Language of document : ECLI:EU:T:2022:552

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

14 septembre 2022 (*)

« Marque de l’Union européenne – Demandes de marques de l’Union européenne figuratives READY 4YOU – Motif absolu de refus – Absence de caractère distinctif – Article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 »

Dans les affaires jointes T‑367/21 et T‑432/21,

Sushi&Food Factor sp. z o.o. sp.k., établie à Robakowo (Pologne), représentée par Me J. Gwiazdowska, avocate,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mmes D. Walicka et M. Chylińska, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de M. D. Spielmann (rapporteur), président, Mme M. Brkan et M. I. Gâlea, juges,

greffier : Mme M. Zwozdziak-Carbonne, administratrice,

vu la phase écrite de la procédure, notamment la décision du 25 avril 2022 portant jonction des affaires T‑367/21 et T‑432/21 aux fins de la phase orale de la procédure et de la décision mettant fin à l’instance,

à la suite de l’audience du 29 juin 2022,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Sushi&Food Factor sp. z o.o. sp.k., demande l’annulation des décisions de la cinquième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 20 avril 2021 (affaire R 2273/2020-5) et du 13 mai 2021 (affaire R 2321/2020-5) (ci-après les « décisions attaquées »).

 Antécédents du litige

2        Le 13 mars 2020 (affaire T‑367/21), la requérante a présenté à l’EUIPO une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne pour le signe figuratif suivant :

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3        Le 11 mars 2020 (affaire T‑432/21), la requérante a présenté à l’EUIPO une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne pour le signe figuratif suivant :  

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4        Les marques demandées désignaient les produits et les services relevant des classes 29, 30 et 43 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 29 : « Denrées et produits alimentaires principalement constitués de viande et de ses succédanés ; fruits, légumes et champignons transformés (y compris les noix et les légumineuses) ; produits laitiers et leurs succédanés ; fromages ; lait ; produits et boissons laitiers ; œufs d’oiseaux et produits à base d’œufs ; huiles et graisses ; huile d’olive ; beurres ; poissons, fruits de mer et mollusques, et produits dérivés ; soupes et préparations pour faire les bouillons, extraits de viande ; viande et charcuterie ; volaille ; gibier ; pâté de foie ; bouillons ; salades de légumes et de viande ; amuse-bouche à base de pommes de terre ; amuse-bouche à base de légumes ; amuse-bouche à base de viande ; amuse-bouche à base de fruits ; amuse-bouche à base de noix ; amuse-bouche à base de soja ; amuse-bouche à base de tofu ; amuse-bouche à base de fromage ; amuse-bouche à base d’œufs ; desserts lactés ; desserts aux fruits ; desserts au yaourt ; gelées, confitures, compotes, pâtes de fruits et de légumes ; chips de pommes de terre ; chips de fruits ; chips de légumes » ;

–        classe 30 : « Café, thé, cacao et succédanés de ces produits ; café non naturel ; chocolat ; boissons à base de café, thé, cacao et chocolat ; sucreries ; céréales transformées, amidons et produits dérivés ; préparations de boulangerie et levure ; pâtisseries et confiseries, gâteaux, tartes et biscottes ; farine ; préparations et produits céréaliers ; produits céréaliers pour petit-déjeuner ; riz ; tapioca ; pâtes, nouilles et boulettes sèches et fraîches ; petits pains ; pretzels ; petits-beurre ; muesli ; flocons de maïs, d’avoine et de céréales ; gruaux pour l’alimentation humaine ; barres de céréales et énergétiques ; bonbons, barres et chewing-gums ; pain ; sucres, édulcorants naturels, enrobages et garnitures pâtissiers, produits apicoles ; sagou ; miel ; mélasse (sirops) ; glaçons, glaces, yaourts et sorbets glacés ; sel, épices et arômes ; vinaigre ; chips (produits céréaliers) ; sauces ; sushi ; moutarde ; mayonnaise ; ketchup ; chapelure ; pizza ; pâtés ; plats préparés à base de riz ; plats préparés à base de pâtes ; amuse-bouche à base de céréales, de sésame, de riz, de pâtes, de chocolat, de muesli ; amuse-bouche – sucreries contenant des céréales, des noix, des fruits ; croûtons » ;

