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CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

MME JULIANE KOKOTT

présentées le 19 mars 2015 (1)

Affaire C‑398/13 P

Inuit Tapiriit Kanatami e.a.

contre

Commission européenne

«Pourvoi – Règlement (UE) no 737/2010 – Règlement (CE) no 1007/2009 – Commerce de produits dérivés du phoque – Interdiction de mise sur le marché dans l’Union européenne – Dérogations pour des communautés inuites – Choix de la base juridique adéquate – Compétence générale d’harmonisation dans le marché intérieur (article 95 CE) – Droits fondamentaux – Droit international – Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones»





I –    Introduction

1.        En 2009, le législateur de l’Union pouvait‑il se baser sur l’article 95 CE (devenu article 114 TFUE) pour instituer une quasi‑interdiction de la mise sur le marché de produits dérivés du phoque dans le marché intérieur? C’est en substance la question que doit examiner la Cour dans le cadre du présent pourvoi.

2.        Il n’est pas nécessaire de souligner à quel point sont sensibles les questions juridiques liées à l’interprétation et à l’application de l’article 95 CE pour délimiter les compétences de l’Union européenne et des États membres (2). Outre l’étendue de cette compétence générale d’harmonisation dans le marché intérieur, la présente affaire soulève aussi des problèmes dans le domaine des droits fondamentaux de l’Union. De surcroît, il s’agit d’examiner quels effets il convient de prêter à une déclaration de l’Assemblée générale des Nations unies.

3.        C’est déjà la deuxième fois que l’Inuit Tapiriit Kanatami, en tant que représentant des intérêts des Inuits (3) canadiens, ainsi que d’autres parties, surtout des fabricants ou des négociants de produits dérivés du phoque (ci‑après les «requérants»), portent ces questions devant les juridictions de l’Union. Comme ils ne pouvaient pas introduire de recours direct contre le règlement de base du Parlement et du Conseil (4), à défaut de qualité pour agir (5), ils attaquent maintenant le règlement de mise en œuvre de la Commission (6) et invoquent à titre incident (conformément à l’article 277 TFUE) l’illégalité du règlement de base.

4.        Cette fois non plus, les requérants n’ont pas obtenu gain de cause en première instance. Le Tribunal a rejeté comme non fondé leur recours en annulation par un arrêt du 25 avril 2013 (7). C’est cet arrêt qu’ils attaquent par le présent pourvoi.

II – Cadre juridique

A –    Le droit de l’Union

5.        Les dispositions du droit de l’Union concernant la mise sur le marché des produits dérivés du phoque figurent, d’une part, dans le règlement de base que le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne ont adopté en 2009 et, d’autre part, dans le règlement de mise en œuvre que la Commission européenne a adopté en 2010. Si le recours est dirigé, formellement, contre le règlement de mise en œuvre, sur le fond, les attaques concernent exclusivement la légalité du règlement de base.

1.      Le règlement de base

6.        L’objet du règlement de base est défini à son article 1er dans les termes suivants:

«Le présent règlement établit des règles harmonisées concernant la mise sur le marché des produits dérivés du phoque.»

7.        L’article 3 du règlement de base définit les «conditions de mise sur le marché» des produits dérivés du phoque:

«1.      La mise sur le marché de produits dérivés du phoque est autorisée uniquement pour les produits dérivés du phoque provenant de formes de chasse traditionnellement pratiquées par les communautés inuites et d’autres communautés indigènes à des fins de subsistance. Ces conditions s’appliquent au moment ou au point d’importation pour les produits importés.

2.      Par dérogation au paragraphe 1:

a)      l’importation de produits dérivés du phoque est autorisée lorsqu’elle présente un caractère occasionnel et concerne exclusivement des marchandises destinées à l’usage personnel des voyageurs ou des membres de leur famille. La nature et la quantité de ces marchandises ne peuvent pas pouvoir laisser penser qu’elles sont importées à des fins commerciales;

b)      la mise sur le marché de produits dérivés du phoque est également autorisée lorsqu’ils résultent d’une chasse réglementée par la législation nationale et pratiquée dans le seul objectif d’une gestion durable des ressources marines. Cette mise sur le marché est uniquement autorisée dans un but non lucratif. La nature et la quantité de ces marchandises ne peuvent pas pouvoir laisser penser qu’elles sont mises sur le marché à des fins commerciales.

L’application du présent paragraphe ne compromet pas la réalisation de l’objectif du présent règlement.

3.      La Commission publie, conformément à la procédure de gestion visée à l’article 5, paragraphe 2, des notes techniques explicatives établissant une liste indicative des codes de la nomenclature combinée susceptibles de concerner les produits dérivés du phoque soumis au présent article.

4.      Sans préjudice du paragraphe 3, les mesures relatives à la mise en œuvre du présent article, qui visent à modifier des éléments non essentiels du présent règlement en le complétant, sont arrêtées en conformité avec la procédure de réglementation avec contrôle […]»

8.        La notion d’«Inuit» est définie comme suit à l’article 2, point 4, du règlement de mise en œuvre:

«les membres indigènes du territoire inuit, à savoir les régions arctiques et subarctiques dans lesquelles les Inuits possèdent actuellement ou traditionnellement des droits et des intérêts aborigènes, reconnus comme faisant partie de la population inuite et comprenant les groupes suivants: Inupiat, Yupik (Alaska), Inuit, Inuvialuit (Canada), Kalaallit (Groenland) et Yupik (Russie)».

9.        En outre, il convient de citer le considérant 14 du règlement de base:

«Il importe que les intérêts économiques et sociaux fondamentaux des communautés inuites pratiquant la chasse aux phoques à des fins de subsistance ne soient pas compromis. Cette chasse fait partie intégrante de la culture et de l’identité des membres de la société inuite et, en tant que telle, elle est reconnue par la déclaration des Nations unies relative aux droits des peuples indigènes. C’est pourquoi la mise sur le marché des produits dérivés du phoque provenant de ces formes de chasse traditionnellement pratiquées par les communautés inuites et d’autres communautés indigènes à des fins de subsistance devrait être autorisée.»

2.      Le règlement de mise en œuvre

10.      Le 10 août 2010, la Commission a adopté des dispositions de mise en œuvre sur le commerce des produits dérivés du phoque sous la forme du règlement de mise en œuvre, sur le fondement de l’article 3, paragraphe 4, du règlement de base.

11.      L’article 1er du règlement de mise en œuvre dispose ce qui suit:

«Le présent règlement fixe les modalités de mise sur le marché de produits dérivés du phoque, en application de l’article 3 du règlement (CE) no 1007/2009.»

12.      L’article 3 du règlement de mise en œuvre fixe les conditions auxquelles des produits dérivés du phoque provenant de formes de chasse pratiquées par les communautés inuites et d’autres communautés indigènes peuvent être mis sur le marché.

13.      L’article 4 du règlement de mise en œuvre précise à quelles conditions des produits dérivés du phoque destinés à l’usage personnel des voyageurs ou des membres de leur famille peuvent être importés.

14.      Enfin, l’article 5 du règlement de mise en œuvre énonce les conditions auxquelles les produits dérivés du phoque issus de la gestion des ressources marines peuvent être mis sur le marché.

B –    Les résolutions des Nations unies

15.      L’Assemblée générale des Nations unies, avec la résolution 61/295, adoptée lors de sa 107e séance plénière le 13 septembre 2007, a proclamé solennellement la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones (ci‑après la «DNUDPA»).

