Language of document : ECLI:EU:T:2018:316

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

31 mai 2018 (*)

« Politique étrangère et de sécurité commune – Mesures restrictives prises à l’encontre de la Syrie – Gel des fonds – Détournement de pouvoir – Principe de bonne administration – Principe d’autorité de la chose jugée – Violation de l’article 266 TFUE – Erreur manifeste d’appréciation – Droits fondamentaux – Proportionnalité – Principe de non-discrimination »

Dans l’affaire T‑461/16,

Khaled Kaddour, demeurant à Damas (Syrie), représenté par Mmes V. Davies et V. Wilkinson, solicitors, et M. R. Blakeley, barrister,

partie requérante,

contre

Conseil de l’Union européenne, représenté initialement par MM. J. Bauerschmidt et G. Étienne, puis par M. Bauerschmidt et par Mme S. Kyriakopoulou, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation de la décision (PESC) 2016/850 du Conseil, du 27 mai 2016, modifiant la décision 2013/255 PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie (JO 2016, L 141, p. 125), et du règlement d’exécution (UE) 2016/840 du Conseil, du 27 mai 2016, mettant en œuvre le règlement (UE) no 36/2012 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie (JO 2016, L 141, p. 30), pour autant que ces actes concernent le requérant,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de M. D. Gratsias, président, Mme I. Labucka et M. I. Ulloa Rubio (rapporteur), juges,

greffier : Mme M. Marescaux, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 16 novembre 2017,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le requérant, M. Khaled Kaddour, est un homme d’affaires de nationalité syrienne qui développe une activité commerciale, notamment, dans le domaine du tabac et de l’automobile.

2        Condamnant fermement la répression violente des manifestations pacifiques en Syrie et lançant un appel aux autorités syriennes pour qu’elles s’abstiennent de recourir à la force, le Conseil de l’Union européenne a adopté, le 9 mai 2011, la décision 2011/273/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie (JO 2011, L 121, p. 11). Compte tenu de la gravité de la situation, le Conseil a institué un embargo sur les armes, une interdiction des exportations de matériel susceptible d’être utilisé à des fins de répression interne, des restrictions à l’admission dans l’Union européenne ainsi que le gel des fonds et des ressources économiques de certaines personnes et entités responsables de la répression violente exercée contre la population civile syrienne.

3        Les noms des personnes responsables de la répression violente exercée contre la population civile en Syrie ainsi que ceux des personnes, physiques ou morales, et des entités qui leur sont liées sont mentionnés dans l’annexe de la décision 2011/273. En vertu de l’article 5, paragraphe 1, de cette décision, le Conseil, statuant sur proposition d’un État membre ou du haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, peut modifier ladite annexe. Le nom du requérant n’y figurait pas.

4        Étant donné que certaines des mesures restrictives prises à l’encontre de la République arabe syrienne entrent dans le champ d’application du traité FUE, le Conseil a adopté le règlement (UE) no 442/2011, du 9 mai 2011, concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie (JO 2011, L 121, p. 1). Ce règlement est, pour l’essentiel, identique à la décision 2011/273, mais il prévoit des possibilités de déblocage des fonds gelés. La liste des personnes, des entités et des organismes reconnus comme étant soit responsables de la répression en cause, soit associés auxdits responsables, figurant dans l’annexe II dudit règlement, est identique à celle figurant dans l’annexe de la décision 2011/273. Le nom du requérant n’y figurait donc pas. En vertu de l’article 14, paragraphes 1 et 4, du règlement no 442/2011, lorsque le Conseil décide d’appliquer à une personne, physique ou morale, à une entité ou à un organisme les mesures restrictives visées, il modifie l’annexe II en conséquence et, par ailleurs, examine la liste qui y figure à intervalles réguliers et au moins tous les douze mois.

 Sur l’inscription initiale du nom du requérant sur les listes de personnes visées par des mesures restrictives

5        Par la décision d’exécution 2011/367/PESC, du 23 juin 2011, mettant en œuvre la décision 2011/273 (JO 2011, L 164, p. 14), le Conseil a modifié la décision 2011/273 en vue notamment d’appliquer les mesures restrictives en cause à d’autres personnes et entités. Le nom du requérant figurait à la ligne 6 du tableau de la partie A de l’annexe concernant les personnes visées par ladite décision d’exécution ainsi que la date de l’inscription de son nom sur la liste en cause, en l’occurrence le 23 juin 2011, et les motifs suivants :

« Partenaire d’affaires de Maher Al-Assad ; source de financement pour le régime. »

6        Le même jour, le Conseil a adopté, sur le fondement de l’article 215, paragraphe 2, TFUE et de la décision 2011/273, le règlement d’exécution (UE) no 611/2011, mettant en œuvre le règlement no 442/2011 (JO 2011, L 164 p. 1). Le nom du requérant figurait à la ligne 6 du tableau de l’annexe dudit règlement d’exécution avec les mêmes informations et motifs que ceux indiqués dans l’annexe de la décision d’exécution 2011/367.

7        Par la décision 2011/782/PESC, du 1er décembre 2011, concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie et abrogeant la décision 2011/273 (JO 2011, L 319, p. 56), le Conseil a estimé, compte tenu de la gravité de la situation en Syrie, qu’il était nécessaire d’instituer des mesures restrictives supplémentaires. Par souci de clarté, les mesures imposées par la décision 2011/273 et les mesures supplémentaires ont été regroupées dans un instrument juridique unique. La décision 2011/782 prévoit, à son article 18, des restrictions en matière d’admission sur le territoire de l’Union et, à son article 19, le gel des fonds et des ressources économiques des personnes et des entités dont le nom figure à l’annexe I. Le nom du requérant figurait à la ligne 29 du tableau de l’annexe I concernant les personnes visées par ladite décision avec les mêmes informations et motifs que ceux indiqués dans l’annexe de la décision d’exécution 2011/367.

8        Le 26 décembre 2011, le requérant a introduit devant le Tribunal un recours visant à obtenir l’annulation des décisions 2011/273, 2011/782 et du règlement no 442/2011, tels que mis en œuvre ou modifiés jusqu’au jour de la présentation du recours, pour autant que ces actes le concernaient. Ce recours a été enregistré au greffe du Tribunal sous la référence T‑654/11.

9        Le règlement no 442/2011 a été remplacé par le règlement (UE) no 36/2012 du Conseil, du 18 janvier 2012, concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie et abrogeant le règlement no 442/2011 (JO 2012, L 16, p. 1). Le nom du requérant figurait à la ligne 29 du tableau de l’annexe II de ce dernier règlement avec les mêmes informations et motifs que ceux indiqués dans l’annexe de la décision d’exécution 2011/367.

10      Par la décision 2012/739/PESC du Conseil, du 29 novembre 2012, concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie et abrogeant la décision 2011/782 (JO 2012, L 330, p. 21), les mesures restrictives en cause ont été regroupées dans un instrument juridique unique. Le nom du requérant figurait à la ligne 28 du tableau de l’annexe I de la décision 2012/739 avec les mêmes informations et motifs que ceux indiqués dans l’annexe de la décision d’exécution 2011/367.

11      La décision d’exécution 2013/185/PESC du Conseil, du 22 avril 2013, mettant en œuvre la décision 2012/739 (JO 2013, L 111, p. 77), visait à mettre à jour la liste des personnes et des entités faisant l’objet de mesures restrictives qui figurait à l’annexe I de la décision 2012/739. Le nom du requérant figurait à la ligne 28 du tableau de l’annexe I avec les mêmes informations et motifs que ceux indiqués dans l’annexe de la décision d’exécution 2011/367.

12      Le règlement d’exécution (UE) no 363/2013 du Conseil, du 22 avril 2013, mettant en œuvre le règlement no 36/2012 (JO 2013, L 111, p. 1), comportait les mêmes informations et motifs que ceux indiqués dans l’annexe de la décision d’exécution 2011/367.

13      Le 31 mai 2013, le Conseil a adopté la décision 2013/255/PESC, concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie (JO 2013, L 147, p. 14). Le nom du requérant figurait à la ligne 28 du tableau de l’annexe I de ladite décision avec les mêmes informations et motifs que ceux indiqués dans l’annexe de la décision d’exécution 2011/367.

14      Par mémoires en adaptation déposés au greffe du Tribunal les 22 et 28 juin, 23 et 31 juillet 2012 ainsi que le 7 janvier et le 24 juin 2013, le requérant a sollicité l’annulation, notamment, du règlement no 36/2012, de la décision 2012/739, de la décision d’exécution 2013/185, du règlement d’exécution no 363/2013 et de la décision 2013/255, pour autant que ces actes le concernaient.

15      Par arrêt du 13 novembre 2014, Kaddour/Conseil (T‑654/11, non publié, ci-après l’« arrêt Kaddour I », EU:T:2014:947), le Tribunal a accueilli le moyen, tiré d’une erreur manifeste d’appréciation commise par le Conseil en inscrivant le nom du requérant sur les listes de personnes visées par des mesures restrictives. En substance, il a considéré que le dossier du Conseil ne contenait aucun élément de preuve susceptible d’étayer les allégations selon lesquelles le requérant maintenait un lien professionnel avec M. Maher Al-Assad ou apportait un soutien financier au régime syrien. Par conséquent, faisant partiellement droit au recours du requérant, le Tribunal a annulé le règlement no 36/2012, le règlement d’exécution no 363/2013 et la décision 2013/255, pour autant qu’ils le concernaient, avec effet au 23 janvier 2015. Le recours a été déclaré irrecevable s’agissant des autres actes à l’encontre desquels il était dirigé.

16      Le Conseil n’a pas introduit de pourvoi contre l’arrêt du 13 novembre 2014, Kaddour I (T‑654/11, non publié, EU:T:2014:947).

 Sur la réinscription et le maintien du nom du requérant sur les listes de personnes visées par des mesures restrictives

17      Le 26 janvier 2015, le Conseil a adopté la décision d’exécution 2015/117/PESC, mettant en œuvre la décision 2013/255 (JO 2015, L 20, p. 85). Le même jour, il a adopté le règlement d’exécution (UE) 2015/108 mettant en œuvre le règlement no 36/2012 (JO 2015, L 20, p. 2). Par ces actes, le nom du requérant a été réinscrit sur les listes en cause.

18      En particulier, le nom du requérant a été réinscrit à la ligne 28 du tableau comportant les listes en cause sous le titre « A. Personnes », cette réinscription se fondant sur les motifs suivants :

« Homme d’affaires syrien important, proche de Maher Al-Assad, personnalité clé du régime syrien. Khaled Kaddour bénéficie des politiques menées par le régime syrien et soutient celui-ci ; il est associé à des personnes bénéficiant des politiques menées par le régime et soutenant celui-ci. »

19      Le 27 mars 2015, le requérant a introduit devant le Tribunal un recours visant à obtenir l’annulation de la décision d’exécution 2015/117 et du règlement d’exécution 2015/108, pour autant que ces actes le concernaient. Ce recours a été enregistré au greffe du Tribunal sous la référence T‑155/15.

