Language of document : ECLI:EU:T:2011:480

ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)

15 septembre 2011 (*)

« Marque communautaire – Procédure de déchéance – Marque communautaire verbale CENTROTHERM – Usage sérieux de la marque – Article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement (CE) n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑427/09,

centrotherm Clean Solutions GmbH & Co. KG, établie à Blaubeuren (Allemagne), représentée par Me O. Löffel, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. G. Schneider et Mme R. Manea, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

Centrotherm Systemtechnik GmbH, établie à Brilon (Allemagne), représentée par Mes J. Albrecht et U. Vormbrock, avocats,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’OHMI du 25 août 2009 (affaire R 6/2008‑4), relative à une procédure de déchéance entre centrotherm Clean Solutions GmbH & Co. KG et Centrotherm Systemtechnik GmbH,

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

composé de MM. E. Moavero Milanesi, président, N. Wahl (rapporteur) et S. Soldevila Fragoso, juges,

greffier : Mme T. Weiler, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 22 octobre 2009,

vu les mémoires en réponse de l’OHMI et de l’intervenante déposés au greffe du Tribunal le 26 janvier 2010,

vu les demandes des parties de la tenue d’une audience,

vu l’ordonnance du 30 mars 2011 portant jonction des affaires T‑427/09 et T‑434/09 aux fins de la procédure orale,

à la suite de l’audience du 5 mai 2011,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 7 septembre 1999, l’intervenante, Centrotherm Systemtechnik GmbH, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal CENTROTHERM.

3        Les produits et les services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 11, 17, 19 et 42 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 11 : « Conduites d’échappement pour le chauffage, carneaux de cheminées, tuyaux de chaudières de chauffage ; appliques pour becs de gaz ; pièces mécaniques d’installations de chauffage, de climatisation, de production de vapeur, de séchage et de ventilation ; appareils de filtrage de l’air et leurs pièces ; pièces mécaniques d’installations à gaz ; robinets pour tuyauteries ; tiroirs de cheminées » ;

–        classe 17 : « Raccords pour tuyaux, manchons pour tuyaux, armatures pour conduites, tuyaux, les articles précités non métalliques ; joints, matières à jointoyer ; matières à calfeutrer, à étouper et à isoler ; matières plastiques partiellement ouvrées ; articles en matières plastiques compris en classe 17 » ;

–        classe 19 : « Matériaux de construction ; tuyaux, canalisations, en particulier pour la construction ; canalisations d’eau, tuyaux de dérivation ; armatures pour la construction ; pièces de recouvrement pour murs, panneaux de construction, panneaux ; rallonges pour cheminées, tuyaux de cheminées, capuchons de cheminées, mitres de cheminées, manteaux de cheminées, les articles précités non métalliques » ;

–        classe 42 : « Conseils de construction, planification de la construction, services d’un ingénieur, planification technique de projets ; travaux d’ingénieurs (expertises) ». (DA, pt 1)

4        La marque CENTROTHERM a été enregistrée pour les produits et les services visés au point 3 ci-dessus, le 19 janvier 2001, en tant que marque communautaire.

5        Le 7 février 2007, la requérante, centrotherm Clean Solutions GmbH & Co. KG, a déposé auprès de l’OHMI, en vertu de l’article 15 et de l’article 50, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 40/94 [devenus article 15 et article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009], une demande en déchéance de la marque CENTROTHERM pour tous les produits et les services enregistrés.

6        La demande en déchéance a été notifiée le 15 février 2007 à l’intervenante, qui a été invitée à présenter d’éventuelles observations et preuves de l’usage sérieux de la marque litigieuse dans un délai de trois mois.

7        Dans ses observations du 11 mai 2007, l’intervenante a contesté la demande en déchéance et a, afin de démontrer l’usage sérieux de sa marque, produit les éléments suivants :

–        quatorze photographies numériques ;

–        quatre factures ;

–        une déclaration, intitulée « eidesstattliche Versicherung » (déclaration sur l’honneur), établie par M. W., en sa qualité de gérant de l’intervenante.

8        L’intervenante a déclaré être en possession de nombreuses autres copies de factures qu’elle renonçait à présenter, dans un premier temps, pour des raisons de confidentialité. Affirmant pouvoir produire d’autres documents, elle a prié la division d’annulation de l’OHMI de prendre une mesure procédurale en conséquence, au cas où celle-ci souhaiterait que d’autres preuves et documents individuels soient versés au dossier.

9        Le 30 octobre 2007, la division d’annulation a prononcé la déchéance de la marque CENTROTHERM en constatant que les éléments de preuve fournis pas l’intervenante n’étaient pas suffisants pour démontrer l’usage sérieux de ladite marque.

