Language of document : ECLI:EU:T:2013:444

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

16 septembre 2013 (*) (1)

« Concurrence – Ententes – Marchés belge, allemand, français, italien, néerlandais et autrichien des installations sanitaires pour salles de bains – Décision constatant une infraction à l’article 101 TFUE et à l’article 53 de l’accord EEE – Coordination des hausses de prix et échange d’informations commerciales sensibles – Imputabilité du comportement infractionnel – Amendes – Lignes directrices pour le calcul du montant des amendes de 2006 – Gravité de l’infraction – Circonstances atténuantes – Crise économique – Communication de 2002 sur la coopération – Réduction du montant de l’amende – Valeur ajoutée significative »

Dans l’affaire T‑412/10,

Roca, établie à Saint-Ouen-l’Aumône (France), représentée par Me P. Vidal Martínez, avocat,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée initialement par M. F. Castillo de la Torre, Mmes A. Antoniadis et F. Castilla Contreras, puis par M. Castillo de la Torre, Mme Antoniadis et M. F. Jimeno Fernández, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation partielle de la décision C (2010) 4185 final de la Commission, du 23 juin 2010, relative à une procédure d’application de l’article 101 TFUE et de l’article 53 de l’accord EEE (affaire COMP/39092 – Installations sanitaires pour salles de bains), et une demande de réduction du montant de l’amende infligée à la requérante dans cette décision,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

composé de Mmes I. Pelikánová, président, K. Jürimäe (rapporteur) et M. M. van der Woude, juges,

greffier : M. J. Palacio González, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 6 mars 2013,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Par la décision C (2010) 4185 final, du 23 juin 2010, relative à une procédure d’application de l’article 101 TFUE et de l’article 53 de l’accord EEE (affaire COMP/39092 – Installations sanitaires pour salles de bains) (ci-après la « décision attaquée »), la Commission européenne a constaté l’existence d’une infraction à l’article 101, paragraphe 1, TFUE et à l’article 53 de l’accord sur l’Espace économique européen (EEE) dans le secteur des installations sanitaires pour salles de bains. Cette infraction, à laquelle 17 entreprises auraient participé, se serait déroulée au cours de différentes périodes comprises entre le 16 octobre 1992 et le 9 novembre 2004 et aurait pris la forme d’un ensemble d’accords anticoncurrentiels ou de pratiques concertées sur les territoires de la Belgique, de l’Allemagne, de la France, de l’Italie, des Pays-Bas et de l’Autriche (considérants 2 et 3 et article 1er de la décision attaquée).

2        Plus précisément, la Commission a indiqué, dans la décision attaquée, que l’infraction constatée consistait, premièrement, en la coordination, par lesdites entreprises d’installations sanitaires pour salles de bains, des hausses de prix annuelles et d’autres éléments de tarification, dans le cadre de réunions régulières au sein d’associations nationales professionnelles, deuxièmement, en la fixation ou la coordination des prix à l’occasion d’événements spécifiques tels que l’augmentation du coût des matières premières, l’introduction de l’euro ainsi que l’instauration de péages routiers et, troisièmement, en la divulgation et l’échange d’informations commerciales sensibles. En outre, la Commission a constaté que la fixation des prix dans le secteur des installations sanitaires pour salles de bains suivait un cycle annuel. Dans ce cadre, les fabricants fixaient des barèmes de prix qui restaient généralement en vigueur pendant un an et servaient de base aux relations commerciales avec les grossistes (considérants 152 à 163 de la décision attaquée).

3        Les produits concernés par la décision attaquée sont les installations sanitaires pour salles de bains faisant partie de l’un des trois sous-groupes de produits suivants : les articles de robinetterie, les enceintes de douche et accessoires ainsi que les articles en céramique (ci-après les « trois sous-groupes de produits ») (considérants 5 et 6 de la décision attaquée).

4        La requérante, Roca, ainsi que Roca Sanitario SA, sa société mère, et Laufen Austria AG, une autre filiale de Roca Sanitario, figurent parmi les destinataires de la décision attaquée. À l’époque des faits litigieux, elle était détenue à 100 % par Roca Sanitario. Elle distribuait principalement des articles en céramique et de robinetterie sur le marché français (considérants 1063 et 1064 de la décision attaquée).

5        Le 15 juillet 2004, Masco Corp. et ses filiales, parmi lesquelles Hansgrohe AG, qui fabrique des articles de robinetterie, et Hüppe GmbH, qui fabrique des enceintes de douche, ont informé la Commission de l’existence d’une entente dans le secteur des installations sanitaires pour salles de bains et ont demandé à bénéficier de l’immunité d’amendes au titre de la communication de la Commission sur l’immunité d’amendes et la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes (JO 2002, C 45, p. 3, ci-après la « communication de 2002 sur la coopération ») ou, à défaut, d’une réduction du montant de ces amendes. Le 2 mars 2005, la Commission a adopté une décision conditionnelle d’immunité d’amendes au profit de Masco, conformément au paragraphe 8, sous a), et au paragraphe 15 de la communication de 2002 sur la coopération (considérants 126 à 128 de la décision attaquée).

6        Les 9 et 10 novembre 2004, la Commission a, en application de l’article 20, paragraphe 4, du règlement (CE) n° 1/2003 du Conseil, du 16 décembre 2002, relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles [101 TFUE] et [102 TFUE] (JO 2003, L 1, p. 1), procédé à des inspections inopinées dans les locaux de plusieurs sociétés et associations nationales professionnelles opérant dans le secteur des installations sanitaires pour salles de bains (considérant 129 de la décision attaquée).

7        Les 15 et 19 novembre 2004, Grohe Beteiligungs GmbH et ses filiales ainsi qu’Ideal Standard Inc. et ses filiales ont respectivement sollicité l’immunité d’amendes au titre de la communication de 2002 sur la coopération ou, à défaut, la réduction de leur montant (considérants 131 et 132 de la décision attaquée).

8        Entre le 15 novembre 2005 et le 16 mai 2006, la Commission a adressé des demandes de renseignements, conformément à l’article 18 du règlement n° 1/2003, à plusieurs sociétés et associations opérant dans le secteur des installations sanitaires pour salles de bains, y compris à la requérante (considérant 133 de la décision attaquée).

9        Le 17 janvier 2006, la requérante a demandé à bénéficier de l’immunité d’amendes au titre de la communication de 2002 sur la coopération ou, à défaut, de la réduction de leur montant. Les 19 et 20 janvier 2006, respectivement, Hansa Metallwerke AG et ses filiales ainsi qu’Aloys F. Dornbracht GmbH & Co. KG Armaturenfabrik ont également demandé à bénéficier de l’immunité d’amendes au titre de ladite communication ou, à défaut, de la réduction de leur montant (considérants 135 à 138 de la décision attaquée).

10      Par courrier du 8 décembre 2006, la Commission a informé la requérante qu’elle avait décidé de lui accorder une réduction conditionnée du montant de l’amende.

11      Le 26 mars 2007, la Commission a adopté une communication des griefs, laquelle a été notifiée à la requérante (considérant 139 de la décision attaquée).

12      Du 12 au 14 novembre 2007, une audition a été tenue, à laquelle la requérante a participé (considérant 143 de la décision attaquée).

13      Le 9 juillet 2009, la Commission a envoyé à plusieurs sociétés, parmi lesquelles la requérante, une lettre d’exposé des faits, attirant leur attention sur certaines preuves sur lesquelles elle envisageait de se fonder dans le cadre d’une décision finale (considérants 147 et 148 de la décision attaquée).

14      Entre le 19 juin 2009 et le 8 mars 2010, la Commission a adressé à plusieurs sociétés, parmi lesquelles la requérante, des demandes d’information supplémentaires, conformément à l’article 18 du règlement n° 1/2003 (considérants 149 à 151 de la décision attaquée).

15      Par courrier du 22 janvier 2010, la Commission a informé la requérante, Roca Sanitario et Laufen Austria (ci-après, ensemble, le « groupe Roca ») de sa décision de ne pas leur accorder de réduction du montant de l’amende au titre de la coopération (considérant 1290 de la décision attaquée).

16      Le 23 juin 2010, la Commission a adopté la décision attaquée.

17      Dans la décision attaquée, en premier lieu, la Commission a considéré que les pratiques décrites au point 2 ci-dessus faisaient partie d’un plan global visant à restreindre la concurrence entre les destinataires de ladite décision et présentaient les caractéristiques d’une infraction unique et continue, dont le champ d’application couvrait les trois sous-groupes de produits et s’étendait au territoire de la Belgique, de l’Allemagne, de la France, de l’Italie, des Pays-Bas et de l’Autriche (ci-après l’« infraction constatée »). (considérants 778 et 793 de la décision attaquée). À cet égard, elle a notamment souligné le fait que lesdites pratiques avaient été conformes à un modèle récurrent qui s’était avéré être le même dans les six États membres couverts par son enquête (considérants 778 et 793 de la décision attaquée). Elle a également relevé l’existence d’associations nationales professionnelles concernant l’ensemble des trois sous-groupes de produits, qu’elle a nommées « organismes de coordination », d’associations nationales professionnelles comprenant des membres dont l’activité avait trait à au moins deux de ces trois sous-groupes de produits, qu’elle a nommées « associations multiproduits », ainsi que d’associations spécialisées comprenant des membres dont l’activité portait sur l’un de ces trois sous-groupes de produits (considérants 796 et 798 de la décision attaquée). Enfin, elle a constaté la présence d’un groupe central d’entreprises ayant participé à l’entente dans différents États membres et dans le cadre d’organismes de coordination et d’associations multi-produits (considérants 796 et 797 de la décision attaquée).

18      S’agissant de la participation du groupe Roca à l’infraction constatée, la Commission a considéré que ledit groupe avait connaissance de l’infraction concernant les trois sous-groupes de produits, compte tenu notamment de sa participation aux réunions de l’organisme de coordination Arbeitskreis Sanitärindustrie (ci-après l’« ASI »), en Autriche, ainsi qu’aux réunions de l’Association française des pompes et de la robinetterie et de l’Association française des industries de céramique sanitaire (ci-après l’« AFICS »), en France (considérant 870 de la décision attaquée). Toutefois, en ce qui concerne la portée géographique de l’entente, la Commission a estimé que le groupe Roca ne pouvait pas être considéré comme ayant eu connaissance de sa portée globale, mais uniquement des comportements collusoires ayant eu lieu en France et en Autriche (considérant 871 de la décision attaquée). La participation de la requérante elle-même se serait limitée au territoire français et aux articles de robinetterie et en céramique (considérants 1064 et 1223 de la décision attaquée).

19      En second lieu, aux fins de fixer le montant de l’amende infligée à chaque entreprise, la Commission s’est fondée sur les lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l’article 23, paragraphe 2, sous a), du règlement nº 1/2003 (JO 2006, C 210, p. 2, ci-après les « lignes directrices de 2006 ») (considérant 1184 de la décision attaquée).

20      Dans un premier temps, la Commission a déterminé le montant de base de l’amende. Pour ce faire, elle a précisé que celui-ci était fondé, pour chaque entreprise, sur ses ventes par État membre, multipliées par le nombre d’années de participation à l’infraction constatée dans chaque État membre et pour le sous-groupe de produits concerné, de sorte qu’il soit tenu compte de ce que certaines entreprises exercent leurs activités uniquement dans certains États membres ou uniquement dans un des trois sous-groupes de produits (considérant 1197 de la décision attaquée).

21      Cette précision apportée, la Commission a fixé à 15 % le coefficient lié à la gravité de l’infraction constatée (ci-après le « coefficient ‘gravité de l’infraction’ »), au sens des paragraphes 20 à 23 des lignes directrices de 2006. À ce titre, elle a tenu compte de quatre critères d’appréciation de ladite infraction, à savoir, la nature, les parts de marché combinées, la portée géographique et la mise en œuvre (considérants 1210 à 1220 de la décision attaquée).

22      En outre, la Commission a fixé le coefficient à appliquer, au titre de la durée de l’infraction constatée, au montant de base de l’amende déterminé pour la requérante, sur le fondement des dispositions du paragraphe 24 des lignes directrices de 2006, à 1,83 pour les articles de robinetterie et pour la France, la requérante y ayant participé à l’infraction constatée du 10 décembre 2002 au 9 novembre 2004, et à 0,66 pour les articles en céramique et pour la France, la requérante y ayant participé à l’infraction constatée du 25 février au 9 novembre 2004 (considérant 1223 de la décision attaquée).

23      Enfin, la Commission a, sur le fondement des dispositions du paragraphe 25 des lignes directrices de 2006, afin de dissuader les entreprises en cause de participer à des accords horizontaux de fixation de prix semblables aux accords faisant l’objet de la décision attaquée et au regard des quatre critères d’appréciation visés au point 21 ci-dessus, augmenté le montant de base de l’amende en appliquant un montant additionnel (ci-après le « coefficient ‘montant additionnel’ ») de 15 % (considérants 1224 et 1225 de la décision attaquée).

24      Il en est résulté, s’agissant du groupe Roca, un montant de base de l’amende s’élevant à 3 000 000 euros pour les comportements collusoires relatifs aux articles de robinetterie sur le marché français et un montant de base de l’amende s’élevant à 35 700 000 euros pour les comportements collusoires relatifs aux articles en céramique, dont 3 700 000 euros pour le marché français et 32 000 000 euros pour le marché autrichien (considérant 1226 de la décision attaquée).

25      Dans un deuxième temps, la Commission a examiné l’existence de circonstances aggravantes ou atténuantes susceptibles de justifier un ajustement du montant de base de l’amende. Elle n’a retenu aucune circonstance aggravante ou atténuante à l’égard de la requérante.

26      Dans un troisième temps, la Commission a fait application du plafond de 10 % du chiffre d’affaires (ci-après le « plafond de 10 % »), en vertu de l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003. Le montant de l’amende fixé pour le groupe Roca après application du plafond de 10 % était de 38 700 000 euros (considérants 1261 et 1264 de la décision attaquée).

27      Dans un quatrième temps, la Commission a estimé que le groupe Roca, dont la requérante, n’était pas en droit de bénéficier d’une réduction du montant des amendes au titre de la communication de 2002 sur la coopération. Selon elle, d’une part, les preuves avancées par lui ne pouvaient être réputées représenter une valeur ajoutée significative au sens du paragraphe 21 de ladite communication. D’autre part, le groupe Roca n’aurait pas fait preuve d’un véritable esprit de coopération pendant la procédure administrative (considérant 1300 de la décision attaquée).

28      Eu égard à ce qui précède, la Commission a constaté, à l’article 1er, paragraphe 3, de la décision attaquée, que la requérante avait enfreint l’article 101 TFUE et l’article 53 de l’accord EEE en participant, du 10 décembre 2002 au 9 novembre 2004, à un accord continu ou des pratiques concertées dans le secteur des installations sanitaires pour salles de bains en France et en Autriche.

29      Aux termes de l’article 2, paragraphe 4, sous b), de la décision attaquée, pour cette infraction, la Commission a infligé solidairement à la requérante et à Roca Sanitario une amende de 6 700 000 euros.

 Procédure et conclusions des parties

30      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 9 septembre 2010, la requérante a introduit le présent recours.

31      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (quatrième chambre) a décidé d’ouvrir la procédure orale et, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 64 du règlement de procédure du Tribunal, a posé une question écrite à la Commission à laquelle cette dernière a répondu dans le délai imparti.

32      Les parties ont été entendues, lors de l’audience du 6 mars 2013, en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions écrites et orales posées par le Tribunal.

33      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler les articles 1er et 2 de la décision attaquée, dans la mesure où ils la concernent ;

–        réduire le montant de l’amende qui lui a été infligée ;

–        condamner la Commission aux dépens.

34      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

35      À titre liminaire, il convient de rappeler que le contrôle juridictionnel exercé par le juge de l’Union européenne, s’agissant des décisions de sanction adoptées par la Commission afin de sanctionner les infractions au droit de la concurrence, comprend, outre le contrôle de légalité, prévu à l’article 263 TFUE, un contrôle de pleine juridiction, cette dernière étant reconnue audit juge en vertu de l’article 31 du règlement n° 1/2003, conformément à l’article 261 TFUE (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 8 décembre 2011, Chalkor/Commission, C‑386/10 P, non encore publié au Recueil, points 53, 63 et 64). Cette compétence habilite le juge, au-delà du simple contrôle de légalité de la sanction, à substituer son appréciation à celle de la Commission et, en conséquence, le cas échéant, à supprimer, à réduire ou à majorer le montant de l’amende ou l’astreinte infligée (voir arrêt de la Cour du 8 décembre 2011, KME e.a./Commission, C‑272/09 P, non encore publié au Recueil, point 103, et la jurisprudence citée ; voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 5 octobre 2011, Romana Tabacchi/Commission, T‑11/06, Rec. p. II‑6681, point 265).

36      À la lumière de la jurisprudence exposée au point 35 ci-dessus, dans un premier temps, il y a lieu d’examiner, dans le cadre du contrôle de la légalité de la décision attaquée, les conclusions de la requérante visant à obtenir l’annulation des articles 1er et 2 de la décision attaquée pour autant que ces articles la concernent et, dans un second temps, ses conclusions visant à ce que le Tribunal exerce sa compétence de pleine juridiction pour réformer, en le réduisant, le montant de l’amende que la Commission lui a infligée.

