Language of document : ECLI:EU:T:2019:516

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

12 juillet 2019 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure de nullité – Marque de l’Union européenne figurative mobile.ro – Marque nationale figurative antérieure mobile – Usage sérieux de la marque antérieure – Article 18 du règlement (UE) 2017/1001 – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑412/18,

mobile.de GmbH, établie à Dreilinden (Allemagne), représentée par Me T. Lührig, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par MM. J. Crespo Carrillo et H. O’Neill, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Droujestvo S Ogranichena Otgovornost « Rezon », établie à Sofia (Bulgarie), représentée par Mes M. Yordanova-Harizanova et V. Grigorova, avocats,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’EUIPO du 29 mars 2018 (affaire R 111/2015‑1), relative à une procédure de nullité entre Droujestvo S Ogranichena Otgovornost « Rezon » et mobile.de,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de M. D. Gratsias (rapporteur), président, Mme I. Labucka et M. I. Ulloa Rubio, juges,

greffier : M. I. Dragan, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 2 juillet 2018,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 4 décembre 2018,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 22 novembre 2018,

à la suite de l’audience du 3 avril 2019,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 2 juillet 2008, la requérante, mobile.de GmbH, a déposé une demande de marque de l’Union européenne auprès de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié, lui-même remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif reproduit ci-après :

Image not found


3        Les services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent, notamment, des classes 35 et 42 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante :

–        classe 35 : « Collecte d’informations » ;

–        classe 42 : « Fourniture d’une plateforme Internet pour l’achat et la vente de véhicules, remorques de véhicules et accessoires de véhicules ».

4        La marque contestée a été enregistrée le 26 janvier 2010.

5        Le 16 mai 2013, l’intervenante, Droujestvo S Ogranichena Otgovornost « Rezon », a introduit auprès de l’EUIPO une demande de nullité de la marque contestée pour les services visés au point 3 ci-dessus.

6        À l’appui de sa demande en nullité, l’intervenante a invoqué la marque bulgare figurative enregistrée le 20 avril 2005 (ci-après la « marque nationale antérieure ») et reproduite ci-après :

Image not found

7        La marque nationale antérieure a été enregistrée pour des services relevant notamment des classes 35 et 42 au sens de l’arrangement de Nice et correspondant à la description suivante :

–        classe 35 : « Publicité ; gestion d’affaires ; administration commerciale ; travaux de bureau » ;

–         classe 42 : « Services scientifiques et technologiques et travaux de recherche ainsi que services de conception connexes ; services de recherche et d’analyse industrielle ; conception et développement de matériel informatique et de logiciels ; services juridiques ».

8        Devant la division d’annulation, la requérante a demandé que l’intervenante apporte la preuve de l’usage de la marque nationale antérieure, conformément à l’article 57, paragraphes 2 et 3, du règlement no 207/2009 (devenu article 64, paragraphes 2 et 3, du règlement 2017/1001) et à la règle 22 du règlement (CE) no 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d’application du règlement no 40/94 (JO 1995, L 303, p. 1) [devenue article 10 du règlement délégué (UE) 2018/625 de la Commission, du 5 mars 2018, complétant le règlement 2017/1001, et abrogeant le règlement délégué (UE) 2017/1430 (JO 2018, L 104, p. 1)], pour les services visés au point 7 ci-dessus. Compte tenu du fait que la marque nationale antérieure avait été enregistrée le 20 avril 2005 et que la demande en nullité avait été introduite le 16 mai 2013, la division d’annulation a demandé à l’intervenante de produire la preuve de l’usage de la marque nationale antérieure en Bulgarie pour la période allant du 16 mai 2008 au 15 mai 2013 (ci-après la « période de référence »).

9        Par décision en date du 19 novembre 2014, la division d’annulation a rejeté la demande en nullité, motif pris de l’absence de similitude entre les services couverts par les marques en conflit et, conséquemment, de l’exclusion d’un risque de confusion.

10      Le 12 janvier 2015, l’intervenante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 58 à 64 du règlement no 207/2009 (devenus articles 66 à 71 du règlement 2017/1001), contre la décision de la division d’annulation.

11      Par décision adoptée le 29 mars 2018 (ci-après la « décision attaquée »), la chambre de recours a annulé la décision de la division d’annulation et a déclaré la nullité de la marque contestée pour les services relevant des classes 35 et 42 visés au point 3 ci-dessus.

12      En particulier, la chambre de recours a souligné, tout d’abord, que les preuves de l’usage de la marque nationale antérieure produites par l’intervenante se réfèrent au signe verbal mobile.bg ainsi qu’aux signes figuratifs reproduits ci-après :

Image not found

Image not found

13      Selon la chambre de recours, ces signes diffèrent de la marque nationale antérieure par des éléments n’altérant pas le caractère distinctif de cette dernière au sens de l’article 18, paragraphe 1, second alinéa, sous a), du règlement 2017/1001.

14      Ensuite, la chambre de recours a considéré que les éléments de preuve produits par l’intervenante démontraient un usage sérieux de la marque nationale antérieure au sens de l’article 64, paragraphe 2, du règlement 2017/1001, mais seulement pour les services de publicité en lien avec les véhicules.

