Language of document : ECLI:EU:T:2006:27

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

26 janvier 2006 (*)

« Marque communautaire − Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire verbale Variant − Marque verbale nationale antérieure DERBIVARIANT − Refus d’enregistrement par la chambre de recours – Risque de confusion – Article 74, paragraphe 1, et article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 40/94 »

Dans l’affaire T-317/03,

Volkswagen AG, établie à Wolfsburg (Allemagne), représentée par MS. Risthaus, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par MM.  J. Weberndörfer et G. Schneider, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI ayant été

Nacional Motor, SA, établie à Martorelles (Espagne),

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’OHMI du 17 juin 2003 (affaire R 610/2001-4), relative à une procédure d’opposition entre Nacional Motor, SA et Volkswagen AG,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (quatrième chambre),

composé de MM. H. Legal, président, P. Mengozzi et Mme I. Wiszniewska-Białecka, juges,

greffier : Mme C. Kristensen, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 15 septembre 2003,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 20 janvier 2004,

à la suite de l’audience du 6 juillet 2005,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1       Le 25 juin 1998, Volkswagen AG a présenté une demande de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) en vertu du règlement (CE) nº 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié.

2       La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal Variant.

3       Les produits et les services pour lesquels l’enregistrement a été initialement demandé relèvent des classes 7, 12, 14, 18, 25, 27, 28 et 37 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié. Cette demande a été ultérieurement limitée à cinq classes, à savoir les classes 7, 12, 14, 27 et 37. En particulier, les produits et les services relevant des classes 7, 12 et 37, pour lesquels la demande de marque a été présentée, correspondent à la désignation suivante :

–       classe 7 : « Moteurs et leurs pièces (autres que ceux pour véhicules terrestres) » ;

–       classe 12 : « Véhicules ; appareils de locomotion par terre, par air ou par eau et leurs pièces » ;

–       classe 37 : « Réparations, en particulier réparation, entretien et révision de véhicules, y compris dépannage (réparation de véhicules dans le cadre d’une panne) ».

4       Le 18 janvier 1999, la demande de marque a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 04/99.

5       Le 19 avril 1999, Nacional Motor, SA (ci-après l’« opposante ») a formé une opposition à la demande de marque en invoquant un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous a) et b), du règlement nº 40/94. L’opposition était fondée sur les marques nationales antérieures DERBIVARIANT, DERBI VARIANT et VARIANTDERBI, enregistrées en Espagne. Les produits pour lesquels les marques antérieures ont été enregistrées relèvent de la classe 12 et correspondent à la description suivante : « Véhicules, notamment véhicules à moteur à deux roues; accessoires et pièces de rechange de ceux-ci ». L’opposition était dirigée contre l’enregistrement de la marque demandée pour les produits et les services relevant des classes 7, 12 et 37.

6       Par décision du 24 avril 2001, la division d’opposition a rejeté l’opposition, d’une part, pour défaut de preuves attestant que l’opposante était titulaire des marques antérieures DERBI VARIANT et VARIANTDERBI et, d’autre part, au motif pris de l’absence d’identité de la marque demandée avec la marque antérieure DERBIVARIANT, excluant l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 40/94, et de l’absence de risque de confusion entre les mêmes marques, excluant l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), de ce même règlement.

7       Le 20 juin 2001, l’opposante a formé un recours contre la décision de la division d’opposition. Elle a produit, à l’appui de son recours, de nouveaux éléments visant à prouver qu’elle était titulaire des marques DERBI VARIANT et VARIANTDERBI.

8       Par décision du 17 juin 2003, la quatrième chambre de recours de l’OHMI a annulé la décision de la division d’opposition et a rejeté la demande de marque communautaire (ci-après la « décision attaquée »). Sans prendre position sur les nouveaux éléments de preuves produits par l’opposante, relatifs à la propriété des marques antérieures DERBI VARIANT et VARIANTDERBI, la chambre de recours a limité son examen à la seule comparaison entre la marque demandée et la marque antérieure DERBIVARIANT. Elle a considéré qu’un risque de confusion, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, dans l’esprit du public espagnol, était réel, compte tenu, notamment, de l’identité et de la similitude entre les produits et les services concernés et des similitudes visuelles, phonétiques et conceptuelles entre les signes en conflit.

