ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)
2 avril 1998 (1)
«Fonctionnaires Suspension de procédure de promotion Procédure
disciplinaire»
Dans l'affaire T-86/97,
Réa Apostolidis, fonctionnaire de la Cour de justice des Communautés
européennes, demeurant à Béreldange (Luxembourg), représentée initialement par
Me Alain Levy, avocat au barreau de Paris, puis par Me Jean-Noël Louis, avocat
au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de la fiduciaire
Myson SARL, 30, rue de Cessange,
contre
Cour de justice des Communautés européennes, représentée par M. Timothy
Millett, conseiller juridique pour les affaires administratives, en qualité d'agent,
assisté de Me Aloyse May, avocat au barreau de Luxembourg, ayant élu domicile
auprès de M. Millett, au siège de la Cour de justice, Kirchberg,
ayant pour objet une demande d'annulation de la décision de la Cour de justice du
11 juillet 1996 de suspendre la procédure de pourvoi de l'un des trois emplois
déclarés vacants par l'avis de vacance CJ 91/95, telle que confirmée par la décision
du 10 décembre 1996 portant rejet explicite de la réclamation introduite par la
requérante contre la première décision, la destruction d'un prétendu dossier
parallèle et le paiement de 1 000 000 BFR en réparation du préjudice moral subi,
LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (quatrième chambre),
composé de Mme P. Lindh, président, MM. K. Lenaerts et J. D. Cooke, juges,
greffier: M. A. Mair, administrateur,
vu la procédure écrite et à la suite de la procédure orale du 22 janvier 1998,
rend le présent
Arrêt
Faits et procédure
- 1.
- La requérante est fonctionnaire de grade A 6 affectée à l'unité A de la division
recherche et documentation de la partie défenderesse.
- 2.
- A partir de 1992, certains fonctionnaires de la partie défenderesse ont été victimes
de lettres injurieuses et d'appels téléphoniques malveillants ainsi que de certaines
dégradations de leurs biens matériels, tous perpétrés anonymement. Les victimes
ont demandé l'assistance de la partie défenderesse pour les protéger contre ces
agissements. Sur demande du greffier de la partie défenderesse du 11 octobre 1995,
M. Cranfield, greffier adjoint, a procédé à une enquête sur ces actes. Les
déclarations des victimes entendues au cours de cette enquête tendaient à mettre
en cause la requérante.
- 3.
- Le 14 février 1996, la partie défenderesse a publié un avis de vacance CJ 91/95
déclarant vacants trois postes d'administrateur principal (carrière A 5/A 4) à la
division recherche et documentation.
- 4.
- Le 16 février 1996, la requérante, promouvable, a posé sa candidature à l'un des
postes en question. Deux autres candidatures émanant de fonctionnaires
promouvables également affectés à la division recherche et documentation (M. R.
et Mme S.) et une manifestation d'intérêt d'un fonctionnaire du cadre LA (M. A.)
ont également été enregistrées.
- 5.
- Après avoir écarté d'emblée la candidature du fonctionnaire du cadre LA, qui ne
pouvait être prise en considération, le chef du service concerné, Mme Maggioni,
directeur de la direction «bibliothèque, recherche et documentation», a proposé,
par voie de promotion, de nommer la requérante, M. R. et Mme S.
- 6.
- Par décision du 28 juin 1996, le greffier de la partie défenderesse, M. Grass, en sa
qualité d'autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après «AIPN»), a donné
son accord pour la promotion de M. R. et de Mme S., mais a suspendu la procédure
de pourvoi du troisième emploi faisant l'objet de l'avis de vacance CJ 91/95 dans
l'attente d'investigations complémentaires à mener sur des faits survenus dans
l'institution pour lesquels la requérante était mise en cause par des tiers. Le 3
juillet 1996, il a informé oralement la requérante des motifs de cette suspension.
- 7.
- Par mémorandum du 11 juillet 1996 (ci-après «décision du 11 juillet 1996»), le
greffier de la partie défenderesse a informé la requérante de ce qui suit: «J'ai
donné mon accord pour la nomination de Mme S. et de M. R. dans deux des trois
emplois déclarés vacants. En revanche, la procédure de pourvoi du troisième
emploi d'administrateur principal est suspendue, pour les raisons que je vous ai
indiquées lors de notre entretien du 3 juillet 1996.»
- 8.
- Le 12 septembre 1996, la requérante a introduit une réclamation au titre de
l'article 90, paragraphe 2, du statut des fonctionnaires des Communautés
européennes (ci-après «statut»), demandant l'annulation de la décision du 11 juillet
1996. Elle a demandé, en outre, la destruction complète sous le contrôle du
Tribunal d'un dossier parallèle la concernant, qu'elle prétendait être tenu par la
partie défenderesse, et le paiement de 1 000 000 BFR à titre de réparation du
préjudice moral résultant de la décision du 11 juillet 1996.
- 9.
- Le 25 octobre 1996, M. Cranfield a remis au greffier ses conclusions sur l'enquête
qu'il avait menée, dans lesquelles il estime que «tout converge pour conclure que
[la requérante] est l'auteur de l'ensemble des agissements dont nos collègues se
plaignent». A la même date, il a adressé à la requérante un mémorandum lui
exposant les résultats de cette enquête, accompagné de copies des pièces y
afférentes les plus importantes, et notamment des 18 lettres anonymes. Sous
couvert d'un mémorandum du 10 décembre 1996, la requérante a communiqué
l'ensemble de ces documents au comité chargé des réclamations, en précisant qu'il
s'agissait des documents qu'elle avait qualifiés dans sa réclamation de dossier
parallèle.
- 10.
- Par décision du 10 décembre 1996, notifiée à la requérante le 7 janvier 1997, le
comité chargé des réclamations a rejeté la réclamation de la requérante aux motifs,
d'une part, que, l'AIPN n'étant pas tenue de donner suite à un avis de vacance
d'emploi, elle est a fortiori en droit de suspendre une procédure de pourvoi lorsque
des investigations concernant le comportement de l'intéressé sont en cours et,
d'autre part, que le dossier dont il est question dans la réclamation est celui des
investigations menées sur des faits commis anonymement et non pas un dossier
relevant de l'article 26 du statut.
- 11.
- Le 7 mars 1997, le greffier a demandé au comité administratif de la partie
défenderesse d'engager, en sa qualité d'AIPN, une procédure disciplinaire à
l'encontre de la requérante.
- 12.
- Après l'introduction du présent recours, le comité administratif de la partie
défenderesse a décidé, en sa qualité d'AIPN, le 14 juillet 1997, d'infliger à la
requérante la sanction disciplinaire de l'avertissement par écrit, prévue à l'article
86, paragraphe 2, sous a), du statut. Le 22 octobre 1997, la requérante a introduit
une réclamation au titre de l'article 90, paragraphe 2, du statut, à l'encontre de
cette décision.
Procédure et conclusions des parties
- 13.
- C'est dans ces conditions que, par requête déposée au greffe du Tribunal le 7 avril
1997, la requérante a introduit le présent recours.
- 14.
- La requérante conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:
annuler la décision de la partie défenderesse du 11 juillet 1996 de suspendre
la procédure de pourvoi d'un troisième emploi déclaré vacant par la
publication de l'avis CJ 91/95;
annuler, pour autant que de besoin, la décision explicite de rejet de la
réclamation du 10 décembre 1996;
ordonner la destruction des pièces constituant le dossier parallèle;
condamner la partie défenderesse à lui verser la somme de 1 000 000 BFR
au titre du préjudice moral subi;
condamner la partie défenderesse aux dépens.
