Language of document : ECLI:EU:T:2004:198

Arrêt du Tribunal

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)
30 juin 2004 (1)

« Marque communautaire – Marque verbale Mehr für Ihr Geld – Motifs absolus de refus – Caractère distinctif – Article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 40/94 »

Dans l'affaire T-281/02,

Norma Lebensmittelfilialbetrieb GmbH & Co. KG, établie à Nuremberg (Allemagne), représentée par Mes S. Rojahn et S. Freytag, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. D. Schennen, en qualité d'agent,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la troisième chambre de recours de l'OHMI du 3 juillet 2002 (affaire R 239/2002-3), concernant l'enregistrement de la marque verbale Mehr für Ihr Geld en tant que marque communautaire,



LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (quatrième chambre),



composé de M. H. Legal, président, Mme V. Tiili et M. M. Vilaras, juges,

greffier : M. J. Plingers, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 18 septembre 2002,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 16 décembre 2002,

à la suite de l'audience du 3 mars 2004,

rend le présent



Arrêt




Antécédents du litige

1
Le 19 mai 2000, la requérante a présenté une demande de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié.

2
La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal Mehr für Ihr Geld.

3
Les produits et services pour lesquels l’enregistrement de la marque a été demandé relèvent des classes 3, 29, 30 et 35 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

classe 3 : « Préparations pour blanchir et autres substances pour lessiver ; produits pour nettoyer, polir, dégraisser et abraser ; savons ; parfumerie, huiles essentielles, cosmétiques, produits de toilette (compris dans la classe 3) ; lotions pour les cheveux, produits de soin des cheveux ; produits déodorants à usage personnel ; dentifrices » ;

classe 29 : « Viande, charcuterie, poisson (y compris crustacés, coquillages et mollusques préparés), volaille et gibier ; viandes, charcuteries, volailles, gibiers et poissons ; extraits de viande ; fruits, légumes, herbes et pommes de terre sous forme conservée, séchée, cuite, surgelée ou préparée, y compris cacahuètes, noix, amandes noix de cajou, également à grignoter ; produits à base de pommes de terre, à savoir pommes frites, croquettes de pommes de terre, galettes de pommes de terre, boulettes de pommes de terre, pommes de terre sautées ; gelées de viandes, de charcuteries, de poissons, de fruits et de légumes ; marmelades et confitures ; œufs ; lait, en particulier petit-lait, lait suri, lait épais, conserves de lait et lait condensé ; beurre, beurre fondu, fromages, en particulier fromage blanc, conserves de fromages, kéfir, crème fraîche, yaourt (également avec adjonction de fruits), lait en poudre à usage alimentaire ; desserts à base de lait, de yaourt, de fromage blanc, de gélatine, d’amidon et/ou de crème fraîche ; boissons lactées non alcooliques ; huiles et graisses comestibles, y compris margarine et saindoux ; pâtes à tartiner à base de graisses et de mélanges de graisses ; huiles pour cuire, graisses pour cuire, huiles et graisses de cuisson ; conserves de viandes, de charcuteries, de poissons, de fruits et de légumes; salades et aliments surgelés, plats mélangés, semi-préparés (également produits à fourrer) et plats préparés, également conservés, à base de viandes, de charcuteries, de poissons, de volailles, de gibiers, de fruits et de légumes préparés, de légumineuses, de fromages, d’œufs, de pommes de terre, de pâtes, de riz, de maïs, plats et/ou produits de pommes de terre (y compris farine de pommes de terre), également avec adjonction d’épices et de sauces (y compris sauces à salades) et/ou avec du pain ou des petits pains (par exemple hamburgers et sandwiches) ; pâtés, à savoir pâtés de viandes, pâtés principalement fourrés de viandes, de poissons, de fruits et de légumes et moules à pâtés vides ; mélanges de pickles ; extraits de bouillons de viande, bouillons de viande en cubes et autres préparations à base de bouillons de viande, en particulier bouillons de viande en grains, bouillons de légumes en cubes ; potages préparés, potages concentrés et épices pour potages sous forme liquide, épaissie et lyophilisée, préparations à base de bouillons en pâte, extraits de légumes servant d’additifs pour plats et pour viandes » ;

