Language of document : ECLI:EU:T:2023:721

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

15 novembre 2023 (*)

« Union économique et monétaire – Union bancaire – Mécanisme de résolution unique des établissements de crédit et de certaines entreprises d’investissement (MRU) – Procédure de résolution – Décision de ne pas adopter de dispositif de résolution – Recours en annulation –– Annexes de la requête – Intérêt à agir – Qualité pour agir – Compétence de l’auteur de l’acte – Droit d’être entendu – Obligation de motivation – Notion de “défaillance avérée ou prévisible de l’entité”– Erreur manifeste d’appréciation –Proportionnalité – Égalité de traitement »

Dans l’affaire T‑732/19,

PNB Banka AS, établie à Riga (Lettonie), et les autres parties requérantes dont les noms figurent en annexe (1), représentées par Me O. Behrends, avocat,

parties requérantes,

contre

Conseil de résolution unique (CRU), représenté par Mme H. Ehlers, MM. J. Kerlin et J. Rius Riu, en qualité d’agents, assistés de Me H.-G. Kamann, F. Louis, et L. Forestier, avocats,

partie défenderesse,

soutenu par

République de Lettonie, représentée par Mmes K. Pommere et J. Davidoviča, en qualité d’agents,

et par

Banque centrale européenne (BCE), représentée par Mme E. Koupepidou, MM. A. Lefterov et F. Bonnard, en qualité d’agents,

parties intervenantes,

LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé de Mme K. Kowalik‑Bańczyk, présidente, MM. G. Hesse (rapporteur) et I. Dimitrakopoulos, juges,

greffier : M. V. Di Bucci,

vu la phase écrite de la procédure,

–        la décision du 13 mai 2020 de suspendre la procédure jusqu’à la décision de la Cour mettant fin à l’instance dans les affaires ayant donné lieu à l’arrêt du 6 mai 2021, ABLV Bank e.a./BCE (C‑551/19 P et C‑552/19 P, EU:C:2021:369),

–        l’ordonnance du 4 janvier 2022, PNB Banka e.a./CRU, (T-732/19, non publiée, EU:T:2022:8), par laquelle le Tribunal a décidé qu’il n’y avait plus lieu de statuer sur le présent recours pour autant qu’il était introduit par CR et CT,

–        la décision du 17 juin 2022 de suspendre l’affaire jusqu’aux décisions du Tribunal mettant fin à l’instance dans les affaires ayant donné lieu aux arrêts du 7 décembre 2022, PNB Banka/BCE (T‑301/19, sous pourvoi, EU:T:2022:774), du 7 décembre 2022, PNB Banka/BCE (T‑330/19, sous pourvoi, EU:T:2022:775), et du 7 décembre 2022, PNB Banka/BCE (T‑275/19, sous pourvoi, EU:T:2022:781),

–        la mesure d’organisation de la procédure du 21 décembre 2022,

–        les questions écrites du Tribunal adressées au parties et leurs réponses à ces questions déposées au greffe du Tribunal les 13 et 27 janvier 2023,

rend le présent

Arrêt

1        Par leur recours fondé sur l’article 263 TFUE, les requérants, PNB Banka AS et les autres personnes dont les noms figurent en annexe, demandent l’annulation de la décision SRB/EES/2019/131 du Conseil de résolution unique (CRU), du 15 août 2019, de ne pas adopter de dispositif de résolution à l’égard de l’établissement de crédit PNB Banka AS (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        PNB Banka est un établissement de crédit de droit letton, qui fournissait un large éventail de services bancaires, financiers et de gestion de capitaux. Les huit autres requérants sont des actionnaires ou des actionnaires potentiels de PNB Banka.

3        La Banque centrale européenne (BCE) a décidé de mener une inspection dans les locaux de PNB Banka, qui a été notifiée à cette dernière par courrier du 14 février 2019. Le travail sur site a eu lieu entre le 4 mars et le 10 mai 2019 (ci-après l’« inspection sur place »).

4        Par décision du 1er mars 2019, la BCE a classé PNB Banka en tant qu’entité importante soumise à sa surveillance prudentielle directe, en application des dispositions de l’article 6, paragraphe 5, sous b), du règlement (UE) no 1024/2013 du Conseil, du 15 octobre 2013, confiant à la [BCE] des missions spécifiques ayant trait aux politiques en matière de surveillance prudentielle des établissements de crédit (JO 2013, L 287, p. 63). Cette décision a pris effet le 4 avril 2019.

5        La BCE a notifié à PNB Banka, par courrier du 21 mars 2019, sa décision de s’opposer à l’opération consistant en l’acquisition de participations qualifiées dans A, un autre établissement de crédit letton (ci-après la « banque cible »).

6        Sur demande de la Finanšu un kapitāla tirgus komisija (Commission des marchés financiers et des capitaux, Lettonie) (ci-après la « CMFC »), PNB Banka a présenté, le 11 avril 2019, un plan de conservation de ses fonds propres, en vertu de la loi lettone transposant l’article 142 de la directive 2013/36/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, concernant l’accès à l’activité des établissements de crédit et la surveillance prudentielle des établissements de crédit et des entreprises d’investissement, modifiant la directive 2002/87/CE et abrogeant les directives 2006/48/CE et 2006/49/CE (JO 2013, L 176, p. 338). PNB Banka proposait, notamment, de vendre un certain nombre de ses actifs, d’acquérir des participations dans la banque cible et d’attirer de nouveaux investisseurs.

7        Le 11 juillet 2019, la BCE a décidé d’adopter des mesures d’intervention précoce à l’encontre de PNB Banka (ci-après la « décision d’intervention précoce ») et a invité celle-ci à soumettre, pour le 1er août 2019, un plan d’action exposant comment elle entendait parvenir à rétablir une conformité durable à certaines exigences prudentielles, relatives à l’exigence totale de fonds propres dans le cadre du processus de contrôle et d’évaluation prudentielle (Supervisory Review and Evaluation Process, SREP) (au plus tard le 1er septembre 2019), aux exigences globales de fonds propres (overall capital requirements, OCR) (avant le 1er novembre 2019), aux limites aux grands risques au niveau consolidé et individuel (avant le 1er octobre 2019) et aux limites aux transactions avec des parties liées prévues par la règlementation lettone (avant le 15 août 2019).

8        Le 25 juillet 2019, PNB Banka a publié ses états financiers audités pour 2018, en y intégrant une partie des dépréciations et ajustements de juste valeur demandés par son auditeur externe. Selon ce dernier, la valeur de certains actifs de PNB Banka était surévaluée et ses pertes étaient sous-estimées.

9        Le 31 juillet 2019, le CRU a chargé un évaluateur externe indépendant de procéder à une évaluation afin de déterminer si PNB Banka était en situation de défaillance avérée ou prévisible. Le rapport de valorisation établi par ledit évaluateur a été envoyé au CRU le 13 août 2019 (ci-après le « rapport de valorisation »). Selon ce rapport, PNB Banka présentait, le 31 mars 2019, notamment, un actif qui était inférieur à son passif.

10      Le 1er août 2019, PBN Banka a soumis à la BCE le plan d’action exigé dans la décision d’intervention précoce (ci-après le « plan d’action »). Elle a estimé qu’il lui fallait attirer 146 millions d’euros en fonds propres pour atteindre le ratio d’adéquation des fonds propres exigé par la BCE. Dans le plan d’action, elle a défini les mesures qu’elle adopterait afin de rétablir une conformité durable aux exigences de fonds propres fixées dans cette décision.

11      Le 6 août 2019, la BCE a envoyé une lettre à PNB Banka concluant, notamment, que le plan d’action n’apportait pas d’assurances suffisantes sur sa capacité à rétablir une conformité durable aux exigences de fonds propres au 1er septembre 2019, comme exigé dans la décision d’intervention précoce.

12      Le 13 août 2019, le rapport final de l’inspection sur place (ci-après le « rapport d’inspection ») a été envoyé à PNB Banka. Il constatait l’existence de neuf facteurs de risque concernant les fonds propres de ladite banque, dont six d’une importance majeure. Il concluait que PNB Banka avait une valeur nette négative de – 58,2 millions d’euros au 31 décembre 2018.

13      Le 13 août 2019, PNB Banka a répondu à la lettre de la BCE du 6 août 2019. Dans sa réponse, soutenue par une lettre signée de ses six nouveaux actionnaires, elle proposait plusieurs actions en vue d’augmenter ses fonds propres.

14      Le 15 août 2019, la BCE a conclu que la défaillance de PNB Banka était réputée avérée ou prévisible au sens de l’article 18, paragraphe 1, sous a), du règlement (UE) no 806/2014 du Parlement européen et du Conseil, du 15 juillet 2014, établissant des règles et une procédure uniformes pour la résolution des établissements de crédit et de certaines entreprises d’investissement dans le cadre d’un mécanisme de résolution unique et d’un Fonds de résolution bancaire unique, et modifiant le règlement (UE) no 1093/2010 (JO 2014, L 225, p. 1). Le même jour, le CRU a adopté la décision attaquée.

15      L’article 1er de la décision attaquée est ainsi libellé : « PNB Banka AS ne sera pas soumise à une procédure de résolution ».

16      L’article 2, paragraphe 1, de la décision attaquée énonce que « [c]ette décision est adressée à la [CMFC], en sa capacité d’autorité de résolution nationale au sens de l’article 3, paragraphe 1, troisième alinéa, du règlement no 806/2014 ».

17      L’article 2, paragraphe 2, de la décision attaquée prévoit que, « [c]onformément à l’article 29, paragraphe 1, du règlement no 806/2014, la [CMFC] mettra en œuvre cette [d]écision et s’assurera que toute mesure prise y est conforme, selon les considérations prévues ».

18      Le 22 août 2019, la CMFC a déposé une demande d’ouverture d’une procédure d’insolvabilité à l’encontre de PNB Banka.

19      Le 12 septembre 2019, la Rīgas pilsētas Vidzemes priekšpilsētas tiesa (tribunal de la ville de Riga, arrondissement suburbain de Vidzeme, Lettonie) a prononcé l’insolvabilité de PNB Banka en vertu de la législation lettone en matière de procédure civile. Parallèlement, un administrateur judiciaire a été nommé. Ladite juridiction lui a alors transféré l’ensemble des pouvoirs de PNB Banka et de son conseil d’administration. Cette juridiction a, par ailleurs, rejeté la demande du conseil d’administration de PNB Banka de maintenir ses droits de représenter cette dernière dans le cadre du recours, notamment contre l’évaluation par la BCE de sa défaillance avérée ou prévisible et contre la décision attaquée.

20      Le 17 février 2020, la BCE a retiré, avec effet à partir du 18 février 2020, l’agrément en tant qu’établissement de crédit de PNB Banka conformément à l’article 4, paragraphe 1, sous a), et à l’article 14, paragraphe 5, du règlement no 1024/2013 ainsi qu’aux articles 80 et 83 du règlement no 468/2014 de la [BCE], du 16 avril 2014, établissant le cadre de la coopération au sein du mécanisme de surveillance unique entre la [BCE], les autorités compétentes nationales et les autorités désignées nationales (le « règlement-cadre MSU ») (JO 2014, L 141, p. 1), lus conjointement avec l’article 18, sous d) et e), de la directive 2013/36 et avec la législation lettone sur les établissements de crédit.

 Conclusions des parties

21      Les requérants concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner le CRU aux dépens.

22      Le CRU, soutenu par la République de Lettonie et par la BCE, conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme étant dénué de tout fondement ;

–        condamner les requérants aux dépens.

 En droit

 Sur la phase orale de la procédure 

23      Aux termes de l’article 106 du règlement de procédure du Tribunal :

« 1. La procédure devant le Tribunal comporte, dans sa phase orale, une audience de plaidoiries organisée soit d’office soit à la demande d’une partie principale.

