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CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. JEAN RICHARD DE LA TOUR

présentées le 15 décembre 2022 (1)

Affaire C137/21

Parlement européen

contre

Commission européenne

« Recours en carence – Règlement (UE) 2018/1806 – Liste des pays tiers dont les ressortissants sont soumis à l’obligation de visa pour franchir les frontières extérieures des États membres – Liste des pays tiers dont les ressortissants sont exemptés de cette obligation – Principe de réciprocité – Obligation d’adopter un acte délégué suspendant provisoirement l’exemption de visa pour une période de douze mois à l’égard des ressortissants des États-Unis d’Amérique »






I.      Introduction

1.        Par le présent recours en carence, le Parlement européen demande à la Cour de constater que, en n’adoptant pas un acte délégué, tel que prévu à l’article 7, premier alinéa, sous f), du règlement (UE) 2018/1806 (2), la Commission européenne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu du traité FUE.

2.        Après avoir établi que la Commission dispose d’une marge d’appréciation pour prendre ou non l’acte sollicité par le Parlement, je démontrerai que l’action en carence de ce dernier a été intentée dans un délai raisonnable, mais que la Commission a pris position au sens de l’article 265 TFUE, rendant cette action irrecevable. À titre subsidiaire, j’examinerai au fond la question de la carence de la Commission.

II.    Le cadre juridique

A.      Le règlement (CE) no 539/2001

3.        L’article 1er, paragraphe 4, du règlement (CE) no 539/2001 (3) énonçait, avant sa modification :

« L’établissement, par un pays tiers figurant sur la liste de l’annexe II, de l’obligation de visa vis-à-vis des ressortissants d’un État membre donne lieu à l’application des dispositions ci-après, sans préjudice d’un accord d’exemption de l’obligation de visa conclu par [l’Union] avec ce pays tiers :

a)      l’État membre peut notifier par écrit à la Commission et au Conseil le fait que le pays tiers a établi l’obligation de visa ;

b)      dans le cas d’une telle notification, l’obligation des États membres de soumettre les ressortissants du pays tiers concerné à l’obligation de visa est instaurée à titre provisoire 30 jours après la notification susvisée, à moins que le Conseil, statuant au préalable et à la majorité qualifiée, n’en décide autrement ;

c)      l’instauration provisoire de l’obligation de visa est publiée par le Conseil au Journal officiel [de l’Union européenne] avant qu’elle ne prenne effet ;

d)      la Commission examine toute demande du Conseil ou d’un État membre visant à ce qu’elle soumette une proposition au Conseil portant modification des annexes du présent règlement de manière à inclure le pays tiers concerné dans l’annexe I et à le supprimer de l’annexe II ;

e)      lorsque le pays tiers abroge, avant l’adoption par le Conseil d’une telle modification des annexes du présent règlement, sa décision d’établissement de l’obligation de visa, l’État membre concerné notifie immédiatement par écrit au Conseil et à la Commission cette abrogation ;

f)      cette notification est publiée par le Conseil au Journal officiel [de l’Union européenne]. L’instauration provisoire de l’obligation de visa pour les ressortissants du pays tiers concerné est abrogée 7 jours après la date de cette publication. »

4.        L’article 1er, point 1, sous a), du règlement (UE) no 1289/2013 (4) a modifié, avec effet au 9 janvier 2014, l’article 1er, paragraphe 4, du règlement no 539/2001 comme suit :

« L’application, par un pays tiers figurant sur la liste de l’annexe II, de l’obligation de visa à l’égard des ressortissants d’au moins un État membre donne lieu à l’application des dispositions suivantes :

[...]

d)      lorsqu’elle envisage de nouvelles mesures conformément aux points e), f) ou h), la Commission tient compte des effets des mesures prises par l’État membre concerné en vue d’assurer l’exemption de visa avec le pays tiers en cause, des démarches entamées conformément au point b), et des conséquences de la suspension de l’exemption de l’obligation de visa pour les relations externes de l’Union et de ses États membres avec le pays tiers en cause ;

[...]

f)      si, dans les vingt-quatre mois à compter de la date de publication visée au point a), troisième alinéa, le pays tiers concerné n’a pas levé l’obligation de visa, la Commission adopte, en conformité avec l’article 4 ter, un acte délégué portant suspension temporaire de l’application de l’annexe II, pour une période de douze mois, à l’égard des ressortissants dudit pays tiers. L’acte délégué fixe une date, dans les quatre-vingt-dix jours de son entrée en vigueur, à laquelle la suspension de l’application de l’annexe II prend effet, en tenant compte des ressources dont disposent les consulats des États membres, et modifie l’annexe II en conséquence. Cette modification s’effectue en insérant à côté du nom du pays tiers concerné une note [en] bas de page indiquant que l’exemption de l’obligation de visa est suspendue en ce qui concerne ce pays tiers et précisant la durée de cette suspension.

À partir de la date à laquelle la suspension de l’application de l’annexe II prend effet à l’égard des ressortissants du pays tiers concerné ou lorsqu’une objection à l’acte délégué a été exprimée en vertu de l’article 4 ter, paragraphe 5, tout acte d’exécution adopté en vertu du point e) concernant ce pays tiers vient à expiration.

Si la Commission présente une proposition législative visée au point h), la période de suspension visée au premier alinéa du présent point est prolongée de six mois. La note [en] bas de page visée audit alinéa est modifiée en conséquence.

Sans préjudice de l’application de l’article 4, au cours de ces périodes de suspension, les ressortissants du pays tiers concerné par l’acte délégué sont soumis à l’obligation de visa pour franchir les frontières extérieures des États membres ;

[...] »

B.      Le règlement 2018/1806

5.        Le règlement no 539/2001 a été abrogé et remplacé par le règlement 2018/1806, avec effet au 18 décembre 2018, les références faites au règlement no 539/2001 s’entendant comme étant faites au règlement 2018/1806 et étant à lire selon le tableau de correspondance figurant à l’annexe IV de ce dernier (5).

6.        Aux termes de l’article 1er du règlement 2018/1806 :

« Le présent règlement détermine les pays tiers dont les ressortissants sont soumis à l’obligation de visa ou en sont exemptés, sur la base d’une évaluation au cas par cas de divers critères relatifs, entre autres, à l’immigration clandestine, à l’ordre public et à la sécurité, aux avantages économiques, en particulier en termes de tourisme et de commerce extérieur, ainsi qu’aux relations extérieures de l’Union avec les pays tiers concernés y compris, en particulier, des considérations liées au respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales ainsi que les implications de la cohérence régionale et de la réciprocité. »

7.        L’article 7 de ce règlement est libellé comme suit :

« L’application, par un pays tiers figurant sur la liste de l’annexe II, de l’obligation de visa à l’égard des ressortissants d’au moins un État membre donne lieu à l’application des dispositions suivantes :

a)      dans les trente jours de l’application de l’obligation de visa par le pays tiers, l’État membre concerné en fait notification par écrit au Parlement européen, au Conseil et à la Commission.

Cette notification :

i)      précise la date d’application de l’obligation de visa, ainsi que la nature des documents de voyage et visas concernés ;

ii)      comporte un exposé circonstancié des premières mesures que l’État membre concerné a prises en vue d’assurer l’exemption de l’obligation de visa avec le pays tiers en cause et contient toutes les informations nécessaires.

La Commission publie sans tarder les informations relatives à cette notification au Journal officiel de l’Union européenne, y compris les informations concernant la date d’application de l’obligation de visa et la nature des documents de voyage et visas concernés.