1.     Sur les conclusions tendant à l’annulation partielle de la décision attaquée

37      Au soutien de ses conclusions en annulation partielle de la décision attaquée, la requérante invoque cinq moyens. Le premier moyen concerne l’imputation de la responsabilité des comportements anticoncurrentiels qui lui sont reprochés à Roca Sanitario. Le deuxième moyen est lié à l’appréciation, par la Commission, de la gravité de l’infraction commise par la requérante. Le troisième moyen est tiré d’une violation du principe de proportionnalité s’agissant du choix de l’année de référence dans le cadre de la fixation du montant de base de l’amende. Le quatrième moyen est tiré d’une violation des principes de proportionnalité et d’égalité de traitement, en ce que le contexte économique de crise actuel n’a pas été pris en considération en tant que circonstance atténuante. Le cinquième moyen concerne la prise en compte de la coopération de la requérante, d’une part, dans le cadre de la communication de 2002 sur la coopération et, d’autre part, au titre de circonstance atténuante.

 Sur le premier moyen, relatif à l’existence d’une entreprise unique

38      Dans le cadre du premier moyen, la requérante entend, en substance, contester le fait que la Commission ait considéré qu’elle formait avec Roca Sanitario et Laufen Austria une entreprise unique, de sorte qu’elle a utilisé le chiffre d’affaires de l’entreprise dans son ensemble aux fins de l’application du plafond de 10 %, en application de l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003.

39      En particulier, la requérante fait valoir que la Commission, en imputant à Roca Sanitario la responsabilité des comportements anticoncurrentiels dont elle s’est rendue coupable, a violé l’article 101 TFUE, l’article 6 de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci-après la « CEDH »), l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, ses droits de la défense et l’obligation de motivation. Elle soutient également que, ce faisant, la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation.

40      À l’appui du premier moyen, la requérante soulève quatre griefs qui ont trait, premièrement, à l’importance excessive accordée aux liens d’actionnariat pour conclure à l’existence d’une unité économique formée par Roca Sanitario et la requérante, deuxièmement, aux éléments de preuve présentés par la requérante afin de renverser la présomption selon laquelle Roca Sanitario exerce une influence déterminante sur elle, troisièmement, aux facteurs additionnels pris en considération par la Commission et, quatrièmement, à la violation de l’obligation de motivation de la décision attaquée s’agissant de l’imputation à Roca Sanitario de la responsabilité des comportements anticoncurrentiels de la requérante.

 Sur le grief relatif à l’importance excessive accordée aux liens d’actionnariat

41      La requérante soutient que la Commission s’est fondée de manière excessive sur ses liens d’actionnariat avec Roca Sanitario et a, de ce fait, présumé à tort que cette dernière exerçait une influence déterminante sur elle. Elle fait valoir, premièrement, qu’il n’est pas démontré que Roca Sanitario a participé à ou a eu connaissance de l’infraction constatée, lui a donné des instructions afin qu’elle y participe ou a coordonné sa participation à ladite infraction avec Laufen Austria. Deuxièmement, la Commission irait à l’encontre tant de sa pratique décisionnelle antérieure – selon laquelle elle s’abstiendrait d’adresser une décision à une société mère à laquelle s’applique la présomption d’exercice d’une influence déterminante, eu égard à sa participation au capital de sa filiale, en l’absence d’indices quant à sa connaissance ou à sa participation à l’infraction – que de l’approche adoptée dans la décision attaquée à l’égard de Duscholux Holding AG et ses filiales (ci-après le « groupe Duscholux »). Troisièmement, l’approche de la Commission quant à la charge de la preuve permettant de remettre en cause la présomption selon laquelle la société mère exerce une influence déterminante sur sa filiale rendrait pratiquement impossible cette remise en cause, en méconnaissance des principes de responsabilité personnelle et de présomption d’innocence consacrés à l’article 6, paragraphe 2, de la CEDH.

42      La Commission conteste le bien-fondé de ces arguments.

43      Il résulte d’une jurisprudence constante que le droit de la concurrence de l’Union vise les activités des entreprises et que la notion d’entreprise, qui désigne une unité économique pouvant être constituée de plusieurs personnes physiques ou morales, comprend toute entité exerçant une activité économique, indépendamment du statut juridique de cette entité et de son mode de financement (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 10 septembre 2009, Akzo Nobel e.a./Commission, C‑97/08 P, Rec. p. I‑8237, points 54 et 55, et la jurisprudence citée).

44      Lorsqu’une société mère et sa filiale constituent une même unité économique et, partant, une seule entreprise, la Commission peut imputer le comportement de la filiale à la société mère, sans qu’il soit requis d’établir l’implication personnelle de cette dernière dans l’infraction. Il en va notamment ainsi lorsque la filiale ne détermine pas de façon autonome son comportement sur le marché, mais applique pour l’essentiel les instructions qui lui sont données par la société mère, eu égard en particulier aux liens économiques, organisationnels et juridiques qui unissent ces deux entités juridiques (voir, en ce sens, arrêt Akzo Nobel e.a./Commission, point 43 supra, points 54, 55 et 58, et la jurisprudence citée).

45      Dans le cas particulier où une société mère détient 100 % du capital de sa filiale, d’une part, cette société mère peut exercer une influence déterminante sur le comportement de cette filiale et, d’autre part, il existe une présomption réfragable (ci-après la « présomption d’exercice d’une influence déterminante ») selon laquelle ladite société mère exerce effectivement une telle influence (voir arrêt de la Cour du 20 janvier 2011, General Química e.a./Commission, C‑90/09 P, Rec. p. I‑1, point 39, et la jurisprudence citée).

46      Partant, pour mettre en œuvre la présomption d’exercice d’une influence déterminante visée au point 45 ci-dessus, il suffit que la Commission prouve que la totalité du capital d’une filiale est détenue par sa société mère. À cet égard, d’une part, il importe de préciser que la Commission n’est pas tenue de produire d’indices supplémentaires relatifs à l’exercice effectif d’une influence de la société mère sur sa filiale (voir, en ce sens, arrêt General Química e.a./Commission, point 45 supra, points 40 et 41, et la jurisprudence citée). D’autre part, il incombe aux parties intéressées de renverser cette présomption en apportant des éléments de preuve susceptibles de démontrer l’autonomie de la filiale par rapport à sa société mère sur le marché (voir, en ce sens, arrêt General Química e.a./Commission, point 45 supra, point 45, et la jurisprudence citée).

47      Afin de déterminer si une filiale fixe de façon autonome son comportement sur le marché, il convient de prendre en considération non seulement le fait que la société mère puisse influencer la politique des prix, les activités de production et de distribution, les objectifs de vente, les marges brutes, les frais de vente, le « cash flow », les stocks et le marketing, mais également l’ensemble des éléments pertinents relatifs aux liens économiques, organisationnels et juridiques qui unissent cette filiale à la société mère, lesquels peuvent varier selon les cas et ne sauraient donc faire l’objet d’une énumération exhaustive (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 12 décembre 2007, Akzo Nobel e.a./Commission, T‑112/05, Rec. p. II‑5049, points 64 et 65).

48      En outre, selon la jurisprudence, si la Commission dispose d’une marge d’appréciation pour décider s’il y a lieu d’imputer la responsabilité d’une infraction à une société mère, il n’en demeure pas moins que sa décision de procéder à une telle imputation n’échappe pas, comme en l’espèce, au contrôle des juridictions de l’Union, à qui il appartient de vérifier que les conditions d’une telle imputation sont réunies (arrêt du Tribunal du 17 mai 2011, Elf Aquitaine/Commission, T‑299/08, Rec. p. II‑2149, point 198).

49      En l’espèce, il ressort des considérants 1069 et 1070 de la décision attaquée que la Commission a appliqué la présomption d’exercice d’une influence déterminante, dès lors que Roca Sanitario avait détenu 100 % de la requérante pendant toute la durée de l’infraction, ce que cette dernière ne conteste pas.

50      Partant, c’est conformément à la jurisprudence citée aux points 43 à 46 ci-dessus que la Commission a pu présumer, dans la décision attaquée, que Roca Sanitario exerçait une influence déterminante sur la requérante sur le seul fondement des liens d’actionnariat existant entre ces deux sociétés.

51      La conclusion tirée au point 50 ci-dessus n’est pas remise en cause par les arguments de la requérante.

52      En premier lieu, les arguments tirés de ce que Roca Sanitario ignorait la participation de la requérante à l’infraction constatée, qu’elle n’y a pas participé elle-même et qu’elle n’a ni ordonné à la requérante de commettre une telle infraction ni coordonné les infractions commises par cette dernière et par Laufen Austria doivent être rejetés comme étant inopérants. En effet, selon la jurisprudence, d’une part, lorsque la Commission met en œuvre la présomption d’exercice d’une influence déterminante, elle n’est pas tenue d’établir l’implication personnelle de la société mère dans l’infraction commise par sa filiale (arrêt du 10 septembre 2009, Akzo Nobel e.a./Commission, point 43 supra, point 59). D’autre part, ce n’est pas une relation d’instigation relative à l’infraction entre la société mère et sa filiale ni, à plus forte raison, une implication de la première dans ladite infraction, mais le fait qu’elles constituent une seule entreprise qui habilite la Commission à adresser la décision imposant des amendes à la société mère (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 27 septembre 2012, Nynäs Petroleum et Nynas Belgium/Commission, T‑347/06, non encore publié au Recueil, point 33). Partant, contrairement à ce que soutient la requérante, une société mère peut être tenue solidairement responsable d’une infraction dans laquelle sa filiale est impliquée sans avoir elle-même participé à ladite infraction, sans l’avoir encouragée et sans en avoir eu connaissance, dans la mesure où l’imputation de cette responsabilité à la société mère est uniquement liée au fait qu’elle constitue une entité unique avec sa filiale.

53      En deuxième lieu, la requérante fait valoir que l’imputation à Roca Sanitario de la responsabilité des comportements anticoncurrentiels dont elle s’est rendue coupable est contraire à la pratique décisionnelle antérieure de la Commission. Elle estime que, selon ladite pratique, la Commission s’abstient d’appliquer la présomption d’exercice d’une influence déterminante à une société mère, eu égard à sa participation au capital de sa filiale, en l’absence d’indices quant à sa connaissance ou à sa participation à l’infraction. À cet égard, elle cite la décision C (2004) 4030, du 20 octobre 2004, relative à une procédure d’application de l’article 81, paragraphe 1, [CE] (affaire COMP/C.38.238/B.2 – Tabac brut – Espagne) (JO 2007, L 102, p. 14), la décision 2004/138/CE, du 11 juin 2002, relative à une procédure d’application de l’article 81 [CE] (affaire COMP/36.571/D-1 – Banques autrichiennes – « Club Lombard ») (JO 2004, L 56, p. 1), ainsi que la décision 2004/337/CE, du 20 décembre 2001, relative à une procédure d’application de l’article 81 [CE] et de l’article 53 [EEE] (affaire COMP/E-1/36.212 – Papier autocopiant) (JO 2004, L 115, p. 1). En outre, selon elle, l’imputation à Roca Sanitario de la responsabilité des comportements anticoncurrentiels dont elle s’est rendue coupable est contraire à l’approche adoptée, dans la décision attaquée elle-même, à l’égard du groupe Duscholux.

54      Premièrement, pour autant que les arguments visés au point 53 ci-dessus doivent être compris en ce sens que la requérante fait valoir que la Commission a violé sa pratique décisionnelle antérieure et a commis une erreur compte tenu du traitement réservé au groupe Duscholux, ces arguments doivent être rejetés comme étant non fondés.

55      À cet égard, d’une part, s’agissant de la pratique décisionnelle antérieure, il convient, tout d’abord, de rappeler que des décisions concernant d’autres affaires ne peuvent avoir qu’un caractère indicatif, dès lors que les données circonstancielles des affaires ne sont pas identiques (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 21 septembre 2006, JCB Service/Commission, C‑167/04 P, Rec. p. I‑8935, points 201 et 205, et du 7 juin 2007, Britannia Alloys & Chemicals/Commission, C‑76/06 P, Rec. p. I‑4405, point 60).

56      Ensuite, quelle que soit la pratique décisionnelle antérieure de la Commission, ladite pratique n’invalide pas le constat, figurant au point 50 ci-dessus, que la Commission était en droit, conformément à la jurisprudence exposée aux points 43 à 46 ci-dessus, d’imputer la responsabilité de l’infraction commise par la requérante à Roca Sanitario. A fortiori, une éventuelle erreur de la Commission au regard de cette pratique n’est pas non plus de nature à remettre en cause ledit constat.

57      En outre, la pratique décisionnelle antérieure ne conduit pas à considérer que la Commission ne pouvait pas imputer la responsabilité des comportements anticoncurrentiels d’une filiale à sa société mère. En particulier, les trois décisions citées par la requérante ne confirment nullement que la Commission s’abstient d’imputer la responsabilité des comportements anticoncurrentiels d’une filiale à sa société mère en l’absence d’indices quant à sa connaissance ou à sa participation à l’infraction. En effet, premièrement, il ressort des considérants 18, 375 et 376 de la décision Tabac brut – Espagne qu’elle n’a pas été adressée à deux sociétés mères, Universal Corp. et Universal Leaf Tobacco Co. Inc., parce que, bien qu’elles aient détenu leurs filiales à une très large majorité (vraisemblablement entre 90 et 100 %), les éléments du dossier réfutaient le constat d’exercice d’une influence déterminante. Deuxièmement, aux considérants 479 et 482 de la décision Club Lombard, la Commission a constaté que les éléments du dossier ne permettaient pas de conclure que les filiales concernées ne se comportaient pas de façon autonome sur le marché et les a donc considérées comme seules responsables des infractions qu’elles avaient commises. Troisièmement, il ressort des considérants 50 et 364 de la décision Papier autocopiant que la présomption d’exercice d’une influence déterminante ne trouvait pas à s’appliquer dans la mesure où la société mère ne détenait que 72 % du capital de sa filiale.

58      D’autre part, s’agissant du traitement réservé au groupe Duscholux, il suffit de constater que le fait que la Commission ait retenu, dans la décision attaquée, une approche à l’égard de la requérante et de sa société mère différente de celle retenue à l’égard du groupe Duscholux n’est pas de nature à remettre en cause le fait que la Commission n’a commis aucune erreur en se fondant, conformément à la jurisprudence citée aux points 43 à 46 ci-dessus, sur la présomption d’exercice d’une influence déterminante.

59      Deuxièmement, pour autant que les arguments visés au point 53 ci-dessus doivent être compris en ce sens que la requérante reproche à la Commission d’avoir méconnu le principe d’égalité de traitement, ils doivent également être rejetés comme étant non fondés.

60      En effet, d’une part, s’agissant de la pratique décisionnelle antérieure, il suffit de rappeler que, ainsi que cela a été relevé au point 57 ci-dessus, les trois décisions citées par la requérante ont été adoptées dans des circonstances différentes de celles dans lesquelles se trouvaient la requérante et Roca Sanitario. Partant, c’est sans violer le principe d’égalité de traitement que la Commission a, dans les circonstances de l’espèce, appliqué la présomption d’exercice d’une influence déterminante à Roca Sanitario, eu égard à ses liens d’actionnariat avec la requérante.

61      D’autre part, s’agissant du traitement du groupe Duscholux dans la décision attaquée, il suffit d’observer que la Commission a expliqué dans ses écritures que le fait que Duscholux Holding, qui était la société mère du groupe, n’ait pas été destinataire de cette décision était le résultat d’une erreur commise au cours de l’instruction du dossier, qui a entraîné l’envoi de la communication des griefs à Duscholux AG et non à Duscholux Holding. Or, selon la jurisprudence, le respect du principe d’égalité de traitement ou de non-discrimination doit se concilier avec le respect du principe de légalité, ce qui implique que nul ne peut invoquer à son profit une illégalité commise en faveur d’autrui (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 4 juillet 1985, Williams/Cour des comptes, 134/84, Rec. p. 2225, point 14, et la jurisprudence citée ; du Tribunal du 14 mai 1998, Cascades/Commission, T‑308/94, Rec. p. II‑925, point 259, et du 20 mars 2002, LR AF 1998/Commission, T‑23/99, Rec. p. II‑1705, point 367). Partant, la requérante ne saurait valablement invoquer à son profit l’erreur commise par la Commission à l’égard de Duscholux Holding.

62      En troisième lieu, la requérante soutient que la Commission a, en pratique, rendu la présomption irréfragable, en méconnaissance des principes de responsabilité personnelle et de présomption d’innocence consacrés à l’article 6, paragraphe 2, de la CEDH. À cet égard, elle soutient que la Commission a constaté, au considérant 1072 de la décision attaquée, que la circonstance qu’elle doive communiquer ses états financiers à Roca Sanitario constituait une preuve suffisante pour considérer que cette dernière exerçait une influence déterminante sur elle, alors même qu’il s’agissait d’une obligation légale s’imposant à tout actionnaire et à toute filiale. En réponse aux questions du Tribunal lors de l’audience, la requérante a précisé que, s’il était vrai que ledit considérant 1072 de la décision attaquée ne mentionnait pas explicitement la communication des états financiers, il n’en demeurait pas moins qu’il y faisait implicitement référence en ce qu’il constatait que la requérante « répondait directement » à Roca Sanitario.

63      D’une part, cet argument de la requérante doit être rejeté comme étant inopérant. En effet, il n’est pas de nature à remettre en cause le constat, opéré au point 50 ci-dessus, selon lequel la Commission pouvait à bon droit se fonder sur la seule constatation de la détention par Roca Sanitario de la totalité du capital social de la requérante pour présumer qu’elle exerçait une influence déterminante sur cette dernière.

64      D’autre part, pour autant que, par cet argument, la requérante reproche à la Commission d’avoir, compte tenu de son appréciation des éléments de preuve qu’elle avait produits afin de renverser la présomption d’exercice d’une influence déterminante, rendu ladite présomption irréfragable, il y a lieu de constater que cet argument se rattache au grief relatif à l’appréciation des éléments de preuve produits par la requérante afin de renverser la présomption d’exercice d’une influence déterminante. Il sera, dès lors, examiné, dans ce cadre, au point 81 ci-après.