2. La demande d’audience de plaidoiries par une partie principale doit indiquer les motifs pour lesquels celle-ci souhaite être entendue […]

3. En l’absence de demande visée au paragraphe 2, le Tribunal peut, s’il s’estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier de l’affaire, décider de statuer sur le recours sans phase orale de la procédure […] »

24      L’exposé des motifs du projet de règlement de procédure du 14 mars 2014 confirme d’ailleurs que, compte tenu en particulier des exigences de bonne administration de la justice et d’économie de la procédure, « le Tribunal entend pouvoir se dispenser d’organiser une audience s’il ne l’estime pas nécessaire, à moins qu’une des parties principales ne présente une demande en indiquant les motifs pour lesquels elle souhaite être entendue ».

25      Les dispositions pratiques d’exécution du règlement de procédure (ci-après les « DPE ») prévoient, au point 142, que la partie principale qui souhaite être entendue lors d’une audience de plaidoiries doit présenter, dans un délai de trois semaines à compter de la signification aux parties de la clôture de la phase écrite de la procédure, une demande motivée en ce sens. Ce point précise que cette motivation doit résulter d’une appréciation concrète de l’utilité d’une audience de plaidoiries pour la partie en cause et indiquer les éléments du dossier de l’affaire ou de l’argumentation que cette partie estime nécessaire de développer ou de réfuter plus amplement lors d’une audience de plaidoiries. Il prévoit que, pour mieux orienter les débats lors de celle-ci, il est souhaitable que la motivation ne revête pas un caractère général se bornant, par exemple, à se référer à l’importance de l’affaire. Le point 143 des DPE prévoit que, en l’absence de demande motivée présentée dans le délai imparti par une partie principale, le Tribunal peut décider de statuer sur le recours sans phase orale de la procédure.

26      Il résulte ainsi de l’article 106 du règlement de procédure ainsi que des points 142 et 143 des DPE que, en l’absence de demande d’audience de plaidoiries ou en présence d’une demande d’audience de plaidoiries dépourvue de motivation, le Tribunal peut décider de statuer sur le recours sans phase orale de la procédure, s’il s’estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier de l’affaire.

27      En l’occurrence, dans son courrier du 2 décembre 2021 informant les parties principales de la clôture de la phase écrite de la procédure, le greffe du Tribunal a rappelé les dispositions de l’article 106, paragraphe 2, du règlement de procédure ainsi que celles du point 142 des DPE.

28      Les requérants ont, par courrier du 28 décembre 2021, demandé la tenue d’une audience. Ils invoquent une ingérence dans leur représentation effective et font référence à l’attitude de l’administrateur judiciaire de PNB Banka (voir point 19 ci-dessus), qui ne reconnaîtrait pas le droit du conseil d’administration de PNB Banka de représenter celle-ci en droit. Ils soutiennent également être dépourvus d’une protection juridictionnelle effective et que ni le CRU ni le Tribunal n’ont respecté la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte ») à cet égard. Ils n’apportent pourtant aucun élément en rapport avec le dossier dont dispose le Tribunal dans la présente affaire qui justifierait la tenue d’une audience.

29      Partant, force est de constater que les requérants n’apportent pas d’éléments permettant d’apprécier concrètement l’utilité d’une audience de plaidoiries pour eux ni n’indiquent les éléments du dossier de l’affaire ou de l’argumentation qu’ils estiment nécessaires de développer ou de réfuter plus amplement lors d’une audience de plaidoiries. Dans ces conditions, la demande d’audience ne saurait être qualifiée de demande indiquant les motifs pour lesquels les requérants souhaitent être entendus au sens de l’article 106, paragraphe 2, du règlement de procédure et du point 142 des DPE.

30      Dans ces conditions, le Tribunal, s’estimant suffisamment éclairé par les pièces du dossier, décide de statuer sur le recours sans phase orale de la procédure, conformément à l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure.

 Sur la recevabilité

31      Le CRU soulève trois fins de non-recevoir, tirées, respectivement, la première, du fait que les requérants n’ont pas annexé une copie de la décision attaquée à la requête, la deuxième, du défaut de qualité pour agir des requérants en ce qu’ils ne seraient pas directement concernés par ladite décision et, la troisième, du défaut d’intérêt à agir des requérants.

 Sur la fin de non-recevoir tirée du fait que les requérants n’ont pas annexé une copie de la décision attaquée à la requête

32      Le CRU fait valoir que les requérants n’ont pas fondé la requête sur le texte de la décision attaquée, décision qu’ils n’ont pas jointe à la requête, contrairement à ce que prévoit l’article 21, paragraphe 2, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et l’article 78, paragraphe 1, du règlement de procédure.

33      Il y a lieu de constater que la décision attaquée n’a pas été attachée à la requête. Les requérants font valoir qu’ils ne disposaient pas du texte interne de la décision attaquée à la date du dépôt de la requête. Ceux-ci ont déposé, devant le Tribunal, en tant qu’acte leur faisant grief annexé à la requête, le communiqué de presse selon lequel le CRU a décidé de ne pas adopter de dispositif de résolution à l’égard de PNB Banka ainsi que le résumé de la décision la concernant.

34      Conformément à l’article 21, second alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, lu en combinaison avec l’article 78, paragraphe 1, du règlement de procédure, la requête doit être accompagnée, s’il y a lieu, de l’acte dont l’annulation est demandée.

35      Toutefois, ni le statut de la Cour de justice de l’Union européenne ni le règlement de procédure ne prévoient que le défaut de joindre à la requête l’acte dont l’annulation est demandée entraîne automatiquement son irrecevabilité.

36      En l’occurrence, le CRU n’invoque aucune violation de ses droits ni préjudice, ni même une simple gêne subis en raison de la circonstance selon laquelle la décision attaquée n’avait pas été annexée à la requête. Le vice invoqué par ce dernier n’est partant pas suffisant en l’espèce pour rendre la requête irrecevable (voir, en ce sens et par analogie, arrêts du 24 octobre 2002, Aéroports de Paris/Commission, C‑82/01 P, EU:C:2002:617, points 11 et 12, et du 5 mars 2003, Ineichen/Commission, T‑293/01, EU:T:2003:55, points 32 à 35, et du 5 novembre 2008, Avanzata e.a./Commission, F‑48/06, EU:F:2008:137, points 51 et 52). En effet, le CRU a lui-même produit le texte de ladite décision devant le Tribunal (annexe B.2 au mémoire en défense).

37      Partant, cette fin de non-recevoir ne saurait être accueillie.

 Sur la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité pour agir des requérants

38      Selon le CRU, les requérants n’ont pas qualité pour agir en ce qu’ils ne sont pas directement concernés par la décision attaquée. De surcroît, la qualité d’actionnaires des requérants autres que PNB Banka n’aurait même pas été prouvée, ainsi que la BCE l’a également relevé dans le mémoire en intervention. La mise en liquidation de PNB Banka n’aurait pas été imposée ni causée par ladite décision, mais serait le résultat des actions des autorités nationales compétentes sur le fondement du droit national d’insolvabilité. Cette décision exigerait seulement de la CMFC, destinataire de ladite décision, de ne pas adopter de dispositif de résolution à l’égard de PNB Banka.

39      Il y a lieu de rappeler que, selon l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, toute personne physique ou morale peut former un recours contre les actes dont elle est le destinataire ou qui la concernent directement et individuellement, ainsi que contre les actes réglementaires qui la concernent directement et qui ne comportent pas de mesures d’exécution. Il ressort du point 16 ci-dessus que, en l’occurrence, les requérants ne sont pas destinataires de la décision attaquée.

40      Premièrement, s’agissant de l’absence prétendue d’affectation directe des requérants, il y a lieu de rappeler que la condition selon laquelle une personne physique ou morale qui n’est pas destinataire de la décision faisant l’objet du recours doit être directement concernée par celle-ci, telle que prévue à l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, requiert la réunion de deux critères cumulatifs, à savoir que la mesure contestée, d’une part, produise directement des effets sur sa situation juridique et, d’autre part, ne laisse aucun pouvoir d’appréciation aux destinataires chargés de la mettre en œuvre, cette mise en œuvre ayant un caractère purement automatique et découlant de la seule réglementation de l’Union, sans application d’autres règles intermédiaires (arrêts du 22 mars 2007, Regione Siciliana/Commission, C‑15/06 P, EU:C:2007:183, point 31 ; du 13 octobre 2011, Deutsche Post et Allemagne/Commission, C‑463/10 P et C‑475/10 P, EU:C:2011:656, point 66, et du 6 novembre 2018, Scuola Elementare Maria Montessori/Commission, Commission/Scuola Elementare Maria Montessori et Commission/Ferracci, C‑622/16 P à C‑624/16 P, EU:C:2018:873, point 42).

41      En l’espèce, il y a lieu de distinguer entre l’affectation directe des requérants actionnaires, ou actionnaires potentiels, et l’affectation directe de PNB Banka en tant qu’établissement de crédit.

42      À l’égard des requérants actionnaires et actionnaires potentiels de PNB Banka, force est de relever, en application d’une jurisprudence constante, que la décision attaquée ne produit pas directement d’effets sur leur situation juridique. En effet, le droit des actionnaires de percevoir des dividendes et de participer à la gestion de PNB Banka n’a pas été affecté par ladite décision (ordonnance du 14 mai 2020, Bernis e.a./CRU, T‑282/18, non publiée, EU:T:2020:209, point 40 ; voir également, par analogie, arrêt du 5 novembre 2019, BCE e.a./Trasta Komercbanka e.a., C‑663/17 P, C‑665/17 P et C‑669/17 P, EU:C:2019:923, point 110).

43      Il s’ensuit que les requérants actionnaires ou actionnaires potentiels de PNB Banka ne sont pas directement concernées par la décision attaquée au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE.

44      S’agissant, en outre, de l’absence prétendue d’affectation directe de PNB Banka, il convient de rappeler que, conformément à l’article 18 du règlement no 806/2014, si la BCE estime, dans son évaluation, que l’entité concernée se trouve en situation de défaillance avérée ou prévisible au sens du paragraphe 1, sous a), dudit article, cela a pour conséquence l’engagement de la procédure prévue à cet article. En revanche, si la BCE parvient à la conclusion inverse, la procédure de résolution n’est pas entamée, puisque le paragraphe 1, troisième alinéa, du même article dispose que la BCE doit communiquer son évaluation à la Commission et au CRU seulement lorsqu’elle estime que l’entité est en situation de défaillance avérée ou prévisible (voir, en ce sens, arrêt du 6 mai 2021, ABLV Bank e.a./BCE, C‑551/19 P et C‑552/19 P, EU:C:2021:369, points 67 et 70).

45      Ainsi, d’une part, la conclusion du CRU, fondée sur l’évaluation faite par la BCE, selon laquelle PNB Banka est en situation de défaillance avérée ou prévisible, est donc une condition sine qua non du dispositif de la décision attaquée qui prévoit de ne pas adopter de dispositif de résolution à l’égard de cette banque. Dès lors, la conclusion selon laquelle celle-ci se trouve en situation de défaillance avérée ou prévisible constitue le support nécessaire de l’article 1er de ladite décision. Partant, cette décision, en ce qu’elle constate la défaillance avérée ou prévisible de PNB Banka, produit directement des effets sur la situation juridique de celle-ci au sens de la jurisprudence citée au point 40 ci-dessus.

46      D’autre part, il convient de souligner que la décision d’adopter une mesure de résolution implique l’imposition d’instruments de résolution visés à l’article 18, paragraphe 6, sous b) et c), et à l’article 22 du règlement no 806/2014, tels que la cession des activités, le recours à un établissement-relais, la séparation des actifs, le renflouement interne ou encore le recours au Fonds de résolution unique à l’appui de la mesure de résolution. Dès lors, la décision de ne pas adopter de tels instruments, dont certains sont susceptibles de permettre à PNB Banka de maintenir une partie de ses activités, produit directement des effets sur sa situation juridique.