20      Le 12 octobre 2015, le Conseil a adopté la décision (PESC) 2015/1836 modifiant la décision 2013/255 (JO 2015, L 266, p. 75). Le même jour, il a adopté le règlement (UE) 2015/1828 modifiant le règlement no 36/2012 (JO 2015, L 266, p. 1). Ces actes prévoyaient dès lors des restrictions à l’entrée ou au passage en transit sur le territoire des États membres ainsi que le gel des fonds des « hommes d’affaires influents exerçant leurs activités en Syrie » ainsi que des « membres des familles Assad ou Makhlouf », sauf si des « informations suffisantes indiqu[aie]nt qu[e ces personnes] n[’étaient] pas, ou n[’étaient] plus, liées au régime ».

21      Par lettre du 18 mars 2016, adressée aux représentants du requérant dans l’affaire T‑155/15, le Conseil a informé le requérant de son intention de modifier les motifs de l’inscription du nom de celui-ci sur les listes en cause après avoir procédé au réexamen de ladite inscription. Le Conseil a fixé un délai au requérant pour formuler d’éventuelles observations.

22      Par lettre du 13 avril 2016, les représentants du requérant dans l’affaire T‑155/15 se sont opposés au maintien du nom du requérant sur les listes en cause.

23      Le 27 mai 2016, le Conseil a adopté sa décision (PESC) 2016/850, modifiant la décision 2013/255 (JO 2016, L 141, p. 125). Le même jour, il a adopté le règlement d’exécution (UE) 2016/840 mettant en œuvre le règlement no 36/2012 (JO 2016, L 141, p. 30). Par ces actes (ci-après, pris ensemble, les « actes attaqués »), le nom du requérant a été maintenu sur les listes en cause.

24      En particulier, le nom du requérant a été maintenu à la ligne 28 du tableau comportant les listes en cause sous le titre « A. Personnes » de l’annexe, avec la motivation suivante :

« Homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie, ayant des intérêts et/ou activités dans les secteurs des télécommunications, du pétrole et de l’industrie des matières plastiques, et entretenant des relations d’affaires étroites avec Maher Al-Assad. Du fait de ses activités commerciales, il tire avantage du régime syrien et le soutient. Il fait partie de l’entourage de Maher Al-Assad du fait, notamment, de ses activités commerciales. ».

25      Par lettre du 30 mai 2016, le Conseil a communiqué, aux représentants du requérant dans l’affaire T‑155/15, alors pendante, les nouveaux motifs à l’appui de l’inscription du requérant sur les listes en cause et il leur a envoyé un dossier contenant les preuves visant à étayer le maintien de ladite inscription.

26      Par lettre du 6 juillet 2016, les nouveaux représentants du requérant ont informé le Conseil qu’ils représentaient désormais le requérant et ils ont demandé au Conseil d’annuler l’inscription du nom du requérant sur les listes en cause.

27      Par lettre du 26 juillet 2016, adressée aux nouveaux représentants du requérant, le Conseil a répondu à leur lettre du 6 juillet 2016 et leur a notifié une copie des actes attaqués ainsi que la documentation étayant ces actes.

28      Par arrêt du 26 octobre 2016, Kaddour/Conseil (T‑155/15, non publié, ci-après l’« arrêt Kaddour II » EU:T:2016:628), le Tribunal a rejeté le recours formé par le requérant à l’encontre de la décision d’exécution 2015/117 et du règlement d’exécution no 2015/108, pour autant que ces actes le concernaient. Il a considéré que la réinscription de son nom sur les listes en cause était justifiée par le fait que le Conseil avait apporté un faisceau d’indices précis et concordants susceptible de mettre en évidence que le requérant gardait des liens avec certaines personnalités clés du régime syrien telles que M. Maher Al-Assad, en vertu de l’article 28, paragraphe 1, de la décision 2013/255 et de l’article 15, paragraphe 1, sous a), du règlement no 36/2012.

29      Le requérant n’a pas introduit de pourvoi contre l’arrêt du 26 octobre 2016, Kaddour II (T‑155/15, non publié, EU:T:2016:628).

 Procédure et conclusions des parties

30      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 19 août 2016, le requérant a introduit le présent recours.

31      Le 28 novembre 2016, le Conseil a déposé au greffe du Tribunal son mémoire en défense.

32      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler les actes attaqués ;

–        condamner le Conseil aux dépens.

33      Le Conseil conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours dans son intégralité ;

–        à titre subsidiaire, dans l’hypothèse où le Tribunal annulerait les mesures restrictives adoptées à l’encontre du requérant, ordonner que les effets de la décision 2016/850 soient maintenus en ce qui concerne le requérant, jusqu’à ce que l’annulation du règlement d’exécution 2016/840 prenne effet ;

–        condamner le requérant aux dépens.

 En droit

34      À titre liminaire, il convient de relever que la décision 2016/850 a été adoptée sur le fondement de l’article 29 TUE qui attribue compétence au Conseil pour adopter des décisions qui définissent la position de l’Union sur une question particulière de nature géographique ou thématique (voir, en ce sens, arrêt du 13 septembre 2013, Anbouba/Conseil, T‑592/11, non publié, EU:T:2013:427, point 41).

35      C’est également sur la base de l’article 29 TUE que le Conseil a adopté la décision 2015/1836, selon laquelle être un homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie constitue un critère juridique permettant l’application des mesures restrictives.

36      En effet, aux termes du considérant 6 de la décision 2015/1836 :

« Le Conseil a estimé que, en raison du contrôle étroit exercé sur l’économie par le régime syrien, un cercle restreint de femmes et d’hommes d’affaires influents exerçant leurs activités en Syrie n’est en mesure de maintenir son statut que grâce à des liens étroits avec le régime et au soutien de celui-ci, ainsi qu’à l’influence exercée en son sein. Le Conseil estime qu’il devrait prévoir des mesures restrictives pour imposer des restrictions à l’admission des femmes et des hommes d’affaires influents exerçant leurs activités en Syrie, identifiés par le Conseil et dont la liste figure à l’annexe I, ainsi que pour geler tous les fonds et ressources économiques qui leur appartiennent, qui sont en leur possession, ou qui sont détenus ou contrôlés par eux, afin de les empêcher de fournir un soutien matériel ou financier au régime et, par l’influence qu’ils exercent, d’accroître la pression sur le régime lui-même afin qu’il modifie sa politique de répression ».

37      De même, les articles 27 et 28, paragraphes 2, de la décision 2013/255 tels que modifiés par la décision 2015/1836 prévoient des restrictions à l’entrée ou au passage en transit sur le territoire des États membres et le gel des fonds des « hommes d’affaires influents exerçant leurs activités en Syrie ». En outre, les articles 27 et 28, paragraphes 3, de cette même décision prévoient que ces personnes « ne sont pas inscrites ou maintenues sur la liste des personnes et entités qui figure à l’annexe I s’il existe des informations suffisantes indiquant qu’elles ne sont pas, ou ne sont plus, liées au régime ou qu’elles n’exercent aucune influence sur celui-ci ou qu’elles ne sont pas associées à un risque réel de contournement ».

38      À l’appui du recours, le requérant invoque, en substance, cinq moyens. Le premier est tiré d’un détournement de pouvoir et de violations des principes de bonne administration, d’autorité de la chose jugée ainsi que de sécurité juridique et du droit à un recours effectif. Le deuxième est tiré, de la violation de l’article 266 TFUE. Le troisième est tiré d’une erreur manifeste d’appréciation. Le quatrième est tiré de la violation de droits fondamentaux en ce qui concerne le respect de la réputation et la jouissance paisible de ses biens et de la violation du principe de proportionnalité. Le cinquième est tiré de la violation du principe de non-discrimination.

 Sur le premier moyen, tiré d’un détournement de pouvoir et de violations des principes de bonne administration, d’autorité de la chose jugée ainsi que de sécurité juridique et du droit à un recours effectif

39      Le premier moyen est divisé en trois griefs. Premièrement, le requérant fait valoir que, en maintenant les mesures litigieuses à son égard, le Conseil a commis un détournement de pouvoir. Il soutient, deuxièmement, que le Conseil a violé le principe de bonne administration consacré par l’article 41 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, du fait que celui-ci n’a pas, à ce jour, retiré son nom des listes en cause. Il allègue, troisièmement, que le Conseil a violé son droit à un recours effectif et le principe d’autorité de la chose jugée en ce que celui-ci a réinscrit son nom sur ces listes, alors que le Tribunal avait annulé l’inscription initiale dudit nom sur ces listes.

 Sur le premier grief, tiré d’un détournement de pouvoir

40      Le requérant allègue que le Conseil a « manifestement abusé de son pouvoir » en réinscrivant son nom sur les listes en cause, contournant ainsi l’arrêt du 13 novembre 2014, Kaddour I (T‑654/11, non publié, EU:T:2014:947). Selon lui, le Conseil aurait dû former un recours contre cet arrêt au lieu de réinscrire son nom sur ces listes en se fondant sur des motifs substantiellement identiques à ceux que le Tribunal avait déclaré non fondés. Il fait valoir, en outre, que le Conseil avait maintenu l’inscription dudit nom sur ces listes sur la base des critères d’association et de soutien au régime syrien qui avaient déjà été invalidés par le Tribunal. Par ailleurs, il soutient que les nouvelles allégations du Conseil s’appuyaient également sur des faits, des preuves ou des circonstances qui avaient été jugés insuffisants par le Tribunal et dont le Conseil avait déjà disposés au moment de l’inscription initiale de son nom sur ces mêmes listes.

41      Le Conseil conteste les arguments du requérant.

42      Selon la jurisprudence, un acte n’est entaché de détournement de pouvoir que s’il apparaît, sur la base d’indices objectifs, pertinents et concordants, comme ayant été pris dans le but exclusif, ou à tout le moins déterminant, d’atteindre des fins autres que celles excipées ou afin d’éluder une procédure spécialement prévue par le traité pour parer aux circonstances de l’espèce (voir arrêt du 14 octobre 2009, Bank Melli Iran/Conseil, T‑390/08, EU:T:2009:401, point 50 et jurisprudence citée). Or, en l’espèce, le requérant n’a pas apporté d’éléments susceptibles d’établir que, en adoptant les actes attaqués, le Conseil poursuivait un but autre que celui de mettre fin à la répression violente exercée par le régime syrien contre la population civile en Syrie en gelant les fonds des personnes qui tirent avantage dudit régime et le soutiennent, conformément à la procédure prévue à cette fin par le traité FUE et par le règlement no 36/2012.