- 15.
- La partie défenderesse conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:
rejeter le recours;
condamner la requérante à supporter l'ensemble des dépens, y compris ceux
de la défenderesse.
- 16.
- Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (quatrième chambre) a décidé d'ouvrir
la procédure orale sans procéder à des mesures d'instruction préalables.
- 17.
- Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux
questions posées par le Tribunal à l'audience du 22 janvier 1998.
Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision de la partie défenderesse
du 11 juillet 1996 et, pour autant que de besoin, de la décision du 10 décembre
1996 portant rejet explicite de la réclamation de la requérante
Sur la recevabilité
- 18.
- Compte tenu de la faculté du Tribunal, en vertu de l'article 113 de son règlement
de procédure, d'examiner d'office les conditions de recevabilité du recours, qui sont
d'ordre public (voir, notamment, arrêt du Tribunal du 17 décembre 1997,
Eiselt/Commission, T-208/96, non encore publié au Recueil, point 21 et la
jurisprudence y citée), il y a lieu d'examiner d'abord si les présentes conclusions
visent à l'annulation d'un acte attaquable.
- 19.
- Le Tribunal constate que, par décision du 28 juin 1996, le greffier de la partie
défenderesse a, en sa qualité d'AIPN, décidé de promouvoir M. R. et Mme S., mais
a suspendu la procédure de pourvoi du troisième emploi faisant l'objet de l'avis de
vacance CJ 91/95 dans l'attente d'investigations complémentaires à mener sur des
faits survenus dans l'institution pour lesquels la requérante était mise en cause par
des tiers. Il ressort des éléments du dossier que, le 3 juillet 1996, la requérante a
été informée oralement de cette décision. Ainsi, dans son mémorandum du 4
novembre 1996, adressé à M. Cranfield, la requérante confirme qu'elle a «été
informée, pour la première fois le 3 juillet 1996, par Monsieur le Greffier de la
Cour qu'une enquête allait être menée sur certaines 'accusations non définies à
l'époque et que cette enquête potentielle justifiait la suspension de [sa]
promotion».
- 20.
- La décision du 11 juillet 1996, dont l'annulation est demandée en l'espèce, est un
acte qui confirme à la requérante le contenu de la décision du 28 juin 1996, dont
elle avait déjà pris connaissance le 3 juillet 1996. En effet, dans la décision du 11
juillet 1996, le greffier de la partie défenderesse a, de nouveau, informé la
requérante qu'il avait donné son accord pour la nomination de Mme S. et de M. R.
dans deux des trois emplois déclarés vacants et que la procédure de pourvoi du
troisième emploi d'administrateur principal était suspendue, pour les raisons qu'il
lui avait indiquées lors de leur entretien du 3 juillet 1996.
- 21.
- Il convient de rappeler que le juge communautaire déclare, en principe, irrecevable
un recours intenté contre un acte qui est purement confirmatif d'un acte antérieur
(voir, notamment, arrêt de la Cour du 11 janvier 1996, Zunis Holding
e.a./Commission, C-480/93 P, Rec. p. I-1, point 14). Cette jurisprudence est,
toutefois, fondée sur le souci de ne pas faire renaître des délais de recours. Dès
lors, un recours contre une décision confirmative n'est irrecevable que si la décision
confirmée est devenue définitive à l'égard de l'intéressé, faute d'avoir fait l'objet
d'un recours contentieux introduit dans les délais requis. Dans le cas où la décisionconfirmée n'est pas devenue définitive, la personne intéressée est en droit
d'attaquer soit la décision confirmée, soit la décision confirmative, soit l'une et
l'autre de ces décisions (voir, notamment, arrêt du Tribunal du 27 octobre 1994,
Chavane de Dalmassy e.a./Commission, T-64/92, RecFP p. II-723, point 25).
- 22.
- En l'espèce, le 12 septembre 1996, la requérante a introduit une réclamation contre
la décision du 11 juillet 1996. Dans la mesure où, le 12 septembre 1996, le délai de
trois mois prévu à l'article 90, paragraphe 2, du statut pour l'introduction d'une
réclamation contre la décision du 28 juin 1996 n'avait pas encore expiré, la
requérante était, à la lumière de la jurisprudence précitée, en droit de diriger sa
réclamation contre la décision confirmative du 11 juillet 1996 ou contre la décision
du 28 juin 1996. Comme, en outre, le Tribunal a, conformément à l'article 91,
paragraphe 3, du statut, été saisi du recours dans un délai de trois mois suivant la
notification à la requérante de la décision explicite de rejet de sa réclamation, les
conclusions en annulation sont recevables.
- 23.
- A l'audience, la partie défenderesse a, toutefois, insisté sur le prétendu caractère
prématuré du recours. Elle rappelle à cet effet que la requérante a introduit une
réclamation contre la sanction disciplinaire de l'avertissement par écrit qui lui a été
infligée le 14 juillet 1997.
- 24.
- Il convient d'abord de rappeler que l'acte dont l'annulation est demandée, à savoir
la décision du 11 juillet 1996, suspend la procédure de pourvoi d'un troisième
emploi à la division recherche et documentation de la partie défenderesse, déclaré
vacant par la publication de l'avis CJ 91/95. Il s'agit d'un acte faisant grief à la
requérante au sens de l'article 90, paragraphe 2, du statut. En effet, comme la
requérante était le seul candidat à l'emploi pour lequel la procédure de pourvoi a
été suspendu (voir ci-dessus points 4 à 6), l'acte attaqué la place dans une situation
d'attente et d'incertitude quant à son avenir professionnel. Dès lors, l'objet du
présent recours est manifestement distinct de l'objet de la procédure
précontentieuse dirigée par la requérante contre la sanction de l'avertissement par
écrit qui lui a été infligée en vertu de l'article 86, paragraphe 2, sous a), du statut.
En admettant même que, à la suite de l'introduction de la réclamation contre cette
sanction disciplinaire, la partie défenderesse fasse droit aux prétentions de la
requérante et retire la sanction imposée, il n'en resterait pas moins que l'acte
attaqué, qui suspend la procédure de pourvoi d'un emploi pour lequel elle était le
seul candidat, continuerait à lui faire grief.
- 25.
- Il s'ensuit que l'argument de la partie défenderesse tiré du prétendu caractère
prématuré du recours doit être rejeté et que les conclusions en annulation doivent
être déclarées recevables.
Sur le fond des conclusions en annulation
- 26.
- La requérante invoque sept moyens à l'appui de ses conclusions en annulation. Le
premier est pris d'une violation de l'article 26 du statut. Le deuxième est tiré d'une
violation des articles 6 et 10 de la convention européenne de sauvegarde des droits
de l'homme et des libertés fondamentales (ci-après «CEDH»). Le troisième est
pris du défaut de base légale de la décision du 11 juillet 1996 et d'une violation du
principe d'égalité de traitement. Le quatrième est tiré de la contradiction de motifs
entachant la décision de rejet de la réclamation du 10 décembre 1996. Le
cinquième moyen est pris d'un défaut de motivation de la décision du 11 juillet
1996, et le sixième moyen est tiré d'un détournement de procédure et de pouvoir.
