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Affaire C318/24 PPU [Breian] (i)

P.P.R.

(demande de décision préjudicielle, introduite par la Curtea de Apel Braşov)

 Arrêt de la Cour (cinquième chambre) du 29 juillet 2024

« Renvoi préjudiciel – Coopération judiciaire en matière pénale – Mandat d’arrêt européen – Décision-cadre 2002/584/JAI – Remise des personnes recherchées aux autorités judiciaires d’émission – Respect des droits fondamentaux – Défaillances systémiques ou généralisées concernant l’indépendance du pouvoir judiciaire de l’État membre d’émission – Défaillances portant sur l’absence de preuve de la prestation de serment des juges – Interdiction des traitements inhumains ou dégradants – Conditions de détention dans l’État membre d’émission – Appréciation par l’autorité judiciaire d’exécution – Refus d’exécution du mandat d’arrêt européen par l’autorité judiciaire d’exécution – Effets de ce refus pour l’autorité judiciaire d’exécution d’un autre État membre »

1.        Coopération judiciaire en matière pénale – Décision-cadre relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres – Questions préjudicielles – Recevabilité – Questions portant sur les obligations de l’autorité judiciaire d’exécution d’un mandat d’arrêt européen, posées par l’autorité judiciaire d’émission – Questions recevables

(Art. 267 TFUE ; décision-cadre du Conseil 2002/584, telle que modifiée par la décision-cadre 2009/299)

(voir points 30-32)

2.        Coopération judiciaire en matière pénale – Décision-cadre relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres – Remise des personnes condamnées ou soupçonnées aux autorités judiciaires d’émission – Obligation de respecter les droits et principes juridiques fondamentaux – Droit d’accès à un tribunal indépendant et impartial, établi préalablement par la loi – Défaillances systémiques ou généralisées concernant l’indépendance du pouvoir judiciaire de l’État membre d’émission – Défaillances portant sur la procédure de nomination des membres de ce pouvoir – Risque d’atteinte au droit fondamental à un procès équitable – Vérification par l’autorité judiciaire d’exécution – Portée – Conséquences

(Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, art. 47, 2e al. ; décision-cadre du Conseil 2002/584, telle que modifiée par la décision-cadre 2009/299, art. 1er, § 3)

(voir points 37, 38, 76-82)

3.        Coopération judiciaire en matière pénale – Décision-cadre relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres – Remise des personnes condamnées ou soupçonnées aux autorités judiciaires d’émission – Obligation de respecter les droits et principes juridiques fondamentaux – Refus d’exécution d’un mandat d’arrêt motivé par le risque d’atteinte au droit fondamental à un procès équitable – Effets de la décision de refus – Effets pour les autorités d’exécution d’autres États membres – Obligation de refuser l’exécution de ce mandat d’arrêt – Absence – Obligation, pour chaque autorité d’exécution, de procéder à la vérification de l’existence d’un motif justifiant la non-exécution dudit mandat

(Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, art. 47, 2e al. ; décision-cadre du Conseil 2002/584, telle que modifiée par la décision-cadre 2009/299, art. 1er, § 3, 3, point 2, et 15, § 1)

(voir points 39-46, 55, disp. 1)

4.        Coopération judiciaire en matière pénale – Décision-cadre relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres – Remise des personnes condamnées ou soupçonnées aux autorités judiciaires d’émission – Obligation de respecter les droits et principes juridiques fondamentaux – Refus d’exécution d’un mandat d’arrêt motivé par le risque d’atteinte au droit fondamental à un procès équitable – Effets de la décision de refus – Effets pour l’autorité d’émission – Faculté pour l’autorité d’émission de maintenir ce mandat d’arrêt – Conditions

(Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, art. 47, 2e al. ; décision-cadre du Conseil 2002/584, telle que modifiée par la décision-cadre 2009/299, art. 1er, § 3)

(voir points 47-49, 52-55, disp. 1)

