Language of document : ECLI:EU:T:2015:304



DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

21 mai 2015 (*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire figurative représentant une ligne ondulée – Marques nationales et internationale verbales et figuratives antérieures DURU – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑56/14,

Evyap Sabun Yağ Gliserin Sanayi ve Ticaret A.Ş., établie à Istanbul (Turquie), représentée par Me J. Güell Serra, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. Ó. Mondéjar Ortuño, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI ayant été

Megusta Trading GmbH, établie à Zurich (Suisse),

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’OHMI du 6 novembre 2013 (affaire R 1861/2012‑4), relative à une procédure d’opposition entre Evyap Sabun Yağ Gliserin Sanayi ve Ticaret A.Ş. et Megusta Trading GmbH,

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de M. D. Gratsias, président, Mme M. Kancheva et M. C. Wetter (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 24 janvier 2014,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 5 mai 2014,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et ayant dès lors décidé, sur rapport du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 9 août 2011, DVD1.CH GmbH a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1). La marque demandée a ultérieurement été transférée à Megusta Trading GmbH.

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 3 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Articles pour les soins du corps et de beauté ».

4        La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 2011/161, du 26 août 2011.

5        Le 23 novembre 2011, la requérante, Evyap Sabun Yağ Gliserin Sanayi ve Ticaret A.Ş., a formé opposition, au titre de l’article 41 du règlement n° 207/2009, à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée sur les marques antérieures suivantes :

–        la marque tchèque verbale antérieure DURU, enregistrée, sous le numéro 225 515, le 21 juillet 2000 et renouvelée jusqu’au 8 février 2019, désignant notamment des produits relevant de la classe 3 et correspondant à la description suivante : « Produits pour les soins du corps et d’embellissement » ;

–        la marque slovaque verbale antérieure DURU, enregistrée, sous le numéro 192 722, le 19 octobre 2000 et renouvelée jusqu’au 12 février 2019, désignant notamment des produits relevant de la classe 3 et correspondant à la description suivante : « Produits pour les soins du corps et d’embellissement » ;

–        la marque internationale figurative antérieure, reproduite ci-après, enregistrée, sous le numéro 802 256, le 7 novembre 2002, désignant différents produits relevant de la classe 3 :

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–        la marque bulgare figurative antérieure, reproduite ci-après, enregistrée, sous le numéro 29 149, le 24 octobre 1996 et renouvelée jusqu’au 18 décembre 2015 désignant différents produits relevant de la classe 3 :

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–        la marque roumaine figurative antérieure, reproduite ci-après, enregistrée, sous le numéro 31 665, le 31 mai 1999 et renouvelée jusqu’au 6 février 2016, désignant différents produits et services relevant notamment de la classe 3 :

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7        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

8        Le 7 août 2012, la division d’opposition a rejeté l’opposition dans son intégralité.

9        Le 8 octobre 2012, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’opposition. Megusta Trading a demandé que les produits visés dans la demande d’enregistrement soient limités aux « articles pour les soins du corps et de beauté, à savoir gels destinés à une utilisation sexuelle ». La requérante a accepté de retirer son opposition si cette modification était acceptée par la chambre de recours.

10      Par décision du 6 novembre 2013 (ci-après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours a débouté Megusta Trading de sa demande de limitation des produits et a rejeté le recours. Elle a considéré que les produits en cause visaient les consommateurs finaux moyens, dont le niveau d’attention, compte tenu des produits, était plutôt faible. La chambre de recours a commencé par une analyse des marques tchèque et slovaque antérieures (ci-après les « marques antérieures ») et a donc pris en considération le public pertinent présent sur ces territoires.

11      La chambre de recours a considéré que les marques en conflit, vues dans leur ensemble, étaient différentes. Elle a considéré qu’elles étaient visuellement différentes, étant donné que la marque demandée allait être perçue par le public pertinent comme une figure formant une ligne ondulée et non comme une suite de lettres formant un mot. La chambre de recours a toutefois estimé se trouver en présence d’une similitude visuelle légère en raison des éléments figuratifs de la marque demandée, comparables à la lettre « u » présente dans les marques antérieures. Prenant en considération le fait que le public pertinent n’apercevrait pas la marque demandée comme un mot et que la marque DURU n’avait pas de signification pour ledit public, la chambre de recours a conclu qu’il n’était pas possible de faire une comparaison phonétique et conceptuelle des marques en cause. Elle a donc considéré que les marques en cause étaient globalement différentes et que, ainsi, il n’existait pas de risque de confusion.

