Language of document : ECLI:EU:T:2008:18

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

30 janvier 2008 (*)

« Fonction publique – Fonctionnaires – Notation – Rapport d’évolution de carrière – Exercice d’évaluation 2001/2002 – Régularité de la procédure de notation »

Dans l’affaire T‑85/04,

Guido Strack, ancien fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Wasserliesch (Allemagne), représenté initialement par MJ. Mosar, puis par Mes F. Gengler et P. Goergen, avocats,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par MM. H. Krämer et A. Manville, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation, d’une part, de l’exercice d’évaluation 2001/2002 en ce qui concerne le requérant et, d’autre part, de la décision portant adoption du rapport d’évolution de carrière du requérant pour cet exercice,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (cinquième chambre),

composé de MM. M. Vilaras, président, D. Šváby et Mme K. Jürimäe, juges,

greffier : Mme K. Andová, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 9 janvier 2007,

rend le présent

Arrêt

 Cadre juridique

1        Le statut des fonctionnaires des Communautés européennes, dans sa rédaction applicable à la présente espèce (ci-après le « statut ») comporte un article 43, rédigé comme suit :

« La compétence, le rendement et la conduite dans le service de chaque fonctionnaire, à l’exception de ceux des grades A 1 et A 2, font l’objet d’un rapport périodique établi au moins tous les deux ans, dans les conditions fixées par chaque institution, conformément aux dispositions de l’article 110.

Ce rapport est communiqué au fonctionnaire. Celui-ci a la faculté d’y joindre toutes observations qu’il juge utiles. »

2        L’article 110 du statut prévoit :

« Les dispositions générales d’exécution du présent statut sont arrêtées par chaque institution après consultation de son comité du personnel et avis du comité du statut prévu à l’article 10.

Toutes les dispositions générales d’exécution visées au premier alinéa, ainsi que toutes les réglementations arrêtées d’un commun accord des institutions, sont portées à la connaissance du personnel.

L’application des dispositions du statut fait l’objet d’une consultation régulière entre les administrations des institutions. »

3        L’article 1er, paragraphe 1, des dispositions générales d’exécution de l’article 43 du statut, adoptées par la Commission le 26 avril 2002 (ci-après les « DGE 43 »), dispose :

« Conformément à l’article 43 du statut […] un rapport périodique, appelé rapport d’évolution de carrière, est établi chaque année en ce qui concerne les compétences, le rendement et la conduite dans le service pour chaque membre du personnel permanent […] »

4        L’article 2 des DGE 43, intitulé « Définitions », dispose :

« 1. Aux fins des présentes dispositions générales d’exécution et des dispositions générales d’exécution de l’article 45 du statut, adoptées par la Commission le 26 avril 2002, les notions de points de mérite et de points de priorité sont définies comme suit.

Tant les points de mérite que les points de priorité ont pour objet de récompenser le mérite et l’attribution de points de priorité doit toujours être justifiée par des considérations axées sur le mérite.

Les points de mérite sont ceux qui résultent des notes et appréciations du rapport d’évolution de carrière.

Les points de priorité sont ceux qui peuvent être octroyés :

a)      par les directeurs généraux (pour le personnel A/LA) et par les directeurs (pour le personnel D, C et B) aux membres du personnel méritants, après que les rapports d’évolution de carrière ont été établis dans la [direction générale] ou le service concerné. Les critères d’attribution sont définis à l’article 6 des dispositions générales d’exécution de l’article 45 du statut ;

b)      par l’autorité investie du pouvoir de nomination, sur recommandation des comités de promotion, aux membres du personnel méritants ayant accepté d’assurer des tâches supplémentaires dans l’intérêt de l’institution. Les critères d’attribution sont définis à l’article 9 des dispositions générales d’exécution de l’article 45 du statut ;

c)       par l’autorité investie du pouvoir de nomination, sur recommandation des comités de promotion, en réponse aux recours introduits contre l’octroi des points de priorité, conformément à l’article 13, paragraphe 2, des dispositions générales d’exécution de l’article 45 du statut.

Les points de mérite comme les points de priorité sont capitalisés au fil des années.