5.        Coopération judiciaire en matière pénale – Décision-cadre relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres – Remise des personnes condamnées ou soupçonnées aux autorités judiciaires d’émission – Obligation de respecter les droits et principes juridiques fondamentaux – Droit d’accès à un tribunal indépendant et impartial, établi préalablement par la loi – Défaillances systémiques ou généralisées concernant l’indépendance du pouvoir judiciaire de l’État membre d’émission – Appréciation du risque d’atteinte au droit fondamental à un procès équitable – Suppression de l’avis de recherche international visant la personne faisant l’objet d’un mandat d’arrêt européen – Circonstance ne justifiant pas, à elle seule, le refus d’exécution du mandat d’arrêt – Circonstance susceptible d’être prise en compte dans le cadre de cette appréciation

(Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, art. 47, 2e al. ; décision-cadre du Conseil 2002/584, telle que modifiée par la décision-cadre 2009/299, art. 1er, § 3)

(voir points 59-61, disp. 2)

6.        Questions préjudicielles – Saisine de la Cour – Questions d’interprétation – Obligation de renvoi – Portée – Refus d’exécution d’un mandat d’arrêt européen – Autorité judiciaire d’émission dudit mandat devant statuer sur le maintien ou le retrait de ce mandat – Absence d’obligation de renvoi – Condition – Décision de cette autorité étant susceptible d’un recours juridictionnel de droit interne

(Art. 267 TFUE ; décision-cadre du Conseil 2002/584, telle que modifiée par la décision-cadre 2009/299)

(voir points 65-69, disp. 3)

7.        Coopération judiciaire en matière pénale – Décision-cadre relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres – Remise des personnes condamnées ou soupçonnées aux autorités judiciaires d’émission – Obligation de respecter les droits et principes juridiques fondamentaux – Droit d’accès à un tribunal indépendant et impartial, établi préalablement par la loi – Défaillances systémiques ou généralisées concernant l’indépendance du pouvoir judiciaire de l’État membre d’émission – Défaillances portant sur la procédure de nomination des membres de ce pouvoir – Incertitudes quant à la régularité de la prestation de serment par les juges de la formation de jugement – Circonstances ne justifiant pas, à elles seules, le refus d’exécution du mandat d’arrêt

(Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, art. 47, 2e al. ; décision-cadre du Conseil 2002/584, telle que modifiée par la décision-cadre 2009/299, art. 1er, § 3)

(voir points 84-88, disp. 4)

8.        Coopération judiciaire en matière pénale – Décision-cadre relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres – Remise des personnes condamnées ou soupçonnées aux autorités judiciaires d’émission – Principes de reconnaissance mutuelle et de coopération loyale – Droit de l’autorité judiciaire d’émission d’un mandat d’arrêt européen de participer, en tant que partie, à la procédure relative à l’exécution de ce mandat devant l’autorité judiciaire d’exécution – Absence

(Décision-cadre du Conseil 2002/584, telle que modifiée par la décision-cadre 2009/299, art. 15 et 19)

(voir points 90, 93, 95, 96, disp. 5)

9.        Coopération judiciaire en matière pénale – Décision-cadre relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres – Remise des personnes condamnées ou soupçonnées aux autorités judiciaires d’émission – Conséquences de la constatation du risque de traitement inhumain ou dégradant de la personne faisant l’objet du mandat d’arrêt européen

(Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, art. 4 ; décision-cadre du Conseil 2002/584, telle que modifiée par la décision-cadre 2009/299, art. 1er, § 3)

(voir points 101, 102)

10.      Coopération judiciaire en matière pénale – Décision-cadre relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres – Remise des personnes condamnées ou soupçonnées aux autorités judiciaires d’émission – Obligation de respecter les droits et principes juridiques fondamentaux – Conditions de détention dans l’État membre d’émission – Risque de traitement inhumain ou dégradant – Vérification par l’autorité judiciaire d’exécution – Portée – Obligation de solliciter de l’autorité judiciaire d’émission des informations complémentaires sur les conditions de détention – Absence de possibilité d’exiger l’application d’un standard plus élevé en matière de conditions de détention que celui garanti par la charte des droits fondamentaux

(Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, art. 4 ; décision-cadre du Conseil 2002/584, telle que modifiée par la décision-cadre 2009/299, art. 1er, § 3, et 15, § 2 et 3)

(voir points 103-112, 114-117, 119-122, disp. 6)

Résumé

Saisie à titre préjudiciel par la Curtea de Apel Braşov (cour d’appel de Braşov, Roumanie), la Cour précise, dans le cadre d’une affaire préjudicielle d’urgence, sa jurisprudence relative au motif de non-exécution d’un mandat d’arrêt européen (MAE) se rapportant au risque de violation des droits fondamentaux de la personne concernée en cas de sa remise aux autorités roumaines.

