Language of document : ECLI:EU:C:2016:837

ARRÊT DE LA COUR (grande chambre)

8 novembre 2016 (*)

« Pourvoi – Marque de l’Union européenne – Demande d’enregistrement de la marque figurative comportant les éléments verbaux “compressor technology” – Opposition du titulaire des marques verbales KOMPRESSOR PLUS et KOMPRESSOR – Refus partiel d’enregistrement – Règlement (CE) n° 207/2009 – Article 60 – Règlement (CE) n° 216/96 – Article 8, paragraphe 3 – Recours “accessoire” – Règlement (CE) n° 40/94 – Article 8, paragraphe 1, sous b) – Caractère faiblement distinctif des marques nationales antérieures – Risque de confusion »

Dans l’affaire C‑43/15 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 3 février 2015,

BSH Bosch und Siemens Hausgeräte GmbH, établie à Munich (Allemagne), représentée par Mes S. Biagosch et R. Kunz-Hallstein, Rechtsanwälte,

partie requérante,

les autres parties à la procédure étant :

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. M. Fischer, en qualité d’agent,

partie défenderesse en première instance,

LG Electronics Inc., établie à Séoul (Corée du Sud),

partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO,

LA COUR (grande chambre),

composée de M. K. Lenaerts, président, M. A. Tizzano, vice-président, MM. M. Ilešič (rapporteur), L. Bay Larsen, T. von Danwitz, E. Juhász, Mmes M. Berger, A. Prechal et M. M. Vilaras, présidents de chambre, MM. A. Rosas, A. Borg Barthet, Mme K. Jürimäe et M. C. Lycourgos, juges,

avocat général : M. Y. Bot,

greffier : M. M. Aleksejev, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 14 décembre 2015,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 1er mars 2016,

rend le présent

Arrêt

1        Par son pourvoi, BSH Bosch und Siemens Hausgeräte GmbH (ci-après « BSH ») demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 4 décembre 2014, BSH/OHMI – LG Electronics (compressor technology) (T-595/13, non publié, ci‑après l’« arrêt attaqué », EU:T:2014:1023), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à l’annulation de la décision de la première chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 5 septembre 2013 (affaire R 1176/2012-1), telle que modifiée par la décision rectificative du 3 décembre 2013 (ci-après la « décision litigieuse »), relative à une procédure d’opposition entre LG Electronics Inc. (ci-après « LG ») et BSH.

 Le cadre juridique

 La réglementation relative à la marque de l’Union européenne

2        Le règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié par le règlement (CE) n° 422/2004 du Conseil, du 19 février 2004 (JO 2004, L 70, p. 1) (ci-après le « règlement n° 40/94 »), a été abrogé et remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), entré en vigueur le 13 avril 2009. Le présent litige est donc régi par les dispositions procédurales de ce dernier règlement. En revanche, compte tenu de la date d’introduction de la demande d’enregistrement en cause en l’espèce, à savoir le 24 novembre 2008, qui est déterminante aux fins de l’identification du droit matériel applicable, ledit litige est régi par les dispositions matérielles du règlement n° 40/94.

3        L’article 7 du règlement n° 40/94, intitulé « Motifs absolus de refus », dont le libellé a été repris sans modification à l’article 7 du règlement n° 207/2009, énonçait, à son paragraphe 1 :

« Sont refusés à l’enregistrement :

[...]

b)      les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif ;

c)      les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci ;

[...] »

4        L’article 8 du règlement n° 40/94, intitulé « Motifs relatifs de refus », dont le libellé a été repris sans modification à l’article 8 du règlement n° 207/2009, disposait, à son paragraphe 1 :

« Sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement :

[...]

b)      lorsqu’en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire dans lequel la marque antérieure est protégée ; le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure. »

5        L’article 51 du règlement n° 40/94, intitulé « Causes de nullité absolue », correspondant à l’article 52 du règlement n° 207/2009, prévoyait, à ses paragraphes 1 et 2 :

« 1.      La nullité de la marque communautaire est déclarée, sur demande présentée auprès de l’Office ou sur demande reconventionnelle dans une action en contrefaçon :

a)      lorsque la marque communautaire a été enregistrée contrairement aux dispositions de l’article 7 ;

b)      lorsque le demandeur était de mauvaise foi lors du dépôt de la demande de marque.

2.      Lorsque la marque communautaire a été enregistrée contrairement à l’article 7 paragraphe 1 point b), c) ou d), elle ne peut toutefois être déclarée nulle si, par l’usage qui en a été fait, elle a acquis après son enregistrement un caractère distinctif pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée. »

6        L’article 59 du règlement n° 207/2009, intitulé « Personnes admises à former le recours et à être parties à la procédure », fait partie du titre VII de ce règlement, intitulé « Procédure de recours ». Aux termes de cet article :

« Toute partie à une procédure ayant conduit à une décision peut recourir contre cette décision pour autant que cette dernière n’a pas fait droit à ses prétentions. [...] »

7        L’article 60 du règlement n° 207/2009, intitulé « Délai et forme », qui fait partie de ce même titre VII, dispose :

« Le recours doit être formé par écrit auprès de l’Office dans un délai de deux mois à compter du jour de la notification de la décision. Le recours n’est considéré comme formé qu’après paiement de la taxe de recours. [...] »

8        L’article 63 du règlement n° 207/2009, intitulé « Examen du recours », énonce, à son paragraphe 2 :

« Au cours de l’examen du recours, la chambre de recours invite les parties, aussi souvent qu’il est nécessaire, à présenter, dans un délai qu’elle leur impartit, leurs observations sur les notifications qu’elle leur a adressées ou sur les communications qui émanent des autres parties. »

9        L’article 65 du règlement n° 207/2009, intitulé « Recours devant la Cour de justice », prévoit, à ses paragraphes 1 et 2 :

« 1.      Les décisions des chambres de recours statuant sur un recours sont susceptibles d’un recours devant la Cour de justice.