Le septième moyen, enfin, est pris d'une erreur manifeste d'appréciation.
Sur le premier moyen, tiré d'une violation de l'article 26 du statut
Arguments des parties
- 27.
- La requérante fait valoir que l'obligation énoncée à l'article 26 du statut, d'inclure
dans le dossier individuel du fonctionnaire toutes pièces concernant sa situation
administrative et tous rapports concernant sa compétence, son rendement ou son
comportement, revêt un caractère clair et inconditionnel. L'article 26 du statut
interdirait la tenue par l'administration d'un dossier parallèle sur un fonctionnaire
(arrêt du Tribunal du 11 octobre 1995, Baltsavias/Commission, T-39/93 et T-553/93,
RecFP p. II-695, point 39). Ainsi, cette disposition du statut aurait pour but d'éviter
que des décisions affectant la situation administrative et la carrière du fonctionnaire
concerné ne soient fondées sur des faits concernant son comportement non versés
à son dossier personnel et non communiqués à l'intéressé (arrêt de la Cour du 12
novembre 1996, Ojha/Commission, C-294/95 P, Rec. p. I-5863, point 57, et
jurisprudence y citée).
- 28.
- Or, aux dates auxquelles la décision du 11 juillet 1996 et la décision de rejet de la
réclamation ont été prises, le dossier individuel de la requérante n'aurait contenu
aucun élément critique quant à son comportement. Il ressortirait, toutefois, de la
décision de rejet de la réclamation que la décision du 11 juillet 1996 a été prise non
sur la base du dossier individuel de la requérante mais sur la base d'un dossier
parallèle en violation des dispositions de l'article 26 du statut. En effet, la décision
du 11 juillet 1996 serait fondée sur un motif unique, à savoir l'existence de
certaines accusations qui, bien que formulées contre la requérante par d'autres
fonctionnaires, n'auraient pas été portées à sa connaissance. Ainsi, la requérante
se serait vu notifier une décision qui porte gravement atteinte à son honneur et à
sa probité professionnelle alors même qu'elle aurait été dans l'impossibilité de
présenter des observations sur les documents qui ont fondé cette décision.
- 29.
- Enfin, la requérante fait valoir que le refus de la promouvoir en raison de
l'ouverture d'une procédure disciplinaire a eu, en fait, pour conséquence de lui
infliger, en violation du principe de la présomption d'innocence, une sanction
indirecte de rétrogradation.
- 30.
- La partie défenderesse rétorque que le prétendu dossier parallèle dont fait état la
requérante est celui de l'enquête sur des faits partiellement commis de façon
anonyme qui a abouti à l'ouverture d'une procédure disciplinaire à l'encontre de
la requérante. Il ne s'agirait pas de pièces intéressant la situation administrative de
la requérante ni d'un rapport concernant sa compétence, son rendement ou son
comportement, au sens de l'article 26 du statut. Le dossier de l'enquête ne
constituerait donc aucunement un dossier parallèle interdit par l'article 26 du statut.
Dans sa duplique, elle fait encore observer que la seule pièce de la procédure
disciplinaire qu'il convenait de verser au dossier personnel de la requérante, à
savoir la décision du 14 juillet 1997 qui lui a infligé une sanction disciplinaire, a été
effectivement versée à son dossier personnel.
- 31.
- Elle ajoute que, à supposer même que les pièces en question aient pu être
qualifiées de dossier au sens de l'article 26 du statut, le fait que celles-ci n'aient pas
été versées au dossier personnel de la requérante ne lui aurait porté aucun
préjudice. En effet, ces pièces auraient été communiquées à la requérante et celle-ci aurait été invitée à formuler ses remarques à leur égard. Dans sa duplique, la
partie défenderesse fait encore valoir qu'une décision de suspension de la
procédure de pourvoi d'un emploi ne saurait être assimilée à une sanction
disciplinaire.
Appréciation du Tribunal
- 32.
- L'article 26, premier alinéa, du statut dispose que le dossier individuel du
fonctionnaire doit contenir «toutes pièces intéressant sa situation administrative et
tous rapports concernant sa compétence, son rendement ou son comportement».
En vertu de l'article 26, cinquième alinéa, il «ne peut être ouvert qu'un dossier
pour chaque fonctionnaire».
- 33.
- Il ressort d'une jurisprudence constante que l'article 26 du statut a pour but d'éviter
que des décisions prises par l'AIPN et affectant la situation administrative et la
carrière du fonctionnaire concerné ne soient fondées sur des faits concernant son
comportement non versés à son dossier personnel et non communiqués à l'intéressé
(arrêt Ojha/Commission, précité, point 57, et jurisprudence citée). Dans le cadre
de ce moyen, la requérante dénonce notamment le fait que la décision du 11 juillet
1996 aurait été fondée sur des éléments qui ne figuraient pas dans son dossier
individuel.
- 34.
- Il convient de souligner que la présente affaire ne concerne pas une décision de
l'AIPN portant rejet de la candidature de la requérante pour le troisième poste
déclaré vacant par la publication de l'avis CJ 91/95 (ci-après «troisième poste»).
En l'espèce, l'AIPN a uniquement suspendu l'adoption d'une décision sur la
carrière de la requérante. En effet, la décision du 28 juin 1996 confirmée à la
requérante par note du 11 juillet 1996 a eu pour seul effet de laisser en suspens la
promotion éventuelle de celle-ci.
- 35.
- Le Tribunal rappelle que, à l'époque où l'AIPN a pris la décision de suspendre la
procédure de pourvoi du troisième poste, des accusations avaient été formulées à
l'encontre de la requérante. Selon ces accusations, elle était le prétendu auteur de
lettres injurieuses et d'appels téléphoniques malveillants ainsi que de certaines
dégradations de biens matériels appartenant à d'autres fonctionnaires. Ces
accusations étaient de nature à jeter un doute sur le point de savoir si le dossier
individuel de la requérante comportait toutes les informations pertinentes
concernant son comportement. C'est donc dans le souci de prendre une décision
quant à l'éventuelle promotion de la requérante sur la base d'un dossier complet
que l'AIPN a décidé la suspension de la procédure de pourvoi du troisième poste.
- 36.
- Le prétendu dossier parallèle est, comme le fait observer à juste titre la partie
défenderesse, le dossier d'enquête qui, en l'espèce, a conduit à l'ouverture d'une
procédure disciplinaire contre la requérante. Il convient de souligner que l'article
26 du statut n'interdit nullement à une institution d'ouvrir une enquête et de
constituer un dossier à cet effet. Les seules pièces relatives à une enquête qui
intéressent la situation administrative d'un fonctionnaire particulier, et qui doivent
donc être jointes au dossier du fonctionnaire, sont les éventuelles décisions de
sanction qui ont été prises sur la base du dossier d'enquête.
- 37.
- En l'espèce, la procédure disciplinaire, qui a été ouverte à la suite de l'enquête
menée par M. Cranfield, a conduit à l'adoption par l'AIPN de la décision du 14
juillet 1997, imposant à la requérante la sanction de l'avertissement par écrit,
prévue à l'article 86, paragraphe 2, sous a), du statut. Il ressort d'une note du 15
juillet 1997 adressée à la requérante par M. Pommiès, chef de la division du
personnel, que l'original de cette décision a été versée à son dossier individuel.
