Language of document : ECLI:EU:T:2024:373

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre)

12 juin 2024 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure de nullité – Marque de l’Union européenne verbale FOOTWARE – Cause de nullité absolue – Caractère descriptif – Article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement (UE) 2017/1001 – Recevabilité de nouveaux éléments de preuve – Article 95, paragraphes 1 et 2, du règlement 2017/1001 – Article 27, paragraphe 4, du règlement délégué (UE) 2018/625 »

Dans l’affaire T‑130/23,

Nike Innovate CV, établie à Beaverton, Oregon (États-Unis), représentée par Me K. Sandberg, avocate,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme D. Stoyanova-Valchanova, MM. T. Klee et V. Ruzek, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Puma SE, établie à Herzogenaurach (Allemagne), représentée par Mes M. Schunke et L. Goller, avocats,

LE TRIBUNAL (première chambre),

composé de M. D. Spielmann, président, Mme M. Brkan et M. I. Gâlea (rapporteur), juges,

greffier : M. G. Mitrev, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure,

à la suite de l’audience du 13 mars 2024,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Nike Innovate CV, demande l’annulation et la réformation de la décision de la cinquième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 9 janvier 2023 (affaire R 2173/2021‑5) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 18 mars 2020, l’intervenante, Puma SE, a présenté à l’EUIPO une demande de nullité de la marque de l’Union européenne verbale FOOTWARE, enregistrée à la suite d’une demande déposée par la requérante le 14 mars 2019.

3        Les produits et les services couverts par la marque contestée pour lesquels la nullité était demandée relevaient des classes 9, 38 et 42 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondaient, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 9 : « Modules de matériel informatique pour la réception, le traitement et la transmission de données sur des dispositifs électroniques utilisant l’internet des objets ; dispositifs électroniques et logiciels permettant aux utilisateurs d’interagir à distance avec d’autres dispositifs intelligents pour la surveillance et la commande de systèmes automatisés ; logiciels et micrologiciels utilisés pour permettre aux dispositifs électroniques de partager des données et de communiquer entre eux ; pilotes de logiciels de dispositifs électroniques permettant au matériel informatique et aux dispositifs électroniques de communiquer entre eux ; logiciels pour la sécurité de réseaux et dispositifs ; logiciels pour la sécurité de réseaux et dispositifs, à savoir logiciels pour veiller à la réception, au traitement, à la transmission et au stockage sécurisés de données sur l’internet des objets ; logiciels pour l’utilisation et l’interopérabilité d’interfaces de programmation d’application utilisées par des dispositifs mobiles, des systèmes et des dispositifs d’échange permettant de transmettre des données par le biais de réseaux de communication et de l’internet et se connectant à des réseaux informatiques privés et publics pour services de stockage et d’échange de données » ;

–        classe 38 : « Services de télécommunications ; services de télécommunication, à savoir transmission de données par le biais de réseaux de télécommunication, de réseaux de communication sans fil et de l’internet » ;

–        classe 42 : « Fournisseur de services d’applications proposant des logiciels d’interface de programmation d’application (API) pour l’intégration d’applications de tiers afin de permettre une expérience utilisateur interactive ; informatique en nuage proposant des logiciels pour la connexion, l’exploitation et la gestion de dispositifs en réseau via des réseaux avec ou sans fil ; informatique en nuage proposant des logiciels pour la connexion, l’exploitation et la gestion de dispositifs en réseau sur l’internet des objets ; informatique en nuage proposant des logiciels pour la collecte, la gestion, le suivi, le stockage et l’analyse de données ; informatique en nuage proposant des logiciels pour la gestion d’applications de machine à machine et de réseaux de machine à machine ; fourniture d’accès temporaire à des logiciels d’infonuagique non téléchargeables pour la connexion, l’exploitation et la gestion de terminaux de paiement en réseau, dispositifs de divertissement, ordiphones [smartphones], systèmes d’éclairage, systèmes de CVC, sur l’internet des objets (IdO) ».

4        Les causes invoquées à l’appui de la demande en nullité étaient celles visées à l’article 59, paragraphe 1, sous a) du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1), lu conjointement avec l’article 7, paragraphe 1, sous b) à d), du même règlement.