12      La chambre de recours a, par ailleurs, conclu que, même si l’on considérait qu’il y avait une légère similitude entre les marques en cause, il n’existait pas de risque de confusion dans la perception du public pertinent. À cet égard, elle a considéré que les marques en conflit revêtaient un caractère distinctif intrinsèque moyen et que, même si la lettre « u » des marques antérieures était identifiable dans le signe demandé, la stylisation de ce dernier était telle que la similitude visuelle serait négligeable. La chambre de recours a pris en considération le faible niveau d’attention du public pertinent pour arriver à cette conclusion. Elle a également conclu que, d’un point de vue phonétique, la coïncidence des « u » n’était pas suffisante pour remettre cela en question. Finalement, elle a conclu que l’identité entre les produits ne compensait pas les différences entre les marques en conflit et qu’il n’existait donc pas de risque de confusion dans l’esprit du public pertinent. Elle a retenu la même conclusion à l’égard des autres marques antérieures invoquées par la requérante, en précisant que ces dernières présentaient un degré de similitude encore moins important que les marques qu’elle avait déjà analysées.

 Procédure et conclusions des parties

13      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

14      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

15      La requérante soulève un moyen unique, tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. Dans le cadre de ce moyen, la requérante invoque deux griefs, le premier, tiré d’un dépassement du pouvoir d’appréciation de la chambre de recours et le second, tiré d’une erreur d’appréciation du risque de confusion des marques en conflit.

16      L’OHMI conclut au rejet de ce moyen.

 Sur le premier grief, tiré d’un dépassement du pouvoir de la chambre de recours

17      La requérante allègue que la chambre de recours a outrepassé son pouvoir d’appréciation en considérant, ultra petita, que la marque demandée était une marque figurative et non la marque nuru en lettres stylisées. Elle soutient que ni Megusta Trading ni son prédécesseur en droit n’ont jamais avancé d’arguments dans le sens des conclusions de la chambre de recours. Ces dernières seraient donc incohérentes par rapport à ce qui ressort du dossier et des arguments des parties. La requérante soutient également que cette conclusion est contraire à la désignation de la marque demandée dans les bases de données de l’OHMI et dans d’autres actes, comme la demande d’enregistrement et l’accusé de réception de l’opposition où la marque est désignée par la suite de lettres « nuru ».

18      L’OHMI conteste les arguments de la requérante.

19      Il ressort de la jurisprudence que, par l’effet du recours dont elle est saisie, la chambre de recours est appelée à procéder à un nouvel examen complet du fond de l’opposition, tant en droit qu’en fait [arrêts du 13 mars 2007, OHMI/Kaul, C‑29/05 P, Rec, EU:C:2007:162, point 57, et du 24 mai 2011, ancotel/OHMI – Acotel (ancotel.), T‑408/09, EU:T:2011:241, point 20].

20      À cet égard, force est de constater qu’une opposition à l’enregistrement d’une marque communautaire, lorsqu’elle est fondée sur l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, saisit l’OHMI de la question de l’identité ou de la similitude des marques en conflit ainsi que des produits et des services visés par elles (voir, en ce sens, arrêt ancotel., point 19 supra, EU:T:2011:241, point 21 et jurisprudence citée).

21      Par conséquent, le fait que la partie ayant demandé l’enregistrement de la marque en cause n’ait pas invoqué des arguments devant la chambre de recours ne saurait nullement avoir pour effet de dessaisir l’OHMI de la question de savoir si les signes en conflit ainsi que les services et produits couverts par ceux-ci étaient identiques ou similaires. À cet égard, il doit être précisé que la chambre de recours, lorsqu’elle détermine la perception qu’a le public pertinent d’une marque demandée, n’est nullement liée par les explications données par les parties. Au contraire, ainsi que le fait valoir à juste titre l’OHMI, il appartient à la chambre de recours de procéder à sa propre interprétation des marques en conflit [voir, en ce sens, arrêt du 15 mars 2012, Mustang/OHMI – Decathlon (Trait ondulé), T‑379/08, EU:T:2012:125, point 35].