Après une promotion, le nombre de points correspondant au seuil de promotion est déduit ; le solde éventuel est conservé pour l’exercice suivant.

2. L’évaluateur est le fonctionnaire chargé de réaliser l’évaluation et de rédiger le rapport. Le validateur est le supérieur hiérarchique de l’évaluateur. Il a pour rôle de contresigner le rapport et, en cas de désaccord avec l’évaluateur, c’est à lui que revient la responsabilité finale du rapport.

3. Le validateur est en particulier chargé de veiller à l’application cohérente des normes d’évaluation dans l’ensemble des rapports d’évolution de carrière qu’il contresigne.

4. L’évaluateur d’appel est le supérieur hiérarchique du validateur. Il décide du suivi à donner en ce qui concerne l’avis émis par le comité paritaire d’évaluation visé à l’article 8. »

5        L’article 4 des DGE 43 dispose :

« 1. La première période d’évaluation marquera la transition entre le système de notation précédent et le nouveau système. Elle s’étendra du 1er juillet 2001 au 31 décembre 2002. Par dérogation à l’article 7, paragraphe 1, [des DGE 43,] l’évaluation du rendement du fonctionnaire pendant cette période sera effectuée, à la clôture de la période de référence pour l’évaluation, nonobstant l’absence d’une fixation préalable des objectifs.

2. Pour les exercices suivants, la période de référence pour l’évaluation s’étendra du 1er janvier au 31 décembre. Tous les rapports doivent être finalisés au 15 mars de chaque année suivant la période de référence pour l’évaluation, sauf pour ceux faisant l’objet d’un recours auprès du comité paritaire d’évaluation.

3. Si, pendant la période d’évaluation, la nature des tâches de l’intéressé évolue de manière significative ou que l’évaluateur, appelé à de nouvelles fonctions, n’est plus le supérieur du fonctionnaire, l’évaluateur établit un rapport lorsque au moins un mois s’est écoulé depuis la rédaction du dernier rapport.

4. Lorsque plusieurs rapports ont été établis pour un même exercice d’évaluation et qu’ils portent des notes différentes, la note globale sanctionnant la période d’évaluation en question est calculée au prorata (en fonction du nombre de mois sur lequel porte chacun des rapports), aux fins de la capitalisation des points de mérite. Les notes comportant des décimales autres que des demi-points sont arrondies de façon appropriée. Ce calcul au prorata est également de règle dans les cas où il existe un rapport relatif à une fraction d’année, pour autant que sa durée soit au moins d’un mois. »

6        L’article 7, paragraphes 4 à 6, des DGE 43 énonce :

« 4. Préalablement au dialogue annuel formel, mentionné au paragraphe 1, le fonctionnaire concerné établit, dans les huit jours ouvrables suivant la demande de l’évaluateur, une autoévaluation qui fait partie intégrante du rapport final. L’évaluateur procède au dialogue avec l’intéressé dans les huit jours ouvrables. Après ce dialogue annuel formel, l’évaluateur et le validateur établissent le rapport et le transmettent à l’intéressé dans les huit jours ouvrables.

5. Dans un délai de cinq jours ouvrables le titulaire du poste remplit les sections correspondantes, signe le rapport et retourne le document à l’évaluateur, qui le signe/paraphe sans délai et le transmet au validateur qui le signe/paraphe sans délai.

Le rapport est alors considéré comme définitif. Si, à l’expiration de ce délai, l’intéressé s’abstient soit de signer le rapport ou de le retourner, soit de solliciter un dialogue avec le validateur, il est réputé en avoir accepté le contenu ; le rapport est alors considéré comme définitif et versé à son dossier personnel. En revanche, lorsque le titulaire du poste n’est pas satisfait de la teneur du rapport, il en informe immédiatement l’évaluateur et fait état, dans la section consacrée aux ‘Commentaires’, de son souhait de s’entretenir avec le validateur, en exposant les motifs de sa demande. Dans un délai de cinq jours ouvrables, le validateur organise un dialogue avec l’intéressé afin de parvenir à un accord, dialogue au terme duquel soit il modifie le rapport, soit il le confirme, puis le transmet une nouvelle fois à l’intéressé. Dans un délai de cinq jours ouvrables, ce dernier signe/paraphe le rapport pour acceptation et le fait suivre à l’évaluateur, qui le signe/paraphe sans délai. Le rapport est alors considéré comme définitif. Si, à l’expiration de ce délai, l’intéressé s’abstient soit de signer le rapport, soit de le retourner, il est réputé en avoir accepté le contenu ; le rapport est alors considéré comme définitif et versé à son dossier personnel.