2.      Le recours est ouvert pour incompétence, violation des formes substantielles, violation du traité, du présent règlement ou de toute règle de droit relative à leur application, ou détournement de pouvoir. »

10      L’article 75 du règlement n° 207/2009, intitulé « Motivation des décisions », fait partie du titre IX de ce règlement, intitulé « Dispositions de procédure ». Cet article dispose :

« Les décisions de l’Office sont motivées. Elles ne peuvent être fondées que sur des motifs sur lesquels les parties ont pu prendre position. »

11      Le règlement (CE) n° 216/96 de la Commission, du 5 février 1996, portant règlement de procédure des chambres de recours de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (JO 1996, L 28, p. 11), tel que modifié par le règlement (CE) n° 2082/2004 de la Commission, du 6 décembre 2004 (JO 2004, L 360, p. 8) (ci-après le « règlement n° 216/96 »), prévoit, à son article 8, intitulé « Déroulement de la procédure » :

« [...]

2.      Dans les procédures inter partes, et sans préjudice de l’article 61, paragraphe 2, du règlement, le mémoire exposant les motifs du recours et les observations en réponse peuvent être complétés par une réplique du requérant, présentée dans un délai de deux mois à compter de la notification qui lui est faite des observations en réponse, et une duplique de la partie défenderesse, présentée dans un délai de deux mois à compter de la notification qui lui est faite de la réplique.

3.      Dans les procédures inter partes, la partie défenderesse peut, dans ses observations en réponse, formuler des conclusions visant à l’annulation ou à la réformation de la décision contestée sur un point non soulevé dans le recours. De telles conclusions deviennent sans objet en cas de désistement du requérant. »

12      Postérieurement à l’introduction du présent pourvoi, le règlement n° 207/2009 a été modifié par le règlement (UE) 2015/2424 du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2015 (JO 2015, L 341, p. 21), entré en vigueur le 23 mars 2016.

13      En vertu de ce dernier règlement, l’article 60 du règlement n° 207/2009, désormais intitulé « Délai et forme du recours », est remplacé par le texte suivant :

« 1.      Le recours est formé par écrit auprès de l’Office dans un délai de deux mois à compter du jour de la notification de la décision. Le recours n’est considéré comme formé qu’après paiement de la taxe de recours. Il est déposé dans la langue de procédure de la décision attaquée. Un mémoire exposant les motifs du recours est déposé par écrit dans un délai de quatre mois à compter de la date de la notification de la décision.

2.      Dans les procédures inter partes, le défendeur peut, dans ses observations en réponse, formuler des conclusions visant à l’annulation ou à la réformation de la décision attaquée sur un point non soulevé dans le recours. De telles conclusions deviennent sans objet en cas de désistement du requérant. »

 La réglementation de l’Union relative aux marques nationales

14      L’article 3 de la directive 2008/95/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 octobre 2008, rapprochant les législations des États membres sur les marques (JO 2008, L 299, p. 25), intitulé « Motifs de refus ou de nullité », dispose, à son paragraphe 1, sous b) et c) :

« Sont refusés à l’enregistrement ou sont susceptibles d’être déclarés nuls s’ils sont enregistrés :

[...]

b)      les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif ;

c)      les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci ;

[...] »

 Les antécédents du litige

15      Le 24 novembre 2008, BSH a présenté à l’EUIPO une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne pour le signe figuratif suivant :

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16      Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 7, 9 et 11, au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié (ci-après l’« arrangement de Nice »). Cette demande a été publiée au Bulletin des marques de l’Union européenne n° 4/2009, du 2 février 2009.

17      Le 30 avril 2009, LG a formé opposition à l’enregistrement de la marque en cause pour l’ensemble des produits visés par ladite demande, en invoquant l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. Cette opposition était fondée sur les marques antérieures suivantes :

–        la marque française verbale KOMPRESSOR, enregistrée le 6 juillet 2007 sous le numéro 73477434, désignant les « lave-linge, aspirateurs, lave-vaisselle, mixeurs électriques, générateurs de courant », relevant de la classe 7, au sens de l’arrangement de Nice, et les « fourneaux au gaz, fours pour la cuisine ; appareils de climatisation, réfrigérateurs, fours à micro-ondes, appareils de ventilation, appareils de purification de l’air, grille-pain électriques, humidificateurs, lampes de poche, lampes-torches pour l’éclairage, sèche-linge », relevant de la classe 11, au sens de l’arrangement de Nice ;

–        la marque espagnole verbale KOMPRESSOR, enregistrée le 25 septembre 2007 sous le numéro 2753286, désignant les « machines à laver électriques, aspirateurs électriques, lave-vaisselle automatiques, mixeurs électriques, générateurs de courant », relevant de la classe 7, au sens de l’arrangement de Nice, et les « cuisinières au gaz, fours, appareils de conditionnement d’air, réfrigérateurs électriques (compartiment de congélation), micro-ondes, ventilateurs électriques, appareils et machines de purification de l’air, grille-pain électriques, ventilateurs, lanternes électriques et sèche-linge », relevant de la classe 11, au sens de l’arrangement de Nice ;

