Language of document : ECLI:EU:T:2022:627

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre élargie)

12 octobre 2022 (*)

« Union économique et monétaire – Union bancaire – Redressement et résolution des établissements de crédit – Mesures d’intervention précoce – Décision de la BCE de placer Banca Carige sous administration temporaire – Recours en annulation – Recours formé par un actionnaire – Qualité pour agir – Intérêt distinct de celui de la banque – Recevabilité – Erreur de droit dans la détermination de la base juridique – Interprétation conforme du droit national par le juge de l’Union – Limite – Interdiction d’interpréter le droit national contra legem »

Dans l’affaire T‑502/19,

Francesca Corneli, demeurant à Velletri (Italie), représentée par Mes M. Condinanzi, L. Boggio et F. Ferraro, avocats,

partie requérante,

contre

Banque centrale européenne (BCE), représentée par Mmes C. Hernández Saseta, A. Pizzolla et G. Marafioti, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenue par

Commission européenne, représentée par MM. V. Di Bucci, D. Triantafyllou et A. Nijenhuis, en qualité d’agents,

partie intervenante,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre élargie),

composé, lors des délibérations, de MM. S. Papasavvas, président, S. Gervasoni, L. Madise, P. Nihoul (rapporteur) et J. Martín y Pérez de Nanclares, juges,

greffier : Mme P. Nuñez Ruiz, administratrice,

vu la phase écrite de la procédure, notamment :

–        l’exception d’irrecevabilité soulevée par la BCE par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 2 octobre 2019,

–        l’ordonnance de jonction de l’exception au fond du 29 avril 2020, au titre de l’article 130, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal,

–        la décision du 24 juin 2020 admettant la Commission à intervenir au soutien des conclusions de la BCE,

–        la décision du Tribunal, en application de l’article 28 du règlement de procédure, de renvoyer l’affaire devant une formation de jugement élargie,

–        la mesure d’instruction du 17 novembre 2021, par laquelle le Tribunal a ordonné à la BCE, sur le fondement de l’article 91, sous b), et de l’article 92, paragraphe 3, du règlement de procédure, de produire la version intégrale de sa décision ECB-SSM-2019-ITCAR-11, du 1er janvier 2019, plaçant Banca Carige SpA sous administration temporaire, et les trois décisions de prorogation de cette mesure,

–        la décision du Tribunal, du 15 décembre 2021, en application de l’article 103, paragraphe 3, du règlement de procédure, accordant à la requérante et à la Commission l’accès aux documents produits par la BCE, au titre de la protection juridictionnelle effective,

à la suite de l’audience du 19 janvier 2022,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Mme Francesca Corneli, demande l’annulation de la décision ECB-SSM-2019-ITCAR-11 de la BCE, du 1er janvier 2019, plaçant Banca Carige SpA (ci-après la « banque ») sous administration temporaire, ainsi que de tout acte consécutif ou postérieur, y compris, notamment, la décision ECB-SSM-2019-ITCAR-13 de la BCE, du 29 mars 2019, prorogeant jusqu’au 30 septembre 2019 la durée du placement sous administration temporaire.

 Antécédents du litige et faits postérieurs à l’introduction du recours

2        La banque est un établissement de crédit établi en Italie, coté en Bourse et soumis à la surveillance prudentielle directe de la Banque centrale européenne (BCE) depuis 2014. Elle a cumulé des pertes de plus de 1,6 milliard d’euros entre décembre 2014 et le 1er janvier 2019. La requérante est actionnaire minoritaire de la banque. Lors de l’introduction du recours, elle détenait 200 000 actions ordinaires correspondant à 0,000361 % du capital social de la banque.

3        En 2016, la BCE a adopté une mesure d’intervention précoce concernant la banque, par la décision ECB/SSM/2016 – F1T 87K3OQ2OV1UORLH26/26, laquelle fixait des objectifs à atteindre entre 2017 et 2019 pour les prêts non performants et la couverture qui y était afférente.

4        Pour répondre aux objectifs fixés, le conseil d’administration, en septembre 2017, a approuvé un plan de recapitalisation visant à rétablir un niveau adéquat de fonds propres, à couvrir les pertes générées et, plus globalement, à renforcer la structure du capital afin de rétablir des ratios acceptables de fonds propres.

5        Malgré l’émission d’instruments pour un montant de 544 millions d’euros, clôturée le 21 décembre 2017, la banque ne respectait pas, au 1er janvier 2018, les exigences applicables quant aux fonds propres.

6        Par la suite, la banque a tenté, sans succès, d’augmenter ses fonds propres afin de respecter les exigences applicables. Ainsi, une tentative d’émission d’instruments de fonds propres a échoué trois fois en 2018 (aux mois de mars, de mai et de juin), en raison du faible intérêt des investisseurs.

7        Ces échecs ont exacerbé, au sein du conseil d’administration de la banque, des tensions qui ont conduit à diverses démissions (seize entre mars 2016 et août 2018) rendant nécessaire la nomination de nouveaux membres. C’est ainsi que les actionnaires de la banque ont, lors de l’assemblée générale extraordinaire du 20 septembre 2018, renouvelé ledit conseil d’administration et nommé M. Modiano au poste de président. Lors de la réunion de ce conseil d’administration du 21 septembre 2018, M. Innocenzi a été nommé directeur général.

8        À la fin du mois de septembre 2018, la banque affichait encore des ratios de fonds propres inférieurs aux exigences. La BCE a alors demandé à la banque de présenter un plan de conservation conformément à l’article 142 de la directive 2013/36/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, concernant l’accès à l’activité des établissements de crédit et la surveillance prudentielle des établissements de crédit et des entreprises d’investissement, modifiant la directive 2002/87/CE et abrogeant les directives 2006/48/CE et 2006/49/CE (JO 2013, L 176, p. 338). La banque a ainsi présenté un nouveau plan de conservation, intervenant après la troisième tentative infructueuse d’augmentation de ses fonds propres (voir point 6 ci-dessus). Estimant toutefois que ce plan ne comportait aucune modification substantielle, la BCE a refusé de l’approuver et a demandé à la banque de présenter, au plus tard le 30 novembre 2018, une stratégie visant à rétablir et à garantir durablement le respect des exigences avant le 1er janvier 2019.

9        Pour répondre à cette demande, le conseil d’administration de la banque a adopté, le 12 novembre 2018, un « plan de renforcement des fonds propres de novembre 2018 » reposant sur deux étapes, à savoir, tout d’abord, l’émission d’obligations subordonnées de catégorie 2 et, ensuite, une augmentation de capital soumise à l’approbation des actionnaires.

10      La première étape a été réalisée avec une souscription d’obligations à hauteur de 318,2 millions d’euros par le fonds d’intervention volontaire du Fondo interbancario di tutela dei depositi (fonds interbancaire de protection des dépôts, Italie) et de 1,8 million d’euros par Banco di Desio e della Brianza SpA.