Si le pays tiers décide de lever l’obligation de visa avant l’expiration du délai visé au premier alinéa du présent point, la notification n’est pas faite ou est retirée et les informations ne sont pas publiées ;

b)      immédiatement après la date de publication visée au point a), troisième alinéa, et en concertation avec l’État membre concerné, la Commission entame des démarches auprès des autorités du pays tiers en cause, notamment dans les domaines politique, économique et commercial, en vue du rétablissement ou de l’instauration de l’exemption de visa et informe sans tarder le Parlement européen et le Conseil de ces démarches ;

c)      si, dans les 90 jours à compter de la date de publication visée au point a), troisième alinéa, et malgré toutes les démarches entamées conformément au point b), le pays tiers en cause n’a pas levé l’obligation de visa, l’État membre concerné peut demander à la Commission de suspendre l’exemption de l’obligation de visa à l’égard de certaines catégories de ressortissants dudit pays tiers. Lorsqu’un État membre soumet une telle demande, il en informe le Parlement européen et le Conseil ;

d)      lorsqu’elle envisage de nouvelles mesures conformément au point e), f) ou h), la Commission tient compte des effets des mesures prises par l’État membre concerné en vue d’assurer l’exemption de l’obligation de visa avec le pays tiers en cause, des démarches entamées conformément au point b), et des conséquences de la suspension de l’exemption de l’obligation de visa pour les relations externes de l’Union et de ses États membres avec le pays tiers en cause ;

e)      si le pays tiers concerné n’a pas levé l’obligation de visa, la Commission, au plus tard six mois à compter de la date de publication visée au point a), troisième alinéa, et ensuite tous les six mois au moins au cours d’une période qui, au total, ne peut aller au-delà de la date à laquelle l’acte délégué visé au point f) entre en vigueur ou à laquelle il y est fait objection :

i)      adopte, à la demande de l’État membre concerné ou de sa propre initiative, un acte d’exécution portant suspension temporaire, pour une période de six mois au maximum, de l’exemption de l’obligation de visa pour certaines catégories de ressortissants du pays tiers concerné. Cet acte d’exécution fixe une date, dans les 90 jours de son entrée en vigueur, à laquelle la suspension de l’exemption de l’obligation de visa prend effet, en tenant compte des ressources dont disposent les consulats des États membres. Lorsqu’elle adopte des actes d’exécution ultérieurs, la Commission peut prolonger cette période de suspension par de nouvelles périodes de six mois au maximum et peut modifier les catégories de ressortissants du pays tiers concerné pour lesquelles l’exemption de l’obligation de visa est suspendue.

Ces actes d’exécution sont adoptés en conformité avec la procédure d’examen visée à l’article 11, paragraphe 2. Sans préjudice de l’application de l’article 6, au cours des périodes de suspension, toutes les catégories de ressortissants du pays tiers visées dans l’acte d’exécution sont soumises à l’obligation de visa pour franchir les frontières extérieures des États membres ; ou

ii)      soumet au comité visé à l’article 11, paragraphe 1, un rapport évaluant la situation et exposant les raisons pour lesquelles elle a décidé de ne pas suspendre l’exemption de l’obligation de visa et en informe le Parlement européen et le Conseil.

Tous les facteurs pertinents, tels que ceux visés au point d), sont pris en compte dans ce rapport. Le Parlement européen et le Conseil peuvent procéder à un débat politique sur la base de ce rapport ;

f)      si, dans les vingt-quatre mois à compter de la date de publication visée au point a), troisième alinéa, le pays tiers concerné n’a pas levé l’obligation de visa, la Commission adopte, conformément à l’article 10, un acte délégué portant suspension temporaire de l’exemption de l’obligation de visa, pour une période de douze mois, à l’égard des ressortissants dudit pays tiers. L’acte délégué fixe une date, dans les 90 jours de son entrée en vigueur, à laquelle la suspension de l’exemption de l’obligation de visa prend effet, en tenant compte des ressources dont disposent les consulats des États membres, et modifie l’annexe II en conséquence. Cette modification s’effectue en insérant à côté du nom du pays tiers concerné un renvoi à une note [en] bas de page indiquant que l’exemption de l’obligation de visa est suspendue en ce qui concerne ce pays tiers et précisant la durée de cette suspension.

[...]

h)      si, dans les six mois à compter de l’entrée en vigueur de l’acte délégué visé au point f), le pays tiers concerné n’a pas levé l’obligation de visa, la Commission peut présenter une proposition législative visant à modifier le présent règlement en vue de transférer la référence au pays tiers de l’annexe II à l’annexe I ;

[...] »

8.        Les États-Unis d’Amérique figurent dans la « [l]iste des pays tiers dont les ressortissants sont exemptés de l’obligation de visa lors du franchissement des frontières extérieures des États membres pour des séjours dont la durée n’excède pas 90 jours sur toute période de 180 jours », faisant l’objet de l’annexe II du règlement 2018/1806.

III. Les antécédents du litige

9.        Le 12 avril 2016, la Commission a présenté une communication portant évaluation de la situation de non-réciprocité avec certains pays tiers dans le domaine de la politique des visas (6). Parmi les pays désignés à l’égard desquels la non-réciprocité au regard des visas persistait encore se trouvaient les États‑Unis d’Amérique.

10.      Postérieurement, la Commission a présenté six communications de suivi sur la situation (7). Depuis la communication du mois de décembre 2017, le seul cas de non-réciprocité restant concernait toujours les États‑Unis d’Amérique, qui refusaient d’accueillir sans visa les citoyens de la République de Bulgarie, de la République de Croatie, de la République de Chypre et de la Roumanie.

11.      Compte tenu de l’obligation imposée par les États‑Unis d’Amérique à l’égard des ressortissants de ces États membres, le Parlement, par une résolution du 2 mars 2017 (8), a invité la Commission à agir, au sens de l’article 265 TFUE, en adoptant un acte délégué prévu à l’article 1er, paragraphe 4, du règlement no 539/2001, tel que modifié par le règlement no 1289/2013, visant à suspendre temporairement l’exemption de visa de court séjour pour les ressortissants américains et canadiens en raison du non-respect de la condition de réciprocité.

12.      En réponse à cette invitation à agir, la Commission, par une communication du 2 mai 2017 (9), a pris position sur la résolution du 2 mars 2017, en estimant que l’adoption d’un acte délégué visant à suspendre temporairement l’exemption de l’obligation de visa pour les ressortissants américains et canadiens serait contre-productive et ne contribuerait pas à atteindre l’objectif de l’exemption de visa pour tous les citoyens de l’Union.

13.      Le 22 octobre 2020, le Parlement, par le biais d’une nouvelle résolution (10), a invité une seconde fois la Commission à agir, au sens de l’article 265 TFUE, en adoptant un acte délégué tel que visé à l’article 7, premier alinéa, sous f), du règlement 2018/1806 visant à suspendre temporairement l’exemption de visa de court séjour pour les ressortissants des États‑Unis d’Amérique, compte tenu de l’obligation de visa imposée par ces derniers aux ressortissants bulgares, croates, chypriotes et roumains.

14.      La Commission, par une communication du 22 décembre 2020 (11), a exposé de nouveau les raisons pour lesquelles elle n’estimait pas nécessaire à ce moment‑là d’adopter un acte délégué au sens de l’article 7, premier alinéa, sous f), du règlement 2018/1806.

