjugent pas de la décision finale qui sera adoptée sur lademande de paiement du solde.

101.
    Ces suspensions sont donc conformes au principe de proportionnalité.

102.
    Il s'ensuit que le moyen tiré d'une violation du principe de proportionnalité doitêtre rejeté.

103.
    Il résulte de ce qui précède que le recours en annulation doit être rejeté dans sonintégralité.

Sur les dépens

104.
    Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partiequi succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. En l'espèce, larequérante a succombé dans ses prétentions et la défenderesse a conclu à sacondamnation aux dépens.

105.
    Le Tribunal estime, toutefois, qu'il convient de tenir compte, pour le règlement desdépens, des développements de la procédure ayant conduit à l'adoption desdécisions litigieuses, tels que décrits ci-dessus, notamment aux points 56 et 91,lesquels ont placé la requérante dans un état d'incertitude quant au paiement desconcours financiers qui lui avaient été accordés. Dans de telles circonstances, il nesaurait être tenu rigueur à la requérante d'avoir saisi le Tribunal en vue d'apprécierle comportement de la Commission et d'en tirer des conclusions. Il y a donc lieude constater que ce dernier a favorisé la naissance du litige.

106.
    Or, l'article 87, paragraphe 3, premier et deuxième alinéas, du règlement deprocédure dispose que le Tribunal peut condamner une partie, même gagnante, àrembourser à l'autre partie les frais occasionnés par son propre comportement(arrêt Interhotel/Commission, cité au point 49 ci-dessus, point 82).

107.
    Il y a lieu, par conséquent, de condamner la défenderesse à supporter, outre sespropres dépens, 10 % des dépens exposés par la requérante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête:

1)    Les affaires T-194/97 et T-83/98 sont jointes aux fins de l'arrêt.

2)    Le recours en carence introduit dans l'affaire T-194/97 est irrecevable.

3)    Le recours en annulation introduit dans l'affaire T-83/98 est rejeté.

4)    La défenderesse est condamnée à supporter, outre ses propres dépens, 10 %des dépens exposés par la requérante.

Jaeger
Lenaerts
Azizi

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 27 janvier 2000.

Le greffier

Le président

H. Jung

K. Lenaerts


1: Langue de procédure: le portugais.