47      Quant à la question de savoir si cette décision laisse un pouvoir d’appréciation aux destinataires chargés de la mettre en œuvre au sens de la jurisprudence rappelée au point 40 ci-dessus, il convient de constater que tel n’est pas le cas en l’espèce. En effet, la décision de ne pas adopter de dispositif de résolution à l’égard de PNB Banka ne laisse aucun pouvoir d’appréciation au destinataire chargé de la mettre en œuvre, cette mise en œuvre ayant un caractère purement automatique et découlant de la seule réglementation de l’Union, sans application d’autres règles intermédiaires. En effet, la CMFC ne dispose d’aucune marge de manœuvre par rapport à la décision du CRU selon laquelle aucun instrument de résolution ne sera adopté à l’égard de PNB Banka, cette décision ne nécessitant l’application d’aucune règle ou mesure intermédiaire pour produire ses effets juridiques obligatoires. Cette conclusion n’est pas remise en cause par le fait que la CMFC puisse être amenée à prendre des mesures de mise en œuvre de la décision attaquée, conformément à l’article 29, paragraphe 1, du règlement n °806/2014, dont la teneur est rappelée à l’article 2, paragraphe 2, de ladite décision, puisque celles-ci se situent en dehors du cadre du mécanisme de résolution (voir, en ce sens, ordonnance du 14 mai 2020, Bernis e.a./CRU, T‑282/18, non publiée, EU:T:2020:209, point 43).

48      En particulier, la mise en liquidation de PNB Banka selon la procédure normale d’insolvabilité, conformément au droit letton, se situe en dehors de tout dispositif de résolution et ne découle pas de la décision attaquée. En effet, ladite procédure a été ouverte par la Rīgas pilsētas Vidzemes priekšpilsētas tiesa (tribunal de la ville de Riga, arrondissement suburbain de Vidzeme) sur proposition de la CMFC à la suite de ladite décision, aux termes de laquelle il n’était pas nécessaire dans l’intérêt public d’appliquer un tel dispositif à PNB Banka conformément au règlement no 806/2014 (voir, en ce sens, arrêt du 6 mai 2021, ABLV Bank e.a./BCE, C‑551/19 P et C‑552/19 P, EU:C:2021:369, point 49). Ainsi, la liquidation de PNB Banka selon la procédure normale d’insolvabilité n’a pas été ordonnée par cette décision (voir, en ce sens, ordonnance du 14 mai 2020, Bernis e.a./CRU, T‑282/18, non publiée, EU:T:2020:209, points 39 à 45).

49      Il y a lieu de conclure que PNB Banka est directement concernée par la décision attaquée au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE.

50      Deuxièmement, il convient de relever que l’affectation individuelle de PNB Banka, au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, n’a pas été remise en cause par le CRU. La décision attaquée vise cette banque en tant qu’établissement de crédit à l’égard duquel le CRU n’adopte pas de dispositif de résolution et, ainsi, elle individualise PNB Banka d’une manière analogue à celle dont l’est son destinataire, en l’occurrence la CMFC. PNB Banka est donc individuellement concernée par ladite décision.

51      Par conséquent, les requérants actionnaires ou actionnaires potentiels n’ont pas qualité pour agir à l’encontre de la décision attaquée. Partant, le recours, dans la mesure où il a été introduit par ceux-ci, est irrecevable.

52      En revanche, PNB Banka fait preuve d’une telle qualité pour agir à l’encontre de ladite décision.

 Sur la fin de non-recevoir tirée du défaut d’un intérêt à agir de PNB Banka

53      Le CRU soutient que PNB Banka n’a pas établi avoir un intérêt à agir né et actuel. Premièrement, elle n’aurait pas démontré de quelle façon elle bénéficierait d’une annulation de la décision attaquée. Deuxièmement, le fait que cette dernière confirme que PNB Banka était, selon l’appréciation de la BCE, en défaillance avérée ou prévisible, au sens de l’article 18, paragraphe 1, sous a), du règlement no 806/2014, ne suffirait pas pour conclure qu’elle a un intérêt à agir, puisque cette considération ne concernerait pas le dispositif de ladite décision. En outre, selon la jurisprudence, l’évaluation de défaillance serait dépourvue d’effet juridique pour l’établissement de crédit concerné. Troisièmement, au regard des événements ultérieurs, l’éventuel intérêt qu’aurait PNB Banka ne serait de toute manière pas né ni actuel. Quatrièmement, PNB Banka n’aurait pas établi l’existence d’un rapport entre cette décision et la dégradation de sa situation financière ultérieure.

54      Il convient de rappeler que, conformément à une jurisprudence constante de la Cour, un recours en annulation intenté par une personne physique ou morale n’est recevable que dans la mesure où cette dernière a un intérêt à voir annuler l’acte attaqué. Un tel intérêt suppose que l’annulation de cet acte soit susceptible, par elle‑même, d’avoir des conséquences juridiques et que le recours puisse ainsi, par son résultat, procurer un bénéfice à la partie qui l’a intenté (voir arrêt du 17 septembre 2015, Mory e.a./Commission, C‑33/14 P, EU:C:2015:609, point 55 et jurisprudence citée).

55      Il est constant que, tout en demandant l’annulation intégrale de la décision attaquée, PNB Banka ne se plaint pas du refus de mettre en place un dispositif de résolution, mais elle s’oppose, en substance, aux conclusions du CRU selon lesquelles elle était en défaillance avérée ou prévisible et il n’existait pas de perspective raisonnable que d’autres mesures empêchent cette défaillance.

56      Toutefois, la présente affaire est caractérisée par des particularités qui, de ce fait, ne permettent pas de nier l’intérêt à agir de PNB Banka.

57      D’une part, ainsi qu’il résulte également des points 44 et 45 ci-dessus, soit la BCE estime, dans son évaluation, que l’entité se trouve en situation de défaillance avérée ou prévisible, ce qui a pour conséquence l’engagement de la procédure prévue à l’article 18 du règlement n °806/2014, soit elle considère que tel n’est pas le cas, de sorte que la procédure n’est pas engagée (voir, en ce sens, arrêt du 6 mai 2021, ABLV Bank e.a./BCE, C‑551/19 P et C‑552/19 P, EU:C:2021:369, point 67). L’évaluation de la défaillance avérée ou prévisible, dès lors que celle-ci est adoptée par le CRU, est donc une condition préalable sine qua non du déclenchement de la procédure de résolution prévue par l’article 18 du règlement no 806/2014 et, partant, d’une décision formelle d’adopter ou de ne pas adopter un dispositif de résolution.

58      Ainsi, les motifs de la décision attaquée, notamment l’évaluation de la défaillance avérée ou prévisible de PNB Banka par la BCE, adoptée par le CRU, constituent le support nécessaire du dispositif de cette décision. En effet, si le Tribunal devait conclure que cette évaluation était erronée, la procédure ayant donné lieu à cette décision n’aurait pas dû être déclenchée à l’encontre de PNB Banka.

59      D’autre part, en vue de l’exercice de ses activités bancaires, l’entité concernée a un intérêt légitime à ne pas faire l’objet d’une évaluation dont il résulterait qu’elle est en défaillance avérée ou prévisible et ce indépendamment des événements qui ont eu lieu après l’adoption de la décision attaquée, notamment la liquidation selon la procédure normale d’insolvabilité à l’encontre de PNB Banka.

60      Par conséquent, il convient de conclure que PNB Banka justifie d’un intérêt à agir.

61      Eu égard à ce qui précède, le recours est recevable en tant qu’il est présenté par PNB Banka.

 Sur le fond

62      PNB Banka soulève quatorze moyens à l’appui de son recours tirés, le premier, de l’absence de compétence du CRU, le deuxième, de la violation des droits de PNB Banka en ce que le CRU a pris une décision formelle de ne pas adopter de dispositif de résolution, le troisième, de la violation de l’article 18, paragraphe 1, sous a), du règlement no 806/2014, le quatrième, de la violation de l’article 18, paragraphe 1, sous b) et c), du même règlement, le cinquième, d’un vice de procédure en ce que la décision attaquée est fondée sur une inspection sur place illégale, le sixième, d’une violation du principe de proportionnalité, le septième, d’un défaut de motivation, le huitième, d’une violation du droit d’être entendu, le neuvième, du fait que ladite décision est fondée sur la décision illégale du 21 mars 2019 par laquelle la BCE s’est opposée à l’acquisition par PNB Banka de participations qualifiées dans un autre établissement de crédit, le dixième, d’une violation du principe d’égalité de traitement, le onzième, d’une violation des principes de la sécurité juridique et de la protection des attentes légitimes, le douzième, d’une violation du principe nemo auditur, le treizième, d’un manque d’impartialité de la BCE et, le quatorzième, d’un détournement de pouvoir.

 Sur la recevabilité des moyens

63      Le CRU excipe de l’irrecevabilité d’un nombre de moyens, en substance, pour violation de l’article 21, paragraphe 1, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et de l’article 76, sous d), du règlement de procédure. Selon cette dernière disposition, « [l]a requête visée à l’article 21 du statut contient l’objet du litige, les moyens et arguments invoqués ainsi qu’un exposé sommaire desdits moyens ».

64      Il y a lieu de relever, à cet égard, que le CRU considère, sans motivation particulière hormis celle d’alléguer en substance de manière générale que l’argumentation de PNB Banka est peu claire ou insuffisamment étayée, que les premier, troisième et cinquième à quatorzième moyens sont irrecevables.

65      À cet égard, il convient de rappeler que toute requête doit indiquer l’objet du litige et l’exposé sommaire des moyens et que cette indication doit être suffisamment claire et précise pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal d’exercer son contrôle, le cas échéant, sans autre information à l’appui (voir, en ce sens, arrêt du 7 mars 2017, United Parcel Service/Commission, T‑194/13, EU:T:2017:144, point 191).

66      Il y a également lieu de rappeler qu’il est notamment nécessaire, pour qu’un recours devant le Tribunal soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels celui-ci se fonde ressortent, à tout le moins sommairement, mais d’une façon cohérente et compréhensible, du texte de la requête elle-même (arrêt du 7 mars 2017, United Parcel Service/Commission, T‑194/13, EU:T:2017:144, point 192).

67      En l’espèce, ainsi qu’il ressort des points 69 à 76, 94, 102 à 128, 130 à 139, 141 à 148, 150 à 163, 165 à 168, 170 à 173, 175 à 185 et 187 à 198 ci-après, les éléments de fait et de droit sur lesquels PNB Banka fonde son argumentation sont immédiatement intelligibles à la lecture des moyens concernés de la requête. D’ailleurs, le CRU a été en mesure, dans le mémoire en défense, de répondre à cette argumentation.

68      Il ressort des considérations qui précèdent que les premier, troisième et cinquième à quatorzième moyens sont recevables.

 Sur le premier moyen, tiré de l’incompétence du CRU

69      PNB Banka fait valoir, en substance, que la décision du 1er mars 2019 de la BCE par laquelle cette dernière l’a classée en tant qu’entité importante soumise à sa surveillance prudentielle directe (voir point 4 ci-dessus) était illégale. Pour cette raison, le CRU ne serait pas devenu l’autorité de résolution compétente et n’aurait pas été en droit de prendre une décision concernant l’adoption d’un dispositif de résolution à l’égard de PNB Banka.

70      Le CRU, soutenu par la BCE, conteste cette argumentation.

71      Il ressort de l’article 7, paragraphe 2, sous a), du règlement no 806/2014 que le CRU est chargé de l’élaboration des plans de résolution et de l’adoption de toutes les décisions de résolution relatives aux entités visées à l’article 2 du même règlement qui ne font pas partie d’un groupe et aux groupes qui sont considérés comme importants conformément à l’article 6, paragraphe 4, du règlement no 1024/2013 ou à l’égard desquels la BCE a décidé, conformément à l’article 6, paragraphe 5, sous b), de ce dernier règlement, d’exercer elle-même directement toutes les compétences pertinentes.

72      En outre, l’article 39, paragraphe 5, du règlement no 468/2014 dispose que « [l]a BCE exerce une surveillance prudentielle directe également à l’égard d’une entité moins importante soumise à la surveillance prudentielle ou d’un groupe moins important soumis à la surveillance prudentielle en application d’une décision de la BCE adoptée conformément à l’article 6, paragraphe 5, [sous] b), du règlement [no 1024/2013], selon laquelle la BCE exerce directement toutes les compétences concernées mentionnées à l’article 6, paragraphe 4, [dudit règlement] » et que, « [a]ux fins du mécanisme de surveillance unique (MSU), cette entité moins importante soumise à la surveillance prudentielle ou ce groupe moins important soumis à la surveillance prudentielle sont classés comme importants ».