- 38.
- L'ajout de la décision du 14 juillet 1997 au dossier individuel de la requérante a
éclairé l'AIPN sur le rôle précis joué par celle-ci dans les différents agissements
commis anonymement au sein de l'institution. L'AIPN est maintenant à même de
prendre une décision définitive sur l'éventuelle promotion de la requérante sur la
base d'un dossier individuel complet comportant toutes les pièces pertinentes
concernant sa compétence, son rendement et son comportement.
- 39.
- Il s'ensuit que la décision du 11 juillet 1996 et la décision de rejet de la réclamation
ont été prises dans le plein respect des dispositions de l'article 26 du statut.
- 40.
- Quant à l'argument de la requérante selon lequel la décision du 11 juillet 1996 lui
aurait imposé, en fait, la sanction de rétrogradation, le Tribunal constate que cet
argument manque en fait. En effet, d'une part, la décision du 11 juillet 1996 n'aimposé aucune sanction disciplinaire à la requérante. C'est la décision du 14 juillet
1997 qui lui a infligée une sanction disciplinaire, à savoir l'avertissement par écrit
et non la rétrogradation, prévue à l'article 86, paragraphe 2, sous e), du statut.
D'autre part, la requérante, fonctionnaire de grade A 6, reste promouvable par une
éventuelle promotion au troisième poste, relevant de la carrière A 5/A 4, dont la
procédure de pourvoi a été suspendue.
- 41.
- Le premier moyen doit donc être rejeté.
Sur le deuxième moyen, tiré d'une violation des dispositions des articles 6 et 10 de
la CEDH
Arguments des parties
- 42.
- La requérante fait valoir que la détention d'un dossier parallèle, dont les pièces le
constituant échappent à la connaissance de la personne intéressée, qui ne peut dès
lors valablement se défendre, viole les articles 6 et 10 de la CEDH. Par ailleurs, la
requérante étant présumée innocente, l'AIPN n'aurait pas été en droit de tenir
compte de ce dossier pour décider de suspendre la procédure de pourvoi du poste
brigué par la requérante.
- 43.
- La partie défenderesse rétorque que l'article 6 de la CEDH ne s'applique pas dans
le domaine disciplinaire de la fonction publique communautaire, étant donné
qu'une procédure disciplinaire ne relève pas de la «matière pénale» au sens dudit
article (arrêt du Tribunal du 17 octobre 1991, de Compte/Parlement, T-26/89, Rec.
p. II-781, point 94). En ce qui concerne l'article 10 de la CEDH, la partie
défenderesse explique que cette disposition vise la liberté de recevoir des
informations en tant que contrepartie de la liberté d'expression. Cette liberté ne
viserait pas des situations telles que celle en cause et ne serait donc pas applicable.
Par ailleurs, l'argument de la requérante serait fondé sur une version inexacte des
faits, eu égard au fait que les informations essentielles lui ont été communiquées
notamment sous couvert du mémorandum de M. Cranfield du 25 octobre 1996.
Appréciation du Tribunal
- 44.
- Il convient de souligner que la décision du 11 juillet 1996, bien qu'elle fasse grief
à la requérante en la mettant dans une situation d'attente et d'incertitude quant à
son avenir professionnel, ne peut être considérée comme une sanction. En effet,
cette décision suspend uniquement la procédure de promotion en ce qui concerne
la requérante jusqu'à ce que l'AIPN ait été éclairée, par les résultats de l'enquête
et l'éventuelle procédure disciplinaire, sur le rôle de celle-ci dans les différents
agissements commis anonymement au sein de l'institution défenderesse. La décision
attaquée n'affecte donc pas les chances de la requérante d'être promue en vertu
de l'article 45 du statut. Par ailleurs, rien n'empêche l'AIPN, appelée à prendre une
décision finale sur le pourvoi du troisième poste, de promouvoir éventuellement la
requérante avec effet rétroactif jusqu'à la date à laquelle la décision de suspension
de la procédure de pourvoi a été prise, afin d'anéantir l'effet résultant de ladite
suspension.
- 45.
- Comme il ressort d'une jurisprudence constante que, dans le cadre d'une procédure
disciplinaire, l'article 6 de la CEDH ne peut être invoqué à l'encontre de
l'institution défenderesse (arrêts du Tribunal de Compte/Parlement, précité, point
94, et du 15 mai 1997, N/Commission, T-273/94, RecFP p. II-289, point 95), cette
conclusion s'impose d'autant plus lorsque, comme en l'espèce, la décision prise ne
peut même pas être qualifiée de sanction. L'argument de la requérante tiré d'une
violation de l'article 6 de la CEDH doit donc être rejeté.
- 46.
- En ce qui concerne l'argument tiré d'une violation de l'article 10 de la CEDH, en
ce que la requérante n'aurait pas eu accès au prétendu dossier parallèle, il convient
de rappeler que ce dernier est constitué des pièces recueillies par la partie
défenderesse au cours de l'enquête qu'elle a menée sur des faits commis
anonymement au sein de l'institution. La seule décision qui a été prise par
l'institution défenderesse sur la base de ce dossier d'enquête est celle du 14 juillet
1997, infligeant à la requérante la sanction de l'avertissement par écrit, prévue à
l'article 86, paragraphe 2, sous a), du statut. Il s'ensuit que la partie défenderesse
n'était tenue de communiquer les éléments du dossier d'enquête à la requérante
que dans le cadre de cette procédure disciplinaire et non dans le cadre de
l'adoption de la décision attaquée, qui ne peut d'ailleurs être qualifiée de sanction.
Le présent argument doit donc être écarté.
- 47.
- En ce qui concerne, enfin, l'argument tiré de la violation de la présomption
d'innocence, le Tribunal estime que ce principe aurait pu être violé si la partie
défenderesse avait refusé la promotion de la requérante sur la base des seules
accusations formulées à son encontre. Toutefois, en l'espèce, la décision attaquée
n'a fait que suspendre la décision sur l'éventuelle promotion de la requérante afin
de mener une enquête sur la matérialité des faits dénoncés par certains
fonctionnaires et son implication dans ces faits. Dans de telles circonstances, il ne
saurait être question d'une violation de la présomption d'innocence.
- 48.
- Il s'ensuit que le deuxième moyen doit aussi être rejeté.
Sur le troisième moyen, tiré du défaut de base légale de la décision du 11 juillet
1996 et d'une violation du principe d'égalité de traitement
Arguments des parties
- 49.
- La requérante fait valoir que l'article 45 du statut ne prévoit pas la possibilité pour
l'AIPN de suspendre une procédure de promotion par voie de candidature à un
emploi déclaré vacant, pour quelque cause que se soit. En vertu de cette
disposition du statut, la requérante aurait le droit d'obtenir une décision de
promotion ou de refus de promotion, sur la base des seuls rapports de notation la
concernant ainsi que de la proposition favorable de son supérieur hiérarchique
direct (arrêts du Tribunal du 3 mars 1993, Vela Palacios/CES, T-25/92, Rec. p. II-201, et du 16 décembre 1993, Moat/Commission, T-58/92, Rec. p. II-1443).
- 50.
