Language of document : ECLI:EU:T:2012:335

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

3 juillet 2012 (*)

« FEOGA – Section ‘Garantie’ – Dépenses exclues du financement – Cultures arables – Gel des superficies »

Dans l’affaire T‑212/09,

Royaume de Danemark, représenté initialement par M. J. Bering Liisberg, puis par Mme V. Pasternak Jørgensen, en qualité d’agents, assistés de Mes P. Biering et J. Pinborg, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée initialement par MM. N. Rasmussen et F. Jimeno Fernández, puis par M. Jimeno Fernández, en qualité d’agents, assistés de Me T. Ryhl, avocat,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation partielle de la décision 2009/253/CE de la Commission, du 19 mars 2009, écartant du financement communautaire certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du Fonds européen d’orientation et de garantie agricole (FEOGA), section « Garantie », et du Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) (JO L 75, p. 15), en ce qu’elle exclut du financement communautaire certaines dépenses effectuées par le Royaume de Danemark au titre du gel des superficies,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

composé de Mmes I. Pelikánová, président, K. Jürimäe (rapporteur) et M. M. van der Woude, juges,

greffier : Mme C. Kristensen, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 27 septembre 2011,

rend le présent

Arrêt

 Faits à l’origine du litige

1        Du 27 septembre au 1er octobre 2004 et du 7 au 9 décembre 2004, les services de la Commission des Communautés européennes ont réalisé une enquête sur le terrain quant aux conditions d’application par les autorités danoises, au cours des campagnes 2002, 2003 et 2004, du système intégré de gestion et de contrôle en ce qui concerne les cultures arables et, plus précisément, d’une part, l’éligibilité des parcelles déclarées admissibles au régime de gel et, d’autre part, le mesurage des parcelles.

2        Par lettres en date du 16 novembre 2004 et du 29 septembre 2005, la Commission a informé le Royaume de Danemark que les autorités danoises n’avaient pas respecté les dispositions du règlement (CE) n° 1251/1999 du Conseil, du 17 mai 1999, instituant un régime de soutien aux producteurs de certaines cultures arables (JO L 160, p. 1), et du règlement (CEE) n° 3508/92 du Conseil, du 27 novembre 1992, établissant un système intégré de gestion et de contrôle relatif à certains régimes d’aides communautaires (JO L 355, p. 1).

3        À la suite de la tenue d’une réunion bilatérale le 20 avril 2006, la Commission a, par lettre du 27 juin 2006, communiqué au Royaume de Danemark ses conclusions formelles au sens de l’article 8, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 1663/95 de la Commission, du 7 juillet 1995, établissant les modalités d’application du règlement (CEE) n° 729/70 [du Conseil, du 21 avril 1970, relatif au financement de la politique agricole commune (JO L 94, p. 13),] en ce qui concerne la procédure d’apurement des comptes du FEOGA, section « Garantie » (JO L 158, p. 6), tel que modifié notamment par le règlement (CE) n° 2245/1999 de la Commission, du 22 octobre 1999, établissant les modalités d’application du règlement n° 729/70 (JO L 273, p. 5).

4        Après un échange complémentaire de correspondances, la Commission a, par lettre du 21 février 2008, informé le Royaume de Danemark qu’elle confirmait ses conclusions selon lesquelles l’exécution du régime de primes aux cultures arables au Danemark n’était pas conforme aux règles de droit de l’Union au cours des campagnes 2002 à 2004.

5        Par lettre du 8 avril 2008, le Royaume de Danemark, considérant qu’une telle correction financière était injustifiée, a saisi l’organe de conciliation.

6        Dans son rapport final du 9 septembre 2008, l’organe de conciliation a notamment conclu qu’il n’était pas possible de rapprocher les points de vue de la Commission et du Royaume de Danemark et invitait la Commission à réexaminer le point de savoir si la proposition d’appliquer la correction de 10 % et celle de 5 % à toutes les dépenses impliquées était justifiée.

7        Par sa décision 2009/253/CE, du 19 mars 2009, écartant du financement communautaire certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du Fonds européen d’orientation et de garantie agricole (FEOGA), section « Garantie », et du Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) (JO L 75, p. 15, ci-après la « décision attaquée »), la Commission a, en ce qui concerne le Royaume de Danemark, au titre des exercices financiers 2003, 2004 et 2005, portant respectivement sur les campagnes 2002, 2003 et 2004, proposé d’appliquer des corrections financières forfaitaires s’élevant, selon les cas, à 2 %, 5 % ou 10 %, au titre des lacunes constatées quant aux contrôles par télédétection et aux contrôles du respect des exigences réglementaires pour les superficies gelées (ci-après les « contrôles des superficies gelées »).

8        Les motifs de ces corrections financières ont été résumés dans le rapport de synthèse de la direction générale (DG) « Agriculture et développement rural » du 6 janvier 2009, relatif aux résultats des inspections menées par la Commission dans le contexte de la procédure d’apurement des comptes du FEOGA, section « Garantie », au titre de l’article 7, paragraphe 4, du règlement (CE) n° 1258/1999 du Conseil, du 17 mai 1999, relatif au financement de la politique agricole commune (JO L 160, p. 103), et de l’article 31 du règlement (CE) n° 1290/2005 du Conseil, du 21 juin 2005, relatif au financement de la politique agricole commune (JO L 209, p. 1) (ci-après le « rapport de synthèse »).

9        S’agissant des lacunes quant aux contrôles par télédétection, la Commission a, dans le rapport de synthèse, notamment reproché au Royaume de Danemark de ne pas avoir pris de mesures correctives, telles que l’instigation de contrôles sur place classiques ou l’intensification du nombre de visites sur place, lorsque des images en haute résolution (ci-après les « images HR »), et non en très haute résolution (ci-après les « images THR »), étaient utilisées. La Commission a donc conclu à la violation des articles 15, 22 et 23 du règlement (CE) n° 2419/2001 de la Commission, du 11 décembre 2001, portant modalités d’application du système intégré de gestion et de contrôle relatif à certains régimes d’aides communautaires établis par le règlement n° 3508/92 (JO L 327, p. 11). Au regard desdites lacunes, la Commission a considéré que l’application aux aides payées lors des campagnes 2003 et 2004 d’une correction forfaitaire de 2 % constituait la meilleure façon d’évaluer et de réparer le préjudice causé au FEOGA.

10      S’agissant des lacunes quant aux contrôles des superficies gelées, la Commission a, dans le rapport de synthèse, constaté plusieurs irrégularités susceptibles, selon elle, de fonder sa décision d’écarter certaines dépenses du bénéfice du financement au titre du FEOGA. Lesdites irrégularités sont classées en trois catégories, à savoir, tout d’abord, celles concernant la surface minimale des parcelles gelées, ensuite, celles concernant les conditions d’éligibilité et d’entretien desdites parcelles et, enfin, celles concernant les pratiques de « chasse à la prime ». Au regard desdites irrégularités, la Commission a conclu que les contrôles des superficies gelées présentaient des lacunes si graves qu’un ou plusieurs contrôles clés n’étaient pas appliqués ou si mal qu’ils manquaient totalement d’efficacité. La Commission a donc conclu à la violation des articles 15, 22 et 23 du règlement n° 2419/2001 et, par ailleurs, estimé que l’application aux aides payées lors des campagnes comprises entre 2002 et 2004 d’une correction forfaitaire fixée, selon les situations en cause, à 5 % ou 10 % constituait la meilleure façon d’évaluer et de réparer le préjudice subi par le FEOGA.

11      Enfin, il ressort du rapport de synthèse que, afin d’éviter qu’une double correction ne soit appliquée à une même parcelle, la Commission a proposé d’appliquer la correction forfaitaire de 2 %, au titre des lacunes des contrôles par télédétection, uniquement en ce qui concernait les paiements relatifs aux cultures arables qui n’ont pas fait l’objet d’une correction forfaitaire de 5 % ou 10 %, au titre des lacunes des contrôles des superficies gelées.

 Procédure et conclusions des parties

12      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 2 juin 2009, le Royaume de Danemark a introduit le présent recours.

13      Le 19 juillet 2011, le Tribunal a adressé aux parties, au titre de mesures d’organisation de la procédure, des demandes de renseignements, auxquelles la Commission, par lettre datée du 28 juillet 2011, et le Royaume de Danemark, par lettre datée du 16 août 2011, ont répondu.

14      Le Royaume de Danemark conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée en ce qu’elle écarte du financement communautaire les dépenses qu’il a notifiées ;

–        à titre subsidiaire, annuler la décision attaquée en ce qu’elle écarte du financement communautaire les dépenses qu’il a notifiées, dans la mesure où elle se fonde sur un manquement aux règles de contrôle des superficies mises en jachère ou sur la faiblesse de ces contrôles en 2002, 2003 et/ou 2004 et/ou sur un manquement aux règles de contrôle par télédétection ou sur la faiblesse de ces contrôles en 2003 et/ou 2004 ;

–        condamner la Commission aux dépens.

15      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner le Royaume de Danemark aux dépens.

 En droit

A –  Sur la recevabilité des photographies de l’annexe B.5 du mémoire en défense

16      Le Royaume de Danemark conteste la recevabilité des photographies de l’annexe B.5 du mémoire en défense. La Commission conteste le bien-fondé de cet argument.

17      Le Tribunal rappelle que, en vertu des dispositions de l’article 46, paragraphe 1, sous d), du règlement de procédure du Tribunal, dans les deux mois qui suivent la signification de la requête, le défendeur présente un mémoire en défense qui contient notamment les offres de preuve.

18      En vertu desdites dispositions du règlement de procédure, la Commission est en droit d’étayer, à l’aide de preuves qu’il lui appartient de choisir, son argumentation figurant dans son mémoire en défense, et ce, notamment, en ce qu’elle vise à démontrer le bien-fondé des conclusions qu’elle a tirées dans le rapport de synthèse. En revanche, la production de tels éléments de preuve ne saurait permettre à la Commission de démontrer l’existence d’autres irrégularités que celles retenues au terme de la procédure d’enquête et qui fondent la décision d’écarter du financement de l’Union certaines dépenses effectuées par un État membre au titre d’un fonds.

19      En l’espèce, tout d’abord, il n’est pas contesté entre les parties que les photographies de l’annexe B.5 du mémoire en défense ont été prises au cours de l’enquête visée au point 1 ci-dessus.

20      Ensuite, il ressort des termes du rapport de synthèse que la Commission a retenu comme irrégularités, au titre du caractère éligible des terres gelées, des zones prétendument humides, marécageuses, inondées, dont la position est inappropriée, voire trop inclinée, et que, au titre des irrégularités quant à l’utilisation des terres gelées à des fins non autorisées, elle fait état de stockage de bottes de foin et du déversement de déchets de construction.