IV.    La procédure devant la Cour et les prétentions des parties

15.      Par acte du 4 mars 2021, le Parlement a saisi la Cour d’un recours en carence, considérant que l’article 7, premier alinéa, sous f), du règlement 2018/1806 ne permet pas à la Commission de ne pas adopter un acte délégué dès lors que les conditions d’adoption d’un tel acte sont remplies.

16.      Le Parlement conclut à ce que la Cour :

–        constate que, en n’adoptant pas l’acte délégué en vertu de l’article 7, premier alinéa, sous f), du règlement 2018/1806, la Commission a enfreint le traité, et

–        condamne la Commission aux dépens.

17.      La Commission conclut au rejet du recours et à la condamnation du Parlement aux dépens.

18.      Par acte séparé en date du 18 mai 2021, la Commission a soulevé une exception d’irrecevabilité. Le Parlement a présenté ses observations sur cette exception le 28 juin 2021.

19.      Le 21 septembre 2021, la Cour a décidé de joindre au fond l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission.

20.      Sur la recevabilité, la Commission expose qu’elle a valablement pris position, en réaction à l’invitation à agir adressée par le Parlement, en adoptant la communication du 22 décembre 2020 dans le but de répondre à cette invitation. Elle fait valoir que, en présentant une seconde invitation à agir au cours de l’année 2020 ayant le même contenu que celle de l’année 2017, le Parlement a contourné le délai de recours prévu à l’article 265 TFUE, qui est d’ordre public. Elle ajoute que, si, selon l’interprétation du Parlement, elle était dans l’obligation d’adopter un acte délégué dès l’année 2017, il ne peut y avoir de seconde invitation à agir en raison des résultats de la voie diplomatique utilisée ni de carence continue justifiant une action intentée dans un délai raisonnable au cours de l’année 2020.

21.      À l’inverse, le Parlement estime que la Commission n’a pas pris position au sens de l’article 265, deuxième alinéa, TFUE puisqu’elle s’est contentée de reprendre des éléments de ses précédentes communications. En outre, il précise que sa seconde invitation à agir est recevable puisque la Commission est l’auteure d’une carence continue et que la seconde invitation diffère de la première dans son contenu. Il ajoute que, à la suite des élections, sa composition a changé entre les deux résolutions.

22.      Sur le fond, le Parlement soutient que l’article 7, premier alinéa, sous f), du règlement 2018/1806 ne confère à la Commission une marge de manœuvre ni quant à la possibilité ou non d’adopter un acte délégué ni quant au choix du moment où cet acte délégué visant la suspension de l’exemption de l’obligation de visa pour les ressortissants américains doit être adopté, dès lors que les conditions prévues par cette disposition sont remplies. Selon lui, la seule condition pour agir est la condition objective liée à l’écoulement d’un délai de 24 mois après la publication de la notification prévue à l’article 7, premier alinéa, sous a), du règlement 2018/1806. Cette condition unique n’est pas remise en question par l’article 7, premier alinéa, sous d), de ce règlement qui ne peut être analysé comme un préalable à l’adoption de l’acte délégué, sauf à remettre en cause, de façon contra legem, l’obligation pesant sur la Commission d’adopter cet acte délégué à l’issue du délai de 24 mois ainsi qu’à priver le Parlement et le Conseil de leur rôle dans la mise en œuvre du mécanisme de réciprocité en arrêtant ce mécanisme à la première étape. Le Parlement ajoute que la Commission ne peut être libérée de son obligation d’agir par l’absence de demande d’adoption d’acte délégué par les États membres concernés.

23.      La Commission plaide en faveur de l’absence d’obligation inconditionnelle à agir en raison de la condition préalable instaurée par l’article 7, premier alinéa, sous d), du règlement 2018/1806 lui imposant, lorsqu’elle envisage de nouvelles mesures conformément aux points e), f) ou h) de cet article, de tenir compte des effets des mesures prises par l’État membre concerné, des démarches entamées par elle‑même dans les domaines politique, économique et commercial, en vue du rétablissement ou de l’instauration de l’exemption de l’obligation de visa, ainsi que des conséquences de la suspension de cette exemption sur les relations extérieures de l’Union et de ses États membres avec le pays tiers en cause. Cette interprétation est conforme à la lettre de l’article 7 du règlement 2018/1806 et à l’intention de 21 États membres exprimée lors de l’adoption du règlement no 1289/2013, qui a instauré le mécanisme de réciprocité. Elle ajoute que la voie diplomatique a porté ses fruits pour les ressortissants croates et polonais et qu’aucun des États membres encore concernés ne lui a demandé l’adoption de l’acte délégué en cause.

V.      Analyse

A.      Observations liminaires

24.      Pour traiter le présent recours, il m’apparaît nécessaire d’aborder une question d’interprétation générale du règlement 2018/1806 quant à la marge de manœuvre dont dispose la Commission en cas de recours au mécanisme de réciprocité prévu à l’article 7, premier alinéa, sous f), de ce règlement. En effet, cette interprétation permettra d’appréhender les motifs d’irrecevabilité soulevés par la Commission tenant, d’une part, au caractère tardif du recours lié à l’existence d’une précédente invitation à agir du Parlement au cours de l’année 2017 ayant un contenu très similaire à celle déférée à la Cour par le présent recours et, d’autre part, à l’existence d’une prise de position de la Commission mettant fin à la procédure en carence.

25.      Pour mémoire, le règlement 2018/1806, reprenant, sur ce point, les avancées introduites par le règlement no 1289/2013 à l’article 1er, paragraphe 4, du règlement no 539/2001, prévoit une gradation des réponses lorsqu’un pays tiers impose des visas pour les ressortissants de tout ou partie des États membres, alors qu’il dispose d’une exemption de visa pour ses propres ressortissants de la part de l’ensemble des États membres : il s’agit du mécanisme de réciprocité.

26.      La première mesure possible consiste en l’adoption par la Commission d’un acte d’exécution portant suspension pour six mois, renouvelables, de l’exemption de l’obligation de visa à l’égard de certaines catégories de ressortissants du pays tiers concerné (12).

27.      La deuxième mesure envisageable est l’adoption par la Commission d’un acte délégué portant suspension pour douze mois de l’exemption de l’obligation de visa pour l’ensemble des ressortissants de ce pays tiers (13).

28.      Enfin, si un visa est toujours exigé par le pays tiers concerné six mois après l’entrée en vigueur de cet acte délégué, la Commission peut présenter une proposition législative visant à modifier le règlement 2018/1806 en vue de basculer le nom de ce pays tiers de la liste des pays exemptés de l’obligation de visa prévue à l’annexe II de ce règlement vers celle des pays soumis à l’obligation de visa prévue à son annexe I (14).

29.      La marge d’appréciation dont dispose la Commission pour adopter l’acte délégué portant suspension de douze mois de l’exemption de l’obligation de visa pour l’ensemble des ressortissants d’un pays tiers résulte de la rédaction de l’article 7, premier alinéa, sous d), du règlement 2018/1806 qui énonce que, lorsqu’elle envisage de mettre en œuvre l’une des mesures visées aux points e), f) ou h), de cet article, la Commission tient compte :

–        des effets des mesures prises par l’État membre concerné en vue d’assurer l’exemption de l’obligation de visa avec le pays tiers en cause ;

–        des démarches entamées auprès des autorités du pays tiers en cause, notamment dans les domaines politique, économique et commercial, en vue du rétablissement ou de l’instauration de l’exemption de visa (15), et

–        des conséquences de la suspension de l’exemption de visa pour les relations externes de l’Union et de ses États membres avec le pays tiers en cause.

