Language of document : ECLI:EU:T:2009:37

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU PRÉSIDENT DE LA DEUXIÈME CHAMBRE DU TRIBUNAL

16 février 2009 (*)

« Intervention – Confidentialité »

Dans l’affaire T‑192/08,

Transnational Company « Kazchrome » AO, établie à Actobe (Kazakhstan),

ENRC Marketing AG, établie à Kloten (Suisse),

représentées par Mes L. Ruessmann et A. Willems, avocats,

parties requérantes,

contre

Conseil de l’Union européenne, représenté par M. J.-P. Hix, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

soutenu par

Commission des Communautés européennes, représentée par M. H. van Vliet et Mme K. Talabér-Ritz, en qualité d’agents,

partie intervenante,

ayant pour objet une demande d’annulation partielle du règlement (CE) n° 172/2008 du Conseil, du 25 février 2008, instituant un droit antidumping définitif et portant perception définitive des droits provisoires institués sur les importations de ferrosilicium originaire de la République populaire de Chine, d’Égypte, du Kazakhstan, de l’ancienne République yougoslave de Macédoine et de Russie (JO L 55, p. 6),

LE PRÉSIDENT DE LA DEUXIÈME CHAMBRE DU TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

rend la présente

Ordonnance

 Procédure

1        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 21 mai 2008, les requérantes ont introduit un recours visant à l’annulation du règlement (CE) n° 172/2008 du Conseil, du 25 février 2008, instituant un droit antidumping définitif et portant perception définitive des droits provisoires institués sur les importations de ferrosilicium originaire de la République populaire de Chine, d’Égypte, du Kazakhstan, de l’ancienne République yougoslave de Macédoine et de Russie (JO L 55, p. 6, ci-après le « règlement attaqué »), pour autant que ce règlement les concerne.

2        Par acte déposé au greffe du Tribunal le 1er septembre 2008, Euroalliages, une association internationale sans but lucratif représentant les industries productrices de ferroalliages et autres produits électrométallurgiques de l’Union européenne, a demandé à intervenir dans la présente affaire au soutien des conclusions du Conseil.

3        La demande d’intervention a été signifiée aux parties conformément à l’article 116, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal. Le Conseil et les requérantes ont présenté leurs observations écrites relatives à la demande d’intervention par actes respectivement déposés au greffe du Tribunal les 20 et 28 octobre 2008. Les requérantes ont soulevé des objections à ce que cette demande soit accueillie.

4        Par acte déposé au greffe du Tribunal le 28 octobre 2008, les requérantes ont demandé que, en application de l’article 116, paragraphe 2, du règlement de procédure, certains éléments confidentiels du dossier soient exclus de la communication à Euroalliages. Aux fins de cette communication, les requérantes ont produit une version non confidentielle des mémoires et pièces en question.

 Sur la demande d’intervention

 Arguments de la demanderesse en intervention et des parties

5        À l’appui de sa demande, Euroalliages expose, en premier lieu, que la plainte qu’elle a déposée auprès de la Commission, le 16 octobre 2006, au nom de ses membres, est à l’origine de l’ouverture de la procédure antidumping qui a conduit à l’adoption du règlement attaqué. En deuxième lieu, elle rappelle qu’elle et ses membres ont été activement impliqués dans l’enquête ayant précédé cette adoption. En troisième lieu, Euroalliages fait valoir qu’elle représente la majorité des producteurs européens actifs dans le secteur concerné, à savoir 23 sociétés en charge de 95 % de la production de ferroalliage dans l’Union européenne, et que l’un de ses objectifs statutaires est de protéger les intérêts de ses membres. En quatrième lieu, Euroalliages soutient que l’issue du recours en annulation formé contre le règlement attaqué affectera directement ses membres et l’industrie communautaire du ferrosilicium dans son ensemble, dans la mesure où ce règlement a été adopté parce qu’il a été constaté que l’industrie communautaire a subi un préjudice important causé par les importations faisant l’objet de dumping en provenance du Kazakhstan. Or, si le recours était accueilli, le droit antidumping institué sur le ferrosilicium des requérantes importé du Kazakhstan serait annulé. En cinquième lieu, Euroalliages prétend qu’elle devrait être autorisée à intervenir, dans la mesure où ses compétences relatives au produit concerné et au marché européen sont susceptibles d’aider le Tribunal dans la conduite de la présente affaire.