5        Le 28 octobre 2021, la division d’annulation a rejeté la demande en nullité.

6        Le 20 décembre 2021, l’intervenante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’annulation.

7        Par la décision attaquée, la chambre de recours a accueilli le recours au motif que la marque contestée était descriptive à l’égard des produits et des services en cause. Elle a estimé que le public pertinent était constitué des consommateurs moyens et du public professionnel dont le niveau d’attention pouvait varier de moyen à élevé. Partant, elle a fondé son appréciation sur le public anglophone qui comprenait l’anglais de base et qui percevrait le signe FOOTWARE comme signifiant « footwear » (chaussures). En analysant les éléments de preuves produits lors de la procédure devant l’EUIPO, qui décrivaient, notamment, l’interaction entre les chaussures et les produits et services désignés par la marque contestée, la chambre de recours a conclu que, à la date pertinente, le public anglophone pertinent pourrait percevoir le signe FOOTWARE comme une référence spécifique et directe à l’espèce ou à la destination des produits et des services visés par la marque contestée, à savoir qu’ils seraient globalement adaptés à un usage pour des chaussures.

 Conclusions des parties

8        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        confirmer la décision de la division d’annulation et maintenir l’enregistrement dans son intégralité ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens qu’elle a exposés.

9        L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens qu’il a exposés, en cas de convocation à une audience.

10      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens, y compris ceux qu’elle a exposés.

 En droit

11      La requérante invoque en substance trois moyens, tirés, le premier, de la violation de l’article 59, paragraphe 1, sous a), lu conjointement avec l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, le deuxième, de la violation de l’article 95, paragraphe 2, du règlement 2017/1001 et de l’article 27, paragraphe 4, du règlement délégué (UE) 2018/625 de la Commission, du 5 mars 2018, complétant le règlement 2017/1001 (JO 2018, L 104, p. 1) et, le troisième, de la violation de l’article 95, paragraphe 1, du règlement 2017/1001.

12      Le Tribunal estime opportun d’examiner, tout d’abord, le deuxième moyen.

 Sur le deuxième moyen, tiré d’une violation de l’article 95, paragraphe 2, du règlement 2017/1001 et de l’article 27, paragraphe 4, du règlement délégué 2018/625

13      La requérante reproche à la chambre de recours d’avoir admis les éléments de preuve supplémentaires produits par l’intervenante pour la première fois devant elle.

14      Premièrement, elle estime que lesdits éléments de preuve n’étaient pas pertinents et n’apportaient aucun élément nouveau, dès lors qu’ils consistaient en des exemples de chaussures dotées d’une technologie intégrée, tandis que de tels exemples étaient déjà contenus dans le dossier. À cet égard, elle considère que la quantité d’exemples disponibles ne ferait aucune différence quant à l’application de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001. De surcroit, elle estime que, en acceptant des éléments de preuves supplémentaires qui tendent à démontrer que la marque contestée consiste en un terme couramment utilisé pour les produits et les services en cause, la chambre de recours admettrait qu’elle procède à une analyse au titre de l’article 7, paragraphe 1, sous d), du même règlement, alors que cette disposition n’est pas invoquée dans le cadre du litige.

15      Deuxièmement, la requérante estime que les éléments produits par l’intervenante devant la chambre de recours ne démontraient pas un usage clair du terme « footware », mais fournissaient simplement des exemples supplémentaires de produits qui étaient connus sous des noms comprenant le suffixe « ware ». Le signe FOOTWARE se distinguerait par le jeu de mots qu’il contient et les seuls éléments pertinents en ce sens seraient des exemples comprenant des jeux de mots similaires.

16      Troisièmement, l’annexe B41 au mémoire exposant les motifs du recours devant la chambre de recours, qui consistait en une liste de marques enregistrées pour la classe 38 et qui contenaient le suffixe « ware », ne serait pas davantage pertinente, puisqu’elle aurait été produite par l’intervenante afin de contester une constatation figurant dans la décision de la division d’annulation qu’elle aurait mal comprise.