21      Or, force est de relever que les irrégularités visées au point qui précède sont semblables à celles énumérées par la Commission dans « la liste et la description des photographies » qui introduisent l’annexe B.5 du mémoire en défense. En revanche, à aucun moment la Commission n’utilise lesdites photographies afin de rapporter la preuve de nouvelles irrégularités.

22      Par conséquent, il convient de constater que les photographies de l’annexe B.5 du mémoire en défense ont été produites par la Commission uniquement en tant qu’éléments de preuve au soutien de son argumentation, et ce afin d’illustrer les constatations d’irrégularités initialement relevées par ses agents lors de l’enquête sur le terrain visée au point 1 ci-dessus et finalement retenues dans le rapport de synthèse.

23      Au regard des considérations qui précèdent, c’est à tort que le Royaume de Danemark conteste la recevabilité des photographies de l’annexe B.5 du mémoire en défense.

24      À titre surabondant, il y a lieu d’ajouter que la recevabilité de telles photographies, en tant que preuves, au sens de l’article 46, paragraphe 1, sous d), du règlement de procédure, ne saurait, en elle-même, augurer de leur niveau probatoire par rapport aux irrégularités rapportées par la Commission dans le rapport de synthèse. En effet, il ressort de la jurisprudence constante qu’il appartient au Tribunal d’apprécier souverainement le caractère probant des pièces de la procédure et notamment des éléments de preuve offerts par les parties au soutien de leur argumentation (arrêt de la Cour du 11 septembre 2008, Allemagne e.a./Kronofrance, C‑75/05 P et C‑80/05 P, Rec. p. I‑6619, point 78 ; voir, par analogie, arrêt de la Cour du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission, C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, Rec. p. I‑5425, point 359).

B –  Sur le fond

25      À l’appui de sa demande d’annulation de la décision attaquée, telle qu’elle est formulée tant à titre principal qu’à titre subsidiaire dans les deux premiers chefs de conclusion de la requête, le Royaume de Danemark soulève quatre moyens tirés, en substance, premièrement, d’erreurs de droit et d’appréciation des règles relatives aux contrôles par télédétection, deuxièmement, d’erreurs de droit et d’appréciation des règles relatives aux contrôles des superficies gelées, troisièmement, d’une violation des formes substantielles et, quatrièmement, d’erreurs de droit et d’appréciation des règles relatives aux corrections financières.

1.     Sur le premier moyen, tiré d’erreurs de droit et d’appréciation des règles relatives aux contrôles par télédétection

26      Le premier moyen se divise en deux branches qu’il convient d’examiner successivement.

27      La Commission conteste l’argumentation du Royaume de Danemark.

a)     Sur la première branche du premier moyen

28      Le Royaume de Danemark soutient, en substance, que la Commission a commis une erreur d’interprétation quant à l’application de la marge de tolérance prévue à l’article 22, paragraphe 1, du règlement n° 2419/2001. En effet, elle aurait considéré à tort que ladite marge ne concernait que l’estimation, par les demandeurs, des superficies et non pas l’estimation par télédétection de ces dernières par les autorités nationales. Le Royaume de Danemark considère que cette interprétation erronée dudit article ne semble pas avoir servi de fondement à la décision attaquée. Toutefois, il soutient qu’une certaine tolérance est naturellement et évidemment admissible pour les mesurages effectués par les autorités.

29      À ce titre, il convient de rappeler que, de manière générale, pour l’interprétation d’une disposition de droit de l’Union, il y a lieu de tenir compte non seulement des termes de celle-ci, mais également de son contexte et des objectifs poursuivis par la réglementation dont elle fait partie (arrêt de la Cour du 17 novembre 1983, Merck, 292/82, Rec. p. 3781, point 12, et arrêt du Tribunal du 6 octobre 2005, Sumitomo Chemical et Sumika Fine Chemicals/Commission, T‑22/02 et T‑23/02, Rec. p. II‑4065, point 47) ainsi que de l’ensemble des dispositions du droit de l’Union (arrêt de la Cour du 6 octobre 1982, Cilfit e.a., 283/81, Rec. p. 3415, point 20, et arrêt Sumitomo Chemical et Sumika Fine Chemicals/Commission, précité, point 47).

30      L’article 22, paragraphe 1, du règlement n° 2419/2001 dispose :

« La détermination de la superficie des parcelles agricoles se fait par tout moyen approprié défini par l’autorité compétente et garantissant une exactitude de mesure au moins équivalente à celle requise pour les mesures officielles prévues par les dispositions nationales. L’autorité compétente établit une marge de tolérance, en tenant compte de la technique de mesure utilisée, de l’exactitude des documents officiels disponibles, de la situation locale (par exemple, la pente ou la forme des parcelles) et des dispositions du paragraphe 2. »

31      Certes, il convient de relever que la lettre de l’article 22, paragraphe 1, du règlement n° 2419/2001 ne précise pas si la marge de tolérance, qu’il incombe à l’autorité compétente d’établir en vertu de la seconde phrase dudit article, s’applique non seulement aux demandeurs d’aide, mais aussi aux autorités nationales.

32      Toutefois, premièrement, le Tribunal constate que ledit article figure sous le titre III du règlement n° 2419/2001, intitulé « Contrôles ». Or, sous ledit titre, le législateur définit les règles de contrôle des demandes d’aide par les autorités nationales.

33      Deuxièmement, il convient d’interpréter les dispositions de l’article 22, paragraphe 1, du règlement n° 2419/2001 en tenant compte des termes suivants du considérant 34 du même règlement :

« […] En ce qui concerne les demandes d’aide ‘surfaces’, lorsque des irrégularités sont mises en évidence, il doit être prévu que, dans les limites d’une certaine marge de tolérance, les demandes d’aide ne sont ajustées et les réductions ne s’appliquent qu’à partir du moment où cette marge a été dépassée [...] »

34      Par conséquent, il ressort de la lecture combinée de ces deux dispositions que la marge de tolérance au sens de l’article 22, paragraphe 1, du règlement n° 2419/2001 a été établie par le législateur afin d’assurer une certaine souplesse en faveur des seuls demandeurs d’aide. Partant, elle ne saurait s’appliquer, ainsi que le soutient le Royaume de Danemark, aux mesures prises par les autorités nationales.

35      Il y a donc lieu de rejeter la première branche du premier moyen comme étant non fondée.

b)     Sur la seconde branche du premier moyen

36      Le Royaume de Danemark soutient, en substance, que la Commission a commis une erreur d’interprétation et d’application des règles relatives au type d’images qu’il aurait dû utiliser. Il fait notamment valoir que, avant 2004, les articles 22 et 23 du règlement n° 2419/2001 n’imposaient aucune règle quant à l’exactitude des mesures prises en recourant à la télédétection.

37      En premier lieu, il convient de rappeler que, tout d’abord, en vertu de l’article 15 du règlement n° 2419/2001, qui fixe les principes généraux quant aux contrôles réalisés par les autorités compétentes des États membres, les contrôles administratifs et les contrôles sur place sont effectués de façon à assurer la vérification efficace du respect des conditions d’octroi des aides.

38      Ensuite, il ressort des dispositions de l’article 22, paragraphe 1, première phrase, du règlement n° 2419/2001 que la « détermination de la superficie des parcelles agricoles se fait par tout moyen approprié défini par l’autorité compétente et garantissant une exactitude de mesure au moins équivalente à celle requise pour les mesures officielles prévues par les dispositions nationales ».

39      Par ailleurs, selon une jurisprudence constante, en vertu des règles du droit de l’Union relatives au FEOGA, il incombe aux États membres d’organiser un système efficace de contrôle et de surveillance, et ce même si la réglementation en vigueur à l’époque des faits n’imposait pas expressément aux États membres de recourir aux méthodes de contrôle prescrites par la Commission dans son rapport de synthèse pour remédier aux anomalies (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 12 juin 1990, Allemagne/Commission, C‑8/88, Rec. p. I‑2321, point 16 ; du 14 avril 2005, Espagne/Commission, C‑468/02, non publié au Recueil, point 35, et arrêt du Tribunal du 25 juillet 2006, Belgique/Commission, T‑221/04, non publié au Recueil, point 52).

40      De même, toujours selon une jurisprudence constante, il résulte des règles du droit de l’Union relatives au FEOGA et, en particulier, de l’article 6, paragraphe 1, du règlement (CEE) n° 3887/92 de la Commission, du 23 décembre 1992, portant modalités d’application du système intégré de gestion et de contrôle relatif à certains régimes d’aides communautaires (JO L 391, p. 36), qui a été remplacé par l’article 15 du règlement n° 2419/2001, que les États membres sont tenus d’organiser un ensemble de contrôles administratifs et de contrôles sur place permettant d’assurer que les conditions matérielles et formelles d’octroi des aides sont correctement observées. Si l’organisation d’un tel ensemble de contrôles fait défaut ou si celle mise en place par un État membre est défaillante au point de laisser subsister des doutes quant à l’observation de ces conditions, c’est à juste titre que la Commission ne reconnaît pas certaines dépenses effectuées par l’État membre concerné (arrêts Allemagne/Commission, point 39 supra, points 20 et 21 ; Espagne/Commission, point 39 supra, point 36, et Belgique/Commission, point 39 supra, point 53).

41      Il ressort des rappels effectués aux points 37 à 40 ci-dessus qu’il incombe aux États membres d’adopter les mesures qu’ils jugent à même de garantir l’efficacité des contrôles et, partant, l’exactitude des mesures prises en recourant à la télédétection.

42      En deuxième lieu, il convient de constater que c’est de manière inopérante que le Royaume de Danemark soutient que le seul document de l’Union prévoyant une exigence d’exactitude était le document de travail AGRI/2254/2003 de la Commission, datant de 2003 et portant sur les contrôles sur place des surfaces et sur leur mesurage conformément aux articles 15 à 23 du règlement n° 2419/2001, ledit document n’ayant selon le Royaume de Danemark aucune valeur contraignante.

43      En effet, ainsi que cela ressort expressément des termes des deux premiers alinéas dudit document de travail, celui-ci a pour objet d’informer les services des États membres de la position de la Commission quant à la mise en œuvre des articles 15 à 23 du règlement n° 2419/2001 et notamment s’agissant des méthodes de contrôle susceptibles d’être utilisées par lesdits États. Or, ainsi que cela est rappelé au point 41 ci-dessus, il découle des dispositions des articles 15 et 22 du règlement n° 2419/2001 une obligation qui pèse sur les États membres d’adopter les mesures qu’ils jugent à même de garantir l’efficacité des contrôles et, partant, l’exactitude des mesures prises en recourant à la télédétection.

44      En troisième lieu, le Tribunal considère que, contrairement à ce que pourrait laisser penser l’argumentation exposée par le Royaume de Danemark, la question qui se pose en l’espèce n’est pas de savoir si l’utilisation d’images HR était autorisée mais de quelle manière lesdites images devaient être utilisées.