15      Enfin, après avoir constaté l’existence d’importantes similitudes entre les services de publicité en lien avec les véhicules couverts par la marque nationale antérieure et les services couverts par le signe contesté (voir point 3 ci-dessus) ainsi qu’entre les signes en conflit, la chambre de recours a conclu à l’existence d’un risque de confusion pour le consommateur moyen en Bulgarie composant le public pertinent et a, ainsi, annulé la marque contestée pour les services relevant des classes 35 et 42 visés au point 3 ci-dessus.

 Conclusions des parties

16      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

17      L’EUIPO et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

18      À l’appui de son recours, la requérante soulève quatre moyens, tirés d’une violation de :

–        l’article 18, paragraphe 1, second alinéa, sous a), du règlement 2017/1001, lu en combinaison avec l’article 64, paragraphes 2 et 3, du même règlement ;

–        l’article 19, paragraphe 2, et de l’article 10, paragraphe 3, du règlement délégué (UE) 2018/625 de la Commission, du 5 mars 2018, complétant le règlement 2017/1001, et abrogeant le règlement délégué (UE) 2017/1430 (JO 2018, L 104, p. 1), lus en combinaison avec l’article 64, paragraphes 2 et 3, du règlement 2017/1001 ;

–        l’article 60, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001, lu en combinaison avec l’article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 2, sous a), ii, du même règlement ;

–        l’article 4, paragraphe 3, TUE, lu en combinaison avec l’article 59, paragraphe 1, sous b), et l’article 61, paragraphe 2, du règlement 2017/1001.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 18, paragraphe 1, second alinéa, sous a), du règlement 2017/1001, lu en combinaison avec l’article 64, paragraphes 2 et 3, du même règlement

19      La requérante fait valoir, tout d’abord, que, en appliquant l’article 18, paragraphe 1, second alinéa, sous a), du règlement 2017/1001 afin d’apprécier l’usage de la marque nationale antérieure, la chambre de recours a commis une erreur de droit. En effet, cette disposition concernerait exclusivement l’usage sérieux des marques de l’Union européenne. En revanche, l’usage des marques nationales serait à apprécier selon le droit national s’y rapportant.

20      Cet argument ne saurait être retenu. En effet, certes, selon l’article 18, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, si, dans un délai de cinq ans à compter de l’enregistrement, la marque de l’Union européenne n’a pas fait l’objet par le titulaire d’un usage sérieux dans l’Union européenne pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée, ou si un tel usage a été suspendu pendant un délai ininterrompu de cinq ans, la marque de l’Union européenne est soumise aux sanctions prévues à ce règlement, sauf juste motif pour le non-usage.

21      Corrélativement, selon l’article 64, paragraphe 2, du règlement 2017/1001, sur requête du titulaire de la marque de l’Union européenne, le titulaire d’une marque de l’Union européenne antérieure, partie à la procédure de nullité, apporte la preuve qu’au cours des cinq années qui précèdent la date de la demande en nullité, la marque de l’Union européenne antérieure a fait l’objet d’un usage sérieux dans l’Union pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée et sur lesquels le titulaire de cette marque antérieure fonde sa demande en nullité, ou qu’il existe de justes motifs pour le non-usage, pour autant qu’à cette date, la marque de l’Union européenne antérieure ait été enregistrée depuis cinq ans au moins. En outre, selon la même disposition, si la marque de l’Union européenne antérieure était enregistrée depuis cinq ans au moins à la date de dépôt ou à la date de priorité de la demande de marque de l’Union européenne, le titulaire de la marque de l’Union européenne antérieure apporte la preuve que les conditions énoncées à l’article 47, paragraphe 2, du règlement 2017/1001 étaient remplies à cette date.

22      Toutefois, selon l’article 64, paragraphe 3, du règlement 2017/1001, le paragraphe 2 de cette disposition s’applique aux marques nationales antérieures, étant entendu que l’usage dans l’Union est remplacé par l’usage dans l’État membre où la marque nationale antérieure fondant une demande en nullité est protégée.

23      Il s’ensuit que, lorsque le titulaire d’une marque de l’Union européenne demande que la preuve de l’usage sérieux soit apportée, cet usage constitue une condition que doivent remplir, en vertu du règlement 2017/1001 lui-même, non seulement les marques de l’Union européenne, mais aussi les marques nationales antérieures invoquées à l’appui d’une demande de nullité de ladite marque de l’Union européenne. Par conséquent, contrairement à ce que fait valoir la requérante, l’application de l’article 64, paragraphe 2, du règlement 2017/1001 aux marques nationales antérieures en vertu du paragraphe 3 dudit article implique que la notion de l’usage sérieux est à définir selon l’article 18 du même règlement. C’est donc sans commettre d’erreur de droit que la chambre de recours a apprécié si la marque nationale antérieure a fait l’objet d’un usage sérieux au sens de cette dernière disposition.

24      Ensuite, la requérante fait valoir que la chambre de recours a commis une erreur en estimant que l’usage du signe verbal mobile.bg et des signes figuratifs reproduits au point 12 ci-dessus vaut usage de la marque nationale antérieure au sens de l’article 18, paragraphe 1, second alinéa, sous a), du règlement 2017/1001. En particulier, la requérante fait valoir que, faisant allusion à un téléphone portable, le terme « mobile » est descriptif des services couverts par la marque nationale antérieure (voir point 7 ci-dessus). Par conséquent, le caractère distinctif de la marque nationale antérieure résulterait exclusivement de l’élément figuratif de cette dernière, à savoir du cadre formant un rectangle qui rappelle une plaque d’immatriculation. Ce serait grâce à cet élément figuratif que le public pertinent ferait finalement le lien entre la marque nationale antérieure et un véhicule.