–        classe 43 : « Service d’approvisionnement en aliments et boissons ; services de restaurants ; services de pizzerias, petits cafés, bars, cafés, salons de thé, cafés-glaciers, pubs, bars à vin ; services de traiteurs ; location de salles de réunion ; location de logements temporaires ; location de chaises, tables, linge de table et verrerie ; location de tentes et de constructions transportables ; services de conseil en matière d’aliments ».

5        Par deux décisions des 29 septembre 2020 (affaire T‑367/21) et 8 octobre 2020 (affaire T‑432/21), l’examinateur a rejeté les demandes d’enregistrement desdites marques, sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous b), et de l’article 7, paragraphe 2, du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1) (affaire T‑367/21) et sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du même règlement (affaire T‑432/21).

6        Les 30 novembre 2020 (affaire T‑367/21) et 7 décembre 2020 (affaire T‑432/21), la requérante a formé deux recours auprès de l’EUIPO contre les décisions de l’examinateur.

7        Par les décisions attaquées, la chambre de recours a rejeté les recours au motif que les marques demandées étaient dépourvues de caractère distinctif, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

8        En particulier, la chambre de recours a considéré que, les marques demandées étant constituées de mots ayant une signification en anglais, le public pertinent était le public de l’Union européenne ayant au moins une connaissance de base de la langue anglaise. Elle a, en outre, indiqué que le niveau d’attention du public pertinent était moyen.

9        La chambre de recours a considéré que l’expression « ready 4you » dans son ensemble serait comprise par le public cible, notamment les consommateurs anglophones, comme « prêt pour toi ». La chambre de recours a estimé que le contenu sémantique des marques demandées ne véhiculait qu’un message promotionnel concernant les caractéristiques des produits et services, qui, sans indiquer des caractéristiques spécifiques, notamment des services en cause, avait un caractère élogieux, publicitaire, et n’indiquait ainsi que des caractéristiques positives des produits et services visés par la demande. Elle a ajouté que les couleurs représentées sur les marques demandées n’étaient pas suffisamment inhabituelles dans l’industrie concernée pour conférer un caractère distinctif à ces marques dans leur ensemble et que les éléments figuratifs étaient trop simples pour détourner l’attention du consommateur du message promotionnel des marques.

10      Enfin, la chambre de recours, s’agissant des autres décisions de l’EUIPO invoquées par la requérante, a considéré que le fait d’avoir enregistré d’autres marques contenant les mots « ready » ou « 4you » ou contenant des éléments graphiques similaires n’était pas un argument en faveur de l’enregistrement des marques en question. De plus, selon la chambre de recours, le fait que les marques demandées fassent partie d’une « famille de marques » de la requérante n’était pas pertinent en l’espèce.

 Conclusions des parties

11      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler les décisions attaquées et autoriser l’enregistrement des marques demandées ;

–        à titre subsidiaire, annuler les décisions attaquées et renvoyer les affaires devant l’EUIPO ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens, y compris ceux exposés devant la chambre de recours et le département « Opérations » de l’EUIPO.

12      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter les recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

13      La requérante invoque trois moyens. Le premier, divisé en deux branches, est tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, le deuxième, d’une violation de l’article 94, paragraphe 1, et de l’article 95, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 et, le troisième, de la violation des principes de bonne administration, de sécurité juridique et d’égalité de traitement.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001

14      D’une part, la requérante fait valoir que la chambre de recours a méconnu l’obligation de procéder à une analyse d’ensemble et d’examiner le caractère distinctif des marques demandées au regard des différents produits et services visés dans les demandes d’enregistrement et du public pertinent et qu’elle a ignoré les circonstances pertinentes attestant de l’aptitude des marques demandées à remplir la fonction d’une marque. D’autre part, selon la requérante, la chambre de recours a omis de tenir compte des éléments figuratifs des marques demandées et estimé à tort que ces marques étaient une devise publicitaire.