16.      L’article 19 de la DNUDPA est libellé comme suit:

«Les États se concertent et coopèrent de bonne foi avec les peuples autochtones intéressés — par l’intermédiaire de leurs propres institutions représentatives — avant d’adopter et d’appliquer des mesures législatives ou administratives susceptibles de concerner les peuples autochtones, afin d’obtenir leur consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause.»

17.      Il ressort du dernier considérant de son préambule que cette déclaration a été proclamée comme «un idéal à atteindre dans un esprit de partenariat et de respect mutuel» (8).

III – Procédure devant la Cour

18.      Par une requête du 8 juillet 2013, les requérants ont introduit conjointement le présent pourvoi. Ils concluent à ce qu’il plaise à la Cour:

–        annuler l’arrêt du Tribunal faisant l’objet du pourvoi, déclarer le règlement no 1007/2009 illégal et inapplicable conformément à l’article 277 TFUE et annuler le règlement no 737/2010 conformément à l’article 263 TFUE si la Cour devait considérer que sont réunis tous les éléments requis pour statuer sur le fond du recours en annulation du règlement attaqué;

–        à titre subsidiaire, annuler l’arrêt faisant l’objet du pourvoi et renvoyer l’affaire devant le Tribunal;

–        condamner la Commission aux dépens des requérants.

19.      La Commission conclut à ce qu’il plaise à la Cour:

–        rejeter le pourvoi; et

–        condamner solidairement les requérants aux dépens.

20.      De son côté, le Parlement, qui, en première instance, était intervenu au soutien de la Commission, conclut à ce qu’il plaise à la Cour:

–        rejeter le pourvoi;

–        condamner les parties requérantes aux dépens.

21.      Enfin, le Conseil, qui, en première instance, était également intervenu au soutien de la Commission, conclut à ce qu’il plaise à la Cour:

–        rejeter le pourvoi;

–        condamner les parties requérantes aux dépens.

22.      Devant la Cour le pourvoi a fait l’objet d’une procédure écrite et d’une audience qui s’est tenue le 9 février 2015.

IV – Appréciation

23.      Dans leur pourvoi, les requérants n’évoquent plus l’intégralité des thèmes qui faisaient l’objet de la procédure de première instance. Dans le cadre de la procédure de pourvoi, le débat juridique ne porte plus que sur quelques problèmes choisis qui concernent tous la légalité du règlement de base (9). Il s’agit d’erreurs de droit qu’aurait commises le Tribunal en rejetant l’exception d’illégalité invoquée à titre incident contre le règlement de base (article 277 TFUE). Avant d’examiner ces griefs de droit matériel (10), une courte remarque liminaire, concernant la recevabilité du recours en annulation en première instance, nous paraît nécessaire.

A –    Remarque liminaire concernant la recevabilité du recours en annulation en première instance

24.      Malgré les objections soulevées par le Conseil en première instance, curieusement, le Tribunal a renoncé à examiner la qualité pour agir des requérants et a examiné directement le bien‑fondé de leur recours (11).

25.      Certes, en principe, cela n’empêche pas la Cour de s’assurer d’office, au stade du pourvoi, que les requérants disposaient de la qualité pour agir requise, au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE (12).

26.      Toutefois, contrairement à la première procédure engagée par les requérants, qui était dirigée directement contre le règlement de base (13), le présent litige, qui est dirigé contre le règlement de mise en œuvre, ne soulève pas de problèmes de recevabilité majeurs du point de vue de la qualité pour agir. En effet, il est possible d’argumenter que, au moins, les requérants qui commercialisent eux‑mêmes des produits dérivés du phoque et les vendent sur le marché intérieur de l’Union sont directement concernés par le règlement de mise en œuvre de la Commission et que, à leur égard, il n’y a pas besoin d’autres mesures de mise en œuvre. Par conséquent, ils peuvent être considérés comme ayant qualité pour agir en vertu du troisième cas de figure de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE (14). Selon la jurisprudence, cela suffit pour juger recevable dans son ensemble le recours, qui a été introduit conjointement par tous les requérants (15).

B –    Sur le choix de l’article 95 CE comme base juridique du règlement de base (premier moyen)

27.      Par leur premier moyen, les requérants reprochent au Tribunal deux erreurs de droit concernant l’article 95 CE. Ce faisant, ils ne mettent pas en doute le caractère en principe adéquat de cette disposition comme base juridique d’une quasi‑interdiction de commercialiser certains produits. En effet, ils se contentent de faire porter le litige sur deux problèmes étroitement circonscrits: il s’agit, d’une part, du moment de la procédure législative auquel les conditions d’application de l’article 95 CE doivent être remplies et, d’autre part, de l’importance du volume des échanges qui doit être affecté pour justifier un recours à l’article 95 CE.

1.      Le moment pertinent pour apprécier si les conditions d’application de l’article 95 CE sont réunies (première branche du premier moyen)

28.      En premier lieu, au vu des points 36 à 64 de l’arrêt attaqué, les requérants reprochent au Tribunal de ne pas s’être fondé sur le moment pertinent lorsqu’il a examiné si les conditions d’application de l’article 95 CE étaient remplies aux fins du règlement de base. Selon eux, le moment pertinent serait non pas celui de l’adoption du règlement de base mais un moment antérieur, à savoir celui où la Commission a soumis sa proposition dudit règlement.

29.      Cet argument ne tient pas.

30.      Selon une jurisprudence constante, pour apprécier la légalité d’un acte juridique de l’Union, ce sont toujours les éléments de fait et de droit existant à la date où l’acte a été adopté qui sont déterminants (16). Il en va de même pour la question litigieuse en l’espèce de savoir si les disparités existant entre les réglementations nationales étaient suffisamment importantes pour justifier une intervention du législateur de l’Union sur le fondement de l’article 95 CE (17).

31.      Autrement, il serait bien plus difficile pour le Parlement et le Conseil de procéder à des modifications de l’acte juridique proposé par la Commission pendant la procédure législative ordinaire (anciennement procédure de codécision), ne serait‑ce que pour tenir compte d’une nouvelle situation de fait ou de droit ou pour exprimer une autre appréciation politique des questions à trancher de la part du colégislateur, y compris la question de la base juridique adéquate.

32.      Ni le principe d’attribution, invoqué par les requérants (article 5, paragraphe 2, première phrase, lu conjointement avec le paragraphe 1, première phrase, TUE, anciennement article 5, paragraphe 1, CE), ni l’objectif d’harmonisation de l’article 95 CE ne s’opposent à ce que le contrôle juridictionnel se fonde sur le moment de l’adoption de l’acte en cause.

33.      Il est exact que la Commission devrait soumettre des propositions d’actes législatifs au Parlement et au Conseil uniquement lorsqu’il est prévisible que, au moment de leur adoption probable par les deux colégislateurs, toutes les conditions d’un recours à l’article 95 CE seront remplies, c’est‑à‑dire aussi la nécessité d’une mesure d’harmonisation au niveau de l’Union. Cela découle de la responsabilité institutionnelle de la Commission (article 17, paragraphes 1 et 2, TUE), ainsi que de son obligation de loyauté envers les autres institutions de l’Union (article 13, paragraphe 2, deuxième phrase, TUE). Toutefois, le contrôle juridictionnel d’un acte législatif a pour objet non pas l’action de l’institution qui a proposé cet acte mais celle des institutions qui l’ont adopté. Par conséquent, devant la Cour, il convient de se fonder sur le moment de la décision du Parlement et du Conseil et non pas sur celui où la Commission a engagé la procédure législative.