25      Il convient de rappeler que l’objet de l’article 18, paragraphe 1, second alinéa, sous a), du règlement 2017/1001, qui évite d’imposer une conformité stricte entre la forme utilisée de la marque et celle sous laquelle la marque a été enregistrée, est de permettre au titulaire de cette dernière d’apporter au signe, à l’occasion de son exploitation commerciale, les modifications qui, sans en altérer le caractère distinctif, permettent de mieux l’adapter aux exigences de commercialisation et de promotion des produits ou des services concernés. Conformément à son objet, le champ d’application matériel de cette disposition doit être limité aux situations dans lesquelles le signe concrètement utilisé par le titulaire d’une marque pour désigner des produits ou des services pour lesquels celle-ci a été enregistrée constitue la forme sous laquelle cette même marque est commercialement exploitée. Dans de pareilles situations, lorsque le signe utilisé dans le commerce diffère de la forme sous laquelle celui-ci a été enregistré uniquement par des éléments négligeables, de sorte que les deux signes peuvent être considérés comme globalement équivalents, la disposition susmentionnée prévoit que l’obligation d’usage de la marque enregistrée peut être remplie en rapportant la preuve de l’usage du signe qui en constitue la forme utilisée dans le commerce [arrêt du 12 mai 2016, mobile.international/EUIPO – Rezon (mobile.de), T‑322/14 et T‑325/14, non publié, EU:T:2016:297, point 53, et la jurisprudence citée].

26      Le constat d’une altération du caractère distinctif de la marque telle qu’enregistrée requiert l’examen du caractère distinctif et dominant des éléments ajoutés en se fondant sur les qualités intrinsèques de chacun de ces éléments ainsi que sur la position relative des différents éléments dans la configuration de la marque (arrêt du 12 mai 2016, mobile.de, T‑322/14 et T‑325/14, non publié, EU:T:2016:297, point 54).

27      La requérante relève, à cet égard, que l’utilisation du signe verbal mobile.bg ne saurait être considérée comme constituant l’usage sérieux de la marque nationale antérieure, puisque ce signe ne contiendrait pas l’élément figuratif déterminant de ladite marque et de son caractère distinctif et serait également phonétiquement et conceptuellement différent de celle-ci. En outre, selon la requérante, il ne saurait être considéré que l’utilisation du signe verbal mobile.bg obéit à des besoins de modernisation de la marque nationale antérieure, si bien que l’appréciation de la chambre de recours serait incompatible avec l’esprit de l’article 18, paragraphe 1, second alinéa, sous a), du règlement 2017/1001.

28      La chambre de recours a observé, au point 32 de la décision attaquée, que la marque nationale antérieure consistait dans le mot « mobile » encadré de lignes formant un rectangle rappelant une plaque d’immatriculation. Ainsi que l’a observé la chambre de recours, les éléments figuratifs formant le cadre en question sont de caractère plutôt banal. En effet, ces éléments donnent l’impression d’un simple encadrement du mot « mobile », ce dernier étant la composante la plus apte à attirer l’attention et à être retenue par le consommateur. Si ce type d’encadrement est, de surcroît, perçu comme une plaque d’immatriculation, comme le font valoir la requérante et l’EUIPO, cette interprétation s’associe au message véhiculé par le mot « mobile », qui renvoie à un bien susceptible de bouger. En outre, le mot « mobile » est, pour le public pertinent, visuellement et phonétiquement très proche de son équivalent bulgare « мобилен », désignant également un bien susceptible de bouger. À supposer donc que, dans l’esprit du public pertinent, le mot « mobile » puisse faire allusion à un téléphone portable, il est tout aussi probable qu’il fera allusion à un bien mobile, sans rapport immédiat et évident avec les services de publicité pris en compte aux fins de l’examen de la demande de nullité de la marque contestée. Dans ce contexte, la chambre de recours n’ayant pas considéré qu’un usage sérieux avait été démontré pour les services relevant de la classe 42 énumérés au point 7, second tiret, ci-dessus, les arguments de la requérante pris de ce que le terme « mobile » est descriptif de ces services s’avère inopérant. Par conséquent, ainsi que l’a observé la chambre de recours, et contrairement à ce que fait valoir la requérante, le caractère distinctif de la marque nationale antérieure se concentre principalement sur le mot « mobile ».

29      Or, ainsi que l’a exposé la chambre de recours au point 37 de la décision attaquée, le signe verbal mobile.bg reprend l’élément dominant de la marque nationale antérieure, à savoir le terme « mobile », et n’en reprend pas le cadre, lequel ne constitue qu’un élément banal. Il en est de même de l’élément ajouté « .bg », qui sera perçu comme une simple indication du nom de domaine de premier niveau associé à la Bulgarie. Cette courte référence très courante n’est pas dotée d’un caractère distinctif particulier, puisqu’elle se limite à véhiculer le message qu’un site Internet bulgare est associé au signe « mobile ». Compte tenu de la similitude accrue résultant de ces appréciations sur les plans visuel, phonétique et conceptuel, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en considérant que le signe mobile.bg est globalement équivalent à la marque nationale antérieure, si bien qu’il constitue une forme n’altérant pas le caractère distinctif de cette dernière au sens de l’article 18, paragraphe 1, second alinéa, sous a), du règlement 2017/1001.