9       Le point 1 de la décision attaquée est rédigé comme suit :

« Par demande introduite le 25 juin 1998, Volkswagen AG […] a sollicité l’enregistrement en tant que marque communautaire de la marque verbale Variant, en relation, après limitation de sa demande et pour autant qu’elle se rapporte à la présente procédure, avec les produits et services indiqués ci-après :

Classe 7 […]

Classe 12 […]

Classe 37 […] »

10     Le dispositif de la décision attaquée est ainsi libellé :

« La chambre de recours :

1. annule la décision attaquée [de la division d’opposition] ;

2. rejette la demande de marque communautaire ;

[…] »

 Conclusions des parties

11     La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–       annuler la décision attaquée dans son ensemble ;

–       annuler, à tout le moins, la décision attaquée pour autant qu’elle rejette la demande d’enregistrement pour des produits non visés par l’opposition ;

–       condamner l’OHMI aux dépens.

12     L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–       faire droit à la demande d’annulation de la décision attaquée pour autant que celle-ci a rejeté la demande d’enregistrement pour les produits relevant des classes 14 et 27 ;

–       rejeter le recours pour le surplus ;

–       condamner la requérante aux dépens.

 En droit

13     À l’appui de son recours, la requérante invoque deux moyens. Le premier moyen est tiré d’une violation de l’article 74, paragraphe 1, du règlement n° 40/94. Le second moyen est tiré d’une erreur d’appréciation dans l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

 Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 74, paragraphe 1, du règlement n° 40/94

 Arguments des parties

14     La requérante soutient que, en refusant l’enregistrement de la marque demandée également pour les produits compris dans les classes 14 et 27, la chambre de recours a élargi, en violation de l’article 74, paragraphe 1, du règlement n° 40/94, l’objet de l’opposition, celle-ci étant dirigée uniquement contre la demande d’enregistrement pour les classes 7, 12 et 37.

15     L’OHMI admet que c’est à tort que la chambre de recours a rejeté la demande d’enregistrement également pour les produits compris dans les classes 14 et 27 et ne s’oppose donc pas à l’annulation de la décision attaquée en ce que celle-ci refuse l’enregistrement de la marque demandée également pour les produits relevant de ces classes. L’OHMI souligne cependant que l’erreur de la chambre de recours a été commise de toute évidence par inadvertance et qu’elle aurait pu être corrigée sur simple demande adressée par la requérante à l’OHMI.

 Appréciation du Tribunal

16     Il ressort du dossier et il est constant que l’opposition était dirigée contre l’enregistrement de la marque demandée uniquement pour les produits et les services relevant des classes 7, 12 et 37.

17     Toutefois, bien qu’au point 1 de la décision attaquée il soit précisé que la procédure d’opposition ne vise la demande d’enregistrement qu’en ce qui concerne les trois classes susvisées, au point 2 du dispositif, la chambre de recours a rejeté la demande de marque sans limiter la portée d’un tel rejet aux produits et aux services relevant desdites classes. Partant, en ce qu’elle statue ultra petita, la décision attaquée est entachée d’illégalité.

18     En effet, ainsi qu’il résulte d’une lecture combinée de l’article 43, paragraphe 5, première phrase, de l’article 62, paragraphe 1, première phrase, et de l’article 74, paragraphe 1, in fine, du règlement n° 40/94, la chambre de recours, dans le cadre d’un recours formé contre une décision de la division d’opposition, ne peut rejeter la demande de marque que dans les limites des prétentions que l’opposante fait valoir dans l’opposition dirigée à l’encontre de l’enregistrement de cette marque. La chambre de recours ne saurait en effet statuer au-delà de l’objet de l’opposition [arrêt du Tribunal du 14 octobre 2003, Phillips‑Van Heusen/OHMI – Pash Textilvertrieb und Einzelhandel (BASS), T‑292/01, Rec. p. II‑4335, points 23 et 24].

