Language of document : ECLI:EU:T:2022:304

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (neuvième chambre)

18 mai 2022 (*)

« Dumping – Extension du droit antidumping institué sur les importations de certains éléments de fixation en fer ou en acier originaires de Chine aux importations expédiées de Malaisie – Exécution d’un arrêt de la Cour – Article 266 TFUE – Réinstitution d’un droit antidumping définitif – Non-rétroactivité – Protection juridictionnelle effective – Principe de bonne administration – Compétence de l’auteur de l’acte »

Dans l’affaire T‑479/20,

Eurobolt BV, établie à ’s-Heerenberg (Pays-Bas),

Fabory Nederland BV, établie à Tilburg (Pays-Bas),

ASF Fischer BV, établie à Lelystad (Pays-Bas),

Stafa Group BV, établie à Maarheeze (Pays-Bas),

représentées par Mes S. De Knop, B. Natens et A. Willems, avocats,

parties requérantes,

contre

Commission européenne, représentée par MM. T. Maxian Rusche et G. Luengo, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation du règlement d’exécution (UE) 2020/611 de la Commission, du 30 avril 2020, réinstituant le droit antidumping définitif institué par le règlement (CE) no 91/2009 du Conseil sur les importations de certains éléments de fixation en fer ou en acier originaires de la République populaire de Chine aux importations de certains éléments de fixation en fer ou en acier expédiés de Malaisie, qu’ils aient ou non été déclarés originaires de ce pays (JO 2020, L 141, p. 1),

LE TRIBUNAL (neuvième chambre),

composé de Mmes M. J. Costeira, présidente, T. Perišin (rapporteure) et M. P. Zilgalvis, juges,

greffier : Mme I. Kurme, administratrice,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 19 janvier 2022,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

 Sur les requérantes

1        Les requérantes, Eurobolt BV, Fabory Nederland BV, ASF Fischer BV et Stafa Group BV, sont des sociétés ayant leur siège aux Pays-Bas qui importent et vendent des éléments de fixation en fer ou en acier.

 Sur le règlement initial instituant un droit antidumping et le règlement d’exécution portant extension de ce droit antidumping

2        Par sa décision 94/800/CE, du 22 décembre 1994, relative à la conclusion au nom de la Communauté européenne, pour ce qui concerne les matières relevant de ses compétences, des accords des négociations multilatérales du cycle de l’Uruguay (1986-1994) (JO 1994, L 336, p. 1), le Conseil de l’Union européenne a approuvé l’accord instituant l’Organisation mondiale du commerce (OMC), signé à Marrakech le 15 avril 1994, ainsi que les accords figurant aux annexes 1 à 3 de cet accord (ci-après, pris ensemble, les « accords OMC »), au nombre desquels figurent l’accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994 (JO 1994, L 336, p. 11, ci-après le « GATT de 1994 ») et l’accord sur la mise en œuvre de l’article VI de l’accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994 (JO 1994, L 336, p. 103, ci-après l’« accord antidumping de l’OMC »). Ainsi, l’Union européenne est membre de l’OMC depuis le 1er janvier 1995. Les États membres de l’Union sont également membres de l’OMC à part entière.

3        En 2009, le Conseil a constaté que des éléments de fixation vendus sur le marché de l’Union faisaient l’objet d’un dumping de la part de producteurs-exportateurs chinois. Ainsi, le 26 janvier 2009, il a adopté le règlement (CE) no 91/2009, instituant un droit antidumping définitif sur les importations de certains éléments de fixation en fer ou en acier originaires de la République populaire de Chine (JO 2009, L 29, p. 1).

4        Le règlement no 91/2009 était fondé sur le règlement (CE) no 384/96 du Conseil, du 22 décembre 1995, relatif à la défense contre les importations qui font l’objet d’un dumping de la part de pays non membres de la Communauté européenne (JO 1996, L 56, p. 1), tel que modifié par le règlement (CE) no 461/2004 du Conseil, du 8 mars 2004 (JO 2004, L 77, p. 12) [remplacé par le règlement (CE) no 1225/2009 du Conseil, du 30 novembre 2009, relatif à la défense contre les importations qui font l’objet d’un dumping de la part de pays non membres de la Communauté européenne (JO 2009, L 343, p. 51), lui-même remplacé par le règlement (UE) 2016/1036 du Parlement européen et du Conseil, du 8 juin 2016, relatif à la défense contre les importations qui font l’objet d’un dumping de la part de pays non membres de l’Union européenne (JO 2016, L 176, p. 21, ci-après le « règlement de base »)].

5        À la suite de l’institution du droit antidumping définitif, la Commission européenne a reçu des éléments de preuve attestant que ces mesures étaient contournées par un transbordement en Malaisie. Elle a ainsi adopté, le 27 octobre 2010, le règlement (UE) no 966/2010, portant ouverture d’une enquête sur le contournement possible des mesures antidumping instituées par le règlement no 91/2009 et soumettant ces importations à enregistrement (JO 2010, L 282, p. 29). Ainsi qu’il ressort du considérant 18 et de l’article 2 de ce règlement, les autorités douanières étaient invitées à prendre les mesures requises pour enregistrer les importations dans l’Union, conformément à l’article 13, paragraphe 3, et à l’article 14, paragraphe 5, du règlement no 1225/2009, afin d’assurer que, dès lors que l’enquête conclurait à l’existence d’un contournement, les droits antidumping d’un montant approprié puissent être perçus rétroactivement à dater de l’enregistrement de telles importations expédiées de Malaisie.

6        Le 18 juillet 2011, le Conseil a adopté, en vertu de l’article 13 du règlement no 1225/2009, le règlement d’exécution (UE) no 723/2011, portant extension du droit antidumping définitif institué par le règlement no 91/2009 sur les importations de certains éléments de fixation en fer ou en acier originaires de la République populaire de Chine aux importations de certains éléments de fixation en fer ou en acier expédiés de Malaisie, qu’ils aient ou non été déclarés originaires de ce pays (JO 2011, L 194, p. 6). Par ce règlement, les droits antidumping ont été étendus aux éléments de fixation expédiés de Malaisie (ci-après les « droits anticontournement »).

7        Le 28 juillet 2011, l’organe de règlement des différends de l’OMC (ci-après l’« ORD ») a adopté le rapport de l’organe d’appel ainsi que le rapport du groupe spécial modifié par le rapport de l’organe d’appel dans l’affaire « Communautés européennes – mesures antidumping définitives visant certains éléments de fixation en fer ou en acier en provenance de Chine » (WT/DS 397) (ci-après la « décision de l’ORD du 28 juillet 2011 »). Dans ces rapports, il a été constaté, notamment, que l’Union avait agi d’une manière incompatible avec certaines dispositions de l’accord antidumping de l’OMC.

8        À la suite de la décision de l’ORD du 28 juillet 2011, le Conseil a adopté le règlement d’exécution (UE) no 924/2012, du 4 octobre 2012, modifiant le règlement no 91/2009 (JO 2012, L 275, p. 1), en opérant, notamment, une réduction du droit antidumping qui était prévu dans ce dernier règlement.

9        La Commission a maintenu ces mesures pour une durée supplémentaire de cinq ans par le règlement d’exécution (UE) 2015/519, du 26 mars 2015, instituant un droit antidumping définitif sur les importations de certains éléments de fixation en fer ou en acier originaires de la République populaire de Chine, tel qu’étendu aux importations de certains éléments de fixation en fer ou en acier expédiés de Malaisie, qu’ils aient ou non été déclarés originaires de ce pays, à l’issue d’un réexamen au titre de l’expiration des mesures effectué conformément à l’article 11, paragraphe 2, du règlement no 1225/2009 (JO 2015, L 82, p. 78).

10      La Chine, cependant, a considéré que la mesure prise par l’Union au moyen du règlement d’exécution no 924/2012 pour mettre en œuvre la décision de l’ORD du 28 juillet 2011 était incompatible avec différentes dispositions de l’accord antidumping de l’OMC et du GATT de 1994.

11      Par une décision du 12 février 2016, l’ORD a adopté de nouveaux rapports concluant à la non-conformité des mesures prises par l’Union au moyen du règlement d’exécution no 924/2012 avec certaines dispositions de l’accord antidumping de l’OMC (ci-après la « décision de l’ORD du 12 février 2016 »).

12      À la suite de la décision de l’ORD du 12 février 2016, la Commission a adopté, le 26 février 2016, le règlement d’exécution (UE) 2016/278, portant abrogation du droit antidumping définitif institué sur les importations de certains éléments de fixation en fer ou en acier originaires de la République populaire de Chine, étendu aux importations de certains éléments de fixation en fer ou en acier expédiés de Malaisie, qu’ils aient ou non été déclarés originaires de ce pays (JO 2016, L 52, p. 24).

 Sur le contentieux subséquent

13      Les requérantes avaient importé des éléments de fixation de Malaisie pendant la période de l’enquête anticontournement conduite par la Commission. La Commission avait enregistré ces importations de manière à pouvoir instituer des droits sur celles-ci lorsque l’enquête aurait confirmé le contournement.

14      Entre janvier 2012 et octobre 2013, les douanes néerlandaises ont émis des avis de mise en recouvrement concernant les droits antidumping dus par les requérantes sur des importations d’éléments de fixation en vertu du règlement d’exécution no 723/2011. Dans le délai fixé par le droit néerlandais, les requérantes ont exercé un recours contre ces avis de recouvrement en application de l’article 243 du règlement (CEE) no 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire (JO 1992, L 302, p. 1), tel que modifié par le règlement (UE) no 952/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 9 octobre 2013, établissant le code des douanes de l’Union (JO 2013, L 269, p. 1).

15      Le 17 novembre 2017, le Hoge Raad der Nederlanden (Cour suprême des Pays-Bas) a saisi la Cour d’une demande de décision préjudicielle concernant la validité du règlement d’exécution no 723/2011, dans le cadre du pourvoi national formé par Eurobolt à l’encontre des droits antidumping versés sur le fondement dudit règlement d’exécution.

16      Dans l’arrêt du 3 juillet 2019, Eurobolt (C‑644/17, EU:C:2019:555), la Cour a jugé que ce règlement d’exécution était entaché de la violation d’une forme substantielle et que, dès lors, il était invalide en ce qu’il avait été adopté en violation de l’article 15, paragraphe 2, du règlement no 1225/2009.