30      S’agissant du signe

Image not found

la requérante fait valoir que l’emploi de la couleur bleu clair sur la partie gauche et sur le point entre « mobile » et « bg » altère le caractère distinctif de la marque nationale antérieure en raison de la différence entre le contraste créé par cette couleur et le contraste créé par l’emploi de la couleur noire dans la forme enregistrée de cette marque. En outre, selon la requérante, la différence de caractère distinctif serait démontrée par le fait qu’une recherche sur Internet en fonction des termes « mobile » et « mobile.bg » ou bien « mobile.de » ne débouche pas sur les mêmes résultats.

31      Enfin, la requérante fait valoir que l’intervenante est titulaire d’une marque bulgare identique à la marque figurative reproduite au point précédent. Or, selon la requérante, la possibilité pour le titulaire d’une marque enregistrée de se prévaloir de son utilisation dans une forme qui diffère de celle sous laquelle cette marque a été enregistrée par des éléments n’en affectant pas le caractère distinctif, même si cette forme différente est elle-même enregistrée en tant que marque, existe uniquement lorsque cette dernière marque a été enregistrée après celle fondant la demande en nullité.

32      Il y a lieu de rejeter d’emblée ce dernier argument. En effet, selon l’article 18, paragraphe 1, second alinéa, sous a), du règlement 2017/1001, constitue un usage sérieux « l’usage de la marque de l’Union européenne sous une forme qui diffère par des éléments n’altérant pas le caractère distinctif de la marque dans la forme sous laquelle elle a été enregistrée, que la marque soit ou non aussi enregistrée sous la forme utilisée au nom du titulaire ». Cette disposition ne pose donc pas de condition selon laquelle l’enregistrement en tant que marque du signe utilisé doit être postérieur à l’enregistrement de la marque fondant la demande en nullité. Par conséquent, même si l’intervenante est titulaire d’une marque figurative nationale identique à celle reproduite au point 30 ci-dessus dont l’enregistrement serait antérieur à celui de la marque fondant la demande en nullité, en l’occurrence la marque nationale antérieure, cette circonstance n’affecterait en rien l’application de l’article 18, paragraphe 1, second alinéa, sous a), du règlement 2017/1001 en l’espèce.

33      Au demeurant, contrairement à ce que fait valoir la requérante, force est de constater que la couleur plus claire utilisée pour l’extrémité gauche et pour le point séparant le mot « mobile » du sigle « bg » constitue une différence négligeable n’altérant pas le caractère distinctif de la marque nationale antérieure, puisqu’elle n’est qu’une variation de stylisation mineure concernant le cadre entourant le mot « mobile », élément principal et dominant de la marque nationale antérieure. Il en est de même de l’apposition de l’élément « .bg » pour les motifs exposés au point 29 ci-dessus. Dans ces conditions, la circonstance qu’une recherche sur Internet en fonction des termes « mobile » et « mobile.bg » ou « mobile.de » ne débouche pas sur les mêmes résultats découle des modalités techniques de fonctionnement des moteurs de recherche en ligne et n’affecte pas l’application de l’article 18, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, qui se focalise sur le caractère distinctif de la marque enregistrée et du signe utilisé en tenant compte de l’ensemble de leurs éléments.

34      Dès lors que la marque nationale antérieure et le signe reproduit au point 30 ci-dessus  sont globalement équivalents en ce que, premièrement, ils ont leur élément verbal dominant en commun, deuxièmement, ils ont également en commun les principes régissant leur configuration graphique, tels la police des caractères et l’encadrement, et, troisièmement, ils diffèrent par des éléments secondaires, brefs et non déterminants quant à leur caractère distinctif, la chambre de recours a pu conclure à bon droit, aux points 32 à 36 de la décision attaquée, que l’usage du signe reproduit au point 30 ci-dessus valait usage de la marque nationale antérieure au sens de l’article 18, paragraphe 1, second alinéa, sous a), du règlement 2017/1001.

35      Quant au signe

Image not found

la requérante estime que l’ajout de la lettre « n » en couleur bleue conduit le public pertinent à comprendre ce signe comme se référant au terme bulgare signifiant « mobile ». Le signe en question se démarquerait donc nettement de la marque nationale antérieure d’un point de vue conceptuel, mais aussi phonétique, compte tenu de l’ajout de l’élément « .bg ».

36      À cet égard, les appréciations formulées aux points 33 et 34 ci-dessus demeurent pertinentes, de sorte que, contrairement à ce que fait valoir la requérante, le signe reproduit au point 35 ci-dessus est globalement équivalent à la marque nationale antérieure. En outre, la lettre ajoutée « n », de couleur différente, se distingue du mot « mobile », élément dominant de la marque nationale antérieure, tout en formant en même temps avec lui l’équivalent bulgare de ce même mot. Par conséquent, ainsi que l’a observé la chambre de recours aux points 38 et 39 de la décision attaquée, l’usage de ce signe ne comporte pas d’altération du caractère distinctif de la marque nationale antérieure.

37      La chambre de recours n’a donc pas commis d’erreur en concluant, aux points 36, 37 et 39 de la décision attaquée, lus en combinaison avec le point 30 de celle-ci, que les preuves se rapportant à l’usage des signes reproduits au point 12 ci-dessus constituent des preuves de l’usage de la marque nationale antérieure, de sorte qu’il y a lieu de rejeter le premier moyen.

