Language of document : ECLI:EU:T:2015:260

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre)

5 mai 2015 (*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire figurative skype – Marque communautaire verbale antérieure SKY – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑423/12,

Skype Ultd, établie à Dublin (Irlande), représentée initialement par Mme I. Fowler, solicitor, Me J. Schmitt, avocat, et M. J. Mellor, QC, puis par Mme A. Carboni et M. M. Browne, solicitors,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. P. Bullock, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

les autres parties à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

Sky plc, anciennement British Sky Broadcasting Group plc, établie à Isleworth (Royaume-Uni),

Sky IP International Ltd, établie à Isleworth,

représentées par M. D. Rose et Mme V. Baxter, solicitors, puis par MM. Rose, R. Guthrie, solicitors, T. Moody-Stuart, barrister, et Mme J. Curry, solicitor,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’OHMI du 26 juillet 2012 (affaire R 1561/2010‑4), relative à une procédure d’opposition entre British Sky Broadcasting Group plc et Sky IP International Ltd, d’une part, et Skype Ultd, d’autre part,

LE TRIBUNAL (première chambre),

composé de M. H. Kanninen, président, Mme I. Pelikánová (rapporteur) et M. E. Buttigieg, juges,

greffier : M. I. Dragan, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 27 septembre 2012,

vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 30 janvier 2013,

vu le mémoire en réponse des intervenantes déposé au greffe du Tribunal le 11 mars 2013,

à la suite de l’audience du 18 novembre 2014,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 28 juin 2005, la société à laquelle a succédé la requérante, Skype Ultd, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

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3        Les produits et services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 9, 38 et 42 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 9 : « Radios, récepteurs radio, récepteurs radio avec horloge, syntoniseurs, amplificateurs audio, unités pour équipements audio, télécommandes pour récepteurs, télécommandes pour amplificateurs, systèmes de haut-parleurs, égaliseurs, machines pour l’enregistrement et la reproduction du son, haut-parleurs pour la reproduction stéréophonique et monophonique du son, haut-parleurs, lecteurs de disques compacts, graveurs de disques compacts, chargeurs de disques compacts pour changer la lecture et la sélection de plusieurs disques compacts, télécommandes pour lecteurs de disques compacts ; serveurs électroniques de centres informatiques, audio et vidéo à domicile, télévisions, télévision sur projection, panneaux d’affichage à cristaux liquides, télévisions à cristaux liquides, télévisions à plasma, petites télévisions, récepteurs de télévision, syntoniseurs de télévision, tubes cathodiques à image, télécommandes pour télévisions, unités audio haute fidélité utilisées comme pièces externes de systèmes de télévision, écrans de télévision avec ou sans syntoniseur, décodeurs, commutateurs de la température de couleur pour télévisions, tubes images fluorescents amovibles pour télévisions, accessoires de télévision, à savoir, raccords de fibres optiques, systèmes d’amélioration de l’image, câbles et câbles DVI-I ; appareils électriques pour l’enregistrement du son, enregistreurs de bandes vidéonumériques, lecteurs de disques vidéonumériques, lecteurs audionumériques, disques audionumériques, équipements de communication optique, assistants numériques, encodeurs et décodeurs numériques, lecteurs mp3 ; appareils photographiques numériques, imprimantes et imprimantes portatives pour appareils photographiques numériques ; dispositifs électroniques numériques portables pour l’enregistrement, l’organisation, la transmission, la manipulation et la révision de textes, données et fichiers audio ; logiciels pour l’organisation, la transmission, la manipulation, la lecture et la révision de textes, données et fichiers audio sur des dispositifs électroniques numériques portables ; casques d’écoute, écouteurs, casques avec lecteur audio intégré, dispositifs portables de lecture de fichiers audio ; dispositifs de communication sans fil, à savoir, téléphones, combinés, casques, haut-parleurs, microphones, écouteurs ; dispositifs de communication Bluetooth, à savoir, téléphones, combinés, casques, haut-parleurs, microphones et écouteurs » ;

–        classe 38 : « Fourniture de communications point-à-point de voix sur IP (VOIP), transmission électroniques de données et documents sur des terminaux informatiques et services de messagerie instantanée ; fourniture d’accès rapide à des réseaux locaux et à un réseau informatique mondial d’informations » ;

–        classe 42 : « Services informatiques et développement de logiciels pour des tiers, à savoir, conception de logiciels et de matériel informatique pour applications de télécommunication et de voix sur IP (VoIP), transmission de données et de services de messagerie instantanée ; création et entretien de sites web pour des tiers ; hébergement de sites web de tiers sur un serveur d’ordinateurs pour un réseau informatique mondial ; installation et maintenance de logiciels ; fourniture d’accès temporaire à des logiciels non téléchargeables en ligne permettant aux abonnés d’utiliser des services de communications VOIP ; fourniture de logiciels téléchargeables en ligne permettant aux abonnés d’utiliser des services de communications VOIP ».