17      En particulier, la Cour a souligné que l’adoption, en vertu du règlement no 1225/2009, de droits antidumping étendus, tels que ceux institués par le règlement d’exécution no 723/2011, s’effectuait sur la base d’une procédure, en particulier d’une enquête, à certains stades de laquelle les États membres, représentés au sein du comité consultatif, devaient être consultés. L’exigence de communiquer tous les éléments d’information utiles au comité consultatif au plus tard dix jours ouvrables avant la réunion de celui-ci, posée à l’article 15, paragraphe 2, du règlement no 1225/2009, relevait des formes substantielles de la régularité de la procédure dont la violation entraînait la nullité de l’acte concerné. Les observations présentées par Eurobolt constituaient des éléments d’information utiles, au sens de l’article 15, paragraphe 2, du règlement no 1225/2009. Or, lesdites observations n’avaient été communiquées aux États membres que deux jours avant la réunion du comité consultatif. Par conséquent, la Cour a conclu que le règlement d’exécution no 723/2011 était invalide en ce qu’il avait été adopté en violation de l’article 15, paragraphe 2, du règlement no 1225/2009 (arrêt du 3 juillet 2019, Eurobolt, C‑644/17, EU:C:2019:555, points 36, 42, 43, 45 et 51).

 Sur l’exécution de l’arrêt du 3 juillet 2019, Eurobolt (C644/17), et l’adoption du règlement attaqué

18      À la suite de l’arrêt du 3 juillet 2019, Eurobolt (C‑644/17, EU:C:2019:555), la Commission a rouvert l’enquête anticontournement afin de corriger l’illégalité formelle identifiée par la Cour. Elle a, à cette fin, adopté le règlement d’exécution (UE) 2019/1374, du 26 août 2019, portant réouverture de l’enquête à la suite de l’arrêt du 3 juillet 2019 dans l’affaire C‑644/17 Eurobolt, en ce qui concerne le règlement d’exécution no 723/2011 (JO 2019, L 223, p. 1).

19      Il ressort du considérant 17 du règlement d’exécution 2019/1374 que la réouverture de l’enquête anticontournement a été limitée à l’exécution de l’arrêt du 3 juillet 2019, Eurobolt (C‑644/17, EU:C:2019:555), à savoir garantir le respect de toutes les exigences procédurales découlant de la procédure relative au comité consultatif prévue à l’article 15, paragraphe 2, du règlement no 1225/2009. Cette procédure a depuis lors été remplacée par la procédure de comité d’examen prévue à l’article 5 du règlement (UE) no 182/2011 du Parlement européen et du Conseil, du 16 février 2011, établissant les règles et principes généraux relatifs aux modalités de contrôle par les États membres de l’exercice des compétences d’exécution par la Commission (JO 2011, L 55, p. 13), qui prévoit que le délai légal applicable pour que les informations pertinentes puissent parvenir au comité est de quatorze jours au plus tard avant la réunion dudit comité.

20      Le comité d’examen a reçu les observations d’Eurobolt au moins quatorze jours avant sa réunion. Les observations formulées à la suite de l’information des parties n’ont pas donné lieu à une modification des conclusions de la Commission, selon lesquelles les mesures initiales devaient être réinstituées sur les importations du produit concerné expédié de Malaisie, qu’il ait ou non été déclaré originaire de ce pays.

21      Ainsi, le 30 avril 2020, la Commission a adopté le règlement d’exécution (UE) 2020/611, réinstituant le droit antidumping définitif institué par le règlement no 91/2009 sur les importations de certains éléments de fixation en fer ou en acier originaires de la République populaire de Chine aux importations de certains éléments de fixation en fer ou en acier expédiés de Malaisie, qu’ils aient ou non été déclarés originaires de ce pays (JO 2020, L 141, p. 1, ci-après le « règlement attaqué »). Par son article 1er, ce règlement réinstitue des mesures antidumping sur les importations d’éléments de fixation expédiés de Malaisie pour la période d’application du règlement d’exécution no 723/2011. Son article 2 dispose que les droits antidumping versés sur le fondement du règlement d’exécution no 723/2011 ne sont pas remboursés et que les remboursements effectués à la suite de l’arrêt du 3 juillet 2019, Eurobolt (C‑644/17, EU:C:2019:555), sont récupérés par les autorités qui ont procédé à ces remboursements.

 Procédure et conclusions des parties

22      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 28 juillet 2020, les requérantes ont introduit un recours tendant à l’annulation du règlement attaqué.

23      Sur proposition de la juge rapporteure, le Tribunal (neuvième chambre) a décidé d’ouvrir la phase orale de la procédure.

24      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience du 19 janvier 2022.

25      Les requérantes concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler le règlement attaqué ;

–        condamner la Commission aux dépens.

26      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner les requérantes aux dépens.

 En droit

27      À titre liminaire, il convient de relever que la Commission a émis des doutes quant à la recevabilité du recours sur la base de l’article 263, quatrième alinéa, deuxième membre de phrase, TFUE, en contestant l’affectation individuelle des requérantes par le règlement attaqué.

28      En revanche, la Commission considère que le recours est recevable pour Fabory Nederland, ASF Fischer et Stafa Group sur le fondement de l’article 263, quatrième alinéa, troisième membre de phrase, TFUE, puisqu’aucune mesure d’exécution n’est requise en ce qui les concerne.

29      Toutefois, la Commission soutient que le recours est irrecevable sur le fondement de l’article 263, quatrième alinéa, troisième membre de phrase, TFUE en ce qui concerne Eurobolt, dans la mesure où l’exécution du règlement attaqué à son égard nécessite des mesures d’exécution sous la forme d’une nouvelle notification de la dette douanière, après l’annulation des notifications de la dette douanière adressées à Eurobolt par le Hoge Raad der Nederlanden (Cour suprême des Pays-Bas).

30      Il y a lieu de rappeler que le juge de l’Union est en droit d’apprécier, suivant les circonstances de chaque espèce, si une bonne administration de la justice justifie de rejeter au fond le recours, sans statuer préalablement sur sa recevabilité (voir, en ce sens, arrêt du 26 février 2002, Conseil/Boehringer, C‑23/00 P, EU:C:2002:118, points 51 et 52).

31      Dans les circonstances de la présente espèce, le Tribunal considère qu’il y a lieu, dans un souci d’économie de la procédure, d’examiner d’emblée les moyens invoqués par les requérantes, sans statuer préalablement sur la recevabilité du présent recours en annulation, ce dernier étant, en tout état de cause et pour les motifs exposés ci-après, dépourvu de fondement.

32      À l’appui de leur recours, les requérantes soulèvent trois moyens. Le premier moyen est tiré de ce que, en réparant rétroactivement une violation d’une forme substantielle, le règlement attaqué viole les articles 266 et 264 TFUE ainsi que le principe de protection juridictionnelle effective. Le deuxième moyen est tiré de ce que, en l’absence de base juridique valable, le règlement attaqué est contraire à l’article 13, paragraphe 1, du règlement de base, à l’article 5, paragraphes 1 et 2, TUE et au principe de bonne administration. Le troisième moyen est tiré de ce que, en interdisant le remboursement et en ordonnant le recouvrement des droits antidumping remboursés, le règlement attaqué enfreint l’article 5, paragraphes 1 et 2, TUE.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation des articles 266 et 264 TFUE et du principe de protection juridictionnelle effective

33      Par leur premier moyen, les requérantes font valoir que, en remédiant rétroactivement à la violation d’une forme substantielle, le règlement attaqué viole les articles 266 et 264 TFUE ainsi que le principe de protection juridictionnelle effective.

34      Le premier moyen se divise en cinq branches. La première branche est tirée de la violation de l’obligation de rembourser les droits antidumping qui ne sont pas légalement dus et de la violation du principe de non-rétroactivité. La deuxième branche est tirée de la violation de l’obligation de ne pas remédier rétroactivement à des violations des formes substantielles dans les affaires antidumping. La troisième branche est tirée de la violation de l’obligation de ne pas remédier rétroactivement à la violation de la forme substantielle en cause. La quatrième branche est tirée de la violation de l’article 264 TFUE. La cinquième branche est tirée de la violation du principe de protection juridictionnelle effective.

 Sur la première branche, tirée de la violation de l’obligation de rembourser les droits antidumping qui ne sont pas légalement dus et de la violation du principe de non-rétroactivité

35      Par la première branche du premier moyen, les requérantes soutiennent que, selon une jurisprudence constante, lorsque la Cour constate l’invalidité d’un règlement imposant des droits antidumping, les droits versés n’ont jamais été légalement dus, de sorte qu’ils doivent être remboursés. Elles font valoir que, conformément à l’article 266 TFUE, la Commission est donc tenue de s’assurer que les droits antidumping en cause soient remboursés et ne saurait prendre la moindre mesure qui rende ce remboursement impossible ou excessivement difficile. Le règlement attaqué vide ce principe de tout sens.

36      Les requérantes observent que, selon la jurisprudence, les mesures antidumping sont des mesures de défense et de protection qui constituent un moyen de prévenir un préjudice futur. Elles ne constituent pas la sanction d’un comportement antérieur et ne visent pas la réparation du dommage subi par l’industrie de l’Union. Des mesures rétroactives ne peuvent plus assurer une fonction de défense et de protection contre un préjudice ; les mesures invalides ont déjà servi à cette fin au cours de leurs six années d’application, indépendamment de leur validité. Ainsi, les requérantes relèvent que, comparée à la politique de remboursement pratiquée de longue date par la Commission, sa nouvelle politique, consistant à imposer des droits antidumping avec effet rétroactif, ne fait que punir les importateurs de l’Union pour avoir contesté en justice, avec succès, ses constatations.

37      Les requérantes ajoutent que les arrêts du 15 mars 2018, Deichmann (C‑256/16, EU:C:2018:187), et du 19 juin 2019, C & J Clark International (C‑612/16, non publié, EU:C:2019:508), ne justifient pas la nouvelle politique de la Commission adoptée dans le règlement attaqué, puisqu’aucun de ces deux arrêts ne traite de la compatibilité avec l’article 266 TFUE d’un règlement qui, comme le règlement attaqué, interdit définitivement le remboursement de droits antidumping versés sur le fondement d’un règlement invalide et impose rétroactivement de nouvelles mesures antidumping.