11      La seconde étape n’a pas pu être mise en œuvre à la suite de l’opposition manifestée par des actionnaires détenant 70 % du capital lors d’une assemblée générale extraordinaire du 22 décembre 2018 à une augmentation de capital par échange d’obligations subordonnées contre des actions nouvellement émises. Avant de se prononcer, les actionnaires en cause souhaitaient que leur soient communiqués, d’une part, le plan d’entreprise et, d’autre part, le bilan afférent aux activités exercées en 2018 par la banque.

12      À la suite de ces événements :

–        le 23 décembre 2018, la banque a indiqué par communiqué de presse que, à la suite du rejet de la proposition formulée par son conseil d’administration, la vice-présidente et un autre membre de ce conseil avaient démissionné avec effet immédiat ;

–        le 2 janvier 2019, un autre communiqué de presse, également émis par la banque, a annoncé la démission, avec effet à cette date, de cinq autres membres dudit conseil d’administration, y compris le président, M. Modiano, et le directeur général, M. Innocenzi ;

–        ces démissions ont entraîné la déchéance de ce conseil d’administration en application, d’une part, de l’article 18, paragraphe 12, des statuts de la banque et, d’autre part, de l’article 2386 du code civil italien.

13      Conformément aux statuts de la banque, les quatre membres non démissionnaires du conseil d’administration sont restés en fonction pour assurer l’administration courante.

14      Le 1er janvier 2019, la BCE a décidé de placer la banque sous administration temporaire (ci-après la « décision de placement sous administration temporaire ») avec les effets suivants :

–        dissolution du conseil d’administration de la banque et remplacement des anciens membres par trois administrateurs temporaires, dont MM. Modiano et Innocenzi, qui avaient été respectivement président dudit conseil d’administration et directeur général de cet établissement ;

–        dissolution du comité de surveillance de la banque et remplacement des anciens membres par trois autres personnes ;

–        attribution aux nouveaux organes de la mission consistant à « prendre les mesures nécessaires afin de garantir que [la banque] se conforme à nouveau aux exigences patrimoniales de manière durable ».

15      Le 2 janvier 2019, l’adoption de la décision de placement sous administration temporaire a été annoncée, parallèlement, par communiqué de presse, d’une part, de la BCE et, d’autre part, de la banque. Le même jour, la négociation des titres émis ou garantis a été suspendue par la Commissione Nazionale per le Società e la Borsa (Commission nationale pour les sociétés et la Bourse, Italie) « jusqu’à l’entrée en vigueur de la décision [de placement sous administration temporaire] ou jusqu’au rétablissement, notamment à la suite des nouvelles initiatives des autorités compétentes en matière de surveillance prudentielle, d’un cadre d’information complet sur les titres émis ou garantis par la banque ».

16      Le 5 janvier 2019, la requérante a demandé à la BCE une copie de la décision de placement sous administration temporaire, au titre de l’article 6 de la décision BCE/2004/3 de la BCE, du 4 mars 2004, relative à l’accès du public aux documents de la BCE (JO 2004, L 80, p. 42) ; cette demande ayant été rejetée, la requérante a introduit un recours en annulation dirigé contre la décision de rejet (arrêt du 29 juin 2022, Corneli/BCE, T‑501/19, non publié, EU:T:2022:402).

17      Le 29 mars 2019, la BCE a prorogé jusqu’au 30 septembre 2019 la durée du placement sous administration temporaire (ci-après la « décision de prorogation ») ; l’adoption de cette décision a été annoncée, par la banque, dans un communiqué de presse, le 30 mars 2019.

18      Le 30 septembre 2019, la BCE a prorogé jusqu’au 31 décembre 2019 le placement sous administration temporaire (ci-après la « deuxième décision de prorogation »).

19      Le 20 décembre 2019, la BCE a prorogé jusqu’au 31 janvier 2020 l’administration temporaire afin de permettre la finalisation de l’opération de renforcement des fonds propres (ci-après la « troisième décision de prorogation »).

 Conclusions des parties

20      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision de placement sous administration temporaire ainsi que tout acte consécutif ou postérieur, y compris, notamment, la décision de prorogation ainsi que les décisions de prorogation successives ;

–        condamner la BCE et la Commission aux dépens.

21      Soutenue par la Commission, la BCE conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        déclarer le recours comme étant irrecevable ou, en tout état de cause, non fondé ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur la recevabilité

 Sur les actes dont l’annulation est demandée

22      En l’espèce, la requérante poursuit l’annulation de plusieurs actes :

–        dans la requête, elle demande l’annulation de la décision de placement sous administration temporaire et de « tout acte consécutif ou postérieur », y compris la décision de prorogation ;

–        dans un courrier adressé au greffe à propos du dépôt de la réplique, elle précise que, adoptée entre-temps, la deuxième décision de prorogation doit être incluse dans l’objet du recours ;

–        dans la réplique, elle soutient que l’objet du recours doit inclure, au même titre, la troisième décision de prorogation.

23      À cet égard, il convient de rappeler que, selon l’article 76, sous d), du règlement de procédure du Tribunal, l’objet du litige doit être indiqué dans la requête.

24      Par ailleurs, les recours en annulation doivent être dirigés contre des actes existants et faisant grief (voir arrêt du 5 octobre 2017, Ben Ali/Conseil, T‑149/15, non publié, EU:T:2017:693, point 59 et jurisprudence citée).

25      En l’espèce, les règles énoncées aux points 23 et 24 ci-dessus sont respectées, d’une part, pour la décision de placement sous administration temporaire et, d’autre part, pour la décision de prorogation, dès lors que ces deux décisions sont visées dans la requête, existaient lors de l’introduction du recours et faisaient alors grief à la requérante.

26      En revanche, les deuxième et troisième décisions de prorogation ont été adoptées après le dépôt de la requête et ne sont pas visées dans celle-ci. Certes, la requérante a désigné, dans la requête, outre la décision de placement sous administration temporaire, « tout acte consécutif ou postérieur ». Toutefois, une formule aussi générale ne saurait être regardée comme étant satisfaisante au regard de l’exigence posée par l’article 21 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et reprise à l’article 76 du règlement de procédure. Selon ces dispositions, l’objet du litige doit être identifié dans la requête et celle-ci doit être accompagnée, en cas de recours en annulation, d’une copie de l’acte attaqué, de manière à permettre la détermination, sans doute possible, de l’objet du litige. En l’espèce, il est manifeste que cette exigence n’est pas respectée lorsqu’une requérante se limite à insérer dans la requête une formule de cette nature.

27      En outre, il ne saurait être considéré que la requérante a formulé une demande d’adaptation de la requête au sens de l’article 86 du règlement de procédure, qui dispose :

–        lorsqu’un acte, dont l’annulation est demandée, est remplacé ou modifié par un autre acte ayant le même objet, le requérant peut, avant la clôture de la phase orale ou avant la décision du Tribunal de statuer sans phase orale de la procédure, adapter la requête pour tenir compte de cet élément nouveau (paragraphe 1) ;

–        dans un tel cas, l’adaptation de la requête doit être faite par acte séparé et dans le délai prévu (paragraphe 2).