19     Dès lors, ainsi que l’admet l’OHMI, c’est à tort que la chambre de recours a, par le point 2 du dispositif de la décision attaquée, rejeté la demande de marque dans son ensemble.

20     Il y a donc lieu d’annuler le point 2 du dispositif de la décision attaquée dans la mesure où il rejette la demande de marque pour les produits et les services autres que les produits et les services relevant des classes 7, 12 et 37.

 Sur le second moyen, tiré d’une erreur d’appréciation dans l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

 Arguments des parties

21     La requérante rappelle, tout d’abord, que, selon une jurisprudence constante, le risque de confusion doit s’apprécier en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce et, notamment, du degré de similitude des marques en conflit, du degré de similitude des produits en cause et du caractère distinctif de la marque antérieure, une telle appréciation devant se fonder sur l’attention qu’un consommateur normalement informé accordera aux marques au moment d’acheter les produits concernés (arrêts de la Cour du 11 novembre 1997, SABEL, C‑251/95, Rec. p. I‑6191, point 23, et du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, Rec. p. I‑3819, point 26). La requérante rappelle également que, selon cette même jurisprudence, l’appréciation du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude des marques en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par les marques, en tenant compte, notamment, des éléments distinctifs et dominants de celles-ci (arrêts SABEL, précité, point 23, et Lloyd Schuhfabrik Meyer, précité, point 26).

22     Selon la requérante, il ressort de cette jurisprudence que le titulaire d’une marque ne peut en revendiquer la protection que pour la forme sous laquelle celle-ci a été enregistrée. Ainsi, une marque qui se compose de plusieurs parties ne conférerait pas à son titulaire le droit d’agir contre l’usage de certains éléments ou de certaines parties de cette marque, laquelle serait protégée uniquement dans son ensemble.

23     En l’espèce, c’est à tort que l’OHMI aurait fondé l’existence d’un risque de confusion sur la seule constatation que le terme « variant », dont se compose la marque demandée, est contenu dans la marque antérieure DERBIVARIANT, sans considérer que cette dernière est formée par un ensemble indissociable.

24     En effet, selon la requérante, le mot « variant » n’est pas reconnaissable d’emblée dans la marque antérieure, de sorte qu’il n’est pas justifié de le séparer du mot « derbi » et de le considérer comme dominant.

25     La requérante fait également observer que l’opposante est, depuis 1949, titulaire de la marque DERBI. Cette marque aurait acquis, du fait de son usage pendant plus de 50 ans, un caractère distinctif fort. Par contre, le mot « variant », du fait de sa similitude avec le terme espagnol « variante », serait légèrement descriptif et, dès lors, faiblement distinctif. Par conséquent, selon la requérante, c’est plutôt le terme « derbi » qui doit être considéré comme dominant dans la marque antérieure.

26     La requérante soutient qu’il n’existe aucune similitude sur le plan visuel entre les signes en conflit, en raison de la différence significative dans le nombre de lettres dont elles se composent et compte tenu de l’impression d’ensemble créée par celles-ci.

27     À cet égard, la requérante fait valoir que, dans son appréciation des similitudes visuelles entre les marques en cause, l’OHMI a méconnu l’importance que revêt le début du mot par rapport aux éléments qui suivent. Elle fait observer que les consommateurs apprennent à connaître une marque comme celle visée par l’opposition par le début du mot, alors qu’ils n’assimilent la fin du mot qu’avec le temps, après avoir rencontré la marque plusieurs fois.