34.      La crainte des requérants qu’une proposition soumise à l’aveuglette par la Commission, un peu comme une prophétie autoréalisatrice, puisse en soi provoquer l’adoption de dispositions nationales, juridiques et administratives divergentes et, ainsi, finalement aussi provoquer elle‑même les conditions d’un recours à l’article 95 CE me paraît aberrante. Il est bien plus probable que les législateurs nationaux s’abstiennent d’adopter une réglementation nationale dans un domaine dès lors que la Commission a soumis une proposition de mesure d’harmonisation au niveau de l’Union.

35.      Par conséquent, tout bien considéré, le Tribunal n’a pas commis d’erreur de droit lorsque, pour examiner si les conditions d’application de l’article 95 CE étaient remplies, il s’est fondé sur le moment de l’adoption du règlement de base au lieu de s’intéresser à celui de la proposition de la Commission.

2.      Les conditions d’un recours à l’article 95 CE

36.      En second lieu, les requérants soutiennent que, en l’espèce, les conditions d’application de l’article 95 CE n’auraient pas été réunies quel que soit le moment sur lequel l’on se fonde. Cette critique apparaît déjà dans la première branche de ce premier moyen, sous la forme de quelques arguments avancés à titre subsidiaire, et se poursuit dans la seconde branche. À cet égard, il est possible de distinguer deux questions: les disparités existant entre les dispositions juridiques et administratives nationales étaient‑elles suffisamment importantes pour justifier une intervention du législateur de l’Union [voir ci‑après, sous a)]? Les échanges de produits dérivés du phoque à l’intérieur de l’Union étaient‑ils suffisamment importants pour justifier une mesure d’harmonisation [voir ci‑après, sous b)]?

a)      Les disparités entre les dispositions juridiques et administratives nationales (argument avancé à titre subsidiaire à la première branche du premier moyen)

37.      Selon les requérants, au moment de l’adoption du règlement de base, comme déjà au moment de la proposition de la Commission, les disparités entre les réglementations nationales étaient loin d’être suffisamment importantes pour engager une procédure législative sur la base de l’article 95 CE.

38.      Cette thèse n’est pas convaincante.

39.      Il est vrai que les mesures visées par l’article 95, paragraphe 1, CE doivent effectivement avoir pour objet d’améliorer les conditions de l’établissement et du fonctionnement du marché intérieur (18).

40.      Si la simple constatation de disparités entre les réglementations nationales et du risque abstrait d’entraves aux libertés fondamentales ou de distorsions de concurrence n’est pas suffisante pour justifier le choix de l’article 95 CE comme base juridique, le législateur communautaire peut y recourir notamment en cas de divergences entre les réglementations nationales lorsque celles‑ci sont de nature à entraver les libertés fondamentales et à avoir ainsi une incidence directe sur le fonctionnement du marché intérieur (19) ou à créer des distorsions de concurrence sensibles (20).

41.      Le règlement de base satisfait bien à ces exigences.

42.      D’après les constats de fait du Tribunal (21), auxquels aucun reproche de dénaturation n’a été fait devant la Cour, plusieurs États membres avaient adopté ou étaient en train d’adopter ou d’examiner des mesures législatives visant à restreindre ou à interdire les activités économiques liées à l’élaboration de produits dérivés du phoque. Plus précisément, au moment de l’adoption du règlement de base, certains États membres avaient déjà interdit la mise sur le marché de produits dérivés du phoque et d’autres prévoyaient d’adopter de telles dispositions, alors que dans d’autres États membres il n’existait aucune restriction au commerce de ces produits, si bien que des conditions commerciales disparates coexistaient au sein de l’Union et qu’une fragmentation du marché intérieur était à craindre.

43.      Le législateur de l’Union pouvait saisir l’occasion qu’offraient ces disparités entre les réglementations nationales applicables, auxquelles il est fait référence à plusieurs reprises dans le préambule du règlement de base (22), pour procéder à une harmonisation au niveau de l’Union. En effet, de telles disparités sont de nature à entraver les échanges de produits dérivés du phoque dans le marché intérieur (23). De surcroît, en raison de ces dispositions divergentes, il existait un risque que les consommateurs européens se méfient même des produits qui ne sont pas dérivés du phoque, mais qu’il n’est pas aisé de distinguer de tels produits (24).

44.      Toutefois, les requérants reprochent au Tribunal de s’être contenté à cet égard d’affirmations extrêmement vagues et générales du préambule du règlement de base. En outre, selon eux, le Tribunal aurait pris en considération, à tort, des indications écrites que la Commission aurait fournies seulement au stade de la procédure contentieuse.

45.      Or, ce grief n’est pas justifié non plus.

46.      D’une part, il convient d’observer que la motivation d’un acte juridique d’application générale de l’Union ne peut pas être soumise aux mêmes exigences que la motivation de décisions individuelles des institutions de l’Union. La motivation d’un acte juridique d’application générale peut se borner à indiquer la situation d’ensemble qui a conduit à son adoption et les objectifs généraux qu’il se propose d’atteindre; elle doit seulement faire ressortir l’essentiel de l’objectif poursuivi (25).

47.      D’autre part, selon une jurisprudence constante, les institutions de l’Union sont libres, dans la procédure contentieuse, d’expliciter les raisons qui sont à la base de l’acte attaqué dans le cadre de leur argumentation de défense (26). Certes, ce faisant, elles ne peuvent pas «produire a posteriori» des raisons totalement nouvelles (27). Cependant, rien ne s’oppose à ce que les institutions de l’Union fournissent au Tribunal des informations relatives au contexte d’un acte législatif permettant à celui‑ci de contrôler la pertinence des motifs indiqués dans le préambule de cet acte et ainsi, en fin de compte, de mieux apprécier sa légalité.

48.      C’est exactement ainsi que cela s’est passé en l’espèce: sans se fonder sur de nouveaux motifs, dans son mémoire de première instance, la Commission a seulement expliqué quels États membres, et à quel moment, avaient adopté dans leur droit national des interdictions de mise sur le marché de produits dérivés du phoque ou envisageaient de le faire.

49.      C’est à juste titre que le Tribunal (28) a indiqué en outre que ni le libellé ni l’objectif de l’article 95 CE ne requièrent que les réglementations nationales divergent dans un nombre minimal d’États pour qu’il soit possible de recourir à des mesures d’harmonisation au niveau de l’Union.

50.      Par conséquent, contrairement à ce que semblent penser les requérants, la simple circonstance que, au moment de l’ouverture de la procédure législative, seulement deux États membres (29) avaient imposé des interdictions des produits dérivés du phoque ne fait pas obstacle à une application de l’article 95 CE (30).

51.      En effet, les conditions auxquelles est subordonnée une intervention du législateur de l’Union sur le fondement de l’article 95 CE sont de nature non pas quantitative mais qualitative. Pour adopter une mesure d’harmonisation, il n’importe pas tellement de savoir si, et dans combien d’États membres, un produit déterminé fait l’objet de réglementations ou même d’interdictions. Toute perturbation existante ou prévisible des échanges dans le marché intérieur peut justifier une mesure d’harmonisation, à condition que soient respectés les principes généraux d’exercice des compétences d’harmonisation, notamment les principes de subsidiarité et de proportionnalité (article 5, paragraphes 3 et 4, TUE).