 Sur le deuxième moyen, tiré d’une violation de l’article 19, paragraphe 2, et de l’article 10, paragraphe 3, du règlement délégué 2018/625, lus en combinaison avec l’article 64, paragraphes 2 et 3, du règlement 2017/1001

38      La requérante fait valoir que les preuves produites par l’intervenante devant la division d’annulation et la chambre de recours ne montrent pas un usage sérieux de la marque nationale antérieure. En particulier, premièrement, les preuves fournies par l’intervenante au sujet de l’usage de la marque nationale antérieure par le biais de son site Internet montreraient uniquement un usage du signe verbal mobile.bg en tant que nom de domaine et non en tant que marque pour les services qu’offre l’intervenante. Deuxièmement, la requérante conteste que les factures produites font preuve d’un usage de la marque nationale antérieure au regard du public pertinent pour des services de publicité en rapport avec les véhicules, ce qui neutraliserait également la force probante de certaines déclarations écrites produites par l’intervenante. Il en serait de même des listes de prix ainsi que des statistiques établies par Google Analytics et produites par l’intervenante, qui ne démontreraient pas un tel usage. Troisièmement, la requérante souligne que certaines captures d’écran produites par l’intervenante faisant figurer les deux signes figuratifs reproduits au point 12 ci-dessus ne sont pas datées, si bien qu’il serait impossible de déterminer si elles relèvent de la période de référence. De surcroît, les preuves de l’usage de ces signes dans certains magazines spécialisés dans le secteur des véhicules n’auraient pas été accompagnées d’éléments relatifs au chiffre d’affaires s’y rapportant.

39      Il y a lieu de relever d’emblée que, compte tenu de l’article 81, paragraphe 2, sous d) et i), du règlement délégué (UE) 2017/1430 de la Commission, du 18 mai 2017, complétant le règlement (CE) no 207/2009 du Conseil sur la marque de l’Union européenne et abrogeant les règlements (CE) no 2868/95 et (CE) no 216/96 (JO 2017, L 205, p. 1) et de l’article 82, paragraphe 2, sous d) et i), du règlement délégué 2018/625, la référence de la requérante à l’article 10, paragraphe 3, et à l’article 19, paragraphe 2, de ce dernier règlement vise en réalité la règle 22, paragraphe 3, et la règle 40, paragraphe 6, du règlement no 2868/95. En effet, ces dernières dispositions du règlement no 2868/95, qui contiennent des prévisions en substance identiques à celles invoquées par la requérante, sont applicables en l’espèce ratione temporis (voir point 8 ci-dessus).

40      Une marque fait l’objet d’un usage sérieux lorsqu’elle est utilisée, conformément à sa fonction essentielle, qui est de garantir l’identité d’origine des produits ou des services pour lesquels elle a été enregistrée, aux fins de créer ou de conserver un débouché pour ces produits et ces services, à l’exclusion d’usages de caractère symbolique ayant pour seul objet le maintien des droits conférés par la marque. De plus, la condition relative à l’usage sérieux de la marque exige que celle-ci, telle qu’elle est protégée sur le territoire pertinent, soit utilisée publiquement et vers l’extérieur (arrêt du 12 mai 2016, mobile.de, T‑322/14 et T‑325/14, non publié, EU:T:2016:297, point 63).

41      L’appréciation du caractère sérieux de l’usage de la marque doit reposer sur l’ensemble des faits et des circonstances propres à établir la réalité de l’exploitation commerciale de celle-ci, en particulier les usages considérés comme justifiés dans le secteur économique concerné pour maintenir ou créer des parts de marché au profit des produits ou des services protégés par la marque, la nature de ces produits ou de ces services, les caractéristiques du marché, l’étendue et la fréquence de l’usage de la marque. Pour examiner, dans un cas d’espèce, le caractère sérieux de l’usage d’une marque antérieure, il convient donc de procéder à une appréciation globale en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce (arrêt du 12 mai 2016, mobile.de, T‑322/14 et T‑325/14, non publié, EU:T:2016:297, point 64).

42      En l’espèce, il y a lieu de rappeler d’emblée que la chambre de recours a conclu, au point 59 de la décision attaquée, que l’intervenante avait apporté la preuve de l’usage sérieux de la marque nationale antérieure en ce qui concerne les services de publicité en lien avec les véhicules automobiles relevant de la classe 35.

43      De surcroît, il ressort des points 6 et 40 à 58 de la décision attaquée que la chambre de recours a fondé cette conclusion notamment sur les éléments qui suivent, produits par l’intervenante :

–        plusieurs copies d’un magazine spécialisé dans la publicité pour véhicules distribué en Bulgarie et faisant apparaître le signe

Image not found

–        deux captures d’écran de la partie consacrée aux conditions générales du site Internet « mobile.bg », tel que celui-ci apparaissait le 22 février 2010 et le 6 mai 2012, faisant figurer le même signe ;

–        des déclarations du directeur de l’intervenante concernant les services offerts par le biais du site Internet « mobile.bg » ;

–        des captures d’écran faisant apparaître des listes de prix relatifs à la publication d’annonces et d’autres messages publicitaires sur le site Internet « mobile.bg » et sous le signe figuratif reproduit au premier tiret ci-dessus, tels qu’apparaissant à plusieurs dates entre 2009 et 2013 ;

–        un rapport de Google Analytics comportant des données relatives au nombre de sessions, d’usagers et de visualisations relatives au site Internet « mobile.bg » couvrant la période entre le 1er janvier 2009 et le 31 décembre 2013 ;

–        une sélection de factures concernant des services de publicité et couvrant la période entre juin 2008 et mai 2013 ;

–        plusieurs déclarations de la part de gérants d’entreprises de vente de véhicules attestant que les entreprises en question offrent leurs biens à la vente par le biais du site Internet « mobile.bg » ;

–        une série de déclarations synthétisant les données résultant des livres comptables de l’intervenante et concernant les chiffres d’affaires relatifs aux services offerts via le site Internet « mobile.bg » entre janvier 2009 et mai 2013 ;

–        une déclaration de la cheffe comptable de l’intervenante synthétisant le nombre total de factures émises par cette dernière à l’adresse des clients utilisant les services offerts via le site Internet « mobile.bg » entre janvier 2008 et mai 2013.

