Language of document : ECLI:EU:T:2021:720

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (dixième chambre)

20 octobre 2021 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne figurative Strong like nature – Marque de l’Union européenne figurative antérieure STRONG NATURE – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑352/20,

St. Hippolyt Holding GmbH, établie à Dielheim (Allemagne), représentée par Me M. Gail, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme L. Lapinskaite et M. V. Ruzek, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Preduzeće za proizvodnju, unutrašnju i spoljnu trgovinu Elephant Co. d.o.o., établie à Belgrade (Serbie), représentée par Me D. Cañadas Arcas, avocate,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’EUIPO du 27 mars 2020 (affaire R 1909/2019-1), relative à une procédure d’opposition entre Preduzeće za proizvodnju, unutrašnju i spoljnu trgovinu Elephant et St. Hippolyt Holding,

LE TRIBUNAL (dixième chambre),

composé de M. A. Kornezov (rapporteur), président, Mme K. Kowalik‑Bańczyk et M. G. Hesse, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 5 juin 2020,

vu l’opposition de l’intervenante à la langue de la requête déposée au greffe du Tribunal le 10 août 2020,

vu le constat du greffe du Tribunal du 14 août 2020 quant à l’utilisation de la langue de la décision attaquée comme langue de la procédure en application de l’article 45, paragraphe 4, sous c), du règlement de procédure du Tribunal,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 30 novembre 2020,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 13 octobre 2020,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 17 novembre 2017, la requérante, St. Hippolyt Holding GmbH, dont le nom social à cette date était St. Hippolyt Nutrition Concepts Marketing- und Vertriebs, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1).

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent notamment de la classe 5 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Compléments alimentaires et préparations diététiques ; préparations et articles d’hygiène ; médicaments à usage vétérinaire ; préparations médicales ; compléments nutritionnels à usage vétérinaire ; préparations de vitamines ; produits vétérinaires ; compléments alimentaires à usage vétérinaire ».

4        La demande de marque a été publiée au Bulletin des marques de l’Union européenne no 2018/004, du 8 janvier 2018.

5        Le 3 avril 2018, l’intervenante, Preduzeće za proizvodnju, unutrašnju i spoljnu trgovinu Elephant Co. d.o.o., a formé opposition, au titre de l’article 46 du règlement 2017/1001, à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits relevant de la classe 5 visés au point 3 ci‑dessus.

6        L’opposition était fondée sur la marque de l’Union européenne figurative enregistrée sous le numéro 6365233, pour les « substances diététiques à usage médical », relevant de la classe 5, représentée ci-après :

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7        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

8        Le 25 juin 2019, la division d’opposition a, d’une part, accueilli l’opposition au motif qu’il existait un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 en ce qui concerne les « compléments alimentaires et préparations diététiques ; médicaments à usage vétérinaire ; préparations médicales ; compléments nutritionnels à usage vétérinaire ; préparations de vitamines ; produits vétérinaires ; compléments alimentaires à usage vétérinaire » et, d’autre part, rejeté l’opposition en ce qui concerne « préparations et articles d’hygiène ».

9        Le 27 août 2019, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 66 à 71 du règlement 2017/1001, contre la décision de la division d’opposition, dans la mesure où celle-ci avait accueilli l’opposition.

10      Par décision du 27 mars 2020 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours. En substance, elle a relevé que les produits visés par les signes en conflit faisant l’objet du recours, étaient identiques ou similaires et que ces marques étaient globalement similaires à un degré moyen. Ainsi, compte tenu des facteurs pertinents et de leur interdépendance ainsi que du « principe du souvenir imparfait », il existerait, pour une partie importante du public pertinent et malgré son niveau d’attention élevé, un risque de confusion quant à l’origine économique des produits en cause.

 Conclusions des parties

11      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

12      L’EUIPO et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

13      À l’appui de son recours, la requérante invoque un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001. Elle reproche à la chambre de recours d’avoir conclu à tort à l’existence d’un risque de confusion au sens dudit article.

14      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

15      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

16      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

17      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des signes en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

18      Lorsque la protection de la marque antérieure s’étend à l’ensemble de l’Union européenne, il y a lieu de prendre en compte la perception des signes en conflit par le consommateur des produits en cause sur ce territoire. Toutefois, il convient de rappeler que, pour refuser l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne, il suffit qu’un motif relatif de refus au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 existe dans une partie de l’Union [voir, en ce sens, arrêt du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 76 et jurisprudence citée].