classe 30 : « Café, thé, cacao, sucre (y compris sucre vanille et sucre vanilliné et dextrose à usage alimentaire), riz, tapioca, sagou, succédanés du café, extraits de café et de thé ; cacao en poudre ; mélanges à base de café, de thé, de cacao et de chocolat sans alcool, y compris sous forme instantanée ; puddings, poudre pour faire du pudding et desserts à base de pudding ; farines et préparations faites de céréales (à l’exception des aliments pour animaux) ; maïs soufflé, pétales de maïs à usage alimentaire ; céréales préparées pour l’alimentation humaine, en particulier flocons d’avoine et autres flocons de céréales, en particulier pour le petit déjeuner, également en mélanges avec des fruits séchés (y compris les noix), du sucre et/ou du miel ; farine de pommes de terre, semoule ; pâtes, plats préparés à base de pâtes et conserves de pâtes ; pain, biscuits, gâteaux et autres pâtisseries; produits pour l’apéritif sucrés et/ou épicés à base de céréales, de cacao, de gâteaux secs, de chocolat, de sucre, de miel, de fruits séchés, de noix, de produits de pommes de terre (y compris farine de pommes de terre), de cacahuètes, d’amandes, de noix de cajou et/ou de gâteaux ; articles de biscuiterie et de biscotterie (également avec intérieurs sucrés et épicés), en particulier pain suédois, petits gâteaux et biscuits ; pizzas, également conservées ; chocolat ; confiserie, en particulier chocolats et pralines, également fourrés de fruits, de café, de boissons sans alcool, de vin et/ou de spiritueux, ainsi que de lait ou de produits laitiers, en particulier yaourt ; glaces comestibles et poudre pour glaces comestibles ; confiseries, en particulier bonbons et gommes à mâcher à usage non médicale ; massepain ; miel, crème à base de sucre inverti, sirop de fruits, sirop de mélasse ; masses de cacao à tartiner, pâtes à tartiner à base de sucre, de cacao, de nougat, de lait et/ou de graisses ; levure, poudre pour faire lever, essences pour pâtisserie (à l’exception des huiles essentielles) ; sel, moutarde, poivre, vinaigre, sauces (y compris sauces à salades), poudre pour faire des sauces et extraits de sauces (y compris ceux de sauces à salades), sauces à salades; mayonnaise; ketchup, épices et mélanges d’épices ; glace à rafraîchir » ;

classe 35 : « Publicité, aide à la vente, conseils en matière de vente et d’achat, recherche et analyses de marché ; conseils d’entreprise, d’organisation, de personnel et de gestion des affaires commerciales ; publicité ; documentation publicitaire ; conseils en matière de décoration intérieure de commerces et de magasins à but publicitaire, décoration de vitrines ; médiation d’informations et de savoir-faire dans le domaine de la vente et des affaires commerciales, en particulier pour le commerce des aliments ; comptabilité, courtage et conclusion d’affaires commerciales, courtage de contrats de vente et d’achat de marchandises ; distribution d’échantillons ».

4
Par décision du 18 janvier 2002, l’examinateur a rejeté la demande de marque au motif que la marque demandée était descriptive et non distinctive au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement n° 40/94.

5
Le 15 mars 2002, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre de l’article 59 du règlement n° 40/94, contre la décision de l’examinateur.

6
Par décision du 3 juillet 2002 (ci-après la « décision attaquée »), la troisième chambre de recours a annulé la décision de l’examinateur pour autant que celle-ci portait rejet de la demande de marque pour les services relevant de la classe 35. La chambre de recours a rejeté le recours pour le surplus.

7
En ce qui concerne les produits relevant des classes 3, 29 et 30, la chambre de recours a considéré, en substance, que la marque demandée était, d’une part, exclusivement composée d’indications descriptives et, d’autre part, dépourvue de caractère distinctif.


Conclusions des parties

8
La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

annuler la décision attaquée dans la mesure où elle confirme le rejet de la demande d’enregistrement pour les classes 3, 29 et 30 ;

condamner l’OHMI aux dépens.