–        la marque britannique verbale KOMPRESSOR, enregistrée le 7 décembre 2007 sous le numéro 2444787, désignant les « machines à laver électriques ; aspirateurs électriques ; lave-vaisselle automatiques ; mixeurs électriques ; générateurs CC ; tous à usage ménager », relevant de la classe 7, au sens de l’arrangement de Nice, et les « cuisinières au gaz ; cuisinières (fours) ; fours à micro-ondes ; ventilateurs électriques ; grille-pain électriques ; lampes-torches pour l’éclairage ; sèche-linge électriques ; tous à usage ménager », relevant de la classe 11, au sens de l’arrangement de Nice, et

–        la marque verbale de l’Union européenne KOMPRESSOR PLUS, enregistrée le 23 août 2012 sous le numéro 7282924, désignant les « machines à laver électriques ; lave-vaisselle automatiques à usage ménager », relevant de la classe 7, au sens de l’arrangement de Nice.

18      Par décision du 3 mai 2012, la division d’opposition de l’EUIPO a partiellement accueilli l’opposition et a, en conséquence, rejeté la demande d’enregistrement de la marque de l’Union européenne en cause pour les produits suivants :

–        Classe 7, au sens de l’arrangement de Nice : « Machines et appareils électriques pour le ménage et la cuisine compris dans la classe 7, à savoir machines et appareils électriques pour la cuisine y compris broyeurs, batteurs et pétrins, presse-fruits, extracteurs de jus, centrifugeuses, moulins, découpeuses, outils électriques, ouvre-boîtes, dispositifs pour aiguiser les couteaux ainsi qu’appareils et dispositifs pour faire des boissons et/ou des aliments, pompes pour la distribution de boissons fraîches destinées à être utilisées avec des dispositifs de réfrigération de boissons ; machines à laver la vaisselle ; machines et appareils électriques pour traiter le linge et les vêtements compris dans la classe 7, y compris lave-linge, essoreuses ; presses et machines à repasser comprises dans la classe 7 ; équipements électriques de nettoyage à usage ménager, y compris équipements électriques pour le nettoyage des vitres, appareils électriques à cirer les chaussures et aspirateurs, appareils d’aspiration de déchets secs et humides ; pièces de tous les articles précités comprises dans la classe 7, en particulier tuyaux, tubes, filtres à poussières et sacs filtrant les poussières, tous pour aspirateurs » ;

–        Classe 9, au sens de l’arrangement de Nice : « Appareils et instruments électriques compris dans la classe 9, à savoir fers à repasser électriques ; balances de cuisine », et

–        Classe 11, au sens de l’arrangement de Nice : « Appareils de chauffage, de production de vapeur et de cuisson, à savoir foyers, rôtissoires, cuisinières, grils, grille-pain, appareils à décongeler et à tenir au chaud, chauffe-eau, thermoplongeurs, marmites autochauffantes, appareils à micro-ondes, gaufriers (électriques), cuit-œufs, friteuses (électriques) ; théières et cafetières électriques, machines à expresso, machines à café entièrement automatiques comprises dans la classe 11 ; appareils de réfrigération, à savoir, réfrigérateurs, bahuts, armoires frigorifiques, appareils pour le refroidissement de boissons, frigos-congélateurs, congélateurs, appareils et machines à glace ; appareils de séchage, à savoir, sèche-linge, machines à sécher le linge, sèche-mains, sèche-cheveux ; appareils de ventilation, à savoir, ventilateurs, filtres pour hottes aspirantes, équipements pour hottes aspirantes et couvercles pour hottes aspirantes, appareils de climatisation et appareils pour améliorer l’air, humidificateurs d’air, désodorisants, distributeurs de parfum (non à usage personnel) ; appareils de purification de l’air ; pompes à chaleur ; pièces de tous les articles précités compris dans la classe 11 ».

19      Pour les autres produits revendiqués, la division d’opposition de l’EUIPO a estimé que ceux-ci et les produits couverts par les marques antérieures étaient dissemblables. Partant, elle a rejeté l’opposition formée par LG au motif qu’il n’existait pas de risque de confusion pour les produits suivants :

–        Classe 7, au sens de l’arrangement de Nice : « Appareils électriques d’élimination des déchets, à savoir broyeurs de déchets et compacteurs de déchets » ;

–        Classe 9, au sens de l’arrangement de Nice : « Pèse-personnes ; appareils électriques pour souder les pellicules ; appareils de télécommande, de signalisation et de commande (électriques/ électroniques) pour machines et appareils pour le ménage et la cuisine ; supports de données enregistrés et vierges exploitables par une machine pour appareils ménagers ; appareils électriques distributeurs de boissons ou d’aliments, distributeurs automatiques ; appareils et programmes informatiques de commande et d’utilisation d’appareils ménagers ; pièces comprises dans la classe 9 pour tous les produits précités ; pièces comprises dans la classe 9 pour les appareils et instruments électriques compris dans la classe 9, à savoir fers à repasser électriques ; balances de cuisine », et

–        Classe 11, au sens de l’arrangement de Nice : « Lampes à infrarouges (autre qu’à usage médical) ; coussins chauffants (non à usage médical), couvertures chauffantes (non à usage médical) ; appareils de distribution d’eau et appareils sanitaires, à savoir notamment accessoires pour installations de vapeur, d’air et de distribution d’eau ; chauffe-eau, chauffe-eau à accumulation et chauffe-eau instantanés ; éviers ; pompes à chaleur ; pièces de tous les articles précités compris dans la classe 11; extracteurs de jus mécaniques (appareils à jus) de distribution de boissons fraîches destinés à être utilisés en combinaison avec des appareils de réfrigération de boissons ».