38      Les requérantes précisent que leur désaccord ne porte pas sur la question de savoir si la Commission pouvait, en principe, rouvrir l’enquête antidumping et imposer de nouvelles mesures antidumping, mais sur la question de savoir si le fait d’imposer rétroactivement de nouvelles mesures antidumping dans le règlement attaqué est bien conforme à l’article 266 TFUE.

39      La Commission conteste les arguments des requérantes.

40      À titre liminaire, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 266 TFUE, l’institution, l’organe ou l’organisme de l’Union dont émane un acte qui a été annulé par la Cour ou par le Tribunal est tenu de prendre les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt de cette juridiction.

41      Cette obligation d’agir est applicable, par analogie, dans le cas où un arrêt de la Cour a invalidé un acte de l’Union, cet arrêt ayant comme conséquence juridique d’imposer à l’institution, à l’organe ou à l’organisme compétent de prendre les mesures nécessaires pour remédier à l’illégalité constatée (voir arrêt du 19 juin 2019, C & J Clark International, C‑612/16, non publié, EU:C:2019:508, point 38 et jurisprudence citée).

42      Certes, ainsi que le soulignent les requérantes, lorsque la Cour déclare invalide un règlement imposant des droits antidumping, ces droits sont à considérer comme n’étant pas légalement dus, au sens de l’article 236 du règlement no 2913/92, et comme devant, en principe, être remboursés par les autorités douanières nationales, dans les conditions prévues à cet effet (voir arrêt du 15 mars 2018, Deichmann, C‑256/16, EU:C:2018:187, point 62 et jurisprudence citée).

43      Cependant, la portée précise d’un arrêt d’invalidation de la Cour et, partant, des obligations qui en découlent doit être déterminée, dans chaque cas concret, en tenant compte non seulement du dispositif de cet arrêt, mais également des motifs qui en constituent le soutien nécessaire (voir arrêt du 15 mars 2018, Deichmann, C‑256/16, EU:C:2018:187, point 63 et jurisprudence citée).

44      Dans ces conditions, il est nécessaire de déterminer, en l’occurrence, la portée précise de la déclaration d’invalidité figurant au dispositif de l’arrêt du 3 juillet 2019, Eurobolt (C‑644/17, EU:C:2019:555), au regard des motifs de cet arrêt qui en constituent le soutien nécessaire.

45      Il ressort du point 51 de l’arrêt du 3 juillet 2019, Eurobolt (C‑644/17, EU:C:2019:555), que l’invalidité du règlement d’exécution no 723/2011 était la conséquence d’une violation de nature procédurale. Plus précisément, la Cour a jugé que l’exigence de communiquer tous les éléments d’information utiles au comité consultatif au plus tard dix jours ouvrables avant la réunion de celui-ci, posée à l’article 15, paragraphe 2, du règlement no 1225/2009, relevait des formes substantielles de la régularité de la procédure dont la violation entraînait la nullité du règlement d’exécution no 723/2011.

46      Ainsi, l’illégalité constatée par la Cour ne concernait que le respect des exigences procédurales découlant de la procédure du comité consultatif prévue à l’article 15, paragraphe 2, du règlement no 1225/2009. En revanche, l’arrêt du 3 juillet 2019, Eurobolt (C‑644/17, EU:C:2019:555), n’affecte pas les actes antérieurs à cette procédure, en particulier le règlement no 966/2010 portant ouverture de l’enquête anticontournement et ordonnant l’enregistrement des importations expédiées de Malaisie.

47      Ainsi qu’il ressort du considérant 18 du règlement attaqué, une violation de l’article 15, paragraphe 2, du règlement no 1225/2009 n’a pas pour effet de vicier l’ensemble de la procédure, étant donné que l’illégalité constatée par la Cour ne portait pas sur les constatations de fond relatives à l’existence d’un contournement. Il peut donc être remédié à cette violation par une réouverture de l’enquête anticontournement au point auquel l’illégalité est intervenue.

48      Dès lors, la Commission pouvait valablement exécuter l’arrêt du 3 juillet 2019, Eurobolt (C‑644/17, EU:C:2019:555), premièrement, en procédant à la réouverture de la procédure antidumping pour corriger l’irrégularité commise, deuxièmement, en respectant les modalités et les délais de la procédure de comité d’examen prévue à l’article 5 du règlement no 182/2011, désormais applicable après l’abrogation de la procédure du comité consultatif prévue à l’article 15, paragraphe 2, du règlement no 1225/2009 (voir point 19 ci-dessus) et, troisièmement, en concluant, après avoir tenu compte des observations formulées par les parties intéressées, que les mesures initiales devaient être réinstituées sur les importations du produit concerné expédié de Malaisie, qu’il ait ou non été déclaré originaire de ce pays.

49      Ainsi, en corrigeant une irrégularité de procédure et en confirmant les conclusions de l’enquête qui n’ont pas été contestées par l’arrêt du 3 juillet 2019, Eurobolt (C‑644/17, EU:C:2019:555), la Commission a respecté son obligation de prendre les mesures que comportait l’exécution de cet arrêt conformément à l’article 266 TFUE.

50      En ce qui concerne le principe de non-rétroactivité, il convient d’observer, tout d’abord, que, dans le domaine des mesures antidumping, ce principe a été consacré par la règle initialement énoncée à l’article 10, paragraphe 1, du règlement no 384/96 et ultérieurement reprise, dans les mêmes termes, à l’article 10, paragraphe 1, du règlement no 1225/2009, puis à l’article 10, paragraphe 1, du règlement de base (voir, en ce sens, arrêt du 9 juin 2021, Roland/Commission, T‑132/18, non publié, EU:T:2021:329, point 94 et jurisprudence citée).

51      Il convient également de préciser que, dans les arrêts du 15 mars 2018, Deichmann (C‑256/16, EU:C:2018:187, points 73, 74 et 76), et du 19 juin 2019, C & J Clark International (C‑612/16, non publié, EU:C:2019:508, points 54 et 55), la Cour a approuvé la reprise de la procédure ayant abouti à l’adoption d’un règlement instituant un droit antidumping invalidé dans le but de réinstituer des droits antidumping expirés, à condition que les règles matérielles en vigueur lors de la survenance des faits visés par ce règlement soient appliquées (voir arrêt du 9 juin 2021, Roland/Commission, T‑132/18, non publié, EU:T:2021:329, point 95 et jurisprudence citée).

52      En l’espèce, la prétendue violation du principe de non-rétroactivité par le règlement attaqué doit, compte tenu de la jurisprudence de la Cour relative à la période couverte par les faits visés par le règlement invalidé, être appréciée au regard de l’article 10, paragraphe 1, du règlement no 1225/2009 (voir, en ce sens, arrêt du 9 juin 2021, Roland/Commission, T‑132/18, non publié, EU:T:2021:329, point 96 et jurisprudence citée).

53      Selon la jurisprudence, l’article 10, paragraphe 1, du règlement no 1225/2009 s’oppose à l’application des droits antidumping à des produits mis en libre pratique avant la date à laquelle les règlements invalidés sont entrés en vigueur (voir, en ce sens, arrêt du 15 mars 2018, Deichmann, C‑256/16, EU:C:2018:187, point 77).

54      En revanche, l’article 10, paragraphe 1, du règlement no 1225/2009 n’exclut pas de procéder à une reprise de la procédure dans le cas où les droits antidumping concernés ont expiré, pour autant que ces droits soient réinstaurés pour leur période d’application initiale (voir, en ce sens, arrêt du 15 mars 2018, Deichmann, C‑256/16, EU:C:2018:187, point 78).

55      Dès lors, contrairement à ce qu’estiment les requérantes, le principe de non-rétroactivité, tel que consacré par l’article 10, paragraphe 1, du règlement no 1225/2009, ne s’oppose pas à ce qu’un acte tel que le règlement attaqué réinstitue des droits antidumping sur des importations ayant eu lieu pendant la période d’application du règlement invalidé (voir, en ce sens, arrêt du 9 juin 2021, Roland/Commission, T‑132/18, non publié, EU:T:2021:329, point 99 et jurisprudence citée).

56      Plus précisément, la rétroactivité impliquerait qu’une norme postérieure s’applique à une situation juridique déjà consolidée. Or, cela n’est pas le cas en l’espèce, puisque les normes applicables sont précisément celles en vigueur lorsque les faits pertinents se sont produits (voir, en ce sens, arrêt du 9 juin 2021, Roland/Commission, T‑132/18, non publié, EU:T:2021:329, point 100).

57      Ainsi, la reprise de la procédure administrative et le rétablissement des droits antidumping sur les importations intervenues au cours de la période d’application du règlement invalidé ne peuvent pas être considérés comme contraires à la règle de non-rétroactivité (voir, en ce sens, arrêt du 15 mars 2018, Deichmann, C‑256/16, EU:C:2018:187, point 79).

58      Le règlement attaqué ne s’appliquant pas rétroactivement à une situation définitivement acquise antérieurement à son entrée en vigueur, le principe de sécurité juridique ne saurait non plus être violé (voir arrêt du 9 juin 2021, Roland/Commission, T‑132/18, non publié, EU:T:2021:329, point 101 et jurisprudence citée).

59      Partant, c’est donc à bon droit que, à la suite de l’arrêt du 3 juillet 2019, Eurobolt (C‑644/17, EU:C:2019:555), la Commission a, comme cela est exposé aux considérants 21 et 29 du règlement attaqué, corrigé l’irrégularité de procédure et réinstitué les droits anticontournement pour leur période d’application initiale, à savoir entre le 27 juillet 2011 et le 27 février 2016, sur la base des conclusions non contestées de l’enquête anticontournement.

60      En outre, compte tenu du fait que l’illégalité relevée par la Cour dans l’arrêt du 3 juillet 2019, Eurobolt (C‑644/17, EU:C:2019:555), ne concernait que le respect des exigences procédurales découlant de la procédure du comité consultatif prévue à l’article 15, paragraphe 2, du règlement no 1225/2009, cet arrêt n’affecte pas les actes antérieurs de la procédure antidumping (voir point 46 ci-dessus).