52.      En outre, qu’il existe ou non des divergences entre les réglementations nationales, une harmonisation au niveau de l’Union peut aussi être nécessaire lorsque, pour un produit nouveau donné, il n’existe encore ni marché ni réglementations commerciales dans l’Union parce qu’un cadre juridique uniforme reste encore à élaborer.

53.      Par conséquent, tout bien considéré, je ne vois aucun signe d’erreur juridique commise par le Tribunal lors du contrôle des circonstances justifiant en l’espèce un recours à l’article 95 CE.

b)      L’importance requise du volume des échanges concerné pour justifier une intervention sur le fondement de l’article 95 CE (seconde branche du premier moyen)

54.      En outre, dans le cadre de ce premier moyen, les requérants soutiennent que le Tribunal se serait fondé sur un critère erroné pour apprécier les disparités existant entre les réglementations nationales relatives au commerce de produits dérivés du phoque lorsque, à la fin du point 56 de l’arrêt attaqué, il a indiqué qu’il s’agirait de produits «pour lesquels les échanges entre États membres ne sont certainement pas négligeables».

55.      Contrairement à ce que semble penser le Parlement, ce grief ne constitue pas une tentative de remettre en cause l’appréciation des faits et des preuves effectuée par le Tribunal, ce qui serait irrecevable au stade du pourvoi. Il s’agit plutôt de savoir si, lors de l’examen de la légalité de la décision litigieuse, le Tribunal a appliqué des critères juridiques corrects et s’il a tiré des conclusions juridiques pertinentes des faits constatés. Or, il incombe bien à la Cour de vérifier cela dans le cadre du pourvoi (31).

56.      En substance, les requérants reprochent au Tribunal de soumettre à des exigences insuffisantes l’adoption de mesures d’harmonisation par le législateur de l’Union. En faisant référence à des formulations dans quelques arrêts antérieurs de la Cour, ils estiment qu’il ne serait possible de recourir à l’article 95 CE que lorsqu’il s’agit d’un marché dans lequel les échanges entre États membres «représentent une part relativement importante» (32), ou, exprimé autrement, sur lequel ces échanges «sont relativement importants» (33).

57.      Il nous semble que ce grief repose sur un double malentendu.

58.      D’une part, avec ces explications contestées relatives aux «échanges qui ne sont pas négligeables», le Tribunal cherchait non pas à déterminer un critère spécifique aux fins de l’application de l’article 95 CE, mais seulement à répondre ponctuellement à un argument que les requérants avaient eux‑mêmes invoqué en première instance. En effet, ils avaient affirmé que la production de produits dérivés du phoque dans l’Union serait «négligeable» (34).

59.      D’autre part, le grief des requérants s’appuie sur une lecture erronée de la jurisprudence de la Cour relative à l’article 95 CE. Il est exact que la Cour a évoqué à plusieurs reprises le caractère «relativement important» ou «non négligeable» des échanges des produits en cause (35). Cependant, il s’agissait là d’une appréciation particulière des circonstances du cas d’espèce et non d’une exigence juridique à laquelle le législateur de l’Union devrait satisfaire pour recourir à l’article 95 CE.

60.      La compétence générale d’harmonisation dans le marché intérieur (article 95 CE, devenu article 114 TFUE) ne connaît pas de seuil de minimis qui, en dessous d’un volume d’échanges minimal, interdirait au législateur de l’Union d’adopter des mesures d’harmonisation pour le produit en cause (36).

61.      D’une part, étant donné la diversité des marchés de produits dans l’Union, un tel seuil de minimis serait impossible à définir de manière universelle et pourrait entraîner une grande insécurité juridique. D’autre part, il existerait un risque sérieux que cela conduise à un «marché intérieur à deux vitesses» dans lequel seuls les produits importants faisant l’objet d’un grand volume d’échanges profiteraient d’un cadre juridique uniforme applicable dans toute l’Union, alors que les échanges de produits moins importants seraient négligés. Cela pourrait justement pénaliser certains produits d’un type nouveau, faisant encore l’objet d’un faible volume d’échanges, et qui, pour percer dans le marché intérieur, auraient peut‑être besoin d’un cadre juridique uniforme.

62.      L’article 95 CE n’exclut nullement une harmonisation des dispositions juridiques et administratives des États membres par le législateur de l’Union en ce qui concerne des produits faisant l’objet d’un volume d’échanges insignifiant, à condition que soient respectés les principes généraux d’exercice des compétences d’harmonisation, notamment les principes de subsidiarité et de proportionnalité (article 5, paragraphes 3 et 4, TUE).

3.      Conclusion intermédiaire

63.      Par conséquent, tout bien considéré, le premier moyen est non fondé dans son intégralité.

C –    Sur les droits fondamentaux (second moyen)

64.      Par leur second moyen, les requérants invoquent trois fautes que, selon eux, le Tribunal aurait commises concernant des principes généraux du droit ayant valeur de droits fondamentaux.

1.      Le respect de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (première branche du second moyen)

65.      Dans le cadre de ce moyen, les requérants reprochent en premier lieu au Tribunal de ne se référer qu’aux dispositions de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci‑après la «Charte») (37) mais pas à la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci‑après la «CEDH») en tant que source de principes généraux du droit ayant valeur de droits fondamentaux. Ils reprochent au Tribunal d’avoir «dénaturé» leur argumentation de première instance concernant la CEDH. Selon eux, cela constitue une erreur de droit.

66.      À cet égard, il convient d’observer que, actuellement, en tant que telle, la CEDH ne fait pas partie du droit de l’Union, puisque, jusqu’à présent, elle n’a pas été intégrée formellement dans l’ordre juridique de l’Union (38). Par conséquent, pour le moment, il est impossible de se fonder sur la CEDH en tant que critère de contrôle de la légalité de l’action des institutions de l’Union.

67.      En l’espèce, c’est à parfaitement juste titre que, à la place, le Tribunal s’est appuyé sur la Charte, qui a valeur constitutionnelle depuis l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne le 1er décembre 2009 (article 6, paragraphe 1, premier alinéa, TUE) et est devenue la source de droits fondamentaux la plus importante du droit de l’Union (39).

68.      Quant à la CEDH, certes, elle continue à remplir deux fonctions importantes pour la protection des droits fondamentaux au niveau de l’Union: d’une part, elle donne des indications sur le sens et la portée des droits fondamentaux consacrés par la Charte dans la mesure où ces derniers correspondent à des droits garantis par la CEDH (article 52, paragraphe 3, première phrase, de la Charte). D’autre part, elle reste la principale source d’inspiration pour des droits fondamentaux non écrits qui font partie du droit de l’Union en tant que principes généraux (article 6, paragraphe 3, TUE). Ainsi, en fin de compte, la CEDH définit le niveau minimal de la protection des droits fondamentaux devant être accordée au sein de l’Union (40) (voir également article 53 de la Charte).

69.      Toutefois, en l’espèce, nous ne voyons pas comment cela devrait aboutir à ce que la CEDH, qu’elle soit lue conjointement avec l’article 6, paragraphe 3, TUE ou avec l’article 52, paragraphe 3, première phrase, de la Charte, soumette le législateur de l’Union à des exigences plus strictes que celles auxquelles le soumet la Charte citée par le Tribunal. Dans leur requête, les requérants n’ont fourni aucune explication précise à ce sujet. Même lors de l’audience, ils n’ont pas fourni d’explication, alors que nous le leur avions demandé expressément.