4        La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 11/2006, du 13 mars 2006.

5        Le 13 juin 2006, British Sky Broadcasting Group plc, devenue Sky plc, et Sky IP International Ltd, ont formé opposition au titre de l’article 42 du règlement n° 40/94 (devenu article 41 du règlement n° 207/2009), à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits et les services visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée, notamment, sur la marque communautaire verbale antérieure SKY, déposée le 30 avril 2003 et enregistrée le 14 octobre 2008, désignant notamment les produits et services relevant des classes 9, 38, 41 et 42 et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 9 : « Appareils et instruments scientifiques, nautiques, géodésiques, photographiques, cinématographiques, optiques, de pesage, de mesurage, de signalisation, de contrôle (inspection), de secours (sauvetage) et d’enseignement ; appareils et instruments pour la conduite, la distribution, la transformation, l’accumulation, le réglage ou la commande du courant électrique ; appareils pour l’enregistrement, la transmission, la reproduction du son ou des images ; supports d’enregistrement magnétiques, disques acoustiques ; distributeurs automatiques et mécanismes pour appareils à prépaiement ; caisses enregistreuses, machines à calculer, équipement pour le traitement de l’information et les ordinateurs ; extincteurs ; y compris appareils et instruments pour le stockage de données, logiciels et logiciels de stockage de données, et logiciels de vidéoconférence, à l’exception des batteries de voiture » ;

–        classe 38 : « Télécommunications, y compris services de vidéoconférence et partage de fichiers, images, musique, vidéo, photos, dessins, contenu audiovisuel, textes, documents et données ; à l’exception des services de communications télégraphiques » ;

–        classe 41 : « Éducation et divertissement ; formation ; divertissement ; activités sportives et culturelles » ;

–        classe 42 : « Services scientifiques et technologiques ainsi que services de recherches et de conception y relatifs ; services d’analyses et de recherches industrielles ; conception et développement d’ordinateurs et de logiciels ; conseils et représentation juridiques ; y compris infrastructures de stockage techniques en ligne, services et infrastructures de sauvegarde techniques en ligne, services de modèle SaaS et hébergement électronique de fichiers, données, photographies, graphismes, documents, vidéos, images, fichiers audio, fichiers audiovisuels, fichiers vidéo, fichiers informatiques, applications informatiques, informations pour des tiers et services de vidéoconférence, mais à l’exception de la réalisation d’analyses chimiques ».

7        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphes 4 et 5, du règlement n° 40/94 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphes 4 et 5, du règlement n° 207/2009].

8        Le 6 juillet 2010, la division d’opposition a fait droit à l’opposition pour l’ensemble des produits et des services concernés, sur le fondement de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

9        Le 11 août 2010, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’opposition.

10      Par décision du 26 juillet 2012 (ci-après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours. En particulier, elle a considéré que les produits et services désignés par les marques en conflit étaient identiques et que les marques en conflit présentaient un degré moyen de similitude visuelle, phonétique et conceptuelle. Selon la chambre de recours, la marque SKY jouit d’un caractère distinctif accru au Royaume-Uni, à tout le moins pour une partie des produits et des services concernés, relevant des classes 9, 38 et 41, et le degré de son caractère distinctif est moyen pour les autres produits et services concernés. Par conséquent, il existerait un risque de confusion, même en tenant compte d’un éventuel niveau d’attention plus élevé de la part du consommateur pertinent. Par ailleurs, les conditions permettant de constater une réduction du risque de confusion en raison d’une coexistence paisible des marques sur le marché ne seraient pas réunies en l’espèce.

 Conclusions des parties

11      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

12      L’OHMI et les intervenantes, Sky plc et Sky IP International Ltd, concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

13      La requérante soulève un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

14      Au soutien de son moyen unique, la requérante fait valoir, premièrement, que, contrairement aux constatations de la chambre de recours, les signes en conflit ne sont pas similaires, deuxièmement, que la marque demandée a elle-même acquis, par son usage intensif, une signification secondaire pour les produits et les services concernés, de nature à neutraliser toute similitude pouvant exister entre les signes et, troisièmement, que les marques en conflit ont coexisté sur le marché pendant de nombreuses années, sans qu’il y ait eu confusion entre elles.

15      L’OHMI et les intervenantes contestent les arguments de la requérante.

16      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

17      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec., EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

18      Lorsque la protection de la marque antérieure s’étend à l’ensemble de l’Union européenne, il y a lieu de prendre en compte la perception des marques en conflit par le consommateur des produits/services en cause sur ce territoire. Toutefois, il convient de rappeler que, pour refuser l’enregistrement d’une marque communautaire, il suffit qu’un motif relatif de refus au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 existe dans une partie de l’Union [voir, en ce sens, arrêt du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, Rec, EU:T:2006:397, point 76 et jurisprudence citée].