19      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’apprécier si c’est à juste titre que la chambre de recours a estimé qu’il existait, en l’espèce, un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

 Sur le public pertinent

20      La chambre de recours a entériné l’appréciation de la division d’opposition selon laquelle le public pertinent pour les produits visés par les signes en conflit est constitué en partie du grand public et en partie des professionnels issus des secteurs médical et vétérinaire, qui prescrivent ces produits. Au point 20 de la décision attaquée, elle a indiqué que, étant donné que lesdits produits étaient liés à la santé, le niveau d’attention pouvait varier de moyen à élevé. Au point 43 de la décision attaquée, la chambre de recours a précisé que, pour une partie importante du public pertinent, ledit niveau d’attention serait « plus élevé ».

21      Selon la requérante, le public pertinent serait composé du grand public, qui cultive des produits frais en vue d’un usage horticole ou de l’alimentation d’animaux domestiques, ainsi que des professionnels du secteur de l’agriculture. Le niveau d’attention serait moyen. La requérante maintient, en outre, qu’elle serait très connue par le consommateur moyen dans le secteur équestre, de sorte que ses produits feraient toujours l’objet d’un achat « ciblé ». Par ailleurs, selon elle, dès lors que les signes en conflit seraient des marques de l’Union européenne, dont les titulaires sont allemands, le risque de confusion devrait être examiné non seulement pour l’Allemagne, mais aussi pour l’ensemble de l’Union.

22      Premièrement, l’allégation de la requérante selon laquelle le public pertinent serait composé du grand public qui cultive des produits frais en vue d’un usage horticole ou de l’alimentation d’animaux domestiques, ainsi que des professionnels du secteur de l’agriculture, ne saurait prospérer. En effet, force est de constater que certaines des catégories des produits en cause dans la présente affaire sont très larges et ne sont limitées ni au secteur horticole ou agricole, ni à l’alimentation d’animaux, de sorte que le public pertinent ne saurait être défini en fonction desdits secteurs. Tel est le cas, par exemple des « compléments alimentaires et préparations diététiques », des « préparations médicales » ou encore des « préparations de vitamines », visés par la demande de marque et des « substances diététiques à usage médical », couvertes par la marque antérieure. Dans de telles circonstances, il appartient à l’EUIPO de prendre en compte le consommateur moyen desdites catégories et non un type spécifique de consommateurs de certains produits au sein d’une catégorie plus large de produits [voir, en ce sens, arrêt du 19 janvier 2017, Stock Polska/EUIPO – Lass & Steffen (LUBELSKA), T‑701/15, non publié, EU:T:2017:16, point 24 et jurisprudence citée].

23      Deuxièmement, l’éventuelle renommée ou notoriété de la marque demandée est sans incidence sur la définition du public pertinent et, plus généralement, sur l’appréciation de l’existence d’un risque de confusion, contrairement à celle de la marque antérieure (voir, en ce sens, arrêt du 3 septembre 2009, Aceites del Sur-Coosur/Koipe, C‑498/07 P, EU:C:2009:503, point 84). Par ailleurs, pour autant que la requérante entendrait se prévaloir d’une stratégie commerciale consistant à utiliser la marque demandée en tant que slogan auprès d’une catégorie cible de consommateurs dans le secteur équestre, il importe de noter que le public pertinent doit être défini en l’espèce en tenant compte de la catégorie des produits désignés dans la demande d’enregistrement de la marque en cause et non pas en fonction des consommateurs visés par la requérante dans le cadre d’une telle stratégie commerciale [voir, en ce sens, arrêt du 29 mars 2017, J & Joy/EUIPO – Joy-Sportswear (J&JOY), T‑389/15, non publié, EU:T:2017:231, points 25 à 27].

24      Troisièmement, force est de relever que les produits en cause dans le cas d’espèce sont essentiellement des compléments alimentaires et produits pharmaceutiques à usage humain et vétérinaire, concernant à l’évidence la santé des humains et des animaux, raison pour laquelle les acheteurs de ces produits les choisiront avec attention. En effet, de tels produits peuvent être destinés tant à des professionnels qu’à des consommateurs finals qui feront preuve d’un niveau d’attention élevé s’agissant de produits et de services liés à leur état de santé [voir arrêt du 8 octobre 2014, Laboratoires Polive/OHMI – Arbora & Ausonia (DODIE), T‑77/13, non publié, EU:T:2014:862, point 25 et jurisprudence citée] ou à celui de leurs animaux [arrêt du 15 mars 2012, Cadila Healthcare/OHMI – Novartis (ZYDUS), T‑288/08, non publié, EU:T:2012:124, point 36].