43      S’agissant, en premier lieu, de l’argument du requérant selon lequel le Conseil a manifestement abusé de son pouvoir en maintenant les mesures litigieuses à son égard pendant près de cinq ans malgré le fait que l’inscription initiale de son nom sur les listes en cause avait été annulée par l’arrêt du 13 novembre 2014, Kaddour I (T‑654/11, non publié, EU:T:2014:947), il ne peut qu’être rejeté. En effet, il ressort du point 93 dudit arrêt que le Conseil, dans le cadre d’un nouvel examen, a la possibilité de réinscrire le nom du requérant sur lesdites listes sur la base de motifs étayés à suffisance de droit.

44      De plus, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 32, paragraphes 1 et 3, du règlement no 36/2012, lorsque le Conseil décide d’appliquer à une personne physique ou morale, à une entité ou à un organisme les mesures restrictives visées, il doit modifier les annexes II ou II bis dudit règlement en conséquence et que, par ailleurs, si des nouveaux éléments de preuve substantiels sont présentés, il doit revoir sa décision et en informer la personne physique concernée. En outre, il devra examiner les listes contenues dans ces annexes à intervalles réguliers et au moins une fois tous les douze mois, conformément au paragraphe 4, du même article. Il ressort de ce qui précède que le Conseil a l’obligation de réexaminer les listes en cause et a le droit, si des nouveaux éléments de preuve substantiels sont présentés, comme c’est le cas en l’espèce, de modifier les motifs ou de réinscrire le nom du requérant sur ces listes. Par conséquent, les actes attaqués étant le résultat du réexamen que doit effectuer le Conseil à l’égard des mesures prises à l’encontre du requérant, il y a lieu de considérer que celui-ci a agi conformément aux pouvoirs qui lui ont été conférés.

45      En deuxième lieu, concernant l’argument du requérant selon lequel la motivation avancée par le Conseil pour justifier l’inscription de son nom sur les listes en cause serait presque la même que celle fondant les actes annulés par l’arrêt du 13 novembre 2014, Kaddour I (T‑654/11, non publié, EU:T:2014:947), il y a lieu de rejeter cet argument comme étant non fondé. En effet, ainsi qu’il ressort du point 64 de l’arrêt du 26 octobre 2016, Kaddour II (T‑155/15, non publié, EU:T:2016:628), une décision de réinscription d’un nom sur lesdites listes adoptée sur le fondement des mêmes motifs que ceux retenus lors de la première inscription de ce nom peut suffire à justifier ladite réinscription pour autant que les éléments de preuve apportés par le Conseil étayent à suffisance de droit lesdits motifs.

46      Par ailleurs, il convient d’observer que, contrairement à ce que fait valoir le requérant, la motivation qui ressort des actes attaqués est bien distincte de la motivation avancée par le Conseil dans le cadre des actes annulés par l’arrêt du 13 novembre 2014, Kaddour I (T‑654/11, non publié, EU:T:2014:947). En effet, le nom du requérant avait été initialement inscrit, sur les listes annexées à la décision 2011/273 et au règlement no 442/2011, en raison de son partenariat avec M. Maher Al-Assad et de son soutien financier au régime syrien (critère du soutien financier). En revanche, le maintien du nom du requérant sur les listes en cause se fonde, d’une part, sur sa condition d’homme d’affaires influent (critère d’homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie) et d’autre part, sur les relations d’affaires étroites qu’il entretient avec M. Maher Al-Assad (critère d’association avec le régime). Il en résulte que, du fait de ses activités commerciales, il tire avantage, selon les actes attaqués, de ce régime et le soutient (critère d’association et de bénéfice tiré du régime).

47      En troisième lieu, s’agissant de l’argument du requérant selon lequel les nouvelles allégations du Conseil s’appuient sur des faits, des preuves ou des circonstances qui ont été jugés insuffisants par le Tribunal dans son arrêt du 13 novembre 2014, Kaddour I (T‑654/11, non publié, EU:T:2014:947), il y a lieu de constater que cette question relève du bien-fondé des motifs établis à l’encontre du requérant. Cette argumentation doit, dès lors, être rejetée comme inopérante en ce qu’elle est soulevée à l’appui du présent grief.

48      Au vu des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le premier grief du premier moyen.

 Sur le deuxième grief, tiré de la violation du principe de bonne administration

49      Le requérant fait valoir que, en réinscrivant et en maintenant son nom sur les listes en cause, le Conseil a violé le principe de bonne administration consacré par l’article 41 de la charte des droits fondamentaux. Selon lui, son cas n’a pas été traité de manière impartiale et équitable ni dans un délai raisonnable. À cet égard, il allègue, en substance, que son nom a été inscrit sur les listes en cause pendant plus de cinq ans et que, le Conseil, en n’ayant pas formulé toutes ses allégations dans l’inscription initiale, a prolongé la durée de traitement de cette inscription en violant le droit à ce que ses affaires soient traitées dans un délai raisonnable et du devoir de bonne administration.

50      Le Conseil conteste les arguments du requérant.

51      À titre liminaire, il y a lieu de rappeler que l’article 41 de la charte des droits fondamentaux prévoit ce qui suit :

« 1. Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions, organes et organismes de l’Union.

2. Ce droit comporte notamment :

a)       le droit de toute personne d’être entendue avant qu’une mesure individuelle qui l’affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre ;

b)       le droit d’accès de toute personne au dossier qui la concerne, dans le respect des intérêts légitimes de la confidentialité et du secret professionnel et des affaires ;

c)       l’obligation pour l’administration de motiver ses décisions.

[…].»

52      Par ailleurs, selon la jurisprudence, dans le cadre de l’adoption de mesures restrictives, le Conseil est soumis à l’obligation de respecter ledit principe de bonne administration, auquel se rattache, selon une jurisprudence constante, l’obligation pour l’institution compétente d’examiner, avec soin et impartialité, tous les éléments pertinents du cas d’espèce (voir arrêt du 30 juin 2016, Al Matri/Conseil, T‑545/13, non publié, EU:T:2016:376, point 58 et jurisprudence citée).

53      En l’espèce, il y a lieu de constater, d’emblée, que, par son argumentation, le requérant conteste uniquement le fait que son nom est toujours inscrit sur les listes en cause, ne contestant pas le fait qu’il a été entendu avant que ces mesures n’aient été prises à son égard, ni le fait qu’il a pu accéder à son dossier administratif, ni que les actes litigieux sont suffisamment motivés en vertu de l’article 41, paragraphe 2, de la charte des droits fondamentaux.

54      Tout d’abord, s’agissant de l’argument du requérant selon lequel le Conseil, en réinscrivant et en maintenant son nom sur les listes en cause, a violé le principe de bonne administration, il ressort des points 43 et 44 ci-dessus que le Conseil pouvait valablement réinscrire et maintenir le nom du requérant sur lesdites listes, après avoir effectué un réexamen de ces listes. Par conséquent, il y a lieu de rejeter ladite argumentation.

55      Ensuite, s’agissant des allégations du requérant relatives à l’absence de traitement de son cas de manière impartiale et équitable et dans un délai raisonnable par le Conseil, il convient de relever que le fait, mentionné par le requérant, que son nom apparaisse pendant une longue période sur les listes en cause ne permet pas, à lui seul, de considérer que son cas a fait l’objet d’un traitement partial, inéquitable ou dans un délai non raisonnable par le Conseil lorsque ce dernier a adopté les actes attaqués. Par ailleurs, il convient de rappeler que les actes attaqués ont été adoptés sur le fondement de l’article 29 TUE, qui attribue compétence au Conseil pour adopter des décisions qui définissent la position de l’Union sur une question particulière de nature géographique ou thématique (voir, en ce sens, arrêt du 13 septembre 2013, Anbouba/Conseil, T‑592/11, non publié, EU:T:2013:427, point 41). Le simple fait que le nom du requérant apparaisse sur les listes en cause ne saurait suffire à remettre en cause l’impartialité du Conseil.

56      En tout état de cause, force est de constater que le requérant n’apporte aucun élément spécifique à l’appui de ses allégations, de sorte qu’elles doivent être écartées.

57      Enfin, s’agissant de l’argument du requérant selon lequel le Conseil ne pouvait fonder la décision portant réinscription de son nom sur les listes en cause sur des motifs qu’il aurait pu invoquer lors de l’inscription initiale dudit nom sur lesdites listes, il y a lieu de relever que, au vu des motifs de l’annulation de la décision portant première inscription de ce nom sur ces listes par l’arrêt du 13 novembre 2014, Kaddour I (T‑654/11, non publié, EU:T:2014:947), rien n’empêchait le Conseil d’effectuer une telle réinscription pour les mêmes motifs, à condition que cette réinscription ait été fondée sur des éléments de preuve différents de ceux que le Tribunal avait considérés comme étant insuffisants à justifier l’application des mesures litigieuses au requérant. Cette argumentation doit donc être rejetée.

58      Il ressort de tout ce qui précède que le deuxième grief du premier moyen doit être rejeté.

 Sur le troisième grief, tiré de la violation du droit à un recours effectif et des principes d’autorité de la chose jugée et de sécurité juridique

59      Le requérant soutient, d’une part, que le Conseil a violé son droit à un recours effectif du fait de la réinscription de son nom sur les listes en cause après que le Tribunal avait annulé l’inscription initiale dudit nom sur lesdites listes. Selon lui, cette réinscription priverait la requête, dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 13 novembre 2014, Kaddour I (T‑654/11, non publié, EU:T:2014:947), de « toute valeur en pratique ».

60      Le requérant fait valoir, d’autre part, que le Conseil a violé les principes d’autorité de la chose jugée et de sécurité juridique en réinscrivant son nom sur les listes en cause après que le Tribunal avait annulé l’inscription initiale dudit nom sur lesdites listes.

61      Le Conseil réfute les arguments du requérant.

62      En premier lieu, il y a lieu de rappeler que le principe de protection juridictionnelle effective constitue un principe général de droit de l’Union, qui découle des traditions constitutionnelles communes aux États membres et qui a été consacré par les articles 6 et 13 de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci-après la « CEDH ») ainsi que par l’article 47 de la charte des droits fondamentaux (arrêt du 21 mars 2012, Fulmen/Conseil, T‑439/10 et T‑440/10, EU:T:2012:142, point 87).

63      Tout d’abord, il convient de noter que les arguments du requérant relatifs au fait que le Conseil a réinscrit son nom sur les listes en cause après l’annulation de l’inscription initiale dudit nom ont déjà été rejetés aux points 43 et 44 ci-dessus.

64      Ensuite, s’agissant de l’argumentation du requérant selon laquelle la requête dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 13 novembre 2014, Kaddour I (T‑654/11, non publié, EU:T:2014:947) a été privée de « toute valeur en pratique », il y a lieu de considérer que la décision de réinscription et de maintien du nom du requérant sur les listes en cause ne remet pas en cause l’effectivité du recours ayant donné lieu audit arrêt. En effet, cet arrêt a eu pour conséquence la suppression, de manière rétroactive, dudit nom desdites listes. Toutefois, ainsi qu’il ressort du point 93 dudit arrêt, le Conseil, dans le cadre d’un nouvel examen, avait la possibilité de réinscrire ce nom sur ces listes sur la base de motifs étayés à suffisance de droit.

