Language of document : ECLI:EU:T:2024:402

ARRÊT DU TRIBUNAL (neuvième chambre)

19 juin 2024 (*)

« Fonction publique – Fonctionnaires – Harcèlement moral – Demande d’assistance – Rejet de la demande – Procédure disciplinaire – Sanction disciplinaire – Révocation – Retrait de la révocation – Nouvelle procédure disciplinaire – Nouvelle révocation – Absences injustifiées – Conflit d’intérêts – Impartialité – Responsabilité – Préjudices matériel et moral »

Dans l’affaire T‑89/20,

PV, représenté par Me D. Birkenmaier, avocat,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. T. Bohr et L. Vernier, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre),

composé de M. L. Truchot, président, Mme R. Frendo et M. M. Sampol Pucurull (rapporteur), juges,

greffier : M. V. Di Bucci,

vu l’ordonnance du 22 septembre 2020, PV/Commission (T‑89/20 AJ),

vu l’arrêt du 23 mars 2023, PV/Commission (C‑640/20 P, EU:C:2023:232),

vu la phase écrite de la procédure, notamment :

–        la requête déposée au greffe du Tribunal le 21 décembre 2020,

–        la décision du 17 janvier 2022 de suspendre la procédure,

–        les observations des parties sur les conséquences à tirer de l’arrêt du 23 mars 2023, PV/Commission (C‑640/20 P, EU:C:2023:232) pour la présente affaire,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 270 TFUE, le requérant, PV, demande, d’une part, l’annulation, premièrement, de la décision du 12 décembre 2019 par laquelle l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN ») a rejeté sa demande d’assistance D/456/19, deuxièmement, de la décision de révocation du 21 octobre 2019 (ci-après la « seconde décision de révocation »), troisièmement, de onze décisions relatives à ses absences injustifiées et de la décision de rejet de la réclamation R/519/19 et, quatrièmement, de la lettre du 21 septembre 2016 relative au décompte de sa dette résultant de ses absences irrégulières et de la décision de rejet de la réclamation R/537/19 ainsi que, d’autre part, la réparation des préjudices qu’il aurait subis du fait de ces décisions.

I.      Antécédents du litige

2        Le 16 juillet 2007, le requérant est devenu fonctionnaire de la Commission européenne après y avoir été engagé en tant qu’agent contractuel le 16 février 2007.

3        Le requérant a, d’abord, été affecté à la direction générale (DG) « Emploi, affaires sociales et inclusion » de la Commission jusqu’au 30 septembre 2009, puis à la DG « Budget » du 1er octobre 2009 au 31 mars 2013 et, enfin, à la DG « Interprétation », au sein de l’unité « Gestion budgétaire et financière », à partir du 1er avril 2013.

A.      Sur les faits ayant conduit à la première décision de révocation et ses suites

4        Le 12 novembre 2013, la cheffe de l’unité « Gestion budgétaire et financière » de la DG « Interprétation » a déposé une plainte disciplinaire à l’encontre du requérant pour des problèmes comportementaux, la non-application des procédures en vigueur et un manque de performance.

5        À partir du 8 mai 2014 jusqu’au 31 juillet 2016 inclus, alléguant être en incapacité de travail en raison de faits de harcèlement moral, le requérant ne s’est plus présenté au travail et a envoyé des certificats médicaux délivrés par son médecin traitant.

6        Les 27 juin et 10 octobre 2014, les médecins-conseils de la Commission ont émis, conformément à l’article 59, paragraphe 1, troisième alinéa, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut »), des avis médicaux indiquant que le requérant était apte à reprendre le travail.

7        À la suite de ces absences, le requérant a été convoqué, conformément à l’article 59, paragraphe 1, troisième alinéa, du statut, à des visites médicales de contrôle, auxquelles il ne s’est pas présenté.

8        Ces absences ont alors été considérées comme étant irrégulières par la Commission et cette dernière a émis plusieurs décisions de retenues sur salaire.

9        Le 10 juillet 2015, l’AIPN a ouvert, sans enquête administrative préalable, la procédure disciplinaire CMS 13/087 à l’encontre du requérant pour insubordination répétée dans l’exercice de ses fonctions, pour son comportement inapproprié au cours de l’année 2013 et pour 89 jours d’absences injustifiées en 2014 (ci-après la « procédure disciplinaire CMS 13/087 »).

10      Par décision du 11 juillet 2016, l’Office « Gestion et liquidation des droits individuels » (PMO) de la Commission a décidé de suspendre le paiement du salaire du requérant à partir du 1er juillet 2016, conformément à l’article 59, paragraphe 3, du statut.

11      Par décision de l’AIPN du 26 juillet 2016, à la suite des conclusions de la procédure disciplinaire CMS 13/087, le requérant a été révoqué de ses fonctions avec effet au 1er août 2016 sans réduction de la pension d’ancienneté (ci-après la « première décision de révocation »).

12      Par la note du 31 juillet 2016, la directrice générale de la DG « Interprétation » a communiqué au requérant son intention de considérer comme étant irrégulières les absences de ce dernier pour la période allant du 2 juin au 31 juillet 2016 et d’opérer les déductions correspondantes sur son salaire, telles qu’elles sont prévues à l’article 60 du statut.

13      Le 15 septembre 2016, la directrice générale de la DG « Interprétation » a confirmé sa décision de considérer les absences irrégulières du requérant pour la période allant du 2 juin au 31 juillet 2016 comme étant injustifiées et d’opérer les déductions prévues au titre de l’article 60 du statut (ci-après la « décision du 15 septembre 2016 »).

14      Par lettre de préinformation du 21 septembre 2016, le PMO a informé le requérant qu’il était redevable d’une dette envers la Commission s’élevant à 42 704,74 euros, correspondant à ses absences irrégulières (ci-après la « lettre du 21 septembre 2016 »).

B.      Sur les faits ayant conduit à la seconde décision de révocation

15      Par un courrier du 20 avril 2017, à la suite de l’arrêt du 14 février 2017, Kerstens/Commission (T‑270/16 P, non publié, EU:T:2017:74), le requérant a demandé le réexamen de la première décision de révocation.

16      Le 24 juillet 2017, l’AIPN a retiré la première décision de révocation (ci-après la « décision de retrait ») et lui a fait part de sa réintégration à compter du 16 septembre 2017. Le 9 août 2017, le requérant a été informé par une lettre de la direction générale des ressources humaines qu’il serait réaffecté le 18 septembre 2017 au sein de l’unité « Systèmes informatiques et de conférence » de la DG « Interprétation ».

17      Le 20 août 2017, le requérant a fait part de son refus de rejoindre sa nouvelle affectation.

18      Par une note du 12 septembre 2017, le directeur du PMO a procédé à une compensation entre les montants dus au requérant pour la période pendant laquelle il avait été révoqué de ses fonctions et les dettes du requérant à l’égard de la Commission. Celle-ci s’est traduite par un versement d’une somme de 9 550 euros au profit du requérant.

19      Le 14 septembre 2017, le requérant a introduit la réclamation enregistrée sous la référence R/413/17 contre la décision de retrait. En particulier, il a contesté sa réintégration au sein de la DG « Interprétation », dans l’unité « Systèmes informatiques et de conférence » et non dans l’unité « Gestion budgétaire et financière » où il exerçait ses fonctions auparavant, « à la suite du harcèlement subi et pour cause d’un autre engagement de travail depuis juillet 2017, pour échapper au chômage provoqué par la Commission ». Cette réclamation a été rejetée par une décision de l’AIPN du 15 janvier 2018.

20      Le 20 septembre 2017, le requérant a été avisé par courriel que ses absences, depuis le 18 septembre 2017, étaient considérées comme étant irrégulières.

21      Le 6 octobre 2017, l’AIPN a chargé l’Office d’investigation et de discipline de la Commission (IDOC) de mener une enquête administrative sur le comportement du requérant, portant sur des allégations de comportements inappropriés, d’insubordination, sur des absences irrégulières à partir de 2013 ainsi que sur les absences irrégulières constatées à partir du 18 septembre 2017, date de sa réaffectation, enregistrée sous la référence CMS 17/025.

22      Le 9 octobre 2017, l’IDOC a informé le requérant de l’ouverture de l’enquête administrative.

23      Par lettre du 13 octobre 2017, la directrice générale de la DG « Interprétation » a informé le requérant qu’il était en absence irrégulière depuis le 18 septembre 2017, que les dix jours de congés auxquels il avait droit avaient été utilisés pour couvrir ces absences pour la période allant du 18 au 29 septembre 2017 et que son salaire serait suspendu à partir du 1er octobre 2017, et ce tant que cette situation d’absence irrégulière perdurerait.

24      Le 29 janvier 2018, le requérant a été convoqué pour une audition par l’IDOC à laquelle il ne s’est pas présenté en motivant les raisons de cette absence dans un courrier du 29 janvier 2018.

25      Le 13 février 2018, le requérant a communiqué ses commentaires sur les faits retenus avant la finalisation du rapport d’enquête, à la suite de l’invitation de l’IDOC en ce sens en date du 7 février 2018.

26      Le 5 mars 2018, l’IDOC a transmis le rapport d’enquête administrative à l’AIPN, à propos duquel le requérant a communiqué ses observations écrites le 9 avril 2018, l’intéressé ne s’étant pas présenté à une audition qui devait se tenir le 10 avril 2018 et qui avait été organisée conformément à l’article 3 de l’annexe IX du statut.

27      Le 18 juillet 2018, l’AIPN a décidé d’ouvrir la procédure disciplinaire CMS 17/025 (ci-après la « procédure disciplinaire CMS 17/025 »), prévue par l’article 12 de l’annexe IX du statut.

28      Le 17 octobre 2018, le requérant a été convoqué à une audition initialement fixée au 26 novembre 2018 devant le conseil de discipline, qui fut repoussée, à la demande du requérant, au 18 décembre 2018, puis au 21 janvier et, enfin, au 26 mars 2019. Le requérant ne s’est rendu à aucune de ces auditions et n’a pas formulé d’observations.

29      Le 28 mai 2019, le conseil de discipline a rendu son avis motivé.

30      Le 12 août 2019, le requérant a introduit une demande d’assistance au titre de l’article 24 du statut, enregistrée sous la référence D/456/19, pour des faits de harcèlement moral entre juillet 2013 et mai 2014 de la part de sa cheffe d’unité à la DG « Interprétation » et de l’adjointe de cette dernière. Le 12 décembre 2019, cette demande a été rejetée par l’AIPN.

31      Dans le cadre de cette demande d’assistance, l’audition du requérant au titre de l’article 22 de l’annexe IX du statut, à laquelle il ne s’est pas présenté, était fixée au 10 juillet 2019, puis a été repoussée, à sa demande, au 24 juillet, puis au 3 septembre 2019.

32      Le 21 octobre 2019, par la seconde décision de révocation, l’AIPN a révoqué le requérant de ses fonctions sans réduction pro tempore de ses droits à pension d’ancienneté en application de l’article 9, paragraphe 1, sous h), de l’annexe IX du statut, à la suite des conclusions de la procédure disciplinaire CMS 17/025. Cette révocation est entrée en vigueur le 1er novembre 2019.

C.      Sur l’arrêt du 30 janvier 2020, PV/Commission (T786/16 et T224/18), et ses suites

33      Par arrêt du 30 janvier 2020, PV/Commission (T‑786/16 et T‑224/18, non publié, EU:T:2020:17), le Tribunal a rejeté les deux recours introduits au titre de l’article 270 TFUE par le requérant tendant, pour le premier, à l’annulation de plusieurs décisions administratives prises à son égard entre 2014 et 2018 et, pour le second, à l’annulation du rejet de ses demandes d’assistance au titre de l’article 24 du statut et de l’ensemble des décisions prises à son égard entre 2017 et 2018. Il demandait également la réparation des préjudices moral et matériel prétendument subis du fait de ces décisions dans les deux affaires.

34      Par ordonnance du 4 février 2022, PV/Commission (T‑786/16 REV, non publiée, EU:T:2022:52), le Tribunal a rejeté la demande en révision de l’arrêt du 30 janvier 2020, PV/Commission (T‑786/16 et T‑224/18, non publié, EU:T:2020:17), introduite par le requérant au titre de l’article 44 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et de l’article 169 du règlement de procédure du Tribunal.

35      Par arrêt du 23 mars 2023, PV/Commission (C‑640/20 P, EU:C:2023:232), la Cour a rejeté le pourvoi formé par le requérant contre l’arrêt du 30 janvier 2020, PV/Commission (T‑786/16 et T‑224/18, non publié, EU:T:2020:17).

D.      Sur les faits résultant de la seconde décision de révocation

36      Le 23 septembre 2019, le requérant a déposé une réclamation enregistrée sous la référence R/519/19 contre onze décisions de retenues sur salaire adoptées entre mai 2015 et juillet 2016 (ci-après « la réclamation R/519/19 »), en arguant de la présence d’une fausse signature sur la décision du 15 septembre 2016. Le 22 janvier 2020, l’AIPN a rejeté cette réclamation.

37      Le 30 septembre 2019, le requérant a déposé une réclamation enregistrée sous la référence R/537/19 (ci-après la « réclamation R/537/19 ») concernant le refus, d’une part, de lui transmettre trois lettres de dettes pour un montant de 21 593,64 euros et, d’autre part, de justifier des prélèvements de cotisations au régime des pensions des institutions de l’Union européenne (RPIUE) et au régime d’assurance maladie commun aux institutions des Communautés européennes (RCAM). Le 29 janvier 2020, l’AIPN a rejeté cette réclamation.

38      Le 25 novembre 2019, le requérant a déposé une réclamation enregistrée sous la référence R/630/19 (ci-après la « réclamation R/630/19 ») contre la seconde décision de révocation. Le 25 mars 2020, l’AIPN a rejeté cette réclamation.

39      Le 12 février 2020, le requérant a introduit une réclamation enregistrée sous la référence R/71/20 (ci-après la « réclamation R/71/20 ») contre la décision de rejet de sa demande d’assistance D/456/19 au titre de l’article 24 du statut pour des faits de harcèlement moral ayant eu lieu entre juillet 2013 et mai 2014. Le 20 mai 2020, l’AIPN a rejeté cette réclamation.

II.    Conclusions des parties

40      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la seconde décision de révocation et la décision de rejet de la réclamation R/630/19 ;

–        annuler la décision du 12 décembre 2019 par laquelle l’AIPN a rejeté sa demande d’assistance D/456/19 et la décision de rejet de la réclamation R/71/20 ;

–        annuler onze décisions, dont la décision du 15 septembre 2016, relatives à ses absences injustifiées et la décision de rejet de la réclamation R/519/19 ;

–        annuler la lettre du 21 septembre 2016 et la décision de rejet de la réclamation R/537/19 ;

–        ordonner la réparation de son préjudice moral, évalué à la somme de 146 000 euros, et de son préjudice matériel, évalué à la somme de 359 481,29 euros ;

–        condamner la Commission aux dépens.

41      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        déclarer le recours non fondé ;

–        condamner le requérant aux dépens.

III. En droit

A.      Sur la recevabilité du document complémentaire

42      Par acte déposé le 30 juillet 2021, le requérant a produit un document , au titre de l’article 84, paragraphe 2, du règlement de procédure (ci-après le « document complémentaire »), après le second échange de mémoires, afin de communiquer au Tribunal un rapport d’expertise graphologique portant sur l’authenticité de la signature de la directrice générale de la DG « Interprétation » apposée sur la décision du 15 septembre 2016 et a soulevé de nouveaux arguments au soutien du dixième moyen.

43      La Commission oppose une fin de non-recevoir à l’encontre du document complémentaire. Elle considère, d’une part, qu’il ne s’agit pas d’un moyen nouveau au sens de l’article 84 du règlement de procédure, mais d’une nouvelle offre de preuve au sens de l’article 85 de ce règlement et, d’autre part, qu’elle doit être considérée comme étant irrecevable en raison de sa tardiveté.

44      Le requérant soutient que le document complémentaire est recevable dans la mesure où il constitue un élément de fait susceptible d’exercer une influence décisive sur le présent litige et qu’il ne lui a été remis que le 21 juillet 2021.

45      À titre préalable, il y a lieu de constater que le document complémentaire contient, d’une part, une nouvelle offre de preuve prenant la forme d’un rapport d’expertise graphologique produit en annexe et de son analyse et, d’autre part, des arguments au soutien du dixième moyen portant sur la fraude et l’application du principe fraus omnia corrumpit ainsi que sur de nouvelles conclusions indemnitaires. Il convient donc d’en étudier la recevabilité séparément.

1.      Sur la recevabilité des nouveaux arguments et des nouvelles conclusions indemnitaires

46      Il convient de rappeler que, aux termes de l’article 76, sous d) et e), du règlement de procédure, la partie requérante a l’obligation de définir l’objet du litige et de présenter ses conclusions dans l’acte introductif d’instance.

47      Aux termes de l’article 84, paragraphe 1, du règlement de procédure, la production de moyens nouveaux en cours d’instance est interdite à moins que ces moyens ne se fondent sur des éléments de droit et de fait qui se sont révélés pendant la procédure. À cet égard, un évènement doit être considéré comme étant un élément permettant la production d’un moyen nouveau, dès lors que celui-ci est de nature à modifier la situation de droit existant lors du dépôt de la requête. Ne constitue pas, en revanche, un élément nouveau de nature à justifier la présentation d’un nouveau moyen un évènement qui ne fait que confirmer une situation de droit que le requérant connaissait au moment où il a introduit son recours (voir, en ce sens, arrêt du 16 septembre 2020, BP/FRA, C‑669/19 P, non publié, EU:C:2020:713, points 15 et 16 et jurisprudence citée).

48      De plus, si l’article 84, paragraphe 2, du règlement de procédure permet, dans certaines circonstances, la production de moyens nouveaux en cours d’instance, cette disposition ne peut, en aucun cas, être interprétée comme autorisant la partie requérante à saisir le Tribunal de conclusions nouvelles et à modifier ainsi l’objet du litige (voir, en ce sens, arrêts du 7 novembre 2019, Rose Vision/Commission, C‑346/18 P, non publié, EU:C:2019:939, point 43, et du 13 juillet 2018, PS/BEI, T‑612/16, non publié, EU:T:2018:483, point 38).

49      Étant donné que, d’une part, ainsi qu’il ressort des observations écrites du 22 août 2019 adressées par le requérant aux membres de l’AIPN tripartite dans le cadre de la procédure disciplinaire CMS 17/025, l’existence d’une prétendue fausse signature dans la décision du 15 septembre 2016 était déjà connue du requérant lors du dépôt de la requête, il convient de constater que ses arguments, présentés pour la première fois après le deuxième échange de mémoires, sont tardifs et donc irrecevables.

50      D’autre part, les nouvelles conclusions indemnitaires ont été introduites après le deuxième échange de mémoires et non au stade de la requête. Il y a lieu de les rejeter comme étant irrecevables.

51      Il en résulte que les nouveaux arguments et les nouvelles conclusions indemnitaires présentés dans le document complémentaire sont irrecevables.

2.      Sur la recevabilité de la nouvelle offre de preuve

52      Il convient de rappeler que l’article 85, paragraphe 1, du règlement de procédure précise que les preuves et offres de preuve sont présentées dans le cadre du premier échange de mémoires. Le paragraphe 3 de cet article ajoute que les parties principales peuvent, à titre exceptionnel, encore produire des preuves ou faire des offres de preuve avant la clôture de la phase orale de la procédure ou avant la décision du Tribunal de statuer sans phase orale de la procédure, à condition que le retard dans la présentation de celles-ci soit justifié. Dans ce dernier cas, conformément au paragraphe 4 dudit article, le Tribunal statue sur la recevabilité des preuves produites ou des offres de preuve qui ont été faites après que les autres parties ont été mises en mesure de prendre position sur celles-ci.

53      Si, conformément à la règle de forclusion prévue à l’article 85, paragraphe 1, du règlement de procédure, les parties doivent motiver le retard apporté à la présentation de leurs preuves ou offres de preuve nouvelles, le juge de l’Union européenne a le pouvoir de contrôler le bien-fondé du motif du retard apporté à la production de ces preuves ou de ces offres de preuve et, selon le cas, le contenu de ces dernières, ainsi que, si cette production tardive n’est pas justifiée à suffisance de droit ou fondée, le pouvoir de les écarter. La présentation tardive, par une partie, de preuves ou d’offres de preuve peut, notamment, être justifiée par le fait que cette partie ne pouvait pas disposer antérieurement des preuves en question ou si les productions tardives de la partie adverse justifient que le dossier soit complété, de façon à ce que soit assuré le respect du principe du contradictoire (voir arrêt du 16 septembre 2020, BP/FRA, C‑669/19 P, non publié, EU:C:2020:713, point 41 et jurisprudence citée).

54      En l’espèce, le requérant justifie la production tardive du rapport d’expertise graphologique par l’absence de décision de la justice pénale belge à la suite d’un dépôt de plainte de sa part qui l’a conduit à demander la réalisation de cette expertise le 15 avril 2021.

55      Or, il ressort des pièces du dossier que, premièrement, le requérant était en possession des éléments nécessaires pour diligenter cette expertise avant le 15 avril 2021 et, deuxièmement, que celle-ci a été réalisée sur sa seule initiative. Le requérant pouvait donc faire établir ce rapport d’expertise avant l’introduction de la requête au soutien de l’argumentation développée dans le cadre du dixième moyen.

56      Cette nouvelle offre de preuve aurait pu être disponible au stade de l’introduction de la requête, puisque sa production dépendait exclusivement de la décision du requérant lui-même de diligenter une telle expertise et, à tout le moins, à celui du second échange de mémoires, dans la mesure où le bien-fondé du dixième moyen avait été contesté par la Commission dans le mémoire en défense.