28     Sur le plan auditif, il n’existerait aucune similitude en raison notamment de la différence dans le nombre de syllabes qui composent les signes en conflit et de la circonstance que le mot « derbi », qui figure uniquement dans la marque antérieure, précède, dans celle-ci, le mot « variant ».

29     Du point de vue conceptuel, la requérante fait valoir que la constatation de la chambre de recours, selon laquelle le terme « variant » pourrait être compris comme désignant une « déviation par rapport à un standard », ne suffit pas pour étayer une association d’idées entre les deux signes en conflit. En effet, un terme indiquant une variante par rapport à un standard demeurerait toujours subordonné au standard auquel il renvoie. Ainsi, la marque antérieure pourrait être comprise dans le sens d’une évolution ou d’une déviation par rapport au « derbi-original ». Par contre, la marque proposée à l’enregistrement est composée du mot « variant » utilisé isolément, qui, même s’il peut évoquer en espagnol l’idée d’une « variante », renverrait à un concept général et il ne se rapporterait pas à un standard, qui puisse permettre d’interpréter la marque comme évoquant l’idée d’une déviation de ce standard.

30     La requérante reproche, enfin, à la chambre de recours d’avoir omis dans la décision attaquée toute référence au niveau d’attention du public concerné. À cet égard, la requérante soutient que, lors de l’achat de véhicules à moteur, le public se montre particulièrement attentif, car il s’agit de produits qui exigent un investissement important et qui, en règle générale, ne sont achetés qu’après mûre réflexion. Le niveau d’attention demeurerait élevé même lors de l’achat de pièces de rechange et d’accessoires, le consommateur devant veiller à la compatibilité de ceux-ci avec le véhicule.

31     L’OHMI conteste tout d’abord l’affirmation de la requérante, selon laquelle le signe verbal DERBIVARIANT constitue une unité indissociable. Au contraire, selon l’OHMI, le consommateur espagnol pertinent disséquera le signe verbal composant la marque antérieure et considérera le premier élément constitutif du signe, à savoir « derbi », comme le terme généralement connu et utilisé pour désigner une rencontre sportive entre des équipes d’une même ville ou de villes proches et il associera automatiquement le second, l’élément « variant », au mot espagnol « variante ».

32     L’OHMI rappelle ensuite que, dans son arrêt du 25 novembre 2003, Oriental Kitchen/OHMI – Mou Dybfrost (KIAP MOU) (T‑286/02, Rec. p. II‑4953, point 39), le Tribunal a jugé que, dans le cas où l’un des deux seuls termes constituant une marque verbale est identique, sur les plans visuel et auditif, à l’unique terme constituant une marque verbale antérieure, et où ces termes, pris ensemble ou isolément, n’ont, sur le plan conceptuel, aucune signification pour le public concerné, les marques en cause, considérées chacune dans leur ensemble, sont normalement à considérer comme similaires. Le principe posé par cet arrêt serait transposable en l’espèce, puisque les mots composant la marque antérieure et la marque proposée à l’enregistrement, bien qu’ayant une signification, n’auraient cependant aucun rapport descriptif avec les produits et les services qu’ils désignent. À cet égard, l’OHMI fait valoir que l’argument de la requérante, selon lequel le terme « variant » serait légèrement descriptif, est incorrect, un tel mot n’étant généralement pas utilisé dans le segment de marché concerné.

33     Selon l’OHMI, qui renvoie à cet égard à l’appréciation du Tribunal contenue au point 43 de l’arrêt KIAP MOU, précité, les deux termes composant la marque antérieure ont un pouvoir attractif équivalent à l’égard du public pertinent. En tout état de cause, s’il fallait reconnaître un pouvoir attractif prédominant à une partie de la marque DERBIVARIANT, celui-ci reviendrait au terme « variant ». En effet, dans ce mot, la suppression de la lettre « e » créerait un écart frappant par rapport à l’orthographe du mot « variante » en espagnol, de nature à retenir l’attention du consommateur. Cette conclusion serait également corroborée par la circonstance que l’élément « variant » est d’une longueur supérieure à celle de l’élément « derbi ».