65      Enfin, force est de constater que le requérant a fait usage de son droit d’introduire le présent recours contre les actes attaqués devant le juge de l’Union au titre de l’article 275, deuxième alinéa, TFUE lu conjointement avec l’article 263, quatrième et sixième alinéa, TFUE. Par conséquent, le requérant ne saurait pas invoquer une violation de son droit à un recours effectif.

66      Il ressort de ce qui précède que les arguments du requérant relatifs à la violation du droit à un recours effectif doivent être rejetés.

67      En second lieu, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, les arrêts d’annulation prononcés par les juridictions de l’Union jouissent, dès qu’ils sont devenus définitifs, de l’autorité absolue de la chose jugée. Celle-ci recouvre non seulement le dispositif de l’arrêt d’annulation, mais aussi les motifs qui ont amené à celui-ci et qui en constituent le soutien nécessaire, en ce sens qu'ils sont indispensables pour déterminer le sens exact de ce qui a été jugé dans le dispositif (arrêt du 3 octobre 2000, Industrie des poudres sphériques/Conseil, C‑458/98 P, EU:C:2000:531, point 81 ; voir également en ce sens, arrêt du 1er juillet 2009, ThyssenKrupp Stainless/Commission, T‑24/07, EU:T:2009:236, points 113 et 140). Lorsque, à la suite d’un arrêt annulant, l’auteur de l’acte annulé en adopte un nouveau, il doit respecter non seulement le dispositif de l’arrêt, mais également les motifs qui ont amené à celui-ci et qui en constituent le soutien nécessaire, en veillant ainsi à ce que ce nouvel acte ne soit pas entaché des mêmes irrégularités que celles identifiées dans l’arrêt d’annulation (voir, en ce sens, arrêts du 5 septembre 2014, Éditions Odile Jacob/Commission, T‑471/11, EU:T:2014:739, point 56 et du 6 mars 2003, Interporc/Commission, C‑41/00 P, EU:C:2003:125, points 29 et 30 et jurisprudence citée).

68      L’autorité de la chose jugée d’un arrêt ne s’attache cependant qu’aux points de fait et de droit qui ont été effectivement ou nécessairement tranchés (arrêt du 19 février 1991, Italie/Commission, C‑281/89, EU:C:1991:59, point 14). Ainsi, l’article 266 TFUE n’oblige l’institution dont émane l’acte annulé que dans les limites de ce qui est nécessaire pour assurer l’exécution de l’arrêt d’annulation. En outre, l’auteur de l’acte peut invoquer, dans sa nouvelle décision, des motifs autres que ceux sur lesquels il avait fondé sa première décision (voir, en ce sens, arrêt du 6 mars 2003, Interporc/Commission, C‑41/00 P, EU:C:2003:125, points 30 à 32).

69      En l’espèce, le requérant fait valoir que le Conseil a violé les principes d’autorité de la chose jugée et de sécurité juridique en réinscrivant son nom sur les listes en cause, alors que le Tribunal avait annulé l’inscription initiale dudit nom sur lesdites listes. Or, il suffit de rappeler que le fait que le Tribunal a jugé, dans l’arrêt du 13 novembre 2014, Kaddour I (T‑654/11, non publié, EU:T:2014:947), que le Conseil n’avait pas étayé à suffisance de droit les critères sur le fondement desquels ladite inscription initiale avait été adoptée est sans influence quant à la validité des décisions de réinscription et de maintien postérieures de ce nom sur ces listes qui s’appuient sur des critères et des éléments de preuve différents. En effet, contrairement à ce que prétend le requérant, pour justifier ces dernières décisions, le Conseil invoque, dans les actes attaqués, un autre fondement, à savoir celui de l’homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie ainsi que de son association avec le régime syrien.

70      Par ailleurs, s’agissant de la violation du principe de sécurité juridique allégué par le requérant, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, ce principe implique que la législation de l’Union soit certaine et que son application soit prévisible pour les justiciables (voir arrêts du 22 juin 2006, Belgique et Forum 187/Commission, C‑182/03 et C‑217/03, EU:C:2006:416, point 69, et du 14 octobre 2010, Nuova Agricast et Cofra/Commission, C‑67/09 P, EU:C:2010:607, point 77).

71      En l’espèce, il convient de rappeler de nouveau que le Conseil pouvait, à la suite de l’arrêt du 13 novembre 2014, Kaddour I (T‑654/11, non publié, EU:T:2014:947), décider de réinscrire le nom du requérant sur les listes en cause. En effet, le Conseil peut, en application de l’article 266 TFUE, remédier aux irrégularités constatées dans l’arrêt d’annulation en adoptant, à la suite d’un nouvel examen, une nouvelle décision d’inscription sur la base de motifs étayés à suffisance de droit. Le Tribunal a, par ailleurs, maintenu les effets de la décision et du règlement par lesquels le nom du requérant avait été inscrit initialement sur lesdites listes jusqu’à l’expiration du délai de pourvoi afin de permettre au Conseil de remédier en temps utile aux irrégularités constatées dans l’arrêt en question et d’éviter une atteinte à l’efficacité des mesures de gel de fonds susceptibles d’être, à l’avenir, adoptées à l’égard du requérant (arrêt du 13 novembre 2014, Kaddour I, T‑654/11, non publié, EU:T:2014:947, points 92 et 93).

72      Bien que le Conseil n’ait pas introduit de pourvoi à l’encontre de l’arrêt du 13 novembre 2014, Kaddour I (T‑654/11, non publié, EU:T:2014:947), et qu’il n’ait pas saisi l’opportunité offerte par le Tribunal de réinscrire le nom du requérant sur les listes en cause dans le délai de pourvoi, lequel expirait le 23 janvier 2015, ces circonstances ne sauraient avoir fait naître chez le requérant l’espérance que son nom ne serait pas réinscrit sur lesdites listes. En effet, d’une part, l’absence de pourvoi formé à l’encontre dudit arrêt ne pouvait aucunement être interprété comme un renoncement de la part du Conseil à réinscrire le nom du requérant sur ces listes, dans la mesure où le Tribunal avait expressément indiqué qu’il appartenait à ce dernier de décider des mesures d’exécution de cet arrêt, lesquelles pouvaient consister en une réinscription sur la base de motifs étayés à suffisance de droit. D’autre part, le maintien des effets de la première inscription jusqu’à l’expiration du délai de pourvoi visait uniquement à éviter que le requérant ne transfère ses fonds en dehors de l’Union avant que le Conseil ne puisse remédier aux irrégularités constatées dans ledit arrêt. Aucune obligation n’était toutefois imposée au Conseil de procéder à la réinscription du nom du requérant dans ce délai, qui peut, dans certaines circonstances, se révéler insuffisant pour que le Conseil puisse réaliser des vérifications et remédier auxdites irrégularités, notamment lorsque cela implique de réunir des éléments de preuve additionnels, comme en l’espèce.

73      Dans ces circonstances, il ne saurait être reproché au Conseil d’avoir violé les principes de l’autorité de la chose jugée et de sécurité juridique.

74      Au vu des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le troisième grief du premier moyen ainsi que le premier moyen dans son ensemble.

 Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 266 TFUE

75      Le requérant soutient que, en vertu de l’article 266 TFUE, le Conseil aurait dû corriger les erreurs identifiées par le Tribunal dans l’arrêt du 13 novembre 2014, Kaddour I (T‑654/11, non publié, EU:T:2014:947), ou supprimer son nom sur les listes en cause. Cependant, selon lui, le Conseil a contourné ledit arrêt en réinscrivant son nom dans lesdites listes sur le fondement des mêmes critères juridiques, motifs et éléments de preuve que ceux utilisés pour l’inscription initiale dudit nom sur ces listes. Il fait valoir que le Conseil n’a pas pris les mesures nécessaires afin de remédier aux irrégularités constatées par le Tribunal lors de ladite inscription initiale en vertu de l’article 266 TFUE.

76      Le Conseil conteste les arguments du requérant.

77      En vertu de l’article 266 TFUE, l’institution dont émane l’acte annulé est tenue de prendre les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt d’annulation.

78      À la suite de l’annulation partielle du règlement no 36/2012, du règlement d’exécution no 363/2013 et de la décision 2013/255, il appartenait au Conseil de procéder, sur la base de l’article 266 TFUE, à un nouvel examen des faits afin d’apprécier s’il fallait réinscrire ledit nom sur lesdites listes, sur la base de nouveaux motifs étayés à suffisance de droit [voir, en ce sens, arrêt du 25 juin 2015, Iranian Offshore Engineering & Construction/Conseil, T‑95/14, EU:T:2015:433, point 63 (non publié) et jurisprudence citée].

79      Il convient de rappeler, tout d’abord, que, dans l’arrêt du 13 novembre 2014, Kaddour I (T‑654/11, non publié, EU:T:2014:947), le Tribunal a estimé que le Conseil n’avait pas établi que le requérant avait un lien professionnel avec M. Maher Al-Assad ni qu’il apportait un soutien financier au régime syrien et, en conséquence, il a annulé le règlement no 36/2012, le règlement d’exécution no 363/2013 et la décision 2013/255, avec effet au 23 janvier 2015 pour autant qu’ils concernaient le requérant.

80      Il y a lieu de considérer, ensuite, que le deuxième moyen repose sur une interprétation erronée de l’article 266 TFUE. En effet, il convient de relever, d’une part, que le retrait du nom du requérant des listes en cause est la conséquence de l’arrêt d’annulation, en vertu duquel les actes annulés sont éliminés rétroactivement de l’ordre juridique de l’Union. D’autre part, ainsi que cela ressort de la jurisprudence citée au point 78 ci-dessus, ledit article ne s’oppose pas à la possibilité pour le Conseil de réinscrire le nom du requérant sur ces listes pour des motifs différents de ceux sur lesquels reposait l’inscription initiale de ce nom sur les mêmes listes.

81      Ainsi, à la suite de l’arrêt du 13 novembre 2014, Kaddour I (T‑654/11, non publié, EU:T:2014:947), le Conseil pouvait valablement décider de réinscrire le nom du requérant sur les listes en cause ainsi qu’il ressort des points 72 et 73 ci-dessus. À cet égard, il convient de rappeler que le Tribunal a indiqué, au point 93 de cet arrêt, que le Conseil pouvait remédier aux violations constatées dans l’arrêt d’annulation en adoptant de nouvelles mesures restrictives à l’égard du requérant. Le Tribunal a, par ailleurs, maintenu les effets de l’inscription initiale dudit nom sur lesdites listes jusqu’à l’expiration du délai de pourvoi afin de permettre au Conseil de remédier en temps utile aux irrégularités constatées dans cet arrêt et d’éviter une atteinte à l’efficacité des mesures de gel de fonds susceptibles d’être, à l’avenir, adoptées à l’égard du requérant.

