Language of document : ECLI:EU:T:2013:547

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU PRÉSIDENT DE LA PREMIÈRE CHAMBRE DU TRIBUNAL

13 septembre 2013(*)

« Intervention »

Dans l’affaire T‑547/12,

Teva Pharma BV, établie à Utrecht (Pays-Bas),

Teva Pharmaceuticals Europe BV, établie à Utrecht, représentées par Mme K. Bacon et M. D. Piccinin, barristers, et M. G. Morgan et Mme C. Drew, solicitors,

parties requérantes,

contre

Agence européenne des médicaments (EMA), représentée par M. T. Jabłoński et Mme G. Gavriilidou, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenue par

Commission européenne, représentée par Mmes P. Mihaylova, M. Šimerdová et M. E. White, en qualité d’agents,

et par

ViiV Healthcare UK Ltd, établie à Brentford (Royaume-Uni), représentée par M. I. Dodds-Smith et Mme J. Mulryne, solicitors, et Mme J. Stratford, QC,

parties intervenantes,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision de l’Agence européenne des médicaments (EMA) du 26 novembre 2012 concernant la non-validation de la demande d’autorisation de mise sur le marché pour le médicament Abacavir/Lamivudine (EMA/H/C/002710/0000),

LE PRÉSIDENT DE LA PREMIÈRE CHAMBRE DU TRIBUNAL

rend la présente

Ordonnance

1        Par acte déposé au greffe du Tribunal le 27 mars 2013, l’European Federation of Pharmaceutical Industries and Associations (EFPIA) a demandé à intervenir dans la présente affaire au soutien des conclusions de la partie défenderesse.

2        Par acte déposé au greffe du Tribunal le 29 mars 2013, l’European Confederation of Pharmaceutical Entrepreneurs (Eucope) a demandé à intervenir dans la présente affaire au soutien des conclusions de la partie défenderesse.

3        Ces demandes ont été signifiées aux parties conformément à l’article 116, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal. Par lettre reçue au greffe du Tribunal le 4 juin 2013, les requérantes, Teva Pharma BV et Teva Pharmaceuticals Europe BV, ont soulevé des objections à ce que ces demandes d’intervention soient accueillies, ce qui n’a pas été le cas de l’Agence européenne des médicaments (EMA).

4        En vertu de l’article 40, deuxième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, applicable au Tribunal en vertu de l’article 53, premier alinéa, du même statut, toute personne pouvant justifier d’un intérêt à la solution du litige autre qu’un litige entre États membres, entre institutions de l’Union européenne ou entre États membres, d’une part, et institutions de l’Union, d’autre part, est en droit d’intervenir au litige.

5        Conformément à une jurisprudence constante, l’association représentative ayant pour objet la protection de ses membres, qui demande à intervenir dans un litige soulevant des questions de principe de nature à affecter ces derniers, justifie d’un tel intérêt [voir, en ce sens, ordonnances du président de la Cour du 17 juin 1997, National Power et PowerGen, C‑151/97 P(I) et C‑157/97 P(I), Rec. p. I‑3491, point 66, et du 28 septembre 1998, Pharos/Commission, C‑151/98 P, Rec. p. I‑5441, point 6, et ordonnance du président de la première chambre du Tribunal du 3 septembre 2013, Telekomunikacja Polska/Commission, T‑486/11, non publiée au Recueil, point 13).

6        Au soutien de leurs demandes, l’EFPIA, une association sans but lucratif représentant l’industrie pharmaceutique et biotechnologique au sein de l’Union, et l’Eucope, une confédération européenne de l’industrie pharmaceutique, font chacune valoir qu’elles justifient d’un intérêt à la solution du litige.

 Sur la justification d’un intérêt à la solution du litige

 Sur la représentativité

7        À cet égard, l’EFPIA soutient être représentative d’un nombre important d’entreprises actives dans le secteur pharmaceutique. Elle indique représenter 39 sociétés ainsi que 33 associations nationales actives dans ce secteur, soit 1 900 sociétés au total. L’EFPIA indique également que ses membres ont présenté ou entendent présenter des dossiers d’autorisation de mise sur le marché en Europe et qu’ils s’appuient pour cela sur les règles et les principes relatifs à l’exclusivité des données qui s’opposent à ce que les données précliniques et cliniques obtenues en vue de l’autorisation de leurs produits soient mentionnées et invoquées par d’autres fabricants de médicaments au cours de la période d’exclusivité de ces données.