65      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le présent grief comme étant pour partie non fondé et pour partie inopérant.

 Sur l’évaluation des éléments de preuve produits par la requérante afin de renverser la présomption d’exercice d’une influence déterminante

66      La requérante fait valoir, d’une part, que la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation des éléments de preuve qu’elle avait produits afin de renverser la présomption d’exercice d’une influence déterminante. D’autre part, elle se prévaut d’une violation de ses droits de la défense.

67      La Commission conteste le bien-fondé des arguments de la requérante.

68      À cet égard, il convient de rappeler que la Commission a fait état, aux considérants 1065 à 1068 de la décision attaquée, des éléments avancés par le groupe Roca afin de renverser la présomption. Elle les a rejetés au considérant 1071 de ladite décision.

69      Dans un premier temps, s’agissant des arguments relatifs au caractère erroné de l’évaluation des éléments de preuve produits pour renverser la présomption d’exercice d’une influence déterminante, la requérante fait valoir, en premier lieu, que Roca Sanitario n’a ni eu connaissance de sa participation à l’infraction, ni encouragé, ni coordonné la participation de ses filiales à l’infraction constatée. Ces arguments doivent être rejetés comme étant inopérants pour les motifs exposés au point 52 ci-dessus. En effet, l’imputation d’une responsabilité à la société mère est uniquement liée au fait que cette dernière constitue une entité unique avec sa filiale. Partant, la seule question pertinente pour déterminer la responsabilité d’une société mère est celle de savoir si sa filiale se comportait de façon autonome sur le marché, sans qu’il soit requis d’établir que la société mère a elle-même participé à l’infraction, en avait connaissance ou a encouragé la participation de sa filiale.

70      En deuxième lieu, la requérante soutient que le groupe Roca n’a pas appartenu au noyau dur de l’entente composé d’entreprises encourageant la participation de leurs filiales aux pratiques anticoncurrentielles, que, parmi les filiales dudit groupe, seules Laufen Austria et elle ont participé à l’entente et qu’elles n’y ont pas participé aux mêmes moments. Pour les mêmes raisons que celles évoquées au point 69 ci-dessus, ces arguments doivent être rejetés comme étant inopérants. En effet, par ces arguments, la requérante cherche à démontrer qu’elle et Laufen Austria n’ont reçu aucune instruction de la part de Roca Sanitario quant à leur participation aux activités anticoncurrentielles, ce qui démontrerait leur autonomie.

71      En troisième lieu, la requérante affirme qu’elle déterminait son comportement sur le marché de façon autonome. Premièrement, elle se prévaut de son autonomie commerciale et financière. À ce titre, d’une part, elle soutient, en substance, que Roca Sanitario ne lui donne aucune instruction et n’intervient pas dans la négociation des achats, y compris auprès d’autres filiales de Roca Sanitario, la politique des ventes à l’international, la fixation des prix et des conditions commerciales, la gestion de la clientèle internationale et la conclusion de contrats financiers avec des tiers. D’autre part, les rapports financiers mensuels et les éléments relatifs aux budgets annuels qu’elle communique à Roca Sanitario attesteraient de son autonomie. En effet, l’information transmise dans lesdits rapports serait d’ordre général. En outre, il ressortirait des éléments relatifs aux budgets annuels que c’est elle qui déciderait de la modification des prix prévus dans lesdits budgets et qu’elle serait libre de dévier de ces budgets sans l’autorisation préalable de Roca Sanitario.

72      Or, d’une part, contrairement à ce qu’affirme la requérante, il ressort des éléments du dossier que Roca Sanitario était en mesure de contrôler ses activités grâce aux rapports mensuels et annuels qui étaient transmis par son directeur général au siège social du groupe Roca en Espagne et qui concernaient ses résultats financiers. En effet, ces rapports contenaient des informations concernant le chiffre d’affaires de la requérante, son « cash flow », son bénéfice brut, son résultat avant impôts, intérêts, amortissements et provisions (EBITDA), le nombre total d’unités vendues ainsi que l’évolution des prix mois par mois. En outre, la requérante reconnaît dans ses écritures que ces rapports pouvaient contenir des informations concernant les questions stratégiques si ces dernières avaient des répercussions du point de vue comptable.

73      Il est, à cet égard, sans pertinence que, comme l’affirme la requérante, les informations contenues dans les rapports aient été d’ordre général, les informations sur des questions stratégiques aient été fournies a posteriori au sujet d’activités de l’entreprise n’ayant pas été soumises à autorisation préalable de la part de Roca Sanitario, les rapports n’aient contenu aucune référence à des produits particuliers ou à des familles de produits et n’aient contenu de renseignements ni sur le marché français, ni sur les prix pratiqués par la concurrence, ni sur les sujets abordés par elle au sein des associations professionnelles françaises dont elle faisait partie. En effet, ces éléments ne remettent pas en cause le constat selon lequel les rapports permettaient à Roca Sanitario de suivre et de contrôler les activités de la requérante.

74      D’autre part, le fait, ainsi que la requérante l’a reconnu dans ses écritures, qu’elle fournissait des informations concernant la préparation et l’élaboration de son budget à Roca Sanitario est un indice important de l’exercice effectif d’une influence déterminante. Ce constat n’est pas remis en cause par le fait que la requérante fixait ses objectifs financiers indépendamment et était libre de s’en écarter sans autorisation préalable, que, dans le cadre de la présentation des budgets, la discussion était centrée sur les prix auxquels elle achetait les produits de Roca Sanitario et que cela ne signifiait pas que cette dernière approuvait ex ante ou s’opposait ex post aux prix de vente qu’elle-même avait fixés unilatéralement.

75      Partant, les arguments tendant à démontrer l’autonomie commerciale et financière de la requérante doivent être rejetés comme étant non fondés.

76      Deuxièmement, la requérante se prévaut de son autonomie quant à la gestion des ressources humaines et de son indépendance organique. Elle soutient, en particulier, que, d’une part, son organe d’administration, à savoir le poste de gérant, a toujours été confié à des personnes, d’abord M. [S. M.] puis M. [B. F.], n’ayant assumé aucune fonction au sein du conseil d’administration ou des organes de direction de Roca Sanitario. D’autre part, son directeur général, M. [A.], n’aurait jamais occupé un quelconque poste de direction au sein de Roca Sanitario ou d’une autre de ses filiales. À cet égard, il suffit de constater que, d’une part, même à supposer que la requérante jouisse, ainsi qu’elle le soutient, d’une certaine autonomie en ce domaine, celle-ci est, compte tenu des possibilités de contrôle de Roca Sanitario mentionnées aux points 72 et 74 ci-dessus, en tout état de cause insuffisante pour démontrer qu’elle se comporte de manière autonome sur le marché. D’autre part, bien que le chevauchement de dirigeants entre une société mère et sa filiale constitue un indice de l’exercice effectif d’une influence déterminante, il ne saurait être déduit de l’absence d’un tel chevauchement que ladite filiale agit de façon autonome sur le marché. Partant, ces arguments ne sont pas de nature à renverser la présomption d’exercice d’une influence déterminante et doivent, dès lors, être rejetés comme étant non fondés.

77      Troisièmement, la requérante soutient qu’elle dispose d’une autonomie quant à la gestion de ses affaires juridiques. À cet égard, d’une part, pour autant que cet argument se réfère à la conclusion de contrats par la requérante, il doit être rejeté pour les motifs exposés aux points 72 et 74 ci-dessus. D’autre part, pour autant que cet argument est fondé sur les considérations selon lesquelles les représentants légaux de la requérante et de Roca Sanitario aux fins de la procédure d’infraction et devant le Tribunal ne sont pas les mêmes et la requérante décide librement du recours à des services juridiques extérieurs, il suffit de constater que cet élément n’est pas de nature à établir que Roca Sanitario ne pouvait pas exercer d’influence dans la gestion des affaires juridiques de la requérante. Partant, cet argument doit être rejeté comme étant non fondé.

78      En quatrième lieu, la requérante reproche à la Commission une confusion entre la présomption d’exercice d’une influence déterminante et l’exercice effectif d’une telle influence. Selon la requérante, d’une part, il appartenait à la Commission de démontrer que Roca Sanitario pouvait exercer une influence déterminante sur elle et qu’elle l’a effectivement exercée. D’autre part, la Commission n’aurait pas apporté la preuve de l’exercice effectif d’une telle influence.

79      Or, cet argument est non fondé. En effet, il ressort de la jurisprudence citée aux points 43 à 46 ci-dessus que, lorsque la Commission impute la responsabilité du comportement anticoncurrentiel d’une filiale à sa société mère sur la base de la présomption d’exercice d’une influence déterminante, elle n’est nullement tenue de prouver l’exercice effectif d’une telle influence. En revanche, il appartient à la partie intéressée de renverser ladite présomption.

80      En cinquième lieu, la requérante fait valoir que Roca Sanitario ne s’est jamais érigée en interlocuteur unique vis-à-vis de la Commission. À cet égard, il y a lieu d’observer que le fait pour une société mère de ne pas se présenter comme le seul interlocuteur, tant au cours de la procédure administrative qu’au stade contentieux, ne permet pas de conclure que la filiale concernée est autonome par rapport à sa société mère (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 7 juin 2011, Total et Elf Aquitaine/Commission, T‑206/06, non publié au Recueil, point 98). Partant, il convient de rejeter cet argument de la requérante comme étant non fondé.

81      En sixième lieu, la requérante soutient, dans le cadre du grief relatif à l’importance excessive accordée aux liens d’actionnariat, que la Commission a rendu la présomption d’exercice d’une influence déterminante irréfragable, en méconnaissance des principes de responsabilité personnelle et de présomption d’innocence consacrés à l’article 6, paragraphe 2, de la CEDH (voir points 62 et 64 ci-dessus). À cet égard, il suffit de constater que la circonstance qu’une entité ne produise pas, dans un cas donné, d’éléments de preuve de nature à renverser la présomption d’exercice effectif d’une influence déterminante ne signifie pas que ladite présomption ne peut, en aucun cas, être renversée (arrêt de la Cour du 29 septembre 2011, Elf Aquitaine/Commission, C‑521/09 P, non encore publié au Recueil, point 66). Partant, cet argument de la requérante doit être rejeté comme étant non fondé.

82      Dans ces conditions, il y a lieu de conclure que la Commission n’a commis aucune erreur en estimant, au considérant 1071 de la décision attaquée, que les arguments avancés par la requérante n’étaient pas susceptibles de renverser la présomption d’exercice d’une influence déterminante.

83      Dans un second temps, s’agissant de la prétendue violation de ses droits de la défense, la requérante fait valoir que la référence dans le mémoire en défense au document relatif à la communication des budgets annuels à Roca Sanitario ainsi que les arguments qui en sont tirés sont tardifs et, partant, irrecevables en ce qu’ils constituent une violation de ses droits de la défense. En effet, ledit document n’aurait été mentionné ni dans la communication des griefs ni dans la décision attaquée.

84      Cet argument doit être rejeté comme étant non fondé. En effet, d’une part, ainsi que cela a été constaté au point 82 ci-dessus, c’est à bon droit que la Commission a considéré que la présomption d’exercice d’une influence déterminante n’avait pas été renversée par les arguments présentés par le groupe Roca. À cet égard, il y a lieu de préciser que la Commission pouvait valablement tirer cette conclusion sans se fonder sur le document relatif à la communication des budgets annuels, lequel vient uniquement corroborer le bien-fondé de cette conclusion. D’autre part, force est de constater que la présentation du document relatif à la communication des budgets annuels à Roca Sanitario dans le mémoire en défense ne saurait, en elle-même, constituer une violation des droits de la défense de la requérante. En effet, c’est en réponse à un argument, soulevé par la requérante dans ses écritures, relatif aux rapports mensuels et annuels concernant ses résultats financiers que la Commission a, en mentionnant lesdits budgets, opposé à la requérante cet élément de défense qu’elle estimait pertinent et qu’il lui était loisible d’invoquer devant le Tribunal.

85      Au vu de l’ensemble des éléments qui précèdent, il convient de rejeter le présent grief comme étant pour partie inopérant et pour partie non fondé.

 Sur les facteurs additionnels pris en compte par la Commission afin de renforcer la présomption d’exercice d’une influence déterminante

86      La requérante soulève deux séries d’arguments qui ont trait, d’une part, à une erreur manifeste d’appréciation commise par la Commission dans l’analyse des facteurs additionnels pris en compte afin de renforcer la présomption d’exercice d’une influence déterminante et, d’autre part, à une violation de ses droits de la défense.

–       Sur l’erreur manifeste d’appréciation des facteurs additionnels

87      La requérante soutient que la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation des facteurs additionnels que cette dernière a invoqués aux considérants 1071 et 1072 de la décision attaquée afin de renforcer la présomption d’exercice d’une influence déterminante. En effet, la requérante estime, en substance, que, d’une part, plusieurs affirmations figurant au considérant 1072 de ladite décision sont erronées. D’autre part, au considérant 1071 de ladite décision, la Commission aurait sorti de leur contexte les observations formulées dans le cadre de l’audition du 13 novembre 2007, visée au point 12 ci-dessus, concernant l’application de la communication de 2002 sur la coopération et en aurait déduit, à tort, que la requérante constituait une entreprise unique avec Roca Sanitario et Laufen Austria.

88      La Commission conteste le bien-fondé des arguments de la requérante.

89      Selon la jurisprudence citée au point 46 ci-dessus, la Commission n’est pas tenue de corroborer par des facteurs additionnels la présomption d’exercice d’une influence déterminante qu’elle est en droit de poser lorsqu’une société mère détient la totalité ou la quasi-totalité du capital social de sa filiale.

90      En l’espèce, il a été constaté au point 50 ci-dessus que c’est à bon droit que la Commission a présumé que Roca Sanitario exerçait une influence déterminante sur la requérante. En outre, il ressort du point 82 ci-dessus que c’est également à bon droit que la Commission a considéré que la présomption d’exercice d’une influence déterminante n’avait pas été renversée par les arguments présentés par le groupe Roca.

91      Dès lors, il y a lieu de considérer que c’est à titre surabondant que la Commission a, d’une part, relevé, au considérant 1071 de la décision attaquée, que Roca Sanitario a reconnu, aux fins de la demande de la requérante tendant à bénéficier d’une réduction d’amende au titre de la communication de 2002 sur la coopération (ci-après la « demande tendant à bénéficier d’une réduction d’amende »), constituer une entreprise unique avec la requérante et Laufen Austria et, d’autre part, invoqué, au considérant 1072 de la décision attaquée, des facteurs additionnels renforçant la présomption d’exercice d’une influence déterminante.

92      Dans la mesure où les arguments soulevés par la requérante au soutien du présent grief sont dirigés contre des éléments avancés par la Commission à titre surabondant, il convient de considérer que, même s’il devait être considéré que la Commission a commis une erreur quant à l’appréciation de ces éléments, une telle erreur ne serait pas, en toute hypothèse, de nature à remettre en cause le fait qu’elle pouvait à bon droit se fonder sur la seule constatation de la détention par Roca Sanitario de la totalité du capital social de la requérante pour présumer qu’elle exerçait une influence déterminante sur cette dernière.

93      Partant, le présent grief doit être rejeté comme étant inopérant, sans que les arguments que la requérante a soulevés à son appui, tels qu’exposés au point 87 ci-dessus, puissent modifier ce constat.

–       Sur la violation des droits de la défense

94      La requérante fait valoir que ses droits de la défense ont été violés. En effet, d’une part, les facteurs additionnels, mentionnés aux considérants 1071 et 1072 de la décision attaquée, n’auraient été évoqués ni dans la communication des griefs ni dans la lettre d’exposé des faits qui lui a été adressée. Lorsqu’ils ont été mentionnés dans la communication des griefs, les interprétations subjectives et les conclusions qui s’en dégagent dans la décision attaquée n’auraient pas pu raisonnablement en être tirées. D’autre part, la Commission aurait invoqué pour la première fois dans le mémoire en défense des pièces et arguments qui n’avaient été mentionnés ni dans la communication des griefs ni dans la décision attaquée.

95      La Commission conteste le bien-fondé des arguments de la requérante.

96      Premièrement, il convient de relever que l’argument de la requérante relatif aux facteurs additionnels mentionnés aux considérants 1071 et 1072 de la décision attaquée est inopérant. En effet, d’une part, la Commission a imputé à Roca Sanitario la responsabilité des comportements anticoncurrentiels de la requérante sur la base de la présomption d’exercice d’une influence déterminante sans que le groupe Roca soit parvenu à renverser ladite présomption. Partant, même à supposer que la Commission ait méconnu les droits de la défense de la requérante en ce qui concerne lesdits facteurs additionnels, une telle violation ne serait, en tout hypothèse, pas susceptible d’entraîner l’annulation de la décision attaquée dès lors qu’elle n’aurait aucune incidence sur le fondement même de l’imputation. D’autre part, force est de constater que la requérante ne se prévaut d’aucune violation des droits de la défense quant à l’application, dans la décision attaquée, de la présomption d’exercice d’une influence déterminante au groupe Roca.