 Sur la première branche du premier moyen

15      La requérante fait valoir que la chambre de recours a procédé à une analyse erronée du caractère distinctif des marques demandées en méconnaissant l’obligation de les examiner au regard des différents produits et services visés dans les demandes d’enregistrement et du public pertinent, qui se caractérise par des niveaux d’attention différents, et en ignorant d’autres circonstances pertinentes, telles que les habitudes du marché, l’utilisation sur le marché et la famille des marques, violant ainsi les principes d’appréciation globale.

16      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

17      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, sont refusées à l’enregistrement les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif. En vertu de l’article 7, paragraphe 2, du même règlement, l’article 7, paragraphe 1, est applicable même si les motifs de refus n’existent que dans une partie de l’Union.

18      Le caractère distinctif d’une marque au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 signifie que cette marque permet d’identifier le produit pour lequel l’enregistrement est demandé comme provenant d’une entreprise déterminée et donc de distinguer ce produit de ceux d’autres entreprises (voir arrêt du 21 janvier 2010, Audi/OHMI, C‑398/08 P, EU:C:2010:29, point 33 et jurisprudence citée).

19      Ce caractère distinctif doit être apprécié, d’une part, par rapport aux produits ou aux services pour lesquels l’enregistrement est demandé et, d’autre part, par rapport à la perception qu’en a le public pertinent (voir arrêt du 29 avril 2004, Henkel/OHMI, C‑456/01 P et C‑457/01 P, EU:C:2004:258, point 35 et jurisprudence citée).

20      Il convient, en outre, de rappeler que, selon la jurisprudence de la Cour, d’une part, l’examen des motifs absolus de refus doit porter sur chacun des produits ou des services pour lesquels l’enregistrement de la marque est demandé et que, d’autre part, la décision par laquelle l’autorité compétente refuse l’enregistrement d’une marque doit, en principe, être motivée pour chacun desdits produits ou desdits services (arrêt du 17 mai 2017, EUIPO/Deluxe Entertainment Services Group, C‑437/15 P, EU:C:2017:380, point 29).

21      Toutefois, s’agissant de cette dernière exigence, l’autorité compétente peut se limiter à une motivation globale pour tous les produits ou services concernés, lorsque le même motif de refus est opposé pour une catégorie ou un groupe de produits ou de services (voir arrêt du 17 mai 2017, EUIPO/Deluxe Entertainment Services Group, C‑437/15 P, EU:C:2017:380, point 30 et jurisprudence citée). Cependant, une telle faculté ne s’étend qu’à des produits et à des services présentant entre eux un lien suffisamment direct et concret, au point qu’ils forment une catégorie ou un groupe de produits ou de services d’une homogénéité suffisante (voir arrêt du 17 mai 2017, EUIPO/Deluxe Entertainment Services Group, C‑437/15 P, EU:C:2017:380, point 31 et jurisprudence citée).

22      Il résulte des considérations qui précèdent que, contrairement à ce que soutient la requérante, il ne saurait a priori être exclu que les produits et les services visés par une demande d’enregistrement présentent tous une caractéristique pertinente pour l’analyse d’un motif absolu de refus et qu’ils puissent être regroupés, aux fins de l’examen de la demande d’enregistrement en cause par rapport à ce motif absolu de refus, dans une seule catégorie ou dans un seul groupe d’une homogénéité suffisante, au sens de la jurisprudence citée au point 21 ci-dessus.

23      En l’espèce, il y a lieu de relever que la chambre de recours a, à juste titre, identifié plusieurs groupes homogènes de produits et de services aux fins de la définition du public pertinent et de son niveau d’attention.