20      Le 26 juin 2012, BSH a formé un recours auprès de l’EUIPO, visant à l’annulation de la décision de la division d’opposition de cet Office. À cette occasion, BSH a par ailleurs apporté quelques limitations à la liste de produits compris dans la classe 7, au sens de l’arrangement de Nice, pour laquelle elle demandait l’enregistrement de la marque.

21      Dans ses observations en réponse au mémoire exposant les motifs du recours, en date du 31 octobre 2012, LG a fait valoir que certains des produits à comparer, qui avaient été jugés dissemblables par la division d’opposition de l’EUIPO, étaient en réalité similaires et que, par conséquent, la demande d’enregistrement en cause aurait dû être rejetée également pour ces produits. Ces observations indiquaient, par ailleurs, qu’elles visaient à ce que la décision de la division d’opposition de l’EUIPO soit réformée de sorte que cette demande d’enregistrement soit largement rejetée.

22      Lesdites observations ont été communiquées à BSH par un fax du greffe de l’EUIPO, en date du 8 novembre 2012, informant BSH, sur instruction de la première chambre de recours de cet Office, du fait que la procédure écrite a été close et que la communication de ces mêmes observations est effectuée uniquement à titre d’information.

23      Par la décision litigieuse, la première chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours de BSH.

24      Par cette même décision, la première chambre de recours de l’EUIPO a partiellement fait droit à la demande de LG, qu’elle a qualifiée de recours « accessoire » (« ancillary » appeal) conformément à l’article 8, paragraphe 3, du règlement n° 216/96.

25      À titre liminaire, la première chambre de recours de l’EUIPO a relevé que, LG n’ayant pas contesté le rejet de l’opposition concernant certains produits, la décision de la division d’opposition de cet Office était devenue définitive dans la mesure où l’enregistrement de la marque de l’Union européenne en cause a été autorisé pour ceux-ci.

26      S’agissant du public pertinent, la première chambre de recours de l’EUIPO, après avoir relevé que le territoire concerné correspond à ceux de l’Espagne, de la France et du Royaume-Uni, a constaté que le public pertinent est composé, d’une part, de l’utilisateur professionnel pour ce qui concerne les « appareils électriques distributeurs de boissons ou d’aliments, distributeurs automatiques » et, d’autre part, du consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, pour les autres produits.

27      S’agissant de la comparaison des signes en conflit, la première chambre de recours de l’EUIPO a considéré qu’il existait une similitude sur les plans visuel, phonétique et conceptuel et que, partant, ils étaient globalement similaires.

28      S’agissant de la comparaison des produits, d’une part, la première chambre de recours de l’EUIPO a confirmé l’appréciation de la division d’opposition de cet Office concernant les produits visés par les marques en conflit que cette dernière avait considérés comme identiques ou similaires et, partant, a confirmé que, s’agissant de ces produits, il existait un risque de confusion.

29      D’autre part, la première chambre de recours de l’EUIPO a considéré, contrairement à la division d’opposition de cet Office, que les « extracteurs de jus mécaniques (appareils à jus) de distribution de boissons fraîches destinés à être utilisés en combinaison avec des appareils de réfrigération de boissons », relevant de la classe 11, au sens de l’arrangement de Nice, ainsi que les « pièces comprises dans la classe 9 pour les appareils et instruments électriques, à savoir fers à repasser électriques ; balances de cuisine », relevant de la classe 9, au sens de l’arrangement de Nice, visés par la marque dont l’enregistrement est demandé, étaient similaires à des produits visés par les marques antérieures. Elle a estimé que, pour ces produits, il existait également un risque de confusion et a, dès lors, annulé la décision de la division d’opposition de l’EUIPO en ce qu’elle avait rejeté l’opposition pour lesdits produits.

 La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué

30      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 13 novembre 2013, BSH a introduit un recours tendant à l’annulation de la décision litigieuse. À l’appui de son recours, BSH a soulevé un moyen unique, tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

31      Tout en ne contestant pas les conclusions de la première chambre de recours de l’EUIPO selon lesquelles les produits en cause, y compris ceux pour lesquels la division d’opposition de l’EUIPO avait constaté qu’ils étaient dissemblables, sont identiques ou similaires et les marques en conflit sont globalement similaires, BSH a fait valoir, dans le cadre de ce moyen unique, que, pour les produits contenant ou susceptibles de contenir un compresseur, comme des aspirateurs, des climatiseurs et des réfrigérateurs, le signe KOMPRESSOR était descriptif et que, dès lors, les marques nationales antérieures revêtaient un caractère distinctif « minimal ». BSH a soutenu que, dans l’appréciation du risque de confusion, la première chambre de recours de l’EUIPO n’a pas suffisamment tenu compte du faible caractère distinctif desdites marques pour ces produits. En effet, eu égard à celui-ci, même de légères différences entre les marques en conflit suffiraient pour exclure tout risque de confusion.

32      Par l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté ce moyen unique et, partant, le recours dans son ensemble.