73      Par décision du 1er mars 2019, la BCE a classé PNB Banka comme entité importante soumise à sa surveillance prudentielle directe en application de l’article 6, paragraphe 5, sous b), du règlement no 1024/2013 Cette décision a pris effet le 4 avril 2019. Partant, à compter de cette date le CRU était chargé de l’élaboration des plans de résolution et de l’adoption de toutes les décisions de résolution relatives à PNB Banka.

74      En premier lieu, ainsi que le précise, à juste titre, le CRU, les actes des institutions de l’Union jouissent, en principe, d’une présomption de légalité et produisent, dès lors, des effets juridiques aussi longtemps qu’ils n’ont pas été retirés, annulés dans le cadre d’un recours en annulation ou déclarés invalides à la suite d’un renvoi préjudiciel ou d’une exception d’illégalité (voir arrêt du 5 octobre 2004, Commission/Grèce, C‑475/01, EU:C:2004:585, point 18 et jurisprudence citée). De ce fait, le CRU était tenu de respecter la teneur de la décision de la BCE du 1er mars 2019 par laquelle elle a classé PNB Banka comme entité importante. Dans ce contexte, il était chargé de l’adoption de toutes les décisions de résolution relatives à PNB Banka jusqu’à un éventuel retrait ou une éventuelle annulation de cette décision.

75      En deuxième lieu, force est de constater que la décision de la BCE du 1er mars 2019 a fait l’objet d’un recours en annulation séparé, que le Tribunal a rejeté par arrêt du 7 décembre 2022, PNB Banka/BCE (T‑301/19, sous pourvoi, EU:T:2022:774). Même dans l’hypothèse où la prétendue illégalité de ladite décision pourrait entacher la légalité de la décision attaquée, son illégalité n’a donc pas été établie.

76      Partant, le CRU était l’autorité de résolution en charge de prendre une décision sur le fondement de l’article 18 du règlement no 806/2014.

77      Le premier moyen doit donc être rejeté.

 Sur les deuxième et quatrième moyens, tirés d’une violation des droits de PNB Banka au motif que le CRU a pris une décision formelle de ne pas adopter de dispositif de résolution

78      PNB Banka soutient, en substance, que le CRU n’était pas compétent pour prendre une décision formelle de ne pas adopter de dispositif de résolution au sens de l’article 18, paragraphe 1, du règlement no 806/2014, en ce que, bien que la défaillance de PNB Banka fût avérée ou prévisible et qu’il n’existât aucune perspective raisonnable que d’autres mesures empêchent sa défaillance dans un délai raisonnable, un tel dispositif n’était pas nécessaire dans l’intérêt public. Le pouvoir du CRU serait strictement limité à adopter des décisions d’adoption d’un dispositif de résolution et ce sous réserve de l’approbation de la Commission européenne et du Conseil européen. Si les conditions posées par ladite disposition n’étaient pas réunies, le CRU serait censé s’abstenir de toute action. En outre, la décision attaquée serait à l’origine de la liquidation selon la procédure normale d’insolvabilité introduite à l’encontre de PNB Banka, tandis que le CRU manquait de compétence pour prendre une décision visant à la liquidation de cette banque. Le CRU aurait, dès lors, agi ultra vires et l’adoption de cette décision serait fort préjudiciable pour PNB Banka.

79      Par son quatrième moyen, PNB Banka fait valoir, en substance, que le CRU n’était pas non plus compétent pour conclure, dans la décision attaquée, qu’il n’existait aucune perspective raisonnable que d’autres mesures prises à l’égard de cette banque empêchent sa défaillance dans un délai raisonnable au sens de l’article 18, paragraphe 1, sous b), du règlement no 806/2014, ni qu’une mesure de résolution n’était pas nécessaire dans l’intérêt public au sens de l’article 18, paragraphe 1, sous c), de ce règlement.

80      Le CRU, soutenu par la BCE, conteste ces arguments.

81      Il y a lieu d’examiner les deuxième et quatrième moyens ensemble.

82      En premier lieu, ainsi que la Cour l’a jugé, au point 70 de l’arrêt du 6 mai 2021, ABLV Bank e.a./BCE (C‑551/19 P et C‑552/19 P, EU:C:2021:369), lorsque la BCE parvient à la conclusion que l’entité concernée est dans une situation de défaillance avérée ou prévisible, son évaluation est transmise au CRU et la procédure de résolution est entamée. Il incombe, à ce moment, au CRU de vérifier si les conditions visées par l’article 18, paragraphe 1, du règlement no 806/2014 sont réunies afin de décider s’il y a lieu d’adopter un dispositif de résolution.

83      Il convient encore de relever que la Cour a considéré, au point 56 de l’arrêt du 6 mai 2021, ABLV Bank e.a./BCE (C‑551/19 P et C‑552/19 P, EU:C:2021:369), que l’évaluation de défaillance avérée ou prévisible effectuée par le CRU était susceptible de faire l’objet d’un contrôle juridictionnel dans le cadre d’un recours devant les juridictions de l’Union contre l’adoption par le CRU d’un dispositif de résolution ou contre la décision de ne pas adopter un tel dispositif. Il s’ensuit que le CRU est tenu de prendre une décision positive ou négative une fois qu’il a examiné les trois conditions prévues à l’article 18, paragraphe 1, du règlement no 806/2014, ne fût-ce que pour éviter une lacune dans la protection juridictionnelle d’une entité, surtout en ce qui concerne l’évaluation de sa défaillance avérée ou prévisible par la BCE.

84      En outre, ainsi que le souligne également le CRU, cette conclusion trouve appui dans le contexte réglementaire plus large dans lequel s’inscrit l’article 18 du règlement no 806/2014. Ainsi, il ressort de l’article 82, paragraphe 2, de la directive 2014/59/UE du Parlement européen et du Conseil, du 15 mai 2014, établissant un cadre pour le redressement et la résolution des établissements de crédit et des entreprises d’investissement et modifiant la directive 82/891/CEE du Conseil ainsi que les directives du Parlement européen et du Conseil 2001/24/CE, 2002/47/CE, 2004/25/CE, 2005/56/CE, 2007/36/CE, 2011/35/UE, 2012/30/UE et 2013/36/UE et les règlements du Parlement européen et du Conseil (UE) no 1093/2010 et (UE) no 648/2012 (JO 2014, L 173, p. 190), tel que modifié par le règlement délégué (UE) 2016/1434 de la Commission, du 14 décembre 2015 (JO 2016, L 233, p. 1), que « [l]a décision de prendre ou non une mesure de résolution en ce qui concerne un établissement ou une entité […] contient les informations suivantes ». Cette dernière disposition prévoit ainsi expressément la possibilité d’adopter une décision de ne pas prendre une mesure de résolution. Or, ladite disposition peut être considérée comme l’équivalent de l’article 18 du règlement no 806/2014, qui s’applique à l’égard des établissements de crédit moins importants qui ne sont pas soumis à la surveillance directe de la BCE, mais qui relèvent de la surveillance des autorités de résolution nationales (ARN).

85      De surcroît, une fois que la BCE a estimé qu’un établissement de crédit est en situation de défaillance avérée ou prévisible, il incombe au CRU de décider si cette évaluation est correcte et, si tel est le cas, si l’établissement de crédit en question fera ou non l’objet d’une résolution, selon que les autres conditions prévues par l’article 18, paragraphe 1, du règlement no 806/2014 sont remplies. Au demeurant, l’incompétence alléguée du CRU pour adopter une décision de ne pas mettre en place un dispositif de résolution risquerait de compromettre la stabilité de l’établissement concerné et potentiellement des marchés financiers, en laissant planer un doute sur les suites qu’il conviendrait d’envisager à l’égard de cet établissement au regard de l’évaluation de la BCE.

86      Partant, à la suite du déclenchement de la procédure par la BCE, le CRU était tenu d’examiner les critères énumérés à l’article 18, paragraphe 1, du règlement no 806/2014 et de prendre une décision à l’issue de cet examen.

87      Le deuxième moyen ne saurait donc être accueilli.

88      Il découle également de ce qui précède que, contrairement à ce qu’affirme PNB Banka à l’appui du quatrième moyen, il appartenait au CRU de vérifier si les conditions visées par l’article 18, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement no 806/2014 étaient réunies afin de décider s’il y avait lieu d’adopter un dispositif de résolution. Certes, théoriquement, le CRU aurait pu examiner en premier si la condition posée par l’article 18, paragraphe 1, sous c), du règlement no 806/2014, selon laquelle une mesure de résolution est nécessaire dans l’intérêt public, était remplie et, dès lors que ce n’était pas le cas, il aurait pu s’abstenir de l’examen de la condition prévue par l’article 18, paragraphe 1, sous b), du même règlement, à savoir l’existence d’autres mesures susceptibles d’empêcher une défaillance dans un délai raisonnable. Toutefois, le CRU n’a pas commis d’erreur de droit en examinant chacune des trois conditions prévues par l’article 18, paragraphe 1, de ce règlement. Cela est d’autant plus vrai étant donné que les conditions posées par l’article 18, paragraphe 1, sous a) et b), du règlement en question sont étroitement liées.

89      En effet, l’évaluation de la défaillance avérée ou prévisible d’une entité tient compte, en général, de l’existence d’autres mesures pour empêcher sa défaillance. En l’occurrence, il résulte de l’évaluation de la défaillance avérée ou prévisible de PNB Banka effectuée par la BCE ainsi que de l’examen du CRU à cet égard, que cette banque avait été mise en mesure de rétablir sa situation en matière de sa gestion de risques et en matière de ses fonds propres. La BCE a également considéré qu’il n’y avait plus de mesures prudentielles ni d’intervention précoce qui puissent encore restaurer la position de PNB Banka en matière des fonds propres. Dans ce cadre, il ne saurait être reproché au CRU de tenir compte de l’évaluation de la BCE pour répondre à la question de savoir s’il existait d’autres mesures qu’une résolution, ce qui signifie que les conditions posées par l’article 18, paragraphe 1, sous a) et b), du règlement no 806/2014, se chevauchent.

90      Dans la mesure où PNB Banka fait valoir, à l’appui du quatrième moyen, que l’examen des conditions prévues par l’article 18, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement no 806/2014 était préjugé par la conclusion qu’elle était en situation de défaillance avérée ou prévisible, il ressort de la décision attaquée que, même si les conditions posées par l’article 18, paragraphe 1, sous a) et b), dudit règlement coïncident partiellement, les trois conditions ont fait l’objet d’examens distincts, surtout en ce qui concerne la question de savoir si l’adoption d’une mesure de résolution était dans l’intérêt public au sens de l’article 18, paragraphe 1, sous c), de ce règlement.

91      En second lieu, en réponse à l’argument selon lequel le CRU a dépassé sa compétence en ordonnant à la CMFC de liquider PNB Banka, force est de constater, ainsi qu’il ressort également du point 48 ci-dessus, que la décision attaquée n’impose pas à l’ARN concernée d’agir en sorte que l’établissement concerné soit liquidé selon la procédure normale d’insolvabilité. Partant, en l’occurrence, le CRU n’a pas ordonné de mise en liquidation et n’a pas agi au-delà de ces compétences à ce sujet non plus.

92      En effet, l’article 2, paragraphe 2, de la décision attaquée se borne à prévoir que, conformément à l’article 29, paragraphe 1, du règlement no 806/2014, la CMFC mettra en œuvre cette décision et s’assurera que toute mesure prise y est conforme, selon les considérations prévues. Ledit article ne précise pas la nature des mesures que la CMFC doit ou peut prendre, en application du droit national applicable. Dans ces conditions, il convient de conclure que ladite décision n’impose pas à la CMFC de procéder à une liquidation selon la procédure normale d’insolvabilité (voir, par analogie, ordonnance du 14 mai 2020, Bernis e.a./CRU (T‑282/18, non publiée, EU:T:2020:209, point 43).