24      À cet égard, la chambre de recours, aux points 16 et 17 de la décision attaquée dans l’affaire T‑367/21 et aux points 15 et 16 de la décision attaquée dans l’affaire T‑432/21, a distingué, d’une part, les denrées alimentaires relevant des classes 29 et 30, c’est-à-dire des produits d’usage courant qui sont destinés au grand public et, d’autre part, les services relevant de la classe 43, c’est-à-dire une variété de services de restauration, de location de salles, de location de matériel aux fins de restauration ainsi que des services de conseil en alimentation. Dans ces deux cas, la chambre de recours a considéré que le niveau d’attention du public de ces produits et services se situait au niveau de l’utilisateur moyen, normalement informé, raisonnablement attentif et avisé.

25      En outre, la chambre de recours, aux fins de vérifier le caractère distinctif des marques demandées, a identifié, aux points 30 et 31 de la décision attaquée dans l’affaire T‑367/21 et aux points 29 et 30 de la décision attaquée dans l’affaire T‑432/21, comme groupes homogènes de produits et de services les produits alimentaires relevant des classes 29 et 30, les services de restauration relevant de la classe 43 et les services de location et les conseils en matière d’aliments relevant de la classe 43.

26      Par ailleurs, il y a lieu de relever, à l’instar de l’EUIPO, que la requérante n’a pas présenté de groupes spécifiques de produits dont l’identification pourrait avoir une incidence sur l’appréciation du caractère distinctif des signes en cause. Dans ces conditions, il convient de rejeter cet argument de la requérante.

27      S’agissant de l’argument de la requérante selon lequel la chambre de recours a ignoré d’autres circonstances pertinentes, telles que, par exemple, les habitudes des consommateurs du marché ou les modalités de vente des produits et services en cause, il suffit de relever que la requérante n’a pas établi, en l’espèce, que les habitudes des consommateurs ou les modalités de vente des produits et services en cause étaient de nature à remettre en cause les appréciations de la chambre de recours concernant le caractère distinctif des marques demandées.

28      Enfin, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel la chambre de recours a omis de prendre en compte que les marques demandées font partie d’une famille de marques contenant l’élément commun « 4you », il suffit de relever que le concept de la famille de marque ne relève pas des motifs absolus de refus, mais uniquement des motifs relatifs de refus, de sorte que la chambre de recours devait apprécier le caractère distinctif desdites marques au regard de leurs caractéristiques propres, sans prendre en considération les autres marques prétendument similaires dont était titulaire la requérante [arrêt du 12 mars 2019, Novartis/EUIPO (SMARTSURFACE), T‑463/18, non publié, EU:T:2019:152, point 53].

29      À la lumière des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter cette branche du premier moyen.

 Sur la seconde branche du premier moyen

30      En premier lieu, la requérante allègue que l’accent mis par la chambre de recours sur l’élément verbal de la marque et l’isolement de celle-ci auraient conduit la chambre de recours à conclure, à tort, que les marques demandées étaient considérées comme un slogan ou une accroche publicitaire.

31      En second lieu, la requérante reproche à la chambre de recours d’avoir ignoré l’élément figuratif des marques analysées, mais également de n’avoir jamais fait référence aux marques dans leur ensemble. Elle souligne également que l’élément visuel des marques est « d’une grande importance » et que « l’effet de supériorité de l’image » confère à celles-ci une fonction importante, permettant aux signes d’être plus reconnaissables pour les consommateurs. En outre, elle indique que la chambre de recours n’a pas apporté de justification à son affirmation selon laquelle la couleur des signes est communément utilisée dans le commerce, ni mentionné les raisons pour lesquelles la signification « pour » est attribuée à l’élément « 4 » de l’élément verbal de la marque, une telle interprétation n’étant prétendument pas partagée par le public anglophone.

32      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

33      L’enregistrement de marques composées de signes ou d’indications qui sont par ailleurs utilisés en tant que slogans publicitaires, indications de qualité ou expressions incitant à acheter les produits ou les services visés par ces marques n’est pas exclu en raison d’une telle utilisation (arrêt du 21 octobre 2004, OHMI/Erpo Möbelwerk, C‑64/02 P, EU:C:2004:645, point 41).