82      Or, dans les actes attaqués, qui maintiennent le nom du requérant sur les listes en cause, le Conseil a appliqué des critères différents et s’est fondé sur des motifs également différents. En effet, d’une part, l’exposé des motifs de la décision de maintien s’appuie sur le critère relatif à l’association, le bénéfice et le soutien du régime syrien en vertu de l’article 28, paragraphe 1, de la décision 2013/255 et à l’article 15, paragraphe 1, du règlement no 36/2012 ainsi que sur le critère d’homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie, visé à l’article 27, paragraphe 2, à l’article 28, paragraphe 2, sous a) de la décision 2013/255 et à l’article 15, paragraphe 1 bis,sous a), du règlement no 36/2012. D’autre part, les motifs fondant la décision de maintien, à savoir « homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie, ayant des intérêts et/ou activités dans les secteurs des télécommunications, du pétrole et de l’industrie des matières plastiques, et entretenant des relations d’affaires étroites avec Maher Al Assad », ne figurant pas dans le règlement no 36/2012, le règlement d’exécution no 363/2013 et la décision 2013/255, pour autant qu’ils le concernaient, avec effet au 23 janvier 2015, ils n’ont donc pas été soumis au contrôle du Tribunal dans l’arrêt du 13 novembre 2014, Kaddour I (T‑654/11, non publié, EU:T:2014:947).

83      En tout état de cause, il convient de rappeler que, ainsi qu’il ressort du point 93 de l’arrêt du 13 novembre 2014, Kaddour I (T‑654/11, non publié, EU:T:2014:947), le Conseil, dans le cadre d’un nouvel examen, a la possibilité de réinscrire le nom du requérant sur les listes en cause sur la base de motifs étayés à suffisance de droit. Partant, une décision de maintien du nom du requérant sur lesdites listes adoptée sur le fondement des mêmes motifs que ceux retenus lors de la première inscription peut suffire à justifier ladite inscription pour autant que les éléments de preuve apportés par le Conseil étayent à suffisance de droit lesdits motifs.

84      S’agissant de l’argument du requérant selon lequel les nouvelles allégations du Conseil s’appuient sur des faits, des preuves ou des circonstances qui ont été jugés insuffisants par le Tribunal dans l’arrêt du 13 novembre 2014, Kaddour I (T‑654/11, non publié, EU:T:2014:947), il y a lieu de constater que cette question relève plutôt du bien-fondé des motifs établis à l’encontre du requérant et, par conséquent, de la légalité au fond de l’acte litigieux. Cet argument doit, dès lors, être rejeté comme inopérant en ce qu’il est soulevé à l’appui du deuxième moyen.

85      Partant, le deuxième moyen doit être rejeté.

 Sur le troisième moyen, tiré d’une erreur manifeste d’appréciation

86      Le requérant soutient, tout d’abord, que le Conseil a maintenu l’inscription de son nom sur les listes en cause en se fondant sur les mêmes allégations que celles justifiant l’inscription initiale de son nom sur ces listes, à savoir, le soutien financier qu’il apporterait au régime syrien (voir point 5 ci-dessus). Il fait valoir, ensuite, que le Conseil n’a pas apporté des éléments de preuve de nature à démontrer le bien-fondé des motifs du maintien de ladite inscription. Il conteste, enfin, être actuellement un homme d’affaires influent en Syrie.

87      Le Conseil conteste les arguments du requérant.

88      Selon une jurisprudence constante, l’effectivité du contrôle juridictionnel garantie par l’article 47 de la charte des droits fondamentaux exige notamment que, au titre du contrôle de la légalité des motifs sur lesquels est fondée la décision d’inscrire ou de maintenir le nom d’une personne déterminée sur les listes de personnes visées par des sanctions, le juge de l’Union s’assure que cette décision repose sur une base factuelle suffisamment solide. Cela implique une vérification des faits allégués dans l’exposé des motifs qui sous-tend ladite décision, de sorte que le contrôle juridictionnel ne soit pas limité à l’appréciation de la vraisemblance abstraite des motifs invoqués, mais porte sur la question de savoir si ces motifs, ou, à tout le moins, l’un d’eux considéré comme suffisant en soi pour soutenir cette même décision, sont étayés (arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 119).

89      C’est à l’autorité compétente de l’Union qu’il appartient, en cas de contestation, d’établir le bien-fondé des motifs retenus à l’encontre de la personne concernée et non à cette dernière d’apporter la preuve négative de l’absence de bien-fondé desdits motifs. Il importe que les informations ou les éléments produits par l’autorité en question étayent les motifs retenus à l’encontre de la personne concernée. Si ces éléments ne permettent pas de constater le bien-fondé d’un motif, le juge de l’Union écarte ce dernier en tant que support de la décision d’inscription ou de maintien de l’inscription en cause (arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, points 121 à 123).

90      Conformément à la jurisprudence de la Cour, l’appréciation du bien-fondé des motifs d’une inscription doit être effectuée en examinant les éléments de preuve non pas de manière isolée, mais dans le contexte dans lequel ils s’insèrent (arrêts du 21 avril 2015, Anbouba/Conseil, C‑630/13 P, EU:C:2015:247, point 51, et du 21 avril 2015, Anbouba/Conseil, C‑605/13 P, EU:C:2015:248, point 50).

91      En outre, compte tenu de la situation en Syrie, le Conseil satisfait à la charge de la preuve qui lui incombe s’il fait état devant le juge de l’Union d’un faisceau d’indices suffisamment concrets, précis et concordants permettant d’établir l’existence d’un lien suffisant entre la personne sujette à une mesure de gel de ses fonds et le régime combattu (arrêt du 21 avril 2015, Anbouba/Conseil, C‑630/13 P, EU:C:2015:247, point 53).

92      En l’espèce, il convient de rappeler que le maintien de l’inscription du nom du requérant sur les listes en cause est fondé sur deux motifs distincts, à savoir, d’une part, sur sa condition d’homme d’affaires influent (critère d’homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie) et d’autre part, sur les relations d’affaires étroites avec M. Maher Al-Assad (critère d’association avec le régime). Il en résulte que, du fait de ses activités commerciales, le requérant tire avantage, selon les actes attaqués, du régime syrien et le soutient (critère d’association et de bénéfice tiré du régime).

93      Par ailleurs, force est de constater que, ainsi qu’il a été rappelé aux points 35 et 36 ci-dessus, être un homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie constitue, conformément à l’article 27, paragraphe 2 et à l’article 28, paragraphe 2, de la décision 2013/255, telle que modifiée, en dernier lieu, par la décision 2015/1836, un des critères juridiques pour l’application des mesures restrictives, et par conséquent, pour l’inscription du nom du requérant sur les listes en cause.

94      Certes, conformément à l’article 27, paragraphe 3 et à l’article 28, paragraphe 3, de la décision 2013/255, telle qu’applicable en l’espèce, les noms de femmes et d’hommes d’affaires influents exerçant leurs activités en Syrie ne sont pas inscrits ou maintenus sur la liste en cause s’il existe des informations suffisantes indiquant que ces membres ne sont pas, ou ne sont plus, liés au régime syrien ou qu’ils n’exercent aucune influence sur celui-ci ou qu’ils ne sont pas associés à un risque réel de contournement.

95      Le requérant fait valoir, en premier lieu, que le Conseil a erronément maintenu l’inscription de son nom sur les listes en cause en se fondant sur les mêmes motifs que ceux justifiant l’inscription initiale dudit nom sur lesdites listes, à savoir, son partenariat avec M. Maher Al-Assad et son soutien financier au régime syrien.

96      En l’espèce, il y a lieu de relever que, ainsi qu’il ressort des points 82 et 83 ci-dessus, les motifs du maintien du nom du requérant sur les listes en cause ne correspondent pas aux motifs de l’inscription initiale dudit nom sur lesdites listes. En effet, les motifs « homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie, ayant des intérêts et/ou activités dans les secteurs des télécommunications, du pétrole et de l’industrie des matières plastiques, et entretenant des relations d’affaires étroites avec Maher Al-Assad », sont différents de ceux fondant ladite inscription initiale. Ainsi, non seulement les critères d’inscription sur ces listes, mais, également, les motifs retenus par le Conseil à son égard ont été modifiés entre, d’une part, cette inscription initiale et, d’autre part, la réinscription ainsi que le maintien du nom du requérant sur les listes en question.

97      En tout état de cause, il convient de rappeler qu’une décision de maintien du nom du requérant sur les listes en cause adoptée sur le fondement des mêmes motifs que ceux retenus lors de la première inscription peut suffire à justifier ladite inscription pour autant que les éléments de preuve apportés par le Conseil étayent à suffisance de droit lesdits motifs (voir par analogie, arrêt du 13 novembre 2014, Kaddour I, T‑654/11, non publié, EU:T:2014:947, point 93).

98      Il y a dès lors lieu de rejeter l’argument du requérant selon lequel le Conseil a erronément maintenu l’inscription de son nom sur les listes en cause en se fondant sur les mêmes motifs que ceux justifiant l’inscription initiale dudit nom sur lesdites listes.

99      Le requérant soutient, en deuxième lieu, que le Conseil n’a pas apporté d’éléments de preuve nouveaux ou de nature à démontrer le bien-fondé des motifs de l’inscription de son nom sur lesdites listes, notamment son association avec M. Maher Al-Assad et son soutien au régime syrien.

100    À titre liminaire, il convient de rappeler que le Tribunal, dans l’arrêt du 26 octobre 2016, Kaddour II (T‑155/15, non publié, EU:T:2016:628), a considéré que la réinscription du nom du requérant sur les listes en cause était justifiée du fait que le Conseil avait apporté un faisceau d’indices précis et concordants susceptible de mettre en évidence que le requérant gardait des liens avec certaines personnalités clés du régime, syrien, telles que M. Maher Al-Assad.

101    Par ailleurs, en l’espèce, il importe d’observer que le Conseil a fourni aux représentants du requérant, pour justifier le maintien du nom de celui-ci sur les listes en cause, le document COREU du 20 mai 2016 portant la référence PESC/0049/16 – ST 9478/16 et les documents portant la référence 430/16 à 435/16 RELEX. Il s’agit de plusieurs documents, comportant des éléments d’information publiquement accessibles, destinés à préciser, selon le Conseil, le contexte général et personnel qui concerne le requérant. En particulier, le document COREU du 20 mai 2016 contient une explication des nouveaux motifs retenus à l’encontre du requérant ainsi que des éléments d’information fournis à l’appui de cette motivation. Ces éléments d’information sont, notamment, des liens vers les sites Internet du Washington Institute, de la Jamestown Foundation, du WorldCrunch, de The New York Sun, Lebanon Wire, Middle East Transparent, de Recherches sur le terrorisme, de Shabab Kurd, Ya Libnan et de la Syrian Democratic Union Organization qui publient des articles concernant le requérant. S’agissant des documents portant la référence 430/16 à 435/16 RELEX, ils contiennent des nouveaux articles de presse cités dans le document COREU du 20 mai 2016 et publiés sur les sites Internet de Shabab Kurd, Ya Libnan, Writtingcompany, WorldCrunch et de la Syrian Democratic Union Organization ainsi qu’un rapport de solvabilité d’une société de transport de véhicules automobiles et de camionnettes, produit en décembre 2015 par Orbis.