22      De même, est dénué de pertinence l’argument selon lequel la marque demandée était désignée par la suite de lettres « nuru » dans les bases de données de l’OHMI, dans la demande d’enregistrement et dans l’accusé de réception de l’opposition. En effet, cette circonstance est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée, ladite désignation de la marque demandée ayant exclusivement des fins administratives [arrêt du 30 mai 2013, Brauerei Beck/OHMI – Aldi (Be Light), T‑172/12, EU:T:2013:286, point 29].

23      Il s’ensuit que le premier grief de la requérante doit être rejeté.

 Sur la comparaison des signes

24      En ce qui concerne le risque de confusion, la requérante soutient, en substance, que la chambre de recours a commis une erreur en constatant que la marque demandée « se compos[ait] d’une ligne ondulée divisée en quatre éléments stylisés », qui ne serait pas perçue par le public comme la séquence de lettres « nuru » écrite dans une police stylisée. Elle soutient, à cet égard, que la motivation selon laquelle « l’impression globale donnée par le signe contesté n’est pas celle d’un mot car les éléments ne sont pas placés sur une même ligne » est erronée. Au contraire, la marque demandée sera, selon la requérante, perçue par le public pertinent comme une version stylisée des lettres « n », « u », « r » et « u ».

25      Par conséquent, la requérante se prévaut d’une similitude entre les marques en conflit au regard de leur longueur, de leur structure, du nombre de leurs lettres, de leur couleur et de leurs trois dernières lettres, à savoir « u », « r » et « u », qui sont identiques.

26      La requérante conteste également la conclusion de la chambre de recours selon laquelle les marques sont différentes du fait du degré de stylisation de la marque demandée et l’affirmation selon laquelle « l’identification [de la lettre ‘u’] dans le signe contesté n’est pas suffisante » pour compenser les différences entre les marques en conflit.

27      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

28      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

29      En l’espèce, la chambre de recours a considéré que le territoire pertinent se composait de celui de la République tchèque et de la Slovaquie pour les marques antérieures, avec lesquelles elle a commencé son analyse. Cette appréciation, qui au demeurant n’est pas contestée par les parties, est correcte et doit être confirmée.

30      En ce qui concerne le niveau d’attention du public pertinent, il est de jurisprudence constante que, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir arrêt du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, Rec, EU:T:2007:46, point 42 et jurisprudence citée].

31      La chambre de recours a conclu, au point 20 de la décision attaquée, que les produits visaient les consommateurs finaux moyens, dont le niveau d’attention, compte tenu des produits, était « plutôt faible ».

32      Compte tenu de la nature des produits concernés, à savoir, pour la marque demandée, les « articles pour les soins du corps et de beauté », il y a lieu de considérer que le public pertinent se compose de consommateurs moyens normalement informés et raisonnablement attentifs et avisés, de sorte que l’attention du public pertinent ne saurait être considérée comme étant faible, même s’il s’agit de produits de grande consommation [voir, en ce sens, arrêts du 14 avril 2011, Lancôme/OHMI – Focus Magazin Verlag (ACNO FOCUS), T‑466/08, Rec, EU:T:2011:182, point 49 et jurisprudence citée, et du 22 mai 2012, Olive Line International/OHMI – Umbria Olii International (O·LIVE), T‑273/10, EU:T:2012:246, point 41 et jurisprudence citée].

33      Il s’ensuit qu’en l’espèce, il convient de prendre en considération un consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. À l’occasion du contrôle de légalité de la décision attaquée quant au niveau d’attention du public pertinent, il y a donc lieu de juger que c’est à tort que la chambre de recours a estimé que le niveau d’attention de ce dernier était « plutôt faible ».