57      Dès lors, la présentation de la nouvelle offre de preuve est tardive.

58      Partant, l’ensemble du document complémentaire est irrecevable.

B.      Sur l’objet du recours

59      En premier lieu, par ses premier, deuxième, troisième et quatrième chefs de conclusions, le requérant demande au Tribunal l’annulation de la seconde décision de révocation, de la décision du 12 décembre 2019 par laquelle l’AIPN a rejeté sa demande d’assistance D/456/19, de onze décisions dont la décision du 15 septembre 2016, et de la lettre du 21 septembre 2016 (ci-après les « décisions attaquées ») ainsi que des décisions de rejet des réclamations R/630/19, R/71/20, R/519/19 et R/537/19 présentées à leur égard.

60      Selon une jurisprudence constante, des conclusions en annulation formellement dirigées contre la décision de rejet d’une réclamation ont pour effet de saisir le Tribunal de l’acte contre lequel la réclamation a été présentée lorsqu’elles sont, en tant que telles, dépourvues de contenu autonome (voir arrêt du 13 juillet 2018, Curto/Parlement, T‑275/17, EU:T:2018:479, point 63 et jurisprudence citée). En effet, la décision qui rejette une réclamation, qu’elle soit implicite ou explicite, ne fait, si elle est pure et simple, que confirmer l’acte ou l’abstention dont le réclamant se plaint et ne constitue pas, prise isolément, un acte attaquable (voir arrêt du 12 septembre 2019, XI/Commission, T‑528/18, non publié, EU:T:2019:594, point 20 et jurisprudence citée).

61      En revanche, compte tenu du caractère évolutif de la procédure précontentieuse, la motivation incluse dans la décision de rejet de la réclamation devra être prise en considération pour l’examen de la légalité de la décision faisant grief (voir, en ce sens, arrêts du 9 décembre 2009, Commission/Birkhoff, T‑377/08 P, EU:T:2009:485, points 55 à 59).

62      En l’espèce, sous réserve des considérations énoncées aux points 64 à 119 ci-après, étant donné que les décisions de rejet des réclamations ne font que confirmer les décisions attaquées, en précisant au besoin les motifs venant au soutien de celles-ci, il convient de constater que les conclusions en annulation formulées à l’encontre des décisions de rejet des réclamations sont dépourvues de contenu autonome et qu’il n’y a donc pas lieu de statuer spécifiquement sur celles-ci. Toutefois, dans l’examen de la légalité des décisions attaquées, il est nécessaire de prendre en considération la motivation figurant dans les décisions de rejet des réclamations, cette motivation étant censée coïncider avec celle des décisions attaquées.

63      En second lieu, par son cinquième chef de conclusions, le requérant demande l’indemnisation par la Commission des préjudices prétendument subis en raison des décisions attaquées.

C.      Sur les conclusions en annulation

1.      Sur la recevabilité des troisième et quatrième chefs de conclusions

64      La Commission soulève deux fins de non-recevoir tirées, la première, du caractère confirmatif des décisions de rejet des réclamations R/519/19 et R/537/19 et, la seconde, du caractère prématuré de la réclamation R/537/19 ayant pour objet le calcul des droits à pension d’ancienneté du requérant.

a)      Sur la première fin de non-recevoir, tirée du caractère confirmatif de la décision de rejet de la réclamation R/519/19

65      La Commission conteste la recevabilité du troisième chef de conclusions. Elle rappelle que la décision du 15 septembre 2016 a déjà fait l’objet d’une réclamation, qui a été rejetée le 17 janvier 2017, et qu’elle est, de ce fait, devenue définitive. De plus, elle réfute l’existence d’un faux et l’argument selon lequel le principe fraus omnia corrumpit permet de contourner la tardiveté du recours en l’absence d’intention frauduleuse avérée.

66      Le requérant estime que le troisième chef de conclusions est recevable. Il considère avoir satisfait à l’ensemble des conditions posées à l’article 91, paragraphes 1 à 3, du statut et, en tout état de cause, que le principe fraus omnia corrumpit écarte tout délai de forclusion.

67      Selon une jurisprudence constante, la recevabilité d’un recours introduit devant le Tribunal, au titre de l’article 270 TFUE et de l’article 91 du statut, est subordonnée au déroulement régulier de la procédure précontentieuse et au respect des délais qu’elle prévoit (voir arrêt du 24 avril 2017, HF/Parlement, T‑584/16, EU:T:2017:282, point 64 et jurisprudence citée).

68      À cet égard, il convient, en particulier, de rappeler que les délais de réclamation et de recours, visés aux articles 90 et 91 du statut, sont d’ordre public et ne sauraient être laissés ni à la disposition des parties ni à celle du juge auquel il appartient de vérifier, même d’office, s’ils sont respectés. Ces délais répondent à l’exigence de sécurité juridique et à la nécessité d’éviter toute discrimination ou tout traitement arbitraire dans l’administration de la justice (voir arrêt du 3 mars 2021, Barata/Parlement, T‑723/18, EU:T:2021:113, point 29 et jurisprudence citée).

69      En premier lieu, un recours contre une décision confirmative est irrecevable seulement si la décision confirmée est devenue définitive à l’égard de l’intéressé, faute d’avoir fait l’objet d’un recours contentieux introduit dans les délais requis. Dans le cas contraire, la personne intéressée est en droit d’attaquer soit la décision confirmée, soit la décision confirmative, soit l’une et l’autre de ces décisions (voir, en ce sens, arrêts du 18 décembre 2007, Weißenfels/Parlement, C‑135/06 P, EU:C:2007:812, point 54 ; du 31 mai 2017, DEI/Commission, C‑228/16 P, EU:C:2017:409, point 35, et du 10 mars 2021, AM/BEI, T‑134/19, EU:T:2021:119, point 28).

70      Un acte est considéré comme étant purement confirmatif d’un acte antérieur s’il ne contient aucun élément nouveau par rapport à un acte antérieur et n’a pas été précédé d’un réexamen de la situation du destinataire de cet acte antérieur [voir, en ce sens, ordonnance du 6 octobre 2015, GEA Group/OHMI (engineering for a better world), T‑545/14, EU:T:2015:789, point 16 et jurisprudence citée, et arrêt du 25 juin 2020, ZS/BEI, T‑659/18, non publié, EU:T:2020:281, point 31 et jurisprudence citée].

71      Toutefois, il convient de préciser, à cet égard, que, selon une jurisprudence constante, si l’acte attaqué constitue la réponse à une demande dans laquelle des faits nouveaux et substantiels sont invoqués et par laquelle l’administration est priée de procéder à un réexamen de la décision antérieure devenue définitive, cet acte ne saurait être considéré comme revêtant un caractère purement confirmatif, dans la mesure où il statue sur ces faits et contient, ainsi, un élément nouveau par rapport à la décision antérieure. En effet, l’existence de faits nouveaux et substantiels peut justifier la présentation d’une demande tendant au réexamen d’une décision antérieure devenue définitive (voir, en ce sens, ordonnances du 6 octobre 2015, engineering for a better world, T‑545/14, EU:T:2015:789, point 17 et jurisprudence citée, et du 11 juin 2020, Vanhoudt e.a./BEI, T‑294/19, non publiée, EU:T:2020:264, point 32 et jurisprudence citée).

72      Ne constitue pas un fait nouveau substantiel, au sens de la jurisprudence, un fait qui ne modifie pas de façon substantielle la situation du requérant telle qu’elle se présentait lors de l’adoption de la décision antérieure devenue définitive (voir arrêt du 15 novembre 2018, Estonie/Commission, C‑334/17 P, non publié, EU:C:2018:914, point 47 et jurisprudence citée). À l’inverse, tel est le cas notamment d’un élément suscitant des doutes quant au bien-fondé de la solution adoptée par ledit acte (voir arrêt du 13 novembre 2014, Espagne/Commission, T‑481/11, EU:T:2014:945, point 39 et jurisprudence citée).

73      En l’espèce, il y a lieu de constater que les onze décisions de retenues sur salaire des 9 février, 30 mars, 5 mai, 24 juin, 1er octobre et 12 novembre 2015, 15 janvier, 22 avril, 31 mai, 5 juillet et 15 septembre 2016 ont toutes fait l’objet de réclamations qui ont systématiquement été rejetées. La première réclamation, enregistrée sous la référence R/225/15, a été rejetée par une décision du 3 mars 2015 et la dernière réclamation, enregistrée sous la référence R/556/16 et portant notamment sur la décision du 15 septembre 2016, l’a été par une décision du 17 janvier 2017.

74      Ainsi, l’ensemble de ces décisions de retenues sur salaire sont devenues définitives à la suite de l’expiration des délais de recours ouverts à leur égard.

75      Par ailleurs, les onze décisions de retenues sur salaire ont fait l’objet d’une demande en annulation qui a été rejetée par l’arrêt du 30 janvier 2020, PV/Commission (T‑786/16 et T‑224/18, non publié, EU:T:2020:17). Ce rejet a été confirmé par la Cour dans l’arrêt du 23 mars 2023, PV/Commission (C‑640/20 P, EU:C:2023:232).

76      Il convient donc d’examiner si l’existence de faits nouveaux et substantiels justifiait la présentation de la demande de réexamen du requérant.

77      Dans sa réclamation R/519/19, le requérant allègue que, à la suite d’une plainte pour faux en écritures publiques, un magistrat instructeur a décidé, le 1er décembre 2017, de l’audition de la directrice générale de la DG « Interprétation », conformément à la loi belge, en tant que suspect de faux en écritures publiques. Cet évènement constituerait un fait nouveau et substantiel au sens de la jurisprudence rappelée aux points 71 et 72 ci-dessus.

78      Cependant, il y a lieu de constater que l’évènement dont se prévaut le requérant n’est qu’une étape procédurale dans le cadre d’une instruction pénale, à la suite d’un dépôt de plainte dont il est lui-même à l’origine.

79      Cet élément ne constitue pas un commencement de preuve de l’existence d’une fausse signature sur la décision du 15 septembre 2016 et, a fortiori, encore moins une décision définitive d’une juridiction belge quant à la nature et au bien-fondé des accusations formulées par le requérant. En effet, la mention de ce régime d’audition ne fait que préciser que le suspect est majeur, non privé de liberté et interrogé au sujet d’une infraction punissable d’une peine privative de liberté.

80      Le requérant n’a donc pas établi l’existence d’un fait qui modifierait de façon substantielle sa situation telle qu’elle se présentait lors de l’adoption des décisions devenues définitives.

81      Ainsi, cet évènement ne constitue pas un fait nouveau et substantiel au sens de la jurisprudence rappelée au point 72 ci-dessus.

82      Partant, aucun fait nouveau et substantiel ne justifiait le réexamen des onze décisions mentionnées au point 77 ci-dessus.

83      Dès lors, le recours contre les onze décisions mentionnées au point 73 ci-dessus doit être déclaré irrecevable conformément à la jurisprudence mentionnée au point 71 ci-dessus.

84      En second lieu, le requérant fait valoir que le délai de forclusion prévu par l’article 270 TFUE ne lui est pas opposable sur la base du principe fraus omnia corrumpit. Il soutient que la décision du 15 septembre 2016 constitue un faux en écritures qui porte gravement atteinte à l’ordre juridique de l’Union en raison d’une fausse signature.

85      À cet égard, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, les actes des institutions de l’Union jouissent, en principe, d’une présomption de légalité et, partant, produisent des effets juridiques, même s’ils sont entachés d’irrégularités, aussi longtemps qu’ils n’ont pas été annulés ou retirés (voir arrêt du 5 octobre 2009, de Brito Sequeira Carvalho et Commission/Commission et de Brito Sequeira Carvalho, T‑40/07 P et T‑62/07 P, EU:T:2009:382, point 150 et jurisprudence citée).

86      Toutefois, par exception à ce principe, les actes entachés d’une irrégularité dont la gravité est si évidente qu’elle ne peut être tolérée par l’ordre juridique de l’Union doivent être réputés n’avoir produit aucun effet juridique, même provisoire, c’est‑à‑dire être considérés comme étant juridiquement inexistants. Cette exception vise à préserver un équilibre entre deux exigences fondamentales, mais parfois antagonistes, auxquelles doit satisfaire un ordre juridique, à savoir la stabilité des relations juridiques et le respect de la légalité (arrêts du 24 novembre 2021, CX/Commission, T‑743/16 RENV II, non publié, EU:T:2021:824, point 248, et du 5 octobre 2009, de Brito Sequeira Carvalho et Commission/Commission et de Brito Sequeira Carvalho, T‑40/07 P et T‑62/07 P, EU:T:2009:382, point 151).

87      Néanmoins, la gravité des conséquences qui se rattachent à la constatation de l’inexistence d’un acte des institutions de l’Union postule que, pour des raisons de sécurité juridique, cette constatation soit réservée à des hypothèses tout à fait extrêmes (voir arrêt du 5 octobre 2004, Commission/Grèce, C‑475/01, EU:C:2004:585, point 20 et jurisprudence citée).

88      En l’espèce, il convient d’apprécier si l’irrégularité dénoncée par le requérant apparaît d’une gravité à ce point évidente que l’acte en cause doit être considéré comme étant juridiquement inexistant. Il appartenait au requérant de démontrer comment la prétendue fausse signature avait entaché l’acte d’une irrégularité dont la gravité était si évidente qu’elle ne pouvait être tolérée par l’ordre juridique de l’Union.

89      À cet égard, il y a lieu de constater que le requérant s’est borné à alléguer l’existence d’une fraude en raison de l’usage par la Commission d’un faux en écriture publique.

90      Dans ce contexte, il y a lieu de rappeler que le principe général d’interdiction de la fraude et de l’abus de droit constitue un principe général du droit de l’Union (arrêts du 5 juillet 2007, Kofoed, C‑321/05, EU:C:2007:408, points 38 à 48 ; du 22 novembre 2017, Cussens e.a., C‑251/16, EU:C:2017:881, points 27, 28 et 30, et du 19 décembre 2019, HK/Commission, C‑460/18 P, EU:C:2019:1119, point 88).

91      La constatation d’une fraude repose sur un faisceau concordant d’indices établissant la réunion d’un élément objectif et d’un élément subjectif (arrêt du 6 février 2018, Altun e.a., C‑359/16, EU:C:2018:63, point 50). L’élément objectif consiste en l’acte ou les actes matériels de fraude. Il renvoie au fait que les conditions requises aux fins de l’obtention de l’avantage prévu par le droit de l’Union ne sont pas remplies. L’élément subjectif correspond à l’intention des intéressés de commettre une fraude, c’est-à-dire de contourner ou d’éluder les conditions prévues par la réglementation applicable en vue d’obtenir l’avantage en question. L’obtention frauduleuse peut ainsi découler d’une action volontaire, telle qu’une présentation erronée des faits ne correspondant pas à la réalité, ou d’une omission volontaire, telle que la dissimulation d’une information pertinente dans l’intention d’éluder les conditions d’application de la réglementation en cause (voir, en ce sens, arrêt du 6 février 2018, Altun e.a., C‑359/16, EU:C:2018:63, points 51 à 53).

92      Or, il y a lieu de constater que, s’agissant de la décision du 15 septembre 2016, aucun indice ne permet de constater l’existence d’un acte frauduleux en la forme d’une fausse signature, ni d’une intention frauduleuse consistant au moins en la connaissance de l’utilisation d’un document falsifié. D’ailleurs, interrogé par le Tribunal à ce sujet, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure adoptées au titre de l’article 89 du règlement de procédure, le requérant a reconnu qu’il n’existait aucune décision définitive d’une juridiction belge quant au bien-fondé de son allégation.

93      Il en résulte que le requérant ne démontre pas que la décision du 15 septembre 2016 serait viciée par une quelconque irrégularité. Partant, conformément à la jurisprudence citée au point 91 ci-dessus, il y a lieu de conclure que ni l’existence de la fausse signature ni la volonté de commettre un acte illicite ne sont établies à suffisance de droit. En effet, les illégalités alléguées ne constituent pas des irrégularités dont la gravité est si évidente qu’elle ne peut être tolérée par l’ordre juridique de l’Union justifiant que ces actes soient déclarés inexistants au sens de la jurisprudence citée au point 86 ci-dessus.

94      Partant, le troisième chef de conclusions doit être déclaré irrecevable.

b)      Sur la seconde fin de non-recevoir, tirée du caractère partiellement confirmatif et partiellement prématuré de la réclamation R/537/19

95      La Commission conclut à l’irrecevabilité du quatrième chef de conclusions au motif que la réclamation R/537/19 a le même objet qu’une réclamation antérieure et qu’elle est en partie prématurée.

96      D’une part, la Commission constate que la lettre du 21 septembre 2016 a fait l’objet d’une réclamation enregistrée sous la référence R/556/16, introduite par le requérant le 8 novembre 2016 et qui a été rejetée par une décision de l’AIPN du 17 janvier 2017. Par ailleurs, elle rappelle que le requérant a formé un recours tendant à l’annulation, notamment, de la décision de rejet de la réclamation R/556/16, qui a été rejeté par l’arrêt du 30 janvier 2020, PV/Commission (T‑786/16 et T‑224/18, non publié, EU:T:2020:17).

97      D’autre part, la Commission soutient que la réclamation R/537/19, en ce qu’elle porte sur les droits à pension d’ancienneté du requérant, était prématurée, dans la mesure où aucune décision n’avait été prise à ce sujet à la date de la décision de rejet de cette réclamation.

98      Le requérant conclut à la recevabilité de son quatrième chef de conclusions. Selon lui, l’ensemble des conditions posées à l’article 91, paragraphes 1 à 3, du statut ont été respectées. De plus, les services du PMO auraient commis un dol et une fraude qui écarteraient tout délai de forclusion. À cet égard, le dol et la fraude seraient caractérisés par, premièrement, l’absence de transmission de pièces justificatives pour le prélèvement de 21 593,64 euros, deuxièmement, l’absence d’explications sur le montant de sa dette de 58 837,20 euros, pour la période allant de novembre 2014 à juillet 2016, troisièmement, le défaut d’éclaircissement sur la double déduction des cotisations au RPIUE et au RCAM entre mars 2015 et juillet 2016, quatrièmement, le manque de précision quant à la méthode de calcul de la dette résiduelle établie le 21 septembre 2016, cinquièmement, le calcul du solde de sa dette et, sixièmement, l’absence d’explications de la dernière lettre de dette portant sur un montant de 8 397,89 euros.

99      Il y a lieu de constater que l’objet de la réclamation R/537/19 est double. Elle porte, d’une part, sur la lettre du 21 septembre 2016 et, d’autre part, sur le calcul des droits à pension d’ancienneté du requérant par le PMO.

100    Il convient d’examiner la recevabilité du quatrième chef de conclusions à l’égard de chacun de ces deux éléments.

1)      Sur le caractère confirmatif de la décision de rejet de la réclamation R/537/19 en ce qu’elle a pour objet la lettre du 21 septembre 2016

101    Il convient de rappeler qu’un acte faisant grief ne peut faire l’objet que d’une seule réclamation, introduite à son égard par le fonctionnaire concerné. Lorsque deux réclamations ont le même objet, seule l’une d’entre elles, à savoir celle ayant été introduite en premier, constitue la réclamation au sens de l’article 90 du statut, tandis que l’autre, introduite ultérieurement, doit être considérée comme étant une simple note réitérative de la réclamation et ne peut avoir pour effet de prolonger la procédure précontentieuse (voir, en ce sens, arrêt du 11 décembre 2007, Sack/Commission, T‑66/05, EU:T:2007:370, points 37 et 41).

102    Il y a lieu de constater que la lettre du 21 septembre 2016 a préalablement été contestée par la réclamation R/556/16, du 8 novembre 2016, le requérant estimant n’être redevable d’aucune dette envers la Commission. Cette dernière a été rejetée par une décision de l’AIPN du 17 janvier 2017.

103    Ainsi, la réclamation R/556/16 avait pour objet le montant de la dette résiduelle du requérant à l’égard de la Commission en raison de ses absences irrégulières entre juin 2014 et juillet 2016.

104    Il y a lieu également de constater que, par sa réclamation R/537/19, du 30 septembre 2019, portant sur la lettre du 21 septembre 2016, le requérant conteste à nouveau le montant de sa dette résiduelle.

105    À cette fin, il soutient n’avoir jamais reçu les pièces justificatives afférentes au prélèvement de 21 593,64 euros correspondant aux trois lettres de dettes pour des montants de 7 150,75 euros, de 6 045 euros et de 8 397,89 euros qui sont inclus dans le montant global de sa dette pour une somme totale de 58 837,20 euros, dont 16 132,46 euros ont fait l’objet d’une compensation financière par l’intermédiaire du salaire, la différence entre ces deux montants constituant la dette résiduelle de 42 704,74 euros inscrite dans la lettre du 21 septembre 2016.

106    Il s’ensuit que la prétendue réclamation R/537/19 avait le même objet que la réclamation R/556/16.

107    Partant, il y a lieu de considérer, d’une part, que la réclamation R/537/19 n’est qu’une simple note réitérative de la réclamation R/556/16 et non une réclamation au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut et, d’autre part, que la décision de rejet de cette prétendue réclamation R/537/19 est seulement confirmative.

108    Or, conformément à la jurisprudence rappelée au point 69 ci-dessus, le recours dirigé contre une telle décision confirmative doit être déclaré irrecevable.

109    Toutefois, ainsi qu’il a été rappelé aux points 71 et 72 ci-dessus, l’existence d’un fait nouveau et substantiel peut justifier la présentation d’une demande tendant au réexamen d’une décision devenue définitive après l’expiration des délais de recours.

110    À cet égard, le requérant ne rapporte pas la preuve de l’existence d’un fait nouveau et substantiel permettant de justifier la présentation d’une nouvelle réclamation tendant au réexamen de la décision de rejet de la réclamation R/556/16 devenue définitive.