102    Or, il y a lieu de relever que les documents en cause apportent, contrairement à ce que soutient le requérant, des éléments d’information distincts, provenant de sources ouvertes et publiques variées et différentes de celles que le Tribunal avait considérées dans l’arrêt du 26 octobre 2016, Kaddour II (T‑155/15, non publié, EU:T:2016:628), comme constituant un faisceau d’indices permettant de justifier la réinscription du nom du requérant sur les listes en cause. La seule similitude entre lesdits documents et la documentation fournie par le Conseil afin d’étayer ladite réinscription est que ces informations coïncident sur le fait que le requérant fait partie du noyau de la classe économique dirigeante en Syrie en raison de la gestion des affaires de M. Maher Al-Assad et sur le caractère indéniable de ses liens avec le régime syrien, dans la mesure où il exerce une influence déterminante, par ses activités commerciales et professionnelles, sur le premier cercle des dirigeants de ce régime.

103    En particulier, il convient de noter ce qui suit :

–        d’abord, le document portant la référence 433/16 RELEX, à savoir un article publié le 27 mars 2005 sur le blog Writtingcompany relatif à la faillite d’une banque libanaise identifie le requérant comme « chargé d’affaires (officer manager) du Lt. Col. M. Maher Al-Assad ». De même, le document portant la référence 431/16 RELEX, à savoir un article publié le 9 février 2013 sur le site Internet de Ya Libnan, contient l’affirmation selon laquelle « un appartement à B[ey]r[o]ut[h] de 2,5 millions dollars sous contr[ô]l[e] de Maher, a été transféré sans co[û]ts au chargé d’affaires de celui-ci, Khaled Kaddour»;

–        ensuite, le document portant la référence 432/16 RELEX, à savoir un article publié le 26 novembre 2015 sur le site Internet de WorldCrunch, contient les affirmations selon lesquelles « [l]e clan des oligarques syriens comprend également Maher [A]l-Assad, le frère du président, et ses serviteurs Mohamad Hamcho, Samer Debs et Khaled Kaddour » et que, « [e]n échange de la contribution de l’État, ces hommes d’affaires transfèrent une partie de leurs bénéfices » ;

–        par ailleurs, le document portant la référence 430/16 RELEX, à savoir un article publié le 27 mars 2012 sur le site Internet de Shabab Kurd, fait référence à une liste des membres du « groupe économique privé de Maher Al-Assad » décrivant le requérant comme « [l]e bras droit de Maher Al-Assad ». Dans cet article, il est également indiqué que le requérant « [p]ossède une usine de plastique et une entreprise spécialisée dans les adjudications extérieures pour l’armée » ;

–        en outre, le document portant la référence 434/16 RELEX, à savoir un article publié le 3 juin 2015 sur le site Internet de la Syrian Democratic Union Organization, qui est intitulé « La nouvelle mafia syrienne de Maher Al-Assad », contient l’affirmation selon laquelle, « en ce qui concerne la corruption de Maher Al-Assad à l’extérieur de la Syrie, elle passait par Mirza Nitham Eddin et son gendre, Khaled Nasser Kaddour, qui forment ‘l’organisme de gestionnaires’ pour ses affaires à l’étranger » ;

–        enfin, le document portant la référence 435/16 RELEX contient un rapport de solvabilité produit en décembre 2015 par Orbis concernant une société de transport de véhicules automobiles et de camionnettes, appartenant à M. Ayman Jaber et constituée en 2010, dans laquelle le requérant détient une importante participation, à savoir 40 % des actions de ladite société.

104    Par conséquent, il y a lieu de considérer que, contrairement à ce que soutient le requérant, le Conseil a apporté, dans le cadre de la présente procédure, de nouveaux documents s’avérant pertinents aux fins d’étayer les motifs du maintien du nom du requérant dans les listes en cause.

105    Le requérant conteste, en troisième lieu, la véracité des informations contenues dans les documents en cause et soutient que ces derniers sont dépourvus de force probante.

106    À cet égard, il convient de noter, tout d’abord, que le requérant conteste la véracité des informations contenues dans les documents en cause, mais ne fournit aucun élément susceptible d’appuyer cette contestation, au-delà de son propre témoignage annexé à la requête.

107    Ensuite, s’agissant de la fiabilité des informations fournies par le Conseil, il convient de rappeler que, conformément à une jurisprudence constante, l’activité de la Cour et du Tribunal est régie par le principe de libre appréciation des preuves et le seul critère pour apprécier la valeur des preuves produites réside dans leur crédibilité. En outre, pour apprécier la valeur probante d’un document, il convient de vérifier la vraisemblance de l’information qui y est contenue et tenir compte, notamment, de l’origine du document, des circonstances de son élaboration, de son destinataire et se demander si, d’après son contenu, il semble sensé et fiable (voir, en ce sens, arrêt du 27 septembre 2012, Shell Petroleum e.a./Commission, T‑343/06, EU:T:2012:478, point 161 et jurisprudence citée).

108    Or, il y a lieu de relever que, ainsi qu’il ressort du point 101 ci-dessus, chaque source d’information numérique, publiquement accessible, apporte des éléments d’information différents et que toutes ces sources concordent, en substance, pour désigner le requérant comme membre du noyau de la classe économique dirigeante en Syrie en raison de ses activités commerciales et de sa gestion des affaires de M. Maher Al-Assad, bénéficiant ainsi du régime syrien, en particulier dans le contexte actuel de guerre civile. Par ailleurs, il y a lieu de relever que cette documentation a été publiée à différentes dates et même, s’agissant de certains articles, avant le déclenchement de la crise syrienne, et que, déjà à ce stade, le requérant était considéré comme étant associé à M. Maher Al-Assad.

109    Enfin, cette documentation non seulement a corroboré les informations considérées par le Tribunal, dans l’arrêt du 26 octobre 2016, Kaddour II (T‑155/15, non publié, EU:T:2016:628), comme un faisceau d’indices, précis et concordants, susceptible de mettre en évidence que le requérant gardait des liens avec certaines personnalités clés du régime syrien, telles que M. Maher Al-Assad, mais a également apporté des informations nouvelles et plus actuelles, susceptibles de justifier le maintien du nom du requérant sur les listes en cause.

110    En effet, notamment, le document portant la référence 430/16 RELEX, à savoir un article publié le 27 mars 2012 sur le site Internet de Shabab Kurd, décrit quelques activités commerciales du requérant, notamment, le fait qu’il est propriétaire d’« une usine de plastique et une entreprise spécialisée dans les adjudications extérieures pour l’armée ». Par ailleurs, le document portant la référence 434/16 RELEX, à savoir un article publié le 3 juin 2015 sur le site Internet de la Syrian Democratic Union Organization met en évidence la relation d’affaires et le lien de parenté du requérant avec Mirza Nitham Eddin, à savoir que le requérant est le beau-frère de ce dernier, relation d’ailleurs reconnue par le requérant lui-même dans la requête. De plus, dans ce dernier article il est indiqué que le requérant est le gestionnaire des affaires à l’étranger de M. Maher Al-Assad. En outre, le document portant la référence 435/16 RELEX, à savoir le rapport de solvabilité réalisé en décembre 2015 par Orbis, met en exergue que le requérant détient une importante participation dans une société de transport de véhicules automobiles et de camionnettes appartenant à M. Jaber, homme d’affaires syrien dont le nom est également inscrit sur les listes en cause, ce qui n’a pas été remis en cause par l’arrêt du 26 octobre 2016, Jaber/Conseil (T‑154/15, non publié, EU:T:2016:629). À cet égard, le requérant se borne à affirmer, sans nier sa participation ni apporter aucun élément de preuve contraire, que cette société n’a jamais été active ni réalisé d’opérations commerciales. Partant, rien ne permet de remettre en cause la fiabilité de ces informations.

111    Il s’ensuit que l’argumentation du requérant mettant en cause la véracité des informations contenues dans ces documents et la fiabilité de ces derniers doit être rejetée comme étant non fondée.

112    Le requérant conteste, en quatrième lieu, les allégations du Conseil relatives aux motifs du maintien de l’inscription de son nom sur les listes en cause, en se fondant sur des extraits de son propre témoignage annexé à la requête. Il invite également le Tribunal à « examiner dans leur intégralité les preuves avancées ».

113    À cet égard, il convient de rappeler que, si le texte de la requête peut être étayé et complété sur des points spécifiques par des renvois à des passages déterminés de pièces qui y sont annexées, un renvoi global à d’autres écrits, même annexés à la requête, ne saurait pallier l’absence d’éléments essentiels dans la requête. Il n’appartient pas au Tribunal de rechercher et d’identifier, dans les annexes, les moyens et les arguments qu’il pourrait considérer comme constituant le fondement du recours, les annexes ayant une fonction purement probatoire et instrumentale (voir ordonnance du 19 mai 2008, TF1/Commission, T‑144/04, EU:T:2008:155, point 29 et jurisprudence citée ; arrêt du 25 octobre 2012, Arbos/Commission, T‑161/06, non publié, EU:T:2012:573, point 23).

114    Par conséquent, le Tribunal examinera seulement les extraits du témoignage du requérant explicitement mentionnés et analysés dans la requête, les renvois intégraux audit témoignage devant être considérés comme irrecevables.

115    S’agissant des extraits de son témoignage mentionnés et analysés dans la requête, le requérant affirme, tout d’abord, qu’il n’a de relation ni professionnelle ni commerciale avec M. Maher Al-Assad et qu’il n’a jamais soutenu ni occupé un poste politique au gouvernement. Il maintient, ensuite, que son « ancienne » fortune et ses intérêts commerciaux ne résultent pas d’avantages ou de faveurs octroyées par le régime syrien sinon de ses propres initiatives entrepreneuriales (notamment dans le secteur du tabac). Il conteste, en outre, la réalité de ses prétendues activités dans les secteurs des télécommunications, du pétrole et de l’industrie en matières plastiques. Il soutient, par ailleurs, qu’il n’a jamais conclu de contrats avec le gouvernement ni effectué aucun type de transaction recevant des commissions. Il affirme, enfin, être un homme d’affaires dorénavant sans influence, car ses intérêts commerciaux ont été détruits depuis que la guerre a commencé. Il fournit à l’appui de son témoignage des photocopies de photographies qui sont censées démontrer la destruction de son usine de tabac.

116    À cet égard, le requérant ne présente que son témoignage et des photocopies de photographies en noir et blanc et de mauvaise qualité de ce qui ressemble à un bâtiment détruit sans apporter le moindre élément susceptible de remettre en cause les allégations du Conseil et la documentation sur laquelle celui-ci s’est fondé en l’espèce. En effet, le requérant aurait pu présenter des statuts, des contrats ou d’autres documents attestant ses activités commerciales ou professionnelles ou, encore, l’arrêt de toute activité. Par ailleurs, il y a lieu de relever que ce témoignage, émanant du requérant lui-même ne dispose que d’une faible valeur probante.