 Sur le public pertinent

19      Selon la jurisprudence, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir arrêt du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, Rec, EU:T:2007:46, point 42 et jurisprudence citée].

20      La chambre de recours a considéré que le public pertinent se composait du grand public et des professionnels de l’ensemble de l’Union. Au regard du principe rappelé au point 18 ci-dessus, elle a toutefois limité son examen au seul public du Royaume-Uni.

21      La requérante ne conteste pas cette définition du public pertinent, mais fait valoir que le consommateur pertinent est avisé et choisit avec soin les produits et les services désignés par la marque demandée.

22      Il convient d’entériner l’appréciation de la chambre de recours, selon laquelle le public pertinent se compose du grand public et des professionnels. Par ailleurs, les produits et services visés par les marques en conflit sont constitués, notamment, par des produits d’équipement audio et vidéo, de téléphonie et de photographie, ainsi que par des services informatiques liés à des logiciels ou à la création ou à l’hébergement de sites Internet. Si ces produits et services sont susceptibles d’être utilisés quotidiennement par le consommateur final, ils ne sont pas achetés régulièrement par ce dernier et leur prix est relativement élevé. En outre, ils présentent en partie un caractère technique et spécialisé.

23      Dans ces conditions, c’est à juste titre que la requérante soutient que le consommateur pertinent choisit avec soin les produits et les services visés par les marques en conflit.

24      En revanche, contrairement à l’affirmation de la requérante, il ne saurait être supposé que le consommateur moyen de services de communications point-à-point de voix sur IP (VOIP) soit par principe plus avisé et mieux informé que le consommateur moyen de services de télévision. En effet, les services de communications point-à-point, malgré leur caractère technique, s’adressent à un public général et leur utilisation ne nécessite pas de connaissances techniques particulières, au-delà d’une aptitude à utiliser un ordinateur et l’internet. Dès lors, il convient de supposer que le consommateur pertinent n’a pas davantage de connaissances techniques que la moyenne des consommateurs finaux.

 Sur la comparaison des produits et des services

25      Selon une jurisprudence constante, pour apprécier la similitude entre les produits ou les services en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux [voir arrêt du 11 juillet 2007, El Corte Inglés/OHMI – Bolaños Sabri (PiraÑAM diseño original Juan Bolaños), T‑443/05, Rec, EU:T:2007:219, point 37 et jurisprudence citée].

26      La chambre de recours a constaté, à la suite d’un examen exhaustif, que les produits et les services désignés par les marques en conflit étaient identiques. Il y a lieu de souscrire à cette constatation, que les parties n’ont d’ailleurs pas contestée.

27      Si la requérante a, en outre, tenté de tirer argument du fait que les services désignés par la marque demandée, tels qu’effectivement proposés sur le marché, étaient fort différents des produits et des services désignés par la marque SKY, tels qu’effectivement proposés sur le marché par les intervenantes, il convient de rappeler, à l’instar de ce que l’OHMI a fait valoir lors de l’audience, que la comparaison des produits et des services désignés par les marques en conflit doit se faire sur le fondement des listes des produits et des services telles que, respectivement, enregistrées ou demandées.

 Sur la comparaison des signes

28      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, Rec, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

 Sur l’incidence de l’élément figuratif de la marque demandée

29      La marque demandée est constituée par l’élément verbal « skype », entouré d’un bord découpé sous forme de nuage ou de bulle (voir point 2 ci-dessus). La chambre de recours a essentiellement fondé son appréciation de la similitude des signes sur l’analyse de l’élément verbal, en considérant que l’élément figuratif avait une fonction « purement décorative ».

30      Il convient de souscrire à cette approche. En effet, d’un point de vue visuel, l’élément figuratif se limite à mettre en évidence l’élément verbal, précisément en raison du fait qu’il se présente comme une bordure qui suit d’une manière relativement précise les contours du mot « skype », sans y ajouter une autre forme identifiable. En particulier, les deux petites bosses apparaissant à gauche et à droite de l’élément verbal ne retiennent pas immédiatement l’attention et ne seront ainsi pas en mesure d’atténuer l’impression générale de l’élément figuratif perçu comme une simple bordure.

31      Il ne saurait être reproché à la chambre de recours, contrairement à ce que fait valoir la requérante, de n’avoir pas suffisamment accordé d’importance à l’élément figuratif. S’il est vrai, ainsi que le fait valoir la requérante, que la marque demandée doit être appréciée dans son intégralité en tenant dûment compte de son élément figuratif, cela n’exclut pas que certains de ses éléments retiennent moins l’attention que d’autres et soient, par conséquent, moins à même d’influencer l’impression visuelle d’ensemble créée par elle. Or, ainsi qu’il a été exposé au point précédent, tel est précisément le cas en l’espèce pour l’élément figuratif, par rapport à l’élément verbal.