111    S’agissant de l’argument du requérant selon lequel l’existence d’un dol et d’une fraude de l’administration constituerait un motif pour écarter tout délai de forclusion, conformément à la jurisprudence rappelée aux points 85 à 87 ainsi qu’aux points 90 et 91 ci-dessus, il convient de constater que le requérant n’a pas prouvé à suffisance de droit que les illégalités alléguées présentaient un caractère d’évidence et de gravité telles qu’elles justifieraient que ces actes soient déclarés inexistants.

112    Au vu des considérations qui précèdent, le quatrième chef de conclusions en ce qu’il tend à obtenir l’annulation de la décision de rejet de la réclamation R/537/19 et de la lettre du 21 septembre 2016 doit être rejeté comme étant irrecevable.

2)      Sur le caractère prématuré de la réclamation R/537/19 en ce qu’elle a pour objet le calcul des droits à pension d’ancienneté du requérant

113    Selon une jurisprudence constante, tout recours contre un acte faisant grief qui émane de l’AIPN doit, en règle générale, impérativement être précédé d’une réclamation précontentieuse ayant fait l’objet d’une décision explicite ou implicite de rejet. Un recours introduit avant que cette procédure précontentieuse ne soit terminée est, en raison de son caractère prématuré, irrecevable en vertu de l’article 91, paragraphe 2, du statut (voir ordonnance du 31 mars 2020, ZU/SEAE, T‑499/19, non publiée, EU:T:2020:134, point 38 et jurisprudence citée).

114    En l’espèce, à l’occasion de sa réclamation R/537/19, le requérant conteste le calcul de ses droits à pension d’ancienneté.

115    À cet égard, il y a lieu de constater que la décision de rejet de la réclamation R/537/19 précise que, « en ce qui concerne la partie de la réclamation se référant aux droits à pension [d’ancienneté du requérant] auprès du [RPIUE], aucune décision n’a encore été prise et donc la présente réclamation est également irrecevable à ce sujet, en l’absence d’un acte lui faisant grief ».

116    En effet, il ressort des pièces du dossier que le requérant n’a formulé une demande de pension d’ancienneté anticipée, en vertu de l’article 9, premier alinéa, sous b), de l’annexe VIII du statut, que le 24 mars 2020. En réponse, il a été informé, dans une note datée du 20 juillet 2020, que la période travaillée auprès des institutions de l’Union lui ouvrant la possibilité d’acquérir des droits à pension d’ancienneté correspondait à 9 ans, 3 mois et 22 jours. Cette durée étant inférieure aux dix années de service minimal requises par l’article 77 du statut, il ne pouvait bénéficier d’une pension d’ancienneté à partir du 1er novembre 2019 et sa demande a été rejetée.

117    Il en découle qu’aucune décision relative au montant de sa pension d’ancienneté, fondée sur ses droits acquis au titre de l’article 90, paragraphe 1, du statut n’avait été adoptée à la date d’introduction de la réclamation R/537/19, à savoir le 30 septembre 2019.

118    Dès lors, les conclusions aux fins d’annulation dirigées contre la décision de rejet de la réclamation R/537/19 en ce qu’elle a pour objet le calcul des droits à pension d’ancienneté du requérant sont prématurées et doivent donc être déclarées irrecevables au sens de la jurisprudence rappelée au point 113 ci-dessus.

119    Il résulte de tout ce qui précède que le quatrième chef de conclusions doit être déclaré irrecevable.

2.      Sur le fond

120    Au soutien de son recours, le requérant invoque dix moyens, tirés :

–        le premier, de la violation des articles 1er, 3, 4, de l’article 31, paragraphe 1, et de l’article 41, paragraphe 2, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte ») ainsi que des articles 1er sexies et 12 bis du statut ;

–        le deuxième, de la violation de l’article 50 de la Charte, de l’article 9, paragraphe 3, de l’annexe IX du statut et du principe ne bis in idem ;

–        le troisième, de la violation du principe de l’exception d’inexécution et du principe de légalité ;

–        le quatrième, de la violation de l’article 48, paragraphe 1, de la Charte, de l’article 3, paragraphe 2, de la décision C(2019) 4231 final de la Commission, du 12 juin 2019, portant fixation des dispositions générales d’exécution concernant la conduite des enquêtes administratives et des procédures disciplinaires (ci-après les « DGE de 2019 »), ainsi que de la violation du principe de présomption d’innocence et des droits de la défense ;

–        le cinquième, de l’absence d’établissement des faits dans le cadre de la procédure disciplinaire résultant de la saisie pénale du dossier disciplinaire ;

–        le sixième, de la violation de l’article 15 de la Charte ;

–        le septième, de la violation de l’article 41, paragraphe 1, de la Charte, du principe d’impartialité et du principe d’égalité des armes ;

–        le huitième, de la violation de l’article 41, paragraphe 1, de la Charte en raison d’un dépassement du délai raisonnable de la procédure disciplinaire ;

–        le neuvième, de la violation du principe fraus omnia corrumpit, de l’article 41, paragraphe 1, de la Charte, et du principe de bonne administration au motif de l’utilisation d’une fausse signature dans la décision du 15 septembre 2016 ;

–        le dixième, d’une violation du principe fraus omina corrumpit, du principe de légalité et du principe de sécurité juridique.

121    Au stade de la réplique, le requérant soulève également un moyen tiré de la violation du principe de non-rétroactivité des décisions administratives et du principe de sécurité juridique.

122    Étant donné que l’argumentation soutenant le dixième moyen tend exclusivement à l’annulation de la décision de rejet de la réclamation R/537/19, il n’y a pas lieu de l’examiner, dans la mesure où les conclusions dirigées à l’encontre de cette décision ont été déclarées irrecevables, ainsi que cela ressort des points 101 à 119 ci-dessus.

123    Le Tribunal estime opportun d’examiner, dans un premier temps, les deuxième, quatrième, septième et huitième moyens, portant sur la légalité de la procédure disciplinaire CMS 17/025, puis, dans un deuxième temps, le moyen tiré de la violation du principe de non-rétroactivité des décisions administratives et du principe de sécurité juridique ainsi que les premier, neuvième et cinquième moyens concernant les faits disciplinaires reprochés au requérant et, dans un troisième temps, les sixième et troisième moyens, ayant trait à la réintégration du requérant à la suite du retrait de la première décision de révocation.

a)      Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 50 de la Charte, de l’article 9, paragraphe 3, de l’annexe IX du statut et du principe ne bis in idem

124    Le requérant fait valoir que l’AIPN, en adoptant une nouvelle décision de révocation à l’issue de la procédure disciplinaire CMS 17/025, a violé l’article 50 de la Charte, l’article 9, paragraphe 3, de l’annexe IX du statut et le principe de ne bis in idem.

125    Le requérant estime qu’il a fait l’objet de deux sanctions de révocation fondées sur les mêmes motifs. Dans la mesure où la première procédure disciplinaire CMS 13/087 a été menée à son terme, l’existence même de la première sanction ne pourrait pas disparaître et toute nouvelle procédure disciplinaire pour les mêmes faits constituerait une violation du principe ne bis in idem. Selon lui, l’AIPN a violé ce dernier en ouvrant la nouvelle procédure disciplinaire CMS 17/025 à son égard en l’absence de faits nouveaux au sens de l’article 28 de l’annexe IX du statut. Il considère également que les conséquences financières de la première décision de révocation persistent malgré la décision de retrait. De plus, le requérant estime que les deux procédures disciplinaires dont il a fait l’objet sont illégales, car elles sont fondées sur des éléments généraux pouvant recouvrir un nombre indéterminé et incontrôlable de faits.

126    La Commission conteste les arguments du requérant.

127    Il convient de rappeler que, d’une part, le principe ne bis in idem consacré à l’article 50 de la Charte dispose que « [n]ul ne peut être poursuivi ou puni pénalement en raison d’une infraction pour laquelle il a déjà été acquitté ou condamné dans l’Union par un jugement pénal définitif conformément à la loi ». Ce principe interdit un cumul tant de poursuites que de sanctions présentant une nature pénale au sens de cet article pour les mêmes faits et contre une même personne (voir, en ce sens, arrêt du 26 février 2013, Åkerberg Fransson, C‑617/10, EU:C:2013:105, point 34).

128    Ce principe figure également à l’article 9, paragraphe 3, de l’annexe IX du statut, relative à la procédure disciplinaire, qui prévoit qu’une même faute ne peut donner lieu qu’à une seule sanction disciplinaire.

129    Ainsi, l’application du principe ne bis in idem est soumise à une double condition, à savoir, d’une part, qu’il y ait une décision antérieure définitive (condition « bis ») et, d’autre part, que les mêmes faits soient visés par la décision antérieure et par les poursuites ou les décisions postérieures (condition « idem ») (arrêt du 22 mars 2022, bpost, C‑117/20, EU:C:2022:202, point 28).

130    Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le retrait d’un acte produit des effets équivalents à ceux qu’aurait emportés, en principe, l’annulation de cet acte, à savoir que, contrairement à l’abrogation, il produit un effet ex tunc et ne laisse donc pas subsister les effets passés dudit acte (voir arrêt du 12 septembre 2019, Manéa/CdT, T‑225/18, non publié, EU:T:2019:595, point 79 et jurisprudence citée).

131    En l’espèce, il y a lieu de constater que, par la décision du 24 juillet 2017, l’AIPN a retiré la première décision de révocation, ce qui a eu comme conséquence, d’une part, la réintégration du requérant au sein de la DG « Interprétation » à partir du 16 septembre 2017 et, d’autre part, l’octroi rétroactif de ses rémunérations et de ses jours de congé annuels correspondant à la période allant du 1er août 2016 au 15 septembre 2017.

132    À cet effet, l’AIPN a effectué une compensation entre les dettes du requérant envers la Commission et les montants dus par la Commission au requérant pour la période allant du 1er août 2016 au 15 septembre 2017, ayant eu comme résultat le versement d’une somme de 9 550 euros à son profit.

133    Il y a lieu également de constater que, à la suite du retrait de la première décision de révocation par la décision 24 juillet 2017, le requérant a été rétabli dans ses droits grâce à, d’une part, sa réintégration en tant que fonctionnaire et, d’autre part, la compensation financière des conséquences de sa révocation par la Commission (voir points 131 à 132 ci-dessus).

134    Ainsi, la sanction de révocation résultant de la procédure disciplinaire CMS 13/087 a disparu de l’ordre juridique.

135    Or, le principe ne bis in idem interdit uniquement une nouvelle appréciation au fond de la matérialité de l’infraction, qui aurait pour conséquence l’imposition soit d’une seconde sanction, s’ajoutant à la première, dans l’hypothèse où la responsabilité serait une nouvelle fois retenue, soit d’une première sanction, dans l’hypothèse où la responsabilité, écartée par la première décision, serait retenue par la seconde (arrêt du 15 octobre 2002, Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission, C‑238/99 P, C‑244/99 P, C‑245/99 P, C‑247/99 P, C‑250/99 P à C‑252/99 P et C‑254/99 P, EU:C:2002:582, point 61).

136    L’application de ce principe suppose donc qu’il a été statué sur la matérialité de l’infraction ou que la légalité de l’appréciation portée sur celle-ci a été contrôlée dans une décision antérieure définitive qui demeure dans l’ordre juridique.

137    De plus, le principe ne bis in idem ne s’oppose pas en soi à une reprise des poursuites ayant pour objet le même comportement lorsqu’une première décision a été annulée pour des motifs de forme, sans qu’il ait été statué au fond sur les faits reprochés, la décision d’annulation ne valant pas alors « acquittement » au sens donné à ce terme dans les matières répressives (voir ordonnance du 22 janvier 2019, Kerstens/Commission, C‑577/18 P, non publiée, EU:C:2019:129, point 39 et jurisprudence citée).

138    Dès lors, dans la mesure où la première décision de révocation a été retirée pour un motif de pure forme, à savoir l’absence de procédure d’enquête administrative préalable, la décision de retrait ne vaut pas acquittement du requérant.

139    Il en résulte que, dans le cadre d’une nouvelle procédure, comme en l’espèce, la seconde décision de révocation ne s’est pas ajoutée à la première.

140    En outre, comme le reconnaît le requérant, la condition d’identité des faits n’est pas remplie en l’espèce. En effet, la seconde décision de révocation est fondée sur des comportements inappropriés, des faits d’insubordination concernant la période 2013-2014 ainsi que des absences irrégulières comprises entre le 30 juin 2014 et le 31 juillet 2016 ainsi qu’après le 18 septembre 2017, tandis que la décision initiale de révocation portait sur des comportements inappropriés et des absences injustifiées en 2014 et en 2015.

141    Par ailleurs, le requérant se prévaut également d’un argument tiré de la violation de l’article 28 de l’annexe IX du statut qui ne saurait prospérer, car, s’il confère la faculté à l’AIPN de rouvrir une procédure disciplinaire en cas de faits nouveaux étayés par des preuves pertinentes, il ne limite aucunement le pouvoir disciplinaire de l’AIPN en matière d’ouverture d’une nouvelle procédure disciplinaire (arrêt du 19 juin 2013, Goetz/Comité des régions, F‑89/11, EU:F:2013:83, point 185). Cette disposition organise une procédure de révision dans le cas de la découverte d’un élément nouveau susceptible de modifier de manière substantielle l’appréciation de la réalité, de la portée ou encore de la gravité des faits reprochés (voir arrêt du 10 juin 2016, HI/Commission, F‑133/15, EU:F:2016:127, point 149 et jurisprudence citée). Il n’est donc pas applicable en l’espèce.

142    De surcroît, l’argument tiré du caractère général, indéterminé et incontrôlable des faits reprochés au requérant dans le cadre des deux procédures disciplinaires ne saurait prospérer. Il ressort du rapport de l’IDOC et de l’avis du conseil de discipline que la nature des griefs et l’objet de l’instruction disciplinaire reposent sur des faits clairement identifiés et qui peuvent être distingués les uns des autres.

143    Le deuxième moyen doit être écarté.

b)      Sur le quatrième moyen, tiré de la violation de l’article 48, paragraphe 1, de la Charte, de l’article 3, paragraphe 2, des DGE de 2019 ainsi que de la violation du principe de présomption d’innocence et des droits de la défense

144    Au soutien de son quatrième moyen, le requérant invoque, en substance, deux branches, tirées respectivement, la première, de la violation du principe de présomption d’innocence et, la seconde, du non-respect des droits de la défense au cours de la procédure disciplinaire ayant abouti à la seconde décision de révocation.

1)      Sur la première branche du quatrième moyen, tirée de la violation du principe de présomption d’innocence

145    Par la première branche du quatrième moyen, le requérant fait valoir que, dans la conduite de la procédure disciplinaire CMS 17/025, l’IDOC et l’AIPN ont méconnu le principe de présomption d’innocence inscrit à l’article 48, paragraphe 1, de la Charte, et à l’article 3, paragraphe 2, des DGE de 2019. En effet, d’une part, l’IDOC aurait mené l’enquête administrative exclusivement à charge sans tenir compte des objections du requérant, ce qui ressortirait de l’absence de reprise des arguments en défense de ce dernier dans son rapport. D’autre part, l’AIPN, dans son rapport au conseil de discipline, se serait prononcée sur la culpabilité du requérant avant que le conseil de discipline n’ait pu formuler son avis et que la décision définitive ne soit adoptée.

146    La Commission conteste les arguments du requérant.

i)      Observations liminaires

147    En premier lieu, il convient de rappeler que le principe de présomption d’innocence, garanti par l’article 48, paragraphe 1, de la Charte, constitue un droit fondamental dont le juge de l’Union doit assurer le respect par les institutions. Selon ces dispositions, le respect de la présomption d’innocence exige que toute personne accusée d’une infraction soit présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement établie (voir arrêt du 8 mai 2019, PT/BEI, T‑571/16, non publié, EU:T:2019:301, point 200 et jurisprudence citée).

148    La présomption d’innocence est applicable aux procédures administratives diligentées contre un fonctionnaire accusé d’un manquement aux obligations statutaires eu égard à la nature des manquements en cause ainsi qu’à la nature et au degré de sévérité des mesures qui s’y rattachent (voir, en ce sens, arrêt du 4 avril 2019, Rodriguez Prieto/Commission, T‑61/18, EU:T:2019:217, point 92).

149    En matière disciplinaire, ce principe requiert des instances impliquées que, durant l’ensemble de la procédure disciplinaire, elles restent mesurées dans leurs propos (arrêt du 19 juin 2013, Goetz/Comité des régions, F‑89/11, EU:F:2013:83, point 185).

150    En outre, il ressort de la jurisprudence qu’une violation de la présomption d’innocence ne peut être constatée qu’en présence d’éléments de nature à démontrer que l’administration avait décidé, dès le début d’une procédure disciplinaire, d’infliger, en tout état de cause, une sanction à la personne concernée (voir arrêt du 9 juin 2021, DI/BCE, T‑514/19, EU:T:2021:332, point 127 et jurisprudence citée).

151    En second lieu, il convient de rappeler le cadre juridique régissant les procédures disciplinaires.

152    Conformément à l’article 1er, à l’article 2, paragraphe 2, et à l’article 3 de l’annexe IX du statut, toute procédure disciplinaire est précédée d’une enquête administrative. Il ressort de l’article 2 des DGE de 2019 que l’IDOC est l’organe de la Commission chargé d’effectuer, à la demande de l’AIPN, les enquêtes administratives, lesquelles visent à établir les faits et, le cas échéant, à déterminer l’existence d’un manquement aux obligations auxquelles les fonctionnaires de la Commission sont soumis.

153    Conformément à l’article 3 de l’annexe IX du statut, l’AIPN décide, sur la base du rapport d’enquête de l’IDOC et après avoir entendu l’intéressé, des suites à donner à l’enquête administrative. Il ressort des articles 3, 11 et 22 de l’annexe IX du statut, lus ensemble avec l’article 9 de cette annexe, que, si l’IDOC estime dans son rapport d’enquête que l’intéressé a manqué à ses obligations statutaires, l’AIPN peut décider soit qu’il y a lieu d’ouvrir une procédure disciplinaire sans consultation du conseil de discipline, auquel cas les seules sanctions que l’AIPN peut prononcer sont des sanctions légères n’affectant pas les droits pécuniaires de l’intéressé, soit qu’il y a lieu d’ouvrir une procédure disciplinaire avec saisine du conseil de discipline, lequel peut proposer n’importe quelle sanction prévue à l’article 9 de l’annexe IX du statut, soit même qu’il convient de n’adopter aucune sanction disciplinaire.

154    De plus, en vertu de l’article 2, paragraphe 3, et de l’article 30 de l’annexe IX du statut, l’AIPN de chaque institution arrête les dispositions générales d’exécution, conformément à l’article 110 du statut. Il y a lieu de constater que la Commission a adopté à ce titre les DGE de 2019, en remplacement d’une version précédente.

155    À cet égard, il découle de l’article 47, paragraphes 1 et 2, des DGE de 2019 que ces dernières prennent effet au jour de leur adoption, à savoir le 12 juin 2019, et qu’elles s’appliquent aux enquêtes et aux procédures disciplinaires en cours au moment de leur adoption. Le même article, paragraphe 3, prévoit que les actes accomplis au titre de la décision C(2004) 1588 de la Commission, du 28 avril 2004, portant fixation des dispositions générales d’exécution concernant la conduite des enquêtes administratives et des procédures disciplinaires (ci-après les « DGE de 2004 »), dans le cadre des enquêtes administratives, des procédures prédisciplinaires, des procédures disciplinaires et des procédures de suspension en cours à la date d’adoption de la présente décision, restent valides pour l’application des DGE de 2019.

156    Il en résulte que les DGE de 2004 sont applicables à l’enquête administrative et à tous les actes accomplis dans le cadre de la procédure disciplinaire jusqu’à l’entrée en vigueur des DGE de 2019. En l’espèce, les DGE de 2004 s’appliquent notamment au rapport de l’AIPN au conseil de discipline et à l’avis de ce dernier.

157    C’est à la lumière des éléments rappelés ci-dessus qu’il convient d’apprécier les arguments du requérant tirés de la violation du principe de présomption d’innocence par l’IDOC et l’AIPN. Il y a lieu d’examiner successivement les différents griefs qui leur sont reprochés.

ii)    Sur le premier grief de la première branche, tiré de la réalisation d’une enquête à charge

158    Par son premier grief, le requérant fait valoir que l’IDOC a violé le principe de présomption d’innocence en réalisant une enquête exclusivement à charge, ce qui se déduit de l’absence de reprise dans le rapport d’enquête administrative de ses remarques des 13 février et 9 avril 2018.

159    Conformément à l’article 47 des DGE de 2019, l’article 3, paragraphe 2, des DGE de 2004, qui était applicable à la procédure d’enquête administrative ouverte à l’encontre du requérant, prévoit que ces enquêtes soient menées de manière approfondie, à charge et à décharge.

160    De plus, selon l’article 4, paragraphe 4, des DGE de 2004, « [e]n tout état de cause, des conclusions se rapportant nommément à un fonctionnaire ne peuvent être tirées à l’issue de l’enquête sans que ce dernier ait été en mesure d’exprimer son avis au sujet de l’ensemble des faits le concernant ». Le même article, paragraphe 5, exige que le rapport de l’IDOC expose les faits et circonstances en cause, établisse si les règles et les procédures applicables à la situation ont été respectées et détermine les éventuelles responsabilités individuelles en tenant compte des circonstances aggravantes ou atténuantes.