28      De nature formelle, l’exigence d’effectuer l’adaptation de la requête par acte séparé n’a pas été respectée en l’espèce. Certes, la requérante a mis en cause la légalité des deuxième et troisième décisions de prorogation. Toutefois, cette démarche est intervenue, pour les deux documents, d’une part, dans la réplique et, d’autre part, dans un courrier adressé au greffe à propos du dépôt de ce dernier document. Or, une indication insérée dans un document concernant un autre acte ne saurait être considérée, au regard de la disposition analysée, comme une demande présentée par « acte séparé ».

29      Ainsi, il apparaît que les conditions fixées par l’article 86 du règlement de procédure ne sont pas respectées en l’espèce et que, par conséquent, les demandes d’adaptation de la requête ne sont pas recevables. Partant, ainsi qu’il résulte des points 25 et 26 ci-dessus, le recours est recevable en tant qu’il est dirigé contre la décision de placement sous administration temporaire et la décision de prorogation (ci-après les « décisions attaquées »), mais ne l’est pas pour « tout acte consécutif ou postérieur » y compris les deuxième et troisième décisions de prorogation.

 Sur la qualité pour agir

30      Soutenue par la Commission, la BCE soulève une fin de non-recevoir tirée du fait que la requérante n’a pas la qualité requise pour agir contre les décisions attaquées, car celle-ci n’est ni directement ni individuellement concernée par ces décisions.

31      À cet égard, il convient de relever que la qualité requise pour introduire un recours en annulation est régie par l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, selon lequel, dans le cas visé en l’espèce, une personne physique ou morale doit être directement et individuellement concernée par la décision qu’elle veut mettre en cause lorsque cette décision est adressée à une autre personne.

32      Pour statuer, il convient d’examiner ces exigences au regard de la situation dans laquelle se trouvait la requérante.

–       Sur l’affectation directe de la requérante

33      Selon la jurisprudence, une personne est directement concernée (affectation directe) lorsque, de manière cumulative, l’acte attaqué :

–        produit directement des effets sur sa situation juridique ;

–        ne laisse aucun pouvoir d’appréciation aux destinataires chargés de le mettre en œuvre, cette mise en œuvre ayant un caractère purement automatique et découlant de la seule réglementation de l’Union européenne sans application d’une règle intermédiaire (voir, en ce sens, arrêt du 5 novembre 2019, BCE e.a./Trasta Komercbanka e.a., C‑663/17 P, C‑665/17 P et C‑669/17 P, ci-après l’« arrêt Trasta », EU:C:2019:923, point 103).

34      Comme il ressort du dossier, la situation juridique de la requérante est affectée, en l’espèce, sans intervention d’un acte intermédiaire, par les décisions attaquées, car ces dernières modifient par elles-mêmes les droits dont dispose celle-ci pour participer en qualité d’actionnaire à la gestion de la banque conformément aux règles applicables :

–        ainsi, lesdites décisions affectent le droit de la requérante d’élire, en tant qu’actionnaire, les organes de direction et de surveillance de la banque, étant donné que, en l’absence de ces décisions, les actionnaires qui, seuls ou avec d’autres, détiennent une certaine proportion du capital peuvent présenter une liste de candidats pour l’élection des membres du conseil d’administration et du conseil de surveillance et tout actionnaire peut élire, parmi les candidats, les membres de ces deux organes, conformément aux statuts de la banque (articles 18 et 26) ;

–        par ailleurs, la décision de placement sous administration temporaire affecte le droit appartenant aux actionnaires, tels que la requérante, de convoquer l’assemblée générale des actionnaires et de fixer l’ordre du jour, étant donné que, selon l’article 10, paragraphe 4, des statuts de la banque, les actionnaires peuvent provoquer la tenue d’une assemblée générale et fixer des points à l’ordre du jour, que, en l’espèce, ce droit est suspendu par les décisions attaquées et que, conformément à l’article 70, paragraphe 2, du decreto legislativo n. 385 – Testo unico delle leggi in materia bancaria e creditizia (décret législatif no 385 – Texte unique des lois en matière bancaire et de crédit), du 1er septembre 1993 (supplément ordinaire à la GURI no 230, du 30 septembre 1993) (ci-après le « texte unique bancaire »), seuls les administrateurs temporaires peuvent convoquer l’assemblée générale et fixer l’ordre du jour, avec l’approbation de la BCE conformément à l’article 72, paragraphe 6, du texte unique bancaire ;

–        enfin, les décisions attaquées modifient les conditions dans lesquelles la responsabilité des organes de direction et de surveillance peut être engagée par les actionnaires, tels que la requérante, étant donné que, en principe régie par l’article 2392 du code civil italien, cette responsabilité est limitée, en cas d’administration temporaire, conformément à l’article 72, paragraphe 9, du texte unique bancaire, aux cas de dol, ou de faute grave, que, par ailleurs, cette disposition prévoit que les actions de nature civile engagées à l’encontre des administrateurs temporaires le sont sous réserve de l’autorisation de la BCE et que le paragraphe 5 dudit article confie aux administrateurs temporaires le droit d’engager des recours en responsabilité à l’encontre des membres des organes dissouts de la banque ou du directeur général, en privant ainsi l’assemblée des actionnaires ou les actionnaires qui, ensemble, détiennent une certaine proportion du capital social du droit d’engager un tel recours conformément aux articles 2393 et 2393 bis du code civil italien.

35      De ces éléments, il apparaît que la relation juridique entre la banque et ses actionnaires, au nombre desquels figure la requérante, a été modifiée, sans intervention d’un quelconque acte intermédiaire, par les décisions attaquées, qui la concernent donc directement.

36      Cette conclusion est toutefois contestée par la BCE et la Commission.

37      En premier lieu, ces institutions soutiennent, en substance, que l’effet des décisions attaquées sur la situation des actionnaires, à supposer qu’il soit avéré, a affecté l’exercice de leurs droits d’une manière seulement temporaire, pendant la période couverte par ces décisions.

38      À cet égard, il convient de relever que, s’agissant de la protection juridictionnelle, aucune différence n’est faite entre les effets produits par un acte selon que ces derniers concernent l’existence d’un droit ou son exercice ; un droit existe pour être exercé, de sorte que, même si l’effet produit par l’acte concerne l’exercice du droit, ce dernier est affecté dans ce pour quoi il a été créé et conféré (voir en ce sens, ordonnance du 25 juin 2014, Accorinti e.a./BCE, T-224/12, non publiée, EU:T:2014:611, point 89). Ainsi, rien dans la jurisprudence n’indique que doivent être exclues de la protection juridictionnelle les situations dans lesquelles il serait porté atteinte, pour une période limitée, à la situation juridique d’une partie.

39      L’argument doit donc être rejeté.

40      En deuxième lieu, la BCE et la Commission soutiennent que la décision de placement sous administration temporaire n’a pas affecté les droits les plus essentiels des actionnaires, dès lors que, aux termes des règles applicables, les décisions revêtant un caractère important pour la banque restaient du ressort des actionnaires.

41      À cet égard, il convient de relever que, comme l’indiquent la BCE et la Commission, certaines décisions affectant la banque pouvaient encore être prises, sous administration temporaire, par les actionnaires réunis en assemblée générale. Toutefois, l’assemblée devait être convoquée, dans ces cas, par les administrateurs temporaires, sans pouvoir l’être par les actionnaires eux-mêmes. Or, rien ne permet de distinguer, parmi les droits dont jouissent les actionnaires, certains qui seraient essentiels et mériteraient une protection, tandis que d’autres, jugés moins importants, en seraient dépourvus.