6        Les requérantes font valoir, en premier lieu, que la référence, dans la demande d’intervention, à l’action en responsabilité intentée par les requérantes contre Euroalliages, devant les juridictions belges, est dénuée de pertinence. En deuxième lieu, s’agissant de l’affirmation d’Euroalliages, selon laquelle elle représente 23 sociétés qui, elles-mêmes, représentent environ 95 % de la production de ferroalliage dans l’Union européenne, les requérantes soutiennent, d’une part, que ce n’est pas la part de la production communautaire totale de ferroalliage représentée par Euroalliages qui importe en l’espèce, mais la part du marché communautaire du ferrosilicium détenue par ses membres. D’autre part, l’affirmation d’Euroalliages, dans sa demande d’intervention, selon laquelle Ferropem, Ferroatlantica, Huta Laziska, OFZ et Vargön Alloys AB sont des producteurs communautaires de ferrosilicium, devrait être rejetée dans la mesure où elle ne repose sur aucune preuve, Vargön Alloys AB n’étant plus membre d’Euroalliages au moment du dépôt de la demande d’intervention et ne produisant plus de ferrosilicium. En troisième lieu, les requérantes contestent l’affirmation d’Euroalliages, selon laquelle sa demande d’intervention devrait être accueillie au motif que ses compétences relatives au produit concerné et au marché européen sont susceptibles d’aider le Tribunal dans la conduite de la présente affaire.

7        Le Conseil considère qu’Euroalliages peut être admise à intervenir au litige.

 Appréciation du président

8        Il convient, tout d’abord, de constater que la demande d’intervention a été introduite conformément à l’article 115 du règlement de procédure du Tribunal. En particulier, la communication au Journal Officiel de l’Union européenne visée à l’article 24, paragraphe 6, du règlement de procédure ayant été publiée le 2 août 2008, la demande d’intervention a été présentée dans le délai prévu à l’article 115, paragraphe 1, du même règlement.

9        Ensuite, s’agissant des objections soulevées par les requérantes concernant le bien-fondé de la demande d’intervention, il importe de rappeler, tout d’abord, que, conformément à l’article 40 du statut de la Cour, applicable à la procédure devant le Tribunal en vertu de l’article 53, premier alinéa, de ce même statut, le droit d’intervenir dans un litige soumis au Tribunal appartient à toute personne justifiant d’un intérêt à la solution du litige, à l’exclusion des litiges entre États membres, entre institutions des Communautés ou entre États membres, d’une part, et institutions des Communautés, d’autre part.

10      Selon la jurisprudence, l’association représentative ayant pour objet la protection de ses membres, qui demande à intervenir dans un litige soulevant des questions de principe de nature à affecter ces derniers, justifie d’un tel intérêt. Cette interprétation large du droit d’intervention vise à permettre de mieux apprécier le cadre des affaires tout en évitant une multiplicité d’interventions individuelles qui compromettraient l’efficacité et le bon déroulement de la procédure (ordonnances du président de la Cour du 17 juin 1997, National Power et PowerGen/British Coal et Commission, C‑151/97 P(I) et C‑157/97 P(I), Rec. p. I‑3491, point 66 ; du 28 septembre 1998, Pharos/Commission, C‑151/98 P, Rec. p. I‑5441, point 6, et du président de la quatrième chambre du Tribunal du 9 mars 2005, Microsoft/Commission, T‑201/04, non publiée au Recueil, point 31).

11      Plus particulièrement, une association peut être admise à intervenir dans une affaire si elle est représentative d’un nombre important d’opérateurs actifs dans le secteur concerné, ses objets incluent celui de la protection des intérêts de ses membres, l’affaire peut soulever des questions de principe affectant le fonctionnement du secteur concerné et, donc, les intérêts de ses membres peuvent être affectés dans une mesure importante par l’arrêt à venir (ordonnance du Tribunal du 26 février 2007, Akzo Nobel Chemicals et Akcros Chemicals/Commission, T‑253/03, Rec. p. II‑479, point 15, et la jurisprudence citée).

12      Enfin, s’agissant du domaine de l’antidumping, il y a lieu de rappeler qu’il ne saurait être sérieusement contesté qu’une association qui a introduit la plainte sur le fondement de laquelle le règlement instituant des droits antidumping définitifs a été adopté et qui a activement participé à la procédure administrative ayant abouti à l’adoption de ce règlement a un intérêt à la solution du litige (voir, en ce sens, ordonnance du Tribunal du 5 mai 2008, Zheijiang Harmonic Hardware Products/Conseil, T‑274/07, non publié au Recueil, point 11).