93      Il y a donc lieu de rejeter également le quatrième moyen.

 Sur le troisième moyen, tiré d’une violation de l’article 18, paragraphe 1, sous a), du règlement no 806/2014

94      Le troisième moyen se compose, en substance, de deux branches. En premier lieu, PNB Banka fait valoir que c’est à tort que le CRU, dans la décision attaquée, s’est appuyé complètement sur l’évaluation de la défaillance avérée ou prévisible de cette banque faite par la BCE sans effectuer son propre examen à l’égard de la condition prévue à l’article 18, paragraphe 1, sous a), du règlement no 806/2014. En second lieu, l’évaluation de la défaillance avérée ou prévisible comporterait des erreurs manifestes d’appréciation en ce que le CRU aurait conclu à tort que l’actif de PNB Banka était inférieur à son passif, au sens de l’article 18, paragraphe 4, sous b), dudit règlement.

95      Le CRU, soutenu par la BCE, conteste l’ensemble de ces arguments.

96      À cet égard, le CRU a considéré, au point 3.2.1 de la décision attaquée, en se fondant, notamment, sur l’évaluation de la défaillance avérée ou prévisible de PNB Banka, effectuée par la BCE, que la défaillance de cette banque était réputée avérée ou prévisible au sens de l’article 18, paragraphe 1, sous a), du règlement no 806/2014, lu conjointement avec l’article 18, paragraphe 4, sous a) et b), du même règlement, au motif que, d’une part, PNB Banka enfreignait les exigences qui conditionnaient le maintien de son agrément, et, d’autre part, son actif était inférieur à son passif.

97      Avant d’examiner le bien-fondé du présent moyen, il convient d’opérer les considérations liminaires suivantes.

–       Sur le degré du contrôle juridictionnel de l’évaluation, par le CRU, de la défaillance avérée ou prévisible d’un établissement de crédit

98      Il convient de rappeler l’étendue du contrôle à exercer, en l’espèce, par le Tribunal.

99      Il ressort de la jurisprudence que le contrôle juridictionnel que le juge de l’Union doit exercer sur le bien-fondé des motifs d’une décision telle que la décision attaquée, pour autant que celle-ci repose sur des appréciations économiques complexes, ne doit pas le conduire à substituer sa propre appréciation à celle du CRU, mais vise à vérifier que cette décision ne repose pas sur des faits matériellement inexacts et qu’elle n’est entachée d’aucune erreur manifeste d’appréciation ou de détournement de pouvoir (voir, en ce sens, arrêt du 4 mai 2023, BCE/Crédit lyonnais, C‑389/21 P, EU:C:2023:368, point 55 et jurisprudence citée).

100    Il résulte également de la jurisprudence que, afin d’établir que l’institution ou l’organe administratif concerné a commis une erreur manifeste dans l’appréciation des faits de nature à justifier l’annulation d’une décision étayée sur des appréciations économiques ou financières complexes, les éléments de preuve apportés par la partie requérante doivent être suffisants pour priver de plausibilité les appréciations des faits retenus dans cette décision (voir, par analogie, arrêts du 14 juin 2018, Lubrizol France/Conseil, C‑223/17 P, non publié, EU:C:2018:442, point 39 ; du 12 décembre 1996, AIUFFASS et AKT/Commission, T‑380/94, EU:T:1996:195, point 59, et du 13 décembre 2018, Comune di Milano/Commission, T‑167/13, EU:T:2018:940, point 108 et jurisprudence citée).

101    C’est à l’aune des considérations précédentes qu’il convient d’examiner les arguments avancés par PNB Banka dans le cadre de son troisième moyen.

–       Sur la première branche, tirée de ce que le CRU n’était pas en droit de se fonder uniquement sur l’évaluation de la défaillance avérée ou prévisible de PNB Banka par la BCE

102    PNB Banka fait valoir, en substance, que le CRU ne pouvait se fonder uniquement sur l’évaluation de sa défaillance avérée ou prévisible effectuée par la BCE sans procéder lui-même à un examen propre de la condition prévue à l’article 18, paragraphe 1, sous a), du règlement no 806/2014.

103    Force est de constater que, dans le cadre de son examen de la condition prévue à l’article 18, paragraphe 1, sous a), du règlement no 806/2014, le CRU a fait siennes les conclusions tirées par la BCE dans le cadre de l’évaluation de la défaillance avérée ou prévisible de PNB Banka. Après avoir résumé les motifs principaux de cette évaluation, au point 3.2.1 de la décision attaquée, le CRU explique qu’il a également mandaté un évaluateur externe (voir point 9 ci-dessus) en vue d’effectuer une valorisation au sens de l’article 20, paragraphe 5, sous a), du même règlement et de l’article 36, paragraphe 4, sous a), de la directive 2014/59. Il indique avoir reçu, le 13 août 2019, le rapport de valorisation. Enfin, il expose au paragraphe 80 de ladite décision qu’il a également pris en considération tous les autres éléments de fait concernant PNB Banka dont il disposait, au nombre desquels figurent des évaluations de la CMFC, de la BCE, de l’auditeur externe de PNB Banka et de l’évaluateur externe que le CRU avait mandaté.

104    PNB Banka n’est donc pas fondée à affirmer que le CRU a étayé son examen sur la seule évaluation de la défaillance avérée ou prévisible de cette banque faite par la BCE. Le CRU a bel et bien effectué son propre examen relatif à la défaillance avérée ou prévisible de PNB Banka et a tenu compte de tous les éléments cités au point 103 ci-dessus. Au demeurant, il ressort de la jurisprudence que le CRU est en droit de s’appuyer sur la seule évaluation de défaillance de la BCE dans le cadre de son examen de la condition prévue à l’article 18, paragraphe 1, sous a), du règlement no 806/2014 (voir, en ce sens, arrêt du 6 mai 2021, ABLV Bank e.a./BCE, C‑551/19 P et C‑552/19 P, EU:C:2021:369, points 62 à 65). Le CRU est donc d’autant plus fondé à ne pas appuyer son examen uniquement sur l’évaluation effectuée par la BCE, mais également sur une valorisation effectuée par un évaluateur externe.

105    La première branche du présent moyen doit donc être rejetée.

–       Sur la seconde branche, tirée du caractère prétendument erroné de la conclusion du CRU selon laquelle la défaillance de PNB Banka était avérée ou prévisible

106    PNB Banka soutient, en substance, que la conclusion adoptée par la BCE et faite sienne par le CRU, selon laquelle sa défaillance était avérée ou prévisible, conformément à l’article 18, paragraphe 1, sous a), du règlement no 806/2014, lu en combinaison avec le paragraphe 4, sous b), dudit article est erronée en ce que son actif n’était pas inférieur à son passif. À cet égard, elle met en exergue que les évaluations la concernant datant d’avant le rapport d’inspection, au nombre desquelles figurent les états financiers de PNB Banka pour l’année 2018, publiés le 25 juillet 2019, et la décision d’intervention précoce, ne font pas état d’une valeur nette négative. Le CRU aurait donc tort de fonder la décision attaquée principalement sur le rapport d’inspection et les conclusions tirées par le CRU selon lesquelles ladite valeur nette était négative et la situation financière se détériorait.

107    En premier lieu, s’agissant de l’évaluation de la défaillance avérée ou prévisible de PNB Banka effectuée par la BCE, il convient de relever que celle-ci constate plusieurs violations des dispositions applicables en matière prudentielle commises par PNB Banka au cours des années précédant ladite évaluation. Selon la BCE, PNB Banka n’a pas fait cesser ces violations, en dépit d’interventions de la CMFC et de la BCE imposant des mesures visant à rétablir la situation financière de PNB Banka.

108    Cette évaluation comporte, notamment, les constatations suivantes. Depuis l’année 2016, PNB Banka aurait méconnu les limites aux grands risques énoncées à l’article 395 du règlement (UE) no 575/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, concernant les exigences prudentielles applicables aux établissements de crédit et aux entreprises d’investissement et modifiant le règlement (UE) no 648/2012 (JO 2013, L 176, p. 1). À compter de l’année 2018, elle aurait épuisé son capital, ce qui aurait conduit à des violations persistantes des exigences en matière de fonds propres, notamment les exigences de fonds propres du pilier 2, relatives à des mesures prudentielles additionnelles. Depuis le mois de février 2018, elle aurait méconnu les limites aux prêts à des parties liées prévues par la règlementation lettone, notamment à cause d’un montant important prêté à son actionnaire principal. En outre, PNB Banka aurait fait face à un niveau de risque de crédit élevé, notamment dû aux prêts non productifs, à une baisse structurelle des revenus bruts d’exploitation ainsi qu’à une augmentation des frais administratifs et d’assistance juridique.

109    La BCE a relevé que, selon le rapport d’inspection (voir point 12 ci-dessus), PNB Banka a eu une valeur nette négative de – 58,2 millions d’euros au 31 décembre 2018 selon le scénario de base, tandis que même en calculant selon le scénario le plus optimiste, l’actif de PNB Banka aurait été inférieur à son passif.

110    La BCE s’est également fondée sur les états financiers audités pour 2018 de PNB Banka, qui comportent l’opinion de son auditeur externe. Celui-ci a indiqué, en substance, que l’actif du groupe auquel appartenait PNB Banka était surévalué. Il pouvait en être déduit, selon la BCE, que, le 31 décembre 2018, PNB Banka était en violation des exigences en matière de fonds de la catégorie 1 (Tier 1 capital) au niveau de la société et au niveau du groupe.

111    La BCE a également tenu compte de l’échange entre, d’une part, la CMFC et elle et, d’autre part, PNB Banka, exposé aux points 6 à 11 ci-dessus, datant des mois précédant l’adoption de l’évaluation de la défaillance avérée ou prévisible de PNB Banka par elle, en vue, notamment, de rétablir la situation en matière de fonds propres de cette banque. Selon elle, les mesures annoncées par PNB Banka n’étaient pas susceptibles d’empêcher ladite défaillance dans un délai raisonnable.

112    La BCE a conclu que PNB Banka enfreignait les exigences relatives au maintien de l’agrément, au sens de l’article 18, paragraphe 4, sous a), du règlement no 806/2014 et que l’actif de PNB Banka était inférieur à son passif, au sens de l’article 18, paragraphe 4, sous b), du même règlement.

113    En second lieu, le CRU s’est fondé en grande partie sur le rapport de valorisation, d’où il ressortait, en substance, que la valeur de l’actif de PNB Banka était surévaluée, que cette valeur devait être réajustée et que le bilan réajusté démontrait un déficit de 52.3 millions d’euros.

114    Ainsi qu’il ressort du point 103 ci-dessus, il s’ensuit que le CRU a fondé la décision attaquée sur plusieurs évaluations comptables, effectuées par des entités différentes et à des moments différents. Sur le fondement de ces rapports et évaluations, le CRU a conclu que PNB Banka était en défaillance avérée ou prévisible conformément à l’article 18, paragraphe 1, sous a), du règlement no 806/2014.

115    Or, force est de constater que PNB Banka ne conteste pas de manière étayée l’exactitude matérielle des éléments de fait invoqués par le CRU, au sens de la jurisprudence citée au point 99 ci-dessus. Elle soutient uniquement que ces éléments ne sont pas de nature à étayer les conclusions du CRU selon lesquelles l’actif de cette banque était inférieur à son passif et que le CRU a dénaturé les faits et a commis une erreur manifeste d’appréciation à cet égard, au sens de cette même jurisprudence.

116    Toutefois, les éléments de fait apportés par PNB Banka ne sont pas suffisants pour priver de plausibilité les appréciations des faits retenus dans la décision attaquée au sens de la jurisprudence citée au point 100 ci-dessus.

117    Ainsi, premièrement, l’affirmation de PNB Banka selon laquelle l’évaluation de sa défaillance avérée ou prévisible est uniquement fondée sur le rapport d’inspection manque en fait, ainsi qu’il ressort des points 107 à 113 ci-dessus.

118    Deuxièmement, l’argument de PNB Banka pris de ce que les conclusions établies par l’équipe d’inspection de la BCE à la suite de l’inspection sur place, sur lesquelles la décision attaquée est en partie fondée, étaient différentes des résultats d’évaluations antérieures, ne saurait davantage prospérer.