6. Si le titulaire du poste n’est pas satisfait de la décision du validateur, il peut lui demander, dans les cinq jours ouvrables, de saisir le comité paritaire d’évaluation prévu à l’article 8. Cette saisine aura lieu sans délai. Le comité ne peut être saisi tant que toutes les voies de recours internes décrites ci-dessus n’ont pas été épuisées. Lorsqu’ils forment un recours devant le comité paritaire d’évaluation, les intéressés indiquent par écrit les motifs de leur requête. »

7        L’article 8, paragraphes 6 et 7, des DGE 43 énonce :

« 6. Le comité d’évaluation donne son avis dans un délai de dix jours ouvrables à compter de la date à laquelle le rapport lui a été soumis. S’il apparaît qu’un membre du comité paritaire d’évaluation, en sa qualité d’évaluateur, de validateur, d’évaluateur d’appel ou d’interlocuteur social, a des intérêts incompatibles avec sa mission, il doit se démettre et se faire remplacer par un suppléant.

7. L’avis du comité d’évaluation, notifié au titulaire du poste ainsi qu’à l’évaluateur et au validateur, est transmis à l’évaluateur d’appel. Dans un délai de trois jours ouvrables, soit ce dernier confirme le rapport, soit il le modifie, avant de le transmettre à l’intéressé. Lorsque l’évaluateur d’appel s’écarte des recommandations figurant dans l’avis du comité paritaire d’évaluation, il justifie les motifs de sa décision. Une copie du rapport est transmise au comité paritaire d’évaluation. Le rapport est alors considéré comme définitif. »

8        En juillet 2002, la Commission a porté à la connaissance de son personnel, par le moyen de l’intranet, un document intitulé « Système d’évaluation du personnel centré sur l’évolution de carrière – Guide » (ci-après le « guide d’évaluation »). Les troisième et quatrième alinéas du point 4.4, intitulé « Évaluation des prestations », sont rédigés comme suit :

« L’évaluateur se réfère aux lignes directrices fournies par la [direction générale ‘Personnel et administration’] sur les fourchettes de référence et à la moyenne cible pour la Commission en termes de point de mérite ainsi qu’aux standards définis au niveau de chaque [direction générale]. La moyenne cible pour 2003 est 14.

Les fourchettes de référence, qui correspondent aux pourcentages indicatifs des effectifs, autorisent différents rythmes de progression de carrière, avec 17-20 points (carrière rapide) pour un maximum de 15 %, 12-16 points (carrière normale) pour environ 75 % et 10-11 points (carrière lente) pour un maximum de 10 %. »

9        Le 3 décembre 2002, la Commission a publié, dans les Informations administratives n° 99-2002, un document intitulé « Exercice d’évaluation du personnel 2001-2002 (transition) » (ci-après le « guide de transition »), contenant diverses informations quant au nouveau système de notation ainsi qu’aux règles de transition applicables. Le troisième et le cinquième point de la rubrique « Qui est l’évaluateur ? Qui est le validateur ? » de ce guide de transition disposent notamment :

« Lorsque le fonctionnaire a eu plusieurs supérieurs hiérarchiques directs durant la période de référence, l’évaluateur et le validateur sont toujours ceux en place au 31 [décembre] 2002. Ce sont eux qui donnent la note globale (sur [20]) au fonctionnaire concerné.