Le 17 décembre 2020, la cour d’appel de Braşov a émis un MAE contre P.P.R., en vue de l’exécution d’une peine d’emprisonnement. Arrêté en France en 2022, P.P. R. n’a cependant pas été remis aux autorités roumaines. Par un arrêt du 29 novembre 2023, la cour d’appel de Paris (France) a refusé l’exécution du MAE en raison de l’existence d’un risque de violation du droit fondamental à un procès équitable devant un tribunal indépendant et impartial, établi préalablement par la loi (1). Selon cette juridiction, il existerait des défaillances systémiques et généralisées affectant le pouvoir judiciaire en Roumanie dans la mesure où le lieu de conservation des procès-verbaux de prestation de serment des juges serait incertain, ce qui ferait naître un doute quant à la composition régulière des juridictions de cet État membre. En outre, en l’occurrence, le procès-verbal de prestation de serment d’un juge de la formation ayant infligé la peine d’emprisonnement serait introuvable alors qu’un autre juge de la même formation aurait seulement prêté serment lors de sa nomination en tant que procureur. Par ailleurs, par une décision de la chambre des requêtes de la Commission de contrôle des fichiers d’Interpol (CCF), l’avis de recherche international visant P.P. R. a été supprimé de la base de données d’Interpol au motif que les données le concernant n’étaient pas conformes aux règles d’Interpol relatives au traitement des données à caractère personnel. Cela aurait mis en évidence l’existence de sérieuses préoccupations, notamment, au sujet du respect des droits fondamentaux lors de la procédure dont P.P. R. a fait l’objet en Roumanie.

Le 29 avril 2024, P.P. R. a été arrêté à Malte en vertu du MAE émis contre lui. Le même jour, l’autorité judiciaire d’exécution maltaise a demandé à la juridiction de renvoi des informations complémentaires, précisant que P.P. R. avait invoqué l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 29 novembre 2023.

Par la suite, le 20 mai 2024, la juridiction maltaise a décidé de ne pas remettre P.P. R. aux autorités roumaines, estimant que les informations relatives aux conditions de détention en Roumanie dont elle disposait ne lui permettaient pas de conclure que l’interdiction de peines ou de traitements inhumains et dégradants, prévue à l’article 4 de la Charte, serait respectée si P.P. R. devait être remis à ces autorités.

Dans ces conditions, la juridiction de renvoi a décidé de poser à la Cour plusieurs questions préjudicielles portant en substance : tout d’abord, sur les effets produits, pour d’autres autorités d’exécution et pour l’autorité d’émission, par une décision d’une autorité d’exécution de refuser l’exécution d’un MAE ; ensuite, sur les motifs sous-tendant les décisions des autorités d’exécution française et maltaise de refuser l’exécution du MAE émis par l’autorité d’émission ; enfin, sur sa propre obligation de saisir la Cour à titre préjudiciel après un tel refus ainsi que sur son droit de participer à la procédure devant l’autorité d’exécution du MAE.

Appréciation de la Cour

En premier lieu, en ce qui concerne des effets d’une décision de refuser l’exécution d’un MAE pour d’autres autorités d’exécution, la Cour fait observer que la décision-cadre relative au MAE (2) ne prévoit pas la possibilité ou l’obligation, pour une autorité d’exécution d’un État membre, de refuser l’exécution d’un MAE au seul motif que son exécution a été refusée par l’autorité d’exécution d’un autre État membre, sans procéder elle-même à la vérification de l’existence d’un motif justifiant sa non-exécution. Ainsi, l’autorité d’exécution d’un État membre n’est pas tenue de refuser l’exécution d’un MAE lorsque l’autorité d’exécution d’un autre État membre a préalablement refusé de l’exécuter pour le motif que la remise de la personne concernée risquerait de porter atteinte au droit fondamental à un procès équitable. Néanmoins, dans le cadre de son propre examen de l’existence d’un motif de non-exécution, cette autorité doit tenir compte des motifs qui sous-tendent la décision de refus adoptée par la première autorité d’exécution.