-
La décision du 11 juillet 1996 violerait également le principe d'égalité de
traitement. En effet, contrairement à la requérante, les deux fonctionnaires promus
auraient été jugés sur leurs seuls dossiers individuels (voir arrêts du Tribunal du 7
février 1991, Tagaras/Cour de justice, T-18/89 et T-24/89, Rec. p. II-53, point 68,
et du 9 février 1994, Lacruz Bassols/Cour de justice, T-109/92, RecFP p. II-105,
point 87).
- 51.
- La partie défenderesse rétorque qu'il est de jurisprudence constante que, dès lors
qu'une procédure de recrutement est entamée, l'AIPN n'est pas tenue d'y donner
suite en pourvoyant à l'emploi mis en vacance (arrêts de la Cour du 24 juin 1969,
Fux/Commission, 26/68, Rec. p. 145, et du 1er décembre 1983, Morina/Parlement,
18/83, Rec. p. 4051; arrêt du Tribunal du 14 février 1990, Hochbaum/Commission,
T-38/89, Rec. p. II-43). Or, si l'AIPN a le pouvoir de ne pas donner suite à un avis
de vacance d'emploi, elle aurait a fortiori le droit de simplement surseoir à prendre
une décision à cet égard, et cela d'autant plus lorsque des motifs importants le
justifient. Elle ajoute que, dans le cas d'espèce, une enquête, destinée à vérifier la
réalité des faits et à identifier leur auteur en vue de l'engagement d'une procédure
disciplinaire à son encontre, était en cours.
- 52.
- La partie défenderesse rappelle que la promotion de la carrière A 7/A 6 à la
carrière A 5/A 4 implique l'accession du fonctionnaire à des fonctions de gestion
et que l'institution investit ainsi l'intéressé de certains pouvoirs hiérarchiques
permettant de diriger des subordonnés. Promouvoir en juillet 1996 le principal
suspect des faits en question, à savoir la requérante, aurait pu annihiler les effets
de l'enquête et de l'éventuelle procédure disciplinaire, contrairement au principe
de bonne administration, et aurait pu priver les victimes de la protection à laquelle
elles ont droit en vertu de l'article 24 du statut et du principe de sollicitude. Pour
ces raisons, l'AIPN aurait eu non seulement le pouvoir mais le devoir de procéder
à la suspension en question.
Appréciation du Tribunal
- 53.
- Il convient de rappeler que la requérante est fonctionnaire de grade A 6 et que
l'avis de vacance CJ 91/95 portait sur le pourvoi de trois postes d'administrateur
principal de la carrière A 5/A 4. Le 28 juin 1996, l'AIPN a pris la décision, qui a
été confirmée à la requérante par note du 11 juillet 1996, de suspendre la
procédure de pourvoi du troisième poste. Comme la requérante était le seul
candidat pour ce poste, la décision de l'AIPN de suspendre la procédure de
pourvoi constitue pour elle une décision suspendant sa promotion.
- 54.
- En vertu de l'article 45 du statut, le pouvoir de promotion des fonctionnaires
appartient à l'AIPN. Quant à la question de savoir si cette disposition accorde aussi
à l'AIPN la compétence pour suspendre une procédure de promotion déjà engagée,
il convient de rappeler que, en l'espèce, la procédure de promotion de la
requérante s'inscrit dans le cadre d'une procédure de pourvoi d'un poste déclaré
vacant. Or, il ressort d'une jurisprudence constante que l'AIPN n'est pas tenue de
donner suite à une procédure de pourvoi d'un poste engagée s'il existe des raisons
objectives qui justifient une telle décision (arrêts du Tribunal du 19 octobre 1995,
Obst/Commission, T-562/93, RecFP p. II-737, point 35, du 21 juin 1996,
Moat/Commission, T-41/95, RecFP p. II-939, point 38, du 18 mars 1997,
Rasmussen/Commission, T-35/96, RecFP p. II-187, point 60, et jurisprudence y
citée). Il s'ensuit que l'AIPN, qui aurait même eu la compétence pour clore
définitivement la procédure de pourvoi du troisième poste, s'il avait existé des
raisons objectives justifiant une telle décision, doit être considérée comme étant
également compétente pour suspendre une telle procédure pour des raisons
objectives.
- 55.
- Ensuite, il ressort d'une jurisprudence constante que l'AIPN dispose d'un large
pouvoir d'appréciation dans le cadre de l'exercice des compétences qui lui sont
attribuées en vertu de l'article 45 du statut. Le contrôle du juge communautaire
doit se limiter à la question de savoir si, eu égard aux voies et moyens qui ont pu
conduire l'administration à son appréciation, celle-ci s'est tenue dans des limites
non critiquables et n'a pas usé de son pouvoir de manière manifestement erronée
(arrêt de la Cour du 23 octobre 1986, Vaysse/Commission, 26/85, Rec. p. 3131,
point 26, et arrêt Obst/Commission, précité, point 44). Il convient encore d'ajouter
que les fonctionnaires, même s'ils réunissent les conditions pour pouvoir être
promus, n'ont pas pour autant un droit subjectif à la promotion (arrêts du Tribunal
du 9 février 1994, Latham/Commission, T-3/92, RecFP p. II-83, point 50, du 30
novembre 1995, Branco/Cour des comptes, T-507/93, RecFP p. II-797, point 28, du
6 juin 1996, Baiwir/Commission, T-262/94, RecFP p. II-739, point 67, et
Rasmussen/Commission, précité, point 59).
- 56.
- Le Tribunal constate que la partie défenderesse a décidé de suspendre la
procédure de pourvoi du troisième poste parce qu'elle voulait mener une enquête
sur des faits survenus dans l'institution pour lesquels la requérante était mise en
cause par des tiers. En prenant cette décision, la partie défenderesse a voulu
concilier à la fois les intérêts de l'institution et ceux de la requérante.
- 57.
- Ainsi, d'une part, la décision de suspendre la procédure de pourvoi du troisième
poste n'affecte pas d'une manière irrémédiable les intérêts de la requérante. En
effet, l'AIPN n'a fait que suspendre temporairement la procédure de pourvoi du
poste en question pour pouvoir déterminer l'éventuelle responsabilité de la
requérante dans certains faits commis anonymement au sein de l'institution
défenderesse. Bien que la décision prise par l'AIPN fasse grief à la requérante en
la mettant dans une situation d'attente et d'incertitude quant à son avenir
professionnel, la décision n'affecte pas ses chances d'être promue en vertu de
l'article 45 du statut, éventuellement avec effet rétroactif (voir ci-dessus point 44).
- 58.
- D'autre part, la décision de l'AIPN de suspendre la procédure de pourvoi du
troisième poste sauvegarde également les intérêts de l'institution défenderesse. En
effet, il est dans son intérêt que seules des personnes ayant une conduite
professionnelle irréprochable soient nommées à des postes de responsabilité. Si
l'AIPN n'avait pas suspendu la procédure et avait promu la requérante en
négligeant les faits pour lesquels la requérante avait été mise en cause, elle aurait
couru le risque d'être amenée à constater, à la fin de l'enquête, qu'elle avait promu
à un poste à responsabilité une personne qui ne le méritait pas.
- 59.