Toutefois, l’évaluateur est tenu de consulter ses prédécesseurs. Cette obligation [vise] tous les fonctionnaires qui ont [occupé la fonction de] supérieur hiérarchique direct de l’intéressé durant au moins trois mois pendant la période de référence. Cette consultation permet à l’évaluateur de se forger une idée des prestations, rendement, compétences et conduite du fonctionnaire durant les mois où il n’aura pas travaillé sous sa direction. L’évaluateur et le validateur tiendront compte des avis des précédents supérieurs hiérarchiques, mais les supérieurs hiérarchiques n’ont pas le pouvoir de donner des points.

[…]

Les avis/commentaires résultant des consultations susvisées seront retranscrits dans le formulaire électronique par l’évaluateur avec mention de date et d’auteur, dans une section (boîte) créée à cet effet. Les [fonctionnaires] évalués devront cependant recevoir une copie de l’original [sur] papier. L’original sera déposé au dossier personnel. »

 Antécédents du litige

10      M. Strack était fonctionnaire de la Commission de grade A 6. Pendant la période allant du 1er juillet 2001 jusqu’au 31 décembre 2002 (ci-après la « période litigieuse »), il était d’abord affecté, jusqu’au 31 mars 2002, à l’Office des publications officielles des Communautés européennes et ensuite, à partir du 1er avril 2002, à la direction générale (DG) « Entreprises ».

11      Par lettre du 27 janvier 2003, le supérieur hiérarchique du requérant lorsqu’il travaillait à l’Office des publications a fait parvenir à l’évaluateur l’appréciation concernant le requérant pour la période allant du 1er juillet 2001 jusqu’au 31 mars 2002. Cette appréciation a abouti à la mention « très bien » pour la rubrique « Rendement » et celle relative aux « aptitudes » ainsi qu’à la mention « suffisant » pour la rubrique « Conduite dans le service ».

12      Le 30 janvier 2003, le requérant a eu un entretien avec son évaluateur concernant le rapport d’évolution de carrière (ci-après le « REC ») pour l’exercice d’évaluation 2001/2002. Le 10 février 2003, l’évaluateur a signé le REC. Le 11 février 2003, le validateur a contresigné le REC. Le requérant a demandé, le 14 février 2003, la révision de son évaluation. Le dialogue entre le requérant et le validateur a eu lieu le 28 février 2003. Le même jour, le validateur a confirmé le REC. Le 6 mars 2003, le requérant a demandé au validateur par courrier électronique de saisir le comité paritaire d’évaluation (ci-après le « CPE »).Le 10 mars 2003, cette demande a été renouvelée par le requérant au moyen du nouveau système informatique de gestion du personnel (appelé « Sysper2 »). Le CPE a rendu son avis le 18 mars 2003. Le 2 mai 2003, le REC du requérant pour la période litigieuse a été rendu définitif par la signature de Mme G. D. B., cette dernière ayant signé au nom du validateur d’appel. Le REC en question a abouti à un nombre total de 13 points, à savoir 6 points sur 10 pour la rubrique « Rendement », 4 points sur 6 pour celle relative aux « aptitudes » et 3 points sur 4 pour la rubrique « Conduite dans le service ». Ainsi, les points accordés pour chacune des trois rubriques correspondent à la mention « bien ».

13      Le 31 juillet 2003, le requérant a introduit une réclamation au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut, par laquelle il demandait l’annulation de l’exercice d’évaluation 2001/2002 et, à titre subsidiaire, l’annulation de son REC pour la période litigieuse. Par décision du 24 novembre 2003, l’AIPN a rejeté cette réclamation.

 Procédure et conclusions des parties

14      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 1er mars 2004, le requérant a introduit le présent recours.

15      Sur rapport du juge rapporteur, il a été décidé d’ouvrir la procédure orale.

16      Par ordonnance du 13 décembre 2006, les affaires T‑85/04 et T‑394/04 ont été jointes aux fins de la procédure orale.

17      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales du Tribunal lors de l’audience publique du 9 janvier 2007.

18      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler l’exercice d’évaluation 2001/2002 en ce qui concerne le requérant ;

–        annuler le REC du requérant, y compris l’avis de son ancien supérieur hiérarchique et la décision de l’autorité investie du pouvoir de nomination du 24 novembre 2003, pour la période litigieuse ;

–        condamner la Commission aux dépens.

19      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner le requérant aux dépens.