9
L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

rejeter le recours ;

condamner la requérante aux dépens.


En droit

10
La requérante invoque deux moyens tirés, respectivement, d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94 et d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94. Il convient de commencer par l’examen du second moyen.

Arguments des parties

11
La requérante fait valoir que la marque demandée Mehr für Ihr Geld présente le minimum de caractère distinctif requis au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

12
Le consommateur considérerait le signe Mehr für Ihr Geld comme un ensemble et comme une indication de l’entreprise déterminée d’où proviennent les produits et services auxquels il s’applique. Ce serait précisément parce que ce signe a la forme d’un énoncé direct, dont le sens est « si vous achetez cela chez nous, vous en aurez plus pour votre argent! », que le consommateur moyen y verrait une indication non pas tant de la qualité d’un produit que des avantages qu’il y aurait à effectuer ses achats auprès de l’utilisateur de ce slogan.

13
En outre, selon la requérante, la marque demandée Mehr für Ihr Geld étant courte et frappante, le consommateur est curieux de savoir de quel « plus » il s’agit, de sorte que le slogan lui reste en mémoire et a une fonction d’indication d’origine. Le slogan tirerait parti de façon originale de l’ambivalence entre le terme « mehr » (« plus »), qui serait indéterminé et, partant, dont la signification resterait obscure, et les termes « Ihr Geld » (« votre argent »), qui, pour le consommateur, serait plus compréhensible et aurait une signification plus personnelle.

14
Le fait que le slogan en question soit constitué d’éléments usuels, compréhensibles et qui auraient déjà été utilisés à de nombreuses reprises dans le commerce serait dénué de pertinence pour l’appréciation du caractère distinctif de la marque demandée, puisque le droit des marques ne protégerait pas les éléments isolés de celles-ci et qu’il faudrait toujours envisager la marque dans son ensemble. Selon la requérante, le fait que certains mots du slogan « mehr für Ihr Geld » soient employés occasionnellement de façon descriptive dans la publicité faite aux produits et services revendiqués ne justifie pas le rejet de la demande de marque sur le fondement du défaut de caractère distinctif. En effet, dans l’assemblage concret de ces mots qui interpelleraient directement le consommateur destinataire de la publicité, le signe serait compris, à la manière d’une marque de maison, comme une indication de l’origine commerciale des produits qui désignent une entreprise déterminée et non pas seulement comme une indication d’une qualité déterminée de ces produits.

15
La requérante ajoute que, en raison du caractère court, frappant et ambivalent de la marque demandée, le consommateur y découvrira, sans que cela soit nécessaire pour surmonter le motif de refus, un ensemble conceptuel provoquant un effet de surprise et donc de repérage. L’interprétation de l’élément « mehr » (« plus »), qui éveille la curiosité, en corrélation avec l’indication « Ihr Geld » (« votre argent »), produirait un effet d’étonnement et d’étrangeté chez le consommateur dans le cadre d’un slogan communiquant une énonciation publicitaire positive, de sorte que la marque demandée devrait, dans son ensemble, être considérée comme distinctive au sens de la jurisprudence [arrêt du Tribunal du 11 décembre 2001, Erpo Möbelwerk/OHMI (DAS PRINZIP DER BEQUEMLICHKEIT), T‑138/00, Rec. p. II‑3739].

16
Selon la requérante, c’est en raison de son caractère court et frappant, de sa formulation, qui constitue une interpellation directe et personnelle, et de son sens vague que la marque demandée sera perçue comme une marque générique et qu’elle permettra au consommateur de saisir la valeur ajoutée du produit acheté dans les magasins de la requérante. Elle conteste l’affirmation de l’examinateur selon laquelle la marque demandée ne fait intervenir aucun élément d’imagination. Cette appréciation ne permettrait pas de conclure à un défaut de caractère distinctif.

17
Par ailleurs, la requérante fait observer que tous les exemples d’utilisation du signe en cause ou de ses éléments, invoqués par l’examinateur, révèlent une utilisation descriptive d’éléments de la marque demandée ou des modifications de celle-ci. Toutefois, les entreprises concurrentes de la requérante seraient libres d’en faire un usage descriptif même après l’enregistrement.