119    Force est de constater, à cet égard, que PNB Banka ne remet pas en cause l’exactitude des données chiffrées ni des calculs de la valeur de son actif et son passif. Elle se borne à affirmer que les conclusions en cause contredisaient les résultats d’analyses antérieures effectuées par la CFMC, par les commissaires aux comptes et la direction de PNB Banka, ainsi que par la BCE elle-même dans la décision d’intervention précoce, ce qui priverait le rapport d’inspection de sa crédibilité.

120    Or, cette seule circonstance, même à la supposer établie, ne suffirait pas pour mettre en doute les conclusions du rapport d’inspection. En effet, ainsi que l’a relevé le CRU à juste titre, la situation économique et financière d’un établissement de crédit peut évoluer rapidement, ce qui peut justifier des réévaluations et des adaptations continues de la part des institutions. C’est dans ce cadre que l’inspection sur place a, notamment, décelé que les actifs de PNB Banka étaient bien plus dépréciés que ce que cette dernière avait constaté dans ses états financiers audités et ses déclarations au 31 décembre 2018. La BCE a déterminé que l’actif de cette banque était inférieur à son passif dans les trois cas de figure analysés. Le déficit était de 58,2 millions d’euros dans le scénario de base, de 23,6 millions d’euros dans le scénario optimiste et de 86,6 millions d’euros dans le scénario pessimiste. Dans ces trois scénarios, le ratio de fonds propres de PNB Banka diminuait, passant de 12,4 % au 31 décembre 2018 à un taux négatif au moment de l’évaluation.

121    Il importe également de relever à cet égard que le rapport d’inspection n’est pas le seul élément pris en compte par le CRU dans la décision attaquée. Au contraire, il résulte de celle-ci que les résultats du rapport d’inspection se situent dans le prolongement d’autres évaluations qui ne le contredisent pas. Ainsi, la décision d’intervention précoce fait état de plusieurs violations, par PNB Banka, d’exigences prudentielles et enjoint à cette banque d’établir un plan d’action, ce qui indique que PNB Banka courrait des risques d’insolvabilité plus élevés qu’autorisés en vertu des règles prudentielles. Le CRU relève également, au paragraphe 73, sous d), de ladite décision, à l’instar de la BCE dans son évaluation de la défaillance avérée ou prévisible, que l’auditeur externe de PNB Banka avait conclu, notamment, que de nombreux actifs de cette banque étaient surévalués, en partie en raison d’une dépréciation de ces actifs et que les pertes étaient sous-estimées. L’auditeur a exprimé ses doutes sur les capacités de PNB Banka et du groupe auquel elle appartenait d’augmenter leur fonds afin d’obéir aux exigences prudentielles minimales et même sur la possibilité de cette banque d’être en mesure de poursuivre ses activités.

122    Au demeurant, le CRU s’appuie sur le rapport de valorisation, dont il ressort que la surévaluation de l’actif de PNB Banka s’élevait à un montant de 95,5 millions d’euros et qu’elle avait une valeur nette négative de – 52,3 millions d’euros. L’évaluateur externe mandaté par le CRU ne remet donc pas en cause les conclusions du rapport d’inspection.

123    Le fait que les documents cités au point 121 ci-dessus ne comportent pas de conclusion explicite selon laquelle l’actif de PNB Banka était inférieur à son passif n’invalide pas cette conclusion. En effet, ces documents font état de préoccupations de plus en plus sérieuses pendant une période de plusieurs années en ce qui concerne, notamment, les fonds propres de ladite banque par rapport à, notamment, la surévaluation d’un nombre considérable des actifs. Ces documents ne privent donc pas de plausibilité l’appréciation des faits, par le CRU, au moment de l’adoption de la décision attaquée, de laquelle, selon l’analyse comptable effectuée par la BCE et confirmée par l’évaluateur externe, il résultait que ledit actif était inférieur à son passif ou qu’il existait des éléments objectifs permettant de conclure que cela allait se produire dans un proche avenir.

124    Il convient donc de rejeter la présente branche et, partant, le troisième moyen dans son intégralité.

 Sur le cinquième moyen, tiré de l’illégalité de l’inspection sur place

125    PNB Banka soutient que la décision de la BCE qui lui a été notifiée par courrier du 14 février 2019 de mener une inspection sur place était illégale. En outre, la façon dont a été conduite cette inspection serait illégale. La décision attaquée serait fondée en grande partie sur les résultats de cette inspection.

126    Le CRU, soutenu par la BCE, conteste les arguments de PNB Banka.

127    Il convient de relever que, à l’appui du présent moyen, PNB Banka se borne à renvoyer à son recours en annulation formé contre la décision de la BCE de mener une inspection sur place. Or, dans le présent recours, elle omet d’exposer les motifs de la prétendue illégalité de cette décision et, en conséquence, de l’inspection sur place. En outre, elle ne précise pas les raisons pour lesquelles l’inspection sur place aurait été menée d’une manière illégale. Enfin elle n’indique pas non plus de quelle manière cette prétendue illégalité serait de nature à entacher la légalité de la décision attaquée.

128    Au demeurant, dans l’arrêt du 7 décembre 2022, PNB Banka/BCE (T‑275/19, sous pourvoi, EU:T:2022:781), le Tribunal a rejeté le recours dirigé contre la décision de la BCE de tenir une inspection sur place.

129    Dans ces conditions, il y a lieu de rejeter le cinquième moyen.

 Sur le sixième moyen, tiré d’une violation du principe de proportionnalité

130    PNB Banka argue que le principe de proportionnalité a été violé à son égard, étant donné que, au lieu d’adopter la décision attaquée, il incombait au CRU de consulter les actionnaires de PNB Banka en vue de mettre en œuvre le plan d’action (voir point 10 ci-dessus).

131    Le CRU, soutenu par la BCE, conteste cet argument.

132    Il convient de rappeler que le principe de proportionnalité, qui fait partie des principes généraux du droit de l’Union, exige que les actes des institutions de l’Union ne dépassent pas les limites de ce qui est approprié et nécessaire à la réalisation des objectifs légitimes poursuivis par la réglementation en cause (arrêt du 17 mai 1984, Denkavit Nederland, 15/83, EU:C:1984:183, point 25), étant entendu que, lorsqu’un choix s’offre entre plusieurs mesures appropriées, il convient de recourir à la moins contraignante et que les inconvénients causés ne doivent pas être démesurés par rapport aux buts visés [arrêt du 30 avril 2019, Italie/Conseil (Quota de pêche de l’espadon méditerranéen), C‑611/17, EU:C:2019:332, point 55].

133    En l’occurrence, le CRU a exposé, au point 3.2.2 de la décision attaquée, qu’il n’existait aucune perspective raisonnable que d’autres mesures empêchent la défaillance de PNB Banka dans un délai raisonnable, au sens de l’article 18, paragraphe 1, sous b), du règlement no 806/2014. Ainsi, le CRU a considéré, sans être contredit, que PNB Banka ne pouvait pas bénéficier de mesures prévues par un système de protection institutionnel (paragraphe 82 de ladite décision), ni de la dépréciation ou la conversion d’instruments de fonds propres pertinents prises à l’égard de PNB Banka au sens de l’article 21 paragraphe 1, dudit règlement (paragraphe 85 de cette décision). En outre, le CRU souscrit à l’appréciation de la BCE dans l’évaluation de la défaillance avérée ou prévisible de PNB Banka, selon laquelle il n’y avait plus d’autres mesures prudentielles disponibles, y compris des mesures d’intervention précoce, de nature à empêcher la défaillance de cette banque (paragraphes 88 et 89 de la même décision). Cette appréciation n’a pas non plus été contestée par PNB Banka.

134    Celle-ci reproche surtout au CRU de ne pas avoir rouvert les discussions avec ses actionnaires afin de mettre en œuvre le plan d’action. À cet égard, le CRU a expliqué aux paragraphes 86 et 87 de la décision attaquée, en substance, que la BCE avait pris en considération le plan d’action et avait mis en mesure PNB Banka de compléter celui-ci, mais avait considéré que les mesures proposées par PNB Banka n’étaient ni adéquates ni crédibles pour les raisons exposées au point 135 ci-après.

135    Ainsi qu’il ressort des points 10 à 13 ci-dessus, le 1er août 2019, PNB Banka a soumis à la BCE le plan d’action. Par lettre du 6 août 2019, la BCE a répondu que les propositions de PNB Banka n’étaient pas suffisamment solides et qu’il fallait davantage d’efforts de la part de ses actionnaires pour rétablir sa situation de fonds propres. PNB Banka a présenté, ensuite, d’autres propositions impliquant l’engagement de ses actionnaires, mais la BCE a conclu, par lettre du 13 août 2019, que ces propositions n’étaient ni adéquates ni crédibles du fait que les actionnaires n’avaient pas produit de convention officielle de prise ferme inconditionnelle dans le cadre d’une augmentation de fonds propres en numéraire ni de preuve manifeste que des fonds en espèces étaient disponibles auprès des actionnaires ou d’autres investisseurs intéressés. La BCE a également relevé que les mesures annoncées par PNB Banka méconnaissaient les délais imposés par la décision d’intervention précoce et que l’apport de fonds propres en nature était moins adéquat, étant donné les risques de dépréciation, que l’aurait été un apport de fonds en numéraire. Le 15 août 2019, la BCE a conclu que PNB Banka était en défaillance avérée ou prévisible.

136    Il ne saurait être reproché au CRU, dans ces conditions, de ne pas avoir consulté les actionnaires en vue de la mise en œuvre des mesures contenues dans le plan d’action.

137    Il importe également de relever que, ainsi qu’il ressort du point 85 ci-dessus, une fois que la BCE a estimé qu’un établissement de crédit est déclaré en situation de défaillance avérée ou prévisible, il incombe au CRU de décider si cette évaluation est correcte et, si tel est le cas, si l’établissement de crédit en question fera ou non l’objet d’une résolution. Dans l’intérêt de la stabilité de l’établissement concerné, mais également des marchés financiers, ce processus décisionnel exige une certaine diligence.

138    Dans ce contexte, PNB Banka ne peut valablement soutenir que le CRU avait encore le choix entre plusieurs mesures appropriées pour mettre un terme à sa situation incertaine et que le CRU pouvait recourir à une mesure moins contraignante que l’adoption de la décision attaquée.

139    PNB Banka n’a pas établi à suffisance de droit que le CRU a violé le principe de proportionnalité.

140    Partant, il y a lieu de rejeter le sixième moyen.

 Sur le septième moyen, tiré d’un défaut de motivation

141    PNB Banka soutient que le CRU a violé son obligation de motivation. Selon elle, la motivation de la décision attaquée n’est pas appropriée et ne révèle pas de manière claire et univoque le raisonnement suivi par le CRU en ce qu’il est fondé sur les résultats de l’inspection sur place de la BCE et ne tient pas compte des évaluations antérieures. En outre, les solutions pour empêcher une défaillance de PNB Banka n’auraient même pas été examinées.

142    Le CRU, soutenu par la BCE, conteste les arguments de PNB Banka.

143    Il ressort de l’article 41, paragraphe 2, sous c), de la Charte que le droit à une bonne administration comporte, notamment, l’obligation pour l’administration de motiver ses décisions.

144    Par ailleurs, il convient de rappeler que la motivation exigée à l’article 296 TFUE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte incriminé, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et au juge de l’Union d’exercer son contrôle. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences fixées à l’article 296 TFUE doit être appréciée non seulement au regard de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir arrêt du 8 septembre 2011, Commission/Pays-Bas, C‑279/08 P, EU:C:2011:551, point 125 et jurisprudence citée ; arrêt du 8 mai 2019, Landeskreditbank Baden-Württemberg/BCE, C‑450/17 P, EU:C:2019:372, point 87).

145    Il s’ensuit qu’une motivation ne doit pas être exhaustive, mais doit être considérée comme suffisante dès lors qu’elle expose les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de la décision (voir, en ce sens, arrêts du 10 juillet 2008, Bertelsmann et Sony Corporation of America/Impala, C‑413/06 P, EU:C:2008:392, point 169, et du 3 mars 2010, Freistaat Sachsen/Commission, T‑102/07 et T‑120/07, EU:T:2010:62, point 180).