10      Le 14 décembre 2007, l’intervenante a formé un recours contre cette décision, auquel la quatrième chambre de recours de l’OHMI a partiellement fait droit par décision du 25 août 2009 (ci-après la « décision attaquée »).

11      La chambre de recours a annulé la décision de la division d’annulation et rejeté la demande en déchéance pour les produits « conduites d’échappement pour le chauffage, carneaux de cheminées, tuyaux de chaudières de chauffage ; appliques pour becs de gaz ; pièces mécaniques d’installations de chauffage ; pièces mécaniques d’installations à gaz ; robinets pour tuyauteries ; tiroirs de cheminées », relevant de la classe 11, « raccords pour tuyaux, manchons pour tuyaux, armatures pour conduites, tuyaux, les articles précités non métalliques », relevant de la classe 17, et « tuyaux, canalisations, en particulier pour la construction ; tuyaux de dérivation ; tuyaux de cheminées », relevant de la classe 19. La chambre de recours a rejeté le recours pour le surplus.

12      En particulier, la chambre de recours a considéré que la preuve de l’usage sérieux de la marque CENTROTHERM, s’agissant de la période de cinq ans précédant la présentation de la demande en déchéance, à savoir le 7 février 2007 (ci-après la « période pertinente »), pour les produits mentionnés au point 11 ci-dessus avait été apportée, dès lors que les photographies fournies par l’intervenante démontraient la nature de l’usage de la marque et que les factures produites attestaient que les produits mentionnés avaient été commercialisés sous la marque litigieuse.

 Conclusions des parties

13      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée pour autant qu’elle rejette la demande en déchéance de la marque CENTROTHERM ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

14      L’OHMI et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Arguments des parties

15      À l’appui de son recours, la requérante invoque un moyen unique, tiré d’une appréciation erronée des éléments de preuve. En considérant que les preuves présentées par l’intervenante étaient suffisantes pour prouver l’usage sérieux de la marque litigieuse, la chambre de recours aurait violé l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009 ainsi que la règle 40, paragraphe 5, et la règle 22, paragraphes 2 et 3, du règlement (CE) n° 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d’application du règlement n° 40/94 (JO L 303, p. 1), tel que modifié.

16      D’après la requérante, l’appréciation faite par la chambre de recours méconnaît les exigences imposées par les dispositions pertinentes et par la jurisprudence, à savoir la preuve de la nature, du lieu, de la durée et de l’importance de l’usage d’une marque. En substance, la requérante affirme que les photographies ne sont pas datées, que les factures ne mentionnent pas la marque litigieuse, mais la dénomination sociale de l’intervenante, que la déclaration sur l’honneur du gérant de l’intervenante est dépourvue de valeur probante et que, pris ensemble, ces différents éléments ne permettent pas d’établir que les produits visualisés sur les photographies ont effectivement été mis sur le marché pendant la période pertinente.

17      L’OHMI conteste les arguments de la requérante et fait valoir que, bien que les éléments versés au dossier ne constituent pas, pris individuellement, des preuves adéquates de l’usage sérieux, ils dépeignent conjointement, et sans qu’aucun doute ne puisse subsister, un usage de la marque litigieuse qui mérite d’être qualifié d’usage sérieux.

18      L’intervenante conteste également les arguments de la requérante. Bien qu’admettant que les photographies versées au dossier ont été prises après la période pertinente, elle considère qu’il est excessif d’exiger du titulaire d’une marque de présenter des photographies de produits commercialisés plusieurs mois, voire plusieurs années, plus tôt, et qui, en outre, indiquent la date à laquelle elles ont été prises au cours de la période pertinente. Cela supposerait en effet que le titulaire de la marque prenne régulièrement, à titre de précaution, des photographies de tous ses produits et les archive, afin de pouvoir les produire en cas de procédure de déchéance. Selon l’intervenante, une telle exigence n’est pas réaliste.

19      En outre, l’intervenante souligne les caractéristiques du marché en cause. À cet égard, elle fait valoir que les produits et les services protégés par sa marque sont commercialisés non pas auprès du consommateur final, mais auprès d’entreprises de construction. Ils sont essentiellement commercialisés non pas dans le commerce de détail ou sur Internet, mais directement proposés et fournis à des clients commerciaux. Cela signifierait que les produits visés par la marque CENTROTHERM feraient moins l’objet de publicités dans les journaux, dans les magazines, à la radio, à la télévision ou sur Internet que dans les foires spécialisées et sur des prospectus, des lettres commerciales et des factures de la partie intervenante. L’exploitation principale de la marque serait surtout de l’apposer sur les produits et leurs emballages, à savoir des cartons et des palettes.

