Language of document : ECLI:EU:T:2009:444

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (sixième chambre)

17 novembre 2009 (1)

« Défaut d’engagement d’une procédure en manquement – Recours en carence – Demande d’injonction – Irrecevabilité manifeste »

Dans l’affaire T-295/09,

Paul Inge Hansen, demeurant à Arvika (Suède), représenté par Me P. Löfqvist, avocat,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande visant à faire constater la carence de la Commission en ce que celle-ci s’est abstenue d’engager une procédure en manquement au titre de l’article 226 CE à l’encontre du Royaume de Suède et à enjoindre à la Commission d’exercer son droit d’initiative, de prendre des mesures et de soutenir des initiatives destinées à promouvoir le droit des handicapés à l’égalité et à la non‑discrimination dans la vie professionnelle,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (sixième chambre),

composé de MM. A. W. H. Meij (rapporteur), président, T. Tchipev et L. Truchot, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Procédure et conclusions de la partie requérante

1        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 20 juillet 2009, la partie requérante a introduit le présent recours.

2        Elle conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        déclarer que la Commission est tenue d’exercer son droit d’initiative et, partant, de prendre des mesures et de soutenir des initiatives destinées à promouvoir le droit des handicapés à l’égalité et à la non-discrimination dans la vie professionnelle, ainsi que de renforcer sa surveillance de l’application par les États membres du droit dérivé concerné et de la mise en œuvre de celui‑ci en droit national ;

–        condamner la Commission à l’indemniser des frais exposés lors des procédures antérieures au présent recours ;

–        condamner la Commission aux dépens.

 En droit

3        Aux termes de l’article 111 du règlement de procédure du Tribunal, lorsque le recours est manifestement irrecevable, le Tribunal peut, sans poursuivre la procédure, statuer par voie d’ordonnance motivée.

4        En l’espèce, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier et décide, en application de cet article, de statuer sans poursuivre la procédure.

 Sur le recours en carence

5        La partie requérante demande, en substance, au Tribunal de constater que la Commission s’est illégalement abstenue d’engager la procédure prévue à l’article 226 CE à l’encontre du Royaume de Suède.

6        Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, est irrecevable le recours en carence intenté par une personne physique ou morale et visant à faire constater que, en n’engageant pas contre un État membre une procédure en constatation de manquement, la Commission s’est abstenue de statuer en violation du traité (voir, par exemple, arrêt de la Cour du 14 février 1989, Star Fruit/Commission, C‑247/87, Rec. p. 291). En effet, les personnes physiques ou morales ne peuvent se prévaloir de l’article 232, troisième alinéa, CE qu’en vue de faire constater qu’une institution s’est abstenue d’adopter, en violation du traité, des actes, autres que des recommandations ou des avis, dont elles sont les destinataires potentiels ou qui concerneraient lesdites personnes de manière directe et individuelle (arrêt de la Cour du 26 novembre 1996, T. Port, C‑68/95, Rec. p. I‑6065, points 58 et 59).

7        Or, dans le cadre de la procédure en manquement régie par l’article 226 CE, les seuls actes que la Commission peut être amenée à prendre sont adressés aux États membres (ordonnances du Tribunal du 29 novembre 1994, Bernardi/Commission, T‑479/93 et T‑559/93, Rec. p. II‑1115, point 31, et du 19 février 1997, Intertronic/Commission, T‑117/96, Rec. p. II‑141, point 32). En outre, il résulte du système prévu par l’article 226 CE que ni l’avis motivé, qui ne constitue qu’une phase préalable au dépôt éventuel d’un recours en constatation de manquement devant la Cour, ni la saisine de la Cour par le dépôt effectif d’un tel recours ne sauraient constituer des actes concernant de manière directe les personnes physiques ou morales.

8        Il s’ensuit que la demande de la partie requérante visant à faire constater que la Commission s’est abstenue de statuer en violation du traité en n’engageant pas contre un État membre une procédure en constatation de manquement doit être rejetée comme manifestement irrecevable.

9        Au surplus, il ressort du dossier que la Commission a, par lettre du 20 mai 2009 portant la référence EMPL/G3/MZ D(2009) 10750, répondu à la lettre que la partie requérante lui aurait adressée le 20 avril 2009 en indiquant qu’elle ne pouvait pas, sur la base des documents soumis, intervenir dans l’affaire en engageant une procédure en constatation de manquement à l’encontre du Royaume de Suède, dans la mesure où aucune infraction du droit communautaire n’avait pas pu être identifiée.