- Il résulte de tout ce qui précède que la décision de l'AIPN de suspendre la
procédure de pourvoi du troisième poste a été fondée sur une raison objective, à
savoir la volonté de l'AIPN d'enquêter sur des faits survenus dans l'institution
défenderesse pour lesquels la requérante était mise en cause par des tiers. La
requérante, qui ne peut faire valoir aucun droit subjectif à la promotion, n'a
nullement démontré que l'AIPN, en prenant une décision ayant pour seul effet la
mise en suspens d'une décision sur sa promotion, ne se serait pas tenue dans des
limites non critiquables ou aurait usé de son pouvoir de manière manifestement
erronée (arrêts Vaysse/Commission, précité, point 26, et Obst/Commission, précité,
point 44). Au contraire, la décision de l'AIPN du 28 juin 1996, confirmée à la
requérante par note du 11 juillet 1996, est fondée sur une mise en balance
équilibrée des intérêts de cette dernière et de la partie défenderesse.
- 60.
- Il s'ensuit que l'argument de la requérante tiré d'un défaut de base légale ou d'une
violation de l'article 45 du statut doit être rejeté.
- 61.
- En ce qui concerne la prétendue violation du principe d'égalité de traitement, il
convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, il y a violation de ce
principe lorsque deux catégories de personnes dont les situations juridiques et
factuelles ne présentent pas de différence essentielle se voient appliquer un
traitement différent ou lorsque des situations différentes sont traitées de manière
identique (arrêts du Tribunal Tagaras/Cour de justice, précité, point 68, et du 5
février 1997, Ibarra Gil/Commission, T-207/95, RecFP p. II-31, point 68).
- 62.
- Le Tribunal constate qu'il existe une différence objective entre la situation de la
requérante et celle des deux autres fonctionnaires promus à la suite de la décision
du 28 juin 1996, de nature à justifier la différence de traitement. En effet,
contrairement à la requérante, les deux autres fonctionnaires qui ont été promus
n'ont pas été mis en cause à l'occasion des agissements pour lesquels une enquête
a été ouverte le 11 octobre 1995.
- 63.
- Il résulte de tout ce qui précède que le troisième moyen doit être rejeté dans son
intégralité.
Sur le quatrième moyen, tiré de la contradiction de motifs entachant la décision de
rejet de la réclamation du 10 décembre 1996
Arguments des parties
- 64.
- La requérante fait valoir que la décision de rejet de la réclamation contient deux
contradictions de motifs. D'une part, la décision admettrait le caractère anonyme
des faits à la base de l'enquête menée tout en les mettant à la charge de la
requérante pour justifier la suspension de la procédure de pourvoi du troisième
poste déclaré vacant à la division recherche et documentation de la partie
défenderesse. D'autre part, la requérante fait observer que la matérialité des faits
n'était pas encore établie à la date à laquelle la décision de rejet de la réclamation
a été prise. Or, fonder une décision de suspension sur la base de faits non encore
établis procéderait d'une motivation irrégulière. Il résulterait, en effet, de la
jurisprudence que, si l'administration doit, en présence d'un incident incompatible
avec l'ordre et la sécurité du service, intervenir avec toute l'énergie nécessaire en
vue d'établir les faits et d'en tirer, en connaissance de cause, les conséquences
appropriées, elle ne saurait cependant prendre des sanctions disciplinaires à
l'encontre d'un fonctionnaire que si les mesures d'instruction ordonnées établissent
avec certitude l'existence d'un comportement portant atteinte au bon
fonctionnement du service ou à la dignité et à la réputation d'un autre
fonctionnaire (arrêt de la Cour du 9 novembre 1989, Katsoufros/Cour de justice,
55/88, Rec. p. 3579, points 15 et 16).
- 65.
- La partie défenderesse attire l'attention sur le fait que ce moyen vise exclusivement
la décision de rejet de la réclamation de la requérante du 10 décembre 1996. Par
conséquent, même si les arguments sous-tendant le présent moyen étaient jugés
valables, ils ne pourraient pas affecter la validité de la décision du greffier prise le
28 juin 1996, et confirmée par écrit le 11 juillet 1996.
- 66.
- En tout état de cause, le moyen serait non fondé. En effet, la partie défenderesse
estime que la motivation de la décision de rejet de la réclamation est cohérente.
Elle porterait sur différents problèmes en raison du contenu de la réclamation qui
avait été soumise à l'attention de l'AIPN. Le présent moyen serait ainsi empreint
de mauvaise foi parce qu'il reprocherait à l'AIPN d'avoir répondu aux différents
points soulevés dans la réclamation.
Appréciation du Tribunal
- 67.
- Le Tribunal constate, tout d'abord, que la décision de rejet de la réclamation n'a
pas mis à la charge de la requérante les faits commis anonymement au sein de
l'institution défenderesse. Au contraire, comme les déclarations des victimes de ces
faits tendaient à mettre en cause la requérante, l'AIPN a décidé de suspendre la
procédure de pourvoi en question dans l'attente des résultats d'une enquête à
mener qui devaient l'éclairer sur l'implication réelle de celle-ci.
- 68.
- L'argument de la requérante selon lequel la décision de rejet de la réclamation
contiendrait une contradiction de motifs, parce qu'elle admettrait le caractère
anonyme des faits à la base de l'enquête menée tout en les mettant à sa charge
pour justifier la suspension de la procédure de pourvoi du troisième poste, doit
donc être rejeté.
- 69.
- En ce qui concerne ensuite l'argument tiré d'une prétendue irrégularité de la
motivation de la décision de rejet de la réclamation, en ce qu'elle aurait été fondée
sur des faits non établis, le Tribunal constate que cet argument se confond avec le
sixième moyen et doit être rejeté pour les motifs mentionnés aux points 85 et 86
ci-après.
- 70.
- Il s'ensuit que le quatrième moyen doit aussi être rejeté.
Sur le cinquième moyen, tiré d'un défaut de motivation de la décision du 11 juillet
1996
Arguments des parties
- 71.
- La requérante estime que l'AIPN aurait dû motiver sa décision du 11 juillet 1996.
Il ne s'agirait pas, en l'espèce, d'une décision de rejet d'une candidature qui peut
encore être motivée au stade du rejet de la réclamation.
- 72.
- La partie défenderesse rétorque que son greffier a donné à la requérante, lors de
l'entretien du 3 juillet 1996, des informations suffisantes pour que celle-ci soit en
mesure de comprendre la décision de suspension de la procédure. Elle explique
que le mémorandum du greffier du 11 juillet 1996 fait référence aux raisons que
le greffier avait indiquées à la requérante lors de cet entretien. Par ailleurs, la
motivation de la décision du greffier aurait été une nouvelle fois explicitée dans la
décision de rejet de la réclamation.
Appréciation du Tribunal
- 73.
- Le Tribunal rappelle que, selon une jurisprudence constante, l'obligation de
motiver une décision a pour but, d'une part, de fournir à l'intéressé les indications
nécessaires pour savoir si la décision est ou non bien fondée et, d'autre part, de
permettre au juge communautaire d'exercer son contrôle sur la légalité de la
décision (voir, par exemple, arrêts du Tribunal du 19 septembre 1996,
Brunagel/Parlement, T-158/94, RecFP p. II-1131, point 106, et du 18 mars 1997,
Picciolo et Caló/Comité des régions, T-178/95 et T-179/95, RecFP p. II-155, point
33). Pour juger du caractère suffisant de la motivation d'une décision, il y a lieu de
la replacer dans le contexte dans lequel s'est inscrite son adoption (voir,
notamment, arrêt de la Cour du 14 février 1990, Delacre e.a./Commission, C-350/88, Rec. p. I-395, point 16, et les arrêts du Tribunal du 5 juin 1992,
Finsider/Commission, T-26/90, Rec. p. II-1789, point 72, et du 17 mai 1995,
Benecos/Commission, T-16/94, RecFP p. II-335, point 33).