34      La chambre de recours a conclu que les produits en cause étaient identiques (point 21 de la décision attaquée). Cette conclusion, qui, au demeurant, n’est pas remise en cause par les parties, doit être confirmée. En effet, les « articles pour les soins du corps et de beauté » désignés par la marque demandée sont identiques aux « produits pour les soins du corps et d’embellissement » couverts par les marques antérieures.

35      S’agissant de la comparaison visuelle des signes, il convient d’abord de considérer que la marque demandée sera généralement perçue dans son ensemble comme une marque composée de quatre éléments figuratifs dépourvus de signification, comme l’a constaté à juste titre la chambre de recours. En effet, la marque demandée sera perçue par le public pertinent comme une figure formant une ligne ondulée et non comme une suite de lettres formant un mot.

36      Cependant, il n’est pas exclu qu’une partie du public pertinent cherchera à donner un sens à la marque demandée. Dans une telle hypothèse, cette partie du public pertinent percevra les quatre éléments figuratifs dont la marque demandée est composée comme des symboles et les interprétera le plus probablement en les comparant aux lettres de l’alphabet latin. Pour cette partie du public pertinent, la marque demandée sera donc perçue comme une suite de lettres fortement stylisées ressemblant le plus probablement à « nuru » ou « nupu », le troisième élément figuratif étant susceptible d’être perçu comme la lettre « r » ou la lettre « p ». Même si certains consommateurs devaient interpréter les éléments figuratifs comme une suite de lettres, il n’en resterait pas moins que le caractère distinctif de la marque demandée ressort de sa forte stylisation et non des éventuelles ressemblances que cette stylisation présente avec des lettres de l’alphabet latin ou une suite de lettres formant, pour la majorité du public pertinent, un mot dépourvu de signification (voir point 42 ci-après). En effet, les lettres à propos desquelles une partie du public pertinent transposera les éléments figuratifs de la marque demandée ne revêtent qu’un faible degré de caractère distinctif intrinsèque, occupant ainsi une place secondaire dans la marque demandée. La forte stylisation des lettres de la marque demandée revêt, en revanche, un caractère distinctif et dominant dans la vision globale de la marque demandée.

37      Les marques antérieures sont composées d’un seul mot, « duru », qui ne se décompose pas en plusieurs éléments.

38      Au vu de ce qui précède, il convient de constater que les marques en conflit présentent des similitudes en ce sens que le deuxième et le dernier élément figuratif de la marque demandée ressemblent à la lettre « u » présente dans les marques antérieures. Les marques en conflit coïncident également en ce qui concerne les trois dernières lettres pour le public pertinent, qui interprétera les éléments figuratifs de la marque demandée comme une suite des lettres « nuru ». Toutefois, ces similitudes ne sauraient compenser les différences visuelles globales que présentent les marques en cause.

39      Il en résulte que lesdites marques ne présentent qu’une faible similitude visuelle même dans l’hypothèse où le public pertinent perçoit la marque demandée comme une suite de lettres.

40      S’agissant de la comparaison phonétique et en tenant compte des considérations qui précèdent, il convient de relever que, pour la partie du public pertinent qui cherchera à interpréter la marque demandée, il existera une certaine similitude avec les marques antérieures DURU, en particulier pour ceux du public pertinent qui prononcera la marque demandée avec les lettres « n », « u », « r » et « u ». La similitude phonétique sera plus faible pour la partie du public pertinent qui prononcera la marque demandée avec les lettres « n », « u », « p » et « u ».

41      Par conséquent, les marques en conflit présentent une faible similitude phonétique.

42      En ce qui concerne la comparaison conceptuelle, il convient de relever qu’aucun élément du dossier ne permet de remettre en cause la conclusion de la chambre de recours selon laquelle la marque demandée est dépourvue de signification pour le public pertinent qui la perçoit comme une marque composée de plusieurs éléments figuratifs (points 22 et 23 de la décision attaquée). Il en va de même pour la suite de lettres « nuru » ainsi que, par ailleurs, pour la suite de lettres « nupu ». Les éléments invoqués par les parties ne permettent pas non plus de remettre en cause la conclusion de la chambre de recours, selon laquelle l’élément verbal « duru » est dépourvu de signification dans les langues du public pertinent (point 23 de la décision attaquée). Dès lors, en l’absence de signification des marques en conflit il n’est pas possible de procéder à une comparaison conceptuelle entre celles-ci [voir, en ce sens, arrêt du 16 septembre 2013, Gitana/OHMI – Teddy (GITANA), T‑569/11, EU:T:2013:462, point 67].