42      L’argument doit donc être rejeté.

43      En troisième lieu, la BCE et la Commission soutiennent que les droits prétendument affectés appartiennent à l’assemblée générale et non aux actionnaires considérés dans leur individualité. Il en résulterait que la situation juridique de chaque actionnaire ne serait pas affectée d’une manière directe par les décisions attaquées.

44      À cet égard, il convient de relever que l’argument de la BCE et de la Commission tiré des droits de l’assemblée générale fait abstraction, à tout le moins, du droit de vote permettant à chaque actionnaire de participer, de manière individuelle, à l’élection des membres appelés à siéger au sein des organes de direction et de surveillance. Or, il ressort du dossier que, avec l’adoption de la décision de placement sous administration temporaire, ce droit ne pouvait plus être exercé par les actionnaires en raison de l’administration temporaire, dès lors que cette nomination devait être décidée, dans le cadre d’un tel régime, par la BCE elle-même, sans même que celle-ci ait dû consulter les actionnaires.

45      Certes, le vote exprimé par un actionnaire déterminé ne permet pas, à lui seul, d’emporter la décision au sein de l’assemblée lorsque cet actionnaire ne détient pas une part suffisamment grande dans le capital social. Toutefois, une telle circonstance n’ôte pas à ce droit de vote, pour chaque actionnaire, son existence et, partant, sa nécessaire protection juridictionnelle.

46      L’argument doit donc être rejeté.

47      En quatrième lieu, contrairement à la requérante qui estime que la recevabilité du recours en l’espèce peut être fondée sur la position adoptée par la Cour dans l’arrêt Trasta, la BCE et la Commission considèrent que cet arrêt confirme plutôt leur point de vue, à savoir que le recours est irrecevable.

48      À cet égard, il convient de relever que la Cour, dans cet arrêt, sans aborder l’affectation individuelle des actionnaires, s’est prononcée sur les conditions dans lesquelles ces derniers pouvaient être tenus pour directement concernés par une décision adoptée au titre de la supervision bancaire à l’égard d’un établissement dans lequel ils détenaient des parts.

49      En l’occurrence, la BCE, en adoptant cette décision, avait retiré l’agrément dont cet établissement avait besoin pour exercer ses activités bancaires. À la suite de ce retrait, l’établissement en question avait été liquidé, en application du droit national, par une juridiction nationale. Pour mener à bien la liquidation, cette juridiction avait nommé un liquidateur. En l’occurrence, la décision attaquée était celle par laquelle l’agrément avait été retiré par la BCE audit établissement.

50      Dans l’arrêt Trasta, la Cour a jugé que cette décision de retrait affectait directement la situation juridique de l’établissement concerné lui-même, car, une fois la décision prise, l’établissement n’était plus autorisé à poursuivre ses activités bancaires (point 104).

51      En revanche, la décision de retrait ne produisait pas un tel effet sur les actionnaires. Certes, la valeur des actions ou la proportion de dividendes distribuables avaient baissé après l’adoption de cette décision. Toutefois, cet effet ne présentait pas, pour la Cour, un caractère juridique, mais bien une nature économique. En soi, le retrait de l’agrément ne faisait pas obstacle, selon la Cour, à ce que les actionnaires continuent à exercer leurs droits au sein de l’assemblée générale, par exemple pour demander que soit modifié l’objet social de l’établissement de manière à lui permettre de poursuivre des activités dans un domaine autre que le domaine bancaire.

52      En définitive, il ressort de l’arrêt Trasta, selon la Cour, que seule la décision de mise en liquidation affectait la situation juridique des actionnaires, car cette décision confiait la gestion de l’établissement concerné au liquidateur en enlevant aux actionnaires la possibilité d’influencer cette gestion. Or, ladite décision n’avait pas été adoptée par la BCE, mais par une juridiction nationale en application du droit national sans qu’une telle conséquence, à savoir la liquidation, soit prévue dans le droit de l’Union en cas de retrait d’agrément. En tant que tel, ce retrait d’agrément, ordonné par la BCE, n’affectait donc pas directement, par lui-même, la situation juridique des actionnaires. Comme le retrait d’agrément était l’acte attaqué, le recours, formé par les actionnaires, devait être déclaré irrecevable (points 105 à 115 dudit arrêt).

53      Ainsi, l’arrêt Trasta concernait une situation différente, puisque, à la différence de la présente affaire, la décision qui était attaquée dans l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt n’avait aucune incidence, par elle-même, sur la situation juridique des requérants actionnaires.

54      L’argument doit donc être rejeté et, par conséquent, la requérante peut être considérée comme étant directement concernée, en l’espèce, par les décisions attaquées.

–       Sur l’affectation individuelle de la requérante

55      Selon la BCE et la Commission, la requérante n’est pas individuellement concernée (affectation individuelle), car ses droits ont été affectés par les décisions attaquées dans une mesure qui n’est pas différente de celle ressentie par les autres actionnaires de la banque.

56      À cet égard, il convient de rappeler que, au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, les sujets autres que les destinataires sont individuellement concernés par un acte attaqué si celui-ci les atteint en raison de certaines qualités qui leur sont particulières ou d’une situation de fait qui les caractérise par rapport à toute autre personne et, de ce fait, les individualise d’une manière analogue à celle dont le destinataire le serait (arrêt du 15 juillet 1963, Plaumann/Commission, 25/62, EU:C:1963:17, p. 223).

57      Pour la requérante, l’exigence liée à l’affectation individuelle est satisfaite en l’espèce, car :

–        elle fait partie d’un groupe dont les membres étaient identifiés ou identifiables au moment où ont été adoptées les décisions attaquées ;

–        et cette identification pouvait être fondée sur des critères propres aux membres de ce groupe (voir arrêt du 23 avril 2009, Sahlstedt e.a./Commission, C‑362/06 P, EU:C:2009:243, point 30 et jurisprudence citée).

58      À cet égard, s’agissant du premier critère, il convient de relever que, comme la requérante le fait observer, elle était identifiable, en sa qualité d’actionnaire, au moment où ont été prises les décisions attaquées. En effet, la décision de mise sous administration temporaire a été adoptée un 1er janvier, c’est-à-dire un jour où, les établissements de crédit étant fermés, les parts détenues dans le capital ne pouvaient être négociées. Comme l’a reconnu la BCE, c’est d’ailleurs en raison de l’impossibilité d’alors acheter ou vendre des parts que la décision de placement sous administration temporaire a été prise au cours de cette journée-là. À ce moment, la liste des actionnaires était close. L’identité de chacun d’eux était vérifiable, comme le requiert la jurisprudence. La situation n’a pas été différente pour la décision de prorogation. Certes, cette décision n’a pas été adoptée un jour férié, contrairement à la première. Il n’en reste pas moins que, au moment de son adoption, la liste des actionnaires susceptibles d’être affectés était, également, déterminée.