S’agissant des effets de cette décision pour l’autorité d’émission, la Cour relève que la décision-cadre 2002/584 n’exclut pas la possibilité, pour cette autorité, de maintenir sa demande de remise au titre d’un MAE en dépit du refus d’exécuter celui-ci. Or, si l’autorité d’émission n’est pas tenue, à la suite d’un tel refus, de retirer son MAE, une décision de refuser son exécution doit, tout de même, l’inciter à la vigilance. Elle ne saurait, surtout en l’absence d’un changement de circonstances, maintenir un MAE lorsqu’une autorité judiciaire d’exécution a légitimement refusé (3) d’y donner suite en raison d’un risque réel de violation du droit fondamental à un procès équitable. En revanche, en l’absence d’un tel risque, à la suite notamment d’un changement de circonstances, le seul fait que l’autorité d’exécution ait refusé d’exécuter ledit MAE ne saurait faire obstacle à ce que l’autorité judiciaire d’émission maintienne celui-ci. Par ailleurs, il appartient à cette autorité d’examiner si, au regard des spécificités de l’espèce, le maintien du MAE revêt un caractère proportionné.

En deuxième lieu, pour ce qui est des motifs sous-tendant les décisions des autorités d’exécution française et maltaise de refuser l’exécution du MAE en cause, la Cour rappelle, premièrement, que, pour déterminer l’existence d’un risque réel de violation du droit fondamental à un procès équitable en raison de défaillances systémiques ou généralisées du fonctionnement du système juridictionnel de l’État membre d’émission, l’autorité d’exécution doit reposer son examen à la fois sur des éléments objectifs, fiables, précis et dûment actualisés relatifs au fonctionnement de ce système ainsi que sur une analyse concrète et précise de la situation individuelle de la personne recherchée. Dès lors, une décision de la CCF portant sur la situation de la personne faisant l’objet d’un MAE (4) ne saurait suffire à justifier le refus de l’exécution de ce MAE. Cependant, une telle décision peut être prise en compte par l’autorité judiciaire d’exécution en vue de décider s’il y a lieu de refuser d’exécuter le MAE.

Deuxièmement, la Cour considère que l’autorité judiciaire d’exécution d’un MAE émis en vue de l’exécution d’une peine ne peut pas refuser d’exécuter ce MAE en se fondant sur le motif que le procès-verbal de prestation de serment d’un juge ayant infligé cette peine est introuvable ou sur la circonstance qu’un autre juge de la même formation aurait seulement prêté serment lors de sa nomination en tant que procureur. En effet, toute irrégularité intervenant au cours de la procédure de nomination d’un juge, ou à l’occasion de son entrée en fonction, n’est pas de nature à jeter un doute sur l’indépendance et l’impartialité de ce juge et, partant, sur la qualité de « tribunal indépendant et impartial, établi préalablement par la loi », au sens du droit de l’Union, d’une formation de jugement dans laquelle il siège. En particulier, ne saurait constituer une défaillance systémique ou généralisée en ce qui concerne l’indépendance du pouvoir judiciaire la circonstance que le droit interne d’un État membre prévoit, éventuellement, qu’un procureur, qui a prêté serment lors de son entrée en fonction, ne doit pas, lors de sa nomination ultérieure aux fonctions de juge, prêter serment une nouvelle fois. De plus, une incertitude quant au lieu de conservation des procès-verbaux de prestation de serment des juges d’un État membre ou l’impossibilité de localiser ces procès-verbaux, notamment si plusieurs années se sont écoulées depuis la prestation de serment du juge concerné, ne sont pas, en elles-mêmes et à défaut d’autres indices pertinents, susceptibles de démontrer que les juges concernés ont exercé leurs fonctions sans jamais avoir prêté le serment exigé. En tout état de cause, une incertitude quant à la question de savoir si les juges d’un État membre ont, avant leur entrée en fonction, prêté le serment prévu par le droit interne ne saurait être considérée comme étant constitutive d’une défaillance systémique ou généralisée en ce qui concerne l’indépendance du pouvoir judiciaire dans cet État membre, si le droit interne prévoit des voies de droit efficaces qui permettent d’invoquer une éventuelle omission de prestation de serment par les juges ayant prononcé un jugement déterminé et d’obtenir ainsi l’annulation de ce jugement. Il appartiendra à la juridiction de renvoi de vérifier si de telles voies de droit existent dans le droit roumain.