 En droit

 Sur la recevabilité

20      En vertu de l’article 113 du règlement de procédure du Tribunal, ce dernier peut à tout moment, d’office, examiner les fins de non-recevoir d’ordre public. Les conditions de recevabilité étant d’ordre public, le Tribunal peut les examiner d’office (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 4 mai 1999, Z/Parlement, T‑242/97, RecFP p. I‑A‑77 et II‑401, point 58, et la jurisprudence citée).

21      En l’espèce, il y a lieu d’examiner d’office si les actes dont le requérant demande l’annulation constituent des actes faisant grief, susceptibles de faire l’objet d’un recours au titre des articles 90 et 91 du statut.

22      Il ressort d’une jurisprudence constante que constituent des actes susceptibles de faire l’objet d’un recours les seules mesures produisant des effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts du requérant, en modifiant, de façon caractérisée, la situation juridique de celui-ci, et qui fixent définitivement la position de l’institution (voir arrêt du Tribunal du 28 septembre 1993, Yorck von Wartenburg/Parlement, T‑57/92 et T‑75/92, Rec. p. II‑925, point 36, et la jurisprudence citée).

23      En l’espèce, s’agissant, tout d’abord, de l’exercice d’évaluation 2001/2002 lui-même, il ne constitue pas un acte faisant grief au sens des articles 90 et 91 du statut, dès lors que cet exercice ne produit aucun effet de droit susceptible d’affecter directement les intérêts du requérant. L’exercice en cause constitue une série d’actes préparatoires aboutissant à un REC, mais qui, par rapport au REC, ne produisent pas d’effets juridiques à l’égard du requérant.

24      En effet, lorsqu’il s’agit d’actes ou de décisions dont l’élaboration s’effectue en plusieurs phases, notamment au terme d’une procédure interne, ne constituent un acte attaquable dans le cadre d’un recours en annulation que les mesures qui fixent définitivement la position de l’institution au terme de cette procédure, à l’exclusion des mesures intermédiaires dont l’objectif est de préparer la décision finale. Ainsi, en matière de recours de fonctionnaires, les actes préparatoires d’une décision ne font pas grief au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut (arrêts du Tribunal du 15 juin 1994, Pérez Jiménez/Commission, T‑6/93, RecFP p. I‑A‑155 et II‑497, point 34 ; du 22 mars 1995, Kotzonis/CES, T‑586/93, Rec. p. II‑665, point 29, et du 17 décembre 2003, McAuley/Conseil, T‑324/02, RecFP p. I‑A‑337 et II‑1657, point 28).

25      S’agissant, ensuite, du REC du requérant pour la période litigieuse, il convient de relever que le REC constitue, comme l’ancien rapport de notation qu’il remplace dans le cadre du nouveau système de notation instauré par les DGE 43, le rapport périodique sur le rendement, la compétence et la conduite dans le service de chaque fonctionnaire, prévu à l’article 43 du statut. À ce titre, le REC constitue, tout comme l’ancien rapport de notation et pour les mêmes raisons, un acte faisant grief (voir arrêt du Tribunal du 25 octobre 2005, Fardoom et Reinard/Commission, T‑43/04, RecFP p. I‑A‑329 et II‑1465, point 29, et la jurisprudence citée).

26      Par conséquent, seule est recevable la demande du requérant dirigée contre le REC le concernant.

 Sur le fond

27      À l’appui de sa demande en annulation de son REC, le requérant invoque huit moyens tirés, premièrement, de la violation de l’article 26 du statut, deuxièmement, de la violation de l’article 25 du statut, troisièmement, de la violation de l’article 43 du statut, du principe d’égalité de traitement et du principe de non-discrimination, quatrièmement, de la violation de l’article 8 des DGE 43, cinquièmement, de la violation de l’obligation de motivation et de l’interdiction de l’arbitraire, sixièmement, de la violation du droit à une procédure administrative équitable, du droit d’être entendu ainsi que de l’interdiction d’une réformation in pejus, septièmement, de la violation du principe de la protection de la confiance légitime et de la règle patere legem quam ipse fecisti et, huitièmement, de la violation du devoir de sollicitude et du droit d’être entendu.