8        Pour sa part, l’Eucope soutient représenter plus de 900 entreprises pharmaceutiques ayant des activités en Europe, dont des sociétés individuelles ou l’association de l’industrie pharmaceutique allemande BPI (Bundesverband des Pharmazeutischen Industrie ev) avec 270 sociétés membres, l’association pharmaceutique du Royaume-Uni EMIG (Ethical Medicines Industry Group), avec 170 sociétés membres, BioDeutschland, une association de 275 sociétés de biotechnologies, IML, l’association suédoise des sociétés pharmaceutiques de taille moyenne, et SwedenBio.

9        Dans leurs observations sur les demandes d’intervention, les requérantes ne contestent pas à l’EFPIA et à l’Eucope la qualité d’associations représentatives.

10      En l’espèce, la représentativité des parties qui ont demandé à intervenir ressort effectivement clairement des données qu’elles ont produites à cet égard. Ainsi, il ressort de la liste des membres tant de l’EFPIA que de l’Eucope que celles-ci comprennent des entreprises exerçant des activités significatives dans le secteur des médicaments ainsi que plusieurs associations elles-mêmes représentatives de telles entreprises. L’EFPIA et l’Eucope peuvent donc être considérées comme des associations représentatives dans le secteur des médicaments pour ce qui est de déterminer leur intérêt à la solution du litige dans la présente affaire.

 Sur la protection des intérêts des membres des demanderesses en intervention

11      L’EFPIA et l’Eucope font chacune valoir qu’elles ont pour but de protéger les intérêts de leurs membres, comme cela ressort de leurs statuts.

12      Dans leurs observations sur les demandes d’intervention, les requérantes soutiennent que les dispositions invoquées par les demanderesses sont trop vagues pour pouvoir être considérées comme satisfaisantes.

13      En l’espèce, il y a donc lieu de s’assurer que les associations représentatives en cause ont démontré avoir pour objet la protection de leurs membres.

14      En ce qui concerne l’EFPIA, il ressort de l’article 2 de ses statuts que ses activités s’étendent « à toutes les questions d’intérêt commun pour ses membres », dont celles qui ont « pour but de favoriser un environnement qui encourage la recherche et le développement pharmaceutique, la production respectant des exigences de qualité élevées, la protection de la propriété intellectuelle et la mise en œuvre d’exigences réglementaires assurant aux patients un accès rapide aux médicaments». En outre, cette même disposition prévoit que, en vue de réaliser cet objectif, l’EFPIA assure la « représentation, devant les juridictions et les autorités administratives, des intérêts généraux de ses membres ».

15      En ce qui concerne l’Eucope, il ressort de l’article 3.2 de ses statuts qu’elle a pour objet de représenter « des sociétés et associations membres ayant des activités dans l’Union européenne […] notamment auprès des institutions européennes ».

16      De telles dispositions englobent bien la possibilité pour chaque demanderesse d’intervenir devant le Tribunal dans la présente affaire afin de protéger les intérêts de ses membres dans la mesure où ceux-ci pourraient être affectés par la solution du litige.

 Sur l’existence de questions de principe de nature à affecter les intérêts des membres des demanderesses en intervention

17      L’EFPIA soutient que la présente affaire soulève des questions de principe affectant le fonctionnement du secteur pharmaceutique. En effet, dans leur recours, les requérantes contestent l’application par l’EMA des règles relatives à l’exclusivité des données, et notamment du principe selon lequel les associations médicamenteuses (à savoir des médicaments contenant une association de substances actives) ne relèvent pas de l’autorisation globale de mise sur le marché pour les composantes indépendantes et peuvent bénéficier d’une période d’exclusivité des données distincte.

18      Or, l’exclusivité des données aurait pour objet d’offrir aux sociétés innovantes la garantie que les données rassemblées en vue de l’autorisation de mise sur le marché du médicament innovant seront utilisées uniquement par les autorités compétentes pour évaluer les demandes des fabricants de génériques ou de deuxièmes médicaments après l’expiration de l’exclusivité des données dont bénéficiait le médicament innovant. Celles-ci devraient pouvoir compter sur cette protection pour planifier et exécuter leurs activités commerciales en ce qui concerne non seulement le retour sur investissement des fonds engagés pour la commercialisation de médicaments déjà autorisés, mais également l’investissement dans le développement de futurs médicaments. La protection des sociétés innovantes présenterait donc également un intérêt en termes de santé publique.

19      Pour sa part, l’Eucope indique à ce propos que le produit qui fait l’objet de la décision de l’EMA du 26 novembre 2012 concernant la non-validation de la demande d’autorisation de mise sur le marché pour le médicament Abacavir/Lamivudine (EMA/H/C/002710/000) est qualifié d’association médicamenteuse. Elle précise, à cet égard, que le recours des requérantes soulève des questions de principe, très importantes en pratique, quant à la protection des données relatives à un tel type de médicaments.