 Les conclusions des parties au pourvoi

33      BSH demande à la Cour :

–        d’annuler l’arrêt attaqué ;

–        d’annuler la décision litigieuse ;

–        à titre subsidiaire, de renvoyer l’affaire au Tribunal, et

–        de condamner l’EUIPO aux dépens des deux procédures.

34      L’EUIPO demande à la Cour :

–        de rejeter le pourvoi et

–        de condamner BSH aux dépens.

35      Par une demande datée du 29 octobre 2015, la Cour a invité la Commission européenne, au titre de l’article 24, second alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, à participer à l’audience afin de répondre aux questions écrites qu’elle a posées.

 Sur le pourvoi

36      Au soutien de son pourvoi, BSH invoque deux moyens, tirés, le premier, d’une violation de l’article 60 du règlement n° 207/2009, et, le second, d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

 Sur le premier moyen

37      Par son premier moyen, BSH reproche au Tribunal d’avoir approuvé, sans le moindre examen, le fait que, dans la décision litigieuse, la première chambre de recours de l’EUIPO, en se fondant sur l’article 8, paragraphe 3, du règlement n° 216/96, a qualifié le mémoire en réponse de LG du 31 octobre 2012 de recours « accessoire » et a refusé l’enregistrement de la marque en cause dans une mesure plus étendue que la division d’opposition de cet Office. Or, LG n’aurait pas introduit un recours satisfaisant aux conditions prévues à l’article 60 du règlement n° 207/2009, qui seul aurait pu justifier d’étendre le rejet de la demande d’enregistrement de la marque en cause au-delà de la décision de cette division d’opposition. En effet, selon BSH, contrairement à l’interprétation retenue par la première chambre de recours de l’EUIPO, l’article 8, paragraphe 3, du règlement n° 216/96 ne saurait permettre, en l’absence d’une base juridique appropriée dans le règlement n° 207/2009, de remettre en cause une partie de la décision de la division d’opposition de cet Office qui n’a pas été attaquée par le recours principal et qui serait, par conséquent, devenue définitive.

38      L’EUIPO estime, à titre principal, que ce moyen est irrecevable dans la mesure où il a été soulevé pour la première fois au stade du pourvoi et, à titre subsidiaire, qu’il est en tout état de cause non fondé, dès lors que l’article 8, paragraphe 3, du règlement n° 216/96 permet à la partie défenderesse de formuler, dans ses observations en réponse, des conclusions visant à l’annulation ou à la réformation de la décision contestée sur un point non soulevé dans le recours.

39      Il est constant que, par la décision litigieuse, la première chambre de recours de l’EUIPO, tout en rejetant le recours de BSH visant à l’annulation de la décision de la division d’opposition de cet Office en ce que celle-ci rejetait sa demande d’enregistrement de marque pour certains des produits revendiqués, a partiellement fait droit à la demande de LG, qu’elle a qualifiée de recours « accessoire » au titre de l’article 8, paragraphe 3, du règlement n° 216/96, par laquelle cette dernière avait sollicité, dans ses observations en réponse, la réformation de cette décision afin que cette demande d’enregistrement soit rejetée également pour certains des produits pour lesquels la division d’opposition de l’EUIPO avait autorisé l’enregistrement de la marque en cause. La première chambre de recours de l’EUIPO a ainsi réformé ladite décision au détriment de BSH, en refusant l’enregistrement de ladite marque pour des produits supplémentaires.

40      Il en ressort que la première chambre de recours de l’EUIPO a implicitement considéré que l’article 8, paragraphe 3, du règlement n° 216/96 a introduit une seconde voie de recours, qui s’ajoute à celle établie à l’article 60 du règlement n° 207/2009, dans sa version antérieure au règlement 2015/2424, et qui, sans être soumise aux conditions prévues à cet article 60, permet à la partie défenderesse d’attaquer la décision faisant l’objet du recours principal sur une partie de celle-ci non visée par ce recours et d’élargir ainsi l’étendue du litige, tel que défini par la partie requérante.

41      Par son premier moyen, BSH reproche au Tribunal de ne pas avoir examiné, dans l’arrêt attaqué, la compatibilité de cette interprétation avec l’article 60 du règlement n° 207/2009.

42      Cependant, il est constant que BSH n’a, à aucun stade de la procédure devant le Tribunal, invoqué la prétendue incompatibilité de ladite interprétation avec l’article 60 du règlement n° 207/2009 ou avec une quelconque autre disposition du droit de l’Union. En effet, son recours devant le Tribunal était fondé sur un moyen unique, tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

43      Or, conformément à une jurisprudence constante, permettre à une partie de soulever pour la première fois devant la Cour un moyen et des arguments qu’elle n’a pas soulevés devant le Tribunal reviendrait à l’autoriser à saisir la Cour, dont la compétence en matière de pourvoi est limitée, d’un litige plus étendu que celui dont a eu à connaître le Tribunal. Dans le cadre d’un pourvoi, la compétence de la Cour est donc limitée à l’appréciation de la solution légale qui a été donnée aux moyens et aux arguments débattus devant les premiers juges (voir, notamment, arrêt du 21 septembre 2010, Suède e.a./API et Commission, C‑514/07 P, C‑528/07 P et C‑532/07‑P, EU:C:2010:541, point 126 ainsi que jurisprudence citée).