28      Il convient d’examiner, en premier lieu, le troisième moyen et plus particulièrement l’allégation faite dans le cadre de ce moyen selon laquelle les principes d’égalité de traitement et de non-discrimination ainsi que l’article 4 des DGE 43 ont été méconnus lors de la procédure d’évaluation ayant abouti au REC litigieux.

 Arguments des parties

29      Dans le cadre du troisième moyen, le requérant fait valoir plus particulièrement que lors de la procédure d’évaluation litigieuse ont été violés le principe d’égalité de traitement ainsi que le principe de non-discrimination en raison de l’application des règles contenues dans le guide de transition. Ces règles prévoient que le supérieur hiérarchique précédent doit être consulté et qu’il donne son avis en vue de l’évaluation sans pouvoir octroyer lui-même des points ni devenir évaluateur.

30      Selon le requérant, ce type de règle particulière serait illégale en ce que la période relevant du supérieur hiérarchique précédent n’est pas traitée de la même façon que la période relevant du supérieur hiérarchique actuel.

31      Par ailleurs, le requérant avance que les règles contenues dans le guide de transition sont contraires aux dispositions claires de l’article 4 des DGE 43, à la fois quant à l’application du nouveau système de notation à partir du 1er juillet 2001, à l’évaluation séparée des périodes de plus d’un mois par chaque supérieur hiérarchique et au calcul proportionnel des points en fonction des différentes notations établies de manière séparée. À cet égard, le requérant précise que l’article 4, paragraphe 3, des DGE 43 s’applique lors de la période de transition.

32      Enfin, le requérant soutient à titre subsidiaire que son REC viole, sur la forme et sur le fond, le guide de transition. Sur le plan formel, contrairement aux dispositions du guide de transition, les avis et les commentaires résultant des consultations susvisées n’auraient pas été retranscrits dans le formulaire électronique par l’évaluateur avec la mention de la date et de l’auteur, dans une section créée à cet effet. Sur le plan matériel, l’évaluateur et le validateur n’auraient pas tenu compte des avis des précédents supérieurs hiérarchiques. En effet, d’une part, l’évaluateur se serait limité à constater que le requérant a été employé par l’Office des publications pendant les neuf premiers mois de la période litigieuse. D’autre part, le validateur se serait rallié au rapport de l’évaluateur sans prendre en compte l’avis de l’ancien supérieur hiérarchique. Ces irrégularités commises par l’évaluateur et le validateur n’auraient pas non plus été corrigées par l’évaluateur d’appel. À cet égard, l’intégration dans le REC de l’avis de l’ancien supérieur hiérarchique du requérant par l’évaluateur d’appel serait insuffisante du fait, d’une part, qu’elle a eu lieu à un moment où il n’y a plus de possibilité pour le requérant d’influer sur la conviction que l’évaluateur s’était librement forgée, et, d’autre part, que la procédure n’était pas contradictoire étant donné que l’évaluateur d’appel n’a donné au requérant aucune occasion de présenter ses observations sur les déclarations des supérieurs hiérarchiques précédents. Enfin, le requérant est d’avis que les assertions de la Commission selon lesquelles le requérant doit encore démontrer que, en cas de prise en compte des avis et commentaires des supérieurs hiérarchiques, son REC aurait pu avoir un contenu différent, ne sont pas pertinentes, étant donné que l’absence de prise en compte constitue un vice de forme entraînant à lui seul l’illégalité du REC.

33      La Commission conteste l’affirmation du requérant selon laquelle la procédure d’évaluation litigieuse telle que mise en œuvre conformément aux règles contenues dans le guide de transition a violé le principe de l’égalité de traitement ainsi que l’article 4, paragraphes 3 et 4, des DGE 43. En effet, la Commission estime que les paragraphes 3 et 4 de l’article 4 des DGE 43 se rapportent à la période définie au paragraphe 2 du même article. Par conséquent, étant donné que l’article 4 paragraphe 2, des DGE 43 fait référence, par les termes « [p]our les exercices suivants », aux périodes d’évaluation devant succéder à la période de transition, les paragraphes 3 et 4 de l’article 4 des DGE 43 ne s’appliqueraient pas au cas d’espèce se rapportant à la période de transition.