32      Ces considérations sont valables à plus forte raison d’un point de vue phonétique, puisque l’élément figuratif en forme de bordure n’est pas susceptible de produire une impression phonétique. L’impression phonétique d’ensemble produite par la marque demandée sera donc déterminée exclusivement par l’élément verbal.

33      De même, sur le plan conceptuel, il n’apparaît pas quel serait le concept qui pourrait être véhiculé par l’élément figuratif. Considéré de manière isolée, cet élément pourrait, tout au plus, faire penser à un nuage. Cependant, une telle association ne s’impose pas nécessairement lorsque l’élément figuratif est apprécié avec l’élément verbal, en raison du fait que l’élément figuratif suit dans une très large mesure les contours de l’élément verbal. La requérante n’a d’ailleurs pas fait valoir que l’élément figuratif revêtirait une quelconque signification.

 Sur la comparaison visuelle, phonétique et conceptuelle

34      S’agissant de la comparaison visuelle avec la marque antérieure SKY, la chambre de recours a considéré que, même si l’élément verbal de la marque demandée s’écrit en un seul mot, le public pertinent remarquerait les trois lettres « sky » communes aux deux marques, dès lors qu’elles sont placées au début dudit élément verbal. Partant, il existerait un degré moyen de similitude visuelle.

35      Sur le plan phonétique, la chambre de recours a considéré que les deux signes se prononçaient en une seule syllabe « skaip » et « skai » et que le début des marques coïncidait donc, la seule différence résidant dans le son final « p » de la marque demandée. Elle a conclu à un degré moyen de similitude phonétique.

36      Sur le plan conceptuel, la chambre de recours a considéré que le mot anglais « sky » signifiait « la zone de l’atmosphère et du cosmos vue de la terre ». Bien que le terme « skype » n’ait aucune signification en anglais, il ne saurait être exclu que le public pertinent identifie en son sein le terme « sky », correspondant au début de la marque demandée. Dès lors, il existerait un degré moyen de similitude conceptuelle.

37      Les arguments de la requérante relatifs aux trois aspects de la comparaison s’articulent, en substance, autour de deux axes : d’une part, la chambre de recours aurait artificiellement décomposé le terme « skype » en « sky » et « pe », alors qu’il s’agirait d’un terme unique, et, d’autre part, elle n’aurait pas tenu compte du fait que, les marques en conflit étant des signes relativement courts, les différences auraient un poids plus important et l’impact du début du signe serait réduit, par rapport à des signes plus longs.

38      L’OHMI et les intervenantes contestent les arguments de la requérante.

39      Il y a lieu de constater que les arguments de la requérante ne sont pas susceptibles de remettre en cause l’appréciation opérée par la chambre de recours, selon laquelle les signes en conflit sont similaires, sur les plans visuel, phonétique et conceptuel.

40      Ainsi, même à supposer, comme semble le faire la requérante, que la chambre de recours ait indûment fondé son constat de similitude sur le seul fait que les trois lettres « sky » sont reproduites au début de la marque demandée, en faisant abstraction des autres circonstances pertinentes, il convient de constater que, en l’espèce, un examen tenant compte de toutes ces circonstances et, notamment, de celles invoquées par la requérante, ne saurait conduire à un résultat différent.

41      En effet, le terme « sky » constituant la marque antérieure figure intégralement au début de la marque demandée. Il représente ainsi les trois cinquièmes des lettres de la marque demandée et sa syllabe unique se retrouve intégralement dans la marque demandée lorsque cette dernière est prononcée. Contrairement aux affirmations de la requérante, la prononciation de la voyelle « y » n’est pas plus brève dans le terme « skype » que dans le terme « sky ». Ce dernier terme reste clairement identifiable dans le terme « skype » malgré le fait que la marque demandée soit écrite en un seul mot, sans qu’il puisse être question d’une « décomposition artificielle », ainsi que le prétend la requérante. En effet, c’est précisément le fait que les lettres « sky » se trouvent au début de la marque demandée qui rend facilement identifiable en son sein le terme « sky », faisant partie du vocabulaire de base de la langue anglaise.

42      Dès lors, le fait que la partie identique des signes en conflit se trouve au début de la marque demandée n’est qu’une circonstance parmi d’autres, constitutives d’une similitude des signes en conflit. Le seul fait, souligné par la requérante, que des différences visuelles et phonétiques aient plus d’importance dans des signes courts tels que ceux en conflit ne suffit pas, en l’espèce, pour contrebalancer la similitude créée par les éléments susvisés.