20      D’après l’intervenante, il n’est pas d’usage sur le marché concerné d’avoir recours et de faire la promotion d’un grand nombre de marques de fabrique. En effet, tandis que les acheteurs de produits de consommation auraient généralement accès à un grand nombre de produits de même nature, proposés par un grand nombre de fournisseurs différents, et devraient s’orienter en fonction des marques, les acheteurs des produits pertinents dans la présente affaire achèteraient généralement auprès d’un seul fournisseur, sur de longues périodes, tout un éventail de produits et d’accessoires et de services afférents. Selon l’intervenante, c’est la raison pour laquelle, généralement, la dénomination sociale ou l’enseigne suffit pour distinguer, à la manière d’une marque, tout un éventail de produits.

 Appréciation du Tribunal

21      À titre liminaire, il convient de rappeler la procédure et l’objectif suivis par la sanction de déchéance ainsi que les principes encadrant l’administration des preuves dans une procédure de déchéance.

22      Il ressort de l’article 15, paragraphe 1, premier alinéa, et de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009 que le titulaire d’une marque communautaire est déclaré déchu de ses droits, sur demande présentée auprès de l’OHMI, si, pendant une période ininterrompue de cinq ans, la marque n’a pas fait l’objet d’un usage sérieux dans l’Union européenne pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée et qu’il n’existe pas de juste motif pour son non-usage.

23      La règle 40, paragraphe 5, du règlement n° 2868/95 dispose que l’OHMI, dans le cas d’une demande en déchéance, impartit au titulaire de la marque communautaire un délai dans lequel celui-ci apporte la preuve de l’usage de la marque. Si la preuve n’est pas apportée dans le délai imparti, la déchéance de la marque communautaire est prononcée. Au titre de la règle 22, paragraphe 3, du règlement n° 2868/95, qui est applicable aux demandes en déchéance en vertu de la règle 40, paragraphe 5, du même règlement, la preuve de l’usage de la marque doit porter sur le lieu, la durée, l’importance et la nature de l’usage qui en a été fait.

24      La ratio legis de l’exigence selon laquelle une marque doit avoir fait l’objet d’un usage sérieux pour être protégée au titre du droit de l’Union réside dans le fait que le registre de l’OHMI ne saurait être assimilé à un dépôt stratégique et statique conférant à un détenteur inactif un monopole légal d’une durée indéterminée. Au contraire, et conformément au considérant 10 du règlement n° 207/2009, ledit registre devrait refléter fidèlement les indications que les entreprises utilisent effectivement sur le marché pour distinguer leurs produits et services dans la vie économique (voir, en ce sens et par analogie, ordonnance de la Cour du 27 janvier 2004, La Mer Technology, C‑259/02, Rec. p. I‑1159, points 18 à 22).

25      Selon la jurisprudence, une marque fait l’objet d’un usage sérieux lorsqu’elle est utilisée, conformément à sa fonction essentielle qui est de garantir l’identité d’origine des produits ou des services pour lesquels elle a été enregistrée, aux fins de créer ou de conserver un débouché pour ces produits et services, à l’exclusion d’usages de caractère symbolique ayant pour seul objet le maintien des droits conférés par la marque. De plus, la condition relative à l’usage sérieux de la marque exige que celle-ci, telle qu’elle est protégée dans le territoire pertinent, soit utilisée publiquement et vers l’extérieur [voir arrêt du Tribunal du 27 septembre 2007, La Mer Technology/OHMI – Laboratoires Goëmar (LA MER), T‑418/03, non publié au Recueil, point 54, et la jurisprudence citée].

26      Bien que la notion d’usage sérieux s’oppose donc à tout usage minimal et insuffisant pour considérer qu’une marque est réellement et effectivement utilisée sur un marché déterminé, il n’en reste pas moins que l’exigence d’un usage sérieux ne vise ni à évaluer la réussite commerciale, ni à contrôler la stratégie économique d’une entreprise ou encore à réserver la protection des marques à leurs seules exploitations commerciales quantitativement importantes [arrêt du Tribunal du 23 février 2006, Il Ponte Finanziaria/OHMI – Marine Enterprise Projects (BAINBRIDGE), T‑194/03, Rec. p. II‑445, point 32].

27      Plus précisément, pour examiner, dans un cas d’espèce, le caractère sérieux de l’usage de la marque en cause, il convient de réaliser une appréciation globale des éléments versés au dossier, en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce. Une telle appréciation doit reposer sur l’ensemble des faits et des circonstances propres à établir la réalité de l’exploitation commerciale de celle-ci, en particulier les usages considérés comme justifiés dans le secteur économique concerné pour maintenir ou créer des parts de marché au profit des produits ou des services protégés par la marque, la nature de ces produits ou de ces services, les caractéristiques du marché, l’étendue et la fréquence de l’usage de la marque (voir arrêt LA MER, précité, points 53 à 55, et la jurisprudence citée).