30.      La Commission considère qu’il résulte du libellé de l’article 7, premier alinéa, sous d), du règlement 2018/1806 qu’elle dispose d’une marge d’appréciation, puisqu’elle doit tenir compte de ces trois éléments constituant une condition préalable à l’adoption de l’acte délégué portant suspension pour douze mois de l’exemption de l’obligation de visa pour l’ensemble des ressortissants de ce pays tiers.

31.      Le Parlement, à l’inverse, estime que l’application de l’article 7, premier alinéa, sous f), de ce règlement n’est soumise à aucune condition préalable et que la seule marge de manœuvre pour la Commission porte sur la date de la prise d’effet de l’acte délégué suspendant l’exemption de visa qui doit tenir compte des ressources des consulats des États membres.

32.      Il me semble que, contrairement à ce que fait valoir le Parlement, il résulte clairement de la lecture combinée de l’article 7, premier alinéa, sous d) et f), du règlement 2018/1806 que la Commission dispose d’une double marge d’appréciation, bien que l’article 7, premier alinéa, sous f), de ce règlement précise que « la Commission adopte [...] un acte délégué ». D’une part, sur le principe du recours à l’acte délégué, elle doit, avant d’adopter un tel acte, tenir compte des éléments énoncés à cet article 7, premier alinéa, sous d), et, d’autre part, s’agissant de la prise d’effet de l’acte délégué, elle peut la décaler au sein d’une période de 90 jours suivant son entrée en vigueur pour tenir compte des ressources des consulats, ainsi que le reconnaît le Parlement.

33.      En effet, lors de la première étape du mécanisme de réciprocité, l’article 7, premier alinéa, sous e), ii), du règlement 2018/1806 prévoit que la Commission, si elle décide de ne pas suspendre l’exemption de l’obligation de visa pour certaines catégories de ressortissants pour une durée de six mois, soumet un rapport au comité visé à l’article 11, paragraphe 1, de ce règlement dans lequel elle tient compte de tous les facteurs pertinents, dont ceux mentionnés à l’article 7, premier alinéa, sous d), dudit règlement.

34.      En outre, les conditions d’élaboration de ce mécanisme de réciprocité, avec adoption d’un acte d’exécution ou d’un acte délégué de suspension de l’exemption de visa pour une certaine durée lors de la procédure de révision du règlement no 539/2001, initiée au cours de l’année 2011 (16), plaident également en ce sens d’une non-automaticité de cette suspension de l’exemption.

35.      En effet, ces actes délégués ou ces actes d’exécution, correspondant à la première ou à la deuxième étape du mécanisme de réciprocité, n’étaient pas prévus dans la proposition de 2011 qui se contentait d’indiquer, dans les motifs de son projet, que « [l]e mécanisme de réciprocité initialement prévu par le règlement [no 539/2001] comportait déjà un certain automatisme : la notification des cas de non-réciprocité n’était pas obligatoire ; l’État membre concerné décidait librement de les notifier ou non. Mais si la notification intervenait, les États membres étaient alors tenus d’imposer l’obligation de visa pour les ressortissants du pays tiers concerné, provisoirement et automatiquement, 30 jours après la notification, sauf décision contraire du Conseil. Cet automatisme était considéré comme le point faible du mécanisme de réciprocité initial et il a donc été abandonné en 2005, car jugé contreproductif. Rien ne permet de penser qu’il serait plus efficace aujourd’hui. Le mécanisme de réciprocité actuel, tel qu’il a été modifié en 2005, est perçu comme globalement efficace, et les cas de non-réciprocité ont été considérablement réduits. Les cas résiduels correspondent essentiellement à des situations dans lesquelles des pays tiers considèrent que certains États membres ne satisfont pas aux critères objectifs d’exemption de visa fixés dans la législation nationale de ces pays » (17). Ainsi, lors de la procédure de révision du règlement no 539/2001, la Commission a pris clairement parti en faveur du maintien d’une non-automaticité et a proposé une modification de l’article 1er, paragraphe 4, sous c), de ce règlement uniquement pour tenir compte des conséquences du traité de Lisbonne.

36.      C’est au cours des discussions au Conseil qu’est apparue l’idée de permettre à la Commission, à la demande de l’État membre concerné ou, passé un certain délai, de sa propre initiative, de prendre un acte d’exécution suspendant l’exemption de visa à titre de réciprocité, en tenant compte des conséquences sur les relations externes de l’Union, ce qui correspond en substance à la première étape du mécanisme de réciprocité finalement adopté (18).

37.      À cette occasion, la Commission a réaffirmé que l’automaticité de la suspension de l’exemption de visa serait contre-productive et certains États membres ont fait valoir des opinions variées. Ainsi, un État membre a estimé intéressante cette proposition de compromis, car elle permettait de montrer une solidarité entre États membres vis-à-vis de l’extérieur. Un autre a fait valoir qu’un rapport de la Commission ne pouvait être un signal suffisant pour le pays tiers et que la Commission devrait être obligée de trouver une solution soit dans le domaine des visas, soit dans un autre domaine comme le commerce ou les transports. Un dernier État membre a critiqué l’approche retenue comme étant trop longue et complexe (19).

38.      En réalité, l’article 1er, paragraphe 4, sous d), du règlement no 539/2001, tel que modifié par le règlement no 1289/2013, prévoyant que la Commission doit tenir compte de certains éléments avant de prendre certaines mesures ainsi que le découpage du mécanisme de réciprocité en trois étapes, résulte en substance des amendements de la commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures lors de l’examen au Parlement de la proposition de 2011 (20), fondés sur l’analyse de son rapporteur selon lequel le fonctionnement du mécanisme de réciprocité n’était pas satisfaisant (21). Toutefois, la commission des affaires étrangères du Parlement, saisie pour avis, avait pris position le 24 novembre 2011 en faveur du statu quo sur la question de l’évolution du mécanisme de réciprocité, adoptant la position initiale de la Commission (22).

39.      Il résulte de ces débats que les positions relatives au mécanisme de réciprocité, à son automaticité, à ses étapes, à la nature des actes à adopter par la Commission, aux délais dans lesquels les adopter et à la possibilité d’entamer des négociations dans d’autres domaines étaient très diverses.

40.      À la lumière de ces éléments, il est important de noter, en premier lieu, l’évolution de la rédaction de l’article 1er, paragraphe 4, sous d), du règlement no 539/2001 entre l’amendement du Parlement qui se contente d’évoquer : « lorsqu’elle envisage d’autres mesures, la Commission tient compte des effets des mesures » et la rédaction finale suivante : « lorsqu’elle envisage de nouvelles mesures conformément aux points e), f) ou h), la Commission tient compte des effets des mesures ».

41.      En second lieu, il convient de prendre en considération la déclaration de 21 États membres lors de l’adoption du règlement no 1289/2013, par laquelle ils ont indiqué que « [l]es modifications apportées au règlement [no 539/2001], notamment celle concernant le mécanisme de réciprocité (article 1er, paragraphe 1) et celle relative à la clause suspensive (article 1er, paragraphe 2), pourraient être lourdes de conséquences pour les relations extérieures de l’Union et de ses États membres. Nous insistons par conséquent sur le fait que, conformément aux dispositions applicables, les institutions compétentes de l’Union sont tenues, avant l’adoption de toute proposition ou décision, de procéder à un examen minutieux et de tenir compte des conséquences politiques potentiellement néfastes que ces propositions ou décisions pourraient avoir pour les relations extérieures tant de l’Union que de ses États membres. Cela vaut en particulier pour les relations extérieures avec des partenaires stratégiques. Nous estimons que le Conseil devrait veiller à ce que, en ce qui le concerne, ces obligations soient pleinement respectées » (23).