34     L’OHMI soutient, enfin, que le degré d’attention du consommateur ne peut qu’être jugé faible pour une partie des produits concernés, à savoir tous les articles désignés avec le terme général « pièces », dont l’origine n’aurait guère d’intérêt aux yeux du consommateur. Il en irait de même pour les services de réparation, d’entretien et de révision, dans la mesure où il s’agit de services de routine ou de moindre importance.

 Appréciation du Tribunal

35     Conformément à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 40/94, « sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de la similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire dans lequel la marque antérieure est protégée; le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure ».

36     Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d’entreprises liées économiquement.

37     Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public concerné a des signes et des produits ou services en cause, en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance entre la similitude des signes et celle des produits ou services désignés [voir arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMIGiorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec. p. II‑2821, points 31 à 33, et la jurisprudence citée].

38     En l’espèce, la marque antérieure étant enregistrée en Espagne, l’existence d’un risque de confusion doit être appréciée du point de vue du public espagnol.

39     Par ailleurs, étant donné la nature des produits et des services concernés, dont la désignation est reproduite aux points 3 et 5 ci-dessus, le public ciblé par rapport auquel l’analyse du risque de confusion doit s’effectuer est composé, pour tous les produits et services en cause, du consommateur moyen espagnol.

40     En ce qui concerne le degré d’attention du consommateur pertinent lors de l’achat des produits concernés ou du choix du fournisseur des services désignés par la marque demandée, il importe de souligner que s’il est vraisemblable que le public ciblé se montrera particulièrement attentif lors de l’achat de véhicules à moteur, produits pouvant représenter un investissement important, en revanche le niveau d’attention sera moindre, ainsi que le souligne à juste titre l’OHMI, s’agissant des pièces de rechange, des accessoires, et des services d’entretien et de réparation, bien que, à tout le moins en ce qui concerne les pièces de rechange, un certain degré d’attention soit malgré tout nécessaire afin de vérifier la compatibilité de ces produits avec les véhicules auxquels ils sont destinés.

–       Sur les produits et les services en cause

41     Selon une jurisprudence constante, il y a lieu, pour apprécier la similitude entre les produits ou services en cause, de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre les produits ou services. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire [arrêt du Tribunal du 23 octobre 2002, Institut für Lernsysteme/OHMI – Educational Services (ELS), T‑388/00, Rec. p. II‑4301, point 51].

42     En l’espèce, l’opposition se fonde sur une marque antérieure enregistrée pour des produits relevant de la classe 12 et est dirigée contre l’enregistrement de la marque demandée pour des produits et des services relevant de la même classe ainsi que des classes 7 et 37.

43     À cet égard, il convient de souligner que les produits visés par la marque demandée, compris dans les classes 7 et 12, et ceux couverts par la marque antérieure, compris dans la classe 12, sont identiques ou largement similaires.

44     Par ailleurs, bien que les produits pour lesquels la marque antérieure est protégée ne comprennent pas les services de réparation, entretien et révision de véhicules, visés par la marque demandée et relevant de la classe 37, lesdits services peuvent être considérés comme accessoires ou complémentaires par rapport aux produits désignés par la marque antérieure compris dans la classe 12 (« Véhicules, notamment véhicules à moteur à deux roues ; accessoires et pièces de rechange de ceux-ci »), étant souvent fournis, ainsi que la chambre de recours l’a à juste titre relevé au point 14 de la décision attaquée, par les mêmes entreprises qui commercialisent les véhicules à moteur.

–       Sur les signes en cause

45     Selon une jurisprudence constante, l’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants (voir arrêt BASS, précité, point 47, et la jurisprudence citée). En effet, le consommateur moyen du type de produit ou service en cause, dont la perception qu’il a des marques joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale du risque de confusion, perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir, par analogie, arrêt SABEL, précité, point 23).