17      Quatrièmement, la requérante rappelle que la date pertinente à prendre en compte aux fins de l’appréciation du caractère distinctif de la marque contestée est la date de la demande d’enregistrement, à savoir le 14 mars 2019. À cet égard, elle souligne qu’il est très difficile d’attribuer une date aux éléments de preuve supplémentaires admis. Bien que le raisonnement de la chambre de recours soit fondé sur le fait qu’il existe une industrie croissante autour de l’internet des objets, les informations produites par l’intervenante ne permettraient pas d’établir que tel était le cas à la date pertinente.

18      L’EUIPO et l’intervenante contestent l’argumentation de la requérante.

19      L’article 95, paragraphe 2, du règlement 2017/1001 prévoit que l’EUIPO « peut ne pas tenir compte des faits que les parties n’ont pas invoqués ou des preuves qu’elles n’ont pas produites en temps utile ».

20      Il découle du libellé dudit article que, en règle générale et sauf disposition contraire, la présentation de preuves par les parties demeure possible après l’expiration des délais auxquels se trouve subordonnée une telle présentation, en application des dispositions du règlement 2017/1001, et qu’il n’est nullement interdit à l’EUIPO de tenir compte de faits et de preuves ainsi tardivement invoqués ou produits [arrêts du 13 mars 2007, OHMI/Kaul, C‑29/05 P, EU:C:2007:162, point 42 ; du 19 avril 2018, EUIPO/Group, C‑478/16 P, non publié, EU:C:2018:268, point 34, et du 2 juin 2021, Franz Schröder/EUIPO – RDS Design (MONTANA), T‑854/19, EU:T:2021:309, point 24].

21      En précisant que ce dernier « peut » décider de ne pas tenir compte de telles preuves, ladite disposition investit en effet l’EUIPO d’un large pouvoir d’appréciation à l’effet de décider, tout en motivant sa décision sur ce point, s’il y a lieu ou non de prendre celles-ci en compte (voir, en ce sens, arrêts du 13 mars 2007, OHMI/Kaul, C‑29/05 P, EU:C:2007:162, point 43 ; du 24 janvier 2018, EUIPO/European Food, C‑634/16 P, EU:C:2018:30, point 56, et du 2 juin 2021, MONTANA, T‑854/19, EU:T:2021:309, point 25).

22      En ce qui concerne le pouvoir d’appréciation conféré à la chambre de recours, l’article 27, paragraphe 4, du règlement 2018/625 prévoit ce qui suit :

« Conformément à l’article 95, paragraphe 2, du règlement […] 2017/1001, la chambre de recours peut accepter des faits invoqués ou des preuves produites pour la première fois devant elle uniquement si ces faits ou preuves répondent aux exigences suivantes :

a)      ils semblent, à première vue, pertinents pour l’issue de l’affaire ; et

b)      ils n’ont pas été présentés en temps utile pour des raisons valables, en particulier lorsqu’ils viennent uniquement compléter des faits et preuves pertinents qui avaient déjà été soumis en temps utile, ou sont déposés pour contester les conclusions tirées ou examinées d’office par la première instance dans la décision objet du recours. »

23      En l’espèce, la chambre de recours a estimé que certains des documents supplémentaires produits par l’intervenante ne faisaient que compléter des faits et des preuves pertinents qui avaient déjà été présentés en temps utile et ont été déposés pour contester les constatations faites par la division d’annulation. La chambre de recours a observé qu’ils étaient clairement pertinents pour l’issue de l’espèce, étant donné qu’ils visaient précisément à prouver le caractère descriptif de la marque contestée par rapport aux produits et aux services en cause. Par conséquent, elle a estimé qu’il était raisonnable d’exercer son pouvoir d’appréciation conformément à l’article 95, paragraphe 2, du règlement 2017/1001 et à l’article 27, paragraphe 4, du règlement 2018/625 et d’admettre cette partie des éléments de preuve produits pour la première fois au stade du recours devant elle.