45      En effet, premièrement, il y a lieu de relever qu’il ressort expressément de la note en bas de page n° 10 des spécifications techniques communes 2002/S 235‑186557 du 4 décembre 2002, relative aux contrôles par télédétection des terres arables et fourragères au cours de la campagne 2003, que l’utilisation d’images satellitaires « SPOT/IRS PAN » n’était plus recommandée pour le mesurage des parcelles. Or, ainsi que la Commission l’a expressément rappelé dans le mémoire en défense, sans que cela soit contesté par le Royaume de Danemark, cette référence « SPOT/IRS PAN » couvre les images HR. Par conséquent, dès le mois de décembre 2002, les États membres étaient parfaitement en mesure de connaître la position de la Commission quant à l’utilisation des images HR au cours de la campagne 2003, à savoir que si ladite utilisation était déconseillée par la Commission dans ses spécifications techniques adoptées en décembre 2002, elle n’était pas interdite.

46      Deuxièmement, il convient de relever que la Commission a, au point 4.1.4 des spécifications techniques communes 2002/S 235‑186557 du 4 décembre 2002, expressément informé les États membres de ce qu’une éventuelle mise à disposition des images THR durant la campagne 2003 était hypothétique dès lors qu’elle était conditionnée par plusieurs facteurs.

47      Troisièmement, ainsi que cela a été rappelé au point 43 ci-dessus, la réglementation applicable en l’espèce oblige les États membres à adopter les mesures qu’ils jugent à même de garantir l’efficacité des contrôles et, partant, l’exactitude des mesures prises en recourant à la télédétection.

48      Par conséquent, il convient de considérer que, au regard, d’une part, des obligations qui incombent aux États membres quant au choix des méthodes de mesurage des parcelles, telles que rappelées aux points 39 et 40 ci-dessus, et, d’autre part, du fait que la Commission avait préalablement informé les États membre de ce que, durant la campagne 2003, l’usage d’images HR était déconseillé et la disponibilité d’images THR non garantie, le Royaume de Danemark aurait dû en tirer pour conséquence la nécessité, ainsi que cela ressort du point 12.1.1, 1), quatrième alinéa, cinquième tiret, du rapport de synthèse, d’adopter une « action corrective, c’est-à-dire instiguer des contrôles sur place plus classiques ou intensifier le nombre de visites sur place lorsque des images HR étaient utilisées ».

49      Or, les irrégularités relevées par la Commission au cours de l’enquête font ressortir le caractère insuffisant des contrôles sur place effectués par le Royaume de Danemark afin de vérifier le mesurage de la superficie des parcelles initialement réalisé en utilisant des images HR.

50      Quatrièmement, il y a lieu de relever, ainsi que cela ressort du point 12.1.1, 1), quatrième alinéa, quatrième tiret, du rapport de synthèse, et sans que cela soit contesté par le Royaume de Danemark, que la Commission avait, dès le mois de février 2002, informé ce dernier de ses doutes quant à la qualité des contrôles par télédétection exécutés dès la campagne 2000.

51      Cinquièmement, c’est à tort que le Royaume de Danemark reproche à la Commission d’avoir utilisé, lors de l’enquête visée au point 1 ci-dessus, une méthode différente de celle retenue par l’État membre concerné.

52      En effet, lorsque la réglementation applicable n’impose pas de recourir à une méthode de mesurage spécifique, il ressort des dispositions de l’article 22, paragraphe 1, première phrase, du règlement n° 2419/2001 que, si les États membres sont libres de choisir les moyens de détermination de la superficie des parcelles agricoles, lesdits moyens doivent, ainsi que cela a été rappelé au point 41 ci-dessus, satisfaire à une exigence de précision. Partant, afin d’apprécier si les États membres ont satisfait à cette exigence, la Commission doit pouvoir elle-même utiliser tout moyen adéquat lui permettant de déterminer le plus exactement possible la superficie des parcelles qu’elle contrôle.

53      Au vu de ce qui précède, il y a lieu de rejeter la seconde branche du premier moyen et, partant, le premier moyen dans son intégralité comme étant non fondé.

2.     Sur le deuxième moyen, tiré d’erreurs de droit et d’appréciation des règles relatives aux contrôles des superficies gelées

54      Le deuxième moyen se divise en deux branches, examinées à titre principal ci-dessous, relatives, pour la première, à deux griefs pris d’erreurs de droit commises par la Commission quant aux règles applicables aux conditions de réalisation des contrôles des superficies gelées et, pour la seconde, à des erreurs d’appréciation commises par la Commission sur le même sujet.

55      À titre liminaire, il convient de rappeler les dispositions de la législation de l’Union et la jurisprudence pertinentes dans le cadre de l’examen du deuxième moyen.

56      En premier lieu, l’article 19, paragraphes 3 et 4, du règlement (CE) n° 2316/1999 de la Commission, du 22 octobre 1999, portant modalités d’application du règlement n° 1251/1999 (JO L 280, p. 43), dispose ce qui suit :

« 3. Les superficies gelées ne peuvent être utilisées pour aucune production agricole autre que celles visées à l’article 6, paragraphe 3, du règlement […] n° 1251/1999, ni faire l’objet d’une utilisation lucrative qui serait incompatible avec une culture arable.

4. Les États membres appliquent les mesures appropriées qui correspondent à la situation particulière des superficies gelées, de façon à assurer leur entretien et la protection de l’environnement. Ces mesures peuvent également concerner une couverture végétale ; dans ce cas, ces mesures doivent prévoir que le couvert végétal ne puisse être destiné à la production des semences et qu’il ne puisse être utilisé en aucun cas à des fins agricoles avant le 31 août ni donner lieu, jusqu’au 15 janvier suivant, à une production végétale destinée à être commercialisée. »

57      En second lieu, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le FEOGA ne finance que les interventions effectuées conformément aux dispositions de l’Union dans le cadre de l’organisation commune des marchés agricoles et qu’il appartient à la Commission, aux fins de prouver l’existence d’une violation des règles de l’organisation commune des marchés agricoles, non de démontrer d’une façon exhaustive l’insuffisance des contrôles effectués par les administrations nationales ou l’irrégularité des chiffres transmis par elles, mais de présenter un élément de preuve du doute sérieux et raisonnable qu’elle éprouve à l’égard de ces contrôles ou de ces chiffres. Cet allégement de l’exigence de la preuve pour la Commission s’explique par le fait que c’est l’État membre qui est le mieux placé pour recueillir et vérifier les données nécessaires à l’apurement des comptes du FEOGA et que c’est à lui qu’il incombe, en conséquence, de présenter la preuve la plus détaillée et complète de la réalité de ses contrôles ou de ses chiffres et, le cas échéant, de l’inexactitude des affirmations de la Commission (voir arrêts de la Cour du 8 mai 2003, Espagne/Commission, C‑349/97, Rec. p. I‑3851, points 45 à 47 et 49, et la jurisprudence citée ; du 4 mars 2004, Allemagne/Commission, C‑344/01, Rec. p. I‑2081, point 58, et la jurisprudence citée, et du 24 février 2005, Grèce/Commission, C‑300/02, Rec. p. I‑1341, points 32 à 36, et la jurisprudence citée).

58      L’État membre concerné, pour sa part, ne saurait infirmer les constatations de la Commission sans étayer ses propres allégations par des éléments établissant l’existence d’un système fiable et opérationnel de contrôle. Dès lors qu’il ne parvient pas à démontrer que les constatations de la Commission sont inexactes, celles-ci constituent des éléments susceptibles de faire naître des doutes sérieux quant à la mise en place d’un ensemble adéquat et efficace de mesures de surveillance et de contrôle (arrêts de la Cour du 28 octobre 1999, Italie/Commission, C‑253/97, Rec. p. I‑7529, point 7 ; du 8 mai 2003, Espagne/Commission, point 57 supra, point 48, et Grèce/Commission, point 57 supra, point 35).

59      C’est à la lumière des dispositions du droit de l’Union et de la jurisprudence rappelées ci-dessus qu’il convient, à titre principal, d’examiner les deux branches du deuxième moyen.

a)     Sur la première branche du deuxième moyen

60      La première branche du deuxième moyen s’articule autour de deux griefs qu’il y a lieu d’examiner successivement.

 Sur le premier grief, tiré d’une erreur de droit quant à l’interprétation des dispositions de l’article 19, paragraphe 4, du règlement n° 2316/1999

61      Le Royaume de Danemark soutient que la Commission a commis une erreur de droit quant à l'interprétation des dispositions de l'article 19, paragraphe 4, du règlement n° 2316/1999 concernant l'obligation d'entretien des parcelles gelées, en considérant que ces dernières doivent être des terres dépourvues de couverture végétale et que la présence d'une telle couverture constitue une exception. À ce titre, il est d’avis que le maintien d’une couverture végétale fait partie intégrante de l’exigence d’entretien et ne constitue pas une dérogation dans le cadre de la législation de l’Union quant au gel des terres. Il ajoute que cette exigence d’entretien est motivée par la protection de l’environnement et n’implique pas une obligation de fauchage qui, au demeurant, ne serait prévue par aucune disposition du droit de l’Union. Le critère déterminant serait de savoir si les superficies en cause constituent toujours, pendant la période de jachère, des terres cultivables.

62      Par ailleurs, le Royaume de Danemark soutient que c’est précisément pour protéger l’environnement et lutter contre la pollution des nitrates, comme le prescrit la directive 91/676/CEE du Conseil, du 12 décembre 1991, concernant la protection des eaux contre la pollution par les nitrates à partir de sources agricoles (JO L 375, p. 1, ci-après la « directive nitrates »), que les parcelles sont recouvertes d’une couverture végétale, l’ensemble du territoire du Danemark ayant été désigné comme étant vulnérable aux nitrates.

63      Enfin, le Royaume de Danemark fait observer que les parcelles ne sont pas retournées à l’état sauvage, comme le prétend la Commission, puisque, sauf exception, des travaux agricoles ordinaires suffisent à les remettre immédiatement en culture.

64      La Commission conteste ces arguments.

65      Premièrement, elle soutient que, bien que les États membres disposent d’une certaine marge d’appréciation quant à la définition des mesures à prendre, d’une part, l’exigence d’entretien des parcelles gelées implique leur fauchage afin qu’elles soient maintenues dans de bonnes conditions agronomiques et, d’autre part, lesdites parcelles doivent en principe être exemptes de couverture végétale non entretenue sous forme de mauvaises herbes et de végétation forestière ou sauvage. S’agissant de la protection de l’environnement, la Commission soutient que l’obligation d’entretien des parcelles ne résulte pas d’un objectif de protection de l’environnement, mais d’une obligation parallèle. En effet, la protection de l’environnement ne constituerait pas un des objectifs premiers de la politique agricole commune, celle-ci poursuivant plutôt l’objectif de sauvegarder et de favoriser le secteur agricole européen. En outre, le Royaume de Danemark ne démontrerait pas en quoi le respect de la directive nitrates impose une dérogation à l’obligation d’entretien prévue par le règlement et en quoi il serait impossible de concilier les deux.