70.      Par conséquent, nous ne voyons, en l’espèce, ni la plus‑value que la référence à la CEDH, dont l’absence est déplorée par les requérants, aurait pu apporter ni comment cette absence de référence aurait pu conduire à l’annulation de l’arrêt attaqué (41).

71.      C’est pourquoi, à l’instar du Parlement, je considère que l’argumentation des requérants concernant la CEDH est inopérante. Par conséquent, la première branche de ce second moyen est non fondée.

2.      La prise en considération d’intérêts d’ordre commercial dans le cadre du droit à la protection de la propriété (deuxième branche du second moyen)

72.      Dans le cadre de ce second moyen, les requérants reprochent en deuxième lieu au Tribunal d’avoir commis une erreur de droit en excluant des intérêts d’ordre commercial de la protection du droit de propriété.

73.      Cet argument ne tient pas non plus.

74.      Selon une jurisprudence constante, la protection du droit de propriété garantie par le droit de l’Union, telle qu’elle est désormais consacrée à l’article 17 de la Charte, ne porte pas sur de simples intérêts ou chances d’ordre commercial, dont le caractère aléatoire est inhérent à l’essence même des activités économiques (42). Un opérateur économique ne saurait faire valoir un droit acquis ou même une confiance légitime dans le maintien d’une situation existante qui peut être modifiée par des actes du législateur de l’Union (43).

75.      C’est exactement ce qui ressort également de l’article 1er du protocole no 1 de la CEDH, dont il convient de tenir compte conformément à l’article 52, paragraphe 3, première phrase, de la Charte et à l’article 6, paragraphe 3, TUE. En effet, selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme (ci‑après la «Cour EDH»), la garantie de la propriété qui y est consacrée ne s’étend pas non plus à de simples perspectives d’acquisition (44).

76.      Certes, selon la jurisprudence de la Cour EDH, dans certaines conditions, même des espérances légitimes de réalisation future de prétentions d’ordre patrimonial peuvent relever de la protection de l’article 1er du protocole no 1 de la CEDH (45). Toutefois, en l’espèce, les requérants ne peuvent justement pas invoquer une telle espérance légitime. En effet, leur demande est fondée uniquement sur le souhait subjectif de pouvoir à l’avenir continuer comme avant à faire des affaires dans le marché intérieur de l’Union avec des produits dérivés du phoque. En revanche, ils ne disposent ni d’un agrément, ni d’un accord, ni d’aucun droit sur lesquels ils pourraient fonder leur espérance de réaliser de telles affaires (46). Même lors de l’audience, ils n’ont fourni aucune explication à cet égard lorsque cela leur a été demandé.

77.      D’ailleurs, les différents arrêts de la Cour EDH invoqués par les requérants dans le cadre du pourvoi ne conduisent pas à une conclusion différente. En effet, dans ces arrêts, à la différence de la présente affaire, il s’agissait de bien plus que de simples perspectives de gains d’entreprises: ces affaires concernaient des licences et des clientèles, c’est‑à‑dire des droits acquis ou des biens d’une entreprise faisant la valeur commerciale de celle‑ci (47).

78.      Par conséquent, tout bien considéré, il est impossible d’affirmer que l’arrêt attaqué aurait méconnu le niveau minimal de protection de la propriété découlant de la CEDH. Le Tribunal s’est prononcé sans commettre d’erreur de droit lorsqu’il a refusé de considérer que la simple espérance des requérants, de pouvoir continuer à écouler dans le marché intérieur de l’Union les mêmes quantités de produits dérivés du phoque qu’auparavant, était protégée par le droit de propriété (48).

79.      Par conséquent, la deuxième branche du second moyen est également non fondée.

a)      Observations complémentaires concernant la liberté d’entreprise

80.      Pour le cas où les requérants voudraient maintenant, au stade du pourvoi, invoquer en outre le droit fondamental à la libre entreprise (article 16 de la Charte) (49), leur argumentation est irrecevable pour deux raisons.

81.      D’une part, un examen de ce droit fondamental conduirait à étendre l’objet du litige examiné en première instance (50).

82.      D’autre part, il convient de rappeler que la liberté d’entreprise ne constitue pas une prérogative absolue, mais doit être prise en considération par rapport à sa fonction dans la société. Elle peut être soumise à un large éventail d’interventions de la puissance publique susceptibles d’établir, dans l’intérêt général, des limitations à l’exercice de l’activité économique (51). Le pourvoi des requérants ne tient absolument aucun compte de cette circonstance. C’est pourquoi leur argumentation relative à la liberté d’entreprise reste trop peu circonstanciée pour pouvoir être raisonnablement appréciée par la Cour (52).

3.      La prise en considération de la DNUDPA (troisième branche du second moyen)

83.      Dans le cadre de ce second moyen, les requérants reprochent en troisième lieu au Tribunal d’avoir commis une erreur de droit «en n’examinant pas le règlement de base à la lumière de l’article 19 de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones».

a)      La recevabilité

84.      Même si la formulation de ce grief n’est pas un modèle de clarté, nous considérons, contrairement au Parlement, qu’elle est suffisamment compréhensible pour permettre de se prononcer utilement sur ledit grief. En effet, il est reproché en substance au Tribunal de ne pas avoir dûment pris en considération l’article 19 de la DNUDPA lors de l’examen de la légalité du règlement de base.

85.      Toutefois, cette troisième branche du second moyen est irrecevable en ce qu’elle fait référence au droit international coutumier. En effet, cet argument n’a pas été invoqué en première instance devant le Tribunal. Par conséquent, comme l’a observé à juste titre le Parlement, les requérants ne peuvent pas invoquer le droit international coutumier dans le cadre du pourvoi (53). Pour le cas où la Cour considérerait quand même les observations des requérants comme un simple développement de leur argumentation de première instance (54), dans un souci d’exhaustivité, nous incluons ci‑après cet argument dans notre analyse.

b)      Le bien‑fondé

86.      En principe, conformément à l’article 3, paragraphe 5, TUE, l’Union contribue au strict respect et au développement du droit international. Par conséquent, lorsqu’elle adopte un acte, elle est tenue de respecter le droit international dans son ensemble, y compris le droit international coutumier qui lie ses institutions (55).

87.      De prime abord, effectivement, l’article 19 de la DNUDPA pourrait donner l’impression, avec sa référence au «consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause», qu’il accorde aux peuples autochtones une espèce de droit de veto contre des mesures législatives et administratives susceptibles d’avoir une incidence sur ces peuples.

88.      Toutefois, à y regarder de plus près, il est impossible de déduire de la DNUDPA des règles de droit international contraignantes que le législateur de l’Union aurait pu enfreindre en adoptant le règlement de base.

89.      Premièrement, une résolution de l’Assemblée générale des Nations unies, telle que celle proclamant solennellement la DNUDPA, ne produit pas en soi d’effets juridiques contraignants. La lecture du préambule de cette déclaration confirme ce constat. D’après ce préambule, la déclaration doit être comprise moins comme un texte juridique contraignant que comme «un idéal à atteindre dans un esprit de partenariat et de respect mutuel» (56). Par conséquent, cette déclaration est un document non pas juridique mais politique et, donc, elle n’est pas en elle‑même susceptible de servir de critère de contrôle de la légalité d’actes des institutions de l’Union.