28      Quant à l’importance de l’usage qui a été fait de la marque en cause, il convient de tenir compte, notamment, du volume commercial de l’ensemble des actes d’usage, d’une part, et de la durée de la période pendant laquelle des actes d’usage ont été accomplis ainsi que la fréquence de ces actes, d’autre part (voir arrêt LA MER, précité, point 56, et la jurisprudence citée). Cette appréciation implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte. Ainsi, un faible volume de produits ou de services commercialisés sous ladite marque peut être compensé par une forte intensité ou une certaine constance dans le temps de l’usage de cette marque et inversement (voir arrêt LA MER, précité, point 57, et la jurisprudence citée).

29      Toutefois, plus le volume commercial de l’exploitation de la marque est limité, plus il est nécessaire que le détenteur de la marque apporte des indications supplémentaires permettant d’écarter d’éventuels doutes quant au caractère sérieux de l’usage de la marque concernée [arrêt du Tribunal du 18 janvier 2011, Advance Magazine Publishers/OHMI – Capela & Irmãos (VOGUE), T‑382/08, non publié au Recueil, point 31].

30      En outre, l’usage sérieux d’une marque ne peut être démontré par des probabilités ou des présomptions, mais doit reposer sur des éléments concrets et objectifs qui prouvent une utilisation effective et suffisante de la marque sur le marché concerné (voir arrêt LA MER, précité, point 59, et la jurisprudence citée).

31      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’apprécier si c’est à juste titre que la chambre de recours a estimé que les éléments de preuve apportés par l’intervenante démontraient un usage sérieux de la marque CENTROTHERM pour les produits cités au point 11 ci-dessus. D’après la requérante, la conclusion de la chambre de recours est dépourvue de base factuelle suffisante.

32      En l’espèce, les éléments de preuve fournis par l’intervenante à la division d’annulation pour démontrer l’usage sérieux de sa marque sont la déclaration sur l’honneur de son gérant, quatre factures et quatorze photographies numériques.

33      À titre liminaire, il importe de constater qu’il ne ressort pas du raisonnement de la chambre de recours que sa conclusion relative à l’établissement d’un usage sérieux pour les produits cités au point 11 ci-dessus soit fondée sur la déclaration sur l’honneur du gérant de l’intervenante. En effet, ainsi qu’il découle des points 26 à 30 de la décision attaquée, c’est l’interaction entre la valeur probante des photographies et celle des quatre factures qui a amené la chambre de recours à constater que l’usage sérieux de la marque CENTROTHERM avait été prouvé. Les références, effectuées aux points 27 et 31 de la décision attaquée, à ladite déclaration ne visent qu’à relever les carences de celle-ci et le défaut d’éléments additionnels corroborant son contenu.

34      Il s’ensuit qu’il convient d’examiner si l’appréciation globale des photographies et des quatre factures permet de conclure que la marque litigieuse a fait l’objet d’un usage sérieux conformément aux principes dégagés par la jurisprudence citée aux points 25 à 29 ci-dessus.

35      À cet égard, il y a lieu de relever que, en ce qui concerne les quatre factures, trois d’entre elles sont datées de juillet 2006 et concernent le Danemark, la Hongrie et la Slovaquie, et l’une d’entre elles date de janvier 2007 et concerne l’Allemagne. Le mot « centrotherm » apparaît dans l’en-tête desdites factures, accompagné du logo de l’intervenante faisant fonction de dénomination sociale et de son adresse postale.

36      Ces factures font état de ce que de multiples produits ayant trait à la plomberie (tuyaux, manchons, ensembles pour raccordement de chaudière, coudes de révision, caches pour systèmes d’échappement) ont été vendus par l’intervenante à quatre clients pour une somme qui correspond, en incluant la facture de 2007, à moins de 0,03 % du chiffre d’affaires que le gérant de l’intervenante a déclaré avoir réalisé en 2006 avec la vente de produits sous la marque CENTROTHERM.

37      Il s’ensuit que, devant l’OHMI, l’intervenante a apporté des preuves de vente relativement faibles par rapport à la somme indiquée dans la déclaration de son gérant. Partant, même dans l’hypothèse où la chambre de recours aurait pris en compte ladite déclaration, il conviendrait de constater qu’il n’y a pas suffisamment d’éléments dans le dossier étayant le contenu de celle-ci en ce qui concerne la valeur des ventes. De plus, s’agissant de l’aspect temporel de l’usage de la marque, lesdites factures portent sur une période très brève, voire ponctuelle, à savoir les 12, 18 et 21 juillet 2006 et le 9 janvier 2007.