34      Il s’ensuit qu’une marque constituée de tels signes ou indications doit être considérée comme dépourvue de caractère distinctif si elle n’est susceptible d’être perçue par le public pertinent que comme une simple formule promotionnelle. En revanche, une telle marque doit se voir reconnaître un caractère distinctif si, au-delà de sa fonction promotionnelle, elle peut être perçue d’emblée  par le public pertinent comme une indication de l’origine commerciale des produits et des services visés [voir arrêt du 17 septembre 2015, Volkswagen/OHMI (COMPETITION), T‑550/14, EU:T:2015:640, point 17 et jurisprudence citée].

35      C’est à la lumière de ces principes qu’il convient d’examiner le cas d’espèce.

36      Il y a lieu tout d’abord de relever que, dans la mesure où les éléments verbaux des signes en cause étaient composés de mots anglais, la chambre de recours a considéré, au point 24 de la décision attaquée dans l’affaire T‑367/21 et au point 23 de la décision attaquée dans l’affaire T‑432/21, que le caractère distinctif devait être apprécié par rapport au public de l’Union ayant au moins une connaissance de base de la langue anglaise.

37      Ensuite, il convient de relever que, contrairement à ce que soutient la requérante, la chambre de recours a, à juste titre, considéré que le public anglophone interprétera le chiffre 4, contenu dans l’élément verbal des marques demandées, comme une référence au mot « for » en anglais (en français « pour »). À cet égard, il suffit de constater que cette interprétation est confirmée dans certains dictionnaires en ligne tels que, par exemple, www.acronymfinder.com.

38      Il s’ensuit que l’expression « ready 4you » des marques demandées est composée de mots anglais signifiant « prêt pour toi », ainsi que l’a considéré, à juste titre, la chambre de recours au point 27 de la décision attaquée dans l’affaire T‑367/21 et au point 26 de la décision attaquée dans l’affaire T‑432/21.

39      De plus, la chambre de recours a indiqué, aux points 30 et 31 de la décision attaquée dans l’affaire T‑367/21 et aux points 29 et 30 de la décision attaquée dans l’affaire T‑432/21, que, d’une part, en ce qui concerne les produits visés par les demandes et compris dans les classes 29 et 30 ainsi que les services de restauration relevant de la classe 43, les mots « ready 4you » indiquaient leurs caractéristiques positives, à savoir le fait qu’ils étaient prêts à être consommés ou faciles à préparer, ou qu’ils étaient conditionnés de manière à pouvoir être immédiatement consommés. D’autre part, s’agissant des services de location et des conseils en matière d’aliments, le signe READY 4YOU informait le consommateur que dans le cadre de ces prestations tout avait été préparé pour lui. La chambre de recours a, par conséquent, estimé que le contenu sémantique des marques demandées ne véhiculait qu’un message promotionnel concernant les caractéristiques des produits et services, qui, sans indiquer des caractéristiques spécifiques, notamment des services en cause, a un caractère élogieux, publicitaire, et n’indiquait ainsi que des caractéristiques positives des produits et services visés par la demande. Dans ces conditions, elle a considéré que les marques demandées étaient dépourvues de caractère distinctif.

40      Les considérations de la chambre de recours telles qu’exposées au point 39 ci-dessus sont correctes et doivent être approuvées. En effet, contrairement à ce que soutient la requérante, les marques demandées se réduisent à un message publicitaire ordinaire, ne possèdent aucune originalité, ne nécessitent aucun effort d’interprétation et ne déclenchent aucun processus cognitif auprès du public concerné. Cette conclusion s’applique à l’ensemble des produits et services en cause.