97      Deuxièmement, pour autant que la requérante fasse valoir une violation de ses droits de la défense en ce que la Commission a invoqué pour la première fois dans le mémoire en défense des pièces et arguments qui n’avaient été mentionnés ni dans la communication des griefs ni dans la décision attaquée, d’une part, contrairement à ce que soutient la requérante, ces éléments ne sont pas destinés à suppléer à d’éventuelles carences de la décision attaquée. En effet, force est de constater que, ainsi que cela a été relevé aux point 50 et 82 ci-dessus, c’est à bon droit que la Commission a fondé cette imputation sur la présomption d’exercice d’une influence déterminante et qu’elle a considéré que ladite présomption n’avait pas été renversée par le groupe Roca. En outre, pour autant que, par cet argument, la requérante reproche à la Commission d’avoir insuffisamment motivé, à son égard, la décision attaquée, il y a lieu de considérer que cet argument se rattache au grief tiré de la violation de l’obligation de motivation et sera, dès lors, examiné avec ce dernier au point 99 et suivants ci-après. D’autre part, ainsi qu’il a été relevé au point 84 ci-dessus, la présentation de pièces et d’arguments devant le Tribunal en tant que moyens de défense ne saurait, par elle-même, violer les droits de la défense de la requérante, dès lors que celle-ci a pu prendre position sur ces éléments tant dans la réplique qu’à l’audience. Partant, l’argument soulevé à cet égard doit être rejeté comme étant non fondé.

98      Au vu de l’ensemble des éléments qui précèdent, il convient de rejeter les arguments tirés de la violation des droits de la défense de la requérante, ainsi que le grief relatif aux facteurs additionnels dans son intégralité, comme étant pour partie inopérants et pour partie non fondés.

 Sur la violation de l’obligation de motivation

99      La requérante soutient que la Commission a violé l’article 296 TFUE. En effet, au considérant 1069 de la décision attaquée, la Commission aurait affirmé que les preuves présentées pour renverser la présomption d’exercice d’une influence déterminante n’étaient pas adéquates, sans avancer les raisons justifiant cette affirmation.

100    La Commission conteste le bien-fondé des arguments de la requérante.

101    Il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, la motivation exigée par l’article 296 TFUE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle (arrêt du 29 septembre 2011, Elf Aquitaine/Commission, point 81 supra, point 147).

102    Ainsi, l’obligation de motiver une décision individuelle a pour but, outre de permettre un contrôle judiciaire, de fournir à l’intéressé une indication suffisante pour savoir si la décision est éventuellement entachée d’un vice permettant d’en contester la validité (voir arrêt du 29 septembre 2011, Elf Aquitaine/Commission, point 81 supra, point 148, et la jurisprudence citée).

103    En outre, il est de jurisprudence constante que l’exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que les destinataires de l’acte ou d’autres personnes concernées directement et individuellement par celui-ci peuvent avoir à recevoir des explications. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir arrêt du 29 septembre 2011, Elf Aquitaine/Commission, point 81 supra, point 150, et la jurisprudence citée).

104    Lorsque, comme en l’espèce, une décision d’application des règles de l’Union en matière de droit de la concurrence concerne une pluralité de destinataires et porte sur l’imputabilité des comportements anticoncurrentiels, elle doit comporter une motivation suffisante à l’égard de chacun de ses destinataires, particulièrement de ceux d’entre eux qui, aux termes de cette décision, doivent supporter la charge de cette infraction. Ainsi, à l’égard d’une société mère tenue pour responsable du comportement infractionnel de sa filiale, une telle décision doit, en principe, contenir un exposé circonstancié des motifs de nature à justifier l’imputabilité de l’infraction à cette société (arrêt du 29 septembre 2011, Elf Aquitaine/Commission, point 81 supra, point 152).

105    S’agissant plus particulièrement d’une décision de la Commission qui s’appuie de manière exclusive, à l’égard de certains destinataires, sur la présomption d’exercice effectif d’une influence déterminante, il y a lieu de constater que la Commission est en tout état de cause, sous peine de rendre cette présomption, dans les faits, irréfragable, tenue d’exposer de manière adéquate à ces destinataires les raisons pour lesquelles les éléments de fait et de droit invoqués n’ont pas suffi à renverser ladite présomption. Le devoir de la Commission de motiver ses décisions sur ce point résulte notamment du caractère réfragable de ladite présomption, dont le renversement requerrait des intéressés de produire une preuve portant sur les liens économiques, organisationnels et juridiques entre les sociétés concernées (arrêt du 29 septembre 2011, Elf Aquitaine/Commission, point 81 supra, point 153).

106    La Commission n’est pourtant pas tenue dans un tel contexte de prendre position sur des éléments qui sont manifestement hors de propos, dépourvus de signification ou clairement secondaires (arrêt du 29 septembre 2011, Elf Aquitaine/Commission, point 81 supra, point 154).

107    En l’espèce, tout d’abord, la Commission a expliqué, au considérant 1063 de la décision attaquée, que Roca Sanitario avait détenu 100 % de la requérante pendant toute la durée de l’infraction. Elle a conclu, sur cette base, au considérant 1069 de ladite décision, que la présomption d’exercice d’une influence déterminante trouvait à s’appliquer en l’espèce.

108    Ensuite, la Commission a exposé, aux considérants 1065 à 1068 de la décision attaquée, l’essentiel des éléments avancés par le groupe Roca afin de renverser la présomption d’exercice d’une influence déterminante tant dans sa réponse à la communication des griefs que dans ses réponses aux demandes de renseignements, en citant précisément les passages pertinents de ces documents. Ainsi, elle a expliqué que Roca Sanitario avait fait valoir qu’elle n’avait pas participé à l’infraction constatée (considérant 1065 de la décision attaquée), qu’elle n’avait pas exercé d’influence sur ses filiales ni pris aucune décision tarifaire pour elles (considérant 1066 de la décision attaquée), que ses filiales ne lui avaient pas communiqué d’informations sur leurs marchés respectifs et qu’elles avaient toujours agi et fixé leurs prix de manière autonome (considérant 1066 de la décision attaquée), qu’il n’y avait eu aucun flux bilatéral d’informations entre elle et ses filiales (considérant 1066 de la décision attaquée), qu’elle n’avait donné aucune instruction à des employés de ses filiales (considérant 1066 de la décision attaquée) et que la Commission ne pouvait se fonder uniquement sur ses liens d’actionnariat avec ses filiales pour présumer l’exercice d’une influence déterminante sur ces dernières (considérant 1067 de la décision attaquée). La Commission a en outre exposé les arguments soulevés par la requérante et par Laufen Austria, tirés de ce que leur comportement commercial était totalement indépendant de Roca Sanitario. En effet, elles n’auraient jamais reçu d’instructions de cette dernière quant à leur participation à l’infraction constatée, dont Roca Sanitario n’aurait, par ailleurs, pas eu connaissance (considérant 1068 de la décision attaquée).

109    Enfin, aux considérants 1070 et 1071 de la décision attaquée, la Commission a répondu aux arguments avancés par le groupe Roca. Premièrement, elle estime que Roca Sanitario est considérée, conformément à la jurisprudence, comme individuellement responsable de l’infraction constatée, sur la base de ses liens juridiques et économiques avec la requérante et Laufen Austria (considérant 1070 de la décision attaquée). Deuxièmement, la Commission indique que l’argument relatif à l’absence de participation de Roca Sanitario à l’infraction constatée ne pouvait prospérer eu égard à la jurisprudence pertinente (considérant 1071 de la décision attaquée). Troisièmement, l’exercice d’une influence déterminante sur la politique commerciale d’une filiale ne supposerait pas la gestion quotidienne de ses activités ni la détermination, par la société mère, des prix devant être appliqués par ses filiales (considérant 1071 de la décision attaquée). En outre, la Commission a ajouté que Roca Sanitario aurait reconnu, lors de l’audition visée au point 12 ci-dessus, qu’elle constituait une seule entreprise, aux fins de la demande tendant à bénéficier d’une réduction d’amende au titre de la communication de 2002 sur la coopération, avec la requérante et Laufen Austria (considérant 1071 de la décision attaquée).

110    Si cette réponse est succincte, elle est suffisante pour permettre de comprendre les raisons pour lesquelles la Commission a considéré que les arguments présentés par le groupe Roca ne permettaient pas de renverser la présomption d’exercice d’une influence déterminante.

111    Par ailleurs, il convient d’ajouter que, aux considérants 1072 et 1073 de la décision attaquée, la Commission a fait état d’éléments supplémentaires produits par le groupe Roca au cours de la procédure administrative. Selon elle, non seulement ces éléments n’étaient pas susceptibles de renverser la présomption de l’exercice d’une influence déterminante, mais au contraire indiquaient une influence de Roca Sanitario sur la requérante et Laufen Austria.

112    En particulier, s’agissant de la requérante, la Commission a cité, au considérant 1072 de la décision attaquée, des éléments démontrant, selon elle, que le directeur commercial de celle-ci répondait directement de Roca Sanitario, que tous les aspects relatifs aux produits commercialisés par celle-ci étaient déterminés par Roca Sanitario et que lesdits produits n’étaient pas fabriqués par celle-ci. S’agissant de Laufen Austria, la Commission a relevé, au considérant 1073 de la décision attaquée, que certains membres du conseil d’administration de Roca Sanitario étaient également membres du conseil de surveillance de celle-ci, que Roca Sanitario décidait de la conception et de la fabrication de nouveaux produits et de la suppression de gammes de produits ainsi que du prix de transfert auquel cette dernière vendait ses produits à ses filiales et que Laufen Austria devait être orientée par les objectifs d’amélioration du volume des ventes et de renforcement de la marque Roca sur son marché.

113    Même à supposer que certains de ces éléments puissent être considérés comme étant imprécis, inexacts ou mal interprétés par la Commission, il n’en demeure pas moins qu’ils constituent un exposé adéquat des raisons pour lesquelles la Commission a estimé que les éléments de fait et de droit invoqués par le groupe Roca n’ont pas suffi à renverser la présomption d’exercice d’une influence déterminante, mais contribuent au contraire à démontrer que Roca Sanitario et ses filiales forment une unité économique unique. À cet égard, il convient de rappeler, en outre, que, selon la jurisprudence, l’obligation de motivation constitue une formalité substantielle qui doit être distinguée de la question du bien-fondé des motifs, celui-ci relevant de la légalité au fond de l’acte litigieux (arrêt du 12 décembre 2007, Akzo Nobel e.a./Commission, point 47 supra, point 94).

114    Dès lors, il y a lieu de conclure que la Commission s’est conformée à son obligation de motivation. Partant, il convient de rejeter les arguments soulevés par la requérante à cet égard comme étant non fondés.

115    Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de rejeter le premier moyen comme étant pour partie inopérant et pour partie non fondé.

 Sur le deuxième moyen, lié à l’appréciation de la gravité de l’infraction commise par la requérante

116    Dans le cadre du deuxième moyen, la requérante soutient, d’une part, que la Commission a violé l’article 101 TFUE, les principes de proportionnalité et d’égalité de traitement ainsi que le principe de protection de la confiance légitime en s’écartant de la méthode de calcul du montant des amendes établie dans les lignes directrices de 2006. En substance, elle conteste le fait que la Commission se soit fondée, dans le cadre du calcul du montant de l’amende qu’elle lui a infligée, sur des coefficients « gravité de l’infraction » et « montant additionnel » identiques à ceux utilisés dans le cadre du calcul du montant de l’amende infligée aux entreprises faisant partie du noyau dur de l’entente.

117    À cet égard, premièrement, la requérante soutient qu’elle ne faisait pas partie du groupe central d’entreprises et que la gravité de son comportement était moindre que celle du comportement de ces entreprises. Deuxièmement, la requérante souligne que les coefficients « gravité de l’infraction » et « montant additionnel » ont été déterminés sur le fondement de la gravité de l’infraction constatée. Or, sa participation à ladite infraction aurait été réduite et limitée au territoire de deux États membres et à deux sous-groupes de produits. Troisièmement, la modulation de l’amende devrait être opérée non par la prise en compte de la portée des ventes de l’entreprise (tant géographique que s’agissant de la gamme de produits), mais par le biais d’une gradation des coefficients « gravité de l’infraction » et « montant additionnel ». En effet, la prise en compte de la valeur des ventes servirait uniquement à délimiter la responsabilité personnelle d’une entreprise et ne constituerait ainsi pas un facteur de modulation de l’amende au vu de la gravité de l’infraction commise.

118    D’autre part, la requérante fait valoir, en substance, une erreur de la Commission quant à l’application du paragraphe 29 des lignes directrices de 2006.

119    La Commission conteste le bien-fondé des arguments de la requérante. En particulier, la Commission soutient que, premièrement, la valeur des ventes prise en compte pour chaque entreprise reflète son degré de participation à l’infraction constatée. Deuxièmement, l’absence d’appartenance de la requérante au groupe central d’entreprises se reflèterait déjà dans la conclusion selon laquelle elle n’est pas responsable de la totalité de l’entente. Troisièmement, s’agissant des entreprises appartenant audit groupe central, la Commission n’aurait pas considéré que cette appartenance était un facteur aggravant davantage leur responsabilité que l’étendue géographique plus importante de l’infraction et, partant, que le plus grand volume des ventes à prendre en compte. Quatrièmement, le coefficient « gravité de l’infraction » aurait été fixé à 15 % compte tenu de la nature de l’infraction constatée. Cinquièmement, il serait sans incidence sur la gravité de l’infraction que la requérante ne vende pas tous les produits concernés par l’infraction constatée et ait limité sa participation à deux États membres.

120    S’agissant, dans un premier temps, des arguments tirés des violations de l’article 101 TFUE, des principes de proportionnalité et d’égalité de traitement ainsi que du principe de protection de la confiance légitime, tels qu’exposés au point 116 ci-dessus, il y a lieu de préciser qu’ils concernent tous les coefficients « gravité de l’infraction » et « montant additionnel ». Dans ces conditions, il convient, en premier lieu, de rappeler les règles s’appliquant au calcul du montant de base de l’amende prévu par les lignes directrices de 2006, en deuxième lieu, de relever les motifs avancés par la Commission au soutien de son choix d’imposer des coefficients de 15 % et, en troisième lieu, d’examiner si, en procédant de la sorte, elle a commis les erreurs et violations que la requérante invoque.

121    En premier lieu, s’agissant des règles applicables au calcul du montant de l’amende, il y a lieu de rappeler que, en vertu des paragraphes 9 à 11 des lignes directrices de 2006, la méthodologie utilisée par la Commission pour fixer les amendes comporte deux étapes. Dans un premier temps, la Commission détermine un montant de base de l’amende pour chaque entreprise ou association d’entreprises. Dans un second temps, elle peut ajuster ce montant de base de l’amende à la hausse ou à la baisse, et ce au regard des circonstances aggravantes ou atténuantes qui caractérisent la participation de chacune des entreprises concernées.

122    S’agissant, plus précisément, de la première phase de la méthode pour la fixation des amendes, selon les paragraphes 21 à 23 des lignes directrices de 2006, le coefficient « gravité de l’infraction » est fixé à un niveau compris dans une fourchette allant de 0 à 30 %, en tenant compte d’un certain nombre de facteurs, tels que la nature de l’infraction, la part de marché cumulée de toutes les parties concernées, l’étendue géographique de l’infraction et la mise en œuvre ou non de l’infraction, étant entendu que les accords de fixation de prix, de répartition de marché et de limitation de production comptent, par leur nature même, parmi les restrictions de concurrence les plus graves. En vertu du paragraphe 25 des lignes directrices de 2006, il est précisé que, dans un but dissuasif, la Commission inclura dans le montant de base de l’amende une proportion, permettant de calculer un montant additionnel, comprise dans une fourchette allant de 15 à 25 % de la valeur des ventes, en tenant compte des facteurs susmentionnés.

123    En deuxième lieu, s’agissant de la proportion de la valeur des ventes de chaque entreprise concernée retenue par la Commission dans la décision attaquée, il convient d’observer que la détermination du coefficient « gravité de l’infraction » et celle du coefficient « montant additionnel » font l’objet respectivement des considérants 1210 à 1220 et des considérants 1224 et 1225 de la décision attaquée.

124    À cet égard, premièrement, s’agissant du coefficient « gravité de l’infraction », il ressort notamment des considérants 1210 à 1214 de la décision attaquée que, pour justifier la fixation d’un coefficient de 15 %, la Commission, après avoir rappelé que les accords horizontaux de fixation des prix comptaient parmi les restrictions de concurrence les plus graves, s’est fondée sur quatre critères, à savoir, la nature de l’infraction, les parts de marché combinées des entreprises sanctionnées, la portée géographique et la mise en œuvre de l’infraction. Il découle desdits considérants que, en substance, la Commission s’est fondée sur l’appréciation selon laquelle les entreprises sanctionnées dans la décision attaquée avaient participé à une infraction unique dans le secteur des installations sanitaires pour salles de bains couvrant les trois sous-groupes de produits dans six États membres et que l’« accord horizontal de fixation de prix », qui avait été mis en œuvre en l’espèce, comptait parmi les restrictions les plus graves de concurrence en raison de sa nature même.

125    Deuxièmement, s’agissant du coefficient « montant additionnel », la Commission a, au considérant 1225 de la décision attaquée, renvoyé aux quatre critères évoqués en ce qui concerne le coefficient « gravité de l’infraction » pour fixer ce coefficient à 15 %.

126    Toutefois, la Commission a estimé, au considérant 871 de la décision attaquée, que, si le groupe Roca, notamment à travers sa participation aux réunions de l’ASI, avait connaissance de l’étendue matérielle de l’infraction constatée en ce qu’elle portait sur les trois sous-groupes de produits, ledit groupe ne pouvait être considéré comme ayant eu connaissance de l’entente globale, mais seulement des comportements collusoires ayant existé en France et en Autriche. Partant, le groupe Roca a été considéré, par la Commission, comme n’ayant participé qu’aux volets français et autrichien de l’infraction constatée, ainsi que cela ressort de l’article 1er, paragraphe 3, de la décision attaquée. La Commission a encore relevé, au considérant 871 de la décision attaquée, que, dès lors que le groupe dont fait partie Laufen Austria et à la tête duquel se trouve Keramik Holding AG (ci-après le « groupe Laufen »), n’avait été acquis qu’en 1999 et qu’une infraction n’a été constatée en France qu’à partir de 2002, le groupe Roca n’avait directement participé à l’infraction dans plusieurs États membres que pendant les deux dernières années de l’infraction.