161    En l’espèce, il y a lieu de constater que les remarques du requérant, transmises par un courrier du 13 février 2018, relatives aux faits mis en lumière à la suite de l’enquête administrative ont bien été mentionnées dans le rapport de l’IDOC de manière synthétique. Cette reformulation ne saurait remettre en cause le constat selon lequel elles ont été prises en compte par l’IDOC dans le cadre de son enquête administrative. À l’inverse, la réponse du requérant du 9 avril 2018 étant postérieure au rapport de l’IDOC, daté du 5 mars 2018, elle ne pouvait y être mentionnée.

162    Par ailleurs, s’agissant de l’argument tiré du caractère identique des pièces à charge figurant dans les dossiers des deux procédures disciplinaires, alors que celles à décharge présentées par le requérant dans le cadre de la première procédure disciplinaire CMS 13/087 n’ont pas bénéficié du même traitement, il suffit de relever que le requérant a eu l’occasion de présenter ses remarques sur les pièces à charge retenues par l’IDOC et de transmettre de nouveaux éléments à décharge à cette occasion (voir point 161 ci-dessus). Pour autant que, par cet argument, le requérant entend faire valoir une violation des droits de la défense, il convient de renvoyer à l’examen de la seconde branche du quatrième moyen qui porte sur cette question.

163    Enfin, il suffit de relever que l’argument du requérant selon lequel l’enquête administrative aurait été menée exclusivement à charge manque en fait. En effet, à l’appui de ses allégations relatives au harcèlement moral prétendument subi, le requérant se fonde sur deux témoignages à décharge qui ont été recueillis dans le cadre de ladite enquête. De plus, il a eu la possibilité de soumettre d’autres éléments à décharge dans le cadre de la procédure disciplinaire.

164    En tout état de cause, le fait que la procédure disciplinaire CMS 17/025 porte en grande partie sur les mêmes faits que la procédure disciplinaire CMS 13/087 est sans incidence sur le respect de la présomption d’innocence, dans la mesure où la décision précédente statuant sur la nature des faits incriminés et la sanction retenue a été retirée par la décision du 24 juillet 2017 (voir points 127 à 143 ci-dessus). Le grief doit donc être écarté.

iii) Sur le second grief de la première branche, tiré de l’opinion exprimée par l’AIPN sur la culpabilité du requérant dans son rapport au conseil de discipline

165    Par son second grief, le requérant fait valoir que l’AIPN a violé le principe de présomption d’innocence en proposant, dans son rapport au conseil de discipline, que la culpabilité du requérant soit retenue.

166    Premièrement, selon l’article 12 de l’annexe IX du statut, le rapport de l’AIPN au conseil de discipline indique « clairement les faits reprochés et, s’il y a lieu, les circonstances dans lesquelles ils ont été commis, y compris toutes les circonstances aggravantes ou atténuantes ».

167    Le rapport de l’AIPN au conseil de discipline, adopté à la suite de l’audition du fonctionnaire concerné, ne vise qu’à établir les faits, au regard notamment des résultats de l’audition, et à les mettre en corrélation avec les obligations ou dispositions statutaires qu’il est reproché à ce fonctionnaire d’avoir méconnues [voir, en ce sens, arrêt du 13 octobre 2021, IB/EUIPO, T‑22/20, EU:T:2021:689, point 103 (non publié) et jurisprudence citée].

168    Ainsi, ce rapport ne constitue qu’un acte préparatoire dans le cadre d’une procédure comportant plusieurs étapes et non la décision finale adoptée à l’issue de la procédure disciplinaire.

169    Deuxièmement, s’agissant de la conclusion du rapport de l’AIPN au conseil de discipline, celle-ci indique ce qui suit :

« Le comportement global [du requérant], décrit dans le présent rapport et documenté par l’enquête, révèle une ignorance coupable des devoirs que lui impose son statut de fonctionnaire au regard plus particulièrement des articles 11, 12 et 21, mais également des articles 55 et 59 du statut.

L’AIPN relève que le comportement [du requérant] s’inscrit dans la durée et que la gravité des manquements constatés est de nature à rompre de manière irréparable le lien de confiance qui doit exister à tout moment entre l’institution et les membres de son personnel. »

170    Or, conformément aux dispositions rappelées au point 153 ci-dessus, l’AIPN est tenue, en cas de manquement aux obligations de la part du fonctionnaire concerné, de décider des suites à donner à l’enquête administrative.

171    À cette fin, compte tenu des dispositions des articles 3 et 11 de l’annexe IX du statut, dès lors que l’AIPN ouvre une procédure disciplinaire en envisageant qu’elle puisse conduire à infliger une sanction plus sévère que l’avertissement par écrit ou le blâme, elle doit saisir le conseil de discipline.

172    Dans le cas d’une procédure disciplinaire devant le conseil de discipline, la faute reprochée au fonctionnaire en cause est définie dans le rapport de l’AIPN accompagnant la saisine dudit conseil, qui est postérieure à cette phase d’enquête (voir, en ce sens, arrêt du 15 décembre 2021, HG/Commission, T‑693/16 P RENV‑RX, EU:T:2021:895, points 163 et 170).

173    Dès lors, la conclusion rappelée au point 169 ci-dessus, sur la base d’un rappel des faits tels qu’ils ont été établis, vient qualifier les manquements aux obligations reprochés au requérant afin de justifier la saisine du conseil de discipline. Néanmoins, cette conclusion ne constitue pas une appréciation définitive par l’AIPN des manquements reprochés au requérant, ni une décision quant à la sanction adoptée à son égard.

174    Troisièmement, s’agissant du résumé du rapport de l’AIPN au conseil de discipline, il y a lieu de constater qu’il n’est pas identique à sa conclusion, mentionnée au point 169 ci-dessus, bien qu’il en reprenne la substance.

175    En particulier, dans le résumé du rapport au conseil de discipline, « [l’]AIPN considère qu’en adoptant un comportement systématiquement négatif et inapproprié [le requérant] a rompu de manière irréparable le lien de confiance qui doit exister entre un fonctionnaire et son institution ».

176    Ainsi, bien que l’AIPN tire les conséquences des manquements à ses obligations telles qu’elles sont reprochées au requérant sur la base de son interprétation des faits établis dans le cadre de la procédure d’enquête administrative, cette prise de position ne saurait être interprétée comme constituant une atteinte à la présomption d’innocence dans la mesure où il incombe à l’AIPN de qualifier les manquements aux obligations reprochées au requérant ainsi que cela ressort des éléments rappelés aux points 170 à 172 ci-dessus.

177    Par conséquent, le requérant ne fait état d’aucun élément de preuve de nature à démontrer que l’AIPN avait décidé, dès le début de la procédure disciplinaire, de lui infliger, en tout état de cause, une sanction.

178    Au surplus, ainsi qu’il ressort des articles 17 et 18 de l’annexe IX du statut, le conseil de discipline n’est pas lié par le rapport de l’AIPN. D’une part, s’il ne se juge pas suffisamment éclairé sur les faits reprochés ou sur les circonstances dans lesquelles ces faits ont été commis, il dispose du pouvoir d’ordonner une enquête contradictoire. D’autre part, à la lumière des pièces produites devant lui, des déclarations écrites ou verbales éventuelles et des résultats de son enquête, le conseil de discipline émet à la majorité un avis motivé quant à la réalité des faits incriminés et, le cas échéant, quant à la sanction que les faits reprochés devraient selon lui entraîner.

179    Partant, dans tous les cas, la prise de position de l’AIPN dans son rapport au conseil de discipline n’était pas en mesure de lier le conseil de discipline quant à son appréciation de la réalité des faits incriminés et de la sanction adéquate, contrairement à ce qu’affirme le requérant.

180    De même, il y a lieu de relever que, conformément à la décision C(2013) 3288 de la Commission, du 4 juin 2013, relative à l’exercice des pouvoirs dévolus par le statut à l’AIPN ainsi que par le RAA à l’autorité habilitée à conclure les contrats d’engagement, telle que modifiée par la décision C(2016) 1881 final de la Commission, du 4 avril 2016, la composition de l’AIPN qui transmet le rapport disciplinaire au conseil de discipline diffère de celle de l’AIPN tripartite qui se prononce à la suite de l’avis du conseil de discipline.

181    Dès lors, il y a lieu d’écarter le second grief et la première branche du quatrième moyen.

2)      Sur la seconde branche du quatrième moyen

182    Par la seconde branche du quatrième moyen, le requérant fait valoir que, en lui refusant l’accès au dossier disciplinaire de la procédure CMS 17/025 au format papier, l’AIPN a méconnu les droits de la défense.

183    La Commission conteste les arguments du requérant.

184    Selon une jurisprudence constante, les droits de la défense, qui comportent le droit d’être entendu et le droit d’accès au dossier, figurent au nombre des droits fondamentaux faisant partie intégrante de l’ordre juridique de l’Union et consacrés par la Charte. En outre, le respect de ces droits s’impose même lorsque la réglementation applicable ne prévoit pas expressément une telle formalité (voir arrêt du 23 septembre 2015, Cerafogli/BCE, T‑114/13 P, EU:T:2015:678, point 32 et jurisprudence citée).

185    Par ailleurs, suivant une jurisprudence constante, le respect des droits de la défense constitue un principe général du droit de l’Union qui trouve à s’appliquer dès lors que l’administration se propose de prendre à l’encontre d’une personne un acte qui lui fait grief (voir, en ce sens, arrêts du 9 novembre 2006, Commission/De Bry, C‑344/05 P, EU:C:2006:710, point 37 et jurisprudence citée, et du 17 octobre 2006, Bonnet/Cour de justice, T‑406/04, EU:T:2006:322, point 76 et jurisprudence citée).

186    En vertu de ce principe, le respect des droits de la défense, qui a pour corollaire le principe du contradictoire, exige que le fonctionnaire à l’égard duquel une institution de l’Union a entamé une procédure administrative ait été mis en mesure, au cours de cette procédure, de faire valoir utilement son point de vue sur la réalité et la pertinence des faits, des circonstances alléguées et des documents que cette institution entend utiliser contre lui à l’appui de son allégation de l’existence d’une infraction aux dispositions du statut (voir arrêt du 7 septembre 2022, WT/Commission, T‑91/20, non publié, EU:T:2022:510, point 67 et jurisprudence citée).

187    De plus, il résulte de l’article 2, paragraphe 2, de l’annexe IX du statut que, à l’issue d’une enquête administrative, l’AIPN est tenue d’informer le fonctionnaire concerné de la fin de l’enquête et de lui communiquer les conclusions du rapport d’enquête.

188    En outre, il découle de l’article 3 de l’annexe IX du statut que, lorsque, sur la base du rapport d’enquête, l’AIPN décide, en cas de manquement aux obligations auxquelles est tenu un fonctionnaire, de l’ouverture d’une procédure disciplinaire, avec ou sans conseil de discipline, elle ne peut le faire qu’« après avoir communiqué au fonctionnaire concerné toutes les pièces du dossier et après l’avoir entendu ».

189    De surcroît, en application de l’article 4, paragraphe 4, des DGE de 2004, le fonctionnaire doit être mis en mesure d’exprimer son avis au sujet de l’ensemble des faits le concernant, avant que des conclusions se rapportant à son comportement ne soient tirées.

190    Ces dispositions font obligation à l’AIPN, lorsqu’elle envisage d’ouvrir une procédure disciplinaire sur la base d’un rapport établi à l’issue d’une enquête administrative, de communiquer au préalable les conclusions du rapport d’enquête ainsi que toutes les pièces du dossier au fonctionnaire concerné afin que celui‑ci puisse, en disposant d’un délai raisonnable pour préparer sa défense, formuler toute observation utile.

191    Il résulte des considérations qui précèdent que l’examen du respect des droits de la défense du requérant implique de vérifier, d’une part, s’il a été préalablement et suffisamment informé des reproches retenus contre lui par l’AIPN et, d’autre part, s’il a pu s’exprimer à ce sujet et s’en défendre.

192    À cet égard, il y a lieu d’observer que, avant l’adoption de la seconde décision de révocation, le requérant s’est vu notifier plusieurs documents, notamment la décision d’ouvrir l’enquête administrative, le 9 octobre 2017, un courrier l’invitant à formuler ses observations et décrivant les faits tels que mis en lumière à la suite des actes d’enquête, le 7 février 2018, mais aussi le rapport final de l’enquête administrative du 5 mars 2018 par une lettre du 9 mars 2018 ainsi que le rapport disciplinaire et ses annexes du 18 juillet 2018.

193    En ce qui concerne le contenu de ces documents, il en résulte que les griefs disciplinaires retenus dans la seconde décision de révocation ainsi que les éléments factuels les sous-tendant ont été exposés de manière suffisamment claire, avant l’adoption de ladite décision, que ce soit dans le rapport d’enquête administrative ou dans le rapport disciplinaire.

194    Ainsi, force est de constater que, avant l’adoption de la seconde décision de révocation, le requérant a été préalablement et suffisamment informé des griefs susceptibles d’être retenus à son égard ainsi que des éléments factuels les sous-tendant.

195    De plus, l’avis motivé du conseil de discipline rappelle que, le 21 janvier 2019, une copie papier de son dossier disciplinaire a été transmise au requérant par les services de la Commission.

196    En outre, le requérant a été mis en mesure de s’exprimer et de se défendre des reproches retenus contre lui, notamment dans un courrier du 13 février 2018. Il a également formulé des observations sur le rapport final de l’enquête administrative de l’IDOC du 5 mars 2018 par courrier du 9 avril 2018 en réponse à sa convocation à l’audition prévue par l’article 3 de l’annexe IX du statut. De plus, il a exprimé son point de vue lors de ses échanges avec le conseil de discipline et enfin dans ses observations écrites du 22 août 2019 ainsi que dans son complément du 1er septembre 2019 adressés aux membres de l’AIPN tripartite.

197    Dans ces conditions, la seconde branche doit être écartée de même que le quatrième moyen dans son ensemble.

c)      Sur le septième moyen, tiré de la violation de l’article 41, paragraphe 1, de la Charte, des principes d’indépendance et d’impartialité ainsi que du principe d’égalité des armes

198    Au soutien de son septième moyen, le requérant invoque, en substance, deux branches, tirées respectivement, la première, d’une violation des principes d’indépendance et d’impartialité et, la seconde, d’une violation du principe d’égalité des armes.

1)      Sur la première branche du septième moyen, tirée d’une violation des principes d’indépendance et d’impartialité

199    Par la première branche du septième moyen, le requérant fait valoir que la seconde décision de révocation est entachée d’une violation des principes d’indépendance et d’impartialité en raison de la composition de l’AIPN tripartite. Il reproche à la directrice générale des ressources humaines et à la directrice générale de la DG « Interprétation », par un premier grief, leur participation aux deux AIPN tripartites en méconnaissance du principe d’impartialité objective et, par un second grief, leur manque d’impartialité subjective.

200    La Commission conteste les arguments du requérant.

i)      Considérations liminaires

201    L’article 41, paragraphe 1, de la Charte énonce notamment que toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement par les institutions, les organes et les organismes de l’Union. Il s’agit d’une composante du principe de bonne administration.

202    Ainsi, le droit de l’Union exige que les procédures administratives se déroulent dans le respect des garanties conférées par le principe de bonne administration, consacré par l’article 41 de la Charte, notamment l’obligation pour l’institution compétente d’examiner avec soin et impartialité tous les éléments pertinents du cas d’espèce (voir arrêt du 20 septembre 2019, UZ/Parlement, T‑47/18, EU:T:2019:650, point 38 et jurisprudence citée).

203    À cet égard, il convient de relever que l’exigence d’impartialité, qui s’impose aux institutions dans l’accomplissement de leurs missions, vise à garantir l’égalité de traitement qui est à la base de l’Union. Cette exigence vise, notamment, à éviter des situations de conflits d’intérêts éventuels en ce qui concerne les fonctionnaires ou les agents. Compte tenu de l’importance fondamentale de la garantie d’indépendance et d’intégrité en ce qui concerne tant le fonctionnement interne que l’image extérieure des institutions, l’exigence d’impartialité couvre toutes circonstances que le fonctionnaire ou l’agent amené à se prononcer sur une affaire doit raisonnablement comprendre comme étant de nature à apparaître, aux yeux des tiers, comme susceptible d’affecter son indépendance en la matière (voir, en ce sens, arrêt du 25 octobre 2007, Komninou e.a./Commission, C‑167/06 P, non publié, EU:C:2007:633, point 57).

204    Aussi, il incombe à ces institutions de se conformer à l’exigence d’impartialité, dans ses deux composantes que sont, d’une part, l’impartialité subjective, en vertu de laquelle aucun membre de l’institution concernée ne doit manifester de parti pris ou de préjugé personnel, et, d’autre part, l’impartialité objective, conformément à laquelle cette institution doit offrir des garanties suffisantes pour exclure tout doute légitime quant à un éventuel préjugé (voir, en ce sens, arrêt du 3 décembre 2019, Pethke/EUIPO, T‑808/17, EU:T:2019:832, point 46 et jurisprudence citée).

205    Selon la jurisprudence, afin de démontrer que l’organisation de la procédure administrative ou disciplinaire n’offre pas des garanties suffisantes pour exclure tout doute légitime quant à un éventuel préjugé, il n’est pas requis d’établir l’existence d’un manque d’impartialité, mais uniquement d’établir qu’un doute légitime à cet égard existe et ne puisse pas être dissipé (voir, en ce sens, arrêt du 27 mars 2019, August Wolff et Remedia/Commission, C‑680/16 P, EU:C:2019:257, point 37).

206    C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner le septième moyen invoqué par le requérant.

ii)    Sur le premier grief de la première branche, tiré de l’absence d’impartialité subjective

207    Il ressort de la jurisprudence que l’impartialité subjective est présumée jusqu’à preuve du contraire (voir arrêt du 27 novembre 2018, Mouvement pour une Europe des nations et des libertés/Parlement, T‑829/16, EU:T:2018:840, point 49 et jurisprudence citée).

208    De plus, l’article 11 bis du statut a pour but de garantir l’indépendance, l’intégrité et l’impartialité des fonctionnaires et des agents, ainsi que, par voie de conséquence, celles des institutions qu’ils servent, en imposant au fonctionnaire ou à l’agent concerné un devoir d’information préventif de l’AIPN ou de l’autorité habilitée à conclure les contrats d’engagement destiné à lui permettre de prendre, le cas échéant, des mesures appropriées. Eu égard au caractère fondamental des objectifs d’indépendance et d’intégrité poursuivis par cette disposition et au caractère général de l’obligation prescrite aux fonctionnaires et aux agents, il convient de reconnaître à l’article 11 bis du statut un large champ d’application, couvrant toute situation au vu de laquelle l’intéressé doit raisonnablement comprendre, compte tenu des fonctions qu’il exerce et des circonstances, qu’elle est de nature à apparaître, aux yeux des tiers, comme une source possible d’altération de son indépendance (voir arrêt du 30 janvier 2020, PV/Commission, T‑786/16 et T‑224/18, non publié, EU:T:2020:17, point 190 et jurisprudence citée).

209    Afin de prouver un manque d’impartialité subjective, la partie requérante doit présenter des indices suffisamment précis, objectifs et concordants de nature à soutenir la véracité ou la vraisemblance de ses allégations (voir arrêt du 8 novembre 2018, QB/BCE, T‑827/16, EU:T:2018:756, point 99 et jurisprudence citée).

210    Le requérant avance deux éléments au soutien de son argumentation. D’une part, il allègue que l’intérêt personnel de la directrice générale des ressources humaines et de la directrice générale de la DG « Interprétation » était de « se débarrasser au plus vite [de lui] » pour ne pas avoir à se justifier devant le juge pénal belge de l’accusation de faux en écritures. D’autre part, la directrice générale des ressources humaines aurait fait part de son opinion dans la conclusion du rapport de l’AIPN au conseil de discipline, selon laquelle « [l]e comportement global [du requérant] s’inscri[vai]t dans la durée et […] la gravité des manquements constatés [étai]t de nature à rompre de manière irréparable le lien de confiance qui doit exister à tout moment entre l’institution et les membres de son personnel ».

211    S’agissant de l’argument tiré d’un intérêt personnel des deux membres de l’AIPN tripartite susmentionnés, le seul élément dont se prévaut le requérant pour établir l’existence d’un défaut d’impartialité subjective est l’instruction pénale en cours, au moment de l’adoption de la seconde décision de révocation par l’AIPN tripartite, à la suite d’un dépôt de plainte dont il est lui-même à l’origine.

212    Or, il y a lieu de constater que l’ordonnance d’instruction adoptée dans le cadre de la procédure d’instruction pénale ne permet pas, à elle seule, d’établir l’existence de faits de nature criminelle (voir, en ce sens, arrêt du 30 janvier 2020, PV/Commission, T‑786/16 et T‑224/18, non publié, EU:T:2020:17, point 192).

213    S’agissant de l’argument tiré du fait que la directrice générale des ressources humaines aurait manifesté un parti pris ou un préjugé personnel dans le rapport de l’AIPN au conseil de discipline, il ressort des points 166 à 173 ci-dessus que ledit rapport ne constitue pas une appréciation sur la culpabilité du fonctionnaire, ni sur la sanction à adopter, mais vise seulement à justifier la saisine du conseil de discipline par l’AIPN. Ainsi, le requérant n’a pas démontré que le fait qu’il s’agisse d’une opinion de l’AIPN à un stade de la procédure serait de nature à empêcher toute évolution du point de vue de l’autorité disciplinaire, en l’occurrence l’AIPN tripartite, à la lumière des conclusions du rapport du conseil de discipline.

214    Dès lors, aucun des deux éléments avancés par le requérant ne constitue un indice suffisamment précis et objectif afin de soutenir la véracité ou la vraisemblance de ses allégations sur le manque d’impartialité subjective des personnes mentionnées au point 210 ci-dessus.