61      Partant, et par analogie à ce que le Tribunal a jugé dans l’arrêt du 9 juin 2021, Roland/Commission (T‑132/18, non publié, EU:T:2021:329, point 104), le principe de non-rétroactivité, tel que consacré à l’article 10, paragraphe 1, du règlement no 1225/2009, ne s’opposait pas à la reprise de la procédure antidumping concernant les produits en cause et à l’adoption du règlement attaqué.

62      Par conséquent, il convient de rejeter la première branche du premier moyen.

 Sur la deuxième branche, tirée de la violation de l’obligation de ne pas remédier rétroactivement à des violations des formes substantielles dans les affaires antidumping

63      Par la deuxième branche du premier moyen, les requérantes considèrent que la violation d’une forme substantielle dans une affaire antidumping entache d’illégalité l’ensemble de la procédure, puisque les formes substantielles revêtent une importance particulière dans les affaires antidumping. Par conséquent, selon les requérantes, il n’est pas possible de remédier rétroactivement à des violations des formes substantielles dans des affaires antidumping et, partant, le règlement attaqué est contraire à l’article 266 TFUE.

64      Les requérantes soulignent que toute violation d’une forme substantielle est si grave qu’elle justifie l’annulation ou l’invalidation du règlement qui en est entaché, quelle que soit l’issue possible de la procédure concernée. Par conséquent, le respect des formes substantielles revêt, encore plus que le respect des droits de la défense, intrinsèquement une importance capitale dans les procédures d’enquêtes antidumping et une importance systémique pour l’état de droit et l’équilibre des pouvoirs.

65      Elles ajoutent que la Cour n’a jamais reconnu que la Commission pouvait remédier rétroactivement à la violation d’une forme substantielle dans une enquête antidumping.

66      La Commission conteste les arguments des requérantes.

67      Il convient de rappeler que, en application de l’article 266 TFUE, l’institution dont émane l’acte annulé est tenue de prendre les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt d’annulation.

68      Afin de se conformer à un arrêt d’annulation et de lui donner pleine exécution, les institutions sont tenues de respecter non seulement le dispositif de l’arrêt, mais également les motifs qui ont amené à celui-ci et qui en constituent le soutien nécessaire, en ce sens qu’ils sont indispensables pour déterminer le sens exact de ce qui a été jugé dans le dispositif. En effet, ce sont ces motifs qui, d’une part, identifient la disposition exacte considérée comme illégale et, d’autre part, font apparaître les raisons exactes de l’illégalité constatée dans le dispositif et que les institutions concernées doivent prendre en considération en remplaçant l’acte annulé (voir arrêt du 12 novembre 1998, Espagne/Commission, C‑415/96, EU:C:1998:533, point 31 et jurisprudence citée).

69      La procédure visant à remplacer un tel acte peut ainsi être reprise au point précis auquel l’illégalité est intervenue (voir arrêt du 3 octobre 2000, Industrie des poudres sphériques/Conseil, C‑458/98 P, EU:C:2000:531, point 82 et jurisprudence citée).

70      Selon une jurisprudence constante, l’annulation d’un acte de l’Union n’affecte pas nécessairement les actes préparatoires. L’annulation d’un acte mettant un terme à une procédure administrative comprenant différentes phases n’entraîne pas nécessairement l’annulation de toute la procédure précédant l’adoption de l’acte en cause indépendamment des motifs, de fond ou de procédure, fondant l’arrêt prononçant l’annulation de cet acte (voir arrêt du 9 juillet 2008, Alitalia/Commission, T‑301/01, EU:T:2008:262, point 100 et jurisprudence citée).

71      Par ailleurs, lorsqu’un arrêt de la Cour annule un règlement antidumping, l’institution qui exécute cet arrêt a la possibilité de reprendre la procédure à l’origine de ce règlement. En outre et sauf si l’irrégularité constatée a entaché la procédure tout entière, l’institution a le choix, pour adopter un acte destiné à remplacer l’acte invalidé, de reprendre cette procédure à partir de la date de l’irrégularité (arrêts du 15 mars 2018, Deichmann, C‑256/16, EU:C:2018:187, points 73 et 74, et du 19 juin 2019, C & J Clark International, C‑612/16, non publié, EU:C:2019:508, point 43).

72      Il convient d’observer que la jurisprudence citée aux points 68 à 71 ci-dessus ne subordonne pas la possibilité de ne pas reprendre toute la procédure précédant l’adoption d’un acte pris en remplacement d’un autre à la condition que ce dernier n’ait pas été annulé pour violation des formes substantielles.

73      À cet égard, il y a lieu de rappeler que la notion de formes substantielles englobe les règles conçues pour entourer les mesures visées de toutes les garanties de circonspection et de prudence (arrêt du 21 mars 1955, Pays-Bas/Haute Autorité, 6/54, EU:C:1955:5, p. 220).

74      En ce qui concerne la question de savoir si la violation d’une forme substantielle entache d’illégalité l’ensemble de la procédure ou seulement l’étape à laquelle elle est intervenue, il y a lieu de rappeler, à l’instar de la Commission, que, dans son arrêt du 13 novembre 1990, Fedesa e.a. (C‑331/88, EU:C:1990:391, points 33 et 34), la Cour a rejeté l’argument selon lequel la violation d’une forme substantielle entachait de nullité toutes les étapes de la procédure législative. Elle a ainsi conclu que, dans la mesure où la directive en question avait été annulée à cause d’un vice de procédure qui concernait exclusivement les modalités de son adoption définitive par le Conseil, l’annulation n’affectait pas les actes préparatoires des autres institutions, parmi lesquels la proposition initiale de la Commission et l’avis du Parlement européen.

75      En l’espèce, il y a lieu de constater que, dans son arrêt du 3 juillet 2019, Eurobolt (C‑644/17, EU:C:2019:555, point 51), la Cour a jugé que l’exigence de communiquer tous les éléments d’information utiles au comité consultatif au plus tard dix jours ouvrables avant la réunion de celui-ci, posée à l’article 15, paragraphe 2, du règlement no 1225/2009, relevait des formes substantielles de la régularité de la procédure dont la violation entraînait la nullité du règlement d’exécution no 723/2011.

76      Partant, ainsi qu’il ressort du point 46 ci-dessus, l’illégalité constatée par la Cour ne concernait que le respect des exigences procédurales découlant de la procédure du comité consultatif prévue à l’article 15, paragraphe 2, du règlement no 1225/2009. En revanche, l’arrêt du 3 juillet 2019, Eurobolt (C‑644/17, EU:C:2019:555), n’affecte pas les actes antérieurs à cette procédure, en particulier le règlement no 966/2010 portant ouverture de l’enquête anticontournement et ordonnant l’enregistrement des importations expédiées de Malaisie.

77      Dès lors, ainsi qu’il ressort des points 48 et 49 ci-dessus, en procédant à la réouverture de la procédure antidumping pour corriger l’irrégularité commise, en respectant les modalités et les délais de la procédure de comité d’examen et en concluant, après avoir tenu compte des observations formulées par les parties intéressées, que les mesures initiales devaient être réinstituées, la Commission a respecté son obligation de prendre les mesures que comportait l’exécution de l’arrêt du 3 juillet 2019, Eurobolt (C‑644/17, EU:C:2019:555), conformément à l’article 266 TFUE.

78      Par conséquent, il convient d’écarter la deuxième branche du premier moyen.

 Sur la troisième branche, tirée de la violation de l’obligation de ne pas remédier rétroactivement à la violation de la forme substantielle en cause

79      Par la troisième branche du premier moyen, les requérantes soulignent que, conformément à la jurisprudence, la violation d’une forme substantielle ne peut être réparée rétroactivement que lorsqu’un but à atteindre dans l’intérêt général l’exige, afin d’éviter un vide juridique qui déséquilibrerait la situation des différents opérateurs économiques.

80      Or, en l’espèce, les requérantes observent que la Commission n’a ni prétendu ni établi qu’il y avait un intérêt général à réinstituer rétroactivement les mesures antidumping invalidées dans l’arrêt du 3 juillet 2019, Eurobolt (C‑644/17, EU:C:2019:555). Elles ajoutent que, même si un tel intérêt général existait, la Commission n’a pas établi que le règlement attaqué était nécessaire pour protéger cet intérêt, puisque les droits antidumping imposés par l’effet du règlement d’exécution no 723/2011 avaient déjà déployé leurs effets protecteurs sur le secteur des éléments de fixation. Par ailleurs, les requérantes considèrent que l’arrêt du 3 juillet 2019, Eurobolt (C‑644/17, EU:C:2019:555), n’avait créé d’aucune manière un vide juridique, puisque la Commission aurait dû autoriser les douanes à rembourser les droits antidumping indûment versés sur le fondement du règlement d’exécution no 723/2011 invalide.

81      Dans leur réplique, les requérantes soulignent que la relation temporelle entre l’enregistrement des importations et l’institution des droits antidumping est régie par l’article 10, paragraphe 4, du règlement de base, lequel contient une exception explicite à la règle prévue à l’article 10, paragraphe 1, de ce même règlement. Selon cette dernière disposition, qui était en litige dans les arrêts du 15 mars 2018, Deichmann (C‑256/16, EU:C:2018:187), et du 19 juin 2019, C & J Clark International (C‑612/16, non publié, EU:C:2019:508), la Commission doit mener une enquête antidumping avant de pouvoir imposer des droits antidumping. Selon les requérantes, ces arrêts concernent seulement cet aspect très spécifique de la rétroactivité.

82      La Commission conteste les arguments des requérantes.

83      À titre liminaire, il convient de relever que, par la troisième branche du premier moyen, les requérantes visent à contester la réparation rétroactive de la violation de la forme substantielle en cause, dans la mesure où, selon elles, aucun but à atteindre dans l’intérêt général ne l’exigeait.

84      À cet égard, il convient de renvoyer, tout d’abord, aux points 50 à 61 ci-dessus, où il a été conclu que, en adoptant le règlement attaqué, la Commission n’avait pas violé le principe de non-rétroactivité.

85      De surcroît, il convient d’observer que, selon une jurisprudence établie et citée par les parties au présent litige, un acte peut se voir reconnaître, à titre exceptionnel, un effet rétroactif lorsque le but à atteindre l’exige et que la confiance légitime des intéressés est dûment respectée (voir, en ce sens, arrêts du 30 septembre 1982, Amylum/Conseil, 108/81, EU:C:1982:322, point 4 ; du 30 septembre 1982, Roquette Frères/Conseil, 110/81, EU:C:1982:323, point 5 et jurisprudence citée, et du 13 novembre 1990, Fedesa e.a., C‑331/88, EU:C:1990:391, point 45).