Troisièmement, la Cour dit pour droit que, lors de l’examen des conditions de détention dans l’État membre d’émission, l’autorité judiciaire d’exécution ne peut pas refuser l’exécution d’un MAE en se fondant sur des éléments concernant les conditions de détention au sein des établissements pénitentiaires de l’État membre d’émission qu’elle a elle-même recueillis et à l’égard desquels elle n’a pas sollicité de l’autorité judiciaire d’émission des informations complémentaires. En outre, l’autorité judiciaire d’exécution ne peut pas appliquer un standard plus élevé en matière de conditions de détention que celui garanti par l’article 4 de la Charte. À cet égard, la seule absence d’établissement d’un « plan précis d’exécution de la peine » ou de « critères précis pour établir un régime d’exécution déterminé » ne relève pas de la notion de « traitement inhumain ou dégradant », au sens de l’article 4 de la Charte.

À supposer que l’établissement d’un tel plan ou de tels critères soit exigé dans l’État membre d’exécution, il y a lieu de rappeler que, en vertu du principe de confiance mutuelle, les États membres peuvent être tenus de présumer le respect des droits fondamentaux par les autres États membres, de telle sorte qu’il ne leur est pas possible, notamment, d’exiger d’un autre État membre un niveau de protection national des droits fondamentaux plus élevé que celui assuré par le droit de l’Union. Partant, l’autorité judiciaire d’exécution ne saurait refuser la remise de la personne recherchée au seul motif que l’autorité judiciaire d’émission ne lui a pas communiqué un « plan précis de l’exécution de la peine » ou des « critères précis pour établir un régime d’exécution déterminé ».

En troisième et dernier lieu, à propos des obligations et des droits de l’autorité judiciaire d’émission, la Cour explique, d’une part, que cette autorité n’est pas tenue de saisir la Cour à titre préjudiciel avant de décider, au regard des motifs ayant conduit l’autorité judiciaire d’exécution à refuser l’exécution d’un MAE, de retirer celui-ci ou de le maintenir, à moins que la décision qu’elle sera amenée à prendre ne soit pas susceptible d’un recours juridictionnel de droit interne, auquel cas elle est, en principe, tenue de saisir la Cour. Elle ne saurait être libérée de cette obligation que lorsqu’elle a constaté que la question soulevée n’est pas pertinente ou que la disposition du droit de l’Union en cause a fait l’objet d’une interprétation de la part de la Cour ou que l’interprétation correcte du droit de l’Union s’impose avec une telle évidence qu’elle ne laisse place à aucun doute raisonnable. D’autre part, la Cour estime que l’autorité judiciaire d’émission d’un MAE ne dispose pas du droit de participer, en tant que partie, à la procédure relative à l’exécution de ce MAE devant l’autorité judiciaire d’exécution. En effet, une telle participation n’est pas indispensable pour assurer le respect des principes de reconnaissance mutuelle et de coopération loyale qui sous-tendent le fonctionnement du mécanisme du MAE.


i      Le nom de la présente affaire est un nom fictif. Il ne correspond au nom réel d’aucune partie à la procédure.


1      Ce droit est consacré à l’article 47, deuxième alinéa, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »).


2      Décision-cadre 2002/584/JAI du Conseil, du 13 juin 2002, relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres (JO 2002, L 190, p. 1), telle que modifiée par la décision-cadre 2009/299/JAI du Conseil, du 26 février 2009 (JO 2009, L 81, p. 24) (ci-après la « décision-cadre 2002/584 »).


3      Conformément à l’article 1er, paragraphe 3, de la décision-cadre 2002/584, lequel dispose : « La présente décision-cadre ne saurait avoir pour effet de modifier l’obligation de respecter les droits fondamentaux et les principes juridiques fondamentaux tels qu’ils sont consacrés par l’article 6 du traité sur l’Union européenne. »


4      En l’occurrence, par sa décision, la CCF a ordonné la suppression de l’avis de recherche international visant P.P.R., en raison d’une violation des règles d’Interpol relatives au traitement des données à caractère personnel.