59      S’agissant du second critère, il doit être constaté, de la même manière, que les actionnaires, dont la requérante, se sont trouvés affectés, du fait de l’adoption des décisions attaquées, dans une qualité qui les caractérisait en propre, à savoir, d’une part, celle de détenir des actions dans le capital de la banque et, d’autre part, celle de se trouver empêchés, par l’effet de ces décisions, d’exercer certains droits attachés à ces actions.

60      Le critère tiré d’une affectation propre a été précisé en ce sens qu’il peut être considéré comme satisfait, notamment, lorsque l’acte attaqué modifie des droits acquis, antérieurement à son adoption, par la personne concernée (voir arrêt du 13 mars 2008, Commission/Infront WM, C‑125/06 P, EU:C:2008:159, point 72 et jurisprudence citée).

61      Or, la requérante avait, précisément, avant l’adoption des décisions attaquées, des droits attachés à ses actions qui, alors qu’ils étaient acquis, se sont trouvés affectés au cours de la période couverte.

62      À cet égard, il importe de noter que, aux termes de l’article 70, paragraphe 2, du texte bancaire unique, le premier effet produit par le placement sous administration temporaire consiste à suspendre les fonctions de l’assemblée générale, c’est-à-dire la possibilité pour les actionnaires de manifester leur position sur les propositions qui leur sont adressées.

63      En outre, parmi les actionnaires, la requérante figurait au nombre de ceux ayant émis un vote négatif à l’encontre de la proposition qui était présentée à l’assemblée générale du 22 décembre 2018, lequel vote, même s’il exprimait seulement une demande de report, a entraîné la démission de membres du conseil d’administration, puis la dissolution de ce dernier, la banque étant alors placée dans la situation qui, dans le contexte qu’elle connaissait, a suscité, comme l’indique la décision de placement sous administration temporaire, l’intervention de la BCE, avec suspension des fonctions de l’assemblée générale et donc de la possibilité, pour les actionnaires, d’influencer par leur vote la stratégie qui serait suivie par la banque.

64      Dans ces conditions, il peut être considéré que sont satisfaites dans son chef les exigences découlant de l’arrêt du 15 juillet 1963, Plaumann/Commission (25/62, EU:C:1963:17).

65      Cette conclusion est contestée par la BCE et la Commission.

66      En premier lieu, elles soulignent que, si le Tribunal devait parvenir à la conclusion que le recours en annulation est irrecevable, une telle déclaration d’irrecevabilité ne serait pas contraire à l’obligation, pour le juge de l’Union, d’assurer aux requérants réels ou potentiels une protection juridictionnelle effective, car la requérante pourrait encore former, dans un tel cas, devant le même juge, un recours en indemnité dans le but d’obtenir, le cas échéant, une réparation pour le dommage subi.

67      À cet égard, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, les recours en annulation et en indemnité poursuivent des objectifs qui, étant distincts, ne sauraient être confondus (arrêt du 2 décembre 1971, Zuckerfabrik Schöppenstedt/Conseil, 5/71, EU:C:1971:116) ; dans ces conditions, le juge de l’Union ne saurait considérer qu’un type de recours (en l’espèce, un recours en annulation) peut être déclaré irrecevable au motif qu’un second recours (par exemple, un recours en indemnité) pourrait être jugé, en ce qui le concerne, conforme aux exigences de recevabilité.

68      L’objection peut donc être rejetée.

69      En second lieu, la BCE fait valoir, avec le soutien de la Commission, que la jurisprudence concernant des groupes fermés doit être limitée à des entités comportant un nombre peu élevé de membres. Tel ne serait pas le cas en l’espèce, car, au moment où ont été adoptées les décisions attaquées, la banque comptait environ 35 000 actionnaires. Pour ces deux institutions, admettre la recevabilité d’un recours susceptible d’être introduit par un nombre aussi élevé de requérants irait à l’encontre de l’approche suivie dans l’arrêt du 15 juillet 1963, Plaumann/Commission (25/62, EU:C:1963:17).

70      À cet égard, il convient de relever que, comme le soulignent la BCE et la Commission, plusieurs arrêts invoqués par la requérante ont trait à des groupes comportant un nombre peu élevé de membres, par exemple 8 entités dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 22 juin 2006, Belgique et Forum 187/Commission (C‑182/03 et C‑217/03, EU:C:2006:416, point 63), 6 dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 13 mars 2008, Commission/Infront WM (C‑125/06 P, EU:C:2008:159, point 76), ou encore 27 dans l’arrêt du 1er juillet 1965, Toepfer et Getreide-Import Gesellschaft/Commission (106/63 et 107/63, EU:C:1965:65, p. 529).

71      Selon la requérante, les termes utilisés dans la jurisprudence ainsi examinée ont seulement pour but, toutefois, d’expliquer le critère dont il est question, à savoir l’exigence que le groupe concerné comporte des membres identifiables au moment où est adoptée la décision de placement sous administration temporaire, et constitue ainsi un groupe ne pouvant être étendu et présentant, par conséquent, cette caractéristique d’être « restreint », « limité » ou encore « fermé » (voir, en ce sens, arrêts du 13 mars 2008, Commission/Infront WM, C‑125/06 P, EU:C:2008:159, point 71, et du 27 février 2014, Stichting Woonpunt e.a./Commission, C‑132/12 P, EU:C:2014:100, point 59).

72      La requérante estime, en tout état de cause, que la jurisprudence admettrait des recours dans des situations pouvant impliquer un nombre élevé de requérants. Il en serait ainsi pour les recours formés par des bénéficiaires contre des décisions adressées par la Commission à un ou à plusieurs États membres à propos de régimes concernant des aides accordées ou susceptibles d’être accordées par ces derniers. Bien que ce type de décision ne leur soit pas adressé, la jurisprudence permettrait à ces bénéficiaires d’attaquer devant le Tribunal la légalité des décisions ainsi adoptées, en dépit du fait que ces requérants peuvent être nombreux, voire très nombreux, en fonction du type de régime concerné [arrêt du 28 juin 2018, Andres (faillite Heitkamp BauHolding)/Commission, C‑203/16 P, EU:C:2018:505].

73      En réponse, la Commission soutient que, dans de telles affaires concernant des bénéficiaires d’aides, les actes attaqués ont une nature réglementaire et non un caractère individuel ; ils auraient trait, en effet, à des mesures nationales comportant un régime d’aide applicable à des catégories de personnes présentant des caractéristiques déterminées.

74      À cet égard, il convient de relever que la position adoptée par la Commission à propos du caractère réglementaire des actes visés dans les affaires concernant des bénéficiaires d’aides n’aurait pas pour effet d’entraîner, si ce caractère devait être confirmé, l’irrecevabilité du recours. En effet, l’article 263, quatrième alinéa, TFUE assure la recevabilité des recours formés contre des actes réglementaires lorsque la situation des requérants est affectée sans mesure d’exécution. Or, c’est sans l’intervention d’aucun acte intermédiaire, de quelque nature que ce soit, que les décisions attaquées ont affecté la situation juridique des actionnaires, en l’espèce, en les privant de la possibilité d’exercer certains de leurs droits attachés à leurs actions durant le placement sous administration temporaire de la banque (voir, en ce sens, arrêt du 6 novembre 2018, Scuola Elementare Maria Montessori/Commission Commission/Scuola Elementare Maria Montessori et Commission/Ferracci, C‑622/16 P à C‑624/16 P, EU:C:2018:873, points 28 et 58).