90.      Deuxièmement, contrairement à ce que pensent les requérants, la DNUDPA ne peut pas être considérée comme une codification du droit international coutumier. Chacun sait que, pour que ce droit prenne naissance, il faut une pratique générale de la part des sujets concernés de droit international public (consuetudo; élément objectif), qui soit acceptée comme étant le droit (opinio iuris sive necessitatis; élément subjectif) (57). Il ne saurait s’agir de cela en l’espèce. Certes, la résolution de l’Assemblée générale des Nations unies proclamant solennellement la DNUDPA a été soutenue par une large majorité de ses États membres. Cependant, force est de constater que quelques États importants, dans lesquels vivent des communautés autochtones, soit ont expressément voté contre la résolution, soit se sont abstenus (58). Dans ces conditions, il était impossible, en tout cas au moment de l’adoption du règlement de base, seulement deux ans environ après la proclamation solennelle de la DNUDPA, de considérer qu’il existait une pratique générale de la part des sujets concernés de droit international public concernant les droits des peuples autochtones.

91.      Troisièmement, il est également impossible de déduire des effets juridiques contraignants de la DNUDPA à l’égard de l’Union en recourant à la jurisprudence de la Cour citée par les requérants, telle qu’elle s’exprime dans les arrêts NTN Tokyo Bearing, Fediol et Nakajima. En effet, l’espèce n’est pas comparable avec ces affaires:

–        La DNUDPA ne constitue pas un cadre juridique général et contraignant (co)généré par l’Union elle‑même au sens de l’arrêt NTN Tokyo Bearing (59), que le législateur de l’Union serait tenu de respecter strictement lors de l’adoption de l’interdiction de mise sur le marché de produits dérivés du phoque.

–        La situation n’est pas non plus comparable à celle de l’affaire Fediol (60). Certes, dans son préambule (61), le règlement de base rappelle expressément la DNUDPA. Cependant, ce rappel ne vise en aucune façon à conférer à des particuliers des droits dérivés de l’article 19 de la DNUDPA dont ils pourraient se prévaloir en justice.

–        Enfin, le règlement de base n’a pas non plus été pris pour satisfaire aux obligations internationales de l’Union comme dans l’affaire Nakajima (62). En effet, comme nous l’avons déjà indiqué, la DNUDPA ne comporte pas de prescriptions contraignantes pour l’action de l’Union ou de ses États membres.

92.      Certes, il ne faut pas se méprendre, ce n’est pas parce que la DNUDPA n’a pas le caractère de «hard law» qu’elle peut être négligée par les institutions de l’Union. En effet, en tant que «soft law» (63), elle a au moins une valeur de recommandation et un poids politique non négligeable, et ce d’autant plus qu’elle a été proclamée solennellement sous forme de résolution de l’Assemblée générale des Nations unies et qu’elle a été soutenue par de nombreux États, dont également tous les États membres de l’Union.

93.      Le respect à l’égard des Nations unies (article 3, paragraphe 5, deuxième phrase, TUE) et la loyauté de l’Union à l’égard de ses propres États membres (article 4, paragraphe 3, premier alinéa, TUE) imposent aux institutions de l’Union d’examiner au fond la DNUDPA et d’en tenir compte dans toute la mesure du possible, même si celle‑ci ne comporte pas de prescriptions contraignantes pour l’action de l’Union.

94.      Le Tribunal n’a en rien méconnu ces «effets de soft law» produits par la DNUDPA. En effet, il s’est assuré que le législateur de l’Union avait examiné au fond ladite déclaration. D’après les constats établis dans l’arrêt attaqué (64), les représentants des Inuits ont été consultés abondamment et à maintes reprises lors de l’élaboration tant du règlement de base que des mesures d’application et, à la suite de cela, le législateur de l’Union a introduit dans le règlement de base (article 3, paragraphe 1, du règlement de base) l’exemption concernant les Inuits qui continue à permettre à ces derniers et à d’autres communautés indigènes la mise sur le marché dans une mesure limitée de produits dérivés du phoque provenant de formes de chasse traditionnellement pratiquées à des fins de subsistance. L’on n’aurait pas pu demander plus au législateur de l’Union dans les conditions de l’espèce.

95.      Par conséquent, tout bien considéré, la troisième branche de ce second moyen, à supposer qu’elle soit recevable, ne saurait prospérer et doit être rejetée comme non fondée.

D –    Synthèse

96.      Comme ni le premier ni le second moyen ne sont pertinents, le pourvoi dans son ensemble n’a aucune chance d’être accueilli et doit être rejeté comme partiellement irrecevable et partiellement non fondé.

V –    Sur les dépens

97.      Si le pourvoi est rejeté comme nous le proposons en l’espèce, alors la Cour se prononce sur les dépens conformément à l’article 184, paragraphe 2, de son règlement de procédure, les modalités étant régies par les articles 137 à 146, lus conjointement avec l’article 184, paragraphe 1, du règlement de procédure.

98.      Il découle de l’article 138, paragraphes 1 et 2, lu conjointement avec l’article 184, paragraphe 1, du règlement de procédure, que la partie qui succombe est condamnée aux dépens s’il est conclu en ce sens; si plusieurs parties succombent, la Cour décide du partage des dépens. Comme la Commission a présenté une conclusion en ce sens et que les requérants ont succombé, ils doivent être condamnés aux dépens. Ayant introduit le pourvoi ensemble, ils devront supporter ces dépens solidairement (65).

99.      Il doit en aller autrement des dépens du Parlement et du Conseil. Ces institutions, qui étaient intervenues au soutien de la Commission en première instance, ont participé à la procédure écrite et à l’audience dans le cadre du pourvoi. La Cour peut condamner ces parties à leurs propres dépens conformément à l’article 184, paragraphe 4, deuxième phrase, du règlement de procédure.

100. Certes, comme le montre son libellé («peut»), cette disposition n’exclut nullement que, le cas échéant, la Cour en décide autrement et condamne le requérant du pourvoi qui a succombé aux dépens de parties qui sont intervenues au soutien de la partie adverse en première instance, lorsque celles‑ci, comme en l’espèce le Parlement et le Conseil, ont obtenu gain de cause (66). Toutefois, en l’espèce, il nous paraît approprié de nous en tenir à la règle énoncée à l’article 184, paragraphe 4, deuxième phrase, du règlement de procédure. L’article 140, paragraphe 1, lu conjointement avec l’article 184, paragraphe 1, du règlement de procédure, va également dans ce sens (67).

VI – Conclusion

101. Au vu des considérations qui précèdent, nous concluons à ce qu’il plaise à la Cour:

1)      rejeter le pourvoi;

2)      condamner le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne à supporter chacun leurs propres dépens;

3)      pour le reste, condamner les requérants à supporter solidairement les dépens.


1 – Langue originale: l’allemand.


2 – D’autres litiges concernant l’article 114 TUE sont pendants, notamment les affaires C‑358/14 (Pologne/Parlement et Conseil), C‑477/14 (Pillbox 38) et C‑547/14 (Philip Morris Brands e.a.).


3 – Les Inuits sont un peuple autochtone qui vit surtout dans les régions arctiques et subarctiques du centre et du nord‑est du Canada, en Alaska, au Groenland et dans certaines parties de la Russie. Le terme «Eskimos», parfois utilisé dans le langage courant, désigne, outre les Inuits, également d’autres peuples arctiques.


4 – Règlement (CE) no 1007/2009, du 16 septembre 2009, sur le commerce des produits dérivés du phoque (JO L 286, p. 36, ci‑après le «règlement de base»).