117    En conséquence, force est de constater que le requérant n’a fourni aucun élément susceptible de remettre en cause le bien-fondé des motifs retenus pour le maintien de l’inscription de son nom sur les listes en cause. Au contraire, il a reconnu, dans ses écritures, avoir été un homme d’affaires influent en Syrie avant le déclenchement de la guerre.

118    En outre, ainsi qu’il a été indiqué aux points 101, 103, 109 et 110 ci-dessus, le Conseil a apporté toute une série de documents d’origines variées, susceptibles de démontrer que le requérant était lié au régime syrien en place ce qui justifiait le maintien du nom de celui-ci sur les listes en cause.

119    En effet, il y a lieu de rappeler que le Conseil a fourni aux représentants du requérant, par ses lettres des 30 mai et 26 juillet 2016, une copie des nouveaux documents et éléments d’information (le document COREU du 20 mai 2016 portant la référence PESC/0049/16 – ST 9478/16 et les documents portant les références 430/16 à 435/16 RELEX) relatifs au maintien de l’inscription du nom du requérant sur les listes en cause et à la modification de l’exposé des motifs fondant cette inscription (points 25 et 27 ci-dessus). Cette nouvelle documentation contient, d’une part, de nouveaux indices et de nouvelles informations concernant le requérant en ce qui concerne les indices déjà jugés dans l’arrêt du 26 octobre 2016, Kaddour II (T‑155/15, non publié, EU:T:2016:628) comme étant suffisants pour appuyer les motifs retenus par le Conseil pour justifier la réinscription dudit nom sur lesdites listes (voir points 101, 103 et 110 ci-dessus), et, d’autre part, des informations qui corroborent les indices déjà présentés par le Conseil lors de ladite réinscription.

120    Par ailleurs, le Conseil a annexé au mémoire en défense d’autres articles de presse émanant de différentes sources. Dans ces articles, il est avancé que l’élite économique syrienne a été largement constituée par des entrepreneurs choisis par M. Bachar Al-Assad et son cercle familial élargi et que cette élite a prospéré en profitant des faveurs du régime. Il convient, ainsi, de considérer que c’est à bon droit que le Conseil a tenu compte de ces éléments, non pour motiver ex post les actes litigieux, mais comme des indices permettant de démontrer que, eu égard au contexte dans lequel l’adoption de ces actes s’était inscrite, la motivation de ceux-ci était suffisante (voir, en ce sens, arrêt du 15 novembre 2012, Conseil/Bamba, C‑417/11 P, EU:C:2012:718, point 62).

121    Il y a, ainsi, lieu de considérer que l’ensemble de ces documents constituent ainsi un faisceau d’indices au sens de l’arrêt du 21 avril 2015, Anbouba/Conseil (C‑630/13 P, EU:C:2015:247, point 52), également susceptible de justifier le maintien du nom du requérant sur les listes en cause.

122    Il résulte de ce qui précède que le Conseil a apporté un faisceau d’indices précis et concordants, au sens de la jurisprudence citée au point 91 ci-dessus, susceptible de mettre en évidence que le requérant gardait des liens avec certaines personnalités clés du régime syrien, telles que M. Maher Al-Assad. Il y a, dès lors, lieu de conclure que le second motif soutenant le maintien du nom du requérant sur les listes en cause était suffisamment étayé.

123    Par ailleurs, selon la jurisprudence, concernant une décision adoptant des mesures restrictives, eu égard à la nature préventive de celles-ci, si le juge de l’Union considère que, à tout le moins, l’un des motifs mentionnés est suffisamment précis et concret, qu’il est étayé et qu’il constitue en soi une base suffisante pour soutenir cette décision, la circonstance que d’autres de ces motifs ne le seraient pas ne saurait justifier l’annulation de ladite décision (voir arrêt du 28 novembre 2013, Conseil/Manufacturing Support & Procurement Kala Naft, C‑348/12 P, EU:C:2013:776, point 72 et jurisprudence citée).

124    En l’espèce, le second motif du maintien de l’inscription du nom du requérant sur les listes en cause, à savoir ses relations d’affaires étroites avec M. Maher Al-Assad, ayant été établi à juste titre par le Conseil et étant une base suffisante d’inscription en vertu du critère légal établi par l’article 28, paragraphe 1, de la décision 2013/255 et par l’article 15, paragraphe 1, sous a), du règlement no 36/2012, il n’est pas nécessaire d’examiner le bien-fondé du premier motif.

125    Cependant, il convient de relever, à titre purement surabondant, que le Conseil a apporté également de nouveaux indices visant à démontrer que le requérant était un homme d’affaires influent, notamment, l’indice relatif à la détention par celui-ci d’une usine de plastiques et d’une entreprise spécialisée dans les adjudications extérieures pour l’armée ainsi que l’indice relatif à sa participation s’élevant à 40 % du capital dans une société de transport de véhicules automobiles avec M. Jaber, homme d’affaires influent également inscrit sur les listes en cause. De plus, le requérant a lui-même reconnu être un homme d’affaires influent en Syrie avant le déclenchement de la guerre dans son témoignage apporté en annexe à la requête sans apporter d’éléments permettant de considérer que tel n’est plus le cas.

126    Or, ainsi qu’il ressort de l’article 27, paragraphe 3 et de l’article 28, paragraphe 3, de la décision 2013/255, les noms des hommes d’affaires influents ne seront pas inscrits ou maintenus sur les listes des personnes qui figurent à l’annexe I de ladite décision s’il existe des informations suffisantes indiquant qu’ils ne sont pas, ou qu’ils ne sont plus, liés au régime ou qu’ils n’exercent aucune influence sur celui-ci ou qu’ils ne sont pas associés à un risque réel de contournement. À cet égard, il y a lieu de constater que, à part le témoignage du requérant qui, ainsi qu’il a été indiqué au point 116 ci-dessus, ne saurait être considéré comme étant une preuve suffisante, il ne ressort pas du dossier de l’affaire que le requérant n’est plus lié au régime et, par conséquent, le Conseil n’a pas commis d’erreur en l’inscrivant sur les listes en cause sur la base du critère d’« homme d’affaires influent » établi par lesdites dispositions.

127    Par ailleurs, il y a lieu de rappeler que les mesures prévues à l’article 27, paragraphe 2, et à l’article 28, paragraphe 2, de la décision 2013/255, telle que modifiée, en dernier lieu, par la décision 2015/1836, concernent les « femmes et hommes d’affaires influents exerçant leurs activités en Syrie » ainsi que les « personnes qui leur sont liées, dont la liste figure à l’annexe I ». Or, étant donné que, d’une part, ainsi qu’il ressort de l’arrêt du 26 octobre 2016, Jaber/Conseil (T‑154/15, non publié, EU:T:2016:629, point 109), le Conseil avait apporté suffisamment d’éléments afin d’établir que M. Jaber avait été à bon droit inscrit sur les listes en cause et, d’autre part, ainsi qu’il ressort des éléments fournis en l’espèce par le Conseil, le requérant est lié à M. Jaber, M. Kaddour est susceptible d’être lié au régime, au sens de l’article 27, paragraphe 2 et de l’article 28, paragraphe 2, de la décision 2013/255. De plus, aucun élément du dossier n’est susceptible de remettre en cause cette constatation. Au contraire, ainsi qu’il a été déjà indiqué, le requérant est lié à M. Jaber dans la mesure où ils sont tous les deux actionnaires majoritaires à hauteur de 40 % du capital d’une société de transports.

128    Au vu des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le troisième moyen, tiré d’une erreur manifeste d’appréciation.

 Sur le quatrième moyen, tiré de la violation de droits fondamentaux et du principe de proportionnalité

129    Le requérant fait valoir, d’une part, que le maintien de son nom sur les listes en cause, à la suite de l’annulation de l’inscription initiale dudit nom sur lesdites listes, constitue une violation de ses droits au respect de sa réputation et de propriété garantis, respectivement, par les articles 7 et 17 de la charte des droits fondamentaux ainsi que par les articles 1er et 8 de la CEDH, Il soutient, d’autre part, que les mesures prises à son égard sont disproportionnées, car, premièrement, le Conseil n’a pas été en mesure de démontrer le bien-fondé des motifs invoqués à cet égard, deuxièmement, ces mesures n’auront aucun effet sur le régime syrien du fait qu’il ne fait pas partie de celui-ci et qu’il n’occupe pas une position d’influence et, troisièmement, lesdites mesures lui ont causé des préjudices réels à lui et à sa famille.

130    Le Conseil conteste les arguments du requérant.

131    En ce qui concerne, en premier lieu, l’argument du requérant tiré de la violation de son droit de propriété, il convient de relever que ce droit fait partie des principes généraux du droit de l’Union et se trouve consacré par l’article 17 de la charte des droits fondamentaux (voir arrêt du 13 septembre 2013, Makhlouf/Conseil, T‑383/11, EU:T:2013:431, point 96 et jurisprudence citée).

132    Cependant, selon une jurisprudence constante, le droit de propriété ne jouit pas, dans le droit de l’Union, d’une protection absolue. Par conséquent, des restrictions peuvent être apportées à l’usage de ce droit fondamental, à condition que ces restrictions répondent effectivement à des objectifs d’intérêt général poursuivis par l’Union et ne constituent pas, au regard du but poursuivi, une intervention démesurée et intolérable qui porterait atteinte à la substance même du droit ainsi garanti [voir, en ce sens, arrêts du 15 novembre 2012, Al-Aqsa/Conseil et Pays-Bas/Al-Aqsa, C‑539/10 P et C‑550/10 P, EU:C:2012:711, point 121, et du 25 juin 2015, Iranian Offshore Engineering & Construction/Conseil, T‑95/14, EU:T:2015:433, point 59 (non publié)].

133    Il en résulte que, étant donné l’importance primordiale de la protection des populations civiles en Syrie, les restrictions au droit de propriété évoquées par le requérant ne sont pas disproportionnées (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 13 septembre 2013, Makhlouf/Conseil, T‑383/11, EU:T:2013:431, point 106), d’autant plus que la décision 2013/255 et le règlement no 36/2012 prévoient certaines exceptions permettant aux personnes et aux entités visées par des mesures restrictives de faire face aux dépenses essentielles.

134    En effet, la décision 2013/255 et le règlement no 36/2012 prévoient la possibilité d’autoriser l’utilisation de fonds gelés pour faire face à des besoins essentiels ou satisfaire à certains engagements, d’accorder des autorisations spécifiques permettant de dégeler des fonds, d’autres avoirs financiers ou d’autres ressources économiques et de réviser périodiquement la composition des listes en vue de permettre que les personnes et entités ne répondant plus aux critères pour figurer dans la liste litigieuse en soient radiées (voir, en ce sens, arrêt du 13 septembre 2013, Makhlouf/Conseil, T‑383/11, EU:T:2013:431, points 102 et 105).