43      Dans ce contexte, il convient de rejeter l’argument de la requérante selon lequel une identification, par le public pertinent, de l’élément « sky » dans le terme « skype » est exclue, puisque l’élément restant « pe » n’a pas de signification propre. En effet, si la décomposition, par le consommateur moyen, d’un signe verbal en des éléments verbaux, qui, pour lui, ont une signification concrète ou qui ressemblent à des mots qu’il connaît, peut être supposée dans des cas de figure où tous les éléments distincts ont une signification propre (arrêt \/ RESPICUR, point 19 supra, EU:T:2007:46, point 58) et si une telle décomposition est exclue lorsqu’il n’existe aucun élément ayant une signification concrète [arrêt du 11 novembre 2009, Bayer Healthcare/OHMI – Uriach-Aquilea OTC (CITRACAL), T‑277/08, EU:T:2009:433, point 55], il \/ découle \/ de la jurisprudence que l’identification, à l’intérieur d’un élément verbal, d’un mot présentant une signification concrète n’est pas subordonnée à l’exigence que le « reste » dudit élément verbal ait également une telle signification (voir, en ce sens, arrêt du 6 octobre 2004, Vitakraft-Werke Wührmann/OHMI – Krafft (VITAKRAFT), T‑356/02, Rec, EU:T:2004:292, point 53).

44      De même, la circonstance, invoquée par la requérante, que le Tribunal ait pu juger, dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 12 novembre 2009, Spa Monopole/OHMI – De Francesco Import (SpagO) (T‑438/07, Rec, EU:T:2009:434, point 24), qu’il est peu probable que le consommateur moyen soit enclin à scinder le signe SpagO en deux mots, « spa » et « go », ne saurait préjuger de la probabilité d’une identification, par le public pertinent, de l’élément « sky » au sein de la marque demandée en l’espèce. En effet, cette probabilité doit être appréciée au regard des circonstances de l’espèce, nécessairement différentes de celles de l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt SpagO, précité (EU:T:2009:434), s’agissant notamment des concepts véhiculés par les éléments verbaux constituant les signes en conflit. Dès lors, au regard des circonstances relevées aux points 41 à 43 ci-dessus, la chambre de recours a pu considérer, sans commettre d’erreur d’appréciation, qu’il ne saurait être exclu que le public identifie le terme « sky » dans la marque demandée, donnant ainsi lieu à une similitude conceptuelle moyenne des deux signes.

45      Il convient d’ajouter, à cet égard, que, dans l’hypothèse où le public pertinent identifierait l’élément figuratif comme représentant un nuage, cette circonstance serait susceptible d’augmenter encore la probabilité d’identification de l’élément « sky » au sein de la marque demandée, puisque les nuages se trouvent « dans le ciel » et pourront ainsi facilement être associés au terme « sky ». Dans cette hypothèse, le degré de similitude conceptuelle des deux signes se trouverait encore augmenté.

 Sur le risque de confusion

46      L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement (arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, Rec, EU:C:1998:442, point 17, et VENADO avec cadre e.a., point 18 supra, EU:T:2006:397, point 74).

47      En l’espèce, la chambre de recours a considéré que, eu égard à l’identité des produits et des services, au degré moyen de similitude phonétique, visuelle et conceptuelle des signes et, pour certains produits et services, au degré de caractère distinctif élevé de la marque antérieure, il existait un risque de confusion, pour le public pertinent au Royaume-Uni, même en tenant compte d’un éventuel niveau d’attention plus élevé de la part du public pertinent.

 Sur le caractère distinctif élevé de la marque antérieure, en raison de sa connaissance par le public

48      Ainsi qu’il découle du considérant 8 du règlement n° 207/2009, l’appréciation du risque de confusion dépend de nombreux facteurs et notamment de la connaissance qu’a le public de la marque sur le marché en cause. Comme le risque de confusion est d’autant plus étendu que le caractère distinctif de la marque s’avère important, les marques qui ont un caractère distinctif élevé, soit intrinsèquement, soit en raison de la connaissance qu’en a le public, jouissent d’une protection plus étendue que celles dont le caractère distinctif est moindre (voir, par analogie, arrêts du 11 novembre 1997, SABEL, C‑251/95, Rec, EU:C:1997:528, point 24 ; Canon, point 46 supra, EU:C:1998:442, point 18, et du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, Rec, EU:C:1999:323, point 20)