18
En outre, la requérante invoque une décision du Bundesgerichtshof, Partner with the best (Markenrecht 2000, p. 50 et 51), selon laquelle la présence répétée de différents mots d’un slogan publicitaire ou d’un slogan publicitaire semblable, par exemple sur des pages Internet, ne saurait entraîner une appréciation contraire, puisque, par principe, la marque demandée doit être appréciée dans sa totalité et que, par conséquent, une recherche de documents dans lesquels les différents mots apparaissent dans des indications descriptives ne permet pas de conclure à la fréquence d’utilisation de cette marque. Il en irait de même pour une marque communautaire.

19
Par conséquent, la marque demandée Mehr für Ihr Geld ne pourrait être considérée, pour les classes 3, 29 et 30, comme un signe dépourvu de caractère distinctif.

20
L’OHMI maintient que la chambre de recours était fondée à considérer que la marque demandée n’était pas distinctive pour les produits qu’elle désigne à l’égard du public pertinent.

21
L’OHMI rappelle que toute marque faisant l’objet d’une demande d’enregistrement doit non seulement posséder un caractère distinctif, mais aussi se prêter à exercer une fonction d’indication d’origine. L’OHMI affirme qu’il a toujours considéré que la qualité de slogan publicitaire n’empêche pas une marque de se voir accorder une protection en tant que telle, de même qu’elle ne justifie pas l’application de critères d’appréciation plus sévères à l’examen des motifs absolus de refus [voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 4 octobre 2001, Merz & Krell, C‑517/99, Rec. p. I‑6959, point 40, et arrêt du Tribunal du 5 décembre 2002, Sykes Enterprises/OHMI (REAL PEOPLE, REAL SOLUTIONS), T‑130/01, Rec. p. II‑5179, point 19]. Cette approche ne reviendrait cependant pas à ce que l’effet produit par la marque demandée sur le consommateur concerné doive être ignoré. Bien au contraire, selon l’OHMI, il faut en tenir compte dans la mesure où il s’agit d’établir si la marque dont a été sollicité l’enregistrement, à supposer qu’elle soit effectivement utilisée, sera ou non perçue par le public concerné comme une indication d’origine.

22
L’OHMI conteste l’affirmation de la requérante selon laquelle la marque demandée Mehr für Ihr Geld (« plus pour votre argent ») pourrait jouer un rôle d’indication d’origine. Selon l’OHMI, cette marque est simple, banale et directement accessible. La teneur du message qu’elle véhicule coïnciderait exactement avec l’information que le consommateur peut en tirer, à savoir que le client pourra acquérir un « plus » en contrepartie de son argent. La marque demandée se limiterait donc à attirer l’attention sur une offre particulièrement avantageuse.

Appréciation du Tribunal

23
Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, sont refusées à l’enregistrement les « marques qui sont dépourvues de caractère distinctif ». En outre, l’article 7, paragraphe 2, du règlement n° 40/94 précise que le « paragraphe 1 est applicable même si les motifs de refus n’existent que dans une partie de la Communauté ».

24
Les signes dépourvus de caractère distinctif visés par l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 sont réputés incapables d’exercer la fonction essentielle de la marque, à savoir celle d’identifier l’origine du produit ou service, afin de permettre ainsi au consommateur qui acquiert le produit ou le service que la marque désigne de faire, lors d’une acquisition ultérieure, le même choix si l’expérience s’avère positive ou de faire un autre choix si elle s’avère négative [arrêt du Tribunal du 27 février 2002, Rewe-Zentral/OHMI (LITE), T‑79/00, Rec. p. II‑705, point 26]. Tel est le cas, notamment, des signes qui sont communément utilisés pour la commercialisation des produits ou des services concernés [arrêt du Tribunal du 3 juillet 2003, Best Buy Concepts/OHMI (BEST BUY), T‑122/01, non encore publié au Recueil, point 20].