215    Partant, le premier grief doit être rejeté.

iii) Sur le second grief de la première branche, tiré de l’absence d’impartialité objective

216    L’exigence d’impartialité objective impose à l’institution d’offrir des garanties suffisantes pour exclure tout doute légitime quant à un éventuel préjugé (voir, en ce sens, arrêt du 11 juillet 2013, Ziegler/Commission, C‑439/11 P, EU:C:2013:513, point 155 et jurisprudence citée).

217    Toutefois, si les inquiétudes de la personne concernée doivent être prises en considération, elles ne sont pas décisives, car il convient de rechercher si ses appréhensions peuvent passer pour objectivement justifiées (voir arrêt du 5 octobre 2020, Broughton/Eurojust, T‑87/19, non publié, EU:T:2020:464, point 67 et jurisprudence citée).

218    En l’espèce, le requérant estime que la seconde décision de révocation est entachée d’une violation du principe d’impartialité en raison de la composition de l’AIPN tripartite qui l’a adoptée. En effet, le simple fait que la directrice générale des ressources humaines et la directrice générale de la DG « Interprétation » aient également fait partie de la composition de l’AIPN tripartite ayant adopté la première décision de révocation serait suffisant pour établir l’existence d’un doute légitime quant à l’existence d’un éventuel préjugé.

219    En premier lieu, force est de constater que, pour la procédure disciplinaire dont le requérant a fait l’objet, les règles de composition de l’AIPN tripartite ont été respectées. À cet égard, sa composition est déterminée par la décision C(2013) 3288. Cette décision prévoit que, pour l’adoption d’une sanction après saisine du conseil de discipline, l’AIPN doit être composée du directeur général des ressources humaines et de la sécurité, du directeur général dont relève le fonctionnaire concerné et d’un troisième agent désigné par le secrétaire général parmi les directeurs généraux et directeurs généraux adjoints. De plus, elle précise que la décision conjointe est prise à la majorité des trois membres.

220    Or, le Tribunal a déjà jugé que le caractère collégial, en l’occurrence tripartite, de la composition de l’AIPN constituait précisément une garantie d’impartialité et d’objectivité dans la prise de décisions disciplinaires (voir, en ce sens, arrêt du 30 mai 2002, Onidi/Commission, T‑197/00, EU:T:2002:135, point 132).

221    Une telle organisation vient contrebalancer les contraintes organisationnelles inhérentes aux relations entre un fonctionnaire et son institution. En particulier, dans le cas d’espèce, l’implication de la directrice générale des ressources humaines et de la directrice générale de la DG « Interprétation » résulte uniquement de l’ouverture de deux procédures disciplinaires successives à l’encontre du même fonctionnaire, ayant conduit à la saisine de l’AIPN tripartite en 2016 et en 2019 alors qu’il était encore affecté au sein de la même direction générale.

222    En second lieu, il convient de rappeler que, s’agissant de l’impartialité objective, une connaissance préalable des faits par ceux qui sont appelés à participer à l’adoption d’une décision judiciaire ou administrative ne constitue pas, à elle seule, une circonstance susceptible d’entacher cette décision d’un vice de procédure sous la forme d’un défaut d’impartialité. En effet, une telle connaissance préalable se révèle parfois inévitable compte tenu d’une activité professionnelle exercée antérieurement ou en parallèle par les personnes concernées (arrêt du 21 octobre 2021, Parlement/UZ, C‑894/19 P, EU:C:2021:863, point 55).

223    Partant, la seule présence de plusieurs membres, voire d’une majorité de membres, ayant déjà pris part à l’élaboration d’une décision antérieure à l’encontre du même fonctionnaire au sein d’un organe disciplinaire chargé d’adopter une nouvelle décision n’est pas, en tant que telle, incompatible avec le principe d’impartialité objective.

224    Dans ces conditions, il est nécessaire d’établir s’il existe dans le cas particulier un élément objectif, tel un conflit d’intérêts en ce qui concerne les fonctionnaires et les agents agissant pour le compte des institutions, des organes et des organismes de l’Union, de nature à faire naître un doute légitime, aux yeux des tiers, quant à l’impartialité de la procédure en cause (arrêt du 21 octobre 2021, Parlement/UZ, C‑894/19 P, EU:C:2021:863, point 55).

225    En l’espèce, d’une part, le requérant fait valoir que la directrice générale des ressources humaines et la directrice générale de la DG « Interprétation » se trouvent en situation de conflit d’intérêts en raison des plaintes déposées pour faux en écritures publiques devant la justice belge et faisant l’objet d’une instruction pénale toujours en cours au moment de l’adoption de la seconde décision de révocation ayant donné lieu à la saisie de son dossier disciplinaire par les autorités belges.

226    Il convient de rappeler que le conflit d’intérêts n’est qu’une variante du vice de partialité, puisque l’exigence d’impartialité couvre toutes circonstances que le fonctionnaire ou l’agent amené à se prononcer sur une affaire doit raisonnablement comprendre comme étant de nature à apparaître, aux yeux des tiers, comme susceptibles d’affecter son indépendance (voir arrêt du 10 février 2021, Spadafora/Commission, T‑130/19, non publié, EU:T:2021:74, point 99 et jurisprudence citée).

227    Or, étant donné qu’il ressort des mesures d’organisation de la procédure que les procédures pénales ouvertes en Belgique n’ont pas abouti à une condamnation, le simple dépôt d’une plainte ou l’existence des ordonnances d’instruction, qui ne constituent que des mesures de mise en état d’un dossier accomplies dans le cadre d’une instruction pénale (voir points 77 à 79 ci-dessus), ne sauraient suffire, à eux seuls, à faire naître un doute légitime quant à l’impartialité des membres de l’AIPN tripartite, en l’absence d’autres éléments permettant de conclure à l’existence d’un conflit d’intérêts.

228    D’autre part, selon le requérant, les deux membres de l’AIPN tripartite mentionnés au point 225 ci-dessus seraient à la fois juge et partie dans la même procédure. Il y a lieu de constater que le requérant renvoie uniquement au fait que la directrice générale des ressources humaines, à l’origine de la saisine du conseil de discipline, a également pris part à la procédure d’adoption de la première décision de révocation.

229    À cet égard, il y a lieu de rappeler que la procédure disciplinaire établie par l’annexe IX du statut prévoit deux phases distinctes. La première phase est constituée par la tenue d’une enquête administrative, engagée par une décision de l’AIPN, suivie de la rédaction d’un rapport d’enquête et close, après que l’intéressé a été entendu sur les faits qui lui étaient reprochés, par des conclusions tirées dudit rapport. La seconde phase est constituée par la procédure disciplinaire proprement dite, engagée par l’AIPN sur la base de ce rapport d’enquête, et consiste soit en l’ouverture d’une procédure disciplinaire sans consultation du conseil de discipline, soit en la saisine du conseil de discipline, sur la base d’un rapport établi par l’AIPN, en fonction des conclusions de l’enquête et des observations qu’a présentées la personne concernée.

230    Or, le fait pour l’AIPN de s’être conformée aux règles du statut en matière disciplinaire, rappelées au point 229 ci-dessus, ne saurait suffire, à lui seul, à faire naître un doute légitime quant à l’impartialité des membres de l’AIPN tripartite, compte tenu des éléments mentionnés aux points 219 et 220 ci-dessus.

231    Il en résulte que, en l’absence d’autres éléments de preuve apportés par le requérant, la procédure disciplinaire a offert des garanties suffisantes pour exclure tout doute légitime quant au respect du principe d’impartialité.

232    En l’espèce, premièrement, comme il a été relevé dans le cadre de l’analyse de la quatrième branche du premier moyen, le droit d’être entendu du requérant a été respecté, deuxièmement, une enquête administrative a été menée afin d’établir les faits et, troisièmement, la seconde décision de révocation s’est fondée sur l’avis du conseil de discipline quant à la véracité des faits disciplinaires.

233    Dès lors, l’AIPN tripartite n’a fait qu’appliquer à des faits disciplinaires établis son appréciation, ce qui a conduit à la révocation du requérant. Ce dernier ne saurait donc lui reprocher des conclusions similaires quant aux deux procédures, qui reposent sur des faits partiellement identiques, pour soutenir l’existence d’un manque d’impartialité objective.

234    Par conséquent, il convient d’écarter le second grief et l’ensemble de la première branche du septième moyen.

2)      Sur la seconde branche du septième moyen, tirée de la violation du principe d’égalité des armes

235    Par la seconde branche du septième moyen, le requérant fait valoir que le principe d’égalité des armes, consacré par l’article 36 des DGE de 2019, a été méconnu par la Commission dans le cadre de la procédure disciplinaire ayant conduit à l’adoption de la seconde décision de révocation. Selon lui, cette méconnaissance résulte du refus de la Commission de lever l’immunité dont bénéficient la directrice générale des ressources humaines et la directrice générale de la DG « Interprétation » en vertu de l’article 11 du protocole no 7 sur les privilèges et immunités de l’Union, qui l’a empêché de les faire condamner pénalement.

236    La Commission conteste les arguments du requérant.

237    Il convient de rappeler que le principe d’égalité des armes découle dans le droit de l’Union de l’article 47 de la Charte.

238    Selon une jurisprudence constante, le principe d’égalité des armes, garanti par le même article, qui est un corollaire de la notion même de procès équitable et a pour but d’assurer l’équilibre entre les parties à la procédure, implique l’obligation d’offrir à chaque partie une possibilité raisonnable de présenter sa cause, y compris ses preuves, dans des conditions qui ne la placent pas dans une situation de net désavantage par rapport à son adversaire. Ce principe a pour but d’assurer l’équilibre procédural entre les parties à une procédure judiciaire, en garantissant l’égalité des droits et des obligations de ces parties en ce qui concerne, notamment, les règles régissant l’administration des preuves et le débat contradictoire devant le juge (voir arrêt du 5 juin 2019, Bernaldo de Quirós/Commission, T‑273/18, non publié, EU:T:2019:371, point 102 et jurisprudence citée).

239    Toutefois, selon une jurisprudence constante, la procédure devant la Commission n’est pas judiciaire, mais administrative. Dès lors, le respect des caractéristiques que cet article impose à un « tribunal » ne saurait être exigé de la Commission dans le cadre d’une procédure disciplinaire (voir, en ce sens, arrêt du 5 juin 2019, Bernaldo de Quirós/Commission, T‑273/18, non publié, EU:T:2019:371, point 103 et jurisprudence citée).

240    En effet, la procédure disciplinaire ne s’apparente pas à une procédure judiciaire qui, lors de l’audition par l’AIPN tripartite visée à l’article 22 de l’annexe IX du statut, opposerait l’IDOC, d’une part, et le fonctionnaire concerné, d’autre part, et dans le cadre de laquelle le principe d’égalité des armes pourrait être invoqué. La procédure disciplinaire est une procédure administrative destinée à permettre à l’autorité compétente d’adopter, le cas échéant, une sanction appropriée à l’égard d’un fonctionnaire ayant enfreint ses obligations statutaires.

241    Dans ces conditions, la seconde branche du septième moyen du requérant, tirée de la violation, lors de la procédure disciplinaire, du principe d’égalité des armes, doit être considérée comme étant inopérante, l’AIPN tripartite ne constituant pas un « tribunal » au sens des dispositions en cause.

242    En tout état de cause, tout d’abord, il y a lieu de relever que le requérant ne démontre pas en quoi le refus de la Commission de lever l’immunité dont bénéficie la directrice générale des ressources humaines et la directrice générale de la DG « Interprétation » dans le cadre d’une instruction pénale en Belgique est susceptible d’avoir porté atteinte à l’égalité des armes dans la conduite de la procédure disciplinaire CMS 17/025.

243    À cet égard, le fait que le requérant n’a pas été en mesure de prouver l’existence d’infractions pénales, telles que les faux en écritures publiques, devant les juridictions belges n’est pas de nature à caractériser la violation du principe d’égalité des armes dans une procédure distincte de nature disciplinaire.

244    Ensuite, ainsi qu’il ressort des points 155 et 156 ci-dessus, les DGE de 2004 sont applicables à l’ensemble des actes accomplis dans le cadre de la procédure CMS 17/025 jusqu’au 12 juin 2019.

245    Dès lors, le requérant ne saurait reprocher à l’IDOC et au conseil de discipline d’avoir méconnu l’article 36 des DGE de 2019 dans le cadre de la procédure disciplinaire CMS 17/025.

246    Enfin, le requérant ne rapporte aucun élément de preuve de nature à établir que le refus de la Commission de lever l’immunité de deux fonctionnaires dans le cadre d’une instruction pénale aurait privé le requérant d’une possibilité de présenter sa cause, y compris ses preuves, dans des conditions qui ne le placent pas dans une situation de net désavantage par rapport à son adversaire au stade de l’audition devant l’AIPN tripartite.

247    Dans ces conditions, la seconde branche du septième moyen doit être écartée, comme l’ensemble de ce moyen.

d)      Sur le huitième moyen, tiré de la violation de l’article 41, paragraphe 1, de la Charte en raison d’un dépassement du délai raisonnable de la procédure disciplinaire

248    Le requérant fait valoir que tant l’ouverture de la procédure disciplinaire CMS 17/025 le 18 juillet 2018 que la seconde décision de révocation ne sont pas intervenues dans un délai raisonnable, ce qui constituerait une violation de l’article 41, paragraphe 1, de la Charte. Il reproche à la Commission d’avoir ouvert une procédure disciplinaire pour des faits trop anciens. De plus, la seconde sanction de révocation serait tardive dans la mesure où elle interviendrait six ans après la prise de connaissance par la Commission du dernier grief disciplinaire. Le requérant estime également que ce délai a porté atteinte à sa capacité à se défendre efficacement.

249    La Commission conteste les arguments du requérant.

1)      Considérations liminaires

250    Il y a lieu de rappeler que, d’une part, s’agissant du régime disciplinaire applicable aux fonctionnaires de l’Union, le statut prévoit à son annexe IX des délais à respecter pour le déroulement de la procédure disciplinaire devant le conseil de discipline, mais n’impose ni délai de prescription pour l’ouverture d’une procédure disciplinaire, ni délai pour le déroulement de la procédure disciplinaire sans consultation du conseil de discipline.

251    D’autre part, les DGE de 2004, applicables au moment des faits (voir points 155 et 156 ci-dessus), n’imposaient aucun délai de prescription concernant les faits susceptibles de faire l’objet d’une enquête. Il convient néanmoins de relever qu’un délai de prescription de dix ans pour l’ouverture d’une enquête administrative est désormais prévu par l’article 11, paragraphe 4, des DGE de 2019.

252    Dès lors, en l’absence d’un délai de prescription, c’est le principe du délai raisonnable qui s’applique. D’une part, les autorités disciplinaires ont l’obligation de mener avec diligence la procédure disciplinaire et d’agir de sorte que chaque acte de poursuite intervienne dans un délai raisonnable par rapport à l’acte précédent (voir arrêt du 10 juin 2004, François/Commission, T‑307/01, EU:T:2004:180, point 47 et jurisprudence citée).

253    D’autre part, ce devoir de diligence et de respect du délai raisonnable s’impose également quant à l’ouverture de la procédure disciplinaire, notamment dans le cas et à partir du moment où l’administration a pris connaissance des faits et conduites susceptibles de constituer des infractions aux obligations statutaires d’un fonctionnaire. En effet, même en l’absence de délai de prescription, les autorités disciplinaires ont l’obligation d’agir de sorte que l’ouverture de la procédure devant aboutir à une sanction intervienne dans un délai raisonnable [voir arrêt du 13 octobre 2021, IB/EUIPO, T‑22/20, EU:T:2021:689, point 86 (non publié) et jurisprudence citée].

254    En outre, la période à prendre en considération pour évaluer le caractère raisonnable de la durée d’une procédure disciplinaire n’est pas uniquement celle qui commence à partir de la décision d’ouvrir ladite procédure. La réponse à la question de savoir si la procédure disciplinaire, une fois ouverte, a été conduite avec la diligence requise, sera influencée par la circonstance qu’une période plus ou moins longue se sera écoulée entre la survenance de la prétendue infraction disciplinaire et la décision d’ouverture de la procédure disciplinaire [voir arrêt du 13 octobre 2021, IB/EUIPO, T‑22/20, EU:T:2021:689, point 87 (non publié) et jurisprudence citée].

255    À cet égard, le caractère raisonnable de la durée de la phase antérieure à la procédure disciplinaire et de celle de la procédure disciplinaire proprement dite doit être apprécié en fonction des circonstances propres de chaque affaire et, notamment, de l’enjeu du litige pour l’intéressé, de la complexité de l’affaire ainsi que du comportement du requérant et de celui des autorités compétentes [voir arrêt du 13 octobre 2021, IB/EUIPO, T‑22/20, EU:T:2021:689, point 88 (non publié) et jurisprudence citée].

256    Il résulte de la jurisprudence ainsi présentée que la durée de la procédure doit être évaluée, en l’espèce, en tenant compte du temps mis à ouvrir la procédure disciplinaire, puis à conduire chacune de ses étapes, de l’ouverture de l’enquête administrative jusqu’à l’adoption de la décision finale, à l’issue de la procédure disciplinaire.

2)      Sur le respect du délai raisonnable quant à l’ouverture de la procédure administrative, puis disciplinaire et à la conduite de ses différentes étapes

257    Le requérant invoque, en substance, une violation du délai raisonnable tirée tant du caractère tardif de l’ouverture de la procédure administrative que de la durée excessive de la procédure disciplinaire.

258    Il y a lieu de constater que la procédure disciplinaire CMS 17/025 porte sur des faits pouvant être regroupés en deux catégories, la première portant sur des comportements inappropriés du requérant envers sa hiérarchie et ses collègues de travail ainsi que des faits d’insubordination et, la seconde, sur des absences injustifiées.

259    La première catégorie de faits a eu lieu entre le 1er avril 2013 et le 8 mai 2014, date à partir de laquelle le requérant ne s’est plus présenté au travail (voir point 5 ci-dessus). La seconde catégorie de faits s’est produite sur deux périodes distinctes, entre le 1er avril 2013 et le 31 juillet 2016, puis à partir du 18 septembre 2017.

260    Le 12 novembre 2013, la Commission a eu, pour la première fois, connaissance d’une partie de la première catégorie de faits par une lettre de la cheffe d’unité du requérant adressée à une cheffe d’unité de l’IDOC se plaignant du comportement du requérant.

261    Le 6 octobre 2017, l’IDOC a été mandaté par l’AIPN pour conduire l’enquête administrative CMS 17/025 sur les faits reprochés au requérant. Il a transmis son rapport final à l’AIPN le 5 mars 2018.

262    Le 18 juillet 2018, l’AIPN a transmis son rapport au conseil de discipline sur les faits reprochés au requérant.

263    En premier lieu, s’agissant du temps écoulé entre la survenance des faits de nature disciplinaire et l’ouverture de l’enquête administrative, il importe de constater que l’administration a pris connaissance de ces faits, tels qu’ils ont été établis dans le cadre du rapport d’enquête administrative, en novembre 2013. Les autorités disciplinaires ont agi dès le 6 octobre 2017, soit un peu moins de quatre ans après cette date, et ont saisi le conseil de discipline le 18 juillet 2018, soit moins de cinq ans après cette même date.

264    Or, il ressort des points 251 et 252 ci-dessus que, en l’absence de délai de prescription concernant les faits susceptibles de faire l’objet d’une enquête dans les DGE de 2004, applicables en l’espèce, c’est le principe du délai raisonnable qui s’applique. Néanmoins, ce dernier doit être interprété en tenant compte de l’existence du délai de prescription de dix ans prévu par l’article 11, paragraphe 4, des DGE de 2019 (voir, en ce sens, arrêt du 7 septembre 2022, WT/Commission, T-91/20, non publié, EU:T:2022:510, point 83). Ainsi, étant donné que les délais écoulés entre la prise de connaissance par l’administration des faits reprochés, l’action de l’administration et la saisine du conseil de discipline sont inférieurs à dix années, il y a lieu de considérer que l’IDOC et l’AIPN étaient en droit, sans méconnaître le principe de bonne administration et leur devoir de diligence, d’enquêter sur des faits qui s’étaient déroulés, au maximum, quatre ans avant l’ouverture de l’enquête administrative dans le dossier CMS 17/025.

265    De plus, un tel délai ne peut pas non plus être considéré comme étant excessif, dès lors que, à l’intérieur de ce délai, toutes les étapes de la phase antérieure à la procédure disciplinaire se sont elles-mêmes déroulées dans un délai raisonnable par rapport à l’étape précédente.

266    À cet égard, premièrement, les circonstances particulières de l’affaire expliquent en grande partie ce délai, notamment la période de révocation du requérant entre le 1er août 2016 et le 15 septembre 2017. Deuxièmement, une période de cinq années n’apparaît pas comme étant excessive, surtout à la lumière des DGE de 2019 qui prévoient un délai de prescription de dix ans à partir du jour où le manquement présumé cesse. En l’espèce, ce délai aurait commencé à courir le 8 mai 2014, pour les faits d’insubordination et les comportements inappropriés, et le 31 juillet 2016 pour les absences injustifiées du requérant. Troisièmement, les manquements aux obligations statutaires sont principalement constitués d’absences irrégulières dont la constatation implique une procédure particulière et de nombreux échanges sur l’existence ou non d’une justification médicale de celles-ci entre le requérant et la Commission.

267    En deuxième lieu, il convient de constater que l’enquête administrative a duré cinq mois. Or, une telle durée est appropriée aux circonstances et à la complexité du cas d’espèce, ainsi que l’exige l’article 3, paragraphe 2, des DGE 2004, applicable au moment des faits. Elle est également en deçà du délai indicatif de douze mois prévu par l’article 15, paragraphe 3, des DGE 2019, actuellement en vigueur.