66      Deuxièmement, concernant l’allégation selon laquelle les terres recouvertes d’une couverture végétale ne seraient pas rendues à la nature car des travaux agricoles ordinaires suffiraient à les rendre cultivables, la Commission dénonce ce critère comme étant aléatoire. De plus, elle souligne que le Royaume de Danemark n’a pas apporté la preuve que les terres pourraient être remises en l’état en utilisant des machines agricoles habituelles. Enfin, elle rappelle qu’elle a constaté que certaines terres n’étaient pas du tout entretenues, en raison de la présence sur celles-ci de mauvaises herbes, de végétation forestière permanente, de pollution, de déchets de construction, et qu’il ne pouvait donc simplement s’agir d’une couverture végétale pour répondre aux besoins environnementaux.

67      Le Tribunal constate que, au soutien du premier grief de la première branche du deuxième moyen, le Royaume de Danemark soulève, en substance, deux arguments quant à l’interprétation des dispositions de l’article 19, paragraphe 4, du règlement n° 2316/1999, arguments qu’il y a lieu d’examiner successivement.

–       Sur le premier argument

68      En substance, le Royaume de Danemark reproche à la Commission d’avoir fondé la décision attaquée en ayant, au point 12.1.1, 2), sous le titre « Mauvais entretien des superficies gelées », sixième alinéa, du rapport de synthèse, interprété les dispositions de l’article 19, paragraphe 4, du règlement n° 2316/1999 en ce sens que la règle était qu’il n’existait pas de couverture et que la couverture végétale pour des raisons environnementales constituait une exception.

69      Afin d’examiner ce premier argument, il y a lieu d’interpréter les dispositions de l’article 19, paragraphe 4, du règlement n° 2316/1999. À ce titre, ainsi que cela ressort de la jurisprudence rappelée au point 29 ci-dessus, l’interprétation d’une disposition du droit de l’Union se fait, en règle générale, au regard des termes de la disposition, de son contexte, des objectifs poursuivis par la réglementation dont elle fait partie ainsi que de l’ensemble des dispositions du droit de l’Union.

70      En premier lieu, s’agissant des termes des dispositions de l’article 19, paragraphe 4, du règlement n° 2316/1999, lesdites dispositions s’articulant autour de deux phrases, il convient de relever ce qui suit.

71      Premièrement, il ressort des termes de la première phrase de l’article 19, paragraphe 4, du règlement n° 2316/1999 que le législateur a fixé, concernant les terres gelées, deux objectifs qui doivent être poursuivis simultanément par les mesures appropriées appliquées par les États membres. C’est ainsi que lesdites mesures doivent permettre d’assurer, d’une part, l’entretien des superficies gelées et, d’autre part, la protection de l’environnement.

72      De même, le considérant 13 du règlement n° 2316/1999, à la lumière duquel il convient d’interpréter l’article 19, paragraphe 4, dudit règlement, insiste sur la nécessité de prévoir un certain nombre de mesures devant accompagner le gel de terres. Notamment, en vertu de la cinquième phrase dudit considérant, « [i]l convient également de prévoir des dispositions relatives à la protection de l’environnement, à l’entretien et à l’utilisation des surfaces gelées ».

73      Deuxièmement, force est de constater que le maintien d’une couverture végétale constitue, en vertu de l’article 19, paragraphe 4, seconde phrase, du règlement n° 2316/1999 et comme en atteste l’emploi de l’adverbe « également », un type de « mesures appropriées » au sens de l’article 19, paragraphe 4, première phrase, dudit règlement, que les États membres peuvent adopter afin d’atteindre les deux objectifs poursuivis.

74      Partant, il ressort des termes des dispositions de l’article 19, paragraphe 4, du règlement n° 2316/1999 que le maintien d’une couverture végétale sur une parcelle gelée ne constitue pas une dérogation à l’obligation d’entretien d’une telle parcelle, mais une des mesures appropriées adoptées par les États membres de façon à assurer tant son entretien que la protection de l’environnement.

75      En second lieu, s’agissant des autres critères d’interprétation d’une disposition du droit de l’Union, à savoir, son contexte, les objectifs poursuivis par la réglementation dont elle fait partie ainsi que l’ensemble des dispositions du droit de l’Union, il convient, s’agissant des dispositions de l’article 19, paragraphe 4, du règlement n° 2316/1999, de relever ce qui suit.

76      Premièrement, il convient de rappeler, en substance, les dispositions du droit primaire de l’Union applicables en l’espèce. À ce titre, il ressort, d’une part, s’agissant de la campagne 2002 et du premier mois de la campagne 2003, des dispositions de l’article 3, paragraphe 1, sous e), et de l’article 6 du traité CE, dans sa version publiée au Journal officiel des Communautés européennes du 10 novembre 1997 (JO C 340, p. 173), entré en vigueur le 1er mai 1999, et, d’autre part, s’agissant des autres mois de la campagne 2003 ainsi que de la campagne 2004, des dispositions des mêmes articles du traité CE, dans sa version publiée au Journal officiel du 24 décembre 2002 (JO C 325, p. 1), entré en vigueur le 1er février 2003, que les exigences en matière de protection de l’environnement devaient être intégrées dans la définition et la mise en œuvre des politiques de l’Union et, notamment, de la politique agricole commune, en vue de promouvoir le développement durable.

77      Deuxièmement, en ce qui concerne les dispositions du droit dérivé de l’Union applicables en l’espèce, tout d’abord, il convient de rappeler que, en vertu du considérant 21 du règlement n° 1251/1999, dont le règlement n° 2316/1999 porte modalités d’application, « les terres mises en jachère doivent être entretenues de manière à respecter certaines normes minimales de qualité de l’environnement ». L’article 6, paragraphe 2, de ce même règlement prévoit que les États membres appliquent des mesures environnementales appropriées à la situation particulière des terres mises en jachère. Il ressort de ces dispositions du règlement n° 1251/1999 que l’entretien des terres mises en jachère doit être entrepris dans le respect de l’objectif de protection de l’environnement poursuivi par ledit règlement, et ce conformément aux dispositions du droit primaire applicables.

78      Ensuite, il convient de rappeler que, conformément aux dispositions de la dernière phrase du troisième considérant de la directive nitrates, « la politique agricole [commune] doit prendre davantage en considération la politique en matière d’environnement ». L’article 4, paragraphe 1, sous a), de ladite directive prévoit que, en vue d’assurer, pour toutes les eaux, un niveau général de protection contre la pollution, les États membres « établissent un ou des codes de bonne pratique agricole qui seront mis en œuvre volontairement par les agriculteurs et qui devraient contenir au moins les éléments énumérés au point A de l’annexe II ». Or, outre les éléments énumérés audit point A, l’annexe II, point B, sous 8), prévoit que les États membres peuvent également inclure dans leur(s) code(s) de bonne pratique agricole « le maintien d’une quantité minimale de couverture végétale au cours des périodes (pluvieuses) destinée à absorber l’azote au sol qui, en l’absence d’une telle couverture végétale, provoquerait une pollution des eaux par les nitrates ».

79      Il ressort des dispositions de la directive nitrates, dont se prévaut le Royaume de Danemark, que le maintien d’une couverture végétale constitue une mesure adéquate aux fins de lutter contre la pollution des eaux par les nitrates et, partant, une mesure appropriée au regard des exigences de protection de l’environnement qui, conformément aux dispositions du traité CE et ainsi que cela est rappelé au point 76 ci-dessus, doivent être intégrées dans la définition et la mise en œuvre de la politique agricole commune.

80      Troisièmement, en ce qui concerne l’évolution de la législation de l’Union quant au gel des terres, il y a lieu de rappeler que le règlement (CEE) n° 2293/92 de la Commission, du 31 juillet 1992, portant modalités d’application du règlement (CEE) n° 1765/92 du Conseil en ce qui concerne le gel de terres visé à l’article 7 (JO L 221, p. 19), posait une exigence d’entretien plus stricte que celle retenue dans le règlement n° 2316/1999. En effet, en vertu des dispositions distinctes et expresses de l’article 3, paragraphe 2, du règlement n° 2293/92, l’obligation d’entretien visait à assurer le « maintien de bonnes conditions agronomiques ». Or, nonobstant ladite exigence plus stricte, le règlement n° 2293/1992 prévoyait également, en son article 3, paragraphe 3, deuxième phrase, que les États membres appliquaient des mesures appropriées, telles que le maintien d’une couverture végétale, de façon à assurer la protection de l’environnement.

81      En revanche, il ressort des dispositions de l’article 19, paragraphe 4, du règlement n° 2316/1999 que le législateur a assoupli les termes de la législation en ce qu’ils fixent les objectifs poursuivis par la mise en œuvre par les États membres de l’obligation d’entretien des parcelles gelées. En effet, la condition d’entretien des terres gelées ne vise plus de manière distincte et expresse à assurer le « maintien de bonnes conditions agronomiques ».

82      Cet assouplissement des termes de la législation, en ce qu’ils fixent les objectifs poursuivis par la mise en œuvre par les États membres de l’obligation d’entretien des parcelles gelées, reflète la modification du contexte dans lequel les normes de droit dérivé applicables en l’espèce ont été adoptées. En effet, ainsi que cela est relevé au point 76 ci-dessus, le législateur était tenu, conformément aux dispositions du droit primaire de l’Union, de garantir que les exigences en matière de protection de l’environnement aient été intégrées dans la définition et la mise en œuvre de la politique agricole commune, en vue de promouvoir le développement durable. De même, ainsi que cela est relevé au point 77 ci-dessus, il ressort des dispositions de l’article 6, paragraphe 2, du règlement n° 1251/1999, lu à la lumière de celles du considérant 21 du même règlement, que l’entretien des terres mises en jachère doit être entrepris dans le respect de l’objectif de protection de l’environnement poursuivi par ledit règlement.

83      Au demeurant, force est de relever que la Commission a elle-même indiqué, dans le rapport de synthèse, que, à la suite de la réforme de la politique agricole commune intervenue en 1999, l’obligation d’entretien des surfaces gelées avait pour objectif non seulement de les maintenir dans de bonnes conditions agronomiques, mais aussi de garantir la protection de l’environnement. C’est ainsi que, au point 12.1.1, 2), premier alinéa, du rapport de synthèse, la Commission a explicitement indiqué que, « [c]onformément à l’article 19 du règlement [no 2316/1999], les superficies gelées [devaient], pour être éligibles, couvrir une surface minimale » et qu’elles « ne [pouvaient] être utilisées pour certaines finalités et ne [pouvaient] être cultivées, mais [devaient] avoir été entretenues de manière à garantir la protection de l’environnement ». De même, au point 12.1.1, 2), sous le titre « Éligibilité et entretien des terres déclarées gelées », premier alinéa, du rapport de synthèse, la Commission a explicitement indiqué ce qui suit : « [J]usqu’en 1999, la législation en vigueur disposait que les superficies gelées devaient faire l’objet d’un entretien assurant le maintien de bonnes conditions agronomiques [article 3, paragraphe 2, du règlement (CE) no 762/94]. Dans le cadre de l’agenda 2000, l’accent a également été mis sur les aspects environnementaux en plus de la nécessité générale de maintenir les surfaces dans de bonnes conditions agronomiques. L’article 19, paragraphe 4, du règlement (CE) no 2316/1999 dispose que ‘[l]es États membres appliquent les mesures appropriées qui correspondent à la situation particulière des superficies gelées, de façon à assurer leur entretien et la protection de l’environnement’ [condition additionnelle introduite par l’agenda 2000]. »

84      Au regard des considérations qui précèdent s’agissant des autres critères d’interprétation des dispositions de l’article 19, paragraphe 4, du règlement n° 2316/1999, il y a lieu de constater que, au regard des objectifs poursuivis par la réglementation dont ils font partie ainsi que de l’ensemble des dispositions du droit de l’Union, lesdits critères confirment l’interprétation littérale dudit article qui figure au point 74 ci-dessus.