127    Il en est résulté, en ce qui concerne la requérante, ainsi que cela ressort d’une lecture combinée du tableau figurant au considérant 1226 de la décision attaquée et de l’article 2, paragraphe 4, sous b), de cette même décision, qu’elle n’a elle-même été tenue responsable du paiement de l’amende infligée au groupe Roca qu’en ce qui concerne l’infraction commise sur le territoire français.

128    C’est à la lumière des considérations exposées aux points 121 à 127 ci-dessus qu’il convient d’examiner, en troisième lieu, les griefs soulevés par la requérante et tirés, premièrement, de la violation de l’article 101 TFUE, deuxièmement, de la violation du principe de proportionnalité, troisièmement, de la violation du principe de protection de la confiance légitime et, quatrièmement, de la violation du principe d’égalité de traitement.

129    Premièrement, s’agissant de la violation de l’article 101 TUE, force est de constater que la requérante ne fournit aucune explication permettant de comprendre les raisons pour lesquelles elle estime que la Commission a violé cette disposition. Partant, cet argument doit être rejeté comme étant irrecevable au regard des dispositions de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure. En tout état de cause, cet argument est non fondé. En effet, il y a lieu de relever que le constat d’infraction, tel que le prévoit l’article 101 TFUE, ne saurait être remis en cause par une erreur que la Commission aurait commise dans le calcul du montant de l’amende, cette disposition ne comportant aucune précision quant audit calcul.

130    Deuxièmement, s’agissant de la violation du principe de proportionnalité, il convient de rappeler que, dans le cadre des procédures engagées par la Commission pour sanctionner les violations des règles de concurrence, l’application du principe de proportionnalité implique que les amendes ne doivent pas être démesurées par rapport aux objectifs visés, c’est‑à‑dire par rapport au respect de ces règles, et que le montant de l’amende infligée à une entreprise au titre d’une infraction en matière de concurrence doit être proportionné à l’infraction, appréciée dans son ensemble, en tenant compte, notamment, de la gravité de celle-ci (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 8 juillet 2004, JFE Engineering e.a./Commission, T‑67/00, T‑68/00, T‑71/00 et T‑78/00, Rec. p. II‑2501, point 532). En particulier, le principe de proportionnalité implique que la Commission doit fixer l’amende proportionnellement aux éléments pris en compte pour apprécier la gravité de l’infraction et qu’elle doit à ce sujet appliquer ces éléments de façon cohérente et objectivement justifiée (arrêts du Tribunal du 27 septembre 2006, Jungbunzlauer/Commission, T‑43/02, Rec. p. II‑3435, points 226 à 228, et du 28 avril 2010, Amann & Söhne et Cousin Filterie/Commission, T‑446/05, Rec. p. II‑1255, point 171).

131    En l’espèce, force est de constater que la requérante a participé à une infraction consistant en la mise en œuvre d’une coordination de hausses de prix futures, qu’elle avait, en raison de son appartenance au groupe Roca, connaissance de l’étendue matérielle de l’infraction constatée en ce qu’elle portait sur les trois sous-groupes de produits et que cette infraction a concerné tout le territoire français, ce que la requérante n’a pas contesté dans le cadre de son recours. Dans ces conditions, la Commission pouvait, conformément aux paragraphes 21 à 23 et 25 des lignes directrices de 2006, considérer à bon droit que des coefficients « gravité de l’infraction » et « montant additionnel » de 15 % n’étaient pas contraires au principe de proportionnalité.

132    Partant, le grief tiré de la violation du principe de proportionnalité doit être rejeté comme étant non fondé.

133    Troisièmement, s’agissant de la violation du principe de protection de la confiance légitime, la requérante soutient que la Commission a violé ledit principe en s’écartant, sans justification, de la méthode de calcul du montant de l’amende établie dans les lignes directrices de 2006.

134    À cet égard, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, le droit de se prévaloir de la protection de la confiance légitime s’étend à tout particulier qui se trouve dans une situation de laquelle il ressort que l’administration de l’Union, en lui fournissant des assurances précises, a fait naître chez lui des espérances fondées (arrêt de la Cour du 18 juillet 2007, AER/Karatzoglou, C‑213/06 P, Rec. p. I‑6733, point 33). En revanche, une personne ne peut invoquer une violation du principe de la protection de la confiance légitime en l’absence d’assurances précises que lui aurait fournies l’administration (arrêts du Tribunal du 18 janvier 2000, Mehibas Dordtselaan/Commission, T‑290/97, Rec. p. II‑15, point 59, et du 19 mars 2003, Innova Privat-Akademie/Commission, T‑273/01, Rec. p. II‑1093, point 26). Constituent de telles assurances des renseignements précis, inconditionnels et concordants émanant de sources autorisées et fiables (arrêt du Tribunal du 21 juillet 1998, Mellett/Cour de justice, T‑66/96 et T‑221/97, RecFP p. I‑A‑449 et II‑1305, points 104 et 107).

135    En l’espèce, il y a lieu de constater que la Commission ne s’est pas départie de la méthode de calcul du montant de l’amende prévue dans les lignes directrices de 2006.

136    Dans ces conditions, il ne saurait être considéré que la Commission a violé le principe de protection de la confiance. Partant, ce grief doit être rejeté comme étant non fondé.

137    Quatrièmement, s’agissant de la violation du principe d’égalité de traitement, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le principe d’égalité de traitement est violé lorsque des situations comparables sont traitées de manière différente ou que des situations différentes sont traitées de manière identique, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié (arrêts de la Cour du 13 décembre 1984, Sermide, 106/83, Rec. p. 4209, point 28, et du Tribunal du 30 septembre 2009, Hoechst/Commission, T‑161/05, Rec. p. II‑3555, point 79).

138    En l’espèce, force est de constater que l’ensemble des destinataires de la décision attaquée s’est vu appliquer des coefficients « gravité de l’infraction » et « montant additionnel » de 15 %, alors même que, à la différence des entreprises ayant participé à l’infraction unique couvrant les trois sous-groupes de produits dans six États membres, la requérante ne pouvait être tenue pour responsable de l’infraction constatée que pour son volet français. Dès lors, la gravité de l’infraction à laquelle la requérante a participé était moins importante en termes géographiques que celle de l’infraction commise par les autres destinataires de la décision attaquée ayant pris part à l’infraction unique couvrant six territoires et les trois sous-groupes de produits.

139    Toutefois, même à supposer qu’il y ait lieu de considérer que la Commission aurait dû traiter, lors de la détermination desdits coefficients, les entreprises ayant pris part à l’infraction unique couvrant les six territoires de l’Union et les trois sous-groupes de produits de manière distincte de celles qui ont participé à l’infraction unique sur un seul territoire, il n’en demeure pas moins qu’un tel traitement distinct n’aurait pas pu bénéficier à la requérante. En effet, comme il est exposé au point 131 ci-dessus, les coefficients « gravité de l’infraction » et « montant additionnel » de 15 % appliqués à la requérante constituent des taux proportionnés à la gravité de l’infraction qu’elle a commise. Dès lors, l’absence de traitement différencié des entreprises destinataires de la décision attaquée ne s’est pas faite au détriment de la requérante.

140    Dans ces conditions, il y a lieu de rejeter le grief de la requérante selon lequel la Commission a commis une violation du principe d’égalité de traitement à son détriment comme étant non fondé.

141    Dans un second temps, s’agissant du grief de la requérante relatif au paragraphe 29 des lignes directrices de 2006, il convient de relever que, en vertu du troisième tiret dudit paragraphe, afin de bénéficier d’une réduction du montant de l’amende en raison de circonstances atténuantes, l’entreprise concernée doit « apporte[r] la preuve que sa participation à l’infraction est substantiellement réduite » et « démontre[r] par conséquent que, pendant la période au cours de laquelle elle a adhéré aux accords infractionnels, elle s’est effectivement soustraite à leur application en adoptant un comportement concurrentiel sur le marché ».

142    En outre, pour bénéficier de la circonstance atténuante liée à une participation réduite à l’infraction en cause, la requérante doit démontrer que, pendant la période au cours de laquelle elle a adhéré aux accords ayant donné lieu à ladite infraction, elle s’est effectivement soustraite à son application en adoptant un comportement concurrentiel sur le marché ou, à tout le moins, qu’elle a clairement et de manière considérable enfreint les obligations visant à mettre en œuvre cette entente, au point d’avoir perturbé le fonctionnement même de celle-ci. En d’autres termes, elle doit démontrer qu’elle n’a pas appliqué les accords litigieux, en ayant à cet égard un comportement sur le marché susceptible de contrarier les effets anticoncurrentiels de l’infraction constatée (voir arrêt du Tribunal du 29 juin 2012, GDF Suez/Commission, T‑370/09, non encore publié au Recueil, point 439, et la jurisprudence citée).

143    Or, en l’espèce, force est de constater que la requérante s’est contentée de faire valoir le caractère limité de sa participation à l’infraction constatée, sans toutefois démontrer qu’elle s’est soustraite, par l’adoption d’un comportement concurrentiel, à la mise en œuvre de ladite infraction.

144    Partant, la Commission n’a pas commis d’erreur en n’octroyant aucune réduction d’amende à la requérante au titre du paragraphe 29, troisième tiret, des lignes directrices de 2006. Il y a lieu, dès lors, de rejeter le grief soulevé par la requérante à cet égard comme étant non fondé.

145    Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de rejeter le deuxième moyen comme étant pour partie irrecevable et pour partie non fondé.

 Sur le troisième moyen, relatif au choix de l’année de référence pour la détermination du chiffre d’affaires pris en compte aux fins du calcul du montant de base de l’amende

146    Dans le cadre du troisième moyen, la requérante soutient que la Commission a violé le principe de proportionnalité en se fondant sur son chiffre d’affaires pour l’année 2004 et non pour l’année 2003 pour calculer le montant de l’amende qui lui a été infligée eu égard à l’infraction touchant aux articles en céramique en France. Elle précise à cet égard que, pour l’infraction touchant aux articles de robinetterie en France, l’amende a été calculée sur le fondement du chiffre d’affaires pour l’année 2003.

147    La Commission conteste le bien-fondé des arguments de la requérante.

148    Il convient de rappeler que le paragraphe 13 des lignes directrices de 2006 est formulé comme suit :

« En vue de déterminer le montant de base de l’amende à infliger, la Commission utilisera la valeur des ventes de biens ou services, réalisées par l’entreprise, en relation directe ou indirecte avec l’infraction, dans le secteur géographique concerné à l’intérieur du territoire de l’EEE. La Commission utilisera normalement les ventes de l’entreprise durant la dernière année complète de sa participation à l’infraction. »

149    Il découle du paragraphe 13 des lignes directrices de 2006 que la Commission utilise la valeur des ventes réalisées par l’entreprise en relation directe ou indirecte avec l’infraction. À ce titre, elle utilise, en principe, les ventes de l’entreprise durant la dernière année complète de la participation de celle-ci à l’infraction.

150    En l’espèce, premièrement, il convient d’observer que, au considérant 1200 de la décision attaquée, la Commission a estimé que, « pour l’infraction concernant les articles en céramique en France, le calcul [du montant de base de l’amende était] basé sur les ventes réalisées en 2004, étant donné que la durée de la participation pour ce groupe de produits dans cet État membre ne [couvrait] que 8 mois en 2004 ».

151    Deuxièmement, il ressort certes de l’article 1er, paragraphe 3, de la décision attaquée que, comme le souligne la requérante dans ses écritures, elle a été tenue responsable d’une infraction dans le secteur des installations sanitaires pour salles de bains ayant eu lieu du 10 décembre 2002 au 9 novembre 2004. À cet égard, la décision attaquée n’opère aucune distinction selon les produits couverts par ladite infraction.

152    Néanmoins, il ressort du tableau figurant au considérant 1223 de la décision attaquée que la requérante n’a participé à l’infraction touchant aux articles en céramique en France qu’entre le 25 février et le 9 novembre 2004 et qu’aucune infraction n’a été constatée, en ce qui la concerne, s’agissant des articles en céramique en France pour l’année 2003. La Commission indique, dans le même tableau, que la participation de la requérante à l’infraction relative aux articles de robinetterie en France s’est étendue du 10 décembre 2002 au 9 novembre 2004.

153    En outre, l’amende imposée au titre de l’infraction commise par la requérante s’agissant des articles en céramique en France a été calculée, ainsi que cela ressort du tableau visé au point 152 ci-dessus et du tableau figurant au considérant 1226 de la décision attaquée, sur la base d’une participation de huit mois.

154    Il découle de l’ensemble de ces éléments que la participation de la requérante à l’infraction touchant aux articles en céramique en France n’a concerné qu’une partie de l’année 2004 et non l’année 2003, contrairement à l’infraction relative aux articles de robinetterie en France.

155    Dans ces conditions, premièrement, la Commission étant tenue, au regard du paragraphe 13 des lignes directrices de 2006, d’utiliser la valeur des ventes réalisées en relation avec l’infraction, il lui incombait, s’agissant de l’infraction touchant aux céramiques en France, de se fonder sur les ventes afférentes à l’année 2004, qui constitue la seule année durant laquelle la requérante a participé à ladite infraction. Il est à cet égard sans incidence que, s’agissant de la participation de la requérante à l’infraction relative aux articles de robinetterie en France, la Commission a fondé son calcul sur les ventes réalisées en 2003. En effet, ladite infraction ayant eu lieu entre le 10 décembre 2002 et le 9 novembre 2004, l’année 2003 correspondait, s’agissant dudit secteur, à la dernière année complète de participation à l’infraction, au sens dudit paragraphe.

156    Dès lors, c’est à bon droit et sans méconnaître le paragraphe 13 des lignes directrices de 2006 que la Commission s’est fondée sur les ventes réalisées par la requérante en 2004 pour calculer le montant de l’amende qui a été infligée à cette dernière eu égard à l’infraction touchant aux articles en céramique en France.

157    Deuxièmement, s’agissant de la violation du principe de proportionnalité, force est de constater que la requérante ne démontre pas que l’utilisation de l’année 2004 comme année de référence pour le calcul du montant de base de l’amende qui lui a été infligée violerait ledit principe. En effet, elle se contente de relever à cet égard que, si la Commission avait retenu l’année 2003 comme année de référence, le montant de l’amende aurait été inférieur d’environ 400 000 euros à celui qui a été fixé, dès lors que ses ventes d’articles en céramique avaient été sensiblement inférieures en 2003 par rapport à celles de l’année 2004. Or, le simple fait que ledit montant aurait été inférieur s’il avait été calculé sur la base de la valeur des ventes réalisées en 2003 n’est pas de nature à démontrer que l’amende, telle qu’elle a été infligée à la requérante, est disproportionnée par rapport à la gravité de l’infraction commise ni à sa situation économique, telle qu’elle existait à la date d’adoption de la décision attaquée. Partant, il convient de rejeter l’argument soulevé par la requérante à cet égard comme étant non fondé.

158    Au regard des éléments qui précèdent, il y a lieu de rejeter le troisième moyen comme étant non fondé.

 Sur le quatrième moyen, relatif à l’absence de prise en considération en tant que circonstance atténuante du contexte économique de crise

159    Dans le cadre du quatrième moyen, la requérante soutient que la Commission a violé les principes de proportionnalité et d’égalité de traitement. Elle reproche à la Commission de ne pas avoir pris en considération, au titre d’une circonstance atténuante en vertu du paragraphe 29 des lignes directrices de 2006, le contexte de crise économique. Selon elle, dès lors que la Commission a pris en considération ledit contexte lors de l’application du paragraphe 35 desdites lignes directrices à cinq entreprises destinataires de la décision attaquée, elle aurait également dû le faire, au titre d’une circonstance atténuante, s’agissant des autres destinataires de la décision attaquée.

160    La Commission conteste le bien-fondé des arguments de la requérante.

161    Selon la jurisprudence, la Commission dispose d’une marge d’appréciation qui lui permet de prendre ou de ne pas prendre en considération certains éléments lorsqu’elle fixe le montant des amendes qu’elle entend infliger, en fonction notamment des circonstances de l’espèce. Ainsi, en l’absence d’une indication de nature impérative dans les lignes directrices de 2006 en ce qui concerne les circonstances atténuantes qui peuvent être prises en compte, il convient de considérer que la Commission a conservé une certaine marge d’appréciation pour apprécier d’une manière globale l’importance d’une éventuelle réduction du montant des amendes au titre des circonstances atténuantes (arrêt du Tribunal du 12 septembre 2007, Prym et Prym Consumer/Commission, T‑30/05, non publié au Recueil, point 204).

162    En outre, le fait que, dans certains cas, la Commission ait pris en considération, dans sa pratique décisionnelle antérieure, certaines circonstances en tant que circonstances atténuantes n’implique pas pour elle une obligation de procéder de la même façon dans chaque cas d’espèce. Toutefois, la Commission est tenue de respecter le principe d’égalité de traitement, qui constitue un principe général du droit. Ainsi, la Commission ne peut traiter des situations comparables de manière différente ou des situations différentes de manière identique, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié (arrêt Prym et Prym Consumer/Commission, point 161 supra, point 205).