268    Il convient d’ajouter que la durée de l’enquête n’a pu affecter ni le requérant dans ses droits de la défense ni l’établissement des faits par l’AIPN. En effet, le requérant a pu faire connaître utilement son point de vue au sujet des éléments retenus à sa charge, ainsi que l’exige le principe du respect des droits de la défense. D’une part, le 9 janvier 2018, il a été invité à une audition devant l’IDOC, prévue le 29 janvier 2018, à laquelle il ne s’est pas présenté. D’autre part, il a reçu, le 7 février 2018, une note décrivant les faits mis en lumière à la suite des actes d’enquête sur laquelle il a pu transmettre ses commentaires le 13 février 2018.

269    En troisième lieu, en ce qui concerne le déroulement de la procédure disciplinaire, il convient de constater que, d’une part, l’AIPN a transmis son rapport au conseil de discipline environ quatre mois après la transmission par l’IDOC du rapport final de l’enquête administrative, ce qui constitue un délai raisonnable.

270    D’autre part, les multiples demandes de report de l’audition du requérant devant le conseil de discipline expliquent un retard de quatre mois de la procédure. Celui-ci ne s’est d’ailleurs pas présenté à l’audition du 26 mars 2019 et n’a pas produit d’observations.

271    Le 28 mai 2019, l’avis motivé du conseil de discipline a été notifié à l’AIPN.

272    Le requérant ne s’est pas présenté à l’audition au titre de l’article 22 de l’annexe IX du statut, prévue initialement le 10 juillet 2019, puis reportée à sa demande au 3 septembre 2019. Il a présenté ses observations par écrit le 22 août et le 1er septembre 2019.

273    Le 21 octobre 2019, la procédure a été clôturée par l’adoption de la seconde décision de révocation. L’audition du requérant est donc intervenue environ trois mois après la notification de l’avis du conseil de discipline, tandis que la seconde décision de révocation a été adoptée environ deux mois après ladite audition.

274    Il s’ensuit que les étapes composant la procédure disciplinaire se sont, elles aussi, succédé dans des délais raisonnables.

275    Il reste à examiner si l’ensemble de ces étapes et, dès lors, la durée totale de la procédure disciplinaire se sont maintenus dans des limites raisonnables.

276    La procédure d’enquête administrative a duré cinq mois. La procédure disciplinaire a débuté le 18 juillet 2018 pour se clore le 21 octobre 2019, soit une durée d’environ quinze mois. L’ensemble de la procédure a ainsi pris presque vingt mois.

277    Par ailleurs, il n’y a pas eu de période d’inaction critiquable de la part de l’AIPN.

278    Il y a lieu de constater que la seconde décision de révocation a été adoptée à l’issue d’une procédure dont la durée totale est raisonnable.

279    Partant, la procédure disciplinaire CMS 17/025 n’a pas méconnu le principe de bonne administration et l’exigence de traitement de l’affaire dans un délai raisonnable.

280    L’argument présenté par le requérant, selon lequel le délai à retenir se déduit du règlement (CE, Euratom) no 2988/95 du Conseil, du 18 décembre 1995, relatif à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes (JO 1995, L 312, p. 1), ne saurait remettre en cause une telle conclusion, étant donné que la procédure disciplinaire prévue par le statut n’entre pas dans le champ d’application dudit règlement.

281    De plus, ainsi qu’il ressort du point 255 ci-dessus, contrairement à ce que semble prétendre le requérant, dans la mesure où les circonstances de chaque affaire sont différentes et propres à celle-ci, il n’y a pas lieu de comparer la présente affaire à celle ayant donné lieu à l’arrêt du 10 juin 2004, François/Commission (T‑307/01, EU:T:2004:180).

282    Par conséquent, le requérant ne saurait valablement soutenir que la procédure ouverte à son égard se serait déroulée dans des délais déraisonnables.

283    Le huitième moyen doit être écarté.

e)      Sur le moyen, soulevé au stade de la réplique, tiré de la violation du principe de non-rétroactivité des décisions administratives et du principe de sécurité juridique

284    Le requérant fait valoir que la décision de retrait, en produisant des effets ex tunc, a violé le principe de non-rétroactivité des décisions administratives. Ce principe aurait pour objectif de protéger la sécurité juridique. Selon lui, le retrait avec effet rétroactif ne peut effacer la situation factuelle issue de la première décision de révocation, notamment la période de chômage et la nouvelle relation de travail avec un autre employeur du 26 juin 2017 au 14 mars 2018.

285    Le requérant considère que la procédure disciplinaire CMS 17/025 a également violé le principe de non-rétroactivité des décisions administratives et le principe de sécurité juridique en qualifiant d’irrégulière son absence à partir du 18 septembre 2017. Selon lui, sa révocation ayant mis fin à sa relation de travail avec la Commission, il ne pouvait être considéré comme étant absent.

286    La Commission conteste les arguments du requérant et conclut au caractère irrecevable et, en tout état de cause, non fondé de ce moyen.

287    Sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de ce moyen, il importe de rappeler que, conformément à une jurisprudence bien établie, il découle des principes généraux du droit de l’Union que l’administration est, en principe, habilitée à retirer, avec effet rétroactif, un acte administratif adopté illégalement, sous réserve du respect de conditions strictes (voir, en ce sens, arrêt du 27 juin 2017, Ruiz Molina/EUIPO, T‑233/16 P, EU:T:2017:435, points 27 et 28 et jurisprudence citée).

288    De plus, selon une jurisprudence bien établie, rien ne s’oppose à ce que le retrait d’un acte administratif illégal ou légal qui constitue, à l’égard de son destinataire, un acte lui faisant principalement grief puisse être opéré s’il n’a pas porté atteinte à la confiance légitime dudit destinataire et que le principe de sécurité juridique n’est pas enfreint (arrêt du 27 juin 2017, Ruiz Molina/EUIPO, T‑233/16 P, EU:T:2017:435, point 29).

289    À cet égard, il convient de rappeler que le principe de protection de la confiance légitime s’inscrit parmi les principes fondamentaux de l’Union. Le droit de réclamer la protection de la confiance légitime suppose la réunion de trois conditions. Premièrement, des assurances précises, inconditionnelles et concordantes, émanant de sources autorisées et fiables, doivent avoir été fournies à l’intéressé par l’administration. Deuxièmement, ces assurances doivent être de nature à faire naître une attente légitime dans l’esprit de celui auquel elles s’adressent. Troisièmement, les assurances données doivent être conformes aux normes applicables (voir arrêt du 28 septembre 2022, Grieger/Commission, T‑517/21, non publié, EU:T:2022:588, point 81 et jurisprudence citée).

290    Quant au principe de sécurité juridique, qui constitue un principe général du droit de l’Union, il vise à garantir la prévisibilité des situations et des relations juridiques résultant du droit de l’Union et exige que tout acte de l’administration qui produit des effets juridiques soit clair et précis afin que les intéressés puissent connaître sans ambiguïté leurs droits et obligations et prendre leurs dispositions en conséquence (voir, en ce sens, arrêt du 3 juin 2008, Intertanko e.a., C‑308/06, EU:C:2008:312, point 69 et jurisprudence citée).

291    En l’espèce, force est de constater que la première décision de révocation constitue un acte administratif faisant grief au requérant.

292    De plus, s’agissant de la décision de retrait, il convient de relever que, premièrement, elle est intervenue à la suite d’un courrier du requérant du 20 avril 2017, deuxièmement, elle constitue une décision de réintégration plus favorable au requérant que la décision retirée et, troisièmement, elle a laissé au requérant un délai pour en mesurer les conséquences sur ses droits et ses obligations en fixant la date de prise d’effet de sa nouvelle affectation au 18 septembre 2017.

293    Par conséquent, le retrait en question s’est opéré dans le respect du principe de confiance légitime du requérant et en conformité avec le principe de sécurité juridique rappelés dans la jurisprudence citée aux points 289 et 290 ci-dessus. En effet, la première décision de révocation n’a pas pu faire naître d’attente légitime dans l’esprit du requérant dans la mesure où il a lui-même demandé son annulation. De plus, le requérant ne saurait invoquer une violation du principe de sécurité juridique étant donné que les effets du retrait d’un acte administratif en droit de l’Union sont déterminés par une jurisprudence constante rappelée au point 287 ci-dessus.

294    En ce qui concerne la procédure disciplinaire CMS 17/025, dès lors que la Commission a retiré la première décision de révocation, cette dernière est censée n’avoir jamais existé, conformément à la jurisprudence rappelée au point 287 ci-dessus.

295    Ainsi, à la date de retrait de ladite décision, le requérant a été placé rétroactivement dans la position statutaire qui était la sienne avant sa révocation.

296    Dès lors, l’AIPN a tiré toutes les conséquences de cette décision de retrait et du refus du requérant de réintégrer son poste à partir du 18 septembre 2017 en constatant qu’il se trouvait en situation d’absence irrégulière à partir de cette date.

297    Il y a donc lieu, en tout état de cause, d’écarter ce moyen, soulevé au stade de la réplique.

f)      Sur le premier moyen, tiré de la violation des articles 1er, 3, 4, de l’article 31, paragraphe 1, et de l’article 41, paragraphe 2, de la Charte ainsi que de l’article 1er sexies, paragraphe 2, et de l’article 12 bis du statut

298    Le premier moyen se décompose en quatre branches, tirées, la première, de l’existence d’un harcèlement moral, la seconde, du fait que la procédure disciplinaire ayant abouti à sa révocation serait constitutive de harcèlement moral, la troisième, de l’interprétation erronée des faits par le Tribunal dans l’arrêt du 30 janvier 2020, PV/Commission (T‑786/16 et T‑224/18, non publié, EU:T:2020:17), et, la quatrième, d’une violation du droit d’être entendu.

299    Il convient d’examiner d’emblée la quatrième branche.

1)      Sur la quatrième branche, tirée du non-respect du droit d’être entendu

300    Par la quatrième branche du premier moyen, le requérant invoque un grief tiré de la méconnaissance de son droit d’être entendu avant que l’AIPN n’adopte les décisions de rejet des réclamations R/630/19 et R/71/20. Il soutient que, s’il avait eu l’opportunité de s’exprimer, il aurait pu convaincre l’AIPN du bien-fondé de ses accusations de harcèlement moral.

301    La Commission conteste les arguments du requérant.

302    Il y a lieu de rappeler que le droit d’être entendu dans toute procédure, prévu à l’article 41, paragraphe 2, de la Charte, qui fait partie intégrante du respect des droits de la défense tout en étant moins étendu que ces derniers, garantit à toute personne la possibilité de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours d’une procédure administrative et avant qu’une décision susceptible d’affecter de manière défavorable ses intérêts ne soit prise à son égard (voir arrêt du 3 mars 2021, Barata/Parlement, T‑723/18, EU:T:2021:113, point 72 et jurisprudence citée).

303    L’existence d’une violation du droit d’être entendu doit être appréciée en fonction, notamment, des règles juridiques régissant la matière concernée (voir arrêt du 3 mars 2021, Barata/Parlement, T‑723/18, EU:T:2021:113, point 73 et jurisprudence citée).

304    Toutefois, la personne qui introduit une réclamation contre un acte lui faisant grief, au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut, ne peut, en principe, utilement faire valoir qu’elle n’a pas été entendue dans le cadre de la procédure précontentieuse, dans la mesure où la réclamation a pour objet même de permettre à l’intéressé de formuler des observations (voir arrêt du 3 mars 2021, Barata/Parlement, T‑723/18, EU:T:2021:113, point 74 et jurisprudence citée).

305    Dès lors, l’argument par lequel le requérant reproche à l’AIPN de ne pas l’avoir entendu sur les motifs de rejet des réclamations R/630/19 et R/71/20 avant l’adoption des décisions de rejet desdites réclamations manque en droit.

306    La quatrième branche du premier moyen doit être écartée.

2)      Sur la première branche, tirée de l’existence de faits de harcèlement moral à l’encontre du requérant

307    La première branche du premier moyen est présentée par le requérant au soutien de sa demande d’annulation de la décision de rejet de sa demande d’assistance au titre de l’article 24 du statut et de la décision de rejet de la réclamation R/71/20, au motif qu’il aurait été victime d’un harcèlement moral. Selon lui, ces décisions ont été adoptées en violation des articles 1er, 3, 4, de l’article 31, paragraphe 1, de la Charte ainsi que de l’article 1er sexies, paragraphe 2, et de l’article 12 bis du statut interdisant le harcèlement moral. Il estime qu’une connexité existe entre tous les faits de harcèlement moral qu’il aurait subis depuis le mois de juillet 2007, lesquels manifesteraient un processus de harcèlement continu à son égard.

308    Le requérant mentionne, à ce titre, plusieurs comportements et actes. Il invoque, en premier lieu, des faits antérieurs à son affectation à la DG « Interprétation », à savoir les mauvaises relations de travail avec ses collègues. En second lieu, il invoque au soutien de son argumentation les rapports d’évaluation pour 2013, 2014, 2015, la première décision de révocation, les convocations du service médical de la Commission et les certificats médicaux émis par les médecins-conseils de la Commission relatifs à ses absences injustifiées, les décisions de retenues sur salaire consécutives aux décisions constatant ses absences irrégulières et l’absence de rétablissement de sa situation financière à la suite du retrait de la première décision de révocation le 24 juillet 2017 ainsi que deux témoignages recueillis en 2017 à l’occasion de la procédure administrative CMS 17/025.

309    La Commission considère cette branche comme étant partiellement irrecevable et, en tout état de cause, conteste les arguments du requérant.

310    Sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de la première branche du premier moyen, le Tribunal relève que, si le requérant fait valoir, en substance, qu’il a été victime de harcèlement moral continu depuis le mois de juillet 2007, sur la base des éléments mentionnés au point 308 ci-dessus, il convient d’examiner séparément les faits antérieurs au 1er avril 2013 et ceux postérieurs à cette date.

i)      Considérations liminaires

311    Le droit de tout travailleur à des conditions de travail qui respectent sa santé, sa sécurité et sa dignité est expressément consacré à l’article 31, paragraphe 1, de la Charte. L’article 1er sexies, paragraphe 2, du statut fait explicitement référence à des conditions de travail répondant à des normes de santé et de sécurité appropriées.

312    Selon la jurisprudence, les institutions, les organes et les organismes de l’Union sont tenus, tant au titre de l’article 31 de la Charte qu’au titre des articles 12 bis et 24 du statut, de garantir à leurs fonctionnaires et à leurs agents des conditions de travail qui respectent leur santé, leur sécurité et leur dignité et, par conséquent, de mettre à leur disposition en temps utile des procédures permettant d’assurer que leurs conditions de travail répondent à ces exigences (voir arrêt du 13 juillet 2022, AI e.a./ECDC, T‑864/19, non publié, EU:T:2022:452, point 144 et jurisprudence citée).

313    Il convient de rappeler que l’article 12 bis, paragraphe 3, du statut définit le harcèlement moral comme étant une « conduite abusive » qui requiert, pour être établie, que deux conditions cumulatives soient satisfaites. La première condition est relative à l’existence de comportements, de paroles, d’actes, de gestes ou d’écrits qui se manifestent « de façon durable, répétitive ou systématique », ce qui implique que le harcèlement moral doit être compris comme étant un processus s’inscrivant nécessairement dans le temps et suppose l’existence d’agissements répétés ou continus et qui sont « intentionnels ». La seconde condition, séparée de la première par la conjonction « et », exige que ces comportements, paroles, actes, gestes ou écrits aient pour effet de porter atteinte à la personnalité, à la dignité ou à l’intégrité physique ou psychique d’une personne. Du fait que l’adjectif « intentionnel » concerne la première condition et non la seconde, il est possible de tirer une double conclusion. D’une part, les comportements, paroles, actes, gestes ou écrits, visés par l’article 12 bis, paragraphe 3, du statut, doivent présenter un caractère volontaire, ce qui exclut du champ d’application de cette disposition les agissements qui se produiraient de manière accidentelle. D’autre part, il n’est en revanche pas requis que ces comportements, paroles, actes, gestes ou écrits aient été commis avec l’intention de porter atteinte à la personnalité, à la dignité ou à l’intégrité physique ou psychique d’une personne. En d’autres termes, il peut y avoir harcèlement moral au sens de l’article 12 bis, paragraphe 3, du statut sans que le harceleur ait entendu, par ses agissements, discréditer la victime ou dégrader délibérément ses conditions de travail. Il suffit que ses agissements, dès lors qu’ils ont été commis volontairement, aient entraîné objectivement de telles conséquences (voir arrêt du 6 juin 2019, Bonnafous/EACEA, T‑614/17, non publié, EU:T:2019:381, point 220 et jurisprudence citée).

314    De plus, l’agissement en cause devant, en vertu de l’article 12 bis, paragraphe 3, du statut, présenter un caractère abusif, il s’ensuit que la qualification de « harcèlement » est subordonnée à la condition que celui-ci revête une réalité objective suffisante, au sens où un observateur impartial et raisonnable, doté d’une sensibilité normale et placé dans les mêmes conditions, considérerait le comportement ou l’acte en cause comme étant excessif et critiquable (voir arrêt du 13 juillet 2018, Curto/Parlement, T‑275/17, EU:T:2018:479, point 78 et jurisprudence citée).

315    Enfin, lorsqu’il résulte d’un processus continu dans le temps, le harcèlement moral peut, par définition, être le résultat d’un ensemble de comportements différents, qui, pris isolément, ne seraient pas nécessairement constitutifs en soi d’un harcèlement moral, mais qui, appréciés globalement et de manière contextuelle, y compris en raison de leur accumulation dans le temps, pourraient être considérés en tant que tels (voir, en ce sens, arrêt du 28 mai 2020, Cerafogli/BCE, T‑483/16 RENV, non publié, EU:T:2020:225, point 395 et jurisprudence citée).

316    Ainsi, lors de l’examen de la question de savoir si des comportements invoqués par une partie requérante sont constitutifs d’un harcèlement moral, il convient d’examiner ces faits tant isolément que conjointement, en tant qu’éléments d’un environnement global de travail créé par les comportements d’un membre du personnel à l’égard d’un autre membre de ce personnel (voir, en ce sens, arrêts du 13 juillet 2018, SQ/BEI, T‑377/17, EU:T:2018:478, point 94, et du 9 décembre 2020, GV/Commission, T‑705/19, non publié, EU:T:2020:590, point 79).

317    En présence d’une allégation de méconnaissance de l’article 12 bis du statut, le Tribunal doit rechercher si l’institution concernée a commis une erreur d’appréciation des faits au regard de la définition du harcèlement moral visée à cette disposition, et non une erreur manifeste d’appréciation de ces faits (voir, en ce sens, arrêt du 13 juillet 2018, SQ/BEI, T‑377/17, EU:T:2018:478, point 99).

318    C’est à la lumière des principes énoncés ci-dessus qu’il convient d’examiner les arguments du requérant.

ii)    Sur les allégations de harcèlement moral fondées sur des faits antérieurs au 1er avril 2013

319    Le requérant allègue qu’il a été harcelé au sein de la DG « Emploi » et de la DG « Budget » entre le mois de juillet 2007 et son changement d’affectation, le 1er avril 2013, à la DG « Interprétation ».

320    Premièrement, il convient de relever que les allégations de harcèlement moral subi par le requérant au sein de la DG « Emploi » ont fait l’objet d’une demande d’assistance au titre de l’article 24 du statut, introduite le 5 août 2009.

321    Ainsi qu’il ressort de l’arrêt du 30 janvier 2020, PV/Commission (T‑786/16 et T‑224/18, non publié, EU:T:2020:17, point 3), par décision du 9 juin 2010, la procédure a été clôturée à l’issue d’une enquête menée par l’IDOC, qui a conclu que les conditions requises par l’article 12 bis, paragraphe 3, du statut pour qu’un comportement déterminé puisse être considéré comme constituant un harcèlement moral n’étaient pas réunies, et de la mutation du requérant le 1er octobre 2009 à la DG « Budget ».

322    Or, le requérant se borne à renvoyer aux mêmes faits et arguments que ceux présentés dans la demande d’assistance mentionnée au point 320 ci-dessus. Cette décision étant devenue définitive, le requérant ne saurait prétendre, par le présent recours, contester la conclusion rappelée au point 321 ci-dessus.

323    Deuxièmement, en ce qui concerne les allégations formulées par le requérant portant sur l’existence d’un harcèlement moral subi à la DG « Budget », entre les mois de juillet 2010 et de décembre 2011, celui-ci se borne à énumérer un grand nombre de faits évoquant l’existence de divergences de points de vue entre lui et ses collègues et des relations conflictuelles avec certains responsables et collègues de sa direction générale.

324    Or, il est de jurisprudence constante que le fait qu’un fonctionnaire ait des relations difficiles, voire conflictuelles, avec des collègues ou des supérieurs hiérarchiques ne constitue pas à lui seul la preuve d’un harcèlement moral. Par ailleurs, des observations négatives adressées à un agent ne portent pas nécessairement atteinte à sa personnalité, à sa dignité ou à son intégrité lorsqu’elles sont formulées en des termes mesurés et ne reposent pas sur des accusations abusives et dénuées de tout lien avec des faits objectifs (voir arrêt du 19 décembre 2019, ZQ/Commission, T‑647/18, non publié, EU:T:2019:884, point 78 et jurisprudence citée).

325    Dès lors, si les évènements mis en avant font état d’une relation possiblement conflictuelle et, pour le moins, d’une certaine tension ressentie par le requérant à l’égard de ses anciens responsables et collègues, ils ne révèlent pas une conduite abusive se manifestant de façon durable, répétitive ou systématique de la part de ces personnes à son égard.