44      Quant à l’argument, invoqué à cet égard par BSH lors de l’audience devant la Cour, selon lequel l’appréciation du droit de l’Union serait réservée à cette dernière, raison pour laquelle il était logique de soulever seulement devant celle-ci la question de la conformité, à l’article 60 du règlement n° 207/2009, de l’interprétation de l’article 8, paragraphe 3, du règlement n° 216/96 retenue par la première chambre de recours de l’EUIPO, force est de constater que cet argument manque en droit. En effet, ainsi qu’il résulte de l’article 256, paragraphe 1, TFUE et de l’article 65, paragraphes 1 et 2, du règlement n° 207/2009, le Tribunal est pleinement compétent, dans le cadre des recours introduits contre des décisions des chambres de recours de l’EUIPO, pour censurer notamment toute violation de ce règlement, y inclus celle de l’article 60 de celui-ci.

45      Enfin, si l’EUIPO a reconnu lors de l’audience devant la Cour que, par la décision litigieuse, la première chambre de recours de cet Office a fait partiellement droit au recours « accessoire » de LG sans avoir, au préalable, mis BSH en situation de faire valoir ses observations éventuelles sur celui-ci, en violant ainsi le principe du contradictoire tel que formalisé à l’article 63, paragraphe 2, et à l’article 75, seconde phrase, du règlement n° 207/2009, il n’en reste pas moins que, en l’absence de toute contestation par BSH lors de la procédure devant le Tribunal de cette circonstance et en l’absence de la moindre critique de BSH à l’encontre de l’analyse qui a conduit ladite chambre à accueillir ce recours « accessoire », il ne saurait être reproché au Tribunal de ne pas avoir relevé d’office cette violation.

46      Dans ces conditions, le premier moyen doit être rejeté comme étant irrecevable.

 Sur le second moyen

47      Par son second moyen, BSH invoque une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, en reprochant au Tribunal de s’être fondé, notamment au point 31 de l’arrêt attaqué, sur une conception erronée du risque de confusion qui a pour conséquence que le recoupement de deux marques au niveau d’un élément purement descriptif suffit à créer un tel risque, conduisant ainsi à la monopolisation d’une indication purement descriptive, ce que l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), de ce règlement vise pourtant à empêcher.

48      Selon BSH, dans le cas où la marque antérieure est une variante facilement reconnaissable d’une indication descriptive, et où la marque postérieure contient l’indication descriptive en tant que telle, même l’existence de similitudes importantes entre les signes et l’identité des produits que les marques en conflit désignent ne peut permettre de conclure à l’existence d’un risque de confusion, dès lors que les similitudes des signes se limitent aux indications descriptives et ne concernent que des produits qui sont décrits par l’indication. En effet, le public ne percevrait dans une indication descriptive aucune indication d’origine, mais s’orienterait d’après les éléments restants de la marque. Par ailleurs, selon cette thèse, l’étendue de la protection de la marque antérieure ne serait pas limitée de manière générale, mais uniquement en ce qui concerne l’indication descriptive elle-même, de sorte qu’elle demeurerait intacte par rapport à d’autres produits et à d’autres signes similaires.

49      L’EUIPO invoque, à titre principal, l’irrecevabilité du second moyen. En effet, d’une part, il ne ressortirait pas clairement du pourvoi quelles sont les constatations concrètes du Tribunal qui sont censées être contestées. D’autre part, l’allégation de BSH, selon laquelle le Tribunal aurait qualifié de façon inexacte l’importance du caractère distinctif des marques nationales antérieures, viserait à obtenir une nouvelle appréciation des faits. À titre subsidiaire, l’EUIPO soutient que ce moyen est non fondé.

 Sur la recevabilité

50      Selon une jurisprudence constante, il résulte de l’article 256 TFUE ainsi que de l’article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne que le pourvoi est limité aux questions de droit. Le Tribunal est, dès lors, seul compétent pour constater et apprécier les faits pertinents. L’appréciation de ces faits ne constitue donc pas, sous réserve du cas de leur dénaturation, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour dans le cadre d’un pourvoi (voir, notamment, arrêt du 17 mars 2016, Naazneen Investments/OHMI, C‑252/15 P, non publié, EU:C:2016:178, point 59 et jurisprudence citée).

51      En outre, en vertu des mêmes dispositions et de l’article 168, paragraphe 1, sous d), du règlement de procédure de la Cour, un pourvoi doit indiquer de façon précise les éléments critiqués de l’arrêt dont l’annulation est demandée ainsi que les arguments juridiques qui soutiennent de manière spécifique cette demande (voir, notamment, arrêts du 4 septembre 2014, Espagne/Commission, C‑197/13 P, EU:C:2014:2157, point 43, ainsi que du 5 mars 2015, Ezz e.a./Conseil, C‑220/14 P, EU:C:2015:147, point 111). À cet égard, il est précisé, à l’article 169, paragraphe 2, du règlement de procédure, que les moyens et les arguments de droit invoqués identifient avec précision les points des motifs de la décision du Tribunal qui sont contestés (arrêts du 28 juillet 2016, Tomana e.a./Conseil et Commission, C‑330/15 P, non publié, EU:C:2016:601, point 34, ainsi que du 20 septembre 2016, Mallis e.a./Commission et BCE, C‑105/15 P à C‑109/15 P, EU:C:2016:702, point 34).

52      À cet égard, il y a lieu de constater que, par son second moyen, BSH ne se borne nullement à demander une nouvelle appréciation des faits, mais reproche au Tribunal d’avoir omis de tenir compte des principes juridiques applicables à l’appréciation du risque de confusion entre des marques en conflit, ce qui constitue une question de droit pouvant être soumise à la Cour dans le cadre d’un pourvoi (voir, notamment, ordonnance du 7 mai 2015, Adler Modemärkte/OHMI, C‑343/14 P, non publiée, EU:C:2015:310, point 32 et jurisprudence citée).