163    Dès lors que les cartels naissent, généralement au moment où un secteur connaît des difficultés, la Commission n’est pas tenue de considérer comme circonstance atténuante la mauvaise santé financière du secteur en cause, sous peine de devoir réduire l’amende dans la quasi-totalité des cas. En revanche, il est vrai que, dans la pratique décisionnelle de la Commission, des crises structurelles ont été considérées comme des circonstances atténuantes (arrêt Prym et Prym Consumer/Commission, point 161 supra, point 207).

164    En l’espèce, il importe de relever que, aux considérants 1389 à 1399 de la décision attaquée, la Commission a expliqué, en réponse à une demande de réduction du montant de l’amende formulée par Grohe pour elle-même et pour l’ensemble des entreprises concernées, pourquoi elle estimait que la détérioration des activités commerciales dans le secteur des installations sanitaires pour salles de bains, due à la crise économique, n’était pas en elle-même suffisante pour justifier une réduction de ce montant.

165    De plus, il est constant que la Commission a tenu compte, aux considérants 1320 à 1388 de la décision attaquée, de la situation de crise généralisée afin de motiver l’application du paragraphe 35 des lignes directrices de 2006 à cinq des dix entreprises qui en avaient fait la demande. Selon ledit paragraphe, la Commission peut, en effet, dans des circonstances exceptionnelles et sur demande, tenir compte de l’absence de capacité contributive d’une entreprise dans un contexte social et économique particulier, à condition que l’entreprise ayant formulé la demande ait rapporté des preuves objectives que l’imposition d’une amende mettrait irrémédiablement en danger sa viabilité économique et conduirait à priver ses actifs de toute valeur.

166    Or, il ressort des considérants 1344, 1345, 1352, 1353, 1360, 1361, 1368, 1369, 1379 et 1380 de la décision attaquée que les cinq entreprises visées au point 165 ci-dessus, dont ne fait pas partie la requérante, ont fourni des informations concrètes et crédibles indiquant que les difficultés issues du contexte de crise s’appliquaient également à leurs situations individuelles.

167    En outre, il ressort des pièces du dossier que la requérante s’est certes, dans une lettre adressée à la Commission le 10 septembre 2009, prévalu de la situation difficile du secteur des installations pour salles de bains ainsi que de la détérioration de sa situation économique. Toutefois, contrairement aux cinq entreprises visées au point 164 ci-dessus, force est de constater qu’elle n’a avancé aucun argument spécifique à cet égard de sorte à justifier la prise en considération du contexte de crise économique lors de la détermination du montant de l’amende. En outre, en réponse à une question posée par le Tribunal lors de l’audience, la requérante s’est bornée à renvoyer à ladite lettre ainsi qu’à un ensemble de notes de presse relatives aux procédures de chômage technique de Roca Sanitario en 2009 et en 2010.

168    Dans ces conditions, il y a lieu de conclure que la Commission n’a commis aucune violation du principe d’égalité de traitement en ce qu’elle a refusé de prendre en considération, s’agissant de la requérante, le contexte de crise économique en tant que circonstance atténuante au titre du paragraphe 29 des lignes directrices de 2006. Il convient, dès lors, de rejeter l’argument tiré de la violation du principe d’égalité de traitement comme étant non fondé.

169    Deuxièmement, s’agissant de la prétendue violation du principe de proportionnalité, il suffit de rappeler, ainsi que cela a été constaté au point 167 ci-dessus, que la requérante a omis d’avancer des arguments concrets et spécifiques à sa situation justifiant la prise en compte, au stade du calcul du montant de l’amende qui lui a été infligée, du contexte de crise. En particulier, elle n’a présenté aucun argument de nature à établir que l’amende était, au regard de sa situation financière, disproportionnée.

170    Partant, l’argument tiré de la violation du principe de proportionnalité ainsi que le quatrième moyen dans son ensemble doivent être rejetés comme étant non fondés.

 Sur le cinquième moyen, relatif à la coopération de la requérante

171    Dans le cadre du cinquième moyen, d’une part, la requérante estime que la Commission a violé le principe de protection de la confiance légitime et a commis une erreur manifeste dans l’application de la communication de 2002 sur la coopération, dès lors qu’elle ne lui a pas accordé de réduction d’amende au titre de ladite communication. D’autre part, la requérante demande à bénéficier d’une réduction d’amende au titre du paragraphe 29 des lignes directrices de 2006 en raison de sa coopération. Il convient d’interpréter ce second argument en ce sens que la requérante soutient qu’elle aurait dû recevoir une réduction d’amende au titre de sa coopération, conformément audit paragraphe, et qu’elle reproche ainsi à la Commission d’avoir commis une erreur dans l’application de ce paragraphe.

 Sur la violation du principe de protection de la confiance légitime et les violations et erreurs dans l’application de la communication de 2002 sur la coopération

172    La requérante reproche à la Commission, d’une part, de ne pas lui avoir accordé de réduction du montant de l’amende en dépit du fait que celle-ci lui avait, par courrier du 8 décembre 2006, signifiée qu’elle aurait droit à une réduction conditionnée du montant de l’amende. À ce titre, elle fait valoir que la Commission a violé le principe de protection de la confiance légitime.

173    D’autre part, la requérante conteste l’appréciation selon laquelle les informations qu’elle a fournies dans le cadre de sa demande tendant à bénéficier d’une réduction d’amende n’avaient pas de valeur ajoutée significative. À cet égard, elle soutient, en substance, que, les informations fournies par elle au titre de sa demande tendant à bénéficier d’une réduction d’amende présentaient une valeur ajoutée significative dès lors que, sans ces informations, la Commission n’aurait pu prouver l’infraction relative aux articles en céramique commise en France en 2004. En outre, elle affirme ne pas avoir remis en cause, par un manque de coopération, la valeur des informations fournies, dès lors qu’elle n’a pas contesté les faits, mais uniquement leur qualification juridique.

174    La Commission conteste le bien-fondé des arguments de la requérante. Elle soutient, premièrement, que la valeur ajoutée des informations fournies par la requérante ne pouvait pas être qualifiée de significative. En effet, d’une part, la déclaration faite par la requérante aurait été générale, alors que les déclarations d’Ideal Standard auraient été, quant à elles, concrètes et détaillées. D’autre part, l’infraction aurait pu être prouvée par de nombreux tableaux qui faisaient état d’échanges d’information et de la confirmation expresse et détaillée apportée par Ideal Standard étayée par un document rédigé après une réunion. Deuxièmement, elle fait valoir, d’une part, que la requérante a exposé, dans sa réponse à la communication des griefs, des arguments très détaillés contestant le caractère probant des éléments sur lesquels elle se fondait, en particulier le caractère probant des éléments avancés par Ideal Standard concernant l’accord sur les prix de février 2004. D’autre part, elle estime qu’une entreprise ne peut fonder sa demande de réduction sur des faits pour lesquels elle ne la tient finalement pas pour responsable, l’avantage de cette coopération se reflétant déjà dans le fait qu’elle décide d’abandonner certains griefs, raison pour laquelle l’entreprise n’est pas considérée responsable ou ne se voit pas infliger d’amende.

175    Il convient, dans un premier temps, de rappeler les conditions dans lesquelles une entreprise peut bénéficier d’une réduction d’amende en vertu de la communication de 2002 sur la coopération. Dans un deuxième temps, il y a lieu d’examiner si les informations présentées par la requérante au titre de sa demande tendant à bénéficier d’une réduction d’amende présentaient une valeur ajoutée significative avant d’examiner, le cas échéant, dans un troisième temps, la question de savoir si la Commission pouvait à bon droit revenir sur la conclusion selon laquelle la requérante avait droit à une réduction conditionnée du montant de l’amende, signifiée par lettre du 8 décembre 2006.

176    Dans un premier temps, il importe de rappeler que la Commission a défini, dans la communication de 2002 sur la coopération, les conditions dans lesquelles les entreprises coopérant avec elle au cours de son enquête sur une entente peuvent être exemptées de l’amende ou bénéficier d’une réduction du montant de l’amende qu’elles auraient dû acquitter (arrêt du Tribunal du 17 mai 2011, Arkema France/Commission, T‑343/08, Rec. p. II‑2287, point 129).

177    En vertu du paragraphe 20 de la communication de 2002 sur la coopération, « [l]es entreprises qui ne remplissent pas les conditions [pour obtenir une immunité d’amende] peuvent toutefois bénéficier d’une réduction de l’amende qui à défaut leur aurait été infligée ».

178    Le paragraphe 21 de la communication de 2002 sur la coopération dispose que, « afin de pouvoir prétendre à une [réduction d’amende au titre du paragraphe 20 de ladite communication], une entreprise doit fournir à la Commission des éléments de preuve de l’infraction présumée qui apportent une valeur ajoutée significative par rapport aux éléments de preuve déjà en possession de la Commission, et doit mettre fin à sa participation à l’activité illégale présumée au plus tard au moment où elle fournit ces éléments de preuve ».

179    Le paragraphe 22 de la communication de 2002 sur la coopération de définit la notion de valeur ajoutée significative comme suit :

« La notion de ‘valeur ajoutée’ vise la mesure dans laquelle les éléments de preuve fournis renforcent, par leur nature même et/ou leur niveau de précision, la capacité de la Commission d’établir les faits en question. Lors de cette appréciation, la Commission estimera généralement que les éléments de preuve écrits datant de la période à laquelle les faits se rapportent ont une valeur qualitative plus élevée que [celle d]es éléments de preuve établis ultérieurement. De même, les éléments de preuve se rattachant directement aux faits en question seront le plus souvent considérés comme qualitativement plus importants que ceux qui n’ont qu’un lien indirect avec ces derniers. »

180    Il est prévu au paragraphe 23, sous b), premier alinéa, de la communication de 2002 sur la coopération, trois fourchettes de réduction d’amende. La première entreprise à remplir la condition énoncée au paragraphe 21 de ladite communication est en droit d’obtenir une réduction d’amende comprise entre 30 et 50 %, la deuxième entreprise une réduction d’amende comprise entre 20 et 30 %, et les entreprises suivantes une réduction d’amende maximale de 20 %.

181    Le paragraphe 23, sous b), deuxième alinéa, de la communication de 2002 sur la coopération indique que, « pour définir le niveau de réduction à l’intérieur de ces fourchettes, la Commission prendra en compte la date à laquelle les éléments de preuve remplissant la condition énoncée au [paragraphe 21] [de ladite communication] ont été communiqués et le degré de valeur ajoutée qu’ils ont représenté » et qu’« elle pourra également prendre en compte l’étendue et la continuité de la coopération dont l’entreprise a fait preuve à partir de la date de sa contribution ».

182    Il ressort de la logique même de la communication de 2002 sur la coopération que l’effet recherché est de créer un climat d’incertitude au sein des ententes en encourageant leur dénonciation auprès de la Commission. Cette incertitude résulte précisément du fait que les participants à l’entente savent que seul l’un d’entre eux pourra bénéficier d’une immunité d’amende en dénonçant les autres participants à l’infraction, les exposant ainsi au risque qu’ils se voient infliger des amendes. Dans le cadre de ce système, et selon la même logique, les entreprises les plus rapides à fournir leur coopération sont censées bénéficier de réductions plus importantes des amendes auxquelles elles seraient autrement assujetties que celles accordées aux entreprises moins rapides à coopérer (arrêt du Tribunal du 5 octobre 2011, Transcatab/Commission, T‑39/06, Rec p. II‑6831, point 379).

183    L’ordre chronologique et la rapidité de la coopération offerte par les membres du cartel constituent donc des éléments fondamentaux du système mis en place par ladite communication sur la coopération (arrêt Transcatab/Commission, point 182 supra, point 380).

184    Il convient de rappeler à cet égard que, si la Commission est tenue de motiver les raisons pour lesquelles elle estime que des éléments fournis par des entreprises dans le cadre d’une communication sur la coopération constituent une contribution justifiant ou non une réduction du montant de l’amende infligée, il incombe en revanche aux entreprises souhaitant contester la décision de la Commission à cet égard de démontrer que les informations fournies volontairement par ces entreprises ont été déterminantes pour permettre à celle-ci de prouver l’essentiel de l’infraction et donc d’adopter une décision infligeant des amendes (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 24 septembre 2009, Erste Group Bank e.a./Commission, C‑125/07 P, C‑133/07 P, C‑135/07 P et C‑137/07 P, Rec. p. I‑8681, point 297, et arrêt Arkema France/Commission, point 176 supra, point 135).

185    Eu égard à la raison d’être de la réduction, la Commission ne peut faire abstraction de l’utilité de l’information fournie, laquelle est nécessairement fonction des éléments de preuve déjà en sa possession (arrêts du Tribunal du 28 avril 2010, Gütermann et Zwicky/Commission, T‑456/05 et T‑457/05, Rec. p. II‑1443, point 220, et Arkema France/Commission, point 176 supra, point 136).

186    Lorsqu’une entreprise ne fait, au titre de la coopération, que confirmer, et ce de manière moins précise et explicite, certaines des informations déjà données par une autre entreprise au titre de la coopération, le degré de coopération fournie par cette entreprise, quoiqu’il puisse ne pas être dénué d’une certaine utilité pour la Commission, ne saurait être considéré comme comparable à celui fourni par la première entreprise à avoir donné lesdites informations. Une déclaration se limitant à corroborer, dans une certaine mesure, une déclaration dont la Commission disposait déjà ne facilite en effet pas sa tâche de manière significative. Partant, elle ne saurait être suffisante pour justifier une réduction du montant de l’amende au titre de la coopération (voir arrêt Arkema France/Commission, point 176 supra, point 137, et la jurisprudence citée).

187    Toutefois, il ressort également de la jurisprudence que la déclaration d’une entreprise inculpée pour avoir participé à une entente, dont l’exactitude est contestée par plusieurs autres entreprises inculpées, ne peut être considérée comme constituant une preuve suffisante de l’existence d’une infraction commise par ces dernières sans être étayée par d’autres éléments de preuve (arrêt JFE Engineering e.a./Commission, point 130 supra, point 219 ; voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 14 mai 1998, Enso-Gutzeit/Commission, T‑337/94, Rec. p. II‑1571, point 91).

188    Enfin, quand bien même il y aurait lieu de considérer que la Commission disposerait d’une marge d’appréciation dans le cadre de l’examen de la valeur ajoutée significative d’informations qui lui sont fournies en vertu de la communication de 2002 sur la coopération, il n’en demeure pas moins que le Tribunal ne saurait s’appuyer sur ladite marge d’appréciation pour renoncer à exercer un contrôle approfondi tant de droit que de fait de l’appréciation de la Commission à cet égard (voir, par analogie, arrêt Chalkor/Commission, point 35 supra, point 62).

189    Dans un deuxième temps, c’est à la lumière des rappels effectués aux points 176 à 188 ci-dessus qu’il convient d’examiner les arguments soulevés par la requérante, tels qu’exposés au point 173 ci-dessus.

190    À cet égard, il y a lieu d’observer que, aux considérants 1291 à 1293, 1295, 1297, 1299 et 1300 de la décision attaquée, la Commission a motivé le refus d’accorder une réduction d’amende à la requérante en substance par trois considérations. Premièrement, s’agissant des informations fournies par la requérante concernant l’infraction relative aux articles en céramique en France en 2004, elle a observé que, d’une part, Ideal Standard l’avait déjà informée de l’existence d’un échange d’informations détaillées et lui avait notamment transmis des tableaux indiquant un échange d’informations sur les ventes pendant l’été 2004. D’autre part, les informations fournies par la requérante auraient été générales, non étayées par des éléments de preuve contemporains et leur valeur probante aurait été contestée par plusieurs entreprises pendant la procédure administrative. Deuxièmement, s’agissant de l’infraction relative aux articles de robinetterie en France, la requérante n’aurait fourni aucune information. Troisièmement, par son comportement postérieur à la demande tendant à bénéficier d’une réduction d’amende, la requérante aurait diminué voire nié la valeur probante des informations qu’elle avait elle-même transmises et aurait, ainsi, manqué de faire preuve d’un véritable esprit de coopération.

191    Dans ces conditions, à la lumière des motifs de la décision attaquée exposés au point 190 ci-dessus et des arguments soulevés par la requérante, tels qu’exposés au point 173 ci-dessus, il y a lieu de vérifier, en premier lieu, si les informations fournies par cette dernière au titre de sa demande tendant à bénéficier d’une réduction d’amende présentaient une valeur ajoutée significative. En second lieu, il convient d’examiner, le cas échéant, si la requérante a diminué la crédibilité qu’il convient d’attribuer à ces informations en remettant en cause les preuves produites par Ideal Standard de sorte que lesdites informations ne pourraient pas être considérées comme ayant une valeur ajoutée significative.

192    En premier lieu, tout d’abord, il y a lieu de constater que la requérante ne conteste pas la conclusion de la Commission selon laquelle elle n’a fourni aucune information au sujet de l’infraction relative aux articles de robinetterie en France. Dans ces conditions, il convient de limiter l’examen de ses arguments à la valeur ajoutée des informations fournies par elle en ce qui concerne l’infraction relative aux articles en céramique en France.

193    Ensuite, il y a lieu d’observer que, ainsi que la Commission le fait valoir dans ses écritures, aucune infraction n’a été constatée, s’agissant des articles en céramique en France, durant la période s’étendant de 1995 au début de l’année 2004, ce que la requérante ne conteste d’ailleurs pas. Partant, c’est à bon droit que la Commission n’a accordé aucune réduction au titre des informations fournies par la requérante s’agissant de cette période.