25
Il n’en demeure pas moins que l’enregistrement d’une marque composée de signes ou d’indications qui sont par ailleurs utilisés en tant que slogans publicitaires, indications de qualité ou expressions incitant à acheter les produits ou services visés par cette marque n’est pas exclu, en tant que tel, en raison d’une telle utilisation (voir, par analogie, arrêt Merz & Krell, précité, point 40). Toutefois, un signe qui remplit d’autres fonctions que celle d’une marque au sens classique n’est distinctif, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, que s’il peut être perçu d’emblée comme une indication de l’origine commerciale des produits ou services visés afin de permettre au public pertinent de distinguer sans confusion possible les produits ou services du titulaire de la marque de ceux qui ont une autre provenance commerciale (arrêt BEST BUY, précité, point 21).

26
Le caractère distinctif d’un signe ne peut être apprécié que, d’une part, par rapport aux produits ou services pour lesquels l’enregistrement est demandé et, d’autre part, par rapport à la perception qu’en a le public pertinent (arrêt BEST BUY, précité, point 22).

27
En l’espèce, il y a lieu de relever, tout d’abord, que les produits désignés par la marque demandée sont des articles de droguerie et des produits alimentaires de consommation courante destinés à l’ensemble des consommateurs. Par conséquent, le public ciblé est censé être le consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Par ailleurs, en application de l’article 7, paragraphe 2, du règlement n° 40/94, le public ciblé par rapport auquel il convient d’apprécier le motif absolu de refus est un public germanophone, le signe verbal en cause étant composé d’éléments de langue allemande [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 27 février 2002, Ellos/OHMI (ELLOS), T‑219/00, Rec. p. II‑753, points 30 et 31, et du 15 octobre 2003, Nordmilch/OHMI (OLDENBURGER), T‑295/01, non encore publié au Recueil, point 35].

28
S’agissant, ensuite, du caractère distinctif de la marque demandée, la chambre de recours a constaté, au point 36 de la décision attaquée, que le slogan revendiqué était dépourvu du caractère minimal distinctif requis, étant donné qu’il serait compris par les milieux commerciaux visés comme une simple indication de la qualité spécifique des produits proposés et non comme une marque indiquant l’entreprise dont ils proviennent. Cela résulterait du fait que, en tant que slogan courant et usuel dépourvu d’éléments complémentaires distinctifs, ce signe n’a pas de caractère distinctif.

29
Il convient de relever que la chambre de recours a fait une analyse correcte de la marque demandée. En effet, la marque demandée sera immédiatement perçue par le public ciblé comme une simple formule promotionnelle ou un slogan qui indique que les produits en cause présentent pour les consommateurs un avantage en termes de quantité et/ou de qualité par rapport aux produits concurrents (voir, en ce sens, arrêt BEST BUY, précité, point 29). À cet égard, l’élément « mehr » (« plus ») a un caractère laudatif de nature publicitaire, dont la fonction est de mettre en relief les qualités positives des produits ou services pour la présentation desquels cet élément est utilisé [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 20 novembre 2002, Bosch/OHMI (Kit Pro et Kit Super Pro), T‑79/01 et T‑86/01, Rec. p. II‑4881, point 26].

30
Par ailleurs, la requérante a elle-même indiqué que la marque demandée crée chez le consommateur l’idée générale que, lorsqu’il achète les produits désignés par celle-ci, il en a « plus pour son argent ».

31
À cet égard, n’est pas pertinent l’argument de la requérante selon lequel le consommateur n’est pas informé du contenu ou de la nature des produits offerts sous cette marque, car il ne sait pas de quel « plus » il s’agit. En effet, il suffit, pour constater l’absence de caractère distinctif, de relever que le contenu sémantique du signe verbal en cause indique au consommateur une caractéristique du produit relative à sa valeur marchande qui, sans être précise, procède d’une information à caractère promotionnel ou publicitaire que le public pertinent percevra en premier lieu en tant que telle, plutôt que comme une indication de l’origine commerciale des produits (voir, en ce sens, arrêt REAL PEOPLE, REAL SOLUTIONS, précité, points 29 et 30). De plus, la seule absence d’information, dans le signe verbal Mehr für Ihr Geld, sur la nature des produits visés ne saurait être suffisante pour conférer un caractère distinctif à ce signe (voir, en ce sens, arrêt BEST BUY, précité, point 30).