85      Par conséquent, il y a lieu d’interpréter les dispositions de l’article 19, paragraphe 4, du règlement n° 2316/1999 comme suit. D’une part, les États membres sont tenus d’appliquer des mesures appropriées qui leur permettent d’atteindre les deux objectifs poursuivis en matière de gel des terres, à savoir l’entretien des superficies gelées et la protection de l’environnement. D’autre part, le maintien d’une couverture végétale sur les parcelles gelées constitue une mesure appropriée parmi d’autres, au sens dudit article.

86      Partant, c’est à tort que la Commission a interprété lesdites dispositions en ce sens que le maintien d’une couverture végétale sur les terres gelées constituait une exception par rapport aux mesures appropriées devant permettre de satisfaire à l’objectif d’entretien des parcelles poursuivi par l’article 19, paragraphe 4, du règlement n° 2316/1999. Il y a donc lieu d’accueillir le premier argument.

–       Sur le second argument

87      Le Royaume de Danemark conteste le bien-fondé de la décision attaquée en ce qu’elle repose sur les considérations exposées par la Commission dans le rapport de synthèse selon lesquelles, en substance, il découle de l’obligation d’entretien des parcelles gelées une obligation de maintien de bonnes conditions agronomiques.

88      À ce titre, le Tribunal constate que, conformément au premier objectif visé à l’article 19, paragraphe 4, première phrase, du règlement n° 2316/1999, à savoir l’entretien des parcelles gelées, le maintien d’une couverture végétale sur les terres gelées ne saurait, nonobstant sa contribution non contestée à la protection de l’environnement, dispenser les États membres de contrôler que ladite couverture fait elle-même l’objet d’un entretien.

89      Certes, il convient de relever que, ainsi que la Commission l’a admis en réponse à des questions posées par le Tribunal lors de l’audience, la notion d’entretien ne fait l’objet d’aucune définition dans la législation de l’Union et notamment dans le règlement n° 2316/1999. En outre, dans la même réponse, la Commission a confirmé qu’il n’existait aucune orientation, applicable en l’espèce, tendant à préciser cette notion tant quant à l’objet que quant au calendrier des mesures que les États membres auraient pu retenir pour la mettre en œuvre.

90      Toutefois, il convient de constater que, tout d’abord, en vertu des dispositions de l’article 19, paragraphe 4, première phrase, du règlement n° 2316/1999, les mesures appropriées appliquées par les États membres sont déterminées par ces derniers en fonction de la situation particulière des superficies gelées. En outre, il convient de relever que les parties s’accordent sur le fait que le règlement n° 2316/1999 laisse aux États membres une certaine marge d’appréciation quant au choix des mesures pour atteindre les objectifs qu’il fixe et impose une certaine flexibilité pour adapter lesdites mesures aux circonstances de l’espèce. Enfin, ainsi que cela est rappelé au point 77 ci-dessus, en vertu du considérant 21 du règlement n° 1251/1999, l’entretien des terres mises en jachère doit être réalisé de manière à permettre de respecter certaines normes minimales de qualité de l’environnement.

91      Par ailleurs, il convient de considérer que l’assouplissement des termes de la législation, en ce qu’elle fixe les objectifs poursuivis par la mise en œuvre par les États membres de l’obligation d’entretien des parcelles gelées, tel que relevé au point 81 ci-dessus, ne saurait être interprété comme excluant la prise en compte de l’objet même du gel des terres dans le cadre du régime de soutien aux producteurs de certaines cultures arables, institué en 1992, poursuivi en 1999 et qui, ainsi qu’il est rappelé aux considérants 4 et 5 du règlement n° 1251/1999, contribue à la maîtrise de la production des cultures arables.

92      En effet, il y a lieu de rappeler que, en vertu notamment des dispositions de l’article 19, paragraphe 2, du règlement n° 2316/1999, il est permis d’effectuer des semis, pour une récolte l’année suivante, à partir du 15 juillet, c’est-à-dire à une date antérieure à celle du 31 août à laquelle la période de gel des parcelles est en principe clôturée. Une telle disposition, qui doit être lue à la lumière du considérant 14 du règlement n° 2316/1999, permet de constater que les parcelles gelées doivent être entretenues de telle sorte que leurs conditions agronomiques soient préservées. Au demeurant, le Royaume de Danemark a lui-même soutenu, dans le mémoire en réplique, que le critère déterminant aurait été de savoir si les superficies constituaient toujours, pendant la période de jachère, des terres cultivables.

93      Ainsi, lorsque des États membres décident de maintenir une couverture végétale sur les superficies gelées, ils sont tenus de contrôler que ladite couverture fait l’objet d’un entretien approprié au regard de la situation particulière des superficies gelées afin de préserver leurs conditions agronomiques. Partant, il y a lieu de rejeter le second argument comme étant non fondé.

94      Il résulte de l’ensemble des considérations exposées au titre de l’examen du premier grief que c’est à tort que la Commission a considéré que, s’agissant des superficies gelées, le maintien d’une couverture végétale constituait une exception par rapport aux mesures appropriées appliquées par les États membres, conformément aux dispositions de l’article 19, paragraphe 4, du règlement n° 2316/1999. En revanche, c’est à bon droit qu’elle a considéré que la couverture végétale maintenue sur des parcelles gelées devait faire l’objet d’un entretien, au sens de l’article 19, paragraphe 4, du règlement n° 2316/1999.

95      En conclusion, il y a lieu d’accueillir partiellement le premier grief de la première branche du deuxième moyen et de rejeter ledit grief pour le surplus comme étant non fondé.

 Sur le second grief, tiré d’une erreur de droit quant à l’interprétation des dispositions de l’article 19, paragraphe 1, deuxième alinéa, sous a), du règlement n° 2316/1999

96      Le Royaume de Danemark soutient, en substance, que la Commission a commis une erreur de droit en interprétant l’article 19, paragraphe 1, deuxième alinéa, sous a), du règlement n° 2316/1999 comme excluant la possibilité que des limites juridiques, telles que celles figurant au registre cadastral, puissent être qualifiées de limites permanentes au sens dudit article.

97      La Commission s’oppose à ces arguments.

98      Tout d’abord, le Tribunal rappelle que le règlement n° 2316/1999 porte modalités d’application du règlement n° 1251/1999. Or, l’article 9, premier alinéa, de ce dernier règlement dispose :

« Les modalités d’application du présent chapitre sont arrêtées selon la procédure prévue à l’article 23 du règlement (CEE) n° 1766/92 du Conseil du 30 juin 1992 portant organisation commune des marchés dans le secteur des céréales [(JO L 181, p. 21)] ; il s’agit notamment des règles :

[…]

–        concernant la superficie minimale susceptible de bénéficier du paiement ; ces conditions doivent tenir particulièrement compte des nécessités du contrôle et tendre à l’efficacité du régime mis en place,

–         [...] »

99      Par ailleurs, en vertu des dispositions de l’article 19, paragraphe 1, deuxième alinéa, sous a), du règlement n° 2316/1999, les États membres peuvent prendre en considération des superficies inférieures au niveau plancher déterminé, si ces superficies « concernent des parcelles entières avec des limites permanentes telles que des murs, haies et cours d’eau [...] ».

100    Il ressort des dispositions de l’article 19, paragraphe 1, deuxième alinéa, sous a), du règlement n° 2316/1999 que la tolérance qu’il prévoit est conditionnée par la présence, sur les parcelles concernées, d’un tracé physique, tel que celui d’un cours d’eau, d’une haie ou d’un mur, qui en délimite visuellement les contours. Une telle condition satisfait à l’exigence posée à l’article 9, premier alinéa, cinquième tiret, du règlement n° 1251/1999, selon laquelle les conditions de détermination des superficies minimales susceptibles de bénéficier du paiement doivent notamment tenir compte des nécessités du contrôle. En effet, la présence physique d’une haie, d’un mur ou d’un cours d’eau permet de délimiter avec un degré de certitude élevé les limites de la parcelle concernée.

101    Dans ces conditions, même à supposer qu’une limite de la parcelle en cause, telle qu’un tel mur ou une haie, ait été construite, pour la première, ou plantée, pour la seconde, en tenant compte des limites juridiques de la parcelle inscrites notamment dans le registre cadastral, seule la présence physique d’une telle limite sur la parcelle permet de déclarer cette dernière éligible en vertu des dispositions de l’article 19, paragraphe 1, du règlement n° 2316/1999.

102    Par conséquent, il convient de rejeter le second grief soulevé par le Royaume de Danemark au soutien de la première branche du deuxième moyen comme étant non fondé.

 Conclusion sur la première branche du deuxième moyen

103    Il ressort de l’ensemble des considérations qui précèdent que la première branche du deuxième moyen est uniquement fondée en ce que le Royaume de Danemark soutient, au titre du premier argument du premier grief de cette branche, que la Commission a commis une erreur de droit en considérant que le maintien d’une couverture végétale, au sens de l’article 19, paragraphe 4, du règlement n° 2316/1999, constituait une exception par rapport aux mesures appropriées devant être appliquées par les États membres afin d’assurer l’entretien de la parcelle gelée et la protection de l’environnement. Il y a lieu d’examiner, à ce stade, les conséquences susceptibles de découler de cette erreur de droit quant à la légalité de la décision attaquée.

104    À ce titre, premièrement, il convient de relever que, ainsi que cela ressort des motifs exposés dans le rapport de synthèse quant aux lacunes des contrôles des superficies gelées effectués par le Royaume de Danemark, tels que résumés en substance au point 10 ci-dessus, la Commission a, dans ledit rapport, constaté plusieurs types d’irrégularités qui concernent les parcelles gelées et qui sont susceptibles, selon elle, de fonder sa décision de déclarer des dépenses inéligibles au FEOGA. Or, ainsi qu’il est relevé au point 111 ci-après, certaines desdites irrégularités sont étrangères à la question de savoir si une couverture végétale était maintenue sur lesdites parcelles. Par conséquent, l’erreur de droit commise par la Commission et relevée par le Tribunal au point 86 ci-dessus n’est pas susceptible de produire des effets juridiques quant à l’appréciation du bien-fondé du constat par la Commission de ces dernières irrégularités.