25      Partant, le constat de la chambre de recours, selon lequel une partie importante du public pertinent fait preuve d’un niveau d’attention élevé doit être approuvé, mais également étendu à l’ensemble du public pertinent, incluant tant le grand public que les professionnels issus des secteurs médical et vétérinaire.

26      Quatrièmement, il y a lieu de préciser que, conformément à la jurisprudence citée au point 18 ci-dessus, la marque antérieure étant une marque de l’Union européenne, il y a lieu de prendre en compte la perception des signes en conflit par le consommateur des produits en cause sur ce territoire. Ainsi, le fait que le titulaire de cette marque soit une société allemande est, contrairement à ce que suggère la requérante, dépourvue de pertinence à cet égard. En revanche, ainsi qu’il ressort de cette jurisprudence, la chambre de recours pouvait examiner l’opposition fondée sur cette marque en recherchant si le motif relatif de refus au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 existait dans une partie de l’Union, c’est-à-dire en se concentrant sur la perception du consommateur anglophone, étant donné que les éléments verbaux des signes en conflit appartiennent au vocabulaire de la langue anglaise.

27      Il s’ensuit que les arguments de la requérante relatifs à la définition du public pertinent retenue par la chambre de recours doivent être écartés.

 Sur la comparaison des produits

28      Aux points 22 et 23 de la décision attaquée, la chambre de recours a précisé faire sienne la conclusion de la division d’opposition, selon laquelle les produits en cause, relevant tous de la classe 5, étaient identiques ou similaires, en renvoyant aux motifs de la décision de cette division et en précisant que la requérante ne contestait pas cette conclusion.

29      À cet égard, il ressort du point 8 de la décision attaquée, que les « compléments alimentaires et préparations diététiques ; compléments nutritionnels à usage vétérinaire ; préparations de vitamines ; compléments alimentaires à usage vétérinaire », désignés par la marque demandée, ont été considérés comme identiques aux « substances diététiques à usage médical », désignés par la marque antérieure, soit parce qu’ils figurent de manière identique dans les deux listes, soit parce que les produits désignés par la marque antérieure comprennent les produits visés par la marque demandée, ou se chevauchent.

30      Quant aux « médicaments à usage vétérinaire ; préparations médicales ; produits vétérinaires » désignés par la marque demandée, ceux-ci seraient, selon la chambre de recours, utilisés, de manière générale, pour améliorer l’état de santé des êtres humains ou des animaux comme c’est le cas des « substances diététiques à usage médical » désignés par la marque antérieure. Par conséquent, la finalité générale de ces produits serait similaire, tous étant des produits pour la santé. Lesdits produits seraient, en outre, destinés aux mêmes consommateurs et pourraient être achetés dans les mêmes magasins et partager les mêmes canaux de distribution.

31      La requérante ne conteste pas de manière étayée ces considérations. Elle se borne à faire valoir que ses canaux de distribution et ceux de l’intervenante ne seraient pas les mêmes dans la mesure où cette première distribuerait ses produits directement aux propriétaires de chevaux via son site Internet ou par l’intermédiaire de magasins spécialisés dans les articles équestres. En outre, la requérante indique, dans différentes parties de la requête, tantôt que les produits en cause sont « suffisamment distingués », tantôt qu’ils sont d’une « légère similitude » ou encore qu’ils sont « identiques », sans pour autant avancer un quelconque argument à cet égard.

32      S’agissant de la prétendue différence dans les canaux de distribution des produits en cause, cette différence concerne, selon l’argument de la requérante, non pas les canaux de distribution des produits concernés, tels que visés dans la demande d’enregistrement de la marque contestée et dans l’enregistrement de la marque antérieure, mais les canaux de distribution des produits effectivement commercialisés par elle. Or, selon la jurisprudence, la similitude des produits visés par les signes en conflit ne doit pas être évaluée au regard des produits effectivement commercialisés sous ces signes (voir, en ce sens, arrêt du 29 mars 2017, J&JOY, T‑389/15, non publié, EU:T:2017:231, point 34). Cet argument de la requérante est, par conséquent, non-fondé.