32
En outre, la marque demandée Mehr für Ihr Geld ne possède pas d’éléments qui pourraient, au-delà de sa signification promotionnelle évidente, permettre au public pertinent de la mémoriser facilement et immédiatement en tant que marque distinctive pour les produits désignés. Même dans l’hypothèse où la marque demandée serait utilisée seule, sans autre signe ou marque, le public pertinent ne pourrait, sans en avoir été averti préalablement, le percevoir autrement que dans son sens promotionnel (arrêt REAL PEOPLE, REAL SOLUTIONS, précité, point 28).

33
S’agissant de l’argument tiré par la requérante de l’arrêt DAS PRINZIP DER BEQUEMLICHKEIT, précité, selon lequel une marque telle que la marque demandée devrait être considérée comme distinctive, il suffit d’indiquer que, selon la jurisprudence postérieure à cet arrêt, les marques visées par l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 sont non seulement celles qui sont communément utilisées, dans le commerce, pour la présentation des produits ou des services concernés, mais aussi celles qui sont seulement susceptibles de l’être (voir, en ce sens, arrêt Kit Pro et Kit Super Pro, précité, point 19, et la jurisprudence citée). Or, en constatant en substance que, « avec ses mots brefs et prégnants, combinés de manière très simple », la marque demandée indique aux consommateurs que les produits visés présentent un avantage en termes de quantité et/ou de qualité, la chambre de recours a, au point 31 de la décision attaquée, démontré à suffisance de droit que cette marque est susceptible d’être communément utilisée dans le commerce, pour la présentation des produits concernés.

34
Dans ces circonstances, il y a lieu de constater que la marque demandée sera perçue en premier lieu par le public pertinent comme un slogan promotionnel, en raison de son sens, plutôt que comme une marque, et qu’elle est donc dépourvue de caractère distinctif.

35
Quant à l’enregistrement du slogan « Partner with the best » en Allemagne, invoqué par la requérante, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence bien établie, d’une part, le régime communautaire des marques est autonome et, d’autre part, la légalité des décisions des chambres de recours s’apprécie uniquement sur la base du règlement n° 40/94 et non sur la base d’une pratique décisionnelle antérieure de l’OHMI [arrêts du Tribunal du 16 février 2000, Procter & Gamble/OHMI (Forme d’un savon), T‑122/99, Rec. p. II‑265, points 60 et 61 ; du 5 décembre 2000, Messe München/OHMI (electronica), T‑32/00, Rec. p. II‑3829, points 46 et 47 ; du 27 février 2002, Streamserve/OHMI (STREAMSERVE), T‑106/00, Rec. p. II‑723, point 66, et arrêt REAL PEOPLE, REAL SOLUTIONS, précité, point 31]. Dès lors, l’OHMI n’est lié ni par les enregistrements nationaux ni par ses décisions antérieures.

36
Par conséquent, il y a lieu de rejeter le second moyen de la requérante.

37
Ainsi qu’il ressort de l’article 7, paragraphe 1, du règlement n° 40/94, il suffit qu’un des motifs absolus de refus énumérés s’applique pour que le signe ne puisse être enregistré comme marque communautaire [arrêt de la Cour du 19 septembre 2002, DKV/OHMI, C‑104/00 P, Rec. p. I‑7561, point 29 ; arrêts du Tribunal du 31 janvier 2001, Mitsubishi HiTec Paper Bielefeld/OHMI (Giroform), T‑331/99, Rec. p. II‑433, point 30, et du 27 novembre 2003, Quick/OHMI (Quick), T‑348/02, non encore publié au Recueil, point 37]. Dans ces conditions, il n’y a pas lieu d’examiner le moyen tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94.

38
Par conséquent, il y a lieu de rejeter le recours.


Sur les dépens

39
Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens exposés par l’OHMI, conformément aux conclusions de ce dernier.


Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête :

1)
Le recours est rejeté.

2)
La requérante est condamnée aux dépens.

Legal

Tiili

Vilaras

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 30 juin 2004.

Le greffier

Le président

H. Jung

H. Legal


1
Langue de procédure: l'allemand.