5 – Ordonnance du Tribunal Inuit Tapiriit Kanatami e.a./Parlement et Conseil (T‑18/10, EU:T:2011:419), confirmée par l’arrêt Inuit Tapiriit Kanatami e.a./Parlement et Conseil (C‑583/11 P, EU:C:2013:625).


6 – Règlement (UE) no 737/2010, du 10 août 2010, portant modalités d’application du règlement no 1007/2009 (JO L 216, p. 1, ci‑après le «règlement de mise en œuvre»).


7 – Arrêt du Tribunal Inuit Tapiriit Kanatami e.a./Commission (T‑526/10, EU:T:2013:215, ci‑après l’«arrêt attaqué»).


8 – En anglais: «as a standard of achievement to be pursued in a spirit of partnership and mutual respect»; en espagnol: «como ideal común que debe perseguirse en un espíritu de solidaridad y respeto mutuo».


9 – Les procédures engagées par le Canada et la Norvège contre l’Union devant l’organe de règlement des différends de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) (CE — Produits dérivés du phoque, affaires DS400 et DS 401), concernant lesquelles les rapports avec recommandations ont été adoptés le 18 juin 2014, avaient pour objets d’autres questions que le présent pourvoi.


10 – Voir à cet égard points 27 à 96 des présentes conclusions.


11 – Ce faisant, le Tribunal s’appuie sur la jurisprudence appliquée occasionnellement par la Cour conformément aux arrêts Conseil/Boehringer (C‑23/00 P, EU:C:2002:118, points 51 et 52) ainsi que France/Commission (C‑233/02, EU:C:2004:173, point 26).


12 – Arrêt Stadtwerke Schwäbisch Hall e.a./Commission (C‑176/06 P, EU:C:2007:730, point 18).


13 – Voir à cet égard note 5.


14 – Le troisième cas de figure de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE accorde à toute personne physique ou morale la qualité pour agir contre des actes réglementaires qui les concernent directement et qui ne comportent pas de mesures d’exécution.


15 – Arrêt CIRFS e.a./Commission (C‑313/90, EU:C:1993:111, points 30 et 31).


16 – Arrêts France/Commission (15/76 et 16/76, EU:C:1979:29, point 7); Crispoltoni e.a. (C‑133/93, C‑300/93 et C‑362/93, EU:C:1994:364, point 43); IECC/Commission (C‑449/98 P, EU:C:2001:275, point 87) et Schaible (C‑101/12, EU:C:2013:661, point 50).


17 – Arrêts Arnold André (C‑434/02, EU:C:2004:800, point 38); Swedish Match (C‑210/03, EU:C:2004:802, point 37); Allemagne/Parlement et Conseil (C‑380/03, EU:C:2006:772, points 46, 51 et 55) ainsi que Vodafone e.a. (C‑58/08, EU:C:2010:321, point 39).


18 – Arrêts British American Tobacco (Investments) et Imperial Tobacco (C‑491/01, EU:C:2002:741, point 60); Royaume‑Uni/Parlement et Conseil (C‑217/04, EU:C:2006:279) ainsi que Vodafone e.a. (C‑58/08, EU:C:2010:321, point 32).


19 – Arrêts Allemagne/Parlement et Conseil (C‑380/03, EU:C:2006:772, point 37) ainsi que Vodafone e.a. (C‑58/08, EU:C:2010:321, point 32).


20 – Arrêts Allemagne/Parlement et Conseil (C‑376/98, EU:C:2000:544, point 84) ainsi que Vodafone e.a. (C‑58/08, EU:C:2010:321, point 32).


21 – Voir à cet égard, notamment, point 36 de l’arrêt attaqué.


22 – Considérants 5, 6 et 7 du règlement de base.


23 – Considérant 6 du règlement de base.


24 – Considérants 7 et 10 du règlement de base.


25 – Arrêt AJD Tuna (C‑221/09, EU:C:2011:153, point 59).


26 – Arrêt Stora Kopparbergs Bergslags/Commission (C‑286/98 P, EU:C:2000:630, point 61); voir dans le même sens déjà arrêts Präsident e.a./Haute Autorité (36/59 à 38/59 et 40/59, EU:C:1960:36, notamment point 857) ainsi que Picciolo/Parlement (111/83, EU:C:1984:200, point 22).


27 – Arrêts Michel/Parlement (195/80, EU:C:1981:284, point 22); Dansk Rørindustri e.a./Commission (C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, EU:C:2005:408, point 463); Elf Aquitaine/Commission (C‑521/09 P, EU:C:2011:620, point 149) ainsi qu’Alliance One International et Standard Commercial Tobacco/Commission et Commission/Alliance One International e.a. (C‑628/10 P et C‑14/11 P, EU:C:2012:479, point 74).


28 – Point 51 de l’arrêt attaqué.


29 – La Belgique et les Pays‑Bas.


30 – Voir en ce sens arrêts Arnold André (C‑434/02, EU:C:2004:800, point 38) et Swedish Match (C‑210/03, EU:C:2004:802, point 37).


31 – Arrêts Sumitomo Metal Industries et Nippon Steel/Commission (C‑403/04 P et C‑405/04 P, EU:C:2007:52, point 40); Bertelsmann et Sony Corporation of America/Impala (C‑413/06 P, EU:C:2008:392, point 117); Solvay/Commission (C‑109/10 P, EU:C:2011:686, point 51) et Commission/Stichting Administratiekantoor Portielje (C‑440/11 P, EU:C:2013:514, point 59).


32 – Arrêts British American Tobacco (Investments) et Imperial Tobacco (C‑491/01, EU:C:2002:741, point 64); Arnold André (C‑434/02, EU:C:2004:800, point 39) et Swedish Match (C‑210/03, EU:C:2004:802, point 38).


33 – Arrêt Allemagne/Parlement et Conseil (C‑380/03, EU:C:2006:772, point 53).


34 – Point 55 de l’arrêt attaqué.


35 – Voir à cet égard, encore une fois, arrêts précités en notes 32 et 33.


36 – Jusqu’à présent, la jurisprudence n’a reconnu une espèce de seuil de minimis qu’en ce qui concerne l’intensité d’atteintes aux libertés fondamentales mais pas en ce qui concerne l’importance du volume des échanges du produit en cause; voir notamment arrêts CMC Motorradcenter (C‑93/92, EU:C:1993:838, point 12); Graf (C‑190/98, EU:C:2000:49, point 25) et Commission/Espagne (C‑211/08, EU:C:2010:340, point 72).


37 – Voir à cet égard, notamment, point 105 de l’arrêt attaqué.


38 – Arrêts Schindler Holding e.a./Commission (C‑501/11 P, EU:C:2013:522, point 32); Åkerberg Fransson (C‑617/10, EU:C:2013:105, point 44) ainsi qu’avis 2/13 (EU:C:2014:2454, point 179).


39 – Voir en ce sens également arrêts Otis e.a. (C‑199/11, EU:C:2012:684); Chalkor/Commission (C‑386/10 P, EU:C:2011:815) ainsi que Schindler Holding e.a./Commission (C‑501/11 P, EU:C:2013:522); même dans l’arrêt Sky Österreich (C‑283/11, EU:C:2013:28), la Cour a examiné seulement les dispositions de la Charte, alors que la question qui lui était posée faisait référence au protocole no 1 de la CEDH.