33      Quant aux affirmations de la requérante faisant référence à différents degrés de similitude des produits en cause, celles-ci sont, comme le fait valoir à juste titre l’EUIPO, contradictoires et ne peuvent qu’être rejetées comme étant irrecevables, dès lors qu’elles ne répondent pas aux exigences de clarté et de précision requises en vertu de l’article 21, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, applicable à la procédure devant le Tribunal conformément à l’article 53, premier alinéa, du même statut, et de l’article 177, paragraphe 1, sous d), du règlement de procédure du Tribunal [voir, en ce sens, arrêt du 17 janvier 2019, ETI Gıda Sanayi ve Ticaret/EUIPO – Grupo Bimbo (ETI Bumbo), T‑368/18, non publié, EU:T:2019:15, point 19].

34      Partant, il convient de rejeter les arguments de la requérante relatifs à la comparaison des produits en cause.

 Sur la comparaison des signes en conflit sur les plans visuel, phonétique et conceptuel

35      La requérante conteste l’appréciation des aspects visuel, phonétique et conceptuel de la comparaison des signes en conflit opérée par la chambre de recours et, par suite, l’appréciation par celle-ci de l’impression d’ensemble produite par ces signes.

36      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

37      Selon la jurisprudence, deux marques sont similaires lorsque, du point de vue du public pertinent, il existe entre elles une égalité au moins partielle en ce qui concerne un ou plusieurs aspects pertinents, à savoir les aspects visuel, phonétique et conceptuel [voir arrêt du 15 décembre 2010, Novartis/OHMI – Sanochemia Pharmazeutika (TOLPOSAN), T‑331/09, EU:T:2010:520, point 43 et jurisprudence citée].

38      En outre, l’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

39      En l’espèce, il convient de rappeler que les signes en conflit sont les suivants : 

Marque demandée

Marque antérieure

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40      La chambre de recours n’a pas estimé, avant de procéder à la comparaison visuelle, phonétique et conceptuelle des signes en conflit, que ceux-ci comportaient un élément dominant ni n’a décelé l’existence d’éléments non-distinctifs. La requérante n’avance pas non plus d’arguments en ce sens.

41      Cela étant précisé, il convient de relever que la marque demandée est composée par trois éléments verbaux et est dépourvue d’élément figuratif particulier. L’élément verbal « strong » figure dans la partie supérieure du signe et apparaît en caractères noirs, en italiques, dans une police de caractères standard et sa première lettre est une majuscule. Les éléments « like » et « nature » apparaissent au-dessous de ce premier, dans une taille plus petite et sont représentés en caractères noirs et dans une police de caractères standard.

42      La marque antérieure est composée, quant à elle, par deux éléments verbaux et des éléments figuratifs. Dans la partie gauche du signe figure un carré bleu à l’intérieur duquel est représenté un arbre vert bordé de blanc. Les éléments verbaux « strong » et « nature » figurent à droite dudit élément figuratif et occupent la majeure partie de la marque antérieure. L’élément « strong », représenté en lettres majuscules, dans une police de caractères standard et en couleur bleu, est placé au-dessus de l’élément « nature », de la même taille, dans la même police de caractères et en couleur verte.

43      En premier lieu, en ce qui concerne l’aspect visuel des signes en conflit, la chambre de recours a considéré, au point 28 de la décision attaquée, s’agissant des éléments verbaux des signes en conflit, que les éléments « strong » et « nature » coïncident, apparaissent dans le même ordre et se placent tous les deux l’un au-dessus de l’autre. La seule différence entre les éléments verbaux des signes en conflit serait la préposition « like » qui figure dans la marque demandée. En revanche, selon la chambre de recours, les signes en conflit auraient une apparence clairement différente puisque la marque demandée serait constituée exclusivement d’éléments verbaux tandis que la marque antérieure serait composée également d’éléments figuratifs visibles, à savoir l’arbre, le carré et les couleurs bleu et vert. Ainsi, dans la mesure où les consommateurs seraient plus à même de reconnaître les marques, sur le plan visuel, grâce à des éléments verbaux plutôt qu’à des images ou des éléments figuratifs, le fait que les signes présentent d’importantes similitudes au niveau de leurs éléments textuels aurait plus d’influence dans la comparaison que les différences concernant les éléments figuratifs. En conséquence, la chambre de recours a conclu, en substance, à une faible similitude visuelle des signes en conflit.