326    Quant à l’argument du requérant selon lequel le harcèlement moral au sein de la DG « Budget » serait établi par des avis médicaux de son médecin traitant, d’un médecin du travail et des rapports d’un psychiatre, il convient de rappeler que de tels avis ou rapports ne sont pas de nature à établir, par eux-mêmes, l’existence d’un harcèlement moral. En effet, si ces certificats et rapports médicaux mettent en évidence la condition médicale du requérant, ils ne permettent toutefois pas d’établir que celle-ci résulterait d’un harcèlement moral, dès lors que, pour conclure à l’existence d’un tel harcèlement, les auteurs des certificats se sont nécessairement fondés exclusivement sur la description que le requérant a pu leur faire de ses conditions de travail et son examen médical (voir, en ce sens, arrêt du 12 janvier 2022, MW/Parlement, T‑630/20, non publié, EU:T:2022:3, point 120 et jurisprudence citée).

327    En outre, des avis d’experts médicaux, quand bien même ils se fonderaient sur d’autres éléments que la description que le fonctionnaire concerné leur a faite de ses conditions de travail, ne sont pas de nature à établir, par eux-mêmes, l’existence, en droit, d’un harcèlement ou d’une faute de l’institution eu égard à son devoir d’assistance (arrêt du 6 février 2015, BQ/Cour des comptes, T‑7/14 P, EU:T:2015:79, point 49).

328    Il convient de conclure qu’aucune erreur d’appréciation des faits n’a été commise.

iii) Sur les allégations de harcèlement moral fondées sur des faits postérieurs au 1er avril 2013

329    À titre liminaire, il importe de relever que les allégations de harcèlement moral subi par le requérant au sein de l’unité « Gestion budgétaire et financière » de la DG « Interprétation » ont fait l’objet d’une demande d’assistance au titre de l’article 24 du statut, introduite le 23 décembre 2014. Par décision du 12 mars 2015 rejetant cette demande, l’AIPN a conclu que le requérant n’avait pas fourni d’éléments susceptibles de démontrer le harcèlement allégué. Cette décision étant devenue définitive, le requérant ne saurait prétendre, par le présent recours, contester cette conclusion.

330    De plus, sans être lié au sens strict sous l’angle de l’autorité de la chose jugée, dès lors que l’objet des recours rejetés par l’arrêt du 30 janvier 2020, PV/Commission (T‑786/16 et T‑224/18, non publié, EU:T:2020:17), n’est pas identique à celui du présent recours, le Tribunal ne saurait faire totalement abstraction du raisonnement qu’il a développé dans ces deux affaires, qui concernent les mêmes parties et portent, pour l’essentiel, sur une même série d’allégations formulées par le requérant ayant trait à l’existence d’un harcèlement moral subi au sein de l’unité « Gestion budgétaire et financière » de la DG « Interprétation » entre le mois de juillet 2013 et le 1er août 2016 par son chef d’unité, le chef d’unité adjoint et deux anciens collègues de travail.

331    En outre, l’arrêt du 23 mars 2023, PV/Commission (C‑640/20 P, EU:C:2023:232), est venu confirmer l’arrêt du 30 janvier 2020, PV/Commission (T‑786/16 et T‑224/18, non publié, EU:T:2020:17), constatant que ces éléments ne pouvaient pas être considérés comme étant constitutifs de faits de harcèlement moral au sens de l’article 12 bis du statut.

332    Premièrement, le requérant fait valoir que les notes et avis médicaux relatifs à ses absences injustifiées sont constitutifs de harcèlement moral.

333    À cet égard, il y a lieu de constater que l’argument tiré du caractère frauduleux des avis médicaux en cause a été rejeté par l’arrêt du 30 janvier 2020, PV/Commission (T‑786/16 et T‑224/18, non publié, EU:T:2020:17, points 114 et 115). Le requérant ne rapporte pas d’élément nouveau susceptible de remettre en cause les conclusions du Tribunal à ce sujet.

334    S’agissant des convocations du service médical de la Commission, rappelées au point 308 ci-dessus, selon l’article 59, paragraphe 1, troisième alinéa, du statut, le fonctionnaire en congé de maladie peut, à tout moment, être soumis à un contrôle médical organisé par l’institution. Si ce contrôle ne peut avoir lieu pour des raisons imputables à l’intéressé, son absence est considérée comme étant injustifiée à compter du jour où le contrôle était prévu.

335    Il ressort de la jurisprudence que l’obligation des institutions de l’Union d’organiser des contrôles médicaux a nécessairement comme corollaire l’obligation pour les fonctionnaires concernés de se soumettre à ces contrôles ou bien de fournir des certificats desquels il ressort, avec une précision suffisante et de façon concluante, leur impossibilité de se déplacer à cette fin, sous peine de rendre sans effet les dispositions des articles 59 et 60 du statut (arrêt du 8 juillet 1998, Aquilino/Conseil, T‑130/96, EU:T:1998:159, point 83).

336    Dans la mesure où le requérant estimait être en congé de maladie, la Commission était fondée à lui demander de se soumettre à un contrôle afin de s’assurer que son absence était bien justifiée du fait d’une maladie ou d’un accident sur la base des dispositions mentionnées au point 334 ci-dessus.

337    Il importe de noter que le requérant reconnaît ne pas s’être présenté à ces visites.

338    Toutefois, le requérant avance une justification tirée de l’avis de son médecin traitant lui prescrivant qu’il évite tout contact avec son environnement de travail.

339    Cependant, il suffit de constater que le service médical ne fait pas partie de l’environnement de travail du requérant (arrêt du 30 janvier 2020, PV/Commission, T‑786/16 et T‑224/18, non publié, EU:T:2020:17, point 219). Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que l’avis du médecin traitant du requérant lui prescrivant d’éviter tout contact avec son environnement de travail ne constitue pas une justification précise et concluante, au sens de la jurisprudence citée au point 335 ci-dessus, l’autorisant à ne pas se soumettre à ces visites médicales.

340    Dès lors, le fait que le service médical a envoyé plusieurs convocations au requérant afin qu’il se soumette à un contrôle médical résulte uniquement de sa non-comparution et ne révèle pas une conduite abusive de la part du service médical à son égard se manifestant de façon durable, répétitive ou systématique.

341    En outre, en ce qui concerne les avis médicaux des 27 juin et 10 octobre 2014, ils se limitent à constater l’aptitude du requérant à reprendre le travail. Ces deux avis ne présentent ni individuellement ni pris dans leur globalité un caractère abusif ou volontaire susceptible d’être constitutif de faits de harcèlement moral au sens de l’article 12 bis du statut.

342    Deuxièmement, le requérant estime que les rapports d’évaluation pour les années 2013 à 2015 sont constitutifs de faits de harcèlement moral.

343    Il convient de constater que le requérant a contesté ces rapports d’évaluation, ce qui a donné lieu aux décisions de rejet des réclamations R/1100/14, du 12 mars 2015, R/313/15, du 11 août 2015, et R/342/16, du 21 septembre 2016.

344    S’agissant des commentaires présents dans ces rapports, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le rapport d’évaluation exprime l’opinion librement formulée des évaluateurs. Il s’ensuit qu’une certaine subjectivité est inhérente aux appréciations dudit rapport, comme à toute opinion personnelle (voir arrêt du 8 novembre 2018, QB/BCE, T‑827/16, EU:T:2018:756, point 96 et jurisprudence citée).

345    De plus, des notes et des appréciations, même négatives, contenues dans un rapport de notation ou d’évaluation ne sauraient, en tant que telles, être considérées comme étant des indices du fait que le rapport aurait été établi dans un but de harcèlement moral (voir arrêt du 12 janvier 2022, MW/Parlement, T‑630/20, non publié, EU:T:2022:3, point 115 et jurisprudence citée).

346    En l’espèce, les rapports en cause se contentent de faire état des appréciations portées sur le travail et le comportement du requérant par ses évaluateurs en s’appuyant sur des faits objectifs. Dès lors, ils n’établissent pas un commencement de preuve de faits constitutifs de harcèlement moral au sens de l’article 12 bis du statut à la lumière de la jurisprudence rappelée aux points 324, 344 et 345 ci-dessus.

347    Troisièmement, en ce qui concerne la suppression de jours de congé, les décisions de retenue sur salaires et les lettres de dettes correspondantes, le requérant n’explique pas en quoi ces décisions seraient constitutives de harcèlement moral, d’autant plus qu’il résulte de l’arrêt du 30 janvier 2020, PV/Commission (T‑786/16 et T‑224/18, non publié, EU:T:2020:17, points 214 à 221), qu’elles n’étaient pas la conséquence d’un quelconque harcèlement, mais bien une correcte application des articles 59 et 60 du statut.

348    Quatrièmement, le requérant fait valoir que la procédure disciplinaire CMS 13/087 et la première décision de révocation font partie intégrante du harcèlement moral qu’il a subi, dans la mesure où la procédure a été menée exclusivement à charge et a abouti à une révocation arbitraire.

349    Il y a lieu de relever que, le 3 octobre 2016, le requérant a introduit la réclamation R/510/16 contre la première décision de révocation, qui a été rejetée par une décision de l’AIPN du 2 février 2017.

350    En l’espèce, le requérant se borne à faire état de son opinion sur le contenu du dossier disciplinaire, sans apporter d’éléments de preuve au soutien de ses affirmations.

351    Par ailleurs, il soutient que ses absences étaient justifiées par la remise de certificats médicaux. Néanmoins, ainsi qu’il découle de l’arrêt du 30 janvier 2020, PV/Commission (T‑786/16 et T‑224/18, non publié, EU:T:2020:17, points 214 à 220), l’AIPN a dûment constaté, conformément à l’article 59, paragraphe 1, troisième alinéa, du statut, que le requérant était dans une situation d’absence injustifiée.

352    Il en résulte que ni la procédure disciplinaire CMS 13/087 ni la première décision de révocation ne sont constitutives de faits de harcèlement moral.

353    Cinquièmement, le requérant fait valoir que l’absence de rétablissement de sa situation financière à la suite du retrait de la première décision de révocation le 24 juillet 2017 est de nature à établir des faits constitutifs de harcèlement moral, dans la mesure où sa dette, résultant du caractère irrégulier de ces absences, n’avait plus aucun fondement juridique.

354    Il y a lieu de constater que, ainsi qu’il ressort des points 131 et 132 ci-dessus, à la suite de la décision de retrait, l’AIPN a versé la somme de 9 550 euros au requérant.

355    Or, ainsi qu’il ressort de l’arrêt du 23 mars 2023, PV/Commission (C‑640/20 P, EU:C:2023:232, point 207), le caractère irrégulier des absences reprochées au requérant ne constituait pas l’un des effets de la première décision de révocation.

356    Dès lors, le retrait de cette décision ne saurait avoir pour effet de justifier ces absences. L’AIPN était donc fondée à opérer une compensation entre les dettes du requérant envers la Commission, résultant de ses absences irrégulières dûment constatées, et celles de la Commission envers le requérant.

357    Il en résulte que le requérant ne rapporte pas la preuve de faits constitutifs de harcèlement moral en ce qui concerne la compensation financière effectuée par la Commission à la suite de l’adoption de la décision de retrait.

358    Sixièmement, s’agissant des deux témoignages invoqués par le requérant, recueillis les 27 novembre et 4 décembre 2017, il convient de relever que ceux-ci font état de l’existence d’une atmosphère de travail tendue au sein de l’unité à laquelle était affecté le requérant qui serait, au moins en partie, causée par le comportement de la cheffe d’unité. Les remarques formulées par cette dernière à l’égard du travail des membres du personnel de l’unité seraient parfois difficilement comprises, voire celles-ci s’avéreraient déstabilisantes pour certains d’entre eux. Toutefois, ces témoignages font également état de comportements inappropriés du requérant à certaines occasions et de ses difficultés à travailler en équipe, qui auraient également contribué à la dégradation de l’atmosphère de travail.

359    Il en résulte que ces témoignages ne permettent pas de faire état d’un comportement inapproprié de la part de l’ancienne cheffe d’unité du requérant relevant de faits constitutifs de harcèlement moral au sens de la jurisprudence rappelée aux points 313 et 314 ci-dessus. Ils dénotent seulement des relations potentiellement conflictuelles au sein de l’unité, sans qu’elles soient de nature à porter atteinte à la personnalité, à la dignité ou à l’intégrité physique ou psychique du requérant au sens de l’article 12 bis du statut.

iv)    Conclusion sur l’existence de faits de harcèlement moral

360    Ainsi, aucun des éléments rapportés par le requérant n’est de nature à constituer un fait constitutif de harcèlement moral au sens de l’article 12 bis du statut.

361    Il y a lieu également de constater que les éléments rapportés par le requérant ne sont pas non plus de nature à avoir eu pour effet de porter atteinte à sa personnalité, à sa dignité ou à son intégrité physique ou psychique lorsqu’ils sont appréciés dans leur ensemble, de manière contextuelle et en prenant en considération la durée dans laquelle ils s’inscrivent (voir point 316 ci-dessus). Certains comportements, à les supposer établis, attestent d’une relation de travail parfois difficile ne correspondant pas aux attentes du requérant. Toutefois, une telle situation ne peut, en l’espèce, être qualifiée de harcèlement moral. Par conséquent, même prises globalement et non isolément, les affirmations du requérant ne permettent pas d’établir l’existence d’un comportement constitutif de harcèlement moral à son égard.

362    De la même manière, les éléments soumis par le requérant ne permettent pas de constater que ses conditions de travail méconnaissaient sa santé et sa dignité au sens de l’article 31, paragraphe 1, de la Charte ou les normes de santé et de sécurité appropriées conformément à l’article 1er sexies, paragraphe 2, du statut.

363    Ainsi, l’argumentation du requérant n’est pas susceptible de remettre en cause l’appréciation réalisée par l’AIPN dans la décision de rejet de la réclamation R/71/20.

364    Il convient, en tout état de cause, d’écarter la première branche du premier moyen.

3)      Sur la deuxième branche du premier moyen, tirée de la poursuite du harcèlement moral par la procédure disciplinaire CMS 17/025 et la décision de réintégration du requérant au sein de la DG « Interprétation »

365    Le requérant fait valoir que tant la procédure disciplinaire CMS 17/025 que la décision de le réintégrer au sein de la DG « Interprétation » sont constitutives de faits de harcèlement moral au sens de l’article 12 bis du statut.

366    La Commission conteste les arguments du requérant.

367    Il y a lieu de constater que, à la suite de la décision de retrait, le requérant a été informé, le 24 juillet 2017, de sa réintégration à compter du 16 septembre 2017 et, le 9 août 2017, de sa réaffectation le 18 septembre 2017 au sein de la même direction générale, mais dans une unité différente.

368    De plus, il ressort des éléments rappelés aux points 319 à 361 ci-dessus que le requérant n’est pas parvenu à établir l’existence du harcèlement moral allégué, ni, a fortiori, à démontrer que la seconde décision de révocation serait entachée d’illégalité pour cause d’un tel harcèlement moral à son égard.

369    En outre, en ce qui concerne l’allégation selon laquelle la décision de réintégration du requérant au sein de la même direction générale serait constitutive de harcèlement moral, il convient de rappeler que, compte tenu du large pouvoir d’appréciation dont jouissent les institutions dans l’organisation de leurs services, ni des décisions administratives sur des questions relevant de l’organisation des services, même si celles-ci sont difficiles à accepter, ni des désaccords avec l’administration sur ces mêmes questions ne sauraient à eux seuls prouver l’existence d’un harcèlement moral (voir arrêt du 13 juillet 2018, SQ/BEI, T‑377/17, EU:T:2018:478, point 108 et jurisprudence citée).

370    Or, compte tenu du constat rappelé au point 368 ci-dessus selon lequel le requérant n’est pas parvenu à établir l’existence d’un harcèlement moral à son égard, son désaccord avec l’administration quant à sa réintégration au sein de l’unité « Systèmes informatiques et de conférence » de la DG « Interprétation » ne constitue pas en tant que tel un commencement de preuve d’un harcèlement moral.

371    Par ailleurs, il convient de relever que la décision de réaffectation du requérant a fait l’objet de la réclamation R/413/17, que l’AIPN a rejeté le 15 septembre 2017 et qui a été confirmée par l’arrêt du 30 janvier 2020, PV/Commission (T‑786/16 et T‑224/18, non publié, EU:T:2020:17, points 166 et 167), lequel constate que rien ne permet d’affirmer que la réintégration du requérant serait constitutive d’un harcèlement moral. Cette décision étant devenue définitive, le requérant ne saurait prétendre, par le présent recours, contester cette conclusion en l’absence d’éléments nouveaux.

372    Il convient d’écarter la deuxième branche du premier moyen.

4)      Sur la troisième branche du premier moyen, tirée des fautes dolosives commises par le Tribunal

373    Le requérant fait valoir que le Tribunal aurait commis des erreurs de droit et des « fautes dolosives » dans son arrêt du 30 janvier 2020, PV/Commission (T‑786/16 et T‑224/18, non publié, EU:T:2020:17).

374    Sans formellement soulever une exception d’incompétence, la Commission considère que les critiques formulées par le requérant relèvent du pourvoi et que le Tribunal n’a pas compétence pour les examiner. Elle conteste également le bien-fondé des arguments du requérant.

375    Il importe de rappeler que, selon l’article 256, paragraphe 1, second alinéa, TFUE, les décisions rendues par le Tribunal peuvent faire l’objet d’un pourvoi devant la Cour, limité aux questions de droit, « dans les conditions et limites prévues par le statut [de la Cour de justice de l’Union européenne] ».

376    Ainsi, l’article 56, premier alinéa, de ce statut prévoit qu’un pourvoi peut être formé devant la Cour, dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision attaquée, contre les décisions du Tribunal mettant fin à l’instance, ainsi que contre les décisions de ce dernier qui tranchent partiellement le litige au fond ou qui mettent fin à un incident de procédure portant sur une exception d’incompétence ou d’irrecevabilité.

377    En l’espèce, les arguments avancés par le requérant visent à contester, en substance, l’arrêt du 30 janvier 2020, PV/Commission (T‑786/16 et T‑224/18, non publié, EU:T:2020:17), qui constitue une décision du Tribunal mettant fin à une instance.

378    Or, ainsi qu’il ressort des points 375 et 376 ci-dessus, force est de relever que le Tribunal ne saurait être compétent pour statuer sur un pourvoi formé contre une décision rendue par l’une de ses formations de jugement ou par l’un de ses membres.

379    En tout état de cause, il y a lieu de rappeler que l’arrêt du 30 janvier 2020, PV/Commission (T‑786/16 et T‑224/18, non publié, EU:T:2020:17), a été contesté par le requérant dans le cadre d’un pourvoi qui a été rejeté par l’arrêt du 23 mars 2023, PV/Commission (C‑640/20 P, EU:C:2023:232).

380    Il convient d’écarter la troisième branche.

381    Partant, le premier moyen dans son ensemble doit être écarté.

g)      Sur le neuvième moyen, tiré de la violation du principe fraus omnia corrumpit, de l’article 41, paragraphe 1, de la Charte et du principe de bonne administration au motif de l’utilisation d’une fausse signature dans la décision du 15 septembre 2016

382    Le requérant fait valoir que la décision du 15 septembre 2016 est entachée d’illégalité au motif qu’elle contient une fausse signature. Selon lui, l’application du principe fraus omnia corrumpit, auquel aucun délai de forclusion ne peut être opposé, permet de remettre en cause l’ensemble de la procédure disciplinaire CMS 17/025. Le requérant estime également que l’application de ce principe découle du principe de bonne administration visé à l’article 41, paragraphe 1, de la Charte.

383    La Commission conteste les arguments du requérant.

384    À titre liminaire, il y a lieu de constater que le requérant ne conteste pas la tardiveté de son recours à l’encontre de la décision du 15 septembre 2016.

385    Cependant, selon lui, dans la mesure où la Commission a commis un faux en écriture dans cette décision portant gravement atteinte à l’ordre juridique de l’Union, aucun délai de forclusion ne peut être appliqué.

386    Il y a donc lieu d’examiner les arguments du requérant à la lumière de la jurisprudence rappelée aux points 86, 87, 90 et 91 ci-dessus sur les irrégularités graves affectant les actes de l’Union et, notamment, l’interdiction de la fraude.

387    En l’espèce, ainsi qu’il a été indiqué au point 92 ci-dessus, il y a lieu de constater que ni l’acte frauduleux ni l’intention frauduleuse n’ont été établis s’agissant de la signature de la décision du 15 septembre 2016. En effet, tant la matérialité de la fausse signature que la volonté de commettre un acte illicite ne sont constatées à suffisance de droit.

388    Interrogé par le Tribunal, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure adoptées au titre de l’article 89 du règlement de procédure, sur l’existence d’une décision définitive portant sur l’existence d’une fausse signature, le requérant a répondu qu’aucune condamnation pénale n’était intervenue dans le cadre des procédures ouvertes devant les juridictions belges à ce sujet.

389    Partant, le requérant n’a pas démontré que la décision du 15 septembre 2016 était affectée d’un vice d’une gravité à ce point évidente qu’elle doive être regardée comme étant juridiquement inexistante au sens de la jurisprudence citée au point 386 ci-dessus.

390    De plus, en l’absence de fraude, il n’y a pas lieu de se prononcer sur la violation du principe de bonne administration qui en résulterait.

391    Il convient d’écarter le neuvième moyen.

h)      Sur le cinquième moyen, tiré de l’absence d’établissement des faits dans le cadre de la procédure disciplinaire résultant de la saisie pénale du dossier disciplinaire

392    Le requérant fait valoir que la saisie pénale du dossier disciplinaire de la procédure CMS 17/025, par un juge d’instruction belge, a une influence sur l’établissement des faits examinés dans le cadre de ladite procédure. Selon lui, cette saisine indique que la seconde décision de révocation est fondée sur des éléments de preuve qui constituent en réalité des faux intellectuels, c’est-à-dire des documents reprenant des faits ou des affirmations qui constituent une altération de la vérité, afin d’établir son aptitude au travail et ainsi lui reprocher des absences irrégulières. Il s’agirait de notes et d’avis médicaux visant à établir l’aptitude au travail du requérant par le service médical de la Commission et dans lesquels des erreurs auraient été volontairement commises. Le requérant estime que ces documents doivent être considérés comme étant inexistants, car ils portent une atteinte grave à l’ordre juridique de l’Union. De plus, selon lui, aucun délai de forclusion ne peut être opposé à une telle action.