34      Par ailleurs, aucune violation du principe d’égalité de traitement n’aurait eu lieu en l’espèce, étant donné que la règle contestée était applicable à tous les fonctionnaires. À cet égard, la Commission fait encore valoir que, en l’espèce, la catégorie des personnes qui ont occupé plusieurs postes au cours de la période d’évaluation doit être distinguée de celle des personnes qui n’ont occupé qu’un seul poste pendant toute la période. Enfin, étant donné que le requérant était informé de l’avis de son ancien supérieur, le vice de forme relatif à la communication serait dénué de pertinence.

35      En outre, la Commission fait valoir, quant aux allégations de violation du guide de transition, que l’avis du supérieur hiérarchique précédent était disponible du fait que le CPE y a eu accès. Par ailleurs, même dans l’hypothèse où cet avis du supérieur hiérarchique précédent n’aurait pas été introduit dans le système, cela ne pourrait constituer une irrégularité substantielle de nature à entacher la validité du REC, étant donné que le contenu de celui-ci n’aurait pas été différent en cas de transcription dans le formulaire électronique. La Commission estime par ailleurs que l’évaluateur d’appel a intégré l’avis de l’ancien supérieur hiérarchique du requérant dans le REC et a ainsi réparé l’erreur commise par l’évaluateur et le validateur.

 Appréciation du Tribunal

36      À titre liminaire, il convient d’examiner la légalité du guide de transition et notamment si ce dernier pouvait valablement prévoir une simple obligation de consultation, contrairement aux DGE 43 qui prévoient la rédaction de REC partiels et une pondération des notes résultant des REC partiels établis pour chacune des périodes d’évaluation en cause.

37      En tant que décision d’une institution communautaire communiquée à l’ensemble du personnel et visant à garantir aux fonctionnaires concernés un traitement identique en ce qui concerne la notation, le guide de transition constitue une directive interne (arrêts du Tribunal du 24 janvier 1991, Latham/Commission, T‑63/89, Rec. p. II‑19, point 25 ; du 30 septembre 2003, Tatti/Commission, T‑296/01, RecFP p. I‑A‑225 et II‑1093, point 43, et du 8 décembre 2005, Merladet/Commission, T‑198/04, RecFP p. I‑A‑403 et II‑1833, point 37 ; voir également, en ce sens, arrêt de la Cour du 1er décembre 1983, Blomefield/Commission, 190/82, Rec. p. 3981, point 20).

38      Rien n’interdit, en principe, à l’AIPN d’établir, par la voie d’une décision interne de caractère général, des règles pour l’exercice du large pouvoir d’appréciation que lui confère le statut (arrêts du Tribunal du 5 octobre 1995, Alexopoulou/Commission, T‑17/95, RecFP p. I‑A‑227 et II‑683, point 23, et Merladet/Commission, point 37 supra, point 38).

39      Toutefois, la faculté de recourir à de telles directives internes est soumise à certaines limites et, notamment, à l’obligation de respecter le principe de la hiérarchie des normes.

40      Il y a lieu de rappeler, à cet égard, qu’une directive interne est une norme inférieure au statut et à la réglementation arrêtée pour l’application de celui-ci (arrêts du Tribunal du 2 juillet 1998, Ouzounoff Popoff/Commission, T‑236/97, RecFP p. I‑A‑311 et II‑905, point 44, et Merladet/Commission, point 37 supra, point 40).

41      Par conséquent, les directives internes prises par les institutions communautaires ne sauraient légalement poser des règles qui dérogent aux dispositions du statut (arrêt Blomefield/Commission, point 37 supra, point 21) ou aux DGE 43 (arrêt Merladet/Commission, point 37 supra, point 41).

42      Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que le guide de transition, en ce qu’il prévoit une simple obligation de consultation du supérieur hiérarchique précédent du fonctionnaire ayant changé de lieu d’affectation pendant la période d’évaluation, ne saurait prévaloir sur l’obligation d’établir des REC partiels prévue à l’article 4, paragraphe 3, des DGE 43 et de procéder à une pondération des notes des différents supérieurs hiérarchiques, prévue à l’article 4, paragraphe 4, des DGE 43 (arrêt Merladet/Commission, point 37 supra, point 43).