105    Or, deuxièmement, il ressort de la jurisprudence constante rappelée aux points 57 et 58 ci-dessus que, s’agissant de l’apurement des comptes du FEOGA par la Commission, aux fins de prouver l’existence d’une violation des règles de l’organisation commune des marchés agricoles, il appartient seulement à la Commission de présenter un élément de preuve du doute sérieux et raisonnable qu’elle éprouve quant au caractère suffisant des contrôles effectués par les administrations nationales ou quant à l’irrégularité des chiffres transmis par ces dernières.

106    Par conséquent, au regard de ces règles spécifiques quant à la charge de la preuve qui s’appliquent aux procédures d’apurement des comptes par la Commission, il convient de considérer que, lorsque la Commission se fonde, comme c’est le cas en l’espèce, pour justifier un doute sérieux et raisonnable qu’elle éprouve, sur plusieurs éléments de preuve autonomes les uns des autres, il suffit que le Tribunal constate qu’au moins un desdits éléments a été à juste titre présenté et que l’État membre concerné n’est pas parvenu à en renverser la valeur probante pour que les conclusions tirées par la Commission quant au caractère insuffisant des modalités de mise en œuvre, par ledit État membre, du contrôle concerné soient fondées.

107    Ainsi, dans la mesure où la Commission a retenu plusieurs irrégularités quant aux conditions de réalisation des contrôles des parcelles gelées, irrégularités dont certaines étaient étrangères à la question de savoir si une couverture végétale était maintenue sur lesdites parcelles, il convient d’examiner le bien-fondé des arguments soulevés par le Royaume de Danemark dans le cadre de la seconde branche du deuxième moyen, tirée d’erreurs d’appréciation s’agissant desdites irrégularités.

b)     Sur la seconde branche du deuxième moyen

108    Au titre de la seconde branche du deuxième moyen, le Royaume de Danemark reproche à la Commission d’avoir commis des erreurs d’appréciation concernant les conditions de réalisation des contrôles des superficies gelées. À cet égard, il soulève deux arguments qui tendent, respectivement et en substance, à démontrer que, d’une part, les conditions dans lesquelles la Commission a constaté certaines irrégularités, qui affectaient certaines parcelles gelées, étaient entachées d’illégalité et, d’autre part, que lesdites irrégularités ne portaient que sur des parties insignifiantes de la superficie totale des parcelles concernées de sorte que, la superficie totale qui aurait pu être prise en compte était, même après retranchement desdites parties insignifiantes, toujours supérieure à la superficie effectivement déclarée.

109    La Commission s’oppose à ces arguments.

110    À titre liminaire, force est de constater que, au regard des règles spécifiques quant à la charge de la preuve au titre de l’apurement des comptes du FEOGA, telles que rappelées aux points 57 et 58 ci-dessus, dans la mesure où la Commission peut fonder ses constatations sur de simples doutes sérieux et raisonnables, c’est de manière inopérante que le Royaume de Danemark fait valoir que la Commission ne pouvait affirmer avec certitude que des irrégularités ont été commises au cours de la période de gel des terres.

111    À titre principal, premièrement, s’agissant du premier argument soulevé par le Royaume de Danemark, le Tribunal rappelle que, ainsi que cela ressort du titre 12.1.1, 2), du rapport de synthèse, la Commission a notamment constaté que des bottes de foin étaient stockées ou que des déchets de construction étaient déversés sur des parcelles qu’elle a contrôlées. Ces deux irrégularités sont étrangères à la question de savoir si une couverture végétale était maintenue sur lesdites parcelles.

112    S’agissant de ces deux irrégularités, il convient de relever que le Royaume de Danemark ne conteste pas la matérialité des constatations factuelles de la Commission qui les soutiennent. Toutefois, afin d’infirmer lesdites constatations, le Royaume de Danemark soutient qu’elles ont été effectuées par la Commission après la clôture de la période de gel et qu’en conséquence elles ne pouvaient pas être retenues pour conclure à l’existence d’irrégularités commises au cours de ladite période.

113    Le Tribunal constate que ce grief repose sur une interprétation manifestement erronée des règles concernant, d’une part, les contrôles devant être réalisés par les États membres et, d’autre part, les enquêtes sur place effectuées par les services de la Commission au titre de l’apurement des comptes des fonds concernés. En effet, ainsi que cela ressort de la requête, le Royaume de Danemark reproche à la Commission de ne pas avoir respecté les règles du calendrier des contrôles qu’elle impose aux États membres.

114    Or, ainsi que cela est rappelé aux points 37 à 41 ci-dessus, il découle des dispositions des articles 15 et 22 du règlement n° 2419/2001 et de la jurisprudence se rapportant auxdits articles qu’il incombe aux États membres et non pas à la Commission de mettre en œuvre et d’adopter les mesures qu’ils jugent à même de garantir l’efficacité des contrôles.

115    En outre, la Cour a également dit pour droit que, dans un souci d’efficacité, il convenait d’effectuer les contrôles sur les superficies consacrées aux cultures arables avant la récolte et sur les superficies consacrées au gel des terres avant que ladite obligation n’ait pris fin, à savoir le 31 août de l’année en cours. En tout état de cause, plus les contrôles sont tardifs, plus il est probable que la Commission pourra raisonnablement conclure que lesdits contrôles n’offrent pas le niveau attendu de garantie de régularité des demandes et que le risque de pertes pour le FEOGA sera significatif (arrêt de la Cour du 7 octobre 2004, Espagne/Commission, C‑153/01, Rec. p. I‑9009, point 153).

116    Au regard de cette jurisprudence, afin d’apprécier le caractère tardif des contrôles effectués par un État membre concernant le gel de parcelles, il y a lieu de tenir compte de la période durant laquelle ladite parcelle doit être gelée.

117    En effet, faute d’une telle vérification par les services compétents de l’État membre concerné, antérieure à la clôture de la période de gel, il ne saurait être exclu que les bottes de foin stockées ou les déchets de construction déversés sur certaines des parcelles contrôlées par la Commission l’aient été durant la période de gel desdites parcelles.

118    Il s’ensuit que la Commission pouvait, lors des enquêtes sur place qu’elle a réalisées, et au vu de la présence de bottes de foin stockées ou de déchets de construction déversés sur certaines des parcelles qu’elle a contrôlées, éprouver des doutes raisonnables et sérieux quant à la qualité des contrôles réalisés par le Royaume de Danemark.

119    Au surplus, la Commission était d’autant plus fondée à éprouver de tels doutes que le Royaume de Danemark a fait valoir, tant au cours de la procédure administrative que dans la requête, que plusieurs des irrégularités identifiées par la Commission sur certaines parcelles n’étaient, en grande partie, pas décelables sur le matériel photographique mis à disposition par la Commission.

120    Or, force est de relever que cet argument illustre par lui-même certaines des irrégularités qui ont pu découler dans la présente affaire, ainsi que cela est relevé au point 48 ci-dessus, de l’absence de mise en œuvre d’actions correctives en cas d’utilisation de seules images HR. En effet, si le Royaume de Danemark avait mis en œuvre, comme il était tenu de le faire, de telles actions avant la clôture de la période de gel, et ce notamment par la réalisation de contrôles renforcés sur le terrain, il aurait alors pu constater, avec un plus haut degré de certitude, la présence ou l’absence de bottes de foin ou de déchets de construction sur certaines parcelles.

121    Enfin, force est également de relever que le Royaume de Danemark a explicitement fait valoir au cours de la procédure administrative, selon la description qui figure dans la requête, que, en cas de réalisation par ses services compétents de contrôles sur le terrain postérieurement à la date de clôture de la période de gel, la méthode utilisée par les autorités danoises consistait alors, en cas de constatation d’irrégularités telles que, par exemple, le stockage de bottes de foin sur une parcelle, à faire bénéficier du doute le demandeur de l’aide, et ce en considérant que lesdites bottes n’étaient pas stockées sur la parcelle en cause au cours de la période de gel.

122    Le Tribunal considère qu’une telle méthode n’est pas conforme aux règles de contrôle qui doivent être mises en œuvre par les États membres afin de garantir le bon usage des fonds de l’Union, et ce conformément aux dispositions du droit de l’Union applicables au titre de l’apurement des comptes du FEOGA. En effet, elle accroît les risques de détournement desdits fonds, puisque non seulement les contrôles sur place effectués par les services compétents du Royaume de Danemark étaient, pour certains, tardifs au regard de la date de clôture de la période de gel des parcelles contrôlées, mais en outre, en cas de détection d’une possible irrégularité durant ces contrôles tardifs, lesdits services présumaient qu’elle n’aurait pas été constatée au cours de la période de gel des parcelles en cause.

123    Au regard des considérations figurant aux points 115 à 122 ci-dessus, d’une part, la Commission était fondée à considérer qu’il existait des doutes raisonnables et sérieux quant au caractère insuffisant des contrôles effectués par le Royaume de Danemark au sujet des parcelles concernées par les irrégularités visées au point 111 ci-dessus. D’autre part, il ressort des considérations qui précèdent que le Royaume de Danemark n’a présenté aucun élément susceptible d’étayer ses arguments tendant à lever lesdits doutes. Il s’ensuit que c’est à bon droit que la Commission a conclu à l’existence de telles irrégularités et, partant, de lacunes quant aux contrôles par le Royaume de Danemark des superficies gelées.

124    Deuxièmement, s’agissant du deuxième argument soulevé par le Royaume de Danemark, le Tribunal constate que ledit argument est également soulevé dans le cadre du quatrième moyen et qu’il vise, en substance, à démontrer le caractère disproportionné des corrections financières appliquées par la Commission. Partant, il est renvoyé, à ce sujet, aux motifs du présent arrêt consacrés, ci-après, à l’examen du quatrième moyen.

125    Par conséquent, au regard de la considération liminaire figurant au point 106 ci-dessus et de la conclusion tirée au point 123 ci-dessus, sans qu’il y ait lieu d’examiner les autres arguments soulevés par le Royaume de Danemark quant à d’autres erreurs d’appréciation que la Commission aurait commises s’agissant des autres éléments de preuve d’irrégularités qu’elle a rapportés dans le rapport de synthèse, tels que résumés au point 10 ci-dessus, il convient de rejeter la seconde branche du deuxième moyen comme étant non fondée.

126    Il ressort de l’ensemble des considérations qui précèdent que le deuxième moyen doit être accueilli quant au premier grief de la première branche et écarté pour le surplus.