393    La Commission conteste les arguments du requérant.

394    En premier lieu, il convient de rappeler que, ainsi que la Cour l’a mentionné dans l’arrêt du 23 mars 2023, PV/Commission (C‑640/20 P, EU:C:2023:232, point 55), par leur nature, des actes qui ne comportent pas une constatation définitive de faits constitutifs de faux intellectuel ne permettent pas, par eux-mêmes, d’établir ces faits.

395    En l’espèce, aucun des faits que le requérant a qualifiés de faux intellectuel n’a été caractérisé en tant que tel, ni n’a fait l’objet d’une condamnation pénale par une juridiction belge.

396    En effet, il y a lieu de constater que la preuve de la prétendue saisie est une copie d’un procès-verbal d’audition du requérant qui retranscrit ses propres déclarations à l’occasion de la remise volontaire des documents. Un tel document n’est pas de nature à démontrer l’existence d’une condamnation pénale pour faux en écritures devant les juridictions belges, mais uniquement la transmission par le requérant des éléments du dossier afin d’étayer le contenu de sa plainte.

397    De plus, le requérant a confirmé au Tribunal qu’aucune condamnation pénale n’était intervenue au niveau national (voir point 388 ci-dessus). Il a également reconnu qu’une procédure pour faux en écriture concernant les notes de non-comparution avait fait l’objet d’une ordonnance de non-lieu à la date du 22 mars 2022.

398    Il en résulte que la simple allégation selon laquelle des infractions pénales ont été commises dans le cadre de l’adoption des décisions ayant servi à établir les faits au cours de la procédure disciplinaire et que des instructions pénales ont été ouvertes concernant ces infractions, dans le cadre desquelles des auditions ont eu lieu ou des documents ont été transmis, n’est pas suffisante pour démontrer que de telles infractions ont été commises lors de l’adoption de ces décisions (voir, en ce sens, arrêt du 23 mars 2023, PV/Commission, C‑640/20 P, EU:C:2023:232, point 72).

399    Dans la mesure où l’argumentation du requérant se fonde sur de telles allégations non étayées, elle doit être écartée.

400    En deuxième lieu, il ressort de l’arrêt du 30 janvier 2020, PV/Commission (T‑786/16 et T‑224/18, non publié, EU:T:2020:17, point 115), confirmé par l’arrêt du 23 mars 2023, PV/Commission (C‑640/20 P, EU:C:2023:232, point 118), que les irrégularités alléguées, en ce qui concerne les notes de non-comparution et les avis médicaux, ne présentent pas une gravité si évidente qu’elle justifie que ces actes soient déclarés inexistants conformément à la jurisprudence rappelée aux points 86 et 87 ci-dessus.

401    En troisième lieu, à supposer que le requérant invoque l’existence de poursuites pénales parallèles, il convient de relever que cette situation, prévue à l’article 25 de l’annexe IX du statut, vise celle d’un fonctionnaire à l’égard duquel des poursuites pénales sont parallèlement engagées pour les faits visés par la procédure disciplinaire et non celle d’un fonctionnaire ayant engagé des poursuites pénales à l’égard de l’un de ses collègues ou d’une institution (arrêt du 11 septembre 2013, de Brito Sequeira Carvalho/Commission, F‑126/11, EU:F:2013:126, point 113).

402    En l’espèce, il y a lieu de constater que le requérant ne faisait pas l’objet de la procédure pénale à laquelle il fait allusion, mais était à l’origine de celle-ci, de sorte que l’article 25 de l’annexe IX du statut ne lui est pas applicable.

403    Le cinquième moyen doit être écarté.

i)      Sur le sixième moyen, tiré de la violation de l’article 15 de la Charte

404    Le requérant fait valoir que, dans la seconde décision de révocation, l’AIPN a méconnu l’article 15 de la Charte en considérant qu’il était en situation d’absence irrégulière à partir du 18 septembre 2017 à la suite de la décision de retrait. En effet, le requérant estime que, d’une part, il n’était plus soumis à aucune obligation statutaire à partir de la première décision de révocation, ce qui lui a permis d’accepter un emploi dans le secteur privé le 26 juin 2017. D’autre part, la décision de retrait n’aurait pas rétabli la situation juridique antérieure, mais aurait créé une nouvelle relation de travail à laquelle il n’aurait jamais consenti.

405    La Commission conteste les arguments du requérant.

406    L’article 15, paragraphe 1, de la Charte consacre le droit de travailler et d’exercer une profession librement choisie ou acceptée. En outre, le libre exercice d’une activité professionnelle fait partie des principes généraux du droit de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 29 mars 2012, Interseroh Scrap and Metals Trading, C‑1/11, EU:C:2012:194, point 43 et jurisprudence citée).

407    Le requérant part de la prémisse que sa réintégration au sein de la DG « Interprétation », à la suite de la décision de retrait, se serait traduite par la création d’une nouvelle relation de travail nécessitant son consentement et non par le rétablissement de la relation de travail antérieure à la première décision de révocation.

408    Or, il y a lieu de rappeler que le retrait d’un acte implique la disparition des effets de cet acte (arrêt du 23 mars 2023, PV/Commission, C‑640/20 P, EU:C:2023:232, point 216).

409    Ainsi, à la suite de la décision de retrait, le requérant a été réintégré dans ses fonctions avec une nouvelle affectation. Il était donc, à compter de cette date, un fonctionnaire à part entière avec les droits et les obligations inhérentes à ce statut.

410    De plus, dans un courriel du 6 août 2017 adressé à la directrice générale des ressources humaines, le requérant a lui-même reconnu que, par l’effet de la décision de retrait, la rupture de son lien statutaire avec la Commission était censée n’avoir jamais existé et il en a déduit qu’il avait « continué à faire partie du personnel actif de [la Commission] de manière ininterrompue ».

411    Dès lors, sa réintégration n’ayant fait que rétablir le requérant dans ses droits et ses attributions, elle ne peut être qualifiée de nouvelle relation de travail.

412    Il en résulte que le requérant ne saurait faire valoir la nécessité d’exprimer à nouveau son consentement à cette relation de travail sur le fondement de l’article 15 de la Charte, dans la mesure où il y avait déjà librement consenti lors de son entrée en fonction le 16 juillet 2007 (voir point 2 ci-dessus).

413    Par ailleurs, il y a lieu de relever, d’une part, que le requérant a sollicité le retrait de la première décision de révocation par un courrier du 20 avril 2017 en s’appuyant sur l’arrêt du 14 février 2017, Kerstens/Commission (T‑270/16 P, non publié, EU:T:2017:74). Il ne pouvait alors ignorer les conséquences potentielles de cette demande sur sa situation professionnelle. D’autre part, le requérant n’a pas manifesté son refus de se voir rétabli dans ses droits et ses attributions, mais a contesté son affectation tant dans son courriel du 9 août que dans celui du 20 août 2017. À ces deux occasions, il a indiqué qu’il désirait bénéficier, au titre de l’article 37, sous a), du statut, d’un détachement dans l’intérêt du service auprès d’un syndicat.

414    Or, le désaccord entre la Commission et le requérant quant à son affectation n’est pas de nature à remettre en cause la volonté de ce dernier de réintégrer l’institution en tant que fonctionnaire.

415    De ce fait, en considérant qu’il était en situation d’absence irrégulière à partir du 18 septembre 2017, la décision de révocation n’a pas méconnu l’article 15 de la Charte.

416    Le sixième moyen doit donc être écarté.

j)      Sur le troisième moyen, tiré de la violation du principe de l’exception d’inexécution et du principe de légalité

417    Le requérant fait valoir qu’il était en droit de refuser sa réintégration au sein de la Commission en vertu du principe de l’exception d’inexécution à la suite, d’une part, de la décision de la Commission de suspendre son salaire à compter du 1er octobre 2017 et, d’autre part, de l’absence de satisfaction de l’ensemble de ses prétentions pécuniaires à la suite de la décision de retrait. Selon lui, la décision de retrait entraîne également la disparition de la constatation de ses absences irrégulières et impose au PMO de lui rembourser la somme de 46 380, 88 euros correspondant à des arriérés de salaires.

418    La Commission conteste les arguments du requérant.

419    Il y a lieu de rappeler que la relation de travail entre un fonctionnaire et son institution est de nature statutaire (arrêt du 23 mars 2023, PV/Commission, C‑640/20 P, EU:C:2023:232, point 146). Elle est, par conséquent, régie par le droit de l’Union.

420    Dans ces conditions, en l’absence de disposition de droit de l’Union prévoyant que le principe de l’exception d’inexécution s’applique à la relation de travail entre un fonctionnaire et son institution, le requérant n’est pas fondé à s’en prévaloir pour refuser de réintégrer la Commission à la suite de la décision de retrait (voir, en ce sens, arrêt du 23 mars 2023, PV/Commission, C‑640/20 P, EU:C:2023:232, points 145 à 149).

421    En tout état de cause, il ressort de l’analyse des premier et deuxième moyens que, tout d’abord, le harcèlement moral que le requérant allègue avoir subi au sein de la DG « Interprétation » avant sa révocation n’a pas été établi (voir points 360 et 361 ci-dessus), ensuite, le requérant n’a pas été réaffecté à la même unité que celle où il travaillait avant sa révocation (voir point 367 ci-dessus) et, enfin, les conséquences financières de sa révocation ont été neutralisées par la Commission (voir point 354 ci-dessus).

422    Le troisième moyen doit donc être écarté, sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur la chronologie des évènements.

423    Il ressort de tout ce qui précède que les conclusions en annulation doivent être écartées dans leur intégralité.

D.      Sur les conclusions indemnitaires

424    Le requérant fait valoir que les illégalités commises par la Commission sont de nature à engager la responsabilité extracontractuelle de l’Union au titre des articles 268 et 340 TFUE. Il mentionne également la compétence de pleine juridiction du Tribunal au titre de l’article 91 du statut dans les litiges de caractère pécuniaire entre l’Union et l’un de ses fonctionnaires. Selon lui, ces illégalités se déduisent des moyens avancés à l’appui des conclusions en annulation.

425    D’une part, le requérant estime avoir subi plusieurs préjudices moraux. Le harcèlement dont il aurait été victime ainsi que l’ensemble des actes attaqués auraient occasionné une perturbation de sa vie personnelle et professionnelle ainsi que des problèmes de santé. Selon lui, l’annulation des actes attaqués ne constitue pas une réparation suffisante de ces préjudices. Il évalue ses préjudices moraux à la somme de 146 000 euros, se répartissant entre 50 000 euros pour la procédure disciplinaire CMS 13/087, 50 000 euros pour la procédure disciplinaire CMS 17/025, 18 000 euros pour le rejet de sa demande d’assistance pour cause de harcèlement, 8 000 euros à la suite de l’utilisation d’une fausse signature et 20 000 euros pour des fautes commises par la Commission dans le calcul des salaires qui lui étaient dus.

426    D’autre part, le requérant estime avoir subi plusieurs préjudices matériels. Ces préjudices, qu’il évalue à la somme de 359 481,29 euros, seraient constitués des retenues irrégulières sur ses salaires de mars 2015 à juillet 2016 pour un montant de 58 837,20 euros, des salaires non perçus entre le 1er août 2016 et le 15 septembre 2017 pour un montant de 40 798,94 euros et entre le 1er octobre 2017 et le 31 décembre 2020 pour un montant de 159 861,39 euros, des allocations de chômage à rembourser à l’Office national de l’emploi (ONEM, Belgique) pour un montant de 12 451,86 euros, du remboursement de ses frais de défense à la suite du retrait de la première décision de révocation pour un montant de 1 689,76 euros, de l’atteinte à la protection de ses données personnelles par la Commission pour un montant de 10 420 euros et de l’absence de progression dans sa carrière pendant 13 ans et 5 mois pour un montant de 75 422,14 euros.

427    La Commission conclut au rejet des conclusions indemnitaires invoquées dans la requête comme étant non fondées.

428    À cet égard, il convient de rappeler que les conclusions tendant à la réparation d’un préjudice matériel ou moral doivent être rejetées lorsqu’elles présentent un lien étroit avec les conclusions en annulation qui ont, elles-mêmes, été rejetées comme étant irrecevables ou non fondées (voir arrêt du 19 décembre 2019, ZQ/Commission, T‑647/18, non publié, EU:T:2019:884, point 202 et jurisprudence citée).

429    En l’espèce, le requérant estime que les illégalités ayant causé les préjudices qu’il invoque, rappelés aux points 425 et 426 ci-dessus, se confondent avec les moyens soulevés à l’appui des conclusions en annulation.

430    Dans la mesure où, ainsi que le reconnaît le requérant lui-même, les conclusions indemnitaires sont étroitement liées aux conclusions en annulation, elles doivent être rejetées.

431    Par ailleurs, le requérant demande la réparation du préjudice matériel, causé par la violation de l’article 8 du règlement (CE) no 45/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 18 décembre 2000, relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel par les institutions et organes communautaires et à la libre circulation de ces données (JO 2001, L 8, p. 1), lequel n’est pas étroitement lié aux conclusions en annulation.

432    À cet égard, selon une jurisprudence constante dans le domaine de la fonction publique, l’engagement de la responsabilité de l’Union est subordonné à la réunion d’un ensemble de conditions, à savoir l’illégalité du comportement reproché à l’institution, la réalité du dommage et l’existence d’un lien de causalité entre le comportement allégué et le préjudice invoqué. Ces trois conditions sont cumulatives, ce qui implique que, dès lors que l’une d’elles n’est pas remplie, la responsabilité de l’Union ne peut être retenue (voir arrêt du 8 novembre 2018, QB/BCE, T‑827/16, EU:T:2018:756, point 117 et jurisprudence citée).

433    Il s’ensuit que, même dans l’hypothèse où une faute d’une institution ou d’un organe ou organisme de l’Union serait établie, la responsabilité de l’Union ne peut être effectivement engagée que si, notamment, la partie requérante est parvenue à démontrer la réalité de son préjudice (arrêt du 8 novembre 2018, QB/BCE, T‑827/16, EU:T:2018:756, point 118).

434    De plus, il ressort de la jurisprudence que l’Union ne peut être tenue pour responsable que du préjudice qui découle de manière suffisamment directe du comportement irrégulier de l’institution concernée. Il incombe à la partie requérante d’établir que, sans la faute commise, le préjudice allégué ne se serait pas produit et que cette faute est la cause déterminante du préjudice subi [voir arrêt du 3 juillet 2019, PT/BEI, T‑573/16, EU:T:2019:481, point 433 (non publié) et jurisprudence citée].

435    En l’espèce, il convient de relever que le requérant n’établit nullement l’existence d’un préjudice résultant de la violation alléguée de l’article 8 du règlement no 45/2001 par la Commission dans le cadre du traitement de ses données à caractère personnel. Il se borne à mentionner le montant de ses frais d’avocat résultant d’une procédure devant les juridictions belges qui n’est pas directement liée à cette violation. Or, il y a lieu de constater que le requérant ne développe aucune argumentation tendant à démontrer l’existence d’un lien de causalité entre ces frais d’avocat et la prétendue illégalité commise par la Commission.

436    Ainsi, et eu égard au caractère cumulatif des conditions d’engagement de la responsabilité non contractuelle des institutions, des organes et des organismes de l’Union, il convient de rejeter la demande indemnitaire portant sur le préjudice causé par la violation du règlement no 45/2001.

437    Compte tenu de l’ensemble de ce qui précède, il y a lieu de rejeter les conclusions indemnitaires et, par conséquent, le recours dans son intégralité.

IV.    Sur les dépens

438    Aux termes de l’article 149, paragraphe 5, du règlement de procédure, lorsque le bénéficiaire de l’aide juridictionnelle succombe, le Tribunal peut, si l’équité l’exige, en statuant sur les dépens dans la décision mettant fin à l’instance, décider qu’une ou plusieurs autres parties supporteront leurs propres dépens ou que ceux-ci seront, totalement ou en partie, pris en charge par la caisse du Tribunal au titre de l’aide juridictionnelle.

439    La Commission a, dans ses conclusions, expressément demandé que le requérant soit condamné aux dépens en faisant valoir qu’aucune raison d’équité ne justifiait la répartition des dépens.

440    En l’espèce, le requérant étant bénéficiaire de l’aide juridictionnelle et ayant succombé, l’équité exige que chaque partie à la présente procédure supporte ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Chaque partie supportera ses propres dépens.

Truchot

Frendo

Sampol Pucurull

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 19 juin 2024.

Signatures


Table des matières


I. Antécédents du litige

A. Sur les faits ayant conduit à la première décision de révocation et ses suites

B. Sur les faits ayant conduit à la seconde décision de révocation

C. Sur l’arrêt du 30 janvier 2020, PV/Commission (T786/16 et T224/18), et ses suites

D. Sur les faits résultant de la seconde décision de révocation

II. Conclusions des parties

III. En droit

A. Sur la recevabilité du document complémentaire

1. Sur la recevabilité des nouveaux arguments et des nouvelles conclusions indemnitaires

2. Sur la recevabilité de la nouvelle offre de preuve

B. Sur l’objet du recours

C. Sur les conclusions en annulation

1. Sur la recevabilité des troisième et quatrième chefs de conclusions

a) Sur la première fin de non-recevoir, tirée du caractère confirmatif de la décision de rejet de la réclamation R/519/19

b) Sur la seconde fin de non-recevoir, tirée du caractère partiellement confirmatif et partiellement prématuré de la réclamation R/537/19

1) Sur le caractère confirmatif de la décision de rejet de la réclamation R/537/19 en ce qu’elle a pour objet la lettre du 21 septembre 2016

2) Sur le caractère prématuré de la réclamation R/537/19 en ce qu’elle a pour objet le calcul des droits à pension d’ancienneté du requérant

2. Sur le fond

a) Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 50 de la Charte, de l’article 9, paragraphe 3, de l’annexe IX du statut et du principe ne bis in idem

b) Sur le quatrième moyen, tiré de la violation de l’article 48, paragraphe 1, de la Charte, de l’article 3, paragraphe 2, des DGE de 2019 ainsi que de la violation du principe de présomption d’innocence et des droits de la défense

1) Sur la première branche du quatrième moyen, tirée de la violation du principe de présomption d’innocence

i) Observations liminaires

ii) Sur le premier grief de la première branche, tiré de la réalisation d’une enquête à charge

iii) Sur le second grief de la première branche, tiré de l’opinion exprimée par l’AIPN sur la culpabilité du requérant dans son rapport au conseil de discipline

2) Sur la seconde branche du quatrième moyen

c) Sur le septième moyen, tiré de la violation de l’article 41, paragraphe 1, de la Charte, des principes d’indépendance et d’impartialité ainsi que du principe d’égalité des armes

1) Sur la première branche du septième moyen, tirée d’une violation des principes d’indépendance et d’impartialité

i) Considérations liminaires

ii) Sur le premier grief de la première branche, tiré de l’absence d’impartialité subjective

iii) Sur le second grief de la première branche, tiré de l’absence d’impartialité objective

2) Sur la seconde branche du septième moyen, tirée de la violation du principe d’égalité des armes

d) Sur le huitième moyen, tiré de la violation de l’article 41, paragraphe 1, de la Charte en raison d’un dépassement du délai raisonnable de la procédure disciplinaire

1) Considérations liminaires

2) Sur le respect du délai raisonnable quant à l’ouverture de la procédure administrative, puis disciplinaire et à la conduite de ses différentes étapes

e) Sur le moyen, soulevé au stade de la réplique, tiré de la violation du principe de non-rétroactivité des décisions administratives et du principe de sécurité juridique

f) Sur le premier moyen, tiré de la violation des articles 1er, 3, 4, de l’article 31, paragraphe 1, et de l’article 41, paragraphe 2, de la Charte ainsi que de l’article 1er sexies, paragraphe 2, et de l’article 12 bis du statut

1) Sur la quatrième branche, tirée du non-respect du droit d’être entendu

2) Sur la première branche, tirée de l’existence de faits de harcèlement moral à l’encontre du requérant

i) Considérations liminaires

ii) Sur les allégations de harcèlement moral fondées sur des faits antérieurs au 1er avril 2013

iii) Sur les allégations de harcèlement moral fondées sur des faits postérieurs au 1er avril 2013

iv) Conclusion sur l’existence de faits de harcèlement moral

3) Sur la deuxième branche du premier moyen, tirée de la poursuite du harcèlement moral par la procédure disciplinaire CMS 17/025 et la décision de réintégration du requérant au sein de la DG « Interprétation »

4) Sur la troisième branche du premier moyen, tirée des fautes dolosives commises par le Tribunal

g) Sur le neuvième moyen, tiré de la violation du principe fraus omnia corrumpit, de l’article 41, paragraphe 1, de la Charte et du principe de bonne administration au motif de l’utilisation d’une fausse signature dans la décision du 15 septembre 2016

h) Sur le cinquième moyen, tiré de l’absence d’établissement des faits dans le cadre de la procédure disciplinaire résultant de la saisie pénale du dossier disciplinaire

i) Sur le sixième moyen, tiré de la violation de l’article 15 de la Charte

j) Sur le troisième moyen, tiré de la violation du principe de l’exception d’inexécution et du principe de légalité

D. Sur les conclusions indemnitaires

IV. Sur les dépens


*      Langue de procédure : le français.