20      À cet égard, étant donné que la présente affaire soulèverait une question de principe affectant le fonctionnement du secteur pharmaceutique, l’EFPIA soutient que les intérêts de ses membres seront affectés dans une mesure importante par l’arrêt à intervenir, du fait notamment des sommes qu’ils ont investies dans la recherche et le développement d’associations médicamenteuses fixes.

21      De même, l’Eucope fait valoir que ses membres incluent des entreprises innovantes qui s’appuient sur la protection des données réglementaires pour justifier leurs investissements dans de nouveaux produits pharmaceutiques, de nouvelles indications pour des produits existants et de nouvelles associations médicamenteuses. En particulier, l’Eucope indique que, si le Tribunal faisait droit au moyen des requérantes, premièrement, la protection des données réglementaires serait retirée pour les nouveaux essais précliniques et cliniques qui doivent être fournis pour toutes les associations médicamenteuses ; deuxièmement, l’extension de la notion d’« autorisation de mise sur le marché globale » demandée par les requérantes pourrait éliminer d’autres types de protection des données réglementaires pour les nouveaux tests et essais ; troisièmement, de manière plus large, l’Eucope et ses membres auraient intérêt à maintenir l’équilibre entre les intérêts des entreprises innovantes (sous la forme d’une protection des données réglementaires) et les intérêts des autres parties intéressées, tel qu’institué par le législateur communautaire.

22      Dans leurs observations sur les demandes d’intervention, les requérantes considèrent en substance que les demanderesses se trompent sur la nature du litige, qui ne concernerait pas les questions de principe qu’elles évoquent, mais plutôt une configuration factuelle très précise, la position des requérantes étant qu’un produit particulier, le Kivexa, ne peut bénéficier de la protection qui lui a été accordée par l’EMA pour fonder la décision du 26 novembre 2012. Les intérêts de leurs membres ne seraient donc pas affectés, et cela d’autant moins que la Commission et ViiV Healthcare UK, détenant les droits en cause dans cette affaire, ont déjà été reconnues comme parties intervenantes.

23      Le Tribunal estime, toutefois, que, contrairement à ce qu’exposent les requérantes dans leurs observations, il ne peut être déduit du présent litige qu’il ne pose pas les questions de principe évoquées par l’EFPIA et l’Eucope, lesquelles sont bien de nature à affecter les intérêts des différents membres de ces associations représentatives, dont la situation se rapproche pour beaucoup de celles de ViiV Healthcare UK. Il y a lieu à cet égard de tenir compte du fait que le présent litige porte sur des questions de propriété et d’exclusivité dont les enjeux financiers sont importants pour tous les acteurs susceptibles d’être impliqués dans un tel litige du fait des droits qu’ils détiennent sur des données du type de celles ici en cause.

24      L’EFPIA et l’Eucope soulignent que leurs interventions faciliteront l’examen du contexte de la présente affaire, tout en évitant de multiples interventions individuelles de leurs membres, ce qui porterait atteinte à l’efficacité et au bon déroulement de la procédure.

25      Cet intérêt n’est pas remis en cause par le fait que ViiV Healthcare UK a déjà été autorisée à intervenir dans la présente affaire.

 Conclusion

26      Il ressort de ce qui précède que l’EFPIA et l’Eucope ont dûment justifié de leur intérêt à la solution du litige et doivent être admises à intervenir au soutien des conclusions de l’EMA.

27      La communication au Journal officiel de l’Union européenne visée à l’article 24, paragraphe 6, du règlement de procédure du Tribunal ayant été publiée le 1er février 2013, les demandes d’intervention ont été présentées dans le délai prévu à l’article 115, paragraphe 1, du règlement de procédure, et les droits des intervenants seront ceux prévus à l’article 116, paragraphes 2 à 4, de ce même règlement.

Par ces motifs,

LE PRÉSIDENT DE LA PREMIÈRE CHAMBRE DU TRIBUNAL

ordonne :

1)      L’European Federation of Pharmaceutical Industries and Associations (EFPIA) et l’European Confederation of Pharmaceutical Entrepreneurs (Eucope) sont admises à intervenir dans l’affaire T‑547/12 à l’appui des conclusions de l’Agence européenne des médicaments (EMA).

2)      Le greffier communiquera à l’EFPIA et à l’Eucope une copie des actes de procédure signifiés aux parties.

3)      Un délai sera fixé à l’EFPIA pour présenter un mémoire en intervention.

4)      Un délai sera fixé à l’Eucope pour présenter un mémoire en intervention.

5)      Les dépens sont réservés.

Fait à Luxembourg, le 13 septembre 2013.

Le greffier

 

      Le président

E.  Coulon

 

      J. Azizi


* Langue de procédure : l’anglais.