49      L’existence d’un caractère distinctif supérieur à la normale, en raison de la connaissance qu’a le public d’une marque sur le marché, suppose nécessairement que cette marque soit connue d’au moins une partie significative du public concerné, sans qu’elle doive nécessairement posséder une renommée au sens de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009. Il ne saurait être indiqué d’une façon générale, par exemple en recourant à des pourcentages déterminés relatifs au degré de connaissance qu’a le public de la marque dans les milieux concernés, qu’une marque a un caractère distinctif élevé. Néanmoins, il y a lieu de reconnaître une certaine interdépendance de la connaissance qu’a le public d’une marque et du caractère distinctif de celle-ci en ce sens que, plus la marque est connue du public ciblé, plus le caractère distinctif de cette marque est renforcé. Pour examiner si une marque jouit d’un caractère distinctif élevé en raison de la connaissance qu’en a le public, il convient de prendre en considération tous les éléments pertinents de la cause, à savoir, notamment, la part de marché détenue par la marque, l’intensité, l’étendue géographique et la durée de son usage, l’importance des investissements réalisés par l’entreprise pour la promouvoir, la proportion des milieux intéressés qui identifie les produits ou les services comme provenant d’une entreprise déterminée grâce à la marque ainsi que les déclarations des chambres de commerce et d’industrie ou d’autres associations professionnelles [voir arrêt du 12 juillet 2006, Vitakraft-Werke Wührmann/OHMI – Johnson’s Veterinary Products (VITACOAT), T‑277/04, Rec, EU:T:2006:202, points 34 et 35 et jurisprudence citée].

50      En l’espèce, la chambre de recours a constaté que la marque antérieure avait un caractère distinctif élevé, en raison de sa très grande renommée au Royaume-Uni, pour les « appareils pour l’enregistrement, la transmission, la reproduction ou la réception du son ou des images », relevant de la classe 9, les « télécommunications », relevant de la classe 38, et le « divertissement », relevant de la classe 41. Elle s’est fondée, à cet égard, sur une série d’éléments de preuve produits par les intervenantes, énumérés aux points 33 à 39 de la décision attaquée. Selon les constatations de la chambre de recours, il ressort notamment de ces éléments :

–        que les intervenantes sont le principal prestataire de télévision numérique au Royaume-Uni, que le groupe Sky jouit d’une renommée énorme et impressionnante et que la marque SKY est l’une des marques les plus connues au Royaume-Uni et considérée par les consommateurs comme étant à l’avant-garde de l’innovation dans les médias numériques ;

–        que le service de radiodiffusion SKY avait une audience de 10,7 millions de foyers en Europe et que la marque SKY avait une notoriété de 84 % auprès des personnes au Royaume-Uni ;

–        que, en janvier 2004, plus de 12 millions de foyers au Royaume-Uni avaient accès aux différentes chaînes de télévision et que le nombre total de téléspectateurs au Royaume-Uni pour toutes les chaînes de la marque SKY dépassait 50 millions en mars 2004 ;

–        que les intervenantes, qui comptent parmi les principaux annonceurs au Royaume-Uni, ont consenti d’importants investissements financiers dans différents médias pour le marketing, la publicité et la promotion de la marque SKY ;

–        que, outre leurs principaux services de télédiffusion, les intervenantes ont proposé un large éventail de produits et de services sous la marque SKY, y compris des services de téléphonie, d’internet, de courrier électronique, de haut débit et des services interactifs de divertissement, d’information, de sports et de films ;

–        que la renommée de la marque SKY a été reconnue par l’office de brevets au Royaume-Uni dans plusieurs décisions.

51      Il y a lieu de considérer, au regard de l’ensemble de ces éléments, que c’est à bon droit que la chambre de recours a conclu à un caractère distinctif accru de la marque SKY au Royaume-Uni, en raison de la connaissance qu’en a le public, pour les « appareils pour l’enregistrement, la transmission, la reproduction ou la réception du son ou des images », relevant de la classe 9, les « télécommunications », relevant de la classe 38, et le « divertissement », relevant de la classe 41. En particulier, contrairement à ce que fait valoir la requérante, la chambre de recours n’a pas « surestimé » ladite connaissance par le public.

52      Il convient également d’approuver la considération de la chambre de recours selon laquelle le fait que la gamme étendue de produits et de services des intervenantes se soit développée à partir de leur services traditionnels renommés de télédiffusion ne s’oppose pas à ce que le caractère distinctif accru de la marque SKY, acquis en raison de sa connaissance auprès du public pertinent, s’étende à d’autres domaines d’activité, pour autant que ces derniers aient été développés par les intervenantes à la date du dépôt de la demande de marque communautaire, le 28 juin 2005. Or, ainsi qu’il découle des éléments de preuve analysés par la chambre de recours, tel est le cas des produits et des services identifiés au point 51 ci-dessus, pour lesquels elle a constaté un caractère distinctif accru en raison de la connaissance de la marque SKY par le public pertinent.

 Sur le prétendu caractère distinctif élevé de la marque demandée, en raison de sa connaissance par le public

53      La requérante fait valoir que la marque demandée a elle-même acquis, par son usage intensif, une signification secondaire pour les produits et services visés au point 3 ci-dessus, à savoir en tant que référence directe à la requérante, circonstance qui a pour effet de neutraliser toute similitude entre les signes en conflit, dans le cadre de l’appréciation du risque de confusion. Selon elle, cela vaut malgré le fait que, à la date du dépôt de la demande de marque communautaire, le 28 juin 2005, les services fournis sous la marque demandée n’étaient sur le marché que depuis 20 mois.