42.      En outre, j’estime que la position défendue par la Commission, à l’occasion de son recours en annulation dirigé, notamment, contre l’article 1er, point 1, sous a), du règlement no 1289/2013, modifiant, entre autres, l’article 1er, paragraphe 4, sous f), du règlement no 539/2001 (24), selon laquelle elle dispose d’une marge d’appréciation presque nulle pour adopter l’acte délégué, ce qui aurait dû amener le législateur de l’Union à choisir un acte d’exécution, n’est pas décisive dans le présent recours.

43.      En effet, d’une part, la Cour a estimé que cette question n’était pas pertinente pour déterminer si l’acte à adopter par la Commission relevait de l’article 290 TFUE ou de l’article 291 TFUE (25).

44.      D’autre part, à partir du moment où la Cour a confirmé la nature d’acte délégué de l’acte pris sur le fondement de l’article 1er, paragraphe 4, sous f), du règlement no 539/2001, tel que modifié par le règlement no 1289/2013 [devenu article 7, premier alinéa, sous f), du règlement 2018/1806], la Commission peut faire usage de la marge d’appréciation laissée par le législateur de l’Union.

45.      Dès lors, c’est en tenant compte de cette marge d’appréciation de la Commission qu’il convient d’examiner les motifs d’irrecevabilité.

B.      Sur la recevabilité

46.      La Commission a soulevé deux motifs d’irrecevabilité portant, l’un, sur la possibilité d’initier une seconde procédure en carence, alors que la première invitation à agir n’a pas été suivie d’une saisine de la Cour, et, l’autre, sur l’existence d’une prise de position mettant fin à la procédure.

1.      La possibilité dune nouvelle invitation à agir après une première invitation nayant pas abouti à la saisine de la Cour

47.      Dans un premier temps, il est indéniable que les résolutions du 2 mars 2017 et du 22 octobre 2020, à l’exception de l’ajout de deux considérants (26) dans la seconde, sont identiques. Le premier considérant ajouté (considérant J) de cette dernière résolution ne fait que renforcer les arguments présentés dans le reste de la résolution (solidarité entre États membres (27), privation des droits du Parlement et du Conseil (28)) sans apporter de nouvel argument. Quant au second considérant ajouté (considérant K), il se contente de rappeler la fonction de gardienne des traités de la Commission et le risque que son inaction affaiblisse cette fonction. Il ne m’apparaît pas que ce rappel général puisse être considéré comme un argument supplémentaire. Dans les deux résolutions, le Parlement reproche donc bien à la Commission la même carence pour les mêmes motifs.

48.      Il importe peu, à cet égard, que la composition du Parlement ait changé entre les deux invitations à agir quant à la recevabilité du recours en carence, puisqu’il s’agit d’un recours institutionnel appartenant en tant que tel à chaque institution concernée.

49.      En outre, le fait qu’il existe, comme je l’ai indiqué précédemment, une marge de manœuvre au bénéfice de la Commission ne permet pas de faire application par analogie de la jurisprudence du Tribunal constatant une carence de la Commission pour ne pas avoir pris un acte délégué, alors que l’obligation d’adopter un tel acte, au plus tard à la date indiquée dans l’acte législatif, était claire, précise et inconditionnelle (29).

50.      En effet, dans l’arrêt du 16 décembre 2015, Suède/Commission (30), le Tribunal s’est fondé sur la rédaction de l’article 5, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement (UE) no 528/2012 (31), énonçant que, « [a]u plus tard le 13 décembre 2013, la Commission adopte des actes délégués [...] en ce qui concerne la spécification des critères scientifiques pour la détermination des propriétés perturbant le système endocrinien », pour juger que « [f]orce est de constater qu’il ressort explicitement de cette disposition que pesait sur la Commission une obligation claire, précise et inconditionnelle d’adopter des actes délégués en ce qui concerne la spécification des critères scientifiques pour la détermination des propriétés perturbant le système endocrinien, et ce au plus tard le 13 décembre 2013 » (32).

51.      En l’espèce, paradoxalement, le Parlement se fonde sur cette jurisprudence pour reprocher à la Commission son inaction, mais sans tirer de conséquences de l’abandon ou du non-engagement de sa première procédure en carence, intervenu après la réponse de la Commission à son invitation à agir. Or, si la Commission avait eu l’obligation d’agir en raison du fait que cette dernière était claire, précise et inconditionnelle, le Parlement aurait dû poursuivre la procédure en carence et saisir la Cour dans le délai prévu à l’article 265, deuxième alinéa, TFUE, sans quoi sa nouvelle invitation à agir pourrait être considérée comme un détournement de ce délai.

52.      L’obligation à agir n’étant pas, en l’espèce, claire, précise et inconditionnelle pour les motifs que j’ai évoqués, il convient de rechercher, d’une part, si le délai existant entre les deux invitations à agir est pertinent quant à la recevabilité du recours et, d’autre part, si une nouvelle invitation à agir, similaire à une précédente, était possible.

53.      Concernant le délai pour l’invitation à agir, en premier lieu, il apparaît nécessaire de procéder à quelques rappels chronologiques.

54.      En effet, la publication prévue à l’article 1er, paragraphe 4, sous a), troisième alinéa, du règlement no 539/2001, tel que modifié par le règlement no 1289/2013 [devenu article 7, premier alinéa, sous a), troisième alinéa, du règlement 2018/1806], a eu lieu le 12 avril 2014 (33). C’est à partir de cette date que doit être décompté le délai de deux ans à l’issue duquel la Commission peut adopter un acte délégué en vertu de l’article 7, premier alinéa, sous f), du règlement 2018/1806. Ainsi, à compter du 11 avril 2016, la Commission pouvait adopter un acte délégué.

55.      Or, la Commission a conclu sa communication du 12 avril 2016 par une invitation du Parlement et du Conseil « à engager de toute urgence des discussions et à prendre position sur la meilleure voie à suivre [...], à la lumière de l’évaluation fournie dans la présente communication. Le Parlement [...] et le Conseil sont invités à informer la Commission de leurs positions respectives au plus tard pour le 12 juillet 2016 ».

56.      Ainsi, la Commission, à l’expiration du délai de 24 mois, a fait clairement savoir qu’elle n’envisageait pas de prendre un acte délégué dans l’immédiat, mais, au contraire, qu’elle attendait la prise de position du Parlement et du Conseil sur cette question avant une date précise.

57.      Le 13 juillet 2016, puis le 21 décembre 2016 (34), la Commission a pris deux nouvelles communications de suivi de celle du 12 avril 2016, dans lesquelles elle faisait état des efforts diplomatiques développés en vue d’aboutir à l’exemption de visa pour les ressortissants des États membres concernés souhaitant se rendre aux États-Unis.

58.      Ce n’est que le 2 mars 2017 que le Parlement a voté la première résolution contenant une invitation à agir à l’égard de la Commission aux fins d’adoption d’un acte délégué.

59.      Pour mémoire, l’article 265 TFUE ne prévoit aucun délai entre le constat de l’inaction et l’invitation à agir pour initier une action en carence. Toutefois, selon la jurisprudence de la Cour, sous peine de forclusion du recours, l’invitation à agir doit être adressée à l’institution compétente dans un délai raisonnable depuis le constat de l’inaction (35).