- 74.
- Le Tribunal constate que le greffier de la partie défenderesse, dans la décision du
11 juillet 1996, mentionne: «La procédure de pourvoi du troisième emploi
d'administrateur principal est suspendue, pour les raisons que je vous ai indiquées
lors de notre entretien du 3 juillet 1996.»
- 75.
- La requérante a expliqué dans sa réclamation du 12 septembre 1996 (point II,
deuxième et troisième alinéas), que le greffier de la partie défenderesse, M. Grass,
l'a entre autres informée, à l'occasion de l'entretien du 3 juillet 1996, «qu'un
certain nombre de lettres, soit anonymes, soit portant le nom d'une ex-collègue [de
la requérante] [...] circulaient dans l'institution et que différentes 'plaintes avaient
été formulées contre [sa] personne, sans toutefois préciser le contenu de celle-ci ou
l'identité des plaignants. M. Grass a, par la suite, indiqué que tant les lettres que
les plaintes étaient, en qualité et quantité, suffisamment importantes pour
constituer un dossier faisant obstacle, tout au moins dans l'immédiat, à [sa]
nomination et qu'il envisageait, par conséquent, d'une part, d'ordonner une
instruction pour clarifier la situation et, d'autre part, de suspendre la procédure de
[sa] nomination jusqu'à la fin de cette instruction».
- 76.
- Il s'ensuit que, examiné dans son contexte, le renvoi dans la décision du 11 juillet
1996 à l'entretien du 3 juillet 1996 fournissait à la requérante des indications
suffisantes pour que cette dernière puisse apprécier le bien-fondé de la décision de
l'AIPN de suspendre la procédure de pourvoi du troisième poste. Par ailleurs, le
Tribunal constate que la motivation a encore été complétée dans la décision
explicite de rejet de la réclamation.
- 77.
- Dans ces circonstances, la décision du 11 juillet 1996 doit être considérée comme
étant suffisamment motivée. Le moyen doit donc être rejeté.
Sur le sixième moyen, tiré d'un détournement de procédure et de pouvoir
Arguments des parties
- 78.
- La requérante fait valoir que, en vertu de l'article 45 du statut, aucun élément non
établi à la date à laquelle l'AIPN prend une décision dans une procédure de
promotion ne peut influencer cette décision. En l'espèce, une décision sur la
candidature de la requérante aurait dû se fonder uniquement sur les éléments
objectifs ressortant de la période de référence 1994-1995, objet du rapport de
notation de la requérante.
- 79.
- La requérante ajoute que la nomination ou non d'un candidat à un emploi déclaré
vacant et la mise en oeuvre d'une procédure d'investigation interne aux institutions
communautaires constituent deux procédures indépendantes. Si les incidents
survenus au sein de l'institution défenderesse constituent des faits graves nécessitant
incontestablement la mise en oeuvre d'une procédure d'investigation, celle-ci aurait
dû être menée indépendamment et en dehors de toute autre procédure. Ce serait
seulement au vu des conclusions de cette procédure d'investigation, au cours de
laquelle les droits de la défense doivent être respectés, que l'AIPN devrait prendre
une décision quant aux éventuelles poursuites à engager. La procédure de pourvoid'un poste déclaré vacant, en l'absence de telles conclusions, devrait en
conséquence être menée indépendamment. En l'espèce, en couplant les deux
procédures celle de la nomination et celle de l'instruction et en faisant
notamment dépendre la première de la seconde, l'AIPN aurait commis en réalité
un détournement de procédure.
- 80.
- La requérante en conclut que la décision du 11 juillet 1996 et la décision de rejet
de sa réclamation sont illégales à un double titre. En premier lieu, la décision de
suspendre la procédure de pourvoi de l'emploi déclaré vacant serait fondée sur des
faits qui n'étaient pas établis au moment de l'adoption de la décision en question.
En second lieu, l'AIPN, au lieu de se prononcer, sur la candidature de la
requérante, sur la base des éléments objectifs contenus dans son rapport de
notation, aurait usé de ses pouvoirs dans un but autre que celui devant être
légalement poursuivi, en l'occurrence la mise en oeuvre d'une procédure
d'investigation préalable à une procédure disciplinaire.
- 81.
- Dans sa réplique, la requérante fait valoir que l'AIPN ne disposait pas, le jour de
l'adoption de la décision attaquée, à savoir le 11 juillet 1996, d'éléments suffisants
pour ouvrir une procédure disciplinaire à son encontre. En effet, M. Cranfield
n'aurait présenté ses conclusions à l'AIPN que le 25 octobre 1996 et, le 13 janvier
1997, l'AIPN aurait estimé indispensable de demander à M. Pommiès de compléter
le dossier par l'audition des principaux protagonistes et d'établir un rapport sur
l'affaire.
- 82.
- La partie défenderesse rétorque qu'aucune règle n'oblige l'AIPN à prendre en
compte les seuls faits constatés lors du dernier rapport de notation. En revanche,
l'article 45 du statut indiquerait que la promotion intervient, le cas échéant, après
examen comparatif des mérites des candidats ainsi que «des rapports» (pluriel)
dont ils ont fait l'objet. Il en ressortirait clairement que l'AIPN est appelée à
procéder à un examen global des mérites.
- 83.
- Elle fait encore valoir que, à la date où le greffier a, en tant qu'AIPN, pris la
décision attaquée, l'enquête était à un stade avancé. L'AIPN aurait disposé alors
d'éléments ayant un poids certain et au vu desquels l'ouverture d'une procédure
disciplinaire à l'encontre de la requérante pouvait être envisagée. Or, l'AIPN aurait
agi de manière contradictoire si elle avait octroyé la promotion à un poste de
responsabilité (A 5/A 4) et avait en même temps engagé une procédure
disciplinaire contre la personne promue pour des comportements tels que ceux en
cause. Dans ce contexte, la décision prise par l'AIPN serait justifiée au regard,
notamment, du principe de bonne administration, du devoir de sollicitude vis-à-vis
des autres fonctionnaires de l'institution et de l'obligation imposée par l'article 24
du statut de protéger les victimes des agissements faisant l'objet d'une investigation.
Appréciation du Tribunal
- 84.
- Il ressort d'une jurisprudence constante qu'il n'y a détournement de pouvoir, dont
le détournement de procédure n'est qu'une forme, que s'il est prouvé qu'en
adoptant l'acte litigieux l'AIPN a poursuivi un but autre que celui visé par la
réglementation en cause ou s'il apparaît, sur la base d'indices objectifs, pertinents
et concordants, que l'acte en question a été pris pour atteindre des fins autres que
celles excipées (arrêts du Tribunal du 26 septembre 1996, Maurissen/Cour des
comptes, T-192/94, RecFP p. II-1229, point 75, et Rasmussen/Commission, précité,
point 70, et jurisprudence y citée).
- 85.