75      Ainsi, la Commission ne peut valablement, d’un côté, contester l’affectation individuelle de la requérante au motif que celle-ci fait partie d’une catégorie d’opérateurs économiques et, de l’autre, soutenir que le recours est irrecevable, car il serait dirigé contre un acte qui, concernant une telle catégorie, présenterait un caractère réglementaire, dans un contexte où cet acte a affecté la situation juridique de la requérante sans l’intervention d’un acte intermédiaire.

76      Dès lors, la seconde objection doit être rejetée également et il peut être considéré, d’une part, que la requérante est individuellement concernée par les décisions attaquées et, d’autre part, eu égard aux considérations ci-dessus concernant l’affectation directe, qu’elle satisfait aux exigences imposées par le traité au titre de la qualité pour agir.

 Sur l’intérêt à agir

77      La BCE soutient que la requérante ne dispose pas de l’intérêt pour agir requis pour introduire le présent recours.

78      À cet égard, il convient de relever que, conformément à la jurisprudence, la requérante, pour former son recours, doit établir l’existence d’un intérêt à agir en démontrant que les effets juridiques obligatoires produits par les décisions attaquées sont de nature à affecter ses intérêts, cette preuve pouvant être apportée en établissant que l’acte a modifié de façon caractérisée sa situation juridique (voir, en ce sens, arrêt du 13 octobre 2011, Deutsche Post et Allemagne/Commission, C‑463/10 P et C‑475/10 P, EU:C:2011:656, point 37).

79      La requérante détenant des parts dans le capital d’une entreprise, l’intérêt à agir doit être distinct de celui poursuivi par l’entreprise, en l’occurrence la banque, dans laquelle elle détient des actions. En effet, seule l’entreprise a le droit, en principe, d’introduire un recours, pour défendre son propre intérêt. Si l’intérêt à défendre est celui de l’entreprise, l’actionnaire peut demander à l’assemblée générale ou à l’organe de direction d’introduire le recours (voir, en ce sens, arrêts du 20 juin 2000, Euromin/Conseil, T‑597/97, EU:T:2000:157, point 50, et du 12 novembre 2015, HSH Investment Holdings Coinvest-C et HSH Investment Holdings FSO/Commission, T‑499/12, EU:T:2015:840, point 31).

80      De la même manière, la Cour européenne des droits de l’homme distingue, d’une part, les recours formés par les actionnaires pour la défense de leurs droits propres et, d’autre part, ceux formés par eux pour assurer la protection des droits de l’entreprise (Cour EDH, 7 juillet 2020, Albert et autres c. Hongrie, CE:ECHR:2020:0707JUD000529414).

81      En l’espèce, la requérante, pour justifier son recours, ne se prévaut pas de l’effet produit sur la banque par les décisions attaquées, mais met en avant l’incidence de ces décisions sur les droits qu’elle détient, personnellement, en sa qualité d’actionnaire, notamment celui de convoquer une assemblée générale pour proposer l’introduction d’un recours ou encore le droit d’ajouter un point en ce sens à l’ordre du jour d’une telle assemblée.

82      Ainsi, il ne saurait être considéré, comme le fait pourtant la BCE, que, si les décisions attaquées étaient annulées, l’effet sur la situation des actionnaires serait identique à celui que produirait une annulation sur celle de la banque : agissant au titre de l’effet produit par les décisions attaquées sur ses propres droits, la requérante peut faire état d’un intérêt à demander l’annulation desdites décisions qui ne se confond pas avec celui de la banque, mais s’en distingue. L’exigence d’un intérêt distinct est donc satisfaite en l’espèce.

83      De ce qui précède, il résulte que le recours formé par la requérante peut être déclaré recevable en tant qu’il a été introduit en son nom à l’égard des décisions attaquées.

 Sur le fond

84      À l’appui du recours, la requérante présente sept moyens, tirés, respectivement :

–        d’une violation des règles relatives à la proportionnalité ;

–        d’une violation de l’obligation de motivation et du droit d’être entendu ;

–        de la nomination, comme administrateurs temporaires, de personnes ayant antérieurement exercé d’importantes fonctions dans la direction et l’administration de la banque ;

–        d’une erreur de droit commise dans la détermination de la base juridique utilisée pour adopter les décisions attaquées ;

–        du fait que la BCE a essayé de résoudre des problèmes de gouvernance en nommant des personnes qui les avaient créés ;

–        de la violation, d’une part, des règles relatives aux droits de l’actionnaire et, d’autre part, des principes fondamentaux portant sur la protection de la propriété et de l’épargne, la liberté de l’initiative économique privée et l’autodétermination du citoyen dans ses choix personnels ;

–        du caractère inadéquat de l’administration temporaire pour résoudre le problème constaté.

85      Le Tribunal estime approprié de commencer l’examen par le moyen tiré d’une erreur de droit dans la détermination de la base juridique utilisée pour adopter les décisions attaquées.

 Sur le moyen tiré d’une erreur de droit commise par la BCE dans la détermination de la base juridique utilisée pour adopter les décisions attaquées

86      La requérante soutient que la BCE a commis une erreur de droit en fondant les décisions attaquées sur l’article 70, paragraphe 1, du texte unique bancaire, alors que cette disposition ne viserait pas la situation invoquée pour justifier le placement sous administration temporaire, à savoir une « détérioration significative » de la situation de la banque.

87      Le moyen est contesté par la BCE avec le soutien de la Commission.

88      À cet égard, il convient de relever que l’article 69 octiesdecies, paragraphe 1, sous b), du texte unique bancaire, qui transpose l’article 28, intitulé « Destitution de la direction générale et de l’organe de direction », de la directive 2014/59/UE, du Parlement européen et du Conseil, du 15 mai 2014, établissant un cadre pour le redressement et la résolution des établissements de crédit et des entreprises d’investissement et modifiant la directive 82/891/CEE du Conseil ainsi que les directives du Parlement européen et du Conseil 2001/24/CE, 2002/47/CE, 2004/25/CE, 2005/56/CE, 2007/36/CE, 2011/35/UE, 2012/30/UE et 2013/36/UE et les règlements du Parlement européen et du Conseil (UE) no 1093/2010 et (UE) no 648/2012 (JO 2014, L 173, p. 190), prévoit :

« 1. La banque d’Italie peut prendre les mesures suivantes à l’égard d’une banque ou de la société mère d’un groupe bancaire :

[…]

(b) le limogeage des acteurs visés à l’article 69 vicies semel, en cas de violation grave de dispositions législatives, réglementaires ou statutaires ou de graves irrégularités dans le cadre de l’administration, ou encore lorsque la détérioration de la situation de la banque ou du groupe bancaire est particulièrement significative, à condition que les mesures visées sous a) ou prévues aux articles 53 bis et 67 ter ne suffisent pas à remédier à la situation. »