60.      S’il est manifeste que la première invitation à agir a été formulée dans un délai raisonnable, elle n’a néanmoins été suivie d’aucun acte de la part du Parlement, qui s’est contenté de la communication de la Commission du 2 mai 2017 (36) rappelant les efforts diplomatiques déployés ainsi que les résultats obtenus et indiquant que l’adoption d’un acte délégué « serait pour le moment contre‑productive et ne contribuerait pas à atteindre l’objectif de l’exemption de visa pour tous les citoyens de l’[Union] ». Dès lors, le choix de la voie diplomatique pour tenter de résoudre la difficulté a été – tout au moins implicitement – validé par le Parlement. Cependant, cette acceptation de la voie diplomatique au détriment de l’adoption d’un acte délégué est-elle définitive ?

61.      Si l’on s’en tient à la seule question du délai, il me semble que, en l’espèce, un enseignement peut être tiré de la jurisprudence de la Cour indiquant qu’il ne saurait être reproché au requérant de ne pas avoir agi dans un délai raisonnable si, pendant toute la période concernée, les parties ont eu des contacts fréquents, de sorte qu’il était fondé à penser que le problème allait recevoir une solution favorable (37).

62.      De même, le Tribunal a admis des invitations à agir 26 ou 47 mois après les dépôts de plaintes en matière d’aides d’État, considérant, ainsi, que la lenteur de la Commission à instruire ces plaintes ne pouvait être préjudiciable aux requérants en matière de délai (38).

63.      Si l’on ne tient pas compte, pour les besoins du raisonnement, de la première invitation à agir du 2 mars 2017, un délai de plus de quatre ans et demi entre la communication du 12 avril 2016 – visée dans la requête du Parlement – et la résolution du 22 octobre 2020 pourrait, au regard des circonstances très particulières de l’affaire, être vu comme permettant encore l’engagement d’une action en carence. Ces circonstances très particulières seraient, en l’espèce, la voie diplomatique choisie par la Commission, dont l’effet ne peut être évalué que sur une durée assez longue ; l’acceptation de cette voie par l’absence de recours en carence par le Parlement en 2017 ; l’existence de réunions de travail tripartites régulières suivies d’effets en faveur de certains ressortissants de l’Union ; les communications régulières de la Commission au Parlement et au Conseil sur les avancées des travaux, ainsi que la pandémie de COVID-19 en 2020 qui a rendu impossibles les déplacements transatlantiques.

64.      En second lieu, je serais enclin à suivre cette idée de non‑forclusion de l’action en carence, surtout dans un contexte où l’invitation à agir fait suite à une première invitation non suivie de l’introduction d’un recours plus de trois ans et demi auparavant dans ce contexte précis.

65.      En effet, la première tentative du Parlement ne peut valoir renonciation implicite à agir en carence plus tard au regard du contexte spécifique de l’affaire puisque, comme je l’ai déjà exposé, la voie diplomatique pour résoudre la question de l’exemption de visa est une voie longue.

66.      En réalité, il serait même envisageable d’aller plus loin en prenant comme point de départ permettant de juger si l’invitation à agir a été faite dans un délai raisonnable chaque nouvelle communication par laquelle la Commission indique au Parlement et au Conseil qu’elle considère comme étant contre-productif d’adopter un acte délégué pour privilégier la voie diplomatique.

67.      Ainsi, je suis d’avis que la seconde invitation à agir a pu être prise dans un délai raisonnable au regard des spécificités de l’affaire rappelées au point 63 des présentes conclusions, que l’on considère le délai écoulé depuis la première invitation à agir ou depuis la dernière communication de la Commission du 23 mars 2020 (39) avant cette seconde invitation à agir.

2.      Lexistence dune prise de position

68.      Dans un second temps, se pose la question de savoir si la communication de la Commission du 22 décembre 2020 constitue une prise de position au sens de l’article 265, deuxième alinéa, TFUE.

69.      Il est de jurisprudence constante que l’adoption par l’institution invitée à agir d’un acte différent de celui que le requérant aurait souhaité n’est pas constitutive d’une carence (40).

70.      En l’occurrence, le fait que la Commission ait pris une communication prônant le recours à la voie diplomatique en lieu et place de l’adoption d’un acte délégué peut s’apparenter à une prise de position qui rendrait le présent recours irrecevable.

71.      En effet, la Cour a reconnu que l’institution invitée à agir n’est pas obligée d’adopter un acte de l’Union au sens de l’article 288 TFUE pour que la prise de position soit valable et que le recours en carence soit irrecevable (41). À cette fin, toute mesure adoptée par cette institution peut, le cas échéant, être assimilée à une prise de position. En l’espèce, sous réserve du respect par la communication du 22 décembre 2020 des conditions de fond relatives à ce qui peut constituer une prise de position, le fait que cette communication ne soit pas un acte prévu par le droit primaire, s’agissant de la forme, n’est pas suffisant pour remplir les conditions du recours en carence (42).

72.      Concernant les conditions de fond touchant à la qualification de « prise de position », la Cour a une acception particulièrement large sur ce qu’une prise de position représente, au sens de l’article 265, deuxième alinéa, TFUE. En ce sens, deux remarques doivent être faites.

73.      D’une part, le fait, pour l’institution invitée à agir, d’entamer le processus de prise de décision, sans l’achever nécessairement, vaut néanmoins prise de position et rend le recours en carence irrecevable (43). En l’occurrence, le fait que la Commission ait adopté la communication du 22 décembre 2020 avant d’adopter potentiellement un acte délégué peut être considéré comme faisant partie du processus intégral de prise de position et pourrait, le cas échéant, en fonction du contenu de cette communication, être considéré comme une prise de position, au sens de l’article 265, deuxième alinéa, TFUE.

74.      D’autre part, même une prise de position partielle ou indirecte vaut prise de position au sens de l’article 265, deuxième alinéa, TFUE (44). Autrement dit, si l’institution censée adopter un acte ne règle la situation que partiellement ou indirectement, sans apporter une solution complète, cela vaut toujours prise de position, l’acte en question pouvant être complété à une étape ultérieure. En l’occurrence, en fonction de l’interprétation qui sera donnée au contenu de la communication du 22 décembre 2020, il se peut que, même si cette dernière ne règle qu’indirectement ou partiellement la question de la suspension de l’exemption de visa, sans apporter une solution précise, le recours en carence soit irrecevable.

75.      J’ajoute deux éléments spécifiques à l’espèce qui me semblent importants.

76.      Premièrement, après la première invitation à agir du 2 mars 2017, le Parlement s’est contenté de la communication de la Commission du 2 mai 2017 (45) et n’a pas poursuivi son action en carence en saisissant la Cour. Il a donc admis, tout au moins implicitement, que cette communication valait prise de position.

77.      Deuxièmement, il existe un précédent dans lequel un requérant a agi en carence contre la Commission pour défaut d’adoption de l’acte délégué prévu à l’article 1er, paragraphe 4, du règlement no 539/2001.