24      À cet égard, en premier lieu, il convient de relever que les éléments de preuve en cause produits par l’intervenante en annexes à son mémoire exposant les motifs de recours devant la chambre de recours, à savoir les annexes B4 à B6, B16 à B20 et B37, contiennent des exemples d’articles chaussants avec des logiciels ou du matériel intégrés, tandis que les annexes B27 à B40 concernent la signification de la marque contestée ou de ses éléments et que les annexes B41, B42 et B48 représentent des extraits concernant certaines marques de l’Union européenne enregistrées peu de temps avant l’adoption de la décision attaquée,une liste de marques contenant le suffixe « ware » et une liste contenant le terme « footware ».

25      Or, d’une part, il convient de constater, à l’instar de la chambre de recours, que ces éléments de preuve sont pertinents, dès lors qu’ils ont pour objet de prouver le lien existant entre les produits et services en cause et la marque contestée, de sorte qu’ils étaient susceptibles d’être utiles aux fins de l’examen du caractère descriptif du signe constituant cette marque, aux fins de l’application de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001.

26      D’autre part, s’agissant du caractère tardif de la production desdits éléments de preuve, il convient de constater, ainsi que le souligne d’ailleurs la requérante, que ces éléments ne font que compléter les faits et les éléments de preuve pertinents qui avaient déjà été présentés en temps utile devant la division d’annulation et n’apportent pas de nouveaux arguments.

27      Par conséquent, les arguments de la requérante selon lesquels la chambre de recours aurait commis une erreur d’appréciation en admettant les éléments de preuve supplémentaires produits par l’intervenante doivent être rejetés.

28      En deuxième lieu, la requérante fait valoir que certains éléments de preuve se rapportent à une période postérieure à la date de dépôt de la demande d’enregistrement de la marque contestée, à savoir le 14 mars 2019.

29      Il est vrai que certains documents admis par la chambre de recours sont postérieurs à ladite date, à savoir les annexes au mémoire exposant les motifs de recours devant la chambre de recours portant les références B20, B27 à B29, B31, B33, B34, B36, B38, B40 à B42 et B48.

30      Toutefois, une partie significative de ces éléments consiste en des articles sur des produits chaussants intégrant une technologie connectée et sur la signification des termes en composant la marque contestée. Ainsi, l’intervenante ayant déjà versé au dossier des exemples similaires, lesdits éléments de preuve servaient uniquement à compléter et à renforcer les arguments initialement soumis et à contester les appréciations de la division d’annulation.

31      Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de rejeter le deuxième moyen.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 59, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001, lu conjointement avec l’article 7, paragraphe 1, sous c), du même règlement

32      Le premier moyen invoqué par la requérante est articulé, en substance, en trois branches tirées, la première, d’une prétendue interprétation erronée du terme « caractéristique » au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, la deuxième, de la prétendue impossibilité pour la chambre de recours de recourir à une motivation globale et, la troisième, d’une erreur d’appréciation relative à la perception de la marque contestée par le public pertinent.

33      Il convient de commencer par l’analyse de la troisième branche du premier moyen.

 Sur la troisième branche du premier moyen

34      La requérante reproche à la chambre de recours de s’être limitée, dans son appréciation du caractère descriptif de la marque contestée, à une analyse réalisée uniquement du point de vue du public pertinent qui percevrait le signe FOOTWARE comme l’équivalent du mot « footwear » (chaussures). Selon la requérante, la chambre de recours aurait dû procéder à une analyse des autres significations possibles de la marque contestée, ce qui l’aurait amenée à considérer que ladite marque n’était pas descriptive.

35      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

36      À titre liminaire, il y a lieu de constater que la chambre de recours a considéré que le public pertinent était le public anglophone de l’Union européenne, composé de consommateurs moyens ainsi que de professionnels, dont le niveau d’attention pouvait varier de moyen à élevé. Ces constatations n’ont pas été remises en cause par la requérante.

37      Ensuite, il convient de rappeler que, conformément à l’article 7, paragraphe 2, du règlement 2017/1001, la protection d’une marque doit être refusée même si les motifs de refus n’existent que dans une partie de l’Union.

38      En outre, selon la jurisprudence, un signe doit se voir opposer un refus d’enregistrement si, en au moins une de ses significations potentielles, il désigne une caractéristique des produits ou des services concernés [arrêt du 23 octobre 2003, OHMI/Wrigley, C‑191/01 P, EU:C:2003:579, point 32 ; voir, également, arrêt du 2 décembre 2020, BSH Hausgeräte/EUIPO (Home Connect), T‑152/20, non publié, EU:T:2020:584, point 22 et jurisprudence citée].