89      De son côté, l’article 70 du texte unique bancaire, qui transpose l’article 29 de la directive 2014/59, intitulé « Administrateur temporaire », dispose :

« 1. La banque d’Italie peut ordonner la dissolution des organes exerçant des fonctions d’administration et de contrôle des banques en cas de violation ou irrégularité visées à l’article 69 octiesdecis, paragraphe 1, sous b), ou si de graves pertes patrimoniales sont attendues, ou lorsque la dissolution est demandée par requête motivée des organes d’administration ou de l’assemblée extraordinaire. »

90      De ces libellés, il ressort que les deux dispositions concernent deux cas de figure différents :

–        d’une part, l’article 69 octiesdecies, paragraphe 1, sous b), organise le « limogeage » des organes d’administration ou de contrôle des banques qui, une fois cette mesure prise, doivent être remplacés selon les procédures prévues en droit national et en droit de l’Union ;

–        d’autre part, l’article 70 régit la « dissolution » (scioglimento) des organes d’administration ou de contrôle des banques, laquelle dissolution entraîne la suspension des fonctions des assemblées et des autres organes et la mise en place d’une administration extraordinaire.

91      À la lecture des articles 28 et 29 de la directive 2014/59 que les dispositions susmentionnées visent à transposer, les mesures dont il est question ne peuvent être considérées comme étant équivalentes ou alternatives, dès lors que la première est moins intrusive que la seconde, qui peut seulement être adoptée si le remplacement des organes d’administration ou de contrôle des banques selon les procédures du droit national et du droit de l’Union est jugé insuffisant par l’autorité compétente pour remédier à la situation.

92      Les conditions d’application de l’article 69 octiesdecies, paragraphe 1, sous b), du texte unique bancaire et de l’article 70 dudit texte diffèrent également. Ainsi, le « limogeage » des organes d’administration ou de contrôle est prévu en cas :

–        de violation grave de dispositions législatives, réglementaires ou statutaires ;

–        ou de graves irrégularités dans le cadre de l’administration ;

–        ou lorsque la détérioration de la situation de la banque ou du groupe bancaire est particulièrement significative.

93      En revanche, la « dissolution » des organes d’administration ou de contrôle et la mise en place d’une administration extraordinaire sont prévues :

–        en cas de violation grave de dispositions législatives, réglementaires ou statutaires visée à l’article 69 octiesdecies, paragraphe 1, sous b) ;

–        ou en cas de graves irrégularités dans le cadre de l’administration visées à l’article 69 octiesdecies, paragraphe 1, sous b) ;

–        ou si de graves pertes patrimoniales sont attendues ;

–        ou lorsque la dissolution est demandée par requête motivée des organes d’administration ou de l’assemblée extraordinaire.

94      Il ressort d’une analyse textuelle portant sur la formulation des conditions d’application de l’article 69 octiesdecies, paragraphe 1, sous b), du texte unique bancaire et de l’article 70 dudit texte que leur énumération est exhaustive et qu’elles sont alternatives, ainsi que l’indique l’utilisation de la conjonction alternative « ou ». Ainsi, la seconde disposition prévoit que la dissolution des organes d’administration ou de contrôle des banques et la mise en place d’une administration extraordinaire sont possibles dans quatre cas de figure, dont deux sont prévus par la première disposition et doivent, comme l’indique le renvoi direct à cette disposition, être interprétés de la même manière que dans le contexte du « limogeage ». L’analyse du texte indique également qu’il n’y a pas de hiérarchie entre ces conditions.

95      Il résulte donc de l’article 69 octiesdecies, paragraphe 1, sous b), du texte unique bancaire et de l’article 70 dudit texte que la seconde disposition ne prévoit pas la dissolution des organes d’administration ou de contrôle des banques et la mise en place d’une administration extraordinaire dans le cas où la « détérioration de la situation de la banque ou du groupe bancaire [serait] particulièrement significative ».

96      En l’espèce, la BCE, par la décision de placement sous administration temporaire, a décidé la « dissolution des organes d’administration et de contrôle de [la banque], et [le] remplacement de ces derniers par trois commissaires extraordinaires et par un comité de surveillance ».

97      Pour adopter cette décision, elle a considéré, au point 2.1, que « les conditions visées à l’article 69 octiesdecies et à l’article 70 du texte unique bancaire, c’est-à-dire une détérioration significative de la situation de [la banque], [étaient] remplies », avant de conclure, au point 2.6, que « l’administration extraordinaire [était] nécessaire et appropriée » et que « l’exercice du pouvoir visé à l’article 70 [dudit texte était] également jugé proportionné pour faire face à la grave situation que [connaissait à ce moment-là la banque] ».

98      Ainsi, il ressort de la motivation fournie dans la décision susvisée que le pouvoir exercé par la BCE dans la présente affaire pour placer la banque sous administration temporaire est celui visé à l’article 70 du texte unique bancaire, la référence à l’article 69 octiesdecies dudit texte ne permettant pas de démentir cette constatation.

99      De la même manière, la BCE, dans la décision de prorogation, a estimé que l’administration temporaire devait être poursuivie, motif pris de la persistance de « l’importante détérioration de la situation de l’entité surveillée » (point 2.1), et que « l’exercice du pouvoir en vertu de l’article 70 [du texte unique bancaire] » était approprié aux circonstances (point 2.6).

100    Il s’ensuit la BCE a violé l’article 70 du texte unique bancaire en se fondant, alors que cette condition n’était pas prévue par cette disposition, sur la « détérioration significative de la situation de [la banque] » pour dissoudre des organes d’administration ou de contrôle de la banque, mettre en place une administration temporaire et la maintenir en vigueur durant la période visée à la décision de prorogation.

101    Cette conclusion est contestée par la BCE et la Commission.

102    En premier lieu, l’une et l’autre observent que le placement sous administration temporaire est prévu à l’article 29 de la directive 2014/59. Or, l’article 70 du texte unique bancaire devrait être lu à la lumière de cette disposition, qu’il avait pour mission de transposer, en application du principe d’interprétation conforme. De cette lecture, il résulterait qu’un placement sous administration temporaire est permis au titre de l’article 70 même si la situation considérée, à savoir la détérioration significative de la situation de la banque, ne se trouve pas visée de manière explicite dans cette disposition.

103    À cet égard, il est de jurisprudence constante que, en appliquant le droit interne, les juridictions nationales sont tenues de l’interpréter dans toute la mesure du possible à la lumière du texte et de la finalité de la directive en cause pour atteindre le résultat visé par celle-ci. Cette obligation d’interprétation conforme du droit national est en effet inhérente au système du traité FUE en ce qu’elle permet aux juridictions nationales d’assurer, dans le cadre de leurs compétences, la pleine efficacité du droit de l’Union lorsqu’elles tranchent les litiges dont elles sont saisies (voir arrêts du 24 janvier 2012, Dominguez, C‑282/10, EU:C:2012:33, point 24 et du 19 janvier 2010, Kücükdeveci, C‑‑555/07, EU:C:2010:21, point 48 et jurisprudence citée ; voir également, par analogie, arrêt du 24 juin 2019, Popławski, C-573/17, EU:C:2019:530, points 55, 57 et 58). Le Tribunal a la même obligation d’interprétation conforme du droit national à la lumière d’une directive lorsqu’il est conduit, comme dans le présent litige, en vertu des dispositions pertinentes, à faire application de ce droit.