78.      La réponse de la Commission, que le requérant jugeait insatisfaisante, se fondait sur trois éléments. D’abord, la Commission faisait valoir qu’elle avait adopté plusieurs rapports et communications dans le domaine de la réciprocité de la levée de l’obligation de visa pour les ressortissants des États membres à l’égard de nombreux pays tiers et qu’elle s’était activement engagée également afin de garantir cette réciprocité sans limite avec les États-Unis d’Amérique. Ensuite, elle exposait qu’elle n’était pas responsable des restrictions d’accès aux États-Unis que subissait le requérant et que sa situation ne s’améliorerait pas du fait de la levée de l’exemption de visa pour les ressortissants américains. Enfin, la Commission concluait à l’irrecevabilité d’un éventuel recours en carence à venir dans la mesure où l’acte délégué sollicité ne concernait pas directement et individuellement le requérant. Le Tribunal a jugé que la Commission avait ainsi pris position, rendant l’action en carence du requérant irrecevable (46).

79.      Il m’apparaît donc clairement que, en l’espèce, la Commission a pris position, au sens de l’article 265, deuxième alinéa, TFUE, par sa communication du 22 décembre 2020 sur le fait qu’elle continuait à privilégier la voie diplomatique pour obtenir la réciprocité de la part des États-Unis d’Amérique et que l’adoption de l’acte délégué sollicité serait contre-productive pour obtenir l’exemption de visa pour l’ensemble des citoyens de l’Union souhaitant se rendre dans ce pays.

80.      Pour ces motifs, je considère que l’action en carence du Parlement est irrecevable.

C.      Sur l’existence d’une carence

81.      Il me semble néanmoins nécessaire de procéder, à titre subsidiaire, à l’examen de la question de fond de l’existence ou non d’une carence de la part de la Commission.

82.      Ainsi que je l’ai exposé aux points 32 à 45 des présentes conclusions, je considère que la Commission dispose d’une marge d’appréciation pour adopter ou non un acte délégué fondé sur l’article 7, premier alinéa, sous f), du règlement 2018/1806. Cette marge d’appréciation est encadrée par les trois critères énoncés au point d) de cet article.

83.      C’est donc à l’aune de ces trois critères que doit être examinée l’existence ou non d’une carence de la part de la Commission.

84.      Le premier critère est l’obligation pour la Commission de tenir compte des effets des mesures prises par l’État membre concerné en vue d’assurer l’exemption de l’obligation de visa avec le pays tiers en cause.

85.      La communication du 22 décembre 2020 est particulièrement étoffée sur ce point et expose que les quatre États membres encore concernés par l’exigence d’un visa pour leurs ressortissants à destination des États-Unis sont dorénavant soumis à des plans de travail sur mesure ciblant les dispositions devant être prises par chacun d’eux pour se conformer au programme américain d’exemption de visa.

86.      De plus, la Commission présente les évolutions quant au taux de refus de visa pour chacun de ces États membres et aux exigences en matière de sécurité qui sont des éléments primordiaux pour les États‑Unis d’Amérique.

87.      Le deuxième critère est l’obligation de tenir compte des démarches entamées auprès des États-Unis d’Amérique, notamment dans les domaines politique, économique et commercial, en vue du rétablissement ou de l’instauration de l’exemption de visa.

88.      D’une part, la Commission fait état de façon approfondie des trois réunions de travail bilatérale ou tripartites au cours de l’année 2020, étant précisé que la réunion bilatérale du mois de mai 2020 a eu lieu au niveau ministériel.

89.      D’autre part, la Commission expose dans sa communication du 22 décembre 2020 que, en raison de la période de transition post‑électorale aux États-Unis et en attendant la mise en place de la nouvelle administration après l’investiture du nouveau président qui était prévue le 20 janvier 2021, elle a dû se contenter d’élaborer, conjointement avec le Service européen pour l’action extérieure (SEAE), une proposition relative à un nouveau programme transatlantique rappelant l’importance des liens transatlantiques.

90.      Ce faisant, la Commission justifie des démarches entreprises au niveau politique pour obtenir l’exemption de visa pour les quatre derniers États membres concernés. En revanche, les développements sur ce sujet contenus dans les écritures de la Commission devant la Cour sont sans incidence sur l’appréciation de l’existence ou non de la carence, car postérieurs à sa prise de position sur l’invitation à agir du Parlement.

91.      Le troisième critère porte sur les conséquences de la suspension de l’exemption de l’obligation de visa pour les relations externes de l’Union et de ses États membres avec les États-Unis d’Amérique.

92.      À la différence de la communication du 12 avril 2016, qui abordait de façon très détaillée les conséquences et l’impact de la suspension de l’exemption de visa pour les citoyens et les entreprises de l’Union, la communication du 22 décembre 2020 se contente d’un renvoi à cette première communication dans la partie relative au contexte. Puis la Commission indique, dans ses conclusions, qu’elle tient compte du fait que la suspension de l’exemption de l’obligation de visa pour les ressortissants américains « aurait des incidences négatives importantes dans toute une série de domaines d’action et de secteurs, et qu’elle porterait atteinte à la coopération transatlantique et [aux] relations extérieures avec un partenaire stratégique. Elle pourrait aussi mettre en péril l’exemption de visa pour tous les autres citoyens de l’[Union] se rendant aux États-Unis, si ce pays décidait d’appliquer ce qu’il a indiqué à plusieurs reprises, à savoir que la simple adoption par la Commission d’un acte délégué suspendant l’exemption de visa pour les citoyens américains aurait pour effet immédiat l’adoption par les États-Unis de mesures de rétorsion, c’est-à-dire la réintroduction d’une obligation de visa pour tous les citoyens de l’Union ». Il convient de relever que cette menace de rétablissement de l’obligation de visa est liée à la seule adoption d’un acte délégué par la Commission et non à l’entrée en vigueur de celui-ci, pourtant conditionnée à l’absence d’objection du Parlement et du Conseil (47).

93.      Je considère donc que la Commission a suffisamment démontré qu’elle avait respecté les dispositions de l’article 7, premier alinéa, sous f), du règlement 2018/1806. Il en résulte que le recours en carence devrait être rejeté au fond si la Cour considère que le recours en carence est recevable.

VI.    Conclusion

94.      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, je propose à la Cour de statuer comme suit :

–        À titre principal, le recours est irrecevable.

–        À titre subsidiaire, le recours est rejeté.

–        Le Parlement européen est condamné aux dépens.


1      Langue originale : le français.


2      Règlement du Parlement européen et du Conseil du 14 novembre 2018 fixant la liste des pays tiers dont les ressortissants sont soumis à l’obligation de visa pour franchir les frontières extérieures des États membres et la liste de ceux dont les ressortissants sont exemptés de cette obligation (JO 2018, L 303, p. 39).


3      Règlement du Conseil du 15 mars 2001 fixant la liste des pays tiers dont les ressortissants sont soumis à l’obligation de visa pour franchir les frontières extérieures des États membres et la liste de ceux dont les ressortissants sont exemptés de cette obligation (JO 2001, L 81, p. 1).


4      Règlement du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2013 modifiant le règlement no 539/2001 (JO 2013, L 347, p. 74).


5      Voir article 14 de ce règlement.


6      Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil intitulée « État des lieux de la situation de non-réciprocité avec certains pays tiers dans le domaine de la politique des visas et éventuelles voies à suivre à cet égard » [COM(2016) 221 final], ci-après la « communication du 12 avril 2016 ».


7      Communications de la Commission au Parlement européen et au Conseil sur les situations de non-réciprocité du 13 juillet 2016 [COM(2016) 481 final] ; du 21 décembre 2016 [COM(2016) 816 final] ; du 2 mai 2017 [COM(2017) 227 final] ; du 20 décembre 2017 [COM(2017) 813 final] ; du 19 décembre 2018 [COM(2018) 855 final], et du 23 mars 2020 [COM(2020) 119 final].