146    En l’occurrence, il convient de constater que, contrairement à ce que soutient PNB Banka, le CRU a expliqué de façon non équivoque et suffisamment précise dans la décision attaquée les raisons pour lesquelles il a considéré que, premièrement, la défaillance de PNB Banka était réputée avérée ou prévisible (point 3.2.1 de ladite décision), deuxièmement, compte tenu des délais requis et d’autres circonstances pertinentes, il n’existait aucune perspective raisonnable que d’autres mesures de nature privée, y compris des mesures prévues par un système de protection institutionnel et des mesures prudentielles prises à son égard, soient de nature à empêcher sa défaillance dans un délai raisonnable (point 3.2.2 de cette décision) et, troisièmement, l’adoption d’une mesure de résolution n’était pas nécessaire dans l’intérêt public (point 3.2.3 de la même décision). Ayant considéré que la condition prévue par l’article 18, paragraphe 1, sous c), du règlement no 806/2014 n’était donc pas remplie, le CRU a ainsi exposé sa conclusion qu’il n’y avait pas lieu d’adopter de dispositif de résolution à l’égard de PNB Banka.

147    En outre, eu égard aux considérations exposées aux points 118 à 122 ci-dessus, le CRU n’était pas tenu d’expliquer spécifiquement pourquoi le rapport d’inspection, qui fait état d’un actif de PNB Banka inférieur à son passif, s’est écarté des appréciations figurant dans des décisions, analyses et rapports antérieurs portant sur la situation prudentielle de PNB Banka et ne présentant pas une telle conclusion.

148    Il s’ensuit, en application de la jurisprudence citée aux points 144 et 145 ci-dessus, que la décision attaquée fait apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement du CRU de manière à permettre à PNB Banka de connaître les justifications de la mesure prise et au Tribunal d’exercer son contrôle.

149    Il y a donc lieu de rejeter le septième moyen.

 Sur le huitième moyen, tiré d’une violation du droit d’être entendu

150    Selon PNB Banka, le CRU ne lui a pas permis de présenter son point de vue sur la décision que le CRU envisageait de prendre.

151    Le CRU, soutenu par la BCE, conteste cet argument.

152    Il y a lieu de rappeler que l’article 41, paragraphe 2, sous a), de la Charte prévoit que le droit à une bonne administration comporte le droit de toute personne d’être entendue avant qu’une mesure individuelle qui l’affecterait défavorablement ne soit prise à son égard.

153    Le droit d’être entendu garantit à toute personne la possibilité de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours de la procédure administrative et avant l’adoption de toute décision susceptible d’affecter de manière défavorable ses intérêts. Ensuite, il convient de préciser que le droit d’être entendu poursuit un double objectif. D’une part, il sert à l’instruction du dossier et à l’établissement des faits le plus précisément et correctement possible et, d’autre part, il permet d’assurer une protection effective de l’intéressé. Le droit d’être entendu vise en particulier à garantir que toute décision faisant grief soit adoptée en pleine connaissance de cause et a notamment pour objectif de permettre à l’autorité compétente de corriger une erreur ou à la personne concernée de faire valoir les éléments relatifs à sa situation personnelle qui militent pour que la décision soit prise, ne soit pas prise ou qu’elle ait tel ou tel contenu (voir arrêt du 4 juin 2020, SEAE/De Loecker, C‑187/19 P, EU:C:2020:444, points 68 et 69 et jurisprudence citée).

154    Il convient de relever que la Cour a affirmé l’importance du droit d’être entendu et sa portée très large dans l’ordre juridique de l’Union, en considérant que ce droit devait s’appliquer à toute procédure susceptible d’aboutir à un acte faisant grief. Le respect du droit d’être entendu s’impose même lorsque la réglementation applicable ne prévoit pas expressément une telle formalité (voir arrêts du 22 novembre 2012, M., C‑277/11, EU:C:2012:744, points 85 et 86 et jurisprudence citée ; du 18 juin 2020, Commission/RQ, C‑831/18 P, EU:C:2020:481, point 67 et jurisprudence citée, et du 7 novembre 2019, ADDE/Parlement, T‑48/17, EU:T:2019:780, point 89 et jurisprudence citée).

155    Force est de constater que le règlement no 806/2014 a pour objectif d’instaurer, conformément à son considérant 8, des mécanismes de résolution plus efficaces, lesquels doivent constituer un instrument essentiel pour éviter les conséquences dommageables des défaillances des banques survenues par le passé. Or s’agissant de la procédure prévue à l’article 18 de ce règlement, un tel objectif suppose une prise de décision rapide, souvent dans des conditions d’urgence, comme l’illustrent les brefs délais prévus dans cette disposition, afin que la stabilité financière ne soit pas mise en péril (arrêt du 6 mai 2021, ABLV Bank e.a./BCE, C‑551/19 P et C‑552/19 P, EU:C:2021:369, point 55).

156    Toutefois, alors que la nécessité de célérité de la procédure prévue à l’article 18 du règlement no 806/2014 doit ainsi être prise en compte, elle doit également être conciliée avec le droit d’être entendu.

157    En outre, le considérant 26 du règlement no 806/2014 confirme à la fois la compétence partagée entre la BCE, autorité de surveillance au sein du MSU, et le CRU, autorité de résolution, pour apprécier si un établissement de crédit est en situation de défaillance avérée ou prévisible, et la compétence exclusive du CRU pour apprécier si les autres conditions requises pour l’adoption d’un dispositif de résolution sont remplies (arrêt du 6 mai 2021, ABLV Bank e.a./BCE, C‑551/19 P et C‑552/19 P, EU:C:2021:369, point 64).

158    Eu égard à la nature de cette procédure administrative complexe visée par l’article 18 du règlement no 806/2014 et menée par la BCE et le CRU conjointement et successivement, ni l’article 41 de la Charte ni les dispositions dudit règlement n’exigent que l’entité concernée par la décision relative à l’adoption d’un dispositif de résolution soit entendue à chaque phase de la procédure par chacun de ces deux organes séparément.

159    Il est constant que, si PNB Banka n’a pas été entendue par le CRU avant l’adoption de la décision attaquée, elle a en revanche été entendue à plusieurs reprises par la BCE.

160    Ainsi, elle a été mise en mesure de s’exprimer, notamment dans le cadre de l’évaluation de la défaillance avérée ou prévisible, sur les éléments pertinents. En outre, ainsi qu’il ressort du point 89 ci-dessus, la BCE a examiné les autres mesures de nature à empêcher la défaillance de PNB Banka. Dans son évaluation, effectuée après avoir entendu PNB Banka, la BCE a examiné les arguments de celle-ci, en les résumant et en y répondant. Le CRU, auquel l’évaluation de la BCE a été ensuite communiquée, avait donc pleine connaissance desdits arguments lors de l’adoption de la décision attaquée, dans laquelle il a fait siennes les conclusions de la BCE relatives aux conditions posées par l’article 18, paragraphe 1, sous a) et b), du règlement no 806/2014. S’agissant du rapport de valorisation, il y a lieu de relever que l’évaluateur externe mandaté par le CRU n’a pas entendu les représentants de PNB Banka avant de formuler ses conclusions. Cela étant, le CRU s’est fondé sur ce rapport sans entendre ces représentants. Toutefois, le rapport, joint en tant qu’annexe B.8, contient une liste des sources utilisées par cet évaluateur (voir notamment page 276 du dossier) et ces sources étaient en principe connues par PNB Banka. En outre, le fait que cette évaluation était aussi fondée sur le rapport d’inspection importe également. Force est de constater que lesdits représentants ont pu répondre au projet du rapport d’inspection, ce qu’ils ont fait.

161    Certes, dans la décision attaquée, le CRU a examiné pour la première fois la condition posée par l’article 18, paragraphe 1, sous c), du règlement no 806/2014, selon laquelle une mesure de résolution doit être nécessaire dans l’intérêt public et il n’a pas entendu PNB Banka à cet égard. Toutefois, aucun des griefs de PNB Banka n’est dirigé contre l’absence alléguée d’un intérêt public. Ils sont tous dirigés contre les conclusions selon lesquelles la défaillance de PNB Banka était avérée ou prévisible, conformément à l’article 18, paragraphe 1, sous a), du règlement no 806/2014. Sur les points qu’elle conteste, PNB Banka a donc été entendue dans le cadre de la procédure administrative.

162    Il importe de souligner également qu’aucun nouvel événement n’est survenu et qu’aucune nouvelle donnée n’a été portée à la connaissance du CRU entre, d’une part, la communication, par la BCE, de son évaluation de la défaillance avérée ou prévisible de PNB Banka et, d’autre part, l’adoption de la décision attaquée.

163    Dans ces conditions, il y a lieu de relever que le droit d’être entendu de PNB Banka n’a pas été violé.

164    Il y a donc lieu de rejeter le huitième moyen.

 Sur le neuvième moyen, tiré du caractère illégal de la décision de la BCE de s’opposer à l’acquisition, par PNB Banka, de participations qualifiées dans un autre établissement de crédit

165    PNB Banka soutient que la décision de la BCE du 21 mars 2019 de s’opposer à l’acquisition de la banque cible était illégale. En effet, la période d’évaluation prévue à l’article 22, paragraphe 2, de la directive 2013/36 aurait expiré avant l’adoption de ladite décision. Or, l’acquisition envisagée aurait été réputée approuvée si l’autorité de contrôle ne s’y était pas opposée avant l’expiration de cette période, en vertu de l’article 22, paragraphe 6, de cette directive. En outre, la BCE se serait opposée à l’acquisition envisagée au motif que les améliorations induites par cette acquisition étaient insuffisantes. Le point de vue de la BCE aurait abouti à ce que l’acquisition envisagée ne puisse pas être réalisée même si ses effets étaient positifs sur le plan réglementaire.

166    Le CRU, soutenu par la BCE, conteste ces arguments.

167    Force est de constater que PNB Banka n’a aucunement établi que la décision de la BCE de s’opposer à son acquisition de la banque cible a conduit à la conclusion de la BCE et du CRU selon laquelle PNB Banka était, le 15 août 2019, en défaillance avérée ou prévisible. En effet, ainsi qu’il ressort du paragraphe 26 de la décision attaquée, l’acquisition d’une participation qualifiée dans la banque cible n’était qu’une des mesures proposées par PNB Banka dans son plan de conservation de ses fonds propres du 11 avril 2019 (voir point 6 ci-dessus). Selon le paragraphe 27 de ladite décision, aucune de ces mesures n’a pu être mise en œuvre. De même, dans le plan d’action, présenté le 1er août 2019 et complété le 13 août 2019, PNB Banka mentionne un certain nombre d’autres interventions visant à rétablir sa position en matière des fonds propres. Ces mesures ont été considérées par la BCE comme insuffisamment solides et efficaces. Partant, il n’a pas été établi à suffisance de droit que, en l’absence de l’opposition par la BCE contre une telle acquisition, le résultat aurait été différent en ce que cette défaillance n’aurait pas été réputée avérée ou prévisible.

168    En outre et en tout état de cause, ainsi qu’il ressort de l’arrêt du 7 décembre 2022, PNB Banka/BCE (T‑330/19, sous pourvoi, EU:T:2022:775), le recours contre la décision de la BCE d’opposition à l’acquisition d’une participation qualifiée dans la banque cible a été rejeté.

169    Partant, il y a lieu de rejeter le neuvième moyen.

 Sur le dixième moyen, tiré d’une violation du principe d’égalité de traitement

170    Selon PNB Banka, le traitement qui lui a été réservé était exceptionnel et inégal par rapport à celui auquel étaient soumis les autres établissements de crédit établis dans la zone euro.

171    Le CRU, soutenu par la BCE, conteste cette argumentation.

172    Aux termes de l’article 6, paragraphe 1, du règlement no 806/2014, « [a]ucune mesure, proposition ou politique du CRU, du Conseil, de la Commission ou d’une [ARN] n’exerce, à l’encontre d’entités, de déposants, d’investisseurs ou d’autres créanciers établis dans l’Union, de discrimination fondée sur leur nationalité ou leur lieu d’établissement ». Cette disposition constitue une expression spéciale du principe d’égalité de traitement ou de non-discrimination, qui exige que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié (voir, en ce sens, arrêt du 15 avril 2010, Gualtieri/Commission, C‑485/08 P, EU:C:2010:188, point 70).