43      En ce qui concerne l’argument de la Commission selon lequel l’article 4, paragraphes 3 et 4, des DGE 43 ne s’applique pas au cas d’espèce, il y a lieu de relever qu’il ne peut être retenu.

44      Le cas d’espèce concerne la première période d’évaluation marquant la transition entre le système applicable avant le 1er juillet 2001 et le nouveau système applicable à partir de cette date. En ce qui concerne la première période d’évaluation, les DGE 43 ne prévoient que deux dérogations par rapport aux périodes postérieures. Elles sont toutes les deux inscrites à l’article 4, paragraphe 1, des DGE 43 et se rapportent, d’une part, à la durée de la période d’évaluation (18 mois au lieu de 12 mois) et, d’autre part, au fait que l’évaluation du rendement se fait sans fixation préalable des objectifs.

45      Par ailleurs, l’allégation de la Commission selon laquelle l’expression « [p]our les exercices suivants » employée dans l’article 4, paragraphe 2, des DGE 43 concerne également les paragraphes 3 et 4 du même article est contredite par la teneur de ces dispositions. En effet, la référence générale au paragraphe 3 à « la » période d’évaluation ainsi que celle à « un même » exercice d’évaluation au paragraphe 4 démontrent que ces deux paragraphes s’appliquent également à la première période d’évaluation.

46      En conséquence, et contrairement à ce que prétend la Commission, le guide de transition ne pouvait pas valablement déroger à la règle générale énoncée à l’article 4 des DGE 43 en ne prévoyant qu’une simple obligation de consultation du supérieur hiérarchique précédent. Il y a lieu de conclure que cette disposition du guide de transition ne pouvait pas trouver à s’appliquer dans le cadre du présent litige et que la validité de la procédure de notation doit donc être appréciée par rapport à l’article 4 des DGE 43 (arrêt Merladet/Commission, point 37 supra, point 47).

47      En l’espèce, au cours de la période litigieuse, le requérant a travaillé pendant neuf mois sous l’autorité de M. S. à l’Office des publications et pendant une période de neuf mois également sous l’autorité de M. K. à la DG « Entreprises ».

48      À défaut d’un REC partiel, il n’est pas assuré que l’opinion de M. S. ait été prise en compte dans de justes proportions dans le REC faisant l’objet du présent litige. La simple consultation de M. S., qui ne liait pas formellement l’évaluateur, ne peut pas être considérée comme suffisante à cet égard. De surcroît, l’établissement du REC partiel aurait permis de calculer la note globale sanctionnant la période d’évaluation 2001/2002 au prorata, conformément à l’article 4, paragraphe 4, des DGE 43. À défaut d’une notation chiffrée, ce calcul n’a pas pu être effectué (voir, en ce sens, arrêt Merladet/Commission, point 37 supra, point 49).

49      Il s’ensuit que le non-respect des DGE 43 dans la procédure d’évaluation concernant le requérant, en raison de l’absence de REC partiels et de pondération des avis des supérieurs hiérarchiques successifs du requérant, n’a pu qu’avoir une incidence décisive sur le déroulement de cette procédure et sur le contenu du REC.

50      Par conséquent, la décision portant adoption du REC du requérant pour l’exercice d’évaluation 2001/2002 est entachée d’illégalité et doit être annulée, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens et arguments soulevés par le requérant.

 Sur les dépens

51      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe doit être condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Toutefois, aux termes de l’article 88 du règlement de procédure, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci.

52      La Commission ayant succombé en ses conclusions, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions en ce sens du requérant.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision portant adoption du rapport d’évolution de carrière de M. Guido Strack pour l’exercice d’évaluation 2001/2002 est annulée.

2)      La Commission est condamnée aux dépens.

Vilaras

Šváby

Jürimäe

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 30 janvier 2008.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       M. Vilaras


* Langue de procédure : l’allemand.