53      Par ailleurs, il ressort clairement des écritures de BSH que ce moyen est notamment dirigé contre le point 31 de l’arrêt attaqué, lequel témoignerait de la méconnaissance, par le Tribunal, de l’essence même du risque de confusion, pour l’appréciation duquel le caractère distinctif de chacune des marques en conflit devrait nécessairement constituer le critère le plus important.

54      Il y a lieu, en conséquence, de considérer le second moyen comme étant recevable.

 Sur le fond

55      L’argumentation de BSH relative au risque de confusion avancée dans le cadre de son moyen unique de recours devant le Tribunal, qui correspond à celle défendue dans le cadre de son second moyen du pourvoi, a été examinée notamment aux points 26 à 32 de l’arrêt attaqué.

56      Ainsi, après avoir rappelé, aux points 26 et 27 de cet arrêt, la jurisprudence en la matière, le Tribunal a constaté, au point 28 dudit arrêt, que, s’agissant des produits pour lesquels la première chambre de recours de l’EUIPO a accueilli l’opposition, cette dernière a constaté, sans que BSH le conteste, que, d’une part, les produits en cause étaient, en partie, identiques et, en partie, similaires et, d’autre part, que les signes en conflit étaient similaires. Il a relevé que l’effet cumulatif de ces constats suffit, en tout état de cause, pour pouvoir conclure à l’existence d’un risque de confusion, même si le caractère distinctif des marques nationales antérieures était considéré comme étant faible.

57      Le Tribunal a ajouté, au point 29 de l’arrêt attaqué, que, dans le cadre de l’appréciation du risque de confusion, la première chambre de recours de l’EUIPO a effectivement tenu compte du fait que, en ce qui concerne les produits en cause, ni les marques nationales antérieures ni la marque demandée ne possédaient un caractère particulièrement distinctif. Toutefois, elle aurait rappelé que, selon la jurisprudence, même en présence d’une marque à caractère distinctif faible, il peut exister un risque de confusion, notamment en raison de l’existence d’une similitude des signes et des produits ou des services visés. Il en serait ainsi lorsque, comme en l’espèce, les produits en cause sont identiques et les marques en conflit présentent une similitude élevée.

58      Au point 31 dudit arrêt, le Tribunal a observé que retenir l’argument de BSH aurait pour effet de neutraliser le facteur tiré de la similitude des marques au profit de celui fondé sur le caractère distinctif de la marque antérieure, auquel il serait alors accordé une importance excessive. Il en résulterait que, dès lors que la marque antérieure n’est dotée que d’un faible caractère distinctif, un risque de confusion n’existerait qu’en cas de reproduction complète de celle-ci par la marque demandée, tout en occultant le degré de similitude entre les signes en cause. Un tel résultat ne serait pas conforme à la nature même de l’appréciation globale que les autorités compétentes sont chargées d’effectuer en vertu de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

59      Partant, le Tribunal a estimé, au point 32 de l’arrêt attaqué, que les arguments de BSH relatifs au caractère faiblement distinctif des marques nationales antérieures ne sauraient affecter la conclusion de la première chambre de recours de l’EUIPO quant à l’existence d’un risque de confusion.

60      Or, cette appréciation du risque de confusion par le Tribunal n’est entachée d’aucune erreur de droit.

61      En effet, il convient de relever que la Cour, rejetant une argumentation similaire à celle avancée par BSH dans le cadre du second moyen, a déjà jugé à plusieurs reprises que, si le caractère distinctif d’une marque antérieure doit être pris en compte dans le cadre de l’appréciation globale de l’existence d’un risque de confusion, il ne constitue cependant qu’un élément parmi d’autres intervenant lors de cette appréciation (voir, notamment, ordonnances du 29 novembre 2012, Hrbek/OHMI, C‑42/12 P, non publiée, EU:C:2012:765, point 61, et du 2 octobre 2014, Przedsiębiorstwo Handlowe Medox Lepiarz/OHMI, C‑91/14 P, non publiée, EU:C:2014:2261, point 22).

62      En outre, s’il est vrai que le risque de confusion est d’autant plus élevé que le caractère distinctif de la marque antérieure s’avère important, un tel risque n’est pas pour autant exclu lorsque le caractère distinctif de la marque antérieure est faible (voir, notamment, ordonnance du 19 novembre 2015, Fetim/OHMI, C‑190/15 P, non publiée, EU:C:2015:778, point 40 et jurisprudence citée).

63      Par conséquent, même en présence d’une marque antérieure à caractère distinctif faible, le Tribunal peut estimer qu’il existe un risque de confusion, notamment en raison d’une similitude des signes et des produits ou des services visés (voir, notamment, ordonnances du 2 octobre 2014, Przedsiębiorstwo Handlowe Medox Lepiarz/OHMI, C‑91/14 P, non publiée, EU:C:2014:2261, point 24 et jurisprudence citée, ainsi que du 7 mai 2015, Adler Modemärkte/OHMI, C-343/14 P, non publiée, EU:C:2015:310, point 59).