127    Toutefois, au regard des considérations exposées aux points 103 à 107 ci-dessus, la Commission ayant rapporté à suffisance de droit la preuve de doutes sérieux et raisonnables quant aux deux irrégularités visées au point 111 ci-dessus, il y a lieu de conclure que, nonobstant l’erreur de droit constatée au point 95 ci-dessus, cette dernière ne saurait emporter l’annulation de la décision attaquée en ce que la Commission conclut à l’existence de lacunes des contrôles par le Royaume de Danemark des superficies gelées.

3.     Sur le troisième moyen, tiré d’une violation des formes substantielles

128    Au titre du troisième moyen, qui se divise en deux branches, le Royaume de Danemark soutient, en substance, que, premièrement, la décision attaquée viole les principes de confiance légitime et de sécurité juridique et, deuxièmement, ladite décision est entachée d’une violation de l’obligation de motivation.

129    La Commission s’oppose aux arguments soulevés par le Royaume de Danemark.

a)     Sur la première branche du troisième moyen

130    À l’appui de la première branche du troisième moyen, le Royaume de Danemark formule deux griefs pris de ce que la Commission, premièrement, n’a pas répondu aux différentes questions qu’il lui avait posées en 2003 quant à l’adaptation du système de contrôle danois à la suite de préconisations contenues dans un nouveau document de travail de la Commission introduisant des seuils de tolérance plus rigoureux s’agissant des contrôles par télédétection et, deuxièmement, a violé le principe de sécurité juridique en concluant à l’existence d’une pratique abusive en matière de « chasse à la prime » du seul fait qu’un terrain était situé à une distance éloignée de l’exploitation principale.

131    À titre liminaire, le Tribunal relève que le second grief se rapporte aux irrégularités retenues par la Commission, au titre des lacunes quant aux contrôles des superficies gelées, concernant la lutte contre les pratiques de « chasse à la prime ».

132    Or, il ressort des considérations et des conclusions tirées aux points 123 à 125 ci-dessus que, dès lors que la Commission a conclu à bon droit à l’existence des irrégularités visées au point 111 ci-dessus, il n’y avait plus lieu pour le Tribunal d’examiner les autres arguments soulevés par le Royaume de Danemark quant aux autres erreurs d’appréciation que la Commission aurait commises en retenant d’autres irrégularités rapportées dans le rapport de synthèse, telles que résumées au point 10 ci-dessus, et notamment quant à la lutte contre les pratiques de « chasse à la prime ».

133    Par conséquent, même à supposer que le second grief formulé au soutien de la première branche du troisième moyen soit fondé, l’illégalité dont serait entachée la décision attaquée n’entraînerait pas son annulation. Dès lors, il n’y a pas lieu de se prononcer sur le bien-fondé de ce second grief qui est inopérant.

134    À titre principal, s’agissant du premier grief formulé au soutien de la première branche du troisième moyen, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, l’absence de réponse de la Commission à une lettre n’est pas en principe de nature, ni en soi ni combinée aux autres circonstances de l’espèce, à susciter une confiance légitime pour la personne qui l’a envoyée (arrêt de la Cour du 11 octobre 2007, Grèce/Commission, C‑332/06 P, non publié au Recueil, point 67 ; voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 16 octobre 2003, Irlande/Commission, C‑339/00, Rec. p. I‑11757, points 78 et 79).

135    Dans ces conditions, force est de constater que, en l’espèce, à supposer que la Commission n’ait pas, ainsi que l’affirme le Royaume de Danemark, répondu aux question posées en 2003 par ce dernier, une telle absence de réponse ne saurait être interprétée comme étant favorable à la position du Royaume de Danemark de sorte qu’il aurait été incité à croire que l’adaptation de son système de contrôle était conforme aux règles communautaires applicables en l’espèce. Dès lors, il convient de rejeter le premier grief de la première branche comme étant non fondé.

136    Il ressort de l’ensemble des considérations qui précèdent que, en ce qui concerne la première branche du troisième moyen, les deux griefs formulés à son soutien doivent être rejetés, comme étant non fondé pour le premier et comme étant inopérant pour le second. Partant, au regard des règles applicables en matière d’apurement des comptes du FEOGA, c’est à tort que le Royaume de Danemark se prévaut d’une violation du principe de sécurité juridique.

b)     Sur la seconde branche du troisième moyen

137    Au titre de la seconde branche du troisième moyen, le Royaume de Danemark soutient que la décision attaquée est entachée d’un défaut de motivation.

138    La Commission s’oppose à ces arguments.

139    Le Tribunal rappelle que, selon une jurisprudence constante, la mesure de l’obligation de motiver consacrée par l’article 253 CE dépend de la nature de l’acte en cause et du contexte dans lequel il a été adopté (arrêts de la Cour du 22 juin 1993, Allemagne/Commission, C‑54/91, Rec. p. I‑3399, point 10, et du 14 avril 2005, Portugal/Commission, C‑335/03, Rec. p. I‑2955, point 83).

140    Dans le contexte particulier de l’élaboration des décisions relatives à l’apurement des comptes du FEOGA, la motivation d’une décision doit, selon la jurisprudence, être considérée comme suffisante dès lors que l’État destinataire a été étroitement associé au processus d’élaboration de cette décision et qu’il connaissait les raisons pour lesquelles la Commission estimait ne pas devoir mettre à la charge du FEOGA la somme litigieuse (arrêts de la Cour du 19 juin 2003, Espagne/Commission, C‑329/00, Rec. p. I‑6103, point 83, et Portugal/Commission, point 139 supra, point 84 ; arrêt du Tribunal du 4 septembre 2009, Autriche/Commission, T‑368/05, non publié au Recueil, point 149).

141    En l’espèce, il y a lieu de constater que, dans l’annexe unique de la décision attaquée, la Commission motive chacune des différentes corrections appliquées à l’égard du Royaume de Danemark en utilisant soit les termes « Faiblesse des contrôles du respect des superficies mises en jachère », soit les termes « Faiblesses dans les contrôles clés : télédétection ». La décision attaquée n’est donc pas dépourvue de toute motivation quant aux défaillances constatées.

142    En outre, il ressort du dossier de l’affaire, et notamment de la lettre de la Commission du 27 juin 2007 et des termes du rapport de synthèse en ce qu’il concerne les aides à la surface et les cultures arables au Royaume de Danemark, que la Commission a indiqué à ce dernier, au cours de la procédure administrative, les griefs sur lesquels elle a fondé la décision attaquée.

143    Il résulte des constatations qui précèdent que la décision attaquée est motivée conformément à l’article 253 CE et qu’il y a lieu de rejeter la seconde branche du troisième moyen comme étant non fondée.

144    En conclusion, il y lieu de rejeter le troisième moyen comme étant non fondé.

4.     Sur le quatrième moyen, tiré d’erreurs de droit et d’appréciation des règles relatives aux corrections financières

145    Au titre du quatrième moyen, le Royaume de Danemark soutient, en substance, que la Commission a violé les règles applicables afin de déterminer le montant des corrections financières. Ce quatrième moyen se divise en deux branches. Premièrement, le Royaume de Danemark fait valoir que la Commission n’a rapporté la preuve d’aucune insuffisance grave dans l’application des règles de l’Union. Deuxièmement, il estime que la Commission n’a pas tenu compte du fait que le FEOGA n’a pas subi de préjudice financier réel et que, par conséquent, le montant de la correction financière qu’elle a retenu est disproportionné par rapport audit préjudice.

146    Plus précisément, en ce qui concerne la seconde branche du quatrième moyen, le Royaume de Danemark soutient que le FEOGA n’a pas subi de préjudice financier réel, car la superficie totale des parties, non affectées par les irrégularités de contrôle, des parcelles gelées est toujours restée supérieure à la superficie totale effectivement déclarée. En effet, lesdites irrégularités n’auraient affecté qu’une partie insignifiante de la superficie totale des parcelles concernées. Partant, la Commission n’aurait pas dû écarter du financement ces parcelles dans leur totalité, mais uniquement la partie de celles-ci affectée par lesdites irrégularités.

147    La Commission s’oppose à ces arguments.

148    À cet égard, le Tribunal rappelle, premièrement, que le principe de proportionnalité exige, selon une jurisprudence constante, que les actes des institutions communautaires ne dépassent pas les limites de ce qui est approprié et nécessaire pour atteindre le but recherché (arrêts de la Cour du 17 mai 1984, Denkavit Nederland, 15/83, Rec. p. 2171, point 25, et du Tribunal du 19 juin 1997, Air Inter/Commission, T‑260/94, Rec. p. II‑997, point 144).

149    Il découle également de la jurisprudence que la violation des obligations dont le respect revêt une importance fondamentale pour le bon fonctionnement d’un système relevant de l’Union peut être sanctionnée par la perte d’un droit ouvert par la réglementation de l’Union, tel que le droit à une aide (voir arrêt de la Cour du 12 octobre 1995, Cereol Italia, C‑104/94, Rec. p. I‑2983, point 24, et la jurisprudence citée).

150    Deuxièmement, selon une jurisprudence constante, s’il appartient à la Commission de prouver l’existence d’une violation des règles de l’Union, une fois cette violation établie, il revient à l’État membre de démontrer, le cas échéant, que la Commission a commis une erreur quant aux conséquences financières à en tirer (arrêts de la Cour du 7 juillet 2005, Grèce/Commission, C‑5/03, Rec. p. I‑5925, point 38, et du 24 avril 2008, Belgique/Commission, C‑418/06 P, Rec. p. I‑3047, point 135).

151    En outre, aux termes du document n° VI/5330/97 de la Commission, du 23 décembre 1997, intitulé « Orientations concernant le calcul des conséquences financières lors de la préparation de la décision d’apurement des comptes du FEOGA-Garantie » (ci-après les « orientations de 1997 »), lorsque des contrôles sont effectués, mais de manière imparfaite, la gravité de la déficience doit être évaluée. À ce titre, pour justifier une correction financière, il doit exister une carence significative dans l’application de règles de l’Union explicites et celle-ci doit exposer le FEOGA à un risque réel de perte ou d’irrégularité.

152    En ce qui concerne le type de correction appliqué, il y a lieu de rappeler que, ainsi que le prévoient les orientations de 1997, lorsqu’il n’est pas possible d’évaluer précisément les pertes subies par l’Union, une correction forfaitaire peut être envisagée par la Commission (arrêt du 24 avril 2008, Belgique/Commission, point 150 supra, point 136).

153    Selon l’annexe 2 des orientations de 1997, la Commission distingue deux catégories de contrôles, comme suit :

« –      Les contrôles clés sont les vérifications physiques et administratives requises pour contrôler les éléments quant au fond, en particulier la réalité de l’objet de la demande, la quantité et les conditions qualitatives, y compris le respect des délais, les exigences de récoltes, les délais de rétention, etc. Ils sont effectués sur le terrain et par recoupement avec des informations indépendantes, telles que les registres cadastraux.