44      La requérante estime que les signes en conflit ne sont pas similaires sur le plan visuel. Elle fait valoir que la marque antérieure serait un signe figuratif composé d’un mot et suggère que les « syllabes et combinaisons des lettres » des signes en conflit seraient agencées de manière visuellement différente et que la configuration des signes en conflit serait différente.

45      À cet égard, il convient d’observer que, d’une part, ainsi que constaté au point 42 ci‑dessus, la marque antérieure contient deux éléments verbaux, et non pas un seul, lesquels occupent la majeure partie du signe et sont clairement visibles. D’autre part, les éléments verbaux des signes en conflit « strong » et « nature » sont identiques et positionnés de manière similaire dans la structure desdits signes, à savoir « strong » au dessus de « nature ».

46      Pour le reste, la requérante n’explique aucunement à quelles « syllabes et combinaisons des lettres » agencées différemment elle se réfère ni ne précise la teneur des différences alléguées à cet égard. Ce grief doit, dès lors, être rejeté comme irrecevable puisqu’il ne répond pas aux exigences de clarté et de précision rappelées au point 33 ci‑dessus.

47      En revanche, il y a lieu de relever que la chambre de recours a tenu compte des différences entre les signes en conflit en relevant que la marque demandée contenait un élément verbal de plus que la marque antérieure, à savoir la préposition « like » et que l’apparence des deux marques était « clairement différente », en raison de l’effet visuel produit par les éléments figuratifs de la marque antérieure. Cependant, elle a également relevé, à juste titre, des similitudes entre les signes en conflit, consistant dans la coïncidence des deux éléments verbaux clairement visibles « strong » et « nature », positionnés de manière similaire dans la structure desdits signes.

48      Ainsi, la chambre de recours a conclu, à juste titre, à l’existence dans l’impression d’ensemble produite par ces marques, d’une similitude visuelle faible.

49      En deuxième lieu, s’agissant de l’aspect phonétique des signes en conflit, la chambre de recours a constaté, au point 35 de la décision attaquée, l’existence d’une similitude phonétique élevée entre les signes en conflit au motif que deux des éléments prononcés de ceux-ci seraient prononcés de manière identique, à savoir « strong » et « nature », la seule différence étant la syllabe « like » qui, dans la marque demandée, se prononcerait entre lesdits éléments.

50      La requérante ne conteste pas de façon étayée et compréhensible cette constatation de la chambre de recours. Elle se borne à tirer argument à cet égard de l’arrêt du 22 septembre 2011, ara/OHMI – Allrounder (A avec deux motifs triangulaires) (T‑174/10, non publié, EU:T:2011:519). Toutefois, l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt n’est en rien comparable au cas d’espèce. En effet, dans ledit arrêt, le Tribunal a constaté que la marque contestée était caractérisée par un graphisme très particulier et que, par conséquent, le public pertinent aurait tendance à la décrire et non à la prononcer, de sorte qu’une comparaison sur le plan phonétique était exclue (voir, en ce sens, arrêt du 22 septembre 2011, A avec deux motifs triangulaires, T‑174/10, non publié, EU:T:2011:519, point 32). En revanche, dans la présente affaire, tant la marque demandée que la marque antérieure contiennent des éléments verbaux clairement identifiables et prononçables, de sorte que la comparaison phonétique entre les signes en conflit est tout à fait pertinente.

51      Il convient de relever, par ailleurs, que les signes en conflit ont en commun la prononciation des mots « strong » et « nature », suivant le même ordre et ayant un rythme de prononciation similaire, ce qui aboutit à leur conférer une sonorité très proche l’une de l’autre. Dès lors, c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu à l’existence d’une similitude phonétique élevée des signes en conflit.

52      En troisième lieu, s’agissant de l’aspect conceptuel des signes en conflit, la chambre de recours a considéré que les concepts véhiculés par les expressions « strong like nature » et « strong nature », prises dans leur signification en anglais, sont très similaires, dans la mesure où l’adjectif « strong » et le substantif « nature » sont les éléments porteurs de signification, tandis que la préposition « like » de la marque demandée n’aurait pas de valeur ajoutée vis-à-vis de ce message. Par conséquent, cette chambre a conclu à une similitude conceptuelle élevée ente les signes en conflit.