54      Il convient de rejeter cet argument.

55      En effet, premièrement, la prétendue « signification secondaire » de la marque demandée n’est en réalité rien d’autre qu’un caractère distinctif du signe acquis par l’usage, à savoir un lien, établi par les consommateurs, entre ledit signe et la requérante fournissant les services désignés. En revanche, il ne s’agit pas d’un contenu conceptuel véhiculé par le signe lui-même et qui serait indépendant de la requérante. Par ailleurs, dans l’hypothèse où le terme « skype » aurait réellement acquis une signification propre pour identifier les services désignés par la marque demandée, il s’agirait alors d’un terme générique et, en conséquence, descriptif, pour ce genre de services.

56      Deuxièmement, selon une jurisprudence constante, c’est la connaissance auprès du public pertinent de la marque antérieure et non celle de la marque demandée qui doit être prise en compte pour apprécier s’il existe un risque de confusion entre les deux marques (voir, par analogie, arrêt Canon, point 46 supra, EU:C:1998:442, point 24 ; arrêt du 3 septembre 2009, Aceites del Sur-Coosur/Koipe, C‑498/07 P, Rec, EU:C:2009:503, point 84).

 Sur le prétendu caractère distinctif faible de la marque antérieure

57      Aux points 41 à 47 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré, d’une part, que le terme « sky » n’était pas descriptif des services de télédiffusion et des produits et des services qui y étaient afférents et, d’autre part, que les éléments de preuve présentés par la requérante afin de démontrer que ledit terme est largement utilisé par les tiers pour des services de télédiffusion et des produits et des services connexes, n’étaient pas en mesure de prouver une dilution de la marque SKY au Royaume-Uni.

58      La requérante fait valoir que la chambre de recours n’a pas tenu compte du fait que le terme « sky » est fortement allusif des services de télédiffusion et que son usage par des tiers en relation avec de nombreux produits et services relevant des classes 9, 38 et 42 a provoqué sa « dilution » pour les services en cause, de manière à affaiblir l’étendue de la protection pouvant être conférée à ce terme.

59      L’OHMI et les intervenantes contestent les arguments de la requérante.

60      S’agissant, premièrement, de la prétendue « dilution » de la marque SKY, il convient de constater que la requérante se limite aux allégations générales et non circonstanciées mentionnées au point 58 ci-dessus. De surcroît, elle ne se réfère que de manière abstraite aux « éléments de preuve produits par [elle] », sans indiquer quels seraient ces éléments. Or, il n’appartient pas au Tribunal de rechercher et d’identifier dans le dossier les éléments qui pourraient fonder les arguments de la requérante (voir, en ce sens, arrêt du 30 janvier 2007, France Télécom/Commission, T‑340/03, Rec, EU:T:2007:22, point 30).

61      Concernant, deuxièmement, le prétendu caractère distinctif intrinsèque faible du terme « sky », il ne semble pas exclu que, contrairement à l’avis de la chambre de recours, ledit terme présente un caractère descriptif par rapport aux services de télédiffusion, en raison de son caractère allusif par rapport à ces services, à tout le moins dans la mesure où ils sont transmis par voie de satellite. Toutefois, en l’espèce, il n’est pas nécessaire pour le Tribunal de prendre position à cet égard. En effet, d’une part, à le supposer admis, le caractère distinctif intrinsèque faible de la marque SKY pour les services de télédiffusion, ainsi que pour les produits relevant de la classe 9 qui ont un rapport étroit avec ces services, serait supplanté par son caractère distinctif accru pour ces mêmes services et produits, en raison de sa connaissance auprès du public pertinent, constatée ci-dessus. D’autre part, le supposé caractère distinctif intrinsèque faible pour certains produits et services n’affecterait pas le caractère distinctif de la marque SKY pour les autres produits et services désignés par cette marque. Dans ces conditions, les arguments que la requérante entend tirer du caractère descriptif ou allusif de la marque SKY sont inopérants [voir, en ce sens, arrêt du 9 septembre 2011, Deutsche Bahn/OHMI – DSB (IC4), T‑274/09, EU:T:2011:451, point 98].

62      Par conséquent, il y a lieu de rejeter ces arguments de la requérante.

 Sur la prétendue coexistence paisible des marques en conflit

63      Aux points 57 à 59 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que les conditions de prise en compte de la coexistence comme facteur susceptible de réduire le risque de confusion n’étaient pas réunies.

64      La requérante fait valoir que les marques en conflit ont coexisté sur le marché pendant de nombreuses années, sans qu’il y ait confusion entre elles, apparaissant même au public de manière conjointe, dans le cadre de publicités pour les produits de la requérante sur les chaînes de télévision des intervenantes, et sans que ces dernières aient à aucun moment engagé d’action en contrefaçon.