40 – Voir également à cet égard point 143 de nos conclusions présentées dans l’affaire Akzo Nobel Chemicals et Akcros Chemicals/Commission (C‑550/07 P, EU:C:2010:229) ainsi que point 203 de notre prise de position relative à l’avis 2/13 (EU:C:2014:2475).


41 – Nous examinerons dans le cadre de la deuxième branche du second moyen l’affirmation des requérants selon laquelle la protection d’intérêts d’ordre commercial serait plus marquée dans la CEDH que dans la Charte.


42 – Arrêts Nold/Commission (4/73, EU:C:1974:51, point 14); FIAMM e.a./Conseil et Commission (C‑120/06 P et C‑121/06 P, EU:C:2008:476, point 185) ainsi que Sky Österreich (C‑283/11, EU:C:2013:28, point 34).


43 – Arrêts Faust/Commission (52/81, EU:C:1982:369, point 27); Swedish Match (C‑210/03, EU:C:2004:802, point 73) ainsi qu’Alliance for Natural Health e.a. (C‑154/04 et C‑155/04, EU:C:2005:449, point 128).


44 – Cour eur. D. H., arrêts Marckx c. Belgique, 13 juin 1979, no 6833/74, série A no 31, point 50; Anheuser‑Busch c. Portugal, 11 janvier 2007, no 73049/01, CEDH 2007‑I, point 64, et Malik c. Royaume Uni, 13 mars 2012, no 23780/08, point 93.


45 – Voir notamment Cour eur. D. H., arrêts Pressos Compania Naviera c. Belgique, 20 novembre 1995, no 17849/91, série A no 322, point 31, et Maurice c. France, 6 octobre 2005, no 11810/03, CEDH 2005‑IX, point 63.


46 – Voir en ce sens également Cour eur. D. H., arrêt Maurice c. France, précité en note 45, points 65 et 66, ainsi que Prince Hans‑Adam II de Liechtenstein c. Allemagne, 12 juillet 2001, no 42527/98, CEDH 2001‑VIII, points 83 à 87.


47 – Cour eur. D. H., arrêts Tre Traktörer Aktiebolag c. Suède, 7 juillet 1989, no 10873/84, série A no 159, point 53; Van Marle e.a. c. Pays‑Bas, 25 mars 1999, no 8543/79, série A no 101; Iatridis c. Grèce, 25 mars 1999, no 31107/96, CEDH 1999‑II, points 54 et 55; Centro Europa 7 et Di Stefano c. Italie, 7 juin 2012, no 38433/09, CEDH 2012, points 178 et 179, ainsi que Malik c. Royaume‑Uni, précité en note 44, point 93.


48 – Voir notamment point 109 de l’arrêt attaqué.


49 – C’est ce que suggère leur référence à l’arrêt Alliance for Natural Health e.a. (C‑154/04 et C‑155/04, EU:C:2005:449, point 127).


50 – Arrêt Groupe Gascogne/Commission (C‑58/12 P, EU:C:2013:770, point 35); voir également arrêts Dansk Rørindustri e.a./Commission (C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, EU:C:2005:408, point 165); Alliance One International et Standard Commercial Tobacco/Commission et Commission/Alliance One International e.a. (C‑628/10 P et C‑14/11 P, EU:C:2012:479, point 111) ainsi que Nexans et Nexans France/Commission (C‑37/13 P, EU:C:2014:2030, point 45).


51 – Arrêt Sky Österreich (C‑283/11, EU:C:2013:28, points 45 et 46).


52 – Arrêts Lindorfer/Conseil (C‑227/04 P, EU:C:2007:490, point 83); Schindler Holding e.a./Commission (C‑501/11 P, EU:C:2013:522, points 45 et 106) ainsi que MasterCard e.a./Commission (C‑382/12 P, EU:C:2014:2201, point 151).


53 – Voir à cet égard jurisprudence précitée en note 50.


54 – Voir, entre autres, arrêts Scaramuzza/Commission (C‑76/93 P, EU:C:1994:371, point 18); Akzo Nobel e.a./Commission (C‑97/08 P, EU:C:2009:536, points 38 et 39) ainsi que Commission/Pologne (C‑504/09 P, EU:C:2012:178, points 35 et 36).


55 – Arrêt Air Transport Association of America e.a. (C‑366/10, EU:C:2011:864, point 101).


56 – Voir dernier considérant du préambule de la DNUDPA (mise en italique par nos soins).


57 – Voir à cet égard notamment arrêts de la Cour internationale de justice du 20 février 1969, dans les affaires Plateau continental de la Mer du Nord (République fédérale d’Allemagne c. Danemark; République fédérale d’Allemagne c. Pays‑Bas), CIJ 1969, p. 4, point 77; et du 27 juillet 1986, Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui‑ci (Nicaragua c. États‑Unis d’Amérique), CIJ 1986, p. 14, points 183 et 184.


58 – La résolution 61/295 a été adoptée par 143 voix contre 4 et 11 abstentions (documents officiels de l’Assemblée générale des Nations unies, 61e session, supplément no 53, A/61/53, première partie, chapitre II, section A). Ont voté contre: l’Australie, le Canada, la Nouvelle‑Zélande et les États‑Unis d’Amérique; se sont abstenus, notamment, le Bengladesh, le Kenya, la Colombie, le Nigéria et la Fédération de Russie.


59 – Arrêt NTN Toyo Bearing e.a./Conseil (113/77, EU:C:1979:91, point 21).


60 – Arrêt Fediol/Commission (191/82, EU:C:1983:259, point 22); voir également, tout récemment, arrêt Conseil et Parlement/Commission et Commission/Vereniging Milieudefensie et Stichting Stop Luchtverontreiniging Utrecht (C‑401/12 P à C‑403/12 P, EU:C:2015:4, point 58).


61 – Considérant 14 du règlement de base.


62 – Arrêt Nakajima/Conseil (C‑69/89, EU:C:1991:186, point 31); voir également, tout récemment, arrêt Conseil et Parlement/Commission et Commission/Vereniging Milieudefensie et Stichting Stop Luchtverontreiniging Utrecht (C‑401/12 P à C‑403/12 P, EU:C:2015:4, point 59).


63 – Concernant la notion de «soft law», voir notamment point 97 et jurisprudence citée des conclusions récentes de l’avocat général Cruz Villalón présentées dans l’affaire Allemagne/Conseil (C‑399/12, EU:C:2014:289).


64 – Points 114 et 115 de l’arrêt attaqué.


65 – Arrêt Akzo Nobel Chemicals et Akcros Chemicals/Commission (C‑550/07 P, EU:C:2010:512, point 123); voir en ce sens également arrêt D et Suède/Conseil (C‑122/99 P et C‑125/99 P, EU:C:2001:304, point 65); dans cette affaire, D et le Royaume de Suède avaient même introduit deux pourvois séparés et ont quand même été condamnés à supporter solidairement les dépens.


66 – Voir en ce sens notamment arrêt Conseil/Zhejiang Xinan Chemical Industrial Group (C‑337/09 P, EU:C:2012:471, point 112); dans cette affaire, le Conseil, en tant que requérant au pourvoi ayant succombé, a été condamné à supporter les dépens de première instance d’Audace qui était intervenue au soutien de la partie adverse et avait obtenu gain de cause dans le cadre du pourvoi.


67 – Voir en ce sens arrêt Inuit Tapiriit Kanatami e.a./Parlement et Conseil (C‑583/11 P, EU:C:2013:625, point 116).