53      La requérante n’avance aucun argument concret pour infirmer cette conclusion. Elle suggère uniquement que, sur le plan conceptuel, toute confusion serait exclue. Cette allégation n’est pourtant pas étayée par des éléments concrets susceptibles de remettre en cause la conclusion de la chambre de recours quant à la similitude élevée entre les marques en conflit sur le plan conceptuel et doit, dès lors, être rejetée pour les raisons déjà exposées au point 33 ci-dessus.

54      Il s’ensuit que la chambre de recours a conclu à juste titre que les signes en conflit sont globalement similaires, puisque, du point de vue du public pertinent, il existait une similitude faible entre ceux-ci sur le plan visuel et une similitude élevée sur les plans phonétique et conceptuel.

 Sur le caractère distinctif de la marque antérieure

55      La chambre de recours a considéré, à l’instar de la division d’opposition, que la marque antérieure présentait un caractère distinctif intrinsèque moyen en raison de la combinaison particulière d’éléments verbaux, d’éléments figuratifs et de couleurs.

56      La requérante fait valoir que la marque antérieure présente un caractère distinctif faible, voire nul, et que, par conséquent, même des différences légères entre les signes en conflit seraient suffisantes pour créer une impression d’ensemble différente de celle-ci.

57      À titre liminaire, il convient de rappeler que le fait qu’une marque ait été enregistrée implique qu’elle jouit d’un minimum de caractère distinctif intrinsèque, puisque l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) no 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [devenu article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001] exclut l’enregistrement d’une marque dépourvue de caractère distinctif. Or, un demandeur de marque ne peut, dans le cadre d’une procédure d’opposition, remettre en cause la validité de ladite marque antérieure. S’agissant plus particulièrement d’une marque de l’Union européenne antérieure, comme en l’espèce, la remise en cause de cette validité ne peut se faire que dans le cadre d’une demande en nullité en vertu de l’article 59 du règlement 2017/1001 [arrêt du 9 septembre 2020, Gothe et Kunz/EUIPO – Aldi Einkauf (FAIR ZONE), T‑589/19, non publié, EU:T:2020:397, point 72].

58      En l’espèce, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur d’appréciation en considérant que la marque antérieure était dotée d’un caractère distinctif moyen, entérinant ainsi les conclusions de la division d’opposition. À cet égard, cette dernière a considéré, à juste titre, que, en dépit de la présence d’éléments composant la marque antérieure qui, pris individuellement, pouvaient être considérés comme ayant un caractère distinctif faible, le positionnement et la combinaison particulière de ces éléments attribuaient à ladite marque un caractère distinctif moyen. En effet, la présentation graphique des éléments figuratifs et des éléments verbaux, ainsi que le jeu des couleurs employé dans la marque antérieure sont à même de conférer à celle-ci un caractère distinctif intrinsèque normal.

59      Or, la requérante n’avance aucun argument étayé tendant à infirmer cette conclusion et à établir que la marque antérieure présenterait un caractère distinctif faible, voire nul.

60      Dans ces circonstances, il y a lieu de conclure que la chambre de recours a constaté à juste titre que la marque antérieure possédait un caractère distinctif moyen.

 Sur le risque de confusion

61      L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement (arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, VENADO avec cadre e.a., T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 74).

62      Par ailleurs, il résulte d’une jurisprudence bien établie que, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de tenir compte du souvenir imparfait des marques concernées par le consommateur moyen (voir ordonnance du 12 janvier 2017, Staywell Hospitality Group/EUIPO, C‑440/16 P, non publiée, EU:C:2017:16, point 5 et jurisprudence citée).

63      En l’espèce, la chambre de recours a considéré que, compte tenu des facteurs pertinents et de leur interdépendance ainsi que du « principe du souvenir imparfait », il existait un risque de confusion pour une partie importante du public pertinent quant à l’origine commerciale des produits en cause portant les signes en conflit.

64      La requérante fait valoir que les impressions d’ensemble des signes en conflit sont différentes, ce qui exclurait le risque de confusion. La différence de couleurs des signes en conflit, ainsi que les autres différences sur les plans visuel, phonétique et conceptuelle, seraient suffisantes pour exclure tout risque de confusion.