46     Ainsi qu’il ressort de la jurisprudence, il y a lieu de relever que deux marques sont similaires lorsque, du point de vue du public pertinent, il existe entre elles une égalité au moins partielle en ce qui concerne un ou plusieurs aspects pertinents [arrêt du Tribunal du 23 octobre 2002, Matratzen Concord/OHMI – Hukla Germany (MATRATZEN), T‑6/01, Rec. p. II‑4335, point 30].

47     En l’espèce, il convient tout d’abord de relever que le seul mot qui constitue la marque demandée, « variant », est entièrement contenu dans le vocable « derbivariant » qui compose la marque antérieure. Par conséquent, ainsi qu’il est observé en substance au point 11 de la décision attaquée, les deux signes présentent une certaine similitude tant sur le plan visuel que sur le plan phonétique.

48     Plus particulièrement, il y a lieu de relever que, en termes de lettres et de syllabes, la séquence qui compose l’élément verbal « variant » constitue la partie prépondérante de la marque antérieure. Cette séquence reproduit sans aucun écart le signe verbal composant la marque demandée.

49     En revanche, les deux signes en cause se différencient, sur les plans visuel et phonétique, par l’ajout, dans la marque antérieure, des cinq lettres et des deux syllabes qui composent le mot « derbi ».

50     Or, s’il est vrai que, comme le souligne la requérante, le consommateur attache normalement plus d’importance à la partie initiale des mots [arrêt du Tribunal du 17 mars 2004, El Corte Inglés/OHMI – González Cabello et Iberia Líneas Aéreas de España (MUNDICOR), T‑183/02 et T‑184/02, non encore publié au Recueil, point 81], en l’espèce, il apparaît que la dissemblance entre les deux signes en conflit concernant les cinq premières lettres de la marque antérieure n’est pas suffisante pour neutraliser, sur les plans visuel et phonétique, la similitude découlant de l’identité constatée entre la partie la plus importante, en terme de lettres et de syllabes, de la marque antérieure et l’unique élément verbal composant la marque demandée.

51     S’agissant de la similitude conceptuelle, c’est à bon droit que la chambre de recours a estimé que, d’un point de vue sémantique, les marques en conflit renvoyaient toutes deux à l’idée d’une « variante ».

52     En effet, le mot « variant » qui constitue tant la partie prépondérante de la marque antérieure que le seul mot composant la marque demandée sera, sans effort particulier, assimilé par le public ciblé au mot espagnol « variante », se différenciant du mot « variant », sur les plans visuel et phonétique, uniquement par un écart orthographique qui, bien que perceptible, n’est pas de nature à empêcher une association conceptuelle immédiate entre les deux termes.

53     Par ailleurs, malgré la présence dans la marque antérieure du mot « derbi », qui constitue en espagnol le terme généralement utilisé pour désigner une rencontre sportive entre des équipes d’une même ville ou de villes proches, il y a lieu de considérer que, ainsi que le relève à juste titre la chambre de recours au point 10 de la décision attaquée, c’est plutôt l’idée de « variation par rapport à un standard », à laquelle renvoie le mot espagnol « variante », évoqué par le terme « variant », que le consommateur espagnol sera porté à retenir d’un point de vue conceptuel lorsqu’il sera confronté à la marque antérieure.

54     Une telle conclusion n’est pas infirmée par l’argument de la requérante selon lequel l’ajout de l’élément verbal « derbi » dans la marque antérieure évoquerait plutôt l’idée d’une variation par rapport à un standard constitué par le « derbi‑original », alors que l’utilisation du mot « variant » isolément dans la marque demandée renverrait plutôt à un concept général de « variante », non rapporté à un standard prédéfini. En effet, même si l’on voulait suivre le raisonnement de la requérante, le concept dominant évoqué par les deux marques serait en tout cas celui d’une variation, qu’elle se rapporte ou non à un standard donné.