86      S’agissant du principe de protection de la confiance légitime, il y a lieu de préciser que, conformément à une jurisprudence constante, le droit de se prévaloir de ce principe suppose que des assurances précises, inconditionnelles et concordantes, émanant de sources autorisées et fiables, ont été fournies à l’intéressé par les institutions de l’Union (voir arrêt du 9 juin 2021, Roland/Commission, T‑132/18, non publié, EU:T:2021:329, point 107 et jurisprudence citée).

87      En l’espèce, l’illégalité constatée dans l’arrêt du 3 juillet 2019, Eurobolt (C‑644/17, EU:C:2019:555), ne concernait que le respect des exigences procédurales découlant de la procédure du comité consultatif prévue à l’article 15, paragraphe 2, du règlement no 1225/2009. Par conséquent, cette illégalité ne saurait faire naître une confiance légitime en ce que les importations ayant eu lieu pendant la période d’application du règlement invalidé ne peuvent plus être assujetties à des droits antidumping réinstitués. Au contraire, cet arrêt supposait que la Commission procède à la réouverture de la procédure antidumping pour corriger l’irrégularité commise, en respectant les modalités et les délais de la procédure de comité d’examen prévue à l’article 5 du règlement no 182/2011, désormais applicable (voir point 19 ci-dessus) (voir, en ce sens, arrêt du 9 juin 2021, Roland/Commission, T‑132/18, non publié, EU:T:2021:329, point 108).

88      Par ailleurs, quant à l’allégation des requérantes selon laquelle la pratique administrative de la Commission confirme que l’annulation des règlements instituant des droits antidumping implique le remboursement de ces droits, il convient de souligner que la légalité d’un règlement tel que le règlement attaqué doit s’apprécier au regard des règles de droit et, notamment, des dispositions du règlement de base et non sur le fondement d’une prétendue pratique décisionnelle antérieure (voir arrêt du 9 juin 2021, Roland/Commission, T‑132/18, non publié, EU:T:2021:329, point 110 et jurisprudence citée).

89      Enfin, il est de jurisprudence constante que, lorsque les institutions disposent, comme dans le domaine des mesures antidumping, d’une marge d’appréciation pour le choix des moyens nécessaires à la réalisation de leur politique, les opérateurs économiques ne sont pas justifiés à placer leur confiance légitime dans le maintien du moyen initialement choisi, lequel peut être modifié par ces institutions dans le cadre de l’exercice de leur pouvoir d’appréciation (voir arrêt du 9 juin 2021, Roland/Commission, T‑132/18, non publié, EU:T:2021:329, point 111 et jurisprudence citée).

90      Dès lors, ni le principe de protection de la confiance légitime ni la pratique administrative de la Commission ne s’opposaient à l’adoption du règlement attaqué.

91      Ainsi, même en supposant que le règlement attaqué s’applique rétroactivement, cela serait, à titre exceptionnel, justifié selon la jurisprudence citée au point 85 ci-dessus, étant donné que, d’une part, le principe de protection de la confiance légitime a été dûment respecté (voir points 86 à 90 ci-dessus) et que, d’autre part, l’exécution de l’arrêt du 3 juillet 2019, Eurobolt (C‑644/17, EU:C:2019:555), exigeait l’adoption de ce règlement (voir points 45 à 49 ci-dessus) (voir, en ce sens, arrêt du 9 juin 2021, Roland/Commission, T‑132/18, non publié, EU:T:2021:329, point 106 et jurisprudence citée).

92      Par conséquent, il convient d’écarter la troisième branche du premier moyen.

 Sur la quatrième branche, tirée de la violation de l’article 264 TFUE

93      Par la quatrième branche du premier moyen, les requérantes font valoir que, dans le règlement attaqué, la Commission a illégalement usurpé les compétences qui sont dévolues à la Cour en vertu de l’article 264 TFUE.

94      Selon les requérantes, en adoptant le règlement attaqué, la Commission a limité, en pratique, l’application dans le temps de l’arrêt du 3 juillet 2019, Eurobolt (C‑644/17, EU:C:2019:555), et a usurpé la compétence de la Cour en imposant rétroactivement des droits antidumping. Or, un tel pouvoir est exclusivement attribué à la Cour en vertu de l’article 264 TFUE. La Commission aurait dû demander à la Cour de limiter les effets de cet arrêt dans le temps.

95      La Commission conteste les arguments des requérantes.

96      Il résulte de la jurisprudence que, si la constatation de l’invalidité d’un acte de l’Union a comme conséquence juridique d’imposer à l’institution qui a adopté cet acte de prendre les mesures nécessaires pour remédier à l’illégalité constatée, l’obligation énoncée à l’article 266 TFUE en cas d’arrêt d’annulation étant applicable par analogie, cette institution n’en dispose pas moins d’un large pouvoir d’appréciation dans le choix de ces mesures, étant entendu que celles-ci doivent être compatibles avec le dispositif de l’arrêt en cause ainsi qu’avec les motifs qui en constituent le soutien nécessaire (voir arrêt du 15 mars 2018, Deichmann, C‑256/16, EU:C:2018:187, point 87 et jurisprudence citée).

97      Compte tenu de l’existence de ce large pouvoir d’appréciation, seul le caractère manifestement inapproprié desdites mesures, par rapport à l’objectif poursuivi, peut affecter leur légalité (voir arrêt du 15 mars 2018, Deichmann, C‑256/16, EU:C:2018:187, point 88 et jurisprudence citée).

98      Or, en l’occurrence, il ressort des points 45 à 49 et 75 à 77 ci-dessus que les requérantes n’ont pas démontré que le règlement attaqué adopté par la Commission était incompatible avec le dispositif et les motifs de l’arrêt du 3 juillet 2019, Eurobolt (C‑644/17, EU:C:2019:555).

99      À cet égard, il importe de préciser que, ainsi que le souligne la Commission, le fait que la Cour n’ait pas expressément fixé de limites dans le temps, comme elle était en droit de le faire en application de l’article 264 TFUE, ne signifie pas nécessairement que la Commission devait renoncer à réinstituer à un niveau adéquat les droits antidumping légitimement dus pendant la période d’application des mesures initiales. En effet, l’article 264 TFUE ne fait pas obstacle à ce que l’institution concernée prenne des mesures pouvant avoir les mêmes effets que ceux de la décision que la Cour serait amenée à prendre si elle faisait application dudit article.

100    Par conséquent, il convient d’écarter la quatrième branche du premier moyen.

 Sur la cinquième branche, tirée de la violation du principe de protection juridictionnelle effective

101    Par la cinquième branche du premier moyen, les requérantes font valoir que le règlement attaqué contrevient au principe de protection juridictionnelle effective, qui exige que les décisions de la Cour offrent une réparation effective.

102    Selon les requérantes, le règlement attaqué prive de tout effet de droit l’arrêt du 3 juillet 2019, Eurobolt (C‑644/17, EU:C:2019:555), par le biais d’un artifice illégal qui permet à la Commission de rectifier rétroactivement des irrégularités. Les requérantes soulignent que l’absence de réparation appropriée découragera les opérateurs économiques d’attaquer en justice les actes de la Commission, en particulier lorsqu’ils seront viciés par la violation d’une forme substantielle, dans la mesure où ces opérateurs ne tireraient aucun bénéfice d’une éventuelle action en justice et ne feraient qu’engager des coûts supplémentaires.

103    Elles relèvent que la nouvelle politique de la Commission rend illusoire la protection juridictionnelle effective dans la mesure où, si jamais le juge de l’Union devait annuler le règlement attaqué, la Commission pourrait alors de nouveau corriger ses erreurs rétroactivement, comme elle l’a fait après l’arrêt du 3 juillet 2019, Eurobolt (C‑644/17, EU:C:2019:555), et où ce cycle pourrait continuer à l’infini.

104    La Commission conteste les arguments des requérantes.

105    Il y a lieu de rappeler que, aux termes de l’article 47, premier alinéa, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »), toute personne dont les droits et les libertés garantis par le droit de l’Union ont été violés a droit à un recours effectif devant un tribunal dans le respect des conditions prévues audit article.

106    Il convient de relever que, dans la mesure où la Charte contient des droits correspondant à des droits garantis par la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci-après la « CEDH »), l’article 52, paragraphe 3, de la Charte vise à assurer la cohérence nécessaire entre les droits contenus dans celle-ci et les droits correspondants garantis par la CEDH, sans que cela porte atteinte à l’autonomie du droit de l’Union et de la Cour de justice de l’Union européenne. Selon les explications afférentes à l’article 47 de la Charte, le premier alinéa de cet article est fondé sur l’article 13 de la CEDH. La Cour doit dès lors veiller à ce que l’interprétation qu’elle effectue de l’article 47, premier alinéa, de la Charte assure un niveau de protection qui ne méconnaît pas celui garanti à l’article 13 de la CEDH, tel qu’interprété par la Cour européenne des droits de l’homme [arrêt du 26 septembre 2018, Belastingdienst/Toeslagen (Effet suspensif de l’appel), C‑175/17, EU:C:2018:776, point 35].

107    Or, selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, le droit à un recours effectif devant un tribunal doit permettre aux justiciables de se prévaloir des droits et des libertés consacrés par la CEDH, étant précisé que ce droit fait peser sur les États une obligation dont la portée varie en fonction de la nature du grief de la partie requérante ou de la nature du droit invoqué et que le caractère effectif du recours ne dépend pas de la certitude d’une issue favorable pour l’intéressé (Cour EDH, 26 octobre 2000, Hassan et Tchaouch c. Bulgarie, CE:ECHR:2000:1026JUD003098596, § 98 ; 14 mars 2002, Paul et Audrey Edwards c. Royaume-Uni, CE:ECHR:2002:0314JUD004647799, § 96, et 6 mars 2001, Hilal c. Royaume-Uni, CE:ECHR:2001:0306JUD004527699, § 78).

108    À cet égard, il convient de relever, à l’instar de la Commission, que le droit à une protection juridictionnelle effective dans le domaine de la défense commerciale ne signifie pas automatiquement que chaque fois qu’une partie requérante forme un recours en annulation l’issue ultime doit être le remboursement du montant intégral des droits antidumping.

109    En l’espèce, l’illégalité constatée dans l’arrêt du 3 juillet 2019, Eurobolt (C‑644/17, EU:C:2019:555), ne concernait que le respect des exigences procédurales découlant de la procédure du comité consultatif prévue à l’article 15, paragraphe 2, du règlement no 1225/2009. Les requérantes reprochaient à la Commission de ne pas avoir transmis leurs observations au comité compétent au moins dix jours avant que celui-ci se réunisse et craignaient que les membres dudit comité n’aient pas été pleinement en mesure d’examiner leurs observations. Ainsi que le relève la Commission, à la suite de la réouverture de la procédure, cette erreur a été rectifiée et les membres du comité ont délibéré en pleine connaissance de toutes les observations des parties intéressées. Les requérantes ne pouvaient pas attendre de cette délibération en connaissance de cause qu’elle aboutisse nécessairement à un remboursement des droits.

110    Ainsi qu’il ressort du point 43 ci-dessus, la portée et les motifs de la déclaration de nullité d’un acte par la Cour dans un arrêt doivent être déterminés dans chaque cas spécifique. Ils peuvent être tels qu’ils ne nécessitent pas le remboursement total et immédiat des droits correspondants (voir, en ce sens, arrêt du 15 mars 2018, Deichmann, C‑256/16, EU:C:2018:187, point 70).

111    En l’espèce, l’infraction constatée par la Cour n’a pas entaché d’irrégularité l’ensemble de la procédure. La violation de l’obligation de respecter la procédure du comité consultatif prévue à l’article 15, paragraphe 2, du règlement no 1225/2009 pouvait être comblée et les mesures antidumping pouvaient être réinstituées conformément aux règles de procédure applicables.

112    Ainsi, en corrigeant cette irrégularité de procédure, en veillant à ce que la délibération du comité ait lieu dans le respect plein et entier des formes substantielles et en confirmant les conclusions de l’enquête qui n’ont pas été contestées par l’arrêt du 3 juillet 2019, Eurobolt (C‑644/17, EU:C:2019:555), la Commission a respecté son obligation découlant de l’article 266 TFUE de prendre les mesures que comportait l’exécution de cet arrêt ainsi que le droit à une protection juridictionnelle effective des requérantes.

113    Partant, il convient d’écarter la cinquième branche du premier moyen et, par conséquent, de rejeter le premier moyen dans son intégralité.

 Sur le deuxième moyen, tiré de l’absence de base juridique valable et de la violation du principe de bonne administration

114    Par leur deuxième moyen, les requérantes font valoir que, en instituant des mesures antidumping fondées sur le règlement no 91/2009, illégal et abrogé, le règlement attaqué viole l’article 13, paragraphe 1, du règlement no 1225/2009, l’article 5, paragraphes 1 et 2, TUE ainsi que le principe de bonne administration.

115    Tout d’abord, les requérantes observent que, selon l’article 13, paragraphe 1, du règlement no 1225/2009, les droits antidumping institués en vertu de ce règlement peuvent être étendus aux importations en provenance de pays tiers lorsque les mesures en vigueur sont contournées. Elles invoquent la jurisprudence selon laquelle un règlement portant extension d’un droit antidumping a pour seul objet d’assurer l’efficacité de celui-ci, de sorte qu’une mesure portant extension d’un droit antidumping définitif n’a qu’un caractère accessoire par rapport à l’acte initial instituant ce droit. Par conséquent, les requérantes font remarquer que les règlements qui portent extension de mesures antidumping ne sauraient exister sans le règlement qui avait initialement établi les mesures antidumping. Ainsi, selon elles, le règlement no 91/2009 fait fonction de base juridique pour le règlement d’exécution no 723/2011.

116    Or, les requérantes soulignent que le règlement no 91/2009 viole à la fois le droit de l’OMC et le droit de l’Union. Elles observent que la Commission a dû abroger ce règlement parce que les violations du droit de l’OMC qu’il contenait étaient si graves qu’elles ne pouvaient être réparées. Selon les requérantes, la plupart des violations du droit de l’OMC constatées par l’ORD représentent également une violation du droit de l’Union. Elles précisent que la Cour a également jugé que ce règlement violait le droit de l’Union dans l’arrêt du 5 avril 2017, Changshu City Standard Parts Factory et Ningbo Jinding Fastener/Conseil (C‑376/15 P et C‑377/15 P, EU:C:2017:269).

117    Les requérantes soutiennent que, en adoptant le règlement attaqué en tant qu’acte n’ayant qu’un caractère accessoire par rapport au règlement no 91/2009, illégal et abrogé, la Commission a violé l’article 13, paragraphe 1, du règlement no 1225/2009, qui subordonne l’adoption de mesures anticontournement à l’existence de mesures antidumping adoptées en vertu du règlement no 1225/2009, ainsi que l’article 5, paragraphes 1 et 2, TUE, qui subordonne son action à l’existence d’une base juridique valable.

118    Enfin, les requérantes soutiennent que la Commission a violé le principe de bonne administration dans la mesure où, alors qu’elle savait que le règlement no 91/2009 était contraire au droit de l’OMC et au droit de l’Union, raison pour laquelle elle l’a abrogé, elle a tout de même adopté le règlement attaqué, acte n’ayant qu’un caractère accessoire, sur la base juridique du règlement no 91/2009, illégal et abrogé.

119    Les requérantes précisent qu’elles ne soutiennent pas que le fait que le règlement no 91/2009 viole le droit de l’OMC en soi est ce qui entache d’illégalité le règlement attaqué. Elles font valoir que la Commission ne saurait légalement adopter le règlement attaqué en tant qu’acte n’ayant qu’un caractère accessoire par rapport au règlement no 91/2009, qui est illégal et qui a été abrogé.

120    Enfin, les requérantes sont d’accord avec l’affirmation de la Commission selon laquelle l’abrogation du règlement no 91/2009 concerne uniquement le futur. Par conséquent, elles soulignent que, le règlement no 91/2009 ayant été abrogé en 2016, il ne saurait valablement servir de base juridique complémentaire pour adopter, en 2020, le règlement attaqué.

121    La Commission conteste les arguments des requérantes.

122    Dans le cadre du deuxième moyen, les requérantes soutiennent, en substance, que le règlement attaqué n’a pas été adopté sur une base juridique valable et que, par conséquent, la Commission a violé l’article 13, paragraphe 1, du règlement no 1225/2009, l’article 5, paragraphes 1 et 2, TUE ainsi que le principe de bonne administration.

123    En premier lieu, s’agissant de l’argument des requérantes relatif à la violation de l’article 13, paragraphe 1, du règlement no 1225/2009, il convient, tout d’abord, de rappeler que les actes de l’Union doivent, en principe, être adoptés conformément aux règles de procédure en vigueur à la date de leur adoption (voir arrêt du 15 mars 2018, Deichmann, C‑256/16, EU:C:2018:187, point 52 et jurisprudence citée).

124    Il s’ensuit que, en raison précisément de l’abrogation du règlement no 1225/2009 et eu égard à la finalité du règlement de base, les procédures engagées sur la base du premier de ces règlements ne pouvaient plus, à compter de son abrogation, être poursuivies que sur la base du second de ceux-ci (voir, en ce sens, arrêt du 15 mars 2018, Deichmann, C‑256/16, EU:C:2018:187, point 52).

125    Le règlement de base étant, conformément à son article 25, entré en vigueur le 20 juillet 2016 et le règlement attaqué ayant été adopté le 3 avril 2020, c’est donc à juste titre que ce dernier a été fondé sur ce règlement, notamment sur son article 13 et son article 14, paragraphe 1, comme cela est exposé dans le second visa du règlement attaqué (voir, en ce sens, arrêt du 9 juin 2021, Roland/Commission, T‑132/18, non publié, EU:T:2021:329, point 74).

126    À cet égard, il convient de noter que, d’une part, selon l’article 13, paragraphe 1, du règlement de base, les droits antidumping institués en vertu dudit règlement peuvent être étendus aux importations en provenance de pays tiers de produits similaires, légèrement modifiés ou non, ainsi qu’aux importations de produits similaires légèrement modifiés en provenance du pays soumis aux mesures ou de parties de ces produits, lorsque les mesures en vigueur sont contournées. D’autre part, conformément à l’article 14, paragraphe 1, dudit règlement, les droits antidumping sont imposés par voie de règlement. Ainsi, par analogie à ce que la Cour a constaté dans l’arrêt du 19 juin 2019, C & J Clark International (C‑612/16, non publié, EU:C:2019:508, point 42), ces deux dispositions, lues conjointement, habilitent donc la Commission à étendre les droits antidumping lorsque les mesures en vigueur sont contournées par voie de règlement (voir, en ce sens, arrêt du 9 juin 2021, Roland/Commission, T‑132/18, non publié, EU:T:2021:329, point 75).

127    L’article 13 et l’article 14, paragraphe 1, du règlement de base, lus conjointement, habilitent également la Commission à procéder à une réinstitution des droits anticontournement à la suite du prononcé d’un arrêt d’annulation ou d’invalidation après que celle-ci a repris la procédure à l’origine du règlement annulé ou invalidé par le juge de l’Union et remédié dans ce cadre, conformément aux règles procédurales et matérielles applicables ratione temporis, à l’illégalité constatée (voir, en ce sens, arrêt du 9 juin 2021, Roland/Commission, T‑132/18, non publié, EU:T:2021:329, point 76 et jurisprudence citée).

128    Il s’ensuit que, en tant qu’il vise l’article 13 et l’article 14, paragraphe 1, du règlement de base, le règlement attaqué est fondé sur une base juridique habilitant la Commission à réinstituer les droits anticontournement imposés par le règlement invalidé (voir, en ce sens, arrêt du 9 juin 2021, Roland/Commission, T‑132/18, non publié, EU:T:2021:329, point 77 et jurisprudence citée).

129    En ce qui concerne l’argument des requérantes selon lequel l’article 13, paragraphe 1, du règlement no 1225/2009 (devenu article 13 du règlement de base) subordonne l’adoption de mesures anticontournement à l’existence de mesures antidumping adoptées en vertu du règlement no 1225/2009, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, cette disposition ne s’oppose pas à l’adoption d’un règlement portant extension de mesures antidumping alors que ces mesures ne sont plus en vigueur, à la condition, d’une part, que l’extension concerne exclusivement la période antérieure à l’expiration de ces mesures et, d’autre part, que l’enregistrement des importations concernées ait été ordonné, conformément à l’article 13, paragraphe 3, et à l’article 14, paragraphe 5, du règlement no 1225/2009 (devenus article 13, paragraphe 3, et article 14, paragraphe 5, du règlement de base) ou, le cas échéant, que des garanties aient été exigées, au moment de l’ouverture de l’enquête sur le contournement, afin de permettre l’application rétroactive des mesures étendues à compter de la date de cet enregistrement (voir, en ce sens, arrêt du 17 décembre 2015, APEX, C‑371/14, EU:C:2015:828, point 55).

130    En l’espèce, les mesures antidumping instituées par le règlement no 91/2009, ainsi que les mesures anticontournement instituées par le règlement d’exécution no 723/2011, ont expiré le 27 février 2016, avec l’abrogation de ce règlement par le règlement d’exécution 2016/278, à la suite de la décision de l’ORD du 12 février 2016 (voir point 12 ci-dessus).

131    Le règlement attaqué, par lequel les droits anticontournement aux importations de certains éléments de fixation en fer ou en acier expédiés de Malaisie ont été réinstitués après l’invalidation du règlement d’exécution no 723/2011 par l’arrêt du 3 juillet 2019, Eurobolt (C‑644/17, EU:C:2019:555), a été adopté le 30 avril 2020.

132    Le règlement attaqué prévoit, dans son article 1er, paragraphe 1, que ces droits soient réinstitués pour la période d’application du règlement d’exécution n° 723/2011, à savoir du 27 juillet 2011, date d’entrée en vigueur de ce règlement d’exécution, au 27 février 2016, date d’expiration des mesures antidumping instituées par le règlement no 91/2009 et des mesures anticontournement instituées par le règlement d’exécution no 723/2011.

133    Par ailleurs, ainsi qu’il ressort du point 5 ci-dessus, par l’adoption du règlement no 966/2010 portant ouverture de l’enquête anticontournement, les importations ont été soumises à enregistrement, en vertu de l’article 14, paragraphe 5, du règlement no 1225/2009, afin d’assurer que, dès lors que l’enquête conclurait à l’existence d’un contournement, les droits antidumping d’un montant approprié puissent être perçus rétroactivement à dater de l’enregistrement de telles importations expédiées de Malaisie.

134    Compte tenu de l’analyse qui précède, il y a lieu de constater que, en adoptant le règlement attaqué à une date où les mesures antidumping instituées par le règlement no 91/2009 avaient expiré, la Commission n’a pas méconnu les exigences résultant de l’article 13 du règlement de base, dès lors que, d’une part, la réinstitution de mesures anticontournement portait exclusivement sur la période antérieure à leur expiration et que, d’autre part, à la date d’ouverture de l’enquête sur le contournement, l’enregistrement des importations concernées avait été ordonné, conformément à l’article 13, paragraphe 3, et à l’article 14, paragraphe 5, de ce règlement, afin de permettre l’application rétroactive des mesures étendues (voir, en ce sens, arrêt du 17 décembre 2015, APEX, C‑371/14, EU:C:2015:828, point 58).

135    En deuxième lieu, s’agissant de l’argument des requérantes relatif à la violation du principe d’attribution énoncé à l’article 5, paragraphes 1 et 2, TUE, il y a lieu de rappeler que, en vertu de cette disposition, l’Union n’agit que dans les limites des compétences que les États membres lui ont attribuées dans les traités pour atteindre les objectifs que ces traités établissent et selon lesquels toute compétence non attribuée dans les traités appartient aux États membres.

136    À cet égard, il convient de relever, à l’instar de la Commission, que la compétence pour adopter des règlements anticontournement est attribuée à la Commission en application de l’article 207 TFUE, relatif à la politique commerciale commune, et de l’article 13, paragraphe 1, du règlement de base, adopté sur cette base juridique de droit primaire, pour instituer des droits antidumping en cas de contournement. Par conséquent, il y a lieu de constater que, en adoptant le règlement attaqué, la Commission n’a pas violé l’article 5, paragraphes 1 et 2, TUE.

137    En troisième lieu, s’agissant de l’argument des requérantes relatif à la violation du principe de bonne administration, il y a lieu de constater, ainsi qu’il ressort du point 12 ci-dessus, que la Commission a décidé d’abroger les droits antidumping institués sur les importations de certains éléments de fixation en fer ou en acier originaires de Chine, étendus aux importations de certains éléments de fixation en fer ou en acier expédiés de Malaisie, en adoptant le règlement d’exécution 2016/278, afin de mettre ces mesures en conformité avec les conclusions des groupes spéciaux et de l’organe d’appel de l’OMC. Ainsi qu’il ressort de l’article 2 du règlement d’exécution 2016/278, l’abrogation des droits antidumping prenait effet à compter de la date d’entrée en vigueur de ce règlement et ne servait pas de base pour le remboursement des droits perçus avant cette date. Par conséquent, l’abrogation des droits antidumping n’a pas eu un effet ex tunc.

138    À cet égard, il convient de relever que l’abrogation ex nunc des droits antidumping institués par le règlement no 91/2009, à la suite de la décision de l’ORD du 12 février 2016, n’affecte pas la validité du règlement no 91/2009.

139    Ainsi qu’il ressort du point 119 ci-dessus, les requérantes admettent que le fait que le règlement no 91/2009 viole le droit de l’OMC n’entache pas en soi d’illégalité le règlement attaqué. Il importe également de préciser que, lors de l’audience, en réponse à une question du Tribunal, les requérantes ont précisé que, en invoquant le principe de bonne administration, elles ne demandaient pas au Tribunal d’examiner la légalité du règlement attaqué au regard des accords OMC. Elles ont soutenu toutefois que, quatre ans après l’abrogation des droits antidumping institués par le règlement no 91/2009 en raison de sa non-conformité avec les accords OMC, la Commission n’aurait pas dû considérer le règlement no 91/2009 comme une base juridique valable pour adopter le règlement attaqué.

140    En ce qui concerne les accords OMC, il résulte d’une jurisprudence constante que, compte tenu de leur nature et de leur économie, ceux-ci ne figurent pas, en principe, parmi les normes au regard desquelles la légalité des actes des institutions de l’Union peut être contrôlée (arrêts du 23 novembre 1999, Portugal/Conseil, C‑149/96, EU:C:1999:574, point 47, et du 15 novembre 2018, Baby Dan, C‑592/17, EU:C:2018:913, point 66).

141    À cet égard, la Cour a en particulier relevé que le fait d’admettre que la tâche d’assurer la conformité du droit de l’Union avec les règles de l’OMC incombe directement au juge de l’Union reviendrait à priver les organes législatifs ou exécutifs de l’Union de la marge de manœuvre dont jouissent les organes similaires des partenaires commerciaux de l’Union. Il est en effet constant que certaines des parties contractantes, dont les partenaires les plus importants de l’Union du point de vue commercial, ont précisément tiré, à la lumière de l’objet et du but des accords OMC, la conséquence que ceux-ci ne figuraient pas parmi les normes au regard desquelles leurs organes juridictionnels contrôlaient la légalité de leurs règles de droit interne. Une telle absence de réciprocité, si elle était admise, risquerait d’aboutir à un déséquilibre dans l’application des règles de l’OMC (arrêt du 1er mars 2005, Van Parys, C‑377/02, EU:C:2005:121, point 53).

142    Ce n’est que dans deux situations exceptionnelles, ayant trait à la volonté du législateur de l’Union de limiter lui-même sa marge de manœuvre dans l’application des règles de l’OMC, que la Cour a admis qu’il appartenait au juge de l’Union, le cas échéant, de contrôler la légalité d’un acte de l’Union et des actes pris pour son application au regard des accords OMC ou d’une décision de l’ORD concernant le non-respect de ces accords (voir arrêt du 18 octobre 2018, Rotho Blaas, C‑207/17, EU:C:2018:840, point 47 et jurisprudence citée).

143    Il s’agit, d’une part, de l’hypothèse où l’Union a entendu donner exécution à une obligation particulière assumée dans le cadre de ces accords et, d’autre part, du cas dans lequel l’acte du droit de l’Union en cause renvoie expressément à des dispositions précises des mêmes accords (voir, en ce sens, arrêts du 22 juin 1989, Fediol/Commission, 70/87, EU:C:1989:254, points 19 à 23, et du 7 mai 1991, Nakajima/Conseil, C‑69/89, EU:C:1991:186, points 29 à 32).

144    Aucune des deux exceptions susmentionnées n’est applicable au règlement no 91/2009. En effet, la Cour a déjà jugé que cet acte ne renvoie pas expressément à des dispositions précises de l’article VI du GATT de 1994 ni ne fait ressortir que, en adoptant ce règlement, le Conseil a entendu donner exécution à une obligation particulière assumée dans le cadre de cet accord ou, plus généralement, des accords OMC. Ainsi, la Cour a conclu que la légalité du règlement no 91/2009 ne pourrait être appréciée ni au regard de l’article VI du GATT de 1994 ni au regard de la décision de l’ORD du 28 juillet 2011 et que, par conséquent, il n’y avait aucun élément de nature à affecter la validité du règlement no 91/2009 à cet égard (voir, en ce sens, arrêt du 18 octobre 2018, Rotho Blaas, C‑207/17, EU:C:2018:840, points 50, 56 et 57).

145    En ce qui concerne l’argument des requérantes, mentionné aux points 91 et 93 de la requête, selon lequel la Cour a annulé le « règlement initial » (à savoir le règlement no 91/2009), il importe de préciser que, dans l’arrêt du 5 avril 2017, Changshu City Standard Parts Factory et Ningbo Jinding Fastener/Conseil (C‑376/15 P et C‑377/15 P, EU:C:2017:269), la Cour a annulé le règlement d’exécution no 924/2012, modifiant le règlement no 91/2009, pour autant qu’il concernait deux sociétés établies en Chine, actives dans la production de certains éléments de fixation en fer ou en acier destinés à la vente sur le marché national ou à l’exportation, notamment vers l’Union.

146    Dans l’arrêt du 5 avril 2017, Changshu City Standard Parts Factory et Ningbo Jinding Fastener/Conseil (C‑376/15 P et C‑377/15 P, EU:C:2017:269), la Cour a jugé que, en estimant aux considérants 82, 102 et 109 du règlement d’exécution no 924/2012 qu’il convenait d’exclure les types de produits exportés par les producteurs-exportateurs chinois pour lesquels aucun type correspondant n’était produit et vendu par le producteur indien, le Conseil avait violé l’article 2, paragraphe 11, du règlement no 1225/2009 (voir, en ce sens, arrêt du 5 avril 2017, Changshu City Standard Parts Factory et Ningbo Jinding Fastener/Conseil, C‑376/15 P et C‑377/15 P, EU:C:2017:269, points 75 et 76).

147    Or, ainsi que le relève la Commission, l’annulation par la Cour du règlement d’exécution no 924/2012, modifiant le règlement no 91/2009, n’affecte pas la validité du règlement no 91/2009 lui-même, puisqu’elle ne fait que constater l’existence d’une erreur de droit dans le règlement d’exécution no 924/2012.

148    En ce qui concerne l’argument des requérantes selon lequel la Commission a également violé le principe de bonne administration, il convient de relever que le fait que la Commission a abrogé le règlement no 91/2009 en raison de sa non-conformité avec les accords OMC n’est pas de nature à entacher la légalité du règlement attaqué.

149    Certes, en vertu de l’article 216, paragraphe 2, TFUE, les accords internationaux conclus par l’Union lient les institutions de l’Union et les États membres. Selon une jurisprudence constante de la Cour, ces accords font partie intégrante de l’ordre juridique de l’Union à compter de leur entrée en vigueur [voir arrêt du 6 octobre 2020, Commission/Hongrie (Enseignement supérieur), C‑66/18, EU:C:2020:792, point 69 et jurisprudence citée]. De plus, selon l’article 21, paragraphe 2, TUE, l’Union est tenue de viser à assurer un « haut degré de coopération dans tous les domaines des relations internationales » afin, notamment, « de promouvoir un système international fondé sur une coopération multilatérale renforcée et une bonne gouvernance mondiale ».

150    Or, en l’espèce, premièrement, il convient de relever que, ainsi qu’il ressort du point 144 ci-dessus, la Cour a relevé que la légalité du règlement no 91/2009 ne pourrait être appréciée ni au regard de l’article VI du GATT de 1994 ni au regard de la décision de l’ORD du 28 juillet 2011. Ainsi, il y a lieu de constater, à l’instar de la Commission, que la non-conformité du règlement no 91/2009 avec les accords OMC n’est pas de nature à affecter sa validité dans l’ordre juridique de l’Union.

151    Deuxièmement, la Commission a respecté son obligation de mettre en conformité les mesures antidumping avec les conclusions des groupes spéciaux et de l’organe d’appel de l’OMC, en abrogeant ces droits par le règlement d’exécution 2016/278.

152    Troisièmement, le règlement attaqué a été adopté en vertu de l’article 13 et de l’article 14, paragraphe 1, du règlement de base. Il réinstitue les droits anticontournement pour la période d’application du règlement d’exécution no 723/2011, à savoir entre le 27 juillet 2011 et le 27 février 2016, période pendant laquelle les mesures initiales instituées par le règlement no 91/2009 n’avaient pas encore expiré (voir points 132 et 134 ci-dessus).

153    Enfin, ainsi qu’il ressort du considérant 29 du règlement attaqué, la Commission avait l’obligation de prendre les mesures nécessaires pour se conformer à un arrêt de la Cour, c’est-à-dire corriger une illégalité constatée par la Cour. Étant donné que l’erreur de procédure pouvait être corrigée et que les conclusions relatives au contournement des mesures ont été confirmées, la Commission était en droit de réinstituer les droits anticontournement pour la période d’application des mesures en cause, sur la base des conclusions non contestées de l’enquête anticontournement.

154    Par conséquent, il y a lieu de constater que, en adoptant le règlement attaqué, la Commission n’a pas violé le principe de bonne administration.

155    Au vu des considérations qui précèdent, il convient d’écarter le deuxième moyen des requérantes. 

 Sur le troisième moyen, tiré de l’incompétence de la Commission pour interdire le remboursement des droits antidumping et ordonner le recouvrement des remboursements effectués

156    Par leur troisième moyen, les requérantes font valoir que, en interdisant définitivement aux autorités douanières de rembourser les droits antidumping indûment versés sur le fondement du règlement d’exécution no 723/2011, déclaré invalide par la Cour dans son arrêt du 3 juillet 2019, Eurobolt (C‑644/17, EU:C:2019:555), et en leur ordonnant de récupérer les remboursements effectués à la suite de cet arrêt, le règlement attaqué viole l’article 5, paragraphes 1 et 2, TUE.

157    À cet égard, les requérantes considèrent que, dans le règlement attaqué, la Commission a usurpé la compétence des autorités douanières de décider du remboursement des droits antidumping indûment versés sur le fondement du règlement d’exécution no 723/2011 invalide.

158    Selon les requérantes, ainsi qu’il ressort des arrêts du 15 mars 2018, Deichmann (C‑256/16, EU:C:2018:187, point 84), et du 19 juin 2019, C & J Clark International (C‑612/16, non publié, EU:C:2019:508, points 84 et 85), la dette douanière fondée sur le règlement d’exécution no 723/2011 invalide est juridiquement distincte de la dette douanière fondée sur le règlement attaqué. Ainsi, le remboursement des droits antidumping qu’elles ont indûment versés sur le fondement du règlement d’exécution no 723/2011 invalide est juridiquement distinct de la perception éventuelle de la dette douanière fondée sur le règlement attaqué. Il en va de même pour la récupération des droits antidumping que les autorités douanières peuvent avoir remboursés en application de l’arrêt du 3 juillet 2019, Eurobolt (C‑644/17, EU:C:2019:555).

159    De surcroît, elles soulignent que, contrairement à ce qui est affirmé dans le règlement attaqué, la Cour n’a jamais reconnu que la Commission pouvait définitivement interdire le remboursement de droits antidumping indûment versés sur le fondement d’un règlement invalide. Les autorités douanières bénéficient d’une compétence exclusive pour interdire définitivement le remboursement de droits antidumping et, par analogie, pour ordonner la récupération des droits déjà remboursés. Dans les arrêts du 15 mars 2018, Deichmann (C‑256/16, EU:C:2018:187, point 59), et du 19 juin 2019, C & J Clark International (C‑612/16, non publié, EU:C:2019:508, point 42), la Cour a simplement reconnu que la Commission pouvait interdire temporairement le remboursement, pendant qu’elle rouvrait une enquête antidumping en vertu de l’article 266 TFUE, afin de préserver la perception des droits antidumping.  

160    La Commission conteste les arguments des requérantes.

161    S’agissant de l’argument des requérantes selon lequel la Commission a usurpé la compétence des autorités douanières de décider du remboursement des droits antidumping indûment versés sur le fondement du règlement d’exécution no 723/2011, déclaré invalide par la Cour, il suffit de rappeler, ainsi qu’il ressort du point 135 ci-dessus, que la compétence pour adopter des règlements anticontournement est attribuée à la Commission au titre de l’article 207 TFUE relatif à la politique commerciale commune et de l’article 13, paragraphe 1, du règlement de base, adopté sur cette base juridique de droit primaire, pour instituer des droits antidumping en cas de contournement.

162    Il convient également de renvoyer aux points 125 et 126 ci-dessus, qui exposent que c’est à juste titre que le règlement attaqué a été adopté en vertu de l’article 13 et de l’article 14, paragraphe 1, du règlement de base.

163    L’article 2 du règlement attaqué dispose que les droits antidumping versés sur le fondement du règlement d’exécution no 723/2011 ne sont pas remboursés et que les remboursements effectués à la suite de l’arrêt du 3 juillet 2019, Eurobolt (C‑644/17, EU:C:2019:555), sont récupérés par les autorités qui ont procédé à ces remboursements.

164    Cet article n’est que la conséquence logique du fait que, après la rectification de l’illégalité, à la suite de l’arrêt du 3 juillet 2019, Eurobolt (C‑644/17, EU:C:2019:555), la Commission a réinstitué à l’identique les droits anticontournement institués par le règlement d’exécution no 723/2011.

165    Par ailleurs, il convient de relever que la Cour a confirmé, dans l’arrêt du 15 mars 2018, Deichmann (C‑256/16, EU:C:2018:187, point 59), que la Commission était habilitée à adresser des injonctions aux autorités douanières nationales, lesdites injonctions portant sur la perception des droits antidumping concernés par l’État membre concerné.

166    Certes, ainsi que le font valoir les requérantes, dans l’arrêt du 15 mars 2018, Deichmann (C‑256/16, EU:C:2018:187), la Cour a reconnu que la Commission pouvait interdire temporairement le remboursement pendant qu’elle rouvrait une enquête antidumping en vertu de l’article 266 TFUE, afin de préserver la perception des droits antidumping.

167    Toutefois, ainsi que le souligne la Commission, la finalité même de l’interdiction temporaire est de prévenir tout risque de prescription ou d’insolvabilité ou tout autre obstacle au recouvrement des droits pendant le temps nécessaire à l’exécution de l’arrêt. Ainsi, la finalité de l’interdiction temporaire est de rendre possible et de préparer l’interdiction définitive.

168    Partant, il convient de relever que la Commission n’a pas violé l’article 5, paragraphes 1 et 2, TUE en interdisant définitivement aux autorités douanières de rembourser les droits antidumping indûment versés sur le fondement du règlement d’exécution no 723/2011, déclaré invalide par la Cour dans son arrêt du 3 juillet 2019, Eurobolt (C‑644/17, EU:C:2019:555), et en leur ordonnant de récupérer les remboursements effectués à la suite de cet arrêt.

169    Dès lors, il ne saurait être considéré que, en adoptant le règlement attaqué, la Commission a usurpé la compétence des autorités douanières de décider du remboursement des droits antidumping indûment versés sur le fondement du règlement d’exécution no 723/2011.

170    Au vu des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le troisième moyen et, partant, le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

171    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Les requérantes ayant succombé, il y a lieu de les condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Eurobolt BV, Fabory Nederland BV, ASF Fischer BV et Stafa Group BV sont condamnées aux dépens.

Costeira

Perišin

Zilgalvis

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 18 mai 2022.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.