65      L’OHMI et les intervenantes contestent les arguments de la requérante.

66      À cet égard, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, il n’est pas totalement exclu que, dans certains cas, la coexistence de marques antérieures sur le marché puisse éventuellement amoindrir le risque de confusion constaté par les instances de l’OHMI entre deux marques en conflit. Néanmoins, une telle éventualité ne saurait être prise en considération que si, à tout le moins, au cours de la procédure concernant des motifs relatifs de refus devant l’OHMI, le demandeur de la marque communautaire a dûment démontré que ladite coexistence reposait sur l’absence d’un risque de confusion, dans l’esprit du public pertinent, entre les marques antérieures dont il se prévaut et la marque antérieure de l’intervenante qui fonde l’opposition et sous réserve que les marques ayant coexisté soient identiques aux marques en conflit [arrêts Aceites del Sur-Coosur/Koipe, point 56 supra, EU:C:2009:503, point 82, et du 11 mai 2005, Grupo Sada/OHMI – Sadia (GRUPO SADA), T‑31/03, Rec, EU:T:2005:169, point 86].

67      En l’espèce, il convient de relever, premièrement, que la coexistence des marques en conflit au Royaume-Uni ne saurait concerner que les services de communication point-à-point (« peer to peer ») et non les autres produits et services désignés par la marque demandée. En effet, la requérante n’a pas allégué avoir développé des activités par rapport à ces autres produits et services, avant la date de dépôt de sa demande de marque. Or, une coexistence ne concernant qu’un service isolé et très spécifique parmi la longue liste de produits et de services désignés par les marques en conflit n’est pas susceptible d’amoindrir le risque de confusion pour la totalité de ces produits et services.

68      Deuxièmement, à la date du dépôt de la marque communautaire, le 28 juin 2005, le service de communication point-à-point de la requérante, lancé en août 2003, existait depuis 22 mois. Même en admettant l’allégation de la requérante selon laquelle ledit service a immédiatement rencontré un grand succès dès son lancement, une période de coexistence de 22 mois, concernant une activité qui ne faisait pas partie du « core business » des intervenantes, était manifestement insuffisante pour pouvoir supposer que la coexistence reposait sur l’absence de risque de confusion dans l’esprit du public pertinent, critère dont l’existence doit être démontrée par la requérante. Ainsi que les intervenantes l’ont souligné à juste titre lors de l’audience, l’abstention de leur part d’intenter, avant le dépôt de la demande de marque communautaire, des procédures en contrefaçon contre la requérante, pouvait reposer sur toute une série de raisons et n’impliquait pas nécessairement qu’elles auraient considéré qu’il n’existait pas de risque de confusion entre les marques en conflit. Il convient donc de constater que la requérante n’a pas démontré l’existence de ce critère.

69      Troisièmement, le fait que, pendant une certaine période en 2009 et 2010, les intervenantes aient accepté de faire passer sur leurs chaînes de télévision de la publicité pour les services de la requérante, n’est manifestement pas pertinent pour l’appréciation de la situation à la date du dépôt de la demande de marque, à savoir le 28 juin 2005.

70      Par conséquent, il convient de rejeter l’argument de la requérante, tiré d’une prétendue coexistence paisible des marques en conflit.

 Conclusion sur le risque de confusion

71      La chambre de recours a considéré que, eu égard à l’identité des produits et des services, au degré moyen de similitude phonétique, visuelle et conceptuelle des signes et au degré élevé de caractère distinctif de la marque antérieure à tout le moins pour certains des produits et des services désignés par elle, l’existence d’un risque de confusion était confirmée, pour le public pertinent au Royaume-Uni, même en tenant compte d’un niveau d’attention plus élevé de la part du public pertinent.

72      Il convient de valider cette appréciation de la chambre de recours. En particulier, il découle des développements qui précèdent que les arguments de la requérante mettant en cause l’appréciation du risque de confusion doivent être rejetés. En effet, contrairement à ce qu’elle a allégué, les signes en cause sont similaires, sur les plans visuel, phonétique et conceptuel. De plus, la prétendue signification secondaire de la marque demandée ne saurait entrer en ligne de compte. En outre, il n’y a pas eu de coexistence paisible des signes en conflit sur le marché, au sens de la jurisprudence citée au point 66 ci-dessus, et, enfin, une « dilution » de la marque antérieure n’a pas été démontrée.

73      Il résulte de tout ce qui précède qu’il convient de rejeter le moyen unique de la requérante et, dès lors, le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

74      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI et des intervenantes.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Skype Ultd supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), par Sky plc et par Sky IP International Ltd.

Kanninen

Pelikánová

Buttigieg

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 5 mai 2015.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.