55     Par ailleurs, la présente affaire se différencie de celle qui a donné lieu à l’arrêt du Tribunal du 22 juin 2005, Plus/OHMI – Bälz et Hiller (Turkish Power) (T‑34/04, non encore publié au Recueil), invoqué par la requérante lors de l’audience. En effet, dans cette affaire, le Tribunal, appelé à juger de l’existence d’un risque de confusion entre la marque verbale POWER et la marque figurative comprenant l’élément verbal « Turkish Power », a considéré que les similitudes conceptuelles entre les marques en conflit, évoquant toutes les deux le concept de force, pouvaient, dans une large mesure, être neutralisées par l’élément figuratif contenu dans la marque demandée, reproduisant la tête d’un lion rugissant, qui ajoutait une connotation distincte d’agressivité au concept de puissance véhiculé par l’élément verbal « power » de la marque nationale antérieure (arrêt Turkish Power, précité, points 61 à 63). Or, en l’espèce, un tel élément de différenciation n’existe pas.

56     Il convient ainsi de conclure que, d’un point de vue conceptuel, les marques en cause présentent également une certaine similitude.

57     Enfin, il y a lieu de relever que, contrairement à ce que soutient la requérante, l’élément verbal « derbi » de la marque antérieure ne présente pas un caractère dominant. À cet égard, il convient d’observer que ni l’élément « derbi » ni l’élément « variant » ne revêt un caractère descriptif spécifique par rapport aux produits ou services concernés. En particulier, s’il est vrai que le mot « variant », en ce qu’il se rapproche du mot espagnol « variante », est susceptible d’évoquer l’idée d’une différente version ou gamme d’un même produit, il n’est pas pour autant de nature à créer, dans l’esprit du consommateur, un lien automatique avec les produits ou les services en cause, puisqu’il a, au contraire, vocation à se rattacher à tout produit ou service.

58     Par ailleurs, bien que, en raison même de l’idée qu’il est susceptible d’évoquer, le mot « variant » puisse ne pas être doté d’un caractère distinctif particulièrement fort, il n’en reste pas moins qu’il s’agit de l’élément prépondérant sur le plan phonétique et visuel et qu’il constitue l’élément que le consommateur espagnol sera porté à retenir d’un point de vue conceptuel.

–       Sur le risque de confusion

59     Compte tenu de l’identité ou de la similitude entre les produits désignés par la marque antérieure et les produits et les services couverts par la marque demandée ainsi que des similitudes visuelles, phonétiques et conceptuelles entre les deux marques, c’est à bon droit que la chambre de recours a conclu qu’il existait en l’espèce un risque concret que le public concerné puisse croire que les produits et les services désignés par lesdites marques ont une même origine commerciale.

60     Une telle conclusion vaut pour tous les produits relevant des classes 7 et 12, qu’il s’agisse de véhicules à moteur, de pièces de rechange ou d’accessoires. En effet, bien que le degré d’attention du public lors de l’achat d’un véhicule puisse être plus élevé que dans le cas de pièces de rechange ou d’accessoires, ou même particulièrement élevé, les similitudes entre les produits concernés et les signes en conflit sont de nature à laisser persister un risque réel de confusion. Il en va de même pour les services compris dans la classe 37.

61     Dès lors, le second moyen d’annulation, tiré d’une erreur d’appréciation dans l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, doit être rejeté.

 Sur les dépens

62     Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé en l’essentiel de ses moyens et arguments, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le point 2 du dispositif de la décision de la quatrième chambre de recours de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) du 17 juin 2003 (affaire R 610/2001-4) est annulé dans la mesure où il rejette la demande d’enregistrement en tant que marque communautaire du signe verbal Variant pour les produits et services autres que les produits et services relevant des classes 7, 12 et 37.

2)      Le recours est rejeté pour le surplus.

3)      La requérante est condamnée aux dépens.

Legal

Mengozzi

Wiszniewska-Białecka

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 26 janvier 2006.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       H. Legal


* Langue de procédure : l'allemand.