39      En l’espèce, la chambre de recours a estimé qu’il existait trois manières dont les consommateurs pouvaient percevoir la marque contestée. Elle a considéré que le public qui pouvait percevoir le terme « footware » comme « footwear », soit parce qu’il pourrait le percevoir comme une graphie erronée de ce terme, soit parce qu’il pourrait le percevoir directement comme « footwear », représentait une partie importante du public anglophone pertinent. C’est sur cette partie du public qu’elle a décidé de fonder son appréciation du lien entre la marque contestée et les produits et services en cause.

40      Or, eu égard à la jurisprudence citée au point 38 ci-dessus, un signe doit se voir opposer un refus d’enregistrement si, en au moins une de ses significations potentielles, il désigne une caractéristique des produits ou des services concernés. Dès lors, la chambre de recours pouvait fonder son appréciation uniquement sur la partie du public pertinent anglophone qui percevrait le signe comme « footwear ».

41      Interrogée à l’audience, la requérante a d’ailleurs confirmé que l’appréciation de la chambre de recours était conforme à la jurisprudence citée au point 38 ci-dessus.

42      Il s’ensuit que l’argument de la requérante selon lequel la chambre de recours aurait dû analyser le caractère descriptif également du point de vue du public qui percevrait la marque contestée différemment de « footwear » ne saurait prospérer et que la troisième branche du premier moyen doit être rejetée.

 Sur la première branche du premier moyen

43      La requérante estime, en substance, que la chambre de recours a considéré, à tort, que le terme « footware » serait descriptif des produits et services désignés par la demande d’enregistrement. La chambre de recours n’aurait pas correctement déterminé ce qui constitue une caractéristique pertinente des produits et des services spécifiques en cause au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001.

44      L’EUIPO et l’intervenante contestent l’argumentation de la requérante.

45      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, sont refusées à l’enregistrement les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci.

46      À cet égard, pour qu’un signe tombe sous le coup de l’interdiction énoncée à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, il faut qu’il présente avec les produits ou les services en cause un rapport suffisamment direct et concret de nature à permettre au public pertinent de percevoir immédiatement, et sans autre réflexion, une description des produits et des services en cause ou d’une de leurs caractéristiques [voir, en ce sens, arrêt du 19 décembre 2019, Currency One/EUIPO – Cinkciarz.pl (CINKCIARZ), T‑501/18, EU:T:2019:879, point 14 et jurisprudence citée].

47      L’appréciation du caractère descriptif d’un signe ne peut être opérée que, d’une part, par rapport aux produits ou aux services concernés et, d’autre part, par rapport à la compréhension qu’en a le public pertinent [arrêts du 25 octobre 2005, Peek & Cloppenburg/OHMI (Cloppenburg), T‑379/03, EU:T:2005:373, point 37, et du 15 janvier 2015, MEM/OHMI (MONACO), T‑197/13, EU:T:2015:16, point 50].

48      Il appartenait donc à la chambre de recours de déterminer si, eu égard à une signification donnée de la marque contestée, il existait, à la date de la demande d’enregistrement, du point de vue du public pertinent, un rapport suffisamment direct et concret entre ladite marque et les caractéristiques des produits et des services en cause au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001 [voir, par analogie, arrêts du 2 décembre 2020, Forex Bank/EUIPO – Coino UK (FOREX), T‑26/20, non publié, EU:T:2020:583, point 31, et du 9 mars 2022, Telefónica Germany/EUIPO (LOOP), T‑132/21, non publié, EU:T:2022:124, point 18].

49      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner l’argumentation de la requérante par laquelle celle-ci remet en cause les appréciations de la chambre de recours s’agissant de la perception du public pertinent de la marque contestée, des éléments constituant une caractéristique pertinente des produits et des services en cause et de la perception de la marque contestée en rapport avec les produits et services en cause.

50      En l’espèce, la chambre de recours a conclu que le public anglophone pertinent pouvait percevoir le signe « footware » – lu « footwear » (chaussures) – comme une