65      L’EUIPO et l’intervenante contestent ces arguments.

66      Force est d’observer, d’une part, que, comme cela ressort des points 28 à 34 ci-dessus, les produits visés par la marque demandée et ceux visés par la marque antérieure ont, à juste titre, été considérés comme identiques ou similaires. D’autre part, comme il ressort des points 35 à 54 ci-dessus, les signes en conflit présentent une similitude faible sur le plan visuel et une similitude élevée sur les plans phonétique et conceptuel et sont ainsi globalement similaires.

67      Si la requérante fait valoir que les différences dans les impressions d’ensemble créées par les signes en conflit seraient susceptibles de contrebalancer les similitudes constatées, le seul argument concret qu’elle avance à cet égard est tiré d’une différence dans les couleurs des signes en conflit. Or, d’une part, la représentation graphique des lettres dans des couleurs différentes n’est pas un facteur déterminant susceptible d’exclure l’impression de similitude entre deux signes figuratifs qui coïncident largement, comme en l’espèce, dans leurs éléments verbaux [voir, en ce sens, arrêt du 24 octobre 2017, Keturi kambariai/EUIPO – Coffee In (coffee inn), T‑202/16, non publié, EU:T:2017:750, point 101 et jurisprudence citée]. D’autre part, l’élément figuratif, composé, en substance, d’un arbre vert bordé de blanc dans un carré bleu, n’est pas susceptible, à lui seul, de détourner l’attention du public pertinent des éléments verbaux de la marque antérieure, parfaitement lisibles, de grande taille et occupant la majeure partie de celle-ci, lesquels coïncident avec deux des trois éléments verbaux de la marque demandée.

68      De surcroît, étant donné que le caractère distinctif de la marque antérieure est considéré comme étant moyen, le public pertinent, pourrait, comme le souligne à bon droit la chambre de recours, raisonnablement penser que la marque demandée est une version de la marque antérieure privée d’éléments figuratifs. Le seul fait que le niveau d’attention du public pertinent est élevé n’est pas, dans les circonstances de l’espèce, susceptible d’infirmer cette conclusion.

69      Par ailleurs, la requérante fait référence à trois arrêts qui démontreraient, selon elle, que même des différences minimes entre les signes en conflit suffiraient pour que le signe, dont l’enregistrement est demandé, produise une impression d’ensemble différente. Il s’agit des arrêts du 22 septembre 2011, A avec deux motifs triangulaires, (T‑174/10, non publié, EU:T:2011:519) ; du 21 novembre 2018, Shenzhen Jiayz Photo Industrial/EUIPO – Seven (SEVENOAK), (T‑339/17, non publié, EU:T:2018:815), et du 29 novembre 2018, Septona/EUIPO – Intersnack Group (welly) (T‑763/17, non publié, EU:T:2018:861). Toutefois, contrairement à ce qu’allègue la requérante, dans ces arrêts, les différences entre les signes en conflit relevées par le Tribunal n’étaient pas qualifiées de « minimes ». Au contraire, ces différences créaient des impressions d’ensemble différentes. Or, en l’occurrence, le Tribunal considère, pour les raisons exposées notamment aux points 66 à 68 ci-dessus, que les différences entre les signes en conflit ne sont pas suffisantes pour produire des impressions d’ensemble différentes. En tout état de cause, la requérante ne précise pas pourquoi elle considère que les enseignements découlant de ces arrêts seraient transposables au cas d’espèce. De surcroît, comme le fait valoir à juste titre l’EUIPO, les signes ayant fait l’objet desdits arrêts et le contexte factuel dans lequel ils s’inscrivent ne sont en rien comparables à ceux faisant l’objet du présent litige.

70      Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, et en application du principe d’interdépendance rappelé au point 61 ci-dessus, il y a lieu de conclure que c’est à bon droit que la chambre de recours a estimé qu’il existait un risque de confusion quant à l’origine des produits dans l’esprit du public pertinent. Il s’ensuit que le moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 2017/1001, doit être écarté et que, partant, le recours doit être rejeté.

 Sur les dépens

71      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

72      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (dixième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      St. Hippolyt Holding GmbH est condamnée aux dépens.

Kornezov

Kowalik-Bańczyk

Hesse

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 20 octobre 2021.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.