44      À cet égard, il convient de relever que, premièrement, les copies de plusieurs éditions du magazine « mobile.bg », spécialisé dans la publicité pour véhicules, auquel se réfère la chambre de recours au point 40 de la décision attaquée et qui s’étalent sur plusieurs années de la période pertinente, font apparaître, en couverture, le signe reproduit au point 43, premier tiret, ci-dessus.

45      Deuxièmement, les factures sélectionnées produites se réfèrent à la prestation de services de publicité fournie sur le site Internet « mobile.bg », lequel, selon une attestation en date du 1er septembre 2011 établie par le registre des noms de domaine « .bg » et mentionnée au point 6, premier tiret, de la décision attaquée, appartient à l’intervenante depuis mars 2002. Les factures en cause ont été émises pour un montant global d’environ 66 000 leva bulgares (BGN), soit entre 33 700 et 33 800 euros en moyenne pour la période de référence. Elles couvrent une période s’étalant entre juin 2008 et mai 2013, à savoir au sein de la période de référence. Elles concernent des services de publicité fournis, via le site Internet « mobile.bg », à différents clients installés en Bulgarie. Les dénominations desdits clients renvoient pour la plupart au commerce de voitures automobiles. Il ressort également de ces documents que l’intervenante a produit au moins une facture pour chaque mois entre juin 2008 et mai 2013, à la seule exception de septembre 2009 et de février 2010, pour lesquels aucune facture n’a été produite. Les factures en question citent des montants allant de 296,57 à 3 600 BGN.

46      Troisièmement, les captures d’écran mentionnées au point 43, deuxième et quatrième tiret, ci-dessus, font clairement apparaître le signe reproduit au premier tiret du même point. Il ressort également de ces captures d’écran que le site Internet « mobile.bg » fonctionne en tant que forum de publicité promouvant la vente de véhicules automobiles, destiné tant aux professionnels du secteur qu’aux particuliers. Quatrièmement, les prix renseignés dans les listes mentionnées au point 43, quatrième tiret, ci-dessus, concernent des services d’annonces offerts sous le signe reproduit au premier tiret du même point. Cinquièmement, le rapport de Google Analytics, mentionné au point 43, cinquième tiret, ci-dessus, montre notamment que le site Internet « mobile.bg » a fait l’objet de plus de 340 millions de sessions entre 2009 et 2013 et que lors de chaque session ont été visitées environ 24 pages de ce site en moyenne.

47      Compte tenu de l’ensemble de ces éléments, les arguments invoqués par la requérante à l’appui du présent moyen doivent être écartés.

48      En effet, contrairement à ce que fait valoir cette dernière, les documents illustrant le contenu du site Internet « mobile.bg » pendant la période pertinente (voir point 46 ci-dessus) font apparaître au premier plan, de manière claire et visible, le signe reproduit au point 43, premier tiret, ci-dessus. L’apposition dudit signe laisse clairement comprendre que les services offerts par le biais de ce site le sont sous le signe en question, qui fonctionne ainsi comme élément indiquant leur origine commerciale. Il en est de même du magazine spécialisé « mobile.bg », qui fait constamment figurer le même signe en couverture. Par voie de conséquence, compte tenu de l’appréciation figurant au point 37 ci-dessus, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en concluant, aux points 46, 54 et 55 de la décision attaquée, que les factures produites démontrent un usage effectif de la marque nationale antérieure, au sens du point 39 ci-dessus, pour la fourniture de services de publicité pour véhicules.

49      Dans ce contexte, c’est à juste titre que la chambre de recours a également tenu compte, aux points 40, 44, 52 et 53 de la décision attaquée, des déclarations mentionnées au point 43, troisième, huitième et neuvième tirets, ci-dessus, afin de conclure, au point 55 de la même décision, qu’un volume significatif de transactions avait été réalisé sous la marque nationale antérieure pendant la période de référence.

50      La véracité de ces déclarations n’est pas remise en cause par les arguments de la requérante, selon lesquels la description des services offerts aux entreprises de vente de véhicules figurant sur les factures produites ne serait pas exacte et ne démontrerait pas un usage de la marque nationale antérieure. En effet, ainsi qu’il ressort des déclarations faites par les gérants des entreprises en question (voir point 43, septième tiret, ci-dessus), ces dernières ont bénéficié des services de l’intervenante en se faisant accueillir sur le site Internet « mobile.bg » et en particulier dans un espace réservé à chacune de ces entreprises sous une adresse électronique spéciale relevant du domaine « mobile.bg ». Or, ainsi qu’il a été exposé au point 48 ci-dessus, le site Internet « mobile.bg » fait apparaître au premier plan, de manière claire et visible, le signe reproduit au point 43, premier tiret, ci-dessus. Force est donc de constater que l’offre de services de l’intervenante à l’adresse des entreprises en question s’est faite sous ce signe, ce qui équivaut à un usage de la marque nationale antérieure (voir point 37 ci-dessus).