194    En outre, en ce qui concerne les informations présentées par la requérante au sujet de l’infraction commise, s’agissant des articles en céramique en France, en 2004, il y a lieu d’observer que, ainsi que cela ressort des considérants 556, 583, 584, 587 et 588 de la décision attaquée, pour conclure à l’existence d’une infraction, la Commission s’est fondée sur quatre éléments de preuve : premièrement, la demande d’Ideal Standard tendant à bénéficier d’une réduction d’amende (considérant 583 de la décision attaquée), deuxièmement, un tableau fourni par cette dernière en annexe à ladite demande (considérant 588 de la décision attaquée), troisièmement, la demande de la requérante tendant à bénéficier d’une réduction d’amende (considérants 556, 587 et 588 de la décision attaquée) et, quatrièmement, la réponse de Duravit à la communication des griefs (considérant 584 de la décision attaquée).

195    Enfin, contrairement à ce qu’elle prétend dans ses écritures, la Commission a estimé, en substance, dans la décision attaquée, ne pas pouvoir fonder la constatation d’une infraction touchant aux articles en céramique en France pour l’année 2004 sur la seule déclaration orale faite par Ideal Standard dans le cadre de sa demande tendant à bénéficier d’une réduction d’amende et le tableau fourni en annexe à ladite demande. En effet, au considérant 588 de la décision attaquée, la Commission a indiqué ce qui suit :

« La Commission n’a pas affirmé que le tableau soumis par Ideal Standard en annexe de sa demande [tendant à bénéficier d’une réduction d’amende] pouvait être qualifié de document contemporain des faits. Il représente néanmoins une tentative d’Ideal Standard de fournir un exposé le plus détaillé possible des faits présentés dans sa déclaration. Même sans tenir compte de cet élément de preuve, la preuve d’une coordination des prix minimaux lors de la réunion de l’AFICS de février 2004 peut être établie sur la base des trois déclarations [à savoir la demande tendant à bénéficier d’une réduction d’amende présentée par Ideal Standard, celle de la requérante et, enfin, la réponse de Duravit à la communication des griefs]. »

196    Partant, d’une part, il y a lieu de constater que, dans la décision attaquée, la Commission s’est elle-même fondée sur les informations fournies par la requérante dans le cadre de sa demande tendant à bénéficier d’une réduction d’amende pour établir l’existence d’une infraction relative aux articles en céramique en France en 2004. Dès lors, il découle de la lecture de la décision attaquée que les informations fournies par la requérante ont présenté une utilité objective pour la Commission.

197    D’autre part, il y a lieu de constater que, sans les informations fournies par la requérante, la Commission n’aurait pas pu prouver, sur la base des seuls éléments présentés par Ideal Standard dans le cadre de sa demande tendant à bénéficier d’une réduction d’amende, l’infraction relative aux articles en céramique commise en France en 2004. En effet, s’il est vrai que, ainsi que cela ressort des considérants 584 et 587 de la décision attaquée, Duravit a confirmé, dans sa réponse à la communication des griefs, que les discussions sur les prix minimaux avaient eu lieu dans le cadre de la réunion de l’AFICS mentionnée par Ideal Standard, il n’en demeure pas moins que, ainsi que cela ressort des observations orales présentées par Duravit lors de l’audition qui s’est tenue devant la Commission le 12 novembre 2007, Duravit a également mis en doute la valeur probante du tableau fourni par Ideal Standard.

198    Compte tenu des éléments qui précèdent, force est de constater que les informations fournies par la requérante dans le cadre de sa demande tendant à bénéficier d’une réduction d’amende présentent une valeur ajoutée significative. En effet, lesdites informations ont permis à la Commission de constater une infraction touchant aux articles en céramique en France pour l’année 2004, dès lors qu’elles ont confirmé l’existence d’une discussion sur les prix minimaux des articles en céramique bas de gamme pendant la réunion de l’AFICS du 25 février 2004 (considérant 588 de la décision attaquée). C’est donc à tort que la Commission a refusé de reconnaître la valeur ajoutée significative de la déclaration faite par la requérante dans le cadre de sa demande tendant à bénéficier d’une réduction d’amende et de lui accorder une réduction du montant de l’amende à ce titre.

199    La conclusion tirée au point 198 ci-dessus ne saurait être remise en cause par les arguments de la Commission tendant à démontrer que les informations fournies par la requérante ne présentaient aucune valeur ajoutée significative.

200    D’une part, l’argument de la Commission selon lequel les informations fournies par la requérante au soutien de la demande tendant à bénéficier d’une réduction d’amende étaient générales, alors que les informations fournies par Ideal Standard étaient concrètes et détaillées, ne saurait prospérer. En effet, la demande d’Ideal Standard tendant à bénéficier d’une réduction d’amende au titre de la communication de 2002 sur la coopération était, compte tenu en particulier de la contestation de la valeur probatoire des éléments fournis par Ideal Standard à ce titre, insuffisante, à elle seule, pour permettre la constatation d’une infraction touchant aux articles en céramique en France pour l’année 2004. En outre, malgré la nature générale des informations fournies par la requérante, celles-ci ont, néanmoins, corroboré les éléments fournis par Ideal Standard et ainsi permis à la Commission de constater ladite infraction. En effet, ainsi que cela ressort du point 197 ci-dessus, sans les informations fournies par la requérante, la Commission n’aurait pas pu prouver, sur la base des seuls éléments présentés par Ideal Standard dans le cadre de sa demande tendant à bénéficier d’une réduction d’amende, l’infraction relative aux articles en céramique commise en France en 2004.

201    D’autre part, l’argument de la Commission selon lequel elle aurait pu prouver l’infraction sur la base des nombreux tableaux qui faisaient état d’échanges d’informations et de la confirmation expresse et détaillée apportée par Ideal Standard et étayée par un document rédigé après une réunion est non fondé. En effet, il y a lieu de rappeler que, au considérant 588 de la décision attaquée, la Commission a estimé, en substance, ne pas pouvoir fonder la constatation d’une infraction touchant aux articles en céramique en France pour l’année 2004 sur la déclaration orale faite par Ideal Standard dans le cadre de sa demande tendant à bénéficier d’une réduction d’amende et sur le tableau fourni en annexe à ladite demande (voir point 195 ci-dessus).

202    Compte tenu de l’ensemble des considérations qui précèdent et eu égard aux considérants 556, 587 et 588 de la décision attaquée, desquels il ressort que les éléments fournis par la requérante ont effectivement permis à la Commission de constater l’infraction touchant aux articles en céramique en France en 2004, il y a lieu de conclure que la Commission a commis une erreur dans l’appréciation de la valeur ajoutée des éléments fournis par la requérante dans sa demande tendant à bénéficier d’une réduction d’amende, telle qu’évaluée à l’issue de la procédure administrative.

203    Dans ces conditions, il convient d’examiner, en second lieu, si, par son comportement postérieur à sa demande tendant à bénéficier d’une réduction d’amende, la requérante a, ainsi que la Commission l’affirme en substance dans la décision attaquée et dans ses écritures, remis en cause la valeur ajoutée significative des informations qu’elle a fournies.

204    À cet égard, il importe de relever que, au considérant 1300 de la décision attaquée, la Commission indique que le groupe Roca « n’a pas démontré un véritable esprit de coopération pendant la procédure [administrative] », mais a, au contraire, affiché un comportement qui a « diminué la valeur des preuves qu[e le groupe Roca] avait initialement apportées ».

205    En outre, il est précisé, au considérant 1295 de la décision attaquée, que « [la requérante] et Laufen [Austria] ont toutes deux vivement contesté les faits décrits dans la communication des griefs (voir par exemple les considérants [360 à 365 et 579 à 582 de la décision attaquée]), mettant ainsi en doute de façon significative la nature anticoncurrentielle des comportements que [le groupe] Roca était cens[é] prouver dans les déclarations qu’[il] a faites dans le cadre de sa demande [tendant à bénéficier d’une réduction d’amende] ». À ce titre, il y a lieu d’ajouter que les considérants 360 à 365 de cette décision exposent les arguments présentés par Laufen Austria dans sa réponse à la communication des griefs, s’agissant des comportements infractionnels sur le marché autrichien. Les considérants 579 à 582 de la même décision exposent, quant à eux, les déclarations faites par le groupe Roca au sujet des pratiques infractionnelles relatives aux produits de robinetterie en France.

206    Par ailleurs, il convient d’observer que, au considérant 586 de ladite décision, la Commission a affirmé ce qui suit :

« [Le groupe] Roca fournit un exposé des faits contradictoire. Tout en confirmant les échanges de prix minimaux au sein de l’AFICS entre 2002 et 2004 en général, [il] tente de discréditer la déclaration corroborative d’Ideal Standard, en concluant que la Commission devrait se repencher sur la question de savoir s’il est possible d’établir la preuve d’une coordination des prix minimaux. [Le groupe] Roca prétend notamment que la description qu’Ideal Standard donne de la coordination des prix minimaux lors de la réunion du 25 février 2004 n’a pas été confirmée par d’autres entreprises ayant présenté une demande tendant à bénéficier d’une réduction d’amende. [Il] prétend, en outre, que le tableau soumis par Ideal Standard ne peut pas être considéré comme une preuve concluante. Selon [le groupe] Roca, ce tableau indique qu’Ideal Standard semble avoir confondu les pratiques exercées en France et celles exercées en Italie (puisque le document est en italien). »

207    Il ressort donc des considérants de la décision attaquée cités aux points 204 à 206 ci-dessus que les informations initialement fournies par la requérante n’auraient plus de valeur ajoutée significative compte tenu du fait qu’elle en avait elle-même diminué l’utilité en mettant en doute la crédibilité de ces mêmes informations.

208    À cet égard, premièrement, il convient d’observer qu’il ressort de la demande tendant à bénéficier d’une réduction d’amende, telle que formulée dans les courriers des 17 et 20 janvier 2006, que celle-ci l’a été, non pas au nom du groupe Roca dans son ensemble, mais au nom propre de la requérante ainsi qu’en celui du groupe Laufen pour autant que les activités dudit groupe en France ont été intégrées au sein de cette dernière. Dès lors, les déclarations de Laufen Austria au cours de la procédure administrative ne sont pertinentes, aux fins de déterminer si la requérante a diminué la valeur ajoutée des informations qu’elle a fournies à la Commission, que pour autant qu’elles concernent les pratiques anticoncurrentielles ayant eu lieu sur le marché français. Or, ainsi que cela a été constaté au point 205 ci-dessus, les considérants 360 à 365 de la décision attaquée, auxquels la Commission renvoie au considérant 1295 de cette même décision, concernent uniquement le marché autrichien. Partant, ces considérants ne révèlent aucune contestation des éléments d’information fournis par la requérante dans le cadre de sa demande tendant à bénéficier d’une réduction d’amende s’agissant du marché français.

209    Deuxièmement, les considérants 579 à 582 de la décision attaquée ont trait, comme cela a été constaté au point 205 ci-dessus, aux déclarations que le groupe Roca a faites concernant les pratiques infractionnelles relatives aux produits de robinetterie ayant eu lieu en France. Partant, ils ne sont pas susceptibles de démontrer que la requérante a, par ces déclarations, remis en cause la valeur ajoutée des éléments qu’elle a elle-même fournis à la Commission. En effet, ces derniers éléments concernaient uniquement l’infraction touchant aux articles en céramique en France.

210    Troisièmement, les éléments mentionnés au considérant 586 de la décision attaquée, tels que développés par la Commission dans ses écritures, ne permettent pas de conclure que la requérante a discrédité les informations qu’elle avait elle-même fournies. En effet, d’une part, il ressort tant de la décision attaquée que des écritures de la Commission que la requérante a confirmé les échanges de prix minimaux concernant les articles en céramique bas de gamme au sein de l’AFICS notamment en 2004, ce qui n’est pas contesté. D’autre part, il est vrai que la requérante a mis en doute la valeur probante de la déclaration d’Ideal Standard relative à la réunion de l’AFICS du 25 février 2004 et du document que cette dernière a produit au soutien de sa déclaration. Néanmoins, il y a lieu de considérer que, ce faisant, la requérante s’est contentée de présenter à la Commission des arguments tendant à établir que les éléments présentés par Ideal Standard n’étaient pas suffisants pour établir l’existence de l’infraction relative aux articles en céramique commise en France en 2004, dans le but de démontrer que les informations qu’elle avait elle-même présentées dans le cadre de sa demande tendant à bénéficier d’une réduction d’amende étaient nécessaires à la Commission pour prouver ladite infraction et, partant, pourvues d’une valeur ajoutée significative.

211    Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de considérer que c’est à tort que la Commission a conclu, au considérant 1300 de la décision attaquée, que la requérante avait, par son comportement postérieur à sa demande tendant à bénéficier d’une réduction d’amende, diminué la valeur des éléments initialement présentés par elle.

212    Cette conclusion n’est pas remise en cause par les arguments soulevés par la Commission à cet égard.

213    En premier lieu, l’argument de la Commission selon lequel la requérante a manqué à son obligation de coopération en ce qu’elle a contesté le caractère probant tant de la déclaration d’Ideal Standard relative à la réunion de l’AFICS du 25 février 2004 que du document qu’elle a produit au soutien de sa déclaration est non fondé. En effet, il y a lieu de considérer que la requérante s’est contentée de mettre en doute la suffisance des éléments apportés par Ideal Standard pour constater l’existence d’une infraction relative aux articles en céramique en France en 2004. Ce faisant, elle s’est contentée d’apporter des éléments de nature à établir la valeur ajoutée significative des informations qu’elle a elle-même présentées dans le cadre de sa demande tendant à bénéficier d’une réduction d’amende.

214    En second lieu, l’argument de la Commission selon lequel une entreprise ne peut fonder sa demande de réduction sur des faits pour lesquels la Commission ne la tient finalement pas pour responsable est non fondé. En effet, s’il est vrai que la Commission n’a constaté aucune infraction relative aux articles en céramique en France au titre de la période allant de 1995 jusqu’au début de l’année 2004, il n’en demeure pas moins que la requérante a été tenue responsable de l’infraction relative aux articles en céramique commise en France en 2004. Or, force est de rappeler que, ainsi que cela a été constaté au point 198 ci-dessus, les informations fournies par la requérante ont effectivement permis à la Commission de constater cette infraction.

215    Partant, il convient d’accueillir le cinquième moyen, en ce qu’il a trait à l’appréciation erronée de la demande de la requérante tendant à bénéficier d’une réduction d’amende.

216    Dans ces conditions, d’une part, il n’y a plus lieu d’examiner l’argument de la requérante selon lequel la Commission a violé ses droits de la défense en ce qu’elle n’a pas eu accès à la réponse de Duravit à la communication des griefs. En effet, il ressort des écritures de la requérante que cet argument est intrinsèquement lié à la contestation de l’appréciation de la Commission selon laquelle la requérante n’avait pas apporté d’informations présentant une valeur ajoutée significative. Or, les arguments présentés par la requérante au titre de cette contestation ont été accueillis aux points 202, 211 et 215 ci-dessus.

217    D’autre part, dans la mesure où le cinquième moyen a été accueilli en ce qu’il a trait à l’appréciation erronée de la demande de la requérante tendant à bénéficier d’une réduction d’amende (voir point 215 ci-dessus), il n’est pas nécessaire d’examiner l’argument de la requérante, exposé au point 172 ci-dessus, selon lequel la Commission a violé le principe de protection de la confiance légitime en décidant, dans la décision attaquée, de supprimer la réduction conditionnée signifiée à la requérante dans la lettre du 8 décembre 2006.

218    Il y a lieu de tirer les conséquences de l’illégalité constatée au point 215 ci-dessus sur le montant de l’amende infligée à la requérante dans le cadre de l’examen des conclusions en réformation formulées par les requérantes, aux points 231 et suivants ci-après.

 Sur l’erreur dans l’application des lignes directrices de 2006

219    La requérante fait valoir que la Commission a commis une erreur dans la mesure où elle ne lui a pas accordé de réduction pour coopération au titre d’une circonstance atténuante au sens du paragraphe 29 des lignes directrices de 2006.

220    La Commission conteste le bien-fondé de cet argument de la requérante.

221    D’abord, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, il ressort du paragraphe 29, quatrième tiret, des lignes directrices de 2006 que la Commission s’est engagée, dans le cadre de son pouvoir d’appréciation des circonstances atténuantes qu’elle est tenue de prendre en considération lors de la fixation du montant des amendes, à octroyer une réduction d’amende lorsqu’« une entreprise coopère effectivement avec [elle] en dehors du champ d’application de la communication sur la [coopération] et au-delà de ses obligations juridiques de coopérer » (arrêt Arkema France/Commission, point 176 supra, point 168).

222    Toutefois, l’application du paragraphe 29, quatrième tiret, des lignes directrices de 2006 ne saurait avoir pour conséquence de priver la communication de 2002 sur la coopération de son effet utile. En effet, il y a lieu de constater que ladite communication définit un cadre permettant de récompenser, pour leur coopération à l’enquête de la Commission, les entreprises qui sont ou ont été parties à des ententes secrètes. Il ressort donc du libellé et de l’économie de ladite communication que les entreprises ne peuvent, en principe, obtenir une réduction d’amende au titre de leur coopération que lorsqu’elles satisfont aux conditions strictes prévues par ladite communication.

223    Dès lors, afin de préserver l’effet utile de la communication de 2002 sur la coopération, ce ne peut être que dans des situations exceptionnelles que la Commission est tenue d’octroyer une réduction d’amende à une entreprise sur la base du paragraphe 29, quatrième tiret, des lignes directrices de 2006. Tel est le cas notamment lorsque la coopération d’une entreprise, tout en allant au-delà de son obligation légale de coopérer sans toutefois lui donner droit à une réduction d’amende au titre de la communication de 2002 sur la coopération, est d’une utilité objective pour la Commission. Une telle utilité doit être constatée lorsque la Commission se fonde dans sa décision finale sur des éléments de preuve qu’une entreprise lui a fournis dans le cadre de sa coopération et en l’absence desquels la Commission n’aurait pas été en mesure de sanctionner totalement ou partiellement l’infraction en cause (arrêt Arkema France/Commission, point 176 supra, point 170).