38      Quant aux photographies déposées, force est de constater que c’est uniquement sur sept des quatorze photographies que la marque CENTROTHERM est clairement visible, à savoir :

–        en tant qu’impression sur deux tuyaux ;

–        en tant qu’impression sur deux objets qui semblent être des parties de tuyaux ;

–        en tant qu’autocollant apposé sur un objet qui semble être une palette et sur deux cartons.

39      Sur quatre autres photographies, il n’est nullement possible de distinguer la trace de la marque litigieuse.

40      Sur les trois dernières photographies, il est possible de discerner des traces de la marque CENTROTHERM, à savoir :

–        les lettres « centroth » sur l’embouchure d’un tuyau ;

–        le logo de la société de l’intervenante ainsi qu’un texte illisible à proximité de ce logo, correspondant probablement au texte de l’en-tête des factures déposées, sur un tuyau et sur un objet qui semble être l’embouchure d’un tuyau.

41      Aucune de ces photographies n’est datée, mais, ainsi qu’exposé au point 18 ci-dessus, l’intervenante a admis au cours de l’audience que ces photographies ont été prises après la période pertinente. En outre, lesdites photographies ne permettent pas d’identifier les produits emballés sur la palette et dans les deux cartons portant les autocollants CENTROTHERM. Si deux de ces autocollants portent une indication relative à la plomberie, ni les photographies ni les factures n’apportent d’éléments permettant de déduire ce que contenaient effectivement ces emballages.

42      Par ailleurs, aucun des numéros d’articles qui sont identifiables sur les photographies ne correspond à des numéros d’articles repris sur les factures fournies par l’intervenante. Il s’ensuit qu’il n’est pas possible de conclure, sur la base des photographies et des factures déposées, que les produits et les emballages visualisés sur les photographies déposées ont effectivement été commercialisés par l’intervenante pendant la période pertinente.

43      Ainsi, force est de constater qu’une appréciation globale des éléments, tels qu’exposés aux points 35 à 42 ci-dessus, ne permet pas de conclure, à moins de recourir à des probabilités ou à des présomptions, que la marque litigieuse a fait l’objet d’un usage sérieux au cours de la période pertinente pour les produits cités au point 11 ci-dessus.

44      Il s’ensuit que la chambre de recours a commis une erreur en estimant que la preuve de l’usage sérieux de la marque CENTROTHERM avait été apportée par l’intervenante pour lesdits produits.

45      Les arguments de l’intervenante, exposés aux points 18 à 20 ci-dessus, selon lesquels, en substance, la spécificité du marché rendrait difficile la réunion des preuves ne sauraient remettre en cause cette conclusion.

46      En effet, les modalités et les moyens de preuve de l’usage sérieux d’une marque ne sont pas limités. La conclusion du Tribunal, selon laquelle l’usage sérieux n’a pas été prouvé en l’espèce, n’est pas due à l’exigence d’un seuil de preuve excessivement élevé, mais au fait que l’intervenante a choisi de restreindre la production de preuves (voir point 8 ci-dessus). La division d’annulation a reçu des photographies d’une qualité inférieure portant sur des objets dont les numéros d’articles ne correspondent pas aux articles qui, selon les rares factures produites, ont été vendus. En outre, lesdites factures couvrent une brève période et font état de ventes d’une valeur minime par rapport à ce que l’intervenante prétend avoir réalisé. Il convient également de constater que l’intervenante a confirmé au cours de l’audience qu’il n’y avait aucun lien direct entres les factures et les photographies qu’elle avait produites devant l’OHMI.

47      Le recours est donc accueilli.

 Sur les dépens

48      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. L’OHMI ayant succombé, il y a lieu de le condamner à supporter les dépens exposés par la requérante, conformément aux conclusions de cette dernière. L’intervenante ayant succombé en ses conclusions, celle-ci supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de la quatrième chambre de recours de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) du 25 août 2009 (affaire R 6/2008‑4) est annulée pour autant qu’elle a partiellement annulé la décision de la division d’annulation du 30 octobre 2007.

2)      L’OHMI supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par centrotherm Clean Solutions GmbH & Co. KG.

3)      Centrotherm Systemtechnik GmbH supportera ses propres dépens.

Moavero Milanesi

Wahl

Soldevila Fragoso

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 15 septembre 2011.

Signatures


* Langue de procédure : l’allemand.