51      Ainsi, la circonstance que certaines captures d’écran, produites par l’intervenante en annexe à quatre déclarations de son gérant en date du 12 octobre 2011 et auxquelles s’est référée la chambre de recours au point 40 de la décision attaquée, ne font pas apparaître clairement leurs dates n’affecte pas la valeur probante des autres éléments sur lesquels a pris appui la chambre de recours.

52      En outre, le fait que les listes de prix mises en ligne sur le site Internet « mobile.bg » témoignent de l’existence des offres de transaction commerciale et non des actes commerciaux accomplis n’affecte en rien la conclusion de la chambre de recours. En effet, ainsi qu’il a été indiqué au point 39 ci-dessus, l’usage sérieux d’une marque vise à créer ou à conserver un débouché pour les produits et les services pour lesquels celle-ci a été enregistrée. Or, telle est précisément la fonction d’une liste de prix de services publiée sous la marque en question.

53      S’agissant du rapport de Google Analytics (voir point 43, cinquième tiret, ci-dessus), la référence aux deux adresses « mobilen.bg » et « mobile.bg » doit être comprise comme signifiant que les données statistiques figurant dans ledit rapport concernent le même site Internet, qui apparaît sous ces deux adresses web. Il s’ensuit que l’argument de la requérante, selon lequel il y aurait un doute sur le fait que le rapport en question concerne le site « mobile.bg », doit être écarté. Il en est de même de l’argument selon lequel le rapport en question n’illustre pas la configuration du site Internet « mobile.bg » pendant la période de référence. En effet, la configuration en cause ressort des captures d’écran auxquelles il est fait référence au point 43, deuxième et quatrième tiret, ci-dessus.

54      Force est de constater que les éléments susmentionnés démontrent une exploitation commerciale étendue et fréquente de la marque nationale antérieure pendant la période pertinente en Bulgarie. Cette exploitation a eu lieu, premièrement, à travers l’apposition visible du signe figuratif reproduit au point 43, premier tiret, ci-dessus sur le site Internet offrant des services de publicité pour véhicules automobiles et sur la couverture de magazines spécialisés dans la même matière et, deuxièmement, à travers l’utilisation des termes « mobile.bg » en tant qu’adresse web et comme élément désignant le forum par le biais duquel ont été offerts les services de publicité et mentionné sur les factures produites. Cette exploitation est en conformité avec les usages considérés comme justifiés dans le secteur de la publicité pour voitures afin de maintenir ou créer des parts de marché au profit de ce type de services et remplit donc les conditions relatives à la période, à la zone géographique, à la nature et à l’étendue de l’usage.

55      Par conséquent, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en estimant, dans le cadre d’une appréciation tenant compte de l’ensemble des éléments pertinents, que l’étendue de l’usage de la marque nationale antérieure correspond à l’usage sérieux requis par l’article 64, paragraphe 2, du règlement 2017/1001. Le deuxième moyen doit donc être rejeté.

 Sur le troisième moyen, tiré la violation de l’article 60, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001, lu en combinaison avec l’article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 2, sous a), ii, du même règlement

56      À l’appui du troisième moyen, la requérante fait valoir, en ce qui concerne la similitude des services, d’une part, que la chambre de recours a commis une erreur en estimant que les services de « publicité en lien avec les véhicules » couverts par la marque nationale antérieure sont similaires aux services de « collecte d’informations » couverts par la marque contestée. En particulier, selon la requérante, considérer, ainsi que l’a fait la chambre de recours au point 68 de la décision attaquée, que la collecte d’informations est un service inclus dans celui de la publicité procède d’une perception indûment extensive de la notion de publicité. En revanche, dans l’esprit du consommateur, la collecte d’informations serait perçue comme une « diffusion d’informations de manière neutre ». D’autre part, la requérante fait valoir que la « fourniture d’une plateforme Internet pour l’achat et la vente de véhicules », service informatique également couvert par la marque contestée, est à distinguer des services de publicité, puisque, dans l’esprit du public pertinent, ces deux types de services ne sont pas offerts par les mêmes opérateurs. En ce qui concerne la similitude des signes, la requérante fait valoir que les signes en conflit ne sont pas similaires, puisque le suffixe « .ro » faisant partie de la marque contestée distinguerait celle-ci de la marque nationale antérieure d’un point de vue phonétique, mais aussi conceptuel.

57      À cet égard, force est de constater que, comme le fait valoir l’EUIPO, la collecte d’informations constitue une étape préalable nécessaire à la publicité pour des biens. S’agissant en particulier de la publicité en lien avec les véhicules, ce service requiert que des informations sur l’offre de tels biens à la vente soient récoltées, avant d’être mises à la disposition du public qui pourrait être intéressé par leur achat. C’est donc à juste titre que la chambre de recours a conclu, au point 68 de la décision attaquée, que la collecte d’informations est un service similaire à celui de la publicité.