224    En l’espèce, d’une part, il y a lieu de rappeler que, ainsi qu’il ressort des points 202 et 211 ci-dessus, c’est à tort que la Commission a considéré, dans la décision attaquée, que les éléments fournis par la requérante au titre de sa demande tendant à bénéficier d’une réduction d’amende étaient dépourvus de valeur ajoutée significative et que la requérante, faute d’avoir coopéré de manière véritable, n’était pas éligible à une réduction au titre de la communication de 2002 sur la coopération. Or, selon la jurisprudence citée au point 223 ci-dessus, ce n’est que dans des circonstances exceptionnelles et, notamment, lorsque la coopération d’une entreprise ne donne pas droit à une réduction d’amende au titre de ladite communication que la Commission peut être tenue d’octroyer une réduction d’amende au titre du paragraphe 29, quatrième tiret, des lignes directrices de 2006. Partant, compte tenu du constat, établi au point 211 ci-dessus, selon lequel la Commission devait accorder une réduction d’amende à la requérante au titre de la communication de 2002 sur la coopération, force est de conclure qu’elle n’était pas tenue d’accorder une réduction d’amende à la requérante au titre de ladite disposition. D’autre part, et en toute hypothèse, force est de constater que la requérante n’avance aucune circonstance exceptionnelle justifiant que la Commission examine sa coopération au regard de cette disposition.

225    Partant, il y a lieu de conclure que la requérante n’a pas établi que la Commission a commis une erreur en ne lui octroyant pas une réduction d’amende sur la base du paragraphe 29, quatrième tiret, des lignes directrices de 2006. Le cinquième moyen, en ce qu’il est fondé sur ledit paragraphe, doit dès lors être rejeté comme étant non fondé.

226    Eu égard aux éléments qui précèdent, il y a lieu d’accueillir partiellement le cinquième moyen, pour autant que la requérante fait valoir que la Commission a commis une erreur dans l’appréciation de la valeur ajoutée des informations qu’elle a présentées au titre de sa demande tendant à bénéficier d’une réduction d’amende, et de le rejeter pour le surplus.

227    Il ressort de l’examen des cinq moyens de recours soulevés par la requérante qu’il y a lieu d’accueillir le cinquième moyen, en ce qu’il est tiré d’une erreur dans l’appréciation de la valeur ajoutée des informations fournies par la requérante au titre de sa demande tendant à bénéficier d’une réduction d’amende, et de le rejeter, ainsi que les autres moyens, pour le surplus.

228    S’agissant des conséquences à tirer au titre des conclusions tendant à l’annulation partielle de la décision attaquée, il convient de relever que, s’agissant de l’article 1er de la décision attaquée, la Commission a considéré, au paragraphe 3 dudit article, que la requérante avait enfreint l’article 101 TFUE et l’article 53 de l’accord EEE en participant, du 10 décembre 2002 au 9 novembre 2004, à une infraction en France et en Autriche. À cet égard, il convient de constater que, aucun des moyens soulevés par la requérante n’ayant remis en cause cette constatation, ledit article n’est pas entaché d’illégalité. Il y a donc lieu de rejeter lesdites conclusions tendant à l’annulation partielle pour autant qu’elles visent l’article 1er, paragraphe 3, de la décision attaquée.

229    En revanche, compte tenu de la conclusion tirée aux points 226 et 227 ci-dessus, il convient d’annuler l’article 2, paragraphe 4, sous b), de la décision attaquée pour autant que la Commission a fixé le montant de l’amende infligée à la requérante sans tenir compte de sa coopération.

230    Dans la mesure où, au titre du deuxième chef de conclusions, la requérante demande, à titre subsidiaire, de réduire le montant de l’amende qui lui a été infligée, il y a aura lieu de déterminer ledit montant dans le cadre de l’examen de ce chef de conclusions.

2.     Sur les conclusions tendant à la réduction du montant de l’amende infligée à la requérante

231    Compte tenu du deuxième chef de conclusions par lequel la requérante demande, à titre subsidiaire, au Tribunal de réduire le montant de l’amende qui lui a été imposée (voir point 33 ci-dessus), il incombe au Tribunal, dans le cadre de l’exercice de sa compétence de pleine juridiction, d’examiner, d’une part, les conséquences de l’erreur commise par la Commission, qui est exposée aux points 202 et 211 ci-dessus, sur le calcul du montant de l’amende infligée à la requérante et, d’autre part, les autres arguments qu’elle avance visant à obtenir du Tribunal une réduction du montant de l’amende qui lui a été infligée.

 Sur les conséquences à tirer de l’erreur de la Commission quant à l’appréciation de la valeur des éléments de preuve fournis à l’appui de la demande de la requérante tendant à bénéficier d’une réduction d’amende

232    S’agissant de l’appréciation erronée de la valeur de la demande de la requérante tendant à bénéficier d’une réduction d’amende, telle que constatée au point 215 ci-dessus, la Commission fait valoir que, si le Tribunal estimait que la requérante avait apporté une valeur ajoutée significative et fait preuve d’une coopération sincère ou véritable, la réduction applicable ne devrait pas dépasser 3 %, car, en l’espèce, l’étendue de la coopération a été très limitée, puisqu’elle n’a concerné que les produits en céramique et le marché français.

233    À cet égard, il convient de préciser que, bien que la communication de 2002 sur la coopération ne préjuge pas de l’appréciation de la réduction du montant de l’amende par le juge de l’Union lorsque celui-ci statue en vertu de sa compétence de pleine juridiction, le Tribunal estime approprié, en l’espèce, de s’en inspirer pour recalculer le montant de l’amende, notamment en raison du fait qu’elle permet de prendre en considération tous les éléments pertinents de l’espèce et d’infliger des amendes proportionnées à l’ensemble des entreprises ayant participé à l’infraction en cause.

234    À cet égard, il convient de rappeler que, au paragraphe 23, sous b), premier alinéa, de la communication de 2002 sur la coopération, il est prévu trois fourchettes de réduction d’amende. En effet, la première entreprise à remplir la condition énoncée au paragraphe 21 de ladite communication est en droit d’obtenir une réduction d’amende comprise entre 30 et 50 %, la deuxième entreprise une réduction d’amende comprise entre 20 et 30 %, et les entreprises suivantes une réduction d’amende maximale de 20 %.

235    Le paragraphe 23, sous b), deuxième alinéa, de la communication de 2002 sur la coopération indique que, « pour définir le niveau de réduction à l’intérieur de ces fourchettes, la Commission prendra en compte la date à laquelle les éléments de preuve remplissant la condition énoncée au [paragraphe 21 de ladite communication] ont été communiqués et le degré de valeur ajoutée qu’ils ont représenté » et qu’« elle pourra également prendre en compte l’étendue et la continuité de la coopération dont l’entreprise a fait preuve à partir de la date de sa contribution ».

236    En l’espèce, tout d’abord, il y a lieu de relever que, ainsi qu’il ressort du considérant 1289 de la décision attaquée, la requérante faisait partie de la troisième entreprise ayant déposé une demande tendant à bénéficier d’une réduction d’amende après celle constituée par Grohe et ses filiales ainsi que celle constituée par Ideal Standard et ses filiales, étant entendu que celle constituée par Masco et ses filiales a bénéficié de l’immunité d’amendes. Dans ces conditions, elle est éligible, au titre du paragraphe 23, sous b), premier alinéa, troisième tiret, de la communication de 2002 sur la coopération, à une réduction d’amende maximale de 20 %, ce qu’elle ne conteste par ailleurs pas.

237    Ensuite, la demande de la requérante tendant à bénéficier d’une réduction d’amende a été présentée le 17 janvier 2006 (voir point 9 ci-dessus), soit environ un an et six mois après la demande d’immunité présentée par Masco et ses filiales (voir point 5 ci-dessus) et environ un an et deux mois après l’introduction des demandes tendant à bénéficier d’une réduction d’amende présentées respectivement par Grohe et ses filiales et par Ideal Standard et ses filiales (voir point 7 ci-dessus), mais avant l’envoi de la communication des griefs.

238    Enfin, il y a lieu d’observer, d’une part, que la déclaration présentée par la requérante au soutien de sa demande tendant à bénéficier d’une réduction d’amende est générale par nature et ne concerne aucune réunion en particulier. D’autre part, ladite déclaration n’a permis d’établir l’infraction que pour huit mois en 2004 et uniquement s’agissant des articles en céramique et du marché français.

239    Partant, le Tribunal considère que, eu égard à l’ensemble des circonstances de l’espèce, et notamment aux circonstances évoquées aux points 236 à 238 ci-dessus, il convient d’accorder à la requérante une réduction de 6 % du montant de l’amende qui lui a été infligée, soit une réduction de 402 000 euros.

240    Dès lors, eu égard aux conclusions tirées au point 239 ci-dessus, le Tribunal fixe le montant total de l’amende devant être infligée solidairement à la requérante, concernant l’infraction à laquelle elle a participé en France, à 6 298 000 euros.

 Sur les arguments additionnels soulevés par la requérante au soutien de sa demande de réduction du montant de l’amende

241    La requérante soulève deux arguments additionnels visant à appuyer sa demande de réformation du montant de l’amende.

242    Il importe de rappeler à cet égard que, selon la jurisprudence, d’une part, dans le cadre de l’exercice de sa compétence de pleine juridiction, le Tribunal doit effectuer sa propre appréciation, en tenant compte de toutes les circonstances de l’espèce et en respectant les principes généraux du droit de l’Union, tels que le principe de proportionnalité (voir, en ce sens, arrêt Romana Tabacchi/Commission, point 35 supra, points 179 et 280) ou encore le principe d’égalité de traitement (arrêt Erste Group Bank e.a./Commission, point 184 supra, point 187).

243    D’autre part, l’exercice de la compétence de pleine juridiction n’équivaut pas à un contrôle d’office par le juge de l’Union. Dès lors, à l’exception des moyens d’ordre public qu’il est tenu de soulever d’office, telle l’absence ou l’insuffisance de motivation de la décision attaquée, c’est à la partie requérante qu’il appartient de soulever les moyens à l’encontre de cette dernière et d’apporter des éléments de preuve à l’appui de ces moyens (voir, en ce sens, arrêt Chalkor/Commission, point 35 supra, point 64).

244    En l’espèce, en premier lieu, la requérante demande, à titre subsidiaire, dans le cadre du deuxième moyen, que le Tribunal tienne compte, dans l’exercice de sa compétence de pleine juridiction, de sa moindre implication dans l’infraction constatée et de la moindre gravité de l’infraction commise par elle.

245    À cet égard, il y a lieu de rappeler que, bien que les lignes directrices de 2006 ne préjugent pas de l’appréciation de l’amende par le juge de l’Union lorsque celui-ci statue en vertu de sa compétence de pleine juridiction (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 27 juillet 2005, Brasserie nationale e.a./Commission, T‑49/02 à T‑51/02, Rec. p. II‑3033, point 169), le Tribunal estime approprié, en l’espèce, de s’en inspirer pour recalculer le montant de l’amende, notamment en raison du fait qu’elles permettent de prendre en considération tous les éléments pertinents de l’espèce et d’imposer des amendes proportionnées à l’ensemble des entreprises ayant participé à l’infraction constatée.

246    D’une part, il convient de rappeler que le Tribunal a constaté, aux points 137 à 140 ci-dessus, que la Commission n’a pas violé le principe d’égalité de traitement en appliquant à la requérante des coefficients « gravité de l’infraction » et « montant additionnel » de 15 %. D’autre part, il y a lieu de rappeler que, ainsi que cela a été constaté au point 131 ci-dessus, la Commission pouvait, conformément aux paragraphes 21 à 23 et 25 des lignes directrices de 2006, considérer à bon droit que des coefficients « gravité de l’infraction » et « montant additionnel » de 15 % n’étaient pas disproportionnés par rapport à la gravité de l’infraction.

247    Certes, les coefficients « gravité de l’infraction » et « montant additionnel » de 15 % sont ceux qui ont été retenus par la Commission, ainsi que cela découle du considérant 1211 de la décision attaquée, pour calculer les amendes imposées aux entreprises ayant participé à l’infraction unique couvrant les trois sous-groupes de produits dans six États membres, qui constitue une infraction plus grave, en raison de sa portée géographique, que celle à laquelle la requérante a participé.

248    Toutefois, le fait que les entreprises ayant participé à l’infraction unique couvrant six États membres et les trois sous-groupes de produits auraient dû se voir imposer une amende calculée sur la base de coefficients « gravité de l’infraction » et « montant additionnel » supérieurs à ceux de 15 % retenus pour sanctionner la requérante ne saurait justifier que le Tribunal lui impose, dans le cadre de l’exercice de sa compétence de pleine juridiction, une amende d’un montant qui ne serait pas suffisamment dissuasif au regard de la gravité de l’infraction à laquelle elle a participé.

249    Dans ces conditions, le Tribunal estime, dans l’exercice de sa compétence de pleine juridiction le conduisant à substituer sa propre appréciation à celle de la Commission et compte tenu de l’ensemble des circonstances de l’espèce, que les coefficients « gravité de l’infraction » et « montant additionnel » de 15 % sont appropriés.

250    En deuxième lieu, dans le cadre du cinquième moyen de son recours, la requérante demande, à titre subsidiaire, au Tribunal de tenir compte, dans l’exercice de sa compétence de pleine juridiction, de sa coopération avec la Commission.

251    À cet égard, force est de constater que cette demande doit être rejetée, dès lors que, compte tenu de la réduction déjà accordée au point 239 ci-dessus, la requérante n’avance ni argument ni preuve de nature à justifier une réduction supplémentaire.

252    En troisième lieu, le Tribunal estime, en vertu de sa compétence de pleine juridiction, que, compte tenu de l’ensemble des éléments avancés devant lui, une amende de 6 298 000 euros constitue, au regard de la durée et de la gravité de l’infraction à laquelle la requérante a participé, une sanction appropriée permettant de réprimer, de manière proportionnée et dissuasive, son comportement anticoncurrentiel.

253    Au regard de l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu, d’une part, de fixer le montant de l’amende infligée à la requérante, à l’article 2, paragraphe 4, sous b), de la décision attaquée, à 6 298 000 euros et, d’autre part, de rejeter le recours pour le surplus.

 Sur les dépens

254    Aux termes de l’article 87, paragraphe 3, du règlement de procédure, le Tribunal peut répartir les dépens ou décider que chaque partie supporte ses propres dépens si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs de conclusions.

255    Le recours ayant été partiellement accueilli, il sera fait une juste appréciation des circonstances de la cause en décidant que la Commission supportera ses propres dépens ainsi qu’un tiers des dépens exposés par la requérante. La requérante supportera donc les deux tiers de ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête :

1)      L’article 2, paragraphe 4, sous b), de la décision C (2010) 4185 final de la Commission, du 23 juin 2010, relative à une procédure d’application de l’article 101 TFUE et de l’article 53 de l’accord EEE (affaire COMP/39092 – Installations sanitaires pour salles de bains), est annulé pour autant que la Commission européenne a fixé le montant de l’amende infligée solidairement à Roca sans tenir compte de sa coopération.

2)      Le montant de l’amende infligée à Roca à l’article 2, paragraphe 4, sous b), de la décision C (2010) 4185 final est de 6 298 000 euros.

3)      Le recours est rejeté pour le surplus.

4)      La Commission supportera, outre ses propres dépens, un tiers des dépens exposés par Roca.

5)      Roca supportera les deux tiers de ses propres dépens.

Pelikánová

Jürimäe

Van der Woude

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 16 septembre 2013.

Signatures

Table des matières


Antécédents du litige

Procédure et conclusions des parties

En droit

1.  Sur les conclusions tendant à l’annulation partielle de la décision attaquée

Sur le premier moyen, relatif à l’existence d’une entreprise unique

Sur le grief relatif à l’importance excessive accordée aux liens d’actionnariat

Sur l’évaluation des éléments de preuve produits par la requérante afin de renverser la présomption d’exercice d’une influence déterminante

Sur les facteurs additionnels pris en compte par la Commission afin de renforcer la présomption d’exercice d’une influence déterminante

–  Sur l’erreur manifeste d’appréciation des facteurs additionnels

–  Sur la violation des droits de la défense

Sur la violation de l’obligation de motivation

Sur le deuxième moyen, lié à l’appréciation de la gravité de l’infraction commise par la requérante

Sur le troisième moyen, relatif au choix de l’année de référence pour la détermination du chiffre d’affaires pris en compte aux fins du calcul du montant de base de l’amende

Sur le quatrième moyen, relatif à l’absence de prise en considération en tant que circonstance atténuante du contexte économique de crise

Sur le cinquième moyen, relatif à la coopération de la requérante

Sur la violation du principe de protection de la confiance légitime et les violations et erreurs dans l’application de la communication de 2002 sur la coopération

Sur l’erreur dans l’application des lignes directrices de 2006

2.  Sur les conclusions tendant à la réduction du montant de l’amende infligée à la requérante

Sur les conséquences à tirer de l’erreur de la Commission quant à l’appréciation de la valeur des éléments de preuve fournis à l’appui de la demande de la requérante tendant à bénéficier d’une réduction d’amende

Sur les arguments additionnels soulevés par la requérante au soutien de sa demande de réduction du montant de l’amende

Sur les dépens


* Langue de procédure : l’espagnol.


1 Le présent arrêt fait l’objet d’une publication par extraits.