10      La Commission a ainsi pris position sur le contenu de la lettre de la partie requérante.

11      La circonstance que cette prise de position ne donne pas satisfaction à la partie requérante est indifférente à cet égard. En effet, l’article 232 CE vise la carence par l’abstention de statuer ou de prendre position et non l’adoption d’un acte différent de celui que l’intéressé aurait souhaité ou estimé nécessaire (arrêts de la Cour du 13 juillet 1971, Deutscher Komponistenverband/Commission, 8/71, Rec. p 705, point 2, et du 24 novembre 1992, Buckl e.a./Commission, C-15/91 et C-108/91, Rec. p. I‑6061, point 17).

12      Pour autant que le recours introduit contre la décision de la Commission du 20 mai 2009 portant la référence EMPL/G3/MZ D(2009) 10750 doive être compris en ce sens qu’il tend à l’annulation de cette décision, il suffit de constater que, selon une jurisprudence constante, les particuliers ne sont pas recevables à attaquer un refus de la Commission d’engager une procédure en constatation de manquement à l’encontre d’un État membre (ordonnance de la Cour du 12 juin 1992, Asia Motor France/Commission, C‑29/92, Rec. p. I‑3935, point 21 ; ordonnance du Tribunal du 13 novembre 1995, Dumez/Commission, T‑126/95, Rec. p. II‑2863, point 33, et arrêt du Tribunal du 22 mai 1996, AITEC/Commission, T‑277/94, Rec. p. II‑351, point 55).

13      Il s’ensuit que la demande de la partie requérante comprise comme visant à l’annulation de la décision de la Commission du 20 mai 2009, portant refus d’engager une procédure en constatation de manquement au titre de l’article 226 CE à l’encontre du Royaume de Suède doit être rejetée comme manifestement irrecevable.

 Sur la demande d’injonction

14      La demande de la partie requérante tend également à obtenir du Tribunal qu’il adresse une injonction à la Commission d’exercer son droit d’initiative, de prendre des mesures et de soutenir des initiatives destinées à promouvoir le droit des handicapés à l’égalité et à la non‑discrimination dans la vie professionnelle.

15      Dans le cadre du contrôle de légalité fondé sur les articles 230 CE et 232 CE, la juridiction communautaire n’a pas compétence pour prononcer des injonctions à l’endroit des institutions et organes communautaires (voir ordonnance de la Cour du 26 octobre 1995, Pevasa et Inpesca/Commission, C‑199/94 P et C‑200/94 P, Rec. p. I‑3709, point 24).

16      Il résulte des considérations qui précèdent qu’il y a lieu de rejeter le présent recours dans son ensemble comme étant manifestement irrecevable, sans qu’il soit nécessaire de le signifier à la partie défenderesse.

 Sur les dépens

17      La présente ordonnance étant adoptée avant la notification de la requête à la partie défenderesse et avant que celle-ci n’ait pu exposer des dépens, il suffit de décider que la partie requérante supportera ses propres dépens, conformément à l’article 87, paragraphe 1, du règlement de procédure.

18      Par ailleurs, s’agissant de la demande de condamner la Commission à indemniser la partie requérante des frais exposés lors des procédures antérieures au présent recours, il convient de rappeler que si, aux termes de l’article 91 du règlement de procédure, « sont considérés comme dépens récupérables [...] les frais indispensables exposés par les parties aux fins de la procédure », cette disposition ne vise, par « procédure », que la procédure devant le Tribunal, à l’exclusion de la phase précontentieuse (voir arrêt du Tribunal du 27 septembre 2006, Akzo Nobel/Commission, T‑330/01, Rec. p. II-3389, point 133, et la jurisprudence citée).

19      Il y a donc lieu de rejeter la demande concernant les frais exposés lors des procédures antérieures au présent recours.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

ordonne :

1)      Le recours est rejeté.

2)      La partie requérante supportera ses propres dépens.

Fait à Luxembourg, le 17 novembre 2009.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

        A. W. H. Meij


1 Langue de procédure : le suédois.