13      En l’espèce, il convient de constater, en premier lieu, qu’Euroalliages est représentative d’un nombre important d’opérateurs actifs dans le secteur concerné. En effet, il n’est pas contesté, ainsi qu’il ressort du deuxième considérant du règlement (CE) n° 994/2007 de la Commission, du 28 août 2007, instituant un droit antidumping provisoire sur les importations de ferrosilicium originaire de la République populaire de Chine, d’Égypte, du Kazakhstan, de l’ancienne République yougoslave de Macédoine et de Russie (JO L 223, p. 1), que les membres d’Euroalliages représentaient plus de 90 % de la production communautaire de ferrosilicium, au moment du dépôt de la plainte auprès de la Commission. Si les requérantes prétendent, dans leurs observations sur la demande d’intervention, que Vargön Alloys AB n’était plus membre d’Euroalliages, au moment du dépôt de la demande d’intervention, elles ne démontrent toutefois pas que, au-delà de cette société, les membres d’Euroalliages se sont retirés de cette association dans une proportion telle qu’elle ne peut plus être considérée comme représentative d’un nombre important d’opérateurs actifs dans le secteur concerné.

14      En deuxième lieu, il ressort des statuts d’Euroalliages que cette association a comme objectif la protection des intérêts de ses membres.

15      En troisième lieu, dans la mesure où le règlement attaqué institue des droits antidumping définitifs à la suite de la constatation de l’existence d’un dumping ayant causé un préjudice à l’industrie communautaire, lequel a été déterminé, notamment, sur la base de données fournies par les membres d’Euroalliages, ainsi qu’il ressort des considérants 11 et 78 du règlement n° 994/2007, force est de constater que ces derniers peuvent être affectés dans une mesure importante par l’arrêt à venir.

16      En quatrième lieu, il n’est pas contesté qu’Euroalliages a introduit la plainte sur le fondement de laquelle le règlement attaqué a été adopté et a activement participé à la procédure administrative ayant abouti à l’adoption dudit règlement.

17      Il convient donc de conclure qu’Euroalliages a un intérêt à la solution du litige.

18      Cette conclusion ne saurait être remise en cause par les autres arguments des requérantes. D’une part, s’agissant de l’argument tiré de l’absence de pertinence de la mention de l’action en responsabilité introduite contre Euroalliages, devant les juridictions belges, force est de constater qu’Euroalliages fait référence à cette action dans le cadre du rappel du contexte procédural du présent litige et ne tire aucun argument relatif au bien-fondé de sa demande d’intervention de cette référence. D’autre part, s’agissant de l’argument tiré de ce que l’expertise d’Euroalliages concernant le ferrosilicium ne constitue pas une base juridique permettant d’admettre l’intervention, il convient de constater que ce n’est qu’après avoir démontré qu’elle possède un intérêt à la solution du litige qu’Euroalliages a fait valoir que son expertise relative au produit concerné pourrait être utile au Tribunal.

19      Eu égard à ce qui précède, il y a lieu de rejeter les objections des requérantes et d’accueillir la demande d’intervention.

 Sur la demande de traitement confidentiel

20      À ce stade, la communication à Euroalliages des actes de procédure signifiés et à signifier aux parties doit être limitée à une version non confidentielle de celles-ci. Une décision sur le bien-fondé de la demande de confidentialité sera prise ultérieurement.

 Sur les dépens

21      L’article 87, paragraphe 1, du règlement de procédure prévoit qu’il est statué sur les dépens dans l’arrêt ou l’ordonnance qui met fin à l’instance.

22      À ce stade de l’instance, les dépens doivent donc être réservés.

Par ces motifs,

LE PRÉSIDENT DE LA DEUXIÈME CHAMBRE DU TRIBUNAL

ordonne :

1)      Euroalliages est admise à intervenir dans l’affaire T‑192/08 au soutien des conclusions du Conseil.

2)      Le greffier communiquera à Euroalliages la version non confidentielle de chaque acte de procédure signifié aux parties.

3)      Un délai sera fixé à Euroalliages pour présenter ses observations éventuelles sur la demande de traitement confidentiel. La décision sur le bien-fondé de cette demande est réservée.

4)      Un délai sera fixé à Euroalliages pour présenter un mémoire en intervention, sans préjudice de la possibilité de le compléter ultérieurement, le cas échéant, à la suite d’une décision sur le bien-fondé de la demande de traitement confidentiel.

5)      Les dépens sont réservés.

Fait à Luxembourg, le 16 février 2009.

Le greffier

 

      Le président

E. Coulon

 

      I. Pelikánová


* Langue de procédure : l’anglais.