- Aucun élément du dossier ne fait apparaître que la partie défenderesse aurait
commis un détournement de pouvoir. Ainsi, contrairement à ce que prétend la
requérante, la partie défenderesse n'a pas pris une décision sur l'éventuelle
promotion de la requérante sur la base de faits non établis. Elle a, en l'espèce,
seulement décidé de suspendre la décision sur l'éventuelle promotion de la
requérante, afin de mener une enquête sur la matérialité des faits dénoncés par
certains fonctionnaires et l'implication de celle-ci dans ces agissements.
- 86.
- Il convient d'ajouter que la suspension de la procédure de pourvoi du troisième
poste permettra précisément à la partie défenderesse de prendre une décision sur
l'éventuelle promotion de la requérante sur la seule base de faits établis. En effet,
si la partie défenderesse avait promu la requérante, elle aurait négligé les
accusations qui avaient été formulées à son encontre. Elle aurait dès lors pris une
décision sur la base d'un dossier ne comportant éventuellement pas toutes les
informations pertinentes concernant le comportement de la requérante. Dans un
souci de bonne administration, et après avoir mis en balance les intérêts de la
requérante et de l'institution, la partie défenderesse a, toutefois, décidé de
suspendre la décision sur sa promotion et d'enquêter sur sa responsabilité pour
certains agissements malveillants. Il s'agit par conséquent d'un exercice non
critiquable du large pouvoir d'appréciation dont jouit la partie défenderesse dans
le cadre de l'application de l'article 45 du statut.
- 87.
- En ce qui concerne le prétendu couplage de la procédure de promotion et de la
procédure d'enquête, le Tribunal estime que le fait que de telles procédures sont
indépendantes n'empêche pas que le résultat de l'une puisse être pertinent pour
l'autre. Dans le cas d'espèce, la partie défenderesse a estimé, à juste titre, que les
résultats de l'enquête étaient pertinents pour prendre une décision sur l'éventuelle
promotion de la requérante. Aucun indice d'un détournement de procédure ne
peut être décelé dans cette attitude de la partie défenderesse.
- 88.
- Le sixième moyen n'est donc pas fondé non plus.
Sur le septième moyen, tiré d'une erreur manifeste d'appréciation
- 89.
- La requérante fait valoir que, même si la volonté de l'AIPN n'a pas été de la
sanctionner, le couplage des deux procédures celle de la nomination et celle de
l'instruction entache la décision du 11 juillet 1996 d'une erreur manifeste
d'appréciation, eu égard au fait que les éléments dont l'AIPN pouvait légalement
disposer au moment de l'adoption de cette décision et ses pouvoirs au titre de la
procédure de pourvoi de l'emploi ne l'autorisaient pas à arrêter la décision
attaquée.
- 90.
- Ce moyen se confond avec les premier, troisième et sixième moyens et doit donc
être rejeté pour les mêmes motifs.
Sur les conclusions tendant à la destruction des pièces constituant un dossier
parallèle
- 91.
- La requérante rappelle que la détention d'un dossier parallèle est illégale. Pour
cette raison, elle demande la destruction des pièces constituant ce dossier.
- 92.
- Il ressort d'une jurisprudence constante que le juge communautaire n'a pas
compétence pour adresser à l'administration des injonctions dans le cadre du
contrôle de légalité fondé sur l'article 91 du statut (voir, par exemple, l'arrêt
Latham/Commission, précité, point 27, et la jurisprudence citée).
- 93.
- Il s'ensuit que la demande tendant à la destruction des pièces constituant un
«dossier parallèle» doit être rejetée comme irrecevable.
Sur les conclusions tendant à la réparation du préjudice moral
- 94.
- La requérante fait valoir que la simple annulation de la décision du 11 juillet 1996
et de la décision de rejet de sa réclamation n'est pas de nature à effacer
intégralement les conséquences préjudiciables de la position adoptée par l'AIPN
(arrêts du Tribunal du 27 février 1992, Plug/Commission, T-165/89, Rec. p. II-367,
point 118, et du 26 octobre 1993, Caronna/Commission, T-59/92, Rec. p. II-1129,
points 106 et 107). Ces décisions auraient eu une influence négative sur son
honneur et sa probité professionnelle (arrêt Katsoufros/Cour de justice, précité,
point 11). La décision du 11 juillet 1996 et la décision de rejet de la réclamation
auraient eu pour effet d'empêcher la promotion de la requérante et constitueraient
ainsi une forme de sanction. Elles mettraient la requérante dans une situation
d'attente et d'incertitude quant à son avenir professionnel, situation qui lui serait
très préjudiciable (arrêt du Tribunal du 26 juin 1996, de Nil et Impens/Conseil, T-91/95, RecFP p. II-959, point 50). Par ailleurs, elle fait observer que le Tribunal a
reconnu qu'un fonctionnaire qui ne possède pas un dossier individuel régulier et
complet subit, de ce fait, un préjudice moral tenant à l'état d'incertitude et
d'inquiétude dans lequel il se trouve quant à son avenir professionnel (arrêt
Baltsavias/Commission, précité, point 83). Pour ces motifs, la requérante sollicite
la réparation du préjudice moral qu'elle a subi par le versement d'une somme égale
à 1 000 000 BFR.
- 95.
- Le Tribunal constate que, par les présentes conclusions, la requérante vise à
obtenir réparation du préjudice moral causé par l'adoption par la partie
défenderesse d'une décision prétendument illégale, à savoir la décision du 11 juillet
1996, telle que confirmée par la décision du 10 décembre 1996 portant rejet
explicite de la réclamation introduite par la requérante contre la première décision.
- 96.
- Le Tribunal rappelle que l'examen des moyens présentés au soutien des conclusions
visant à l'annulation des décisions des 11 juillet et 10 décembre 1996 n'a révélé
aucune illégalité commise par la partie défenderesse. Dans ces circonstances, les
conclusions en indemnisation doivent être rejetées.
- 97.
- Il résulte de l'ensemble des considérations qui précèdent que le recours doit être
rejeté dans son intégralité.
Sur les dépens
- 98.
- Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie
qui succombe est condamnée aux dépens s'il est conclu en ce sens. Toutefois, selon
l'article 88 du même règlement, dans les litiges entre les Communautés et leurs
agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci.
- 99.
- La partie défenderesse demande que la requérante soit condamnée à l'intégralité
des dépens en application de l'article 87, paragraphe 3, deuxième alinéa, du
règlement de procédure. Elle estime, en effet, que le recours est frustratoire et
vexatoire parce que la requérante savait que le prétendu dossier parallèle était le
dossier d'enquête sur les agissements anonymes qui avait donné lieu à une
procédure disciplinaire à l'encontre de la requérante. Par ailleurs, la requérante
aurait dû savoir, en tant que juriste, que l'AIPN n'était pas obligée de donner suite
à un avis de vacance. L'introduction du recours ne serait qu'un stratagème destiné
à déstabiliser l'enquête et la procédure disciplinaire qui l'a suivie.
- 100.
- Le Tribunal estime qu'il n'y a pas lieu de faire application de l'article 87,
paragraphe 3, deuxième alinéa, du règlement de procédure. Bien que le recours ne
soit pas fondé, il n'est pas frustratoire ou vexatoire. En conséquence, il convient de
décider, en application de l'article 88 du règlement de procédure, que chacune des
parties supportera ses propres dépens.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (quatrième chambre)
déclare et arrête:
1) Le recours est rejeté.
2) Chacune des parties supportera ses propres dépens.
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 2 avril 1998.
Le greffier
Le président
H. Jung
P. Lindh