41      De plus, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel la chambre de recours a négligé les éléments figuratifs des marques demandées, il convient de constater que, contrairement à ce que soutient la requérante, aux points 35 à 38 de la décision attaquée dans l’affaire T‑367/21 et aux points 34 à 37 de la décision attaquée dans l’affaire T‑432/21, la chambre de recours a indiqué, à juste titre, d’une part, que les éléments figuratifs des marques demandées ne présentaient aucun degré de fantaisie et, d’autre part, que les couleurs demandées n’étaient pas suffisamment inhabituelles pour conférer aux marques litigieuses un caractère distinctif. Il s’ensuit que la chambre de recours n’a pas négligé les éléments figuratifs des marques demandées mais, au contraire, les a considérés et a conclu qu’ils ne conféraient aux marques demandées aucun caractère distinctif.

42      La requérante ne saurait non plus se prévaloir de l’argument selon lequel la chambre de recours aurait ignoré l’aspect visuel qui serait prépondérant s’agissant des produits alimentaires. En effet, l’aspect visuel des marques demandées a été considéré mais la chambre de recours a conclu, au point 37 de la décision attaquée dans l’affaire T‑367/21 et au point 36 de la décision attaquée dans l’affaire T‑432/21, que les éléments figuratifs n’étaient pas de nature à créer une impression immédiate et durable que le public pertinent pouvait garder en mémoire de manière à distinguer les produits de la requérante de ceux d’autres fabricants.

43      Il convient également de constater que c’est à tort que la requérante prétend que la chambre de recours n’a jamais fait référence au signe dans son ensemble. En effet, il ressort des points 37 et 38 de la décision attaquée dans l’affaire T‑367/21 et des points 36 et 37 de la décision attaquée dans l’affaire T‑432/21 que l’appréciation de la chambre de recours est fondée, notamment, sur l’absence de caractère distinctif des marques « dans [leur] ensemble » et sur le fait que les marques « dans [leur] ensemble » informaient le consommateur que les produits et services proposés étaient prêts à la consommation ou à l’utilisation.

44      Compte tenu de ce qui précède, il convient de rejeter comme non fondés les arguments de la requérante concernant une analyse erronée de l’élément figuratif des marques demandées et une allégation erronée concernant le caractère promotionnel desdites marques. Dans ces conditions, il convient de rejeter le premier moyen dans son ensemble.

 Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 94, paragraphe 1, et de l’article 95, paragraphe 1, du règlement 2017/1001

45      La requérante considère que les décisions attaquées sont entachées d’un défaut de motivation dans la mesure où elles portent sur le motif absolu de refus d’enregistrement visé à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001. En effet, elles ne contiendraient aucune motivation en ce qui concerne les différents produits et services relevant de catégories différentes et s’adressant à un public différent, et la motivation fournie ne permettrait de comprendre ni les raisons pour lesquelles la chambre de recours a considéré que tous les produits et services pouvaient être examinés conjointement ni celles pour lesquelles elle a considéré que les signes concernés étaient dépourvus de caractère distinctif par rapport à chacun de ces produits et services. Par ailleurs, une partie des éléments de preuve pertinents pour apprécier les affaires auraient été ignorés. Par conséquent, la motivation des décisions attaquées ne permettrait pas à la requérante de comprendre les motifs sous-tendant ces décisions.

46      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

47      Il convient de rappeler que, en vertu de l’article 94, paragraphe 1, première phrase, du règlement 2017/1001, les décisions de l’EUIPO doivent être motivées. Cette obligation de motivation a la même portée que celle découlant de l’article 296 TFUE, selon laquelle le raisonnement de l’auteur de l’acte doit apparaître de façon claire et non équivoque. Elle a pour double objectif de permettre, d’une part, aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise afin de défendre leurs droits et, d’autre part, au juge de l’Union d’exercer son contrôle sur la légalité de la décision. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée [arrêt du 7 juin 2017, Mediterranean Premium Spirits/EUIPO – G-Star Raw (GINRAW), T‑258/16, non publié, EU:T:2017:375, point 88].

48      En outre, l’obligation de motivation n’impose pas aux chambres de recours de fournir un exposé qui suivrait exhaustivement et un par un tous les raisonnements articulés des parties devant elles. Il suffit d’exposer les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de la décision [arrêts du 15 janvier 2015, MEM/OHMI (MONACO), T‑197/13, EU:T:2015:16, point 19, et du 7 juin 2017, GINRAW, T‑258/16, non publié, EU:T:2017:375, point 89].