64      Ainsi, les constatations effectuées par le Tribunal au point 31 de l’arrêt attaqué, rejetant la thèse défendue par BSH et visées par le second moyen, ne constituent, en réalité, qu’un rappel de la jurisprudence constante de la Cour, selon laquelle cette thèse n’est pas conforme à la nature même de l’appréciation globale que les autorités compétentes sont chargées d’entreprendre en vertu de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, dès lors que, contrairement à ce que soutient la requérante, elle aurait pour effet de neutraliser le facteur tiré de la similitude des marques au profit de celui fondé sur le caractère distinctif de la marque antérieure (voir, à cet égard, arrêt du 15 mars 2007, T.I.M.E. ART/OHMI, C‑171/06 P, non publié, EU:C:2007:171, point 41, ainsi que ordonnance du 19 novembre 2015, Fetim/OHMI, C‑190/15 P, non publiée, EU:C:2015:778, point 46 et jurisprudence citée).

65      S’agissant de l’argument avancé à cet égard par BSH, selon lequel cette jurisprudence serait erronée étant donné qu’elle conduirait à la monopolisation d’une indication purement descriptive, il y a lieu de constater que c’est non pas l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, mais l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), et l’article 51 de ce règlement, ainsi que l’article 3, paragraphe 1, sous b) et c), de la directive 2008/95, qui ont pour objet d’éviter une telle monopolisation.

66      En ce qui concerne, en particulier, des marques nationales antérieures, la Cour a déjà eu l’occasion de relever qu’il découle de la coexistence des marques de l’Union avec celles-ci, ainsi que du fait que l’enregistrement de ces dernières ne relève pas de la compétence de l’EUIPO, ni leur contrôle juridictionnel de la compétence du Tribunal, que, lors d’une procédure d’opposition à une demande d’enregistrement d’une marque de l’Union, la validité des marques nationales ne peut être mise en cause. Dès lors, dans le cadre d’une telle procédure d’opposition, il n’est pas non plus possible de constater, à l’égard d’un signe identique à une marque protégée dans un État membre, un motif absolu de refus, tel que le caractère descriptif et l’absence de caractère distinctif, prévu à l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement n° 40/94 ainsi qu’à l’article 3, paragraphe 1, sous b) et c), de la directive 2008/95 (voir, en ce sens, arrêt du 24 mai 2012, Formula One Licensing/OHMI, C‑196/11 P, EU:C:2012:314, points 40 et 41).

67      Il s’ensuit que, dans l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, il doit être reconnu un certain degré de caractère distinctif d’une marque nationale invoquée à l’appui d’une opposition à l’enregistrement d’une marque de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 24 mai 2012, Formula One Licensing/OHMI, C‑196/11 P, EU:C:2012:314, point 47).

68      Partant, à supposer qu’une marque nationale antérieure soit effectivement descriptive pour certains des produits pour lesquels elle a été enregistrée et que sa protection conduise à la monopolisation indue de l’indication descriptive en question, il doit être remédié à une telle conséquence non pas par une application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, qui exclut par principe ces produits de la protection que cette disposition confère aux marques antérieures, mais par une procédure de nullité entamée dans l’État membre concerné en vertu de l’article 3, paragraphe 1, sous b) et c), de la directive 2008/95 (voir, en ce sens, arrêt du 24 mai 2012, Formula One Licensing/OHMI, C‑196/11 P, EU:C:2012:314, point 45).

69      Dans ces conditions, doit également être rejeté comme étant en tout état de cause inopérant l’argument de BSH selon lequel la Cour a confirmé, dans l’arrêt du 10 novembre 2011, LG Electronics/OHMI (C‑88/11 P, non publié, EU:C:2011:727), le refus par l’EUIPO d’enregistrer comme marque de l’Union le signe « KOMPRESSOR PLUS » pour des aspirateurs, au motif que ce signe était purement descriptif. En effet, cet arrêt ne remet pas en cause la validité des marques nationales qui ont été invoquées par LG à l’appui de son opposition. 

70      Enfin, contrairement à ce que fait valoir BSH, il ne saurait être exclu d’avance et dans toute hypothèse que, dans le cas où une marque demandée reprend avec de légères différences le signe faiblement distinctif d’une marque nationale antérieure, les consommateurs puissent supposer que ces différences entre les signes en conflit reflètent une variation dans la nature des produits ou découlent de considérations de marketing sans traduire une origine commerciale différente et qu’il puisse donc exister un risque de confusion dans l’esprit du public (voir, en ce sens, ordonnance du 27 avril 2006, L’Oréal/OHMI, C‑235/05 P, non publiée, EU:C:2006:271, point 45).

71      Ainsi, c’est sans commettre d’erreur de droit que le Tribunal a pu conclure en l’espèce, à l’issue de son appréciation autonome des faits, à l’existence d’un tel risque entre les marques nationales antérieures et la marque demandée.

72      Il découle de l’ensemble des considérations qui précèdent que le second moyen doit être rejeté comme non fondé et que, partant, le pourvoi doit être rejeté dans son ensemble.

 Sur les dépens

73      Aux termes de l’article 184, paragraphe 2, du règlement de procédure, lorsque le pourvoi n’est pas fondé, la Cour statue sur les dépens.

74      En vertu de l’article 138, paragraphe 1, de ce règlement, rendu applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de celui-ci, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

75      L’EUIPO ayant conclu à la condamnation de BSH aux dépens, et celle‑ci ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.

Par ces motifs, la Cour (grande chambre) déclare et arrête :

1)      Le pourvoi est rejeté.

2)      BSH Bosch und Siemens Hausgeräte GmbH est condamnée aux dépens.

Signatures


* Langue de procédure : l’allemand.