–      Les contrôles secondaires sont les opérations administratives nécessaires pour traiter correctement les demandes, telles que la vérification du respect des délais de soumission, l’identification de demandes en doublon pour un même objet, l’analyse du risque, l’application de sanctions et la supervision adéquate des procédures. »

154    En ce qui concerne les contrôles clés, l’annexe 2 des orientations de 1997 prévoit ce qui suit :

–        lorsque tous les contrôles clés sont effectués, mais sans respecter le nombre, la fréquence ou la rigueur préconisés par les règlements, il convient alors d’appliquer une correction à hauteur de 5 %, car il peut raisonnablement être conclu que ces contrôles n’offrent pas le niveau attendu de garantie de régularité des demandes et que le risque de pertes pour le FEOGA était significatif ;

–        lorsqu’un ou plusieurs contrôles clés ne sont pas effectués ou sont si mal ou si rarement réalisés qu’ils sont inefficaces pour déterminer l’éligibilité d’une demande ou prévenir les irrégularités, il convient alors d’appliquer une correction de 10 %, car il est raisonnablement permis de penser qu’il existait un risque élevé de pertes importantes pour le FEOGA. En outre, lorsque la carence résulte de la non‑adoption, par un État membre, d’un système de contrôle approprié, la correction doit être appliquée à toutes les dépenses auxquelles ce système de contrôle était applicable.

155    En l’espèce, à titre liminaire, il convient de constater que le Royaume de Danemark ne remet pas en cause, en soi, le bien-fondé du choix, par la Commission, du type de correction financière, à savoir une correction forfaitaire. Tout au plus soutient-il, en substance, dans le cadre de la seconde branche du quatrième moyen, que l’application des taux forfaitaires retenus entraînerait un montant de correction financière disproportionné par rapport au préjudice réellement encouru par le FEOGA.

156    À titre principal, en premier lieu, s’agissant de la première branche du quatrième moyen, il convient de relever que le Royaume de Danemark renvoie à ses arguments, exposés au soutien des premier et deuxième moyens, tendant à démontrer l’absence d’insuffisances graves parmi les irrégularités relevées par la Commission, en ce qui concerne l’application tant des règles de contrôle des parcelles gelées que de celles par télédétection.

157    À ce titre, tout d’abord, ainsi que cela a été retenu aux points 53 et 123 ci-dessus, la Commission était fondée à éprouver des doutes sérieux et raisonnables s’agissant tant des contrôles des parcelles gelées que des contrôles par télédétection effectués par le Royaume de Danemark. En outre, le Royaume de Danemark n’est pas parvenu à infirmer les constatations de la Commission concernant l’insuffisance des contrôles desdites parcelles. C’est donc à juste titre que la Commission a considéré que les dépenses en cause n’avaient pas été exposées conformément aux dispositions de droit applicables dans le cadre de l’organisation commune des marchés agricoles.

158    Ensuite, il y a lieu de constater que, ainsi que cela ressort des termes des orientations de 1997 visés au point 153 ci-dessus, les contrôles sur place en cause en l’espèce, dont l’objet portait sur la qualité des surfaces déclarées, constituent des contrôles clés, au sens des orientations de 1997. Or, ainsi que cela est rappelé au point 154 ci-dessus, dès lors que ces contrôles ont été réalisés si mal et que, ainsi que cela est relevé au point 121 ci-dessus, le Royaume de Danemark a lui-même reconnu qu’il n’a pas été en mesure de constater certaines irrégularités telles que le stockage de bottes de foin ou le déversement de déchets de construction sur certaines parcelles, c’est à bon droit que la Commission a, d’une part, considéré que les irrégularités qu’elle avait relevées démontraient des insuffisances graves s’agissant des contrôles effectués par le Royaume de Danemark et, d’autre part, appliqué le taux forfaitaire de correction maximal, soit 10 %.

159    En second lieu, s’agissant de la seconde branche du quatrième moyen, il convient de renvoyer à la jurisprudence citée au point 57 ci-dessus, dont il ressort que, d’une part, le FEOGA ne finance que les interventions effectuées conformément aux dispositions de l’Union dans le cadre de l’organisation commune des marchés agricoles et, d’autre part, aux fins de prouver l’existence d’une violation des règles de l’organisation commune des marchés agricoles, la Commission n’est pas tenue de démontrer d’une façon exhaustive l’insuffisance des contrôles effectués par les administrations nationales ou l’irrégularité des chiffres transmis par ces dernières. Ainsi qu’il a également été rappelé au point 57 ci-dessus, c’est l’État membre qui est le mieux placé pour recueillir et vérifier les données nécessaires à l’apurement des comptes du FEOGA et c’est à lui qu’il incombe, en conséquence, de présenter la preuve la plus détaillée et complète de la réalité de ses contrôles ou de ses chiffres et, le cas échéant, de l’inexactitude des affirmations de la Commission.

160    De même, il ressort de la jurisprudence que l’obligation qui incombe aux États membres, en vertu de l’article 15 du règlement n° 2419/2001, d’effectuer notamment les contrôles sur place de façon à assurer la vérification efficace du respect des conditions pour l’octroi des aides et des primes, implique que ces contrôles permettent de vérifier avec précision et exactitude la nature et la qualité des cultures faisant l’objet d’une demande d’aide (voir, par analogie, arrêt de la Cour du 10 novembre 2005, Italie/Commission, C‑307/03, non publié au Recueil, points 31 et 32).

161    Or, s’agissant notamment de la politique de gel des parcelles, la Commission est dans l’impossibilité, pour des raisons pratiques évidentes, de procéder à un contrôle exhaustif et approfondi de l’ensemble des parcelles concernées au sein de chaque État membre. En revanche, ainsi que cela ressort de la jurisprudence visée au point 57 ci-dessus, les États membres sont les mieux placés pour effectuer un tel contrôle.

162    Or, en l’espèce et tout d’abord, force est de relever que le Royaume de Danemark s’est contenté de présenter des éléments de preuve portant sur les constatations ponctuelles effectuées par la Commission, lors de l’enquête visée au point 1 ci-dessus, à partir de l’échantillon des parcelles retenues. À aucun moment il n’a présenté des éléments de preuve portant sur l’ensemble des parcelles gelées. Dès lors, lesdits éléments ne sont pas suffisamment détaillés et complets pour démontrer la réalité de ses contrôles ou de ses chiffres et, partant, ne répondent pas à la charge de la preuve qui pèse sur les États membres au titre de l’apurement des comptes du FEOGA.

163    Ensuite, le Royaume de Danemark ne parvient pas à démontrer que les constatations ponctuelles retenues par la Commission telles que le stockage de bottes de foin sur des parcelles gelées affectent exclusivement les parcelles qu’elle a contrôlées.

164    Notamment, force est de rappeler que, ainsi que relevé au point 119 ci-dessus, le Royaume de Danemark reconnaît lui-même que les contrôles par télédétection qu’il avait effectués ne permettaient pas de constater la présence de bottes de foin stockées sur certaines des parcelles contrôlées par la Commission. Partant, il ne saurait être exclu que d’autres parcelles, non contrôlées par la Commission, aient également été utilisées afin de stocker des bottes de foin.

165    Par ailleurs, ainsi que cela est relevé au point 121 ci-dessus, le Royaume de Danemark ne conteste pas avoir effectué certains des contrôles des parcelles gelées postérieurement à la clôture de la période de gel. Or, la tardiveté de tels contrôles ne permet pas de garantir leur efficacité.

166    Enfin, force est de constater que, au point 427 de la requête, le Royaume de Danemark déclare que les irrégularités constatées par la Commission sur certaines des parcelles inspectées signifiaient « seulement qu’il se trouve évidemment toujours l’un ou l’autre agriculteur qui n’est pas respectueux des règles ». Une telle déclaration de la part du Royaume de Danemark révèle une incompréhension grave du rôle primordial que jouent en premier rang les États membres, tel qu’il ressort des rappels effectués au point 57 ci-dessus, au titre de l’apurement des comptes du FEOGA. Or, ainsi que cela est rappelé audit point, ce rôle doit permettre de garantir que le FEOGA ne finance que les interventions effectuées conformément aux dispositions du droit de l’Union dans le cadre de l’organisation commune des marchés agricoles.

167    Dès lors, le Royaume de Danemark n’a pas présenté la preuve la plus détaillée et complète de la réalité de ses contrôles ou de ses chiffres et, le cas échéant, de l’inexactitude des affirmations de la Commission.

168    Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que, d’une part, la Commission a apporté à suffisance de droit la preuve d’un élément de nature à justifier le doute sérieux et raisonnable qu’elle éprouvait à l’égard des contrôles clés portant sur les parcelles gelées réalisés par le Royaume de Danemark et, d’autre part, elle a raisonnablement pu conclure que le risque de pertes pour le FEOGA était significatif et, partant, sans violer le principe de proportionnalité, imposer une correction forfaitaire d’un montant de 5 % ou de 10 %.

169    Il y a donc lieu de rejeter la seconde branche du quatrième moyen comme étant non fondée.

170    En conclusion, le quatrième moyen doit être écarté et, par la même occasion, le recours rejeté.

 Sur les dépens

171    Aux termes de l’article 87, paragraphe 3, du règlement de procédure, le Tribunal peut répartir les dépens ou décider que chaque partie supporte ses propres dépens si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs. Dans les circonstances de l’espèce, au regard notamment de l’erreur de droit commise par la Commission en ce qui concerne les dispositions de l’article 19, paragraphe 4, du règlement n° 2316/1999, le Tribunal décide que chaque partie supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Chaque partie supportera ses propres dépens.

Pelikánová

Jürimäe

Van der Woude

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 3 juillet 2012.

Signatures

Table des matières


Faits à l’origine du litige

Procédure et conclusions des parties

En droit

A –  Sur la recevabilité des photographies de l’annexe B.5 du mémoire en défense

B –  Sur le fond

1.  Sur le premier moyen, tiré d’erreurs de droit et d’appréciation des règles relatives aux contrôles par télédétection

a)  Sur la première branche du premier moyen

b)  Sur la seconde branche du premier moyen

2.  Sur le deuxième moyen, tiré d’erreurs de droit et d’appréciation des règles relatives aux contrôles des superficies gelées

a)  Sur la première branche du deuxième moyen

Sur le premier grief, tiré d’une erreur de droit quant à l’interprétation des dispositions de l’article 19, paragraphe 4, du règlement n° 2316/1999

–  Sur le premier argument

–  Sur le second argument

Sur le second grief, tiré d’une erreur de droit quant à l’interprétation des dispositions de l’article 19, paragraphe 1, deuxième alinéa, sous a), du règlement n° 2316/1999

Conclusion sur la première branche du deuxième moyen

b)  Sur la seconde branche du deuxième moyen

3.  Sur le troisième moyen, tiré d’une violation des formes substantielles

a)  Sur la première branche du troisième moyen

b)  Sur la seconde branche du troisième moyen

4.  Sur le quatrième moyen, tiré d’erreurs de droit et d’appréciation des règles relatives aux corrections financières

Sur les dépens


* Langue de procédure : le danois.