49      Par ailleurs, la motivation peut être implicite à condition qu’elle permette aux intéressés de connaître les raisons pour lesquelles la décision de la chambre de recours a été adoptée et à la juridiction compétente de disposer des éléments suffisants pour exercer son contrôle [arrêts du 9 juillet 2008, Reber/OHMI – Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli (Mozart), T‑304/06, EU:T:2008:268, point 55, et du 7 juin 2017, GINRAW, T‑258/16, non publié, EU:T:2017:375, point 90].

50      Enfin, il y a lieu de rappeler que le défaut ou l’insuffisance de motivation constitue un moyen tiré de la violation des formes substantielles, distinct, en tant que tel, du moyen pris de l’inexactitude des motifs de la décision, dont le contrôle relève de l’examen du bien-fondé de cette décision [voir, en ce sens, arrêts du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink’s France, C‑367/95 P, EU:C:1998:154, point 67, et du 23 septembre 2015, Mechadyne International/OHMI (FlexValve), T‑588/14, non publié, EU:T:2015:676, point 59]

51      En l’espèce, en premier lieu, il convient de rappeler, ainsi qu’il ressort de l’examen du premier moyen, que la chambre de recours a établi à suffisance de droit que les marques demandées étaient dépourvues de caractère distinctif, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

52      En deuxième lieu, il ressort des arguments présentés par la requérante dans le cadre du présent moyen, mais également dans le recours dans son ensemble, qu’elle a été en mesure de comprendre les raisons pour lesquelles la chambre de recours avait estimé que les marques demandées étaient dépourvues de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

53      En troisième lieu, il convient de rappeler, ainsi qu’il a été considéré aux points 21 et 22 ci-dessus, que, selon la jurisprudence, il ne saurait a priori être exclu que les produits et les services visés par une demande d’enregistrement présentent tous une caractéristique pertinente pour l’analyse d’un motif absolu de refus et qu’ils puissent être regroupés, aux fins de l’examen de la demande d’enregistrement en cause par rapport à ce motif absolu de refus, dans une seule catégorie ou dans un seul groupe d’une homogénéité suffisante, au sens de la jurisprudence citée au point 21 ci-dessus (arrêt du 17 mai 2017, EUIPO/Deluxe Entertainment Services Group, C‑437/15 P, EU:C:2017:380, point 34). Or, en l’espèce, la chambre de recours a, à juste titre, identifié plusieurs groupes homogènes de produits et de services tant aux fins de la définition du public pertinent que pour vérifier l’existence d’un lien suffisamment spécifique et direct entre les marques demandées et les produits et services pour lesquels les demandes ont été introduites.

54      Enfin, il convient de constater que l’allégation de la requérante selon laquelle la chambre de recours a ignoré une partie des éléments de preuve n’est pas étayée.

55      Il résulte de tout ce qui précède que la chambre de recours a, conformément à l’article 94, paragraphe 1, première phrase, du règlement 2017/1001, fait apparaître de façon claire et non équivoque les motifs essentiels pour lesquels elle a considéré que les marques demandées étaient dépourvues de caractère distinctif.

56      Dès lors, il y a lieu d’écarter le présent moyen.

 Sur le troisième moyen, tiré de la violation des principes de bonne administration, de sécurité juridique et d’égalité de traitement

57      La requérante fait valoir que la chambre de recours a ignoré la pratique antérieure de l’EUIPO, alors que celle-ci constituait un point de référence légitime pour elle. En effet, les décisions attaquées ne feraient pas référence aux nombreuses marques enregistrées comportant l’élément « 4you », y compris la famille de marques de la requérante. Selon la requérante, le fait que la chambre de recours ait ignoré ces éléments dans son appréciation globale de l’affaire non seulement constitue un manquement à l’obligation de tenir compte de toutes les circonstances factuelles pertinentes, notamment des pratiques du marché dans l’appréciation de l’affaire, mais est également incompatible avec les principes de bonne administration, et constitue une violation du principe d’égalité de traitement.