8      Résolution du Parlement européen sur les obligations de la Commission quant à la réciprocité en matière de visas, en application de l’article 1er, paragraphe 4, du règlement (CE) no 593/2001 [2016/2986(RSP)], ci-après la « résolution du 2 mars 2017 ».


9      Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil définissant la position de la Commission à la suite de la résolution du Parlement européen du 2 mars 2017 sur les obligations de la Commission quant à la réciprocité en matière de visas et rendant compte des progrès accomplis [COM(2017) 227 final].


10      Résolution du Parlement européen sur les obligations de la Commission quant à la réciprocité en matière de visas, en application de l’article 7 du règlement (UE) 2018/1806 [2020/2605(RSP)], ci-après la « résolution du 22 octobre 2020 ».


11      Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil définissant la position de la Commission à la suite de la résolution du Parlement européen du 22 octobre 2020 sur les obligations de la Commission quant à la réciprocité en matière de visas et dressant l’état des lieux [COM(2020) 851 final], ci-après la « communication du 22 décembre 2020 ».


12      Article 7, premier alinéa, sous e), du règlement 2018/1806.


13      Article 7, premier alinéa, sous f), du règlement 2018/1806.


14      Article 7, premier alinéa, sous h), du règlement 2018/1806.


15      Article 7, premier alinéa, sous b), du règlement 2018/1806 par renvoi.


16      Voir proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) no 539/2001 du Conseil fixant la liste des pays tiers dont les ressortissants sont soumis à l’obligation de visa pour franchir les frontières extérieures des États membres et la liste de ceux dont les ressortissants sont exemptés de cette obligation, présentée le 24 mai 2011 [COM(2011) 290 final], ci-après la « proposition de 2011 ».


17      Proposition de 2011, p. 6.


18      Voir compte-rendu de la réunion de travail sur les visas du 7 février 2012 du groupe « Visas »/Comité mixte (UE-Islande/Norvège et Suisse/Liechtenstein), document 6807/12, disponible à l’adresse Internet suivante : https://data.consilium.europa.eu/doc/document/ST-6807-2012-INIT/en/pdf, en particulier modification proposée de l’article 1er, paragraphe 4, sous c), du règlement no 539/2001 (p. 9).


19      Voir compte-rendu cité à la note en bas de page précédente des présentes conclusions, en particulier note en bas de page 1 (p. 8).


20      Voir rapport sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) no 539/2001 du Conseil fixant la liste des pays tiers dont les ressortissants sont soumis à l’obligation de visa pour franchir les frontières extérieures des États membres et la liste de ceux dont les ressortissants sont exemptés de cette obligation (A7-0139/2013), disponible à l’adresse Internet suivante : https://www.europarl.europa.eu/doceo/document/A-7-2013-0139_FR.html#_section1.


21      Voir exposé des motifs du projet de résolution législative du Parlement, intégré au rapport cité à la note en bas de page précédente des présentes conclusions : « Quant à la réciprocité proprement dite, il est clair que, malgré les déclarations de la Commission, le système actuel tel que modifié par le règlement no 851/2005 n’est pas efficace. Bien qu’il ne soit pas nécessaire de rétablir le mécanisme initialement prévu par le règlement no 539/2001, une révision approfondie du mécanisme actuel s’impose afin de garantir une action unie et la solidarité entre les États membres. D’autres considérations comme les relations commerciales de l’Union, ne devraient pas menacer les piliers fondamentaux de la politique commune de visas. »


22      Voir avis de la commission des affaires étrangères sur la proposition de 2011, intégré au rapport cité à la note en bas de page 20 des présentes conclusions.


23      Déclaration disponible à l’adresse Internet suivante : https://data.consilium.europa.eu/doc/document/ST-16088-2013-ADD-1-REV-1/fr/pdf .


24      Voir affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 16 juillet 2015, Commission/Parlement et Conseil (C‑88/14, EU:C:2015:499).


25      Voir arrêt du 16 juillet 2015, Commission/Parlement et Conseil (C‑88/14, EU:C:2015:499, point 32).


26      Considérants J et K, rappelant les enjeux de solidarité et les enjeux institutionnels de la carence de la Commission.


27      Voir considérant C des résolutions du 2 mars 2017 et du 22 octobre 2020.


28      Voir considérants E à G des résolutions du 2 mars 2017 et du 22 octobre 2020.


29      Voir arrêt du 16 décembre 2015, Suède/Commission (T‑521/14, non publié, EU:T:2015:976, point 53).


30      T‑521/14, non publié, EU:T:2015:976.


31      Règlement du Parlement européen et du Conseil du 22 mai 2012 concernant la mise à disposition sur le marché et l’utilisation des produits biocides (JO 2012, L 167, p. 1).


32      Arrêt du 16 décembre 2015, Suède/Commission (T‑521/14, non publié, EU:T:2015:976, point 53).


33      Informations communiquées par la Commission au sujet des notifications faites par les États membres en cas de non-réciprocité, conformément à l’article 1er, paragraphe 4, point a), du règlement (CE) no 539/2001 du Conseil modifié par le règlement (UE) no 1289/2013 du Parlement européen et du Conseil (JO 2014, C 111, p. 1).


34      Voir note en bas de page 7 des présentes conclusions.


35      Voir arrêt du 6 juillet 1971, Pays-Bas/Commission (59/70, EU:C:1971:77, point 19).


36      Voir note en bas de page 9 des présentes conclusions.


37      Voir arrêt du 16 février 1993, ENU/Commission (C‑107/91, EU:C:1993:56, point 24). Dans l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt, le délai était de seize mois.


38      Voir arrêt du 15 septembre 1998, Gestevisión Telecinco/Commission (T‑95/96, EU:T:1998:206, point 80).


39      Voir note en bas de page 7 des présentes conclusions.


40      Voir arrêts du 1er avril 1993, Pesqueras Echebastar/Commission (C‑25/91, EU:C:1993:131, point 12 et jurisprudence citée), ainsi que du 7 octobre 2009, Vischim/Commission (T‑420/05, EU:T:2009:391, point 255 et jurisprudence citée).


41      Voir arrêt du 18 octobre 1979, GEMA/Commission (125/78, EU:C:1979:237, points 17 et 18).


42      Cazet, S., Le recours en carence en droit de l’Union européenne, Bruylant, Bruxelles, 2012, points 101 et 102, p. 76 à 78.


43      Voir arrêt du 26 février 2003, CEVA/Commission (T‑344/00 et T‑345/00, EU:T:2003:40, points 82 à 84).


44      Voir arrêt du 14 décembre 1962, Acciaierie San Michele e.a./Haute Autorité (5/62 à 11/62 et 13/62 à 15/62, EU:C:1962:46, p. 881).


45      Voir note en bas de page 9 des présentes conclusions.


46      Ordonnance du 16 octobre 2017, Salehi/Commission (T‑773/16, non publiée, EU:T:2017:739, points 5 et 15 à 18).


47      Voir article 10, paragraphe 7, du règlement 2018/1806 : « Un acte délégué adopté en vertu de l’article 7, [premier alinéa, sous f),] n’entre en vigueur que si le Parlement européen ou le Conseil n’a pas exprimé d’objections dans un délai de quatre mois à compter de la notification de cet acte au Parlement européen et au Conseil ou si, avant l’expiration de ce délai, le Parlement européen et le Conseil ont tous deux informé la Commission de leur intention de ne pas exprimer d’objections. Ce délai est prolongé de deux mois à l’initiative du Parlement européen ou du Conseil. »