58      S’agissant de l’argument pris de la prétendue absence de similitude entre la « fourniture d’une plateforme Internet pour l’achat et la vente de véhicules, remorques de véhicules et accessoires de véhicules » couverts par la marque nationale antérieure et les services de publicité en lien avec les véhicules couverts par la marque contestée, force est de relever, ainsi que l’a observé la chambre de recours au point 69 de la décision attaquée, qu’une telle plateforme peut constituer le moyen indispensable par le biais duquel est effectuée l’action publicitaire. Tel peut être le cas, peu important que la plateforme en question soit mise à la disposition d’un professionnel ou d’un particulier aux fins de la vente poursuivie. Il s’ensuit que les services en question présentent des liens de complémentarité structurelle et qu’ils doivent, comme l’a relevé la chambre de recours au même point de la décision attaquée, être considérés comme similaires.

59      Ces appréciations sont valables indépendamment de la question de savoir si c’est à juste titre que la chambre de recours a estimé, au point 56 de la décision attaquée, qu’il y avait lieu de considérer l’usage sérieux de la marque nationale antérieure comme établi uniquement pour les services de publicité en lien avec les véhicules. À cet égard, certes, si une marque a été enregistrée pour une catégorie de produits ou de services suffisamment large pour que puissent être distinguées, en son sein, plusieurs sous-catégories susceptibles d’être envisagées de manière autonome, la preuve de l’usage sérieux de la marque pour une partie de ces produits ou services n’emporte protection, dans une procédure d’opposition, que pour la ou les sous-catégories dont relèvent les produits ou services pour lesquels la marque a été effectivement utilisée [arrêt du 14 juillet 2005, Reckitt Benckiser (España)/OHMI – Aladin (ALADIN), T‑126/03, EU:T:2005:288, point 46]. Toutefois, la notion de « sous-catégories susceptibles d’être envisagées de manière autonome » présuppose que les produits ou les services relevant de ces sous-catégories sont d’une nature tellement différente que considérer qu’un usage sérieux pour les uns vaut usage sérieux pour les autres étendrait indûment la protection de ladite marque.

60      Or, contrairement à ce qu’a laissé entendre la chambre de recours au point 58 de la décision attaquée, les services de publicité en lien avec les véhicules ne se distinguent pas de tout autre service de publicité au point qu’ils devraient être considérés comme une sous-catégorie de services de publicité. Cependant, force est de constater que les considérations figurant aux points 56 et 57 ci-dessus sont également valables si l’usage sérieux de la marque nationale antérieure est considéré comme démontré pour les services de publicité en général et pas seulement pour les services de publicité en lien avec les véhicules. Il s’ensuit que la limitation erronée des services au regard desquels la chambre de recours a considéré cette preuve comme apportée n’affecte pas la légalité de la décision attaquée.

61      Enfin, l’argument de la requérante, selon lequel le suffixe « .ro » rend la marque contestée différente phonétiquement et conceptuellement de la marque nationale antérieure, est également voué à l’échec. En effet, ainsi que l’a observé la chambre de recours au point 73 de la décision attaquée, ce suffixe sera perçu comme une simple indication du nom de domaine de premier niveau associé à la Roumanie. Cette courte référence très courante n’est pas dotée d’un caractère distinctif particulier, puisqu’elle se limite à véhiculer le message qu’un site Internet roumain est associé au signe « mobile ». Tous les autres éléments des signes en conflit étant identiques, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en considérant, aux points 74 à 77 de la décision attaquée, qu’ils présentent une similitude très élevée.

62      Le troisième moyen doit donc être écarté.

 Sur le quatrième moyen, tiré d’une violation de l’article 4, paragraphe 3, TUE, lu en combinaison avec l’article 59, paragraphe 1, sous b), et l’article 61, paragraphe 2, du règlement no 2017/1001

63      La requérante fait valoir que l’intervenante a obtenu l’enregistrement de la marque nationale antérieure de mauvaise foi consistant non seulement en la contrefaçon de marques antérieures appartenant à la requérante, mais aussi en l’imitation du modèle d’entreprise mis en œuvre par cette dernière.

64      Toutefois, ainsi que l’a observé la chambre de recours au point 84 de la décision attaquée, seules les instances bulgares sont compétentes pour apprécier le bien-fondé en droit et en fait de cette argumentation de la requérante dans le cadre d’une procédure mettant en cause la validité de l’enregistrement de la marque nationale antérieure. À cet égard, la requérante se limite à indiquer qu’« il n’a pas été possible » d’introduire une demande de nullité de la marque nationale antérieure « pour dépôt de marque de mauvaise foi », sans pour autant expliquer la raison d’une telle impossibilité.

65      Dans ce contexte, l’article 4, paragraphe 3, TUE, concernant l’obligation de coopération loyale entre l’Union et ses États membres, est une disposition manifestement dénuée de pertinence pour la présente affaire. Il en est de même de l’article 59, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, qui concerne la nullité d’une marque de l’Union européenne pour mauvaise foi lors du dépôt de la demande de marque. De manière similaire, l’article 61, paragraphe 2, du même règlement, qui concerne la forclusion par tolérance du titulaire d’une marque nationale antérieure pour demander la nullité d’une marque de l’Union européenne postérieure est tout aussi inopérant, puisque la requérante n’invoque pas de circonstances fondant une tolérance de la part de l’intervenante au sens de cette disposition ni ne prétend avoir invoqué de telles circonstances devant la chambre de recours.

66      Il s’ensuit que le quatrième moyen doit également être rejeté, tout comme, par suite, le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

67      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé en ses conclusions, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      mobile.de GmbH, supportera, outre ses propres dépens, les dépens exposés par l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) et par Droujestvo S Ogranichena Otgovornost « Rezon ».

Gratsias

Labucka

Ulloa Rubio

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 12 juillet 2019.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.