58      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

59      À cet égard, il convient de rappeler que l’EUIPO est tenu d’exercer ses compétences en conformité avec les principes généraux du droit de l’Union, y compris les principes d’égalité de traitement et de bonne administration (arrêt du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, EU:C:2011:139, point 73). Eu égard auxdits principes, l’EUIPO doit prendre en considération les décisions qu’il a déjà adoptées sur des demandes similaires et s’interroger avec une attention particulière sur la question de savoir s’il y a lieu ou non de décider dans le même sens, l’application de ces principes devant être conciliée avec le respect du principe de légalité (arrêt du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, EU:C:2011:139, points 74 et 75).

60      Par conséquent, la personne qui demande l’enregistrement d’un signe en tant que marque de l’Union européenne ne saurait invoquer à son profit une illégalité éventuelle commise en faveur d’autrui afin d’obtenir une décision identique. Au demeurant, pour des raisons de sécurité juridique et, précisément, de bonne administration, l’examen de toute demande d’enregistrement doit être strict et complet afin d’éviter que des marques ne soient enregistrées de manière indue. Cet examen doit avoir lieu dans chaque cas concret. En effet, l’enregistrement d’un signe en tant que marque de l’Union européenne dépend de critères spécifiques, applicables dans le cadre des circonstances factuelles du cas d’espèce, destinés à vérifier si le signe en cause ne relève pas d’un motif de refus (arrêt du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, EU:C:2011:139, points 76 et 77).

61      En l’espèce, indépendamment de ce qui a pu être le cas pour certaines demandes antérieures d’enregistrement de signes comportant l’élément « 4you », ainsi qu’il ressort en particulier des points 33 à 44 ci-dessus, la chambre de recours a considéré à bon droit que les marques demandées se heurtaient au motif de refus tiré de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, de sorte que la requérante ne saurait utilement invoquer, aux fins d’infirmer cette conclusion, des décisions antérieures de l’EUIPO.

62      En outre, ainsi qu’il est indiqué au point 46 de la décision attaquée dans l’affaire T‑367/21 et au point 45 de la décision attaquée dans l’affaire T‑432/21, la chambre de recours a plusieurs fois refusé d’enregistrer des demandes de marques qui étaient constituées d’une combinaison d’un ou plusieurs éléments non distinctifs et de l’élément « 4you ».

63      De plus, il convient de relever, à l’instar de l’EUIPO, que les autres enregistrements indiqués par la requérante sont différents ou contiennent des éléments supplémentaires, de sorte que celle-ci ne peut s’en prévaloir utilement, eu égard à la jurisprudence citée aux points 59 et 60 ci-dessus.

64      Enfin, s’agissant de l’argument tiré de l’existence d’une famille de marques, il suffit de rappeler, ainsi qu’il a été indiqué au point 28 ci-dessus, que le concept de famille de marques ne relève pas des motifs absolus de refus, mais uniquement des motifs relatifs de refus, de sorte que la chambre de recours devait apprécier le caractère distinctif des marques demandées au regard de leurs caractéristiques propres, sans prendre en considération les autres marques prétendument similaires dont était titulaire la requérante (arrêt du 12 mars 2019, SMARTSURFACE, T‑463/18, non publié, EU:T:2019:152, point 53).

65      Dans ces conditions, il convient de rejeter le troisième moyen du recours.

66      Aucun des moyens soulevés par la requérante au soutien de ses conclusions n’étant fondé, il y a lieu de rejeter les recours dans leur ensemble sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité du chef de conclusions de la requérante visant à ce que le Tribunal autorise l’enregistrement des marques demandées.

 Sur les dépens

67      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

68      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Sushi&Food Factor sp. z o.o. sp.k. est condamnée aux dépens.

Spielmann

Brkan

Gâlea

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 14 septembre 2022.

Signatures


*      Langue de procédure : le polonais.