43      Il convient d’examiner l’appréciation du risque de confusion entre les signes en conflit effectuée par la chambre de recours à la lumière des considérations qui précèdent.

44      Dans l’appréciation globale du risque de confusion, les aspects visuel, phonétique ou conceptuel des signes en conflit n’ont pas toujours le même poids. Il importe d’analyser les conditions objectives dans lesquelles les marques peuvent se présenter sur le marché [arrêts du 3 juillet 2003, Alejandro/OHMI – Anheuser-Busch (BUDMEN), T‑129/01, Rec, EU:T:2003:184, point 57, et du 6 octobre 2004, New Look/OHMI – Naulover (NLSPORT, NLJEANS, NLACTIVE et NLCollection), T‑117/03 à T‑119/03 et T‑171/03, Rec, EU:T:2004:293, point 49].

45      L’importance des éléments de similitude ou de différence des signes peut dépendre, notamment, des caractéristiques intrinsèques de ceux-ci ou des conditions de commercialisation des produits ou services que les marques en conflit désignent. Si les produits désignés par les marques en conflit sont normalement vendus dans des magasins en libre-service où le consommateur choisit lui-même le produit et doit, dès lors, se fier principalement à l’image de la marque appliquée sur ce produit, une similitude visuelle des signes sera, en règle générale, d’une plus grande importance. Si, en revanche, le produit visé est surtout vendu oralement, il sera normalement attribué plus de poids à une similitude phonétique des signes (arrêt NLSPORT, NLJEANS, NLACTIVE et NLCollection, point 44 supra, EU:T:2004:293, point 49).

46      Généralement, en ce qui concerne les produits en cause, ceux-ci sont en vente libre dans les grandes surfaces et les clients peuvent les choisir eux-mêmes. Il est également possible que certains des produits en cause soient susceptibles d’être achetés dans des magasins où les consommateurs peuvent se faire assister par les vendeurs. Néanmoins, si une communication orale sur le produit et sur la marque n’est pas exclue, le choix du produit se fait, généralement, de manière visuelle. Partant, la perception visuelle des marques en conflit interviendra normalement, avant l’acte d’achat. L’aspect visuel revêt, de ce fait, plus d’importance dans l’appréciation globale du risque de confusion (voir, en ce sens, arrêt NLSPORT, NLJEANS, NLACTIVE et NLCollection, point 44 supra, EU:T:2004:293, point 50).

47      Au vu de l’importance de l’aspect visuel des marques en cause, de la circonstance que le public pertinent présente un degré d’attention normal et du fait que l’élément distinctif et dominant de la marque demandée réside dans la stylisation forte des lettres même pour la partie du public pertinent qui percevra la marque demandée comme une suite de lettres stylisées, il y a lieu de considérer que c’est à bon droit que la chambre de recours a conclu à l’absence de risque de confusion, même si les produits en cause sont identiques. En effet, les faibles similitudes visuelle et phonétique des marques en cause ne sont pas suffisantes pour compenser les différences entre lesdites marques.

48      Il convient également d’entériner la conclusion de la chambre de recours en ce qui concerne les autres marques antérieures mentionnées dans le point 6 ci-dessus. En effet, celles-ci étant des marques figuratives contenant l’élément verbal « duru » sous des formes légèrement stylisées, elles présentent les mêmes similitudes et différences, voire plus de différences par rapport à la marque demandée, que les marques antérieures examinées ci-dessus. Partant, il n’existe pas de risque de confusion entre ces marques antérieures et la marque demandée.

49      Il s’ensuit que le moyen unique, tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 n’est pas fondé. Par conséquent, il convient de rejeter le recours.

 Sur les dépens

50      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par l’OHMI, conformément aux conclusions de celui-ci.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Evyap Sabun Yağ Gliserin Sanayi ve Ticaret A.Ş. est condamnée aux dépens.

Gratsias

Kancheva

Wetter

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 21 mai 2015.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.