135    À cet égard, il convient de relever que le requérant n’a jamais évoqué le besoin d’accéder à l’ensemble ou à une partie des fonds gelés.

136    Il y a donc lieu de rejeter cet argument.

137    En ce qui concerne, en deuxième lieu, l’argument du requérant tiré d’une atteinte au droit à la réputation, il y a lieu de rappeler que ce droit n’est pas une prérogative absolue et que son exercice peut faire l’objet de restrictions justifiées par des objectifs d’intérêt général poursuivis par l’Union. Ainsi, toute mesure restrictive économique ou financière comporte, par définition, des effets qui affectent la réputation de la personne ou de l’entité qu’elle vise, causant ainsi des préjudices à cette dernière. L’importance des objectifs poursuivis par les mesures restrictives en cause est toutefois de nature à justifier des conséquences négatives, même considérables, pour les personnes ou les entités concernées (voir, en ce sens, arrêt du 25 mars 2015, Central Bank of Iran/Conseil, T‑563/12, EU:T:2015:187, point 115).

138    Par ailleurs et en tout état de cause, force est de constater que, ainsi qu’il a été relevé par le Conseil, le requérant n’apporte aucun élément de nature à démontrer que les mesures prises à son égard ont causé une atteinte à sa réputation et, par conséquent, il y a lieu de rejeter ses allégations.

139    En ce qui concerne, en troisième lieu, l’argument du requérant tiré d’une violation du principe de proportionnalité, il résulte d’une jurisprudence constante que le principe de proportionnalité fait partie des principes généraux du droit de l’Union et exige que les moyens mis en œuvre par une disposition du droit de l’Union soient aptes à réaliser les objectifs légitimes poursuivis par la réglementation concernée et n’aillent pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre lesdits objectifs [arrêts du 15 novembre 2012, Al-Aqsa/Conseil et Pays-Bas/Al-Aqsa, C‑539/10 P et C‑550/10 P, EU:C:2012:711, point 122 ; du 25 juin 2015, Iranian Offshore Engineering & Construction/Conseil, T‑95/14, EU:T:2015:433, point 60 (non publié), et du 14 mars 2017, Bank Tejarat/Conseil, T‑346/15, non publié, EU:T:2017:164, point 149].

140    Certes, les droits du requérant sont restreints dans une certaine mesure du fait des mesures restrictives prises à son égard, dès lors qu’il ne peut pas, notamment, disposer de ses fonds éventuellement situés sur le territoire de l’Union, ni les transférer vers l’Union, sauf en vertu d’autorisations particulières. De même, les mesures visant le requérant peuvent, le cas échéant, susciter une certaine méfiance ou défiance de ses partenaires et de ses clients à son égard.

141    Toutefois, il ressort de l’examen du troisième moyen que le Conseil a, à juste titre, maintenu le nom du requérant sur les listes en cause en se fondant sur les relations professionnelles entretenues avec des personnalités clés du régime, notamment avec M. Maher Al-Assad. De ce fait, le requérant doit être considéré comme un homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie.

142    La décision du maintien du nom du requérant sur les listes en cause, pour autant qu’elle soit fondée sur le critère relatif à l’association du requérant avec le régime syrien par ses relations d’affaires étroites avec M. Maher Al-Assad et, par conséquent, par son soutien audit régime, est apte à réaliser l’objectif d’intérêt général poursuivi par la politique des mesures restrictives adoptée par le Conseil, à savoir la fin de la répression exercée contre la population civile en Syrie, qui a coûté la vie à des milliers de civils. Cet objectif s’inscrit dans le cadre plus général des efforts liés au maintien de la paix et de la sécurité internationale, prévus à l’article 21 du TUE qui vise les dispositions de l’action extérieure de l’Union, et est, par conséquent, légitime.

143    Quant au caractère prétendument disproportionné du maintien du nom du requérant sur les listes en cause, force est de rappeler, ainsi qu’il ressort des points 133 et 134 ci-dessus, que l’article 28, paragraphe 6, de la décision 2013/255, dans sa version modifiée, prévoit la possibilité, d’une part, d’autoriser l’utilisation de fonds gelés pour faire face à des besoins essentiels ou satisfaire à certains engagements et, d’autre part, d’accorder des autorisations spécifiques permettant de dégeler des fonds, d’autres avoirs financiers ou d’autres ressources économiques (voir, par analogie, arrêts du 3 septembre 2008, Kadi et Al Barakaat International Foundation/Conseil et Commission, C‑402/05 P et C‑415/05 P, EU:C:2008:461, point 364, et du 15 novembre 2012, Al-Aqsa/Conseil et Pays-Bas/Al-Aqsa, C‑539/10 P et C‑550/10 P, EU:C:2012:711, point 127).

144    En outre, il convient de prendre en considération que le maintien du nom du requérant sur les listes en cause ne saurait être qualifié de disproportionné en raison de son prétendu caractère potentiellement illimité. En effet, ce maintien fait l’objet d’un réexamen périodique (au moins annuel) en vue d’assurer que les personnes et entités ne répondant plus aux critères pour figurer sur lesdites listes en soient radiées (voir, par analogie, arrêts du 3 septembre 2008, Kadi et Al Barakaat International Foundation/Conseil et Commission, C‑402/05 P et C‑415/05 P, EU:C:2008:461, point 365, et du 15 novembre 2012, Al-Aqsa/Conseil et Pays-Bas/Al-Aqsa, C‑539/10 P et C‑550/10 P, EU:C:2012:711, point 129).

145    Quant aux préjudices allégués par le requérant qui auraient été causés à la suite du maintien de l’inscription de son nom sur les listes en cause et, selon lesquels, ses entreprises auraient été détruites et sa vie ainsi que celle de sa famille seraient en danger, il y a lieu de relever, tout d’abord, que le requérant n’a pas formulé une demande de réparation de ces préjudices dans ses conclusions.

146    À cet égard et en tout état de cause, il y a lieu de constater ensuite que, afin de démontrer l’existence des préjudices allégués, le requérant s’est borné à présenter son propre témoignage ainsi que des photocopies des photos en noir et blanc, de mauvaise qualité de ce qui ressemble à un bâtiment détruit.Les éléments de preuve apportés par le requérant ne suffisent ainsi pas à démontrer l’existence desdits préjudices.

147    Enfin, il convient de rappeler que l’importance des objectifs poursuivis par les actes attaqués est de nature à justifier que ceux-ci aient pu avoir des conséquences négatives, même considérables, pour le requérant sans que cela affecte leur légalité (voir, en ce sens, arrêt du 27 février 2014, Ezz e.a./Conseil, T‑256/11, EU:T:2014:93, point 191).

148    Il en résulte que, étant donné l’importance primordiale du maintien de la paix et de la sécurité internationales, les restrictions au droit de propriété et de réputation du requérant éventuellement causées par les actes attaqués sont justifiées par un objectif d’intérêt général et ne sont pas disproportionnées au regard des buts visés.

149    Au vu des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le quatrième moyen, tiré d’une violation de droits fondamentaux et du principe de proportionnalité.

 Sur le cinquième moyen, tiré de la violation du principe de non-discrimination

150    Le requérant fait valoir que le Conseil a violé le principe de non-discrimination en ayant traité le maintien de l’inscription de son nom sur les listes en cause de la même manière que celui des noms de MM. M. Hamcho et  Jaber sur lesdites listes. Il soutient, à cet égard, que ledit principe implique non seulement que les affaires similaires soient traitées de la même manière, mais, également, que les affaires différentes soient traitées de manière différente. Selon lui, s’il est vrai qu’il a fait appel au même représentant légal que MM. Hamcho et Jaber, il ne reste pas moins que les faits qui lui sont reprochés et sa situation professionnelle sont complètement différents des faits reprochés à ces derniers et à leur situation professionnelle.

151    Le Conseil conteste les arguments du requérant.

152    Selon la jurisprudence, le principe d’égalité de traitement, qui constitue un principe fondamental de droit, interdit que des situations comparables soient traitées de manière différente ou que des situations différentes soient traitées de manière égale, à moins que de tels traitements ne soient objectivement justifiés (arrêt du 14 octobre 2009, Bank Melli Iran/Conseil, T‑390/08, EU:T:2009:401, point 56).

153    En l’espèce, il convient de noter que, ainsi qu’il a été soulevé par le Conseil dans sa défense, le requérant a fait l’objet des mesures litigieuses à la suite d’une évaluation individuelle, fondée sur des éléments de preuve concrets. En effet, les motifs et les éléments de preuve sur lesquels le Conseil s’est fondé pour maintenir l’inscription du nom du requérant sur les listes en cause diffèrent, ainsi qu’il a été reconnu par celui-ci, des motifs et des éléments de preuve sur lesquels ladite institution s’est fondée pour maintenir l’inscription des noms de MM. Hamcho et Jaber sur lesdites listes. Certes, les noms de ces trois personnes ont été inscrits sur ces listes du fait de leurs activités commerciales étant donné que, même si leurs activités sont différentes, ils tirent avantage du régime syrien et le soutiennent (critère des hommes d’affaires influents exerçant leurs activités en Syrie). Toutefois, rien n’indique que le Conseil ait traité la situation du requérant de la même manière que celles des MM. Hamcho et Jaber.

154    Partant, le présent moyen doit être rejeté comme non fondé.

155    Il y a dès lors lieu de rejeter le cinquième moyen, et, par voie de conséquence, le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

156    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Le requérant ayant succombé, il y a lieu de le condamner à supporter ses propres dépens ainsi que ceux du Conseil, conformément aux conclusions de ce dernier.

Par ces motifs,


LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      M. Khaled Kaddour est condamné à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par le Conseil de l’Union européenne.

Gratsias

Labucka

Ulloa Rubio

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 31 mai 2018.

Signatures


Table des matières 


Antécédents du litige

Sur l’inscription initiale du nom du requérant sur les listes de personnes visées par des mesures restrictives

Sur la réinscription et le maintien du nom du requérant sur les listes de personnes visées par des mesures restrictives

Procédure et conclusions des parties

En droit

Sur le premier moyen, tiré d’un détournement de pouvoir et de violations des principes de bonne administration, d’autorité de la chose jugée ainsi que de sécurité juridique et du droit à un recours effectif

Sur le premier grief, tiré d’un détournement de pouvoir

Sur le deuxième grief, tiré de la violation du principe de bonne administration

Sur le troisième grief, tiré de la violation du droit à un recours effectif et des principes d’autorité de la chose jugée et de sécurité juridique

Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 266 TFUE

Sur le troisième moyen, tiré d’une erreur manifeste d’appréciation

Sur le quatrième moyen, tiré de la violation de droits fondamentaux et du principe de proportionnalité

Sur le cinquième moyen, tiré de la violation du principe de non-discrimination

Sur les dépens


*      Langue de procédure : l’anglais.