104    Εn outre, dans la mesure où est en cause l’interprétation d’une disposition de droit national, il convient de rappeler que, en application d’une jurisprudence constante, la portée des dispositions législatives, réglementaires ou administratives nationales doit s’apprécier compte tenu de l’interprétation qu’en donnent les juridictions nationales (voir arrêt du 24 avril 2018, Caisse régionale de crédit agricole mutuel Alpes Provence e.a./BCE, T‑133/16 à T‑136/16, EU:T:2018:219, point 84 et jurisprudence citée).

105    Toutefois, ce principe d’interprétation conforme du droit national connaît certaines limites. En effet, l’obligation pour le juge de se référer au contenu d’une directive lorsqu’il interprète et applique les règles pertinentes du droit interne est limitée par les principes généraux du droit et elle ne peut pas servir de fondement à une interprétation contra legem du droit national (arrêts du 15 avril 2008, Impact, C‑268/06, EU:C:2008:223, point 100, et du 24 janvier 2012, Dominguez, C‑282/10, EU:C:2012:33, point 25).

106    Il en résulte que l’obligation d’interprétation conforme du droit national qui vient d’être rappelée ne peut servir de fondement à une interprétation allant à l’encontre des termes utilisés dans la disposition nationale de transposition d’une directive.

107    Or, tel serait le résultat obtenu si cette méthode d’interprétation était utilisée en l’espèce. En effet, la mesure prise est celle prévue par l’article 70 du texte unique bancaire et, par conséquent, ce sont les conditions d’application de cet article qui doivent être remplies. La référence à l’article 69 octiesdecies dudit texte dans la décision de placement sous administration temporaire, qui s’explique peut-être par le renvoi à cet article pour deux des conditions d’application mentionnées à l’article 70 du même texte, ne saurait modifier les règles applicables pour adopter les mesures visées, ni les conditions de leur application.

108    La « détérioration de la situation de la banque » n’est pas une expression générique, mais une condition fixée par un texte législatif, qui se réfère à une liste exhaustive de quatre conditions alternatives. Ces conditions explicitement fixées par la loi pour adopter une mesure aussi intrusive – la plus intrusive dans le système d’intervention précoce – que celle du placement d’une banque sous administration temporaire doivent être respectées et celles prévues pour adopter la mesure la moins intrusive ne sauraient être considérées comme suffisantes pour justifier l’adoption de la mesure la plus intrusive, sans référence concrète dans le texte.

109    L’argument doit donc être rejeté.

110    En second lieu, la BCE et la Commission ont soutenu à l’audience que la BCE était tenue d’appliquer, outre le droit national, lorsqu’elle intervenait en tant qu’autorité compétente au titre de la réglementation bancaire, l’ensemble des normes figurant dans le droit de l’Union ; à ce titre, elle était tenue, selon ces institutions, d’appliquer la disposition qui, figurant dans la directive 2014/59, prévoit le placement sous administration temporaire en cas de détérioration significative de la situation de l’établissement considéré.

111    À cet égard, il convient de relever que, comme elles le signalent, ces deux institutions doivent se conformer au droit de l’Union dans leurs actions. Cette obligation découle du principe de légalité, qui impose aux institutions de respecter, sous le contrôle du juge de l’Union, les règles auxquelles elles sont soumises. De façon spécifique, elle est exprimée, pour la surveillance prudentielle, comme l’ont souligné les institutions concernées, à l’article 4, paragraphe 3, du règlement (UE) no 1024/2013 du Conseil, du 15 octobre 2013, confiant à la BCE des missions spécifiques ayant trait aux politiques en matière de surveillance prudentielle des établissements de crédit (JO 2013, L 287, p. 63), qui prévoit notamment qu’« aux fins de l’accomplissement des missions qui lui sont confiées par [ce] règlement, et en vue d’assurer des normes de surveillance de niveau élevé, la BCE applique toutes les dispositions pertinentes du droit de l’Union et, lorsque celui-ci comporte des directives, le droit national transposant ces directives ».

112    De cette disposition, il résulte toutefois que, lorsque le droit de l’Union comporte des directives, c’est le droit national transposant ces directives qui doit être appliqué. La disposition ne peut être lue comme comportant deux sources distinctes d’obligations, à savoir l’ensemble du droit de l’Union, y compris les directives, auquel il conviendrait d’ajouter le droit national les transposant. Une telle interprétation supposerait en effet que les dispositions nationales diffèrent des directives et que, dans un tel cas, les deux types de documents s’imposent à la BCE comme étant des sources normatives distinctes. Une telle interprétation ne saurait être acceptée, car elle irait à l’encontre de l’article 288 TFUE, qui prévoit que « [l]a directive lie tout État membre destinataire quant aux résultat à atteindre, tout en laissant aux instances nationales la compétence quant à la forme et aux moyens ». Par ailleurs, selon une jurisprudence constante, une directive ne peut pas par elle-même créer d’obligations pour un particulier et ne peut donc pas être invoquée en tant que telle à son égard (arrêt du 26 février 1986, Marshall, 152/84, EU:C:1986:84, point 48 ; voir, également, arrêt du 19 janvier 2010, Kücükdeveci, C‑555/07, EU:C:2010:21, point 46 et jurisprudence citée).

113    Ainsi, il ne saurait être remédié à l’erreur commise par la BCE dans l’application de l’article 70 du texte unique bancaire par une interprétation libre des textes qui permettrait de reconstruire les conditions d’application de dispositions conçues de manière distincte dans la directive 2014/59 et dans le droit national.

114    Le moyen doit donc être accueilli et il convient donc d’annuler les décisions attaquées sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens.

 Sur les dépens

115    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

116    La BCE ayant succombé, il y a lieu de la condamner à supporter ses dépens ainsi que ceux exposés par la requérante, conformément aux conclusions formulées par cette dernière.

117    Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, les institutions qui sont intervenues au litige supportent leurs propres dépens. En application de cette disposition, la Commission supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre élargie)

déclare et arrête :

1)      La décision ECB-SSM-2019-ITCAR-11 de la BCE, du 1er janvier 2019, plaçant Banca Carige SpA sous administration temporaire, ainsi que la décision ECB-SSM-2019-ITCAR-13 de la BCE, du 29 mars 2019, prorogeant jusqu’au 30 septembre 2019 la durée du placement sous administration temporaire sont annulées.

2)      Le recours est rejeté pour le surplus.

3)      La Banque centrale européenne (BCE) est condamnée à supporter ses dépens ainsi que ceux exposés par Mme Francesca Corneli.

4)      La Commission européenne supportera ses propres dépens.

Papasavvas

Gervasoni

Madise

Nihoul

 

      Martín y Pérez de Nanclares

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 12 octobre 2022.

Signatures


*      Langue de procédure : l’italien.