173    En l’espèce, il suffit de constater que PNB Banka n’a pas établi in concreto qu’un autre établissement de crédit se trouvant dans une situation comparable aurait été traité d’une manière différente. Au contraire, ses allégations restent vagues et imprécises. En particulier, elle ne démontre pas que la décision de la BCE d’effectuer une inspection sur place, quand bien même la tenue d’inspections par la BCE est inhabituelle, conduirait à constater l’existence d’une inégalité de traitement par rapport à un autre établissement de crédit dans une situation factuelle et juridique comparable. Les arguments n’étant pas suffisamment étayés, aucune violation du principe d’égalité de traitement ne peut être constatée.

174    Partant, il convient d’écarter le dixième moyen.

 Sur le onzième moyen, tiré d’une violation des principes de sécurité juridique et de protection de la confiance légitime

175    PNB Banka fait valoir que la décision attaquée est le résultat d’une approche nouvelle et inattendue du CRU et de la BCE à son égard. Le traitement antérieur de PNB Banka par la BCE et la CFMC aurait été fondamentalement différent et elle n’aurait donc pas pu s’attendre, raisonnablement, à la teneur de ladite décision. Il importerait pour PNB Banka que le délai pour la mise en œuvre du plan d’action, établi en réponse à la décision d’intervention précoce, n’ait pas encore expiré au moment de l’adoption de cette décision.

176    Le CRU, soutenu par la BCE, conteste cette argumentation.

177    Il y a lieu de relever que PNB Banka invoque deux principes distincts, le principe de la protection de la confiance légitime et le principe de sécurité juridique.

178    D’une part, s’agissant du principe de protection de la confiance légitime, il ressort d’une jurisprudence bien établie que le droit de se prévaloir de ce principe suppose que des assurances précises, inconditionnelles et concordantes, émanant de sources autorisées et fiables, ont été fournies à l’intéressé par les autorités compétentes de l’Union. En effet, ce droit appartient à tout justiciable dans le chef duquel une institution, un organe ou un organisme de l’Union, en lui fournissant des assurances précises, a fait naître à son égard des espérances fondées (voir arrêt du 19 juillet 2016, Kotnik e.a., C‑526/14, EU:C:2016:570, point 62 et jurisprudence citée).

179    Si le principe de protection de la confiance légitime s’inscrit parmi les principes fondamentaux de l’Union, les opérateurs économiques ne sont pas fondés à placer leur confiance légitime dans le maintien d’une situation existante qui peut être modifiée dans le cadre du pouvoir d’appréciation des institutions de l’Union, et cela spécialement dans un domaine qui implique des interventions d’autorités publiques dans le secteur bancaire, dont l’objet comporte une constante adaptation en fonction des variations de la situation économique (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 19 juillet 2016, Kotnik e.a., C‑526/14, EU:C:2016:570, point 66 et jurisprudence citée).

180    En l’espèce, PNB Banka ne saurait se prévaloir d’une prétendue pratique antérieure du CRU et de la BCE (et de la CFMC) à son égard, étant donné que ces derniers ne lui ont pas fourni d’assurances précises, inconditionnelles et concordantes. Aux paragraphes 17 et 20 de la décision attaquée, le CRU a uniquement indiqué que PNB Banka courrait des risques concernant ses fonds propres ainsi que la gestion de son portefeuille de prêts et son exposition aux grands risques. La situation se serait aggravée entre 2017 et mi-2019. Le CRU s’est appuyé sur plusieurs évaluations, sur les données chiffrées fournies par PNB Banka et sur le fait que celle-ci n’avait pas été en mesure, même après l’imposition de diverses mesures correctives par la CFMC et la BCE, d’établir et de mettre en œuvre des actions suffisamment concrètes et efficaces pour réduire lesdits risques et assurer le respect des exigences prudentielles dans un délai raisonnable. À supposer même que ladite pratique antérieure ait changé, cette évolution ne saurait être dissociée des nouveaux faits et des nouvelles circonstances ayant conduit à l’adoption de ladite décision.

181    Certes, PNB Banka fait observer à juste titre que la décision d’intervention précoce (voir point 7 ci-dessus) lui a imposé, en substance, de rétablir une conformité durable à certaines exigences prudentielles, relatives à l’exigence totale de capital dans le cadre du SREP (au plus tard le 1er septembre 2019), aux OCR (avant le 1er novembre 2019), aux limites aux grands risques au niveau consolidé et individuel (avant le 1er octobre 2019) et aux limites aux transactions avec des parties liées prévues par la règlementation lettone (avant le 15 août 2019). Il n’est pas contesté non plus que certains délais courraient encore à la date de l’adoption de la décision attaquée.

182    Cela étant, l’octroi de délais par la BCE afin que la PNB Banka se conforme à certaines exigences prudentielles n’est pas davantage constitutif d’assurances précises, inconditionnelles et concordantes de nature à faire naître à l’égard de PNB Banka des espérances fondées en ce sens que, durant ces délais, la BCE s’abstiendrait de conclure à la défaillance avérée ou prévisible de PNB Banka. En effet, ainsi que le précise à bon droit le CRU dans le mémoire en défense, la décision d’intervention précoce n’indiquait nullement que PNB Banka ne serait, en toutes circonstances, pas soumise à d’autres mesures de surveillance jusqu’à l’expiration des délais fixés pour la mise en œuvre du plan d’action demandé. PNB Banka ne précise pas non plus de passage ou de formulation dans ladite décision qui pourrait être interprété à cet effet.

183    Force est de constater que, entre l’adoption de la décision d’intervention précoce et l’adoption de la décision attaquée, il y a eu plusieurs échanges entre la BCE et PNB Banka, dans le cadre desquels la BCE a indiqué que les mesures proposées par PNB Banka dans son plan d’action (voir points 10 à 13 ci-dessus) n’étaient pas suffisamment concrètes et solides et que toutes les mesures ne pouvaient être mises en œuvre dans les délais impartis. Dans ces conditions, il ne saurait être valablement reproché au CRU de ne pas avoir attendu l’expiration du dernier délai posé par la décision d’intervention précoce. Le CRU n’a donc pas violé le principe de protection de la confiance légitime.

184    D’autre part, selon une jurisprudence constante, le principe de sécurité juridique exige qu’une réglementation soit claire et précise, afin que les justiciables puissent connaître sans ambiguïté leurs droits et obligations, et que son application soit prévisible pour les justiciables (voir, en ce sens, arrêts du 14 avril 2005, Belgique/Commission, C‑110/03, EU:C:2005:223, point 30, et du 12 décembre 2013, Test Claimants in the Franked Investment Income Group Litigation, C‑362/12, EU:C:2013:834, point 44).

185    PNB Banka ne soutient pas que la règlementation en cause est imprécise et pas claire. Elle n’établit donc pas l’existence d’une violation du principe de sécurité juridique.

186    En conséquence, il y a lieu de rejeter le onzième moyen.

 Sur les douzième à quatorzième moyens, tirés respectivement d’une violation du principe nemo auditur, d’un manque d’impartialité de la BCE et d’un détournement de pouvoir

187    PNB Banka estime que la BCE a violé l’adage nemo auditur propriam turpitudinem allegans, selon lequel nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude. Elle soutient également que la BCE n’a pas respecté le principe nemo potest venire contra factum proprium, selon lequel nul ne peut contester ce qu’il a auparavant reconnu. Enfin, elle fait valoir que la décision attaquée a été motivée par des considérations illégitimes de nature non prudentielle. Le CRU aurait donc détourné son pouvoir.

188    Dans le cadre du douzième moyen, PNB Banka affirme que la BCE a, d’une part, imposé d’attirer des investissements et, d’autre part, par ses pratiques, découragé des investisseurs potentiels. Ainsi, la BCE aurait sanctionné PNB Banka et ses actionnaires pour leur attitude critique envers quelques agents de la BCE et en raison d’une procédure d’arbitrage intentée par PNB Banka et quelques actionnaires (voir, en ce sens, arrêt du 7 décembre 2022, PNB Banka/BCE, T‑275/19, sous pourvoi, EU:T:2022:781, points 10 à 19). PNB Banka précise, dans le cadre du treizième moyen, que La BCE n’a pas pris d’actions pour assurer la crédibilité du processus règlementaire ni de mesures pour mettre fin au comportement prétendument corrompu de B. Il en irait de même de C, président de la CMFC.

189    La situation dans laquelle se trouvait PNB Banka au moment de l’adoption de la décision attaquée serait le résultat du comportement reprochable de la BCE.

190    Le CRU, soutenu par la BCE, conteste ces arguments.

191    Il convient de relever que, par son argumentation au soutien des douzième à quatorzième moyens, PNB Banka critique, en substance, le comportement de la BCE et celui du CRU, qui auraient porté atteinte à sa situation en matière prudentielle.

192    Pour se prévaloir de l’adage nemo auditur propriam turpitudinem allegans, encore faut-il qu’un comportement fautif imputable au CRU soit établi, ce qui n’est pas le cas en l’espèce. Il est vrai que B a été inculpé de faits de corruption et a été traduit en justice pour cette raison en Lettonie. En outre, la Cour a également été saisie dans ce contexte (arrêts du 26 février 2019, Rimšēvičs et BCE/Lettonie, C‑202/18 et C‑238/18, EU:C:2019:139, et du 30 novembre 2021, LR Ģenerālprokuratūra, C‑3/20, EU:C:2021:969). Toutefois, PNB Banka n’a aucunement établi que cette circonstance a influé de manière négative sur sa situation en matière prudentielle ni que ses conflits allégués avec la BCE lui auraient valu un traitement défavorable, qui aurait découragé des investisseurs potentiels.

193    PNB Banka ne peut donc valablement alléguer que des actes fautifs de la BCE ont bénéficié à cette dernière et ont conduit à l’adoption de l’évaluation de la défaillance avérée ou prévisible de PNB Banka et à l’adoption de la décision attaquée par le CRU.

194    PNB Banka n’a pas davantage établi ou expliqué de quelle manière la BCE a violé le principe nemo potest venire contra factum proprium.

195    Le douzième moyen ne saurait donc être accueilli, pas davantage que le treizième moyen, qui n’a pas réellement de contenu autonome et constitue une illustration des arguments avancés dans le cadre du douzième moyen.

196    S’agissant du détournement de pouvoir invoqué par PNB Banka dans le cadre du quatorzième moyen, il importe de rappeler qu’un acte n’est entaché de détournement de pouvoir que s’il apparaît, sur la base d’indices objectifs, pertinents et concordants, avoir été pris dans le but exclusif, ou à tout le moins déterminant, d’atteindre des fins autres que celles excipées ou d’éluder une procédure spécialement prévue par le traité pour parer aux circonstances de l’espèce (arrêt du 10 mars 2005, Espagne/Conseil, C‑342/03, EU:C:2005:151, point 64).

197    En l’espèce, PNB Banka est toutefois restée en défaut d’apporter des éléments de nature à étayer son argumentation.

198    Partant, le quatorzième moyen doit être rejeté.

199    Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que le recours doit être rejeté dans son intégralité comme non fondé.

 Sur les dépens

200    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Les requérants ayant succombé, il y a lieu de les condamner aux dépens exposés par le CRU, conformément aux conclusions de ce dernier.

201    La République de Lettonie et la BCE supporteront leurs propres dépens, en application de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      PNB Banka AS et les autres parties requérantes dont les noms figurent en annexe supporteront leurs propres dépens ainsi que ceux exposés par le Conseil de résolution unique (CRU).

3)      La République de Lettonie et la Banque centrale européenne (BCE) supporteront leurs propres dépens.

Kowalik-Bańczyk

Hesse

Dimitrakopoulos

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 15 novembre 2023.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.


1      La liste des autres parties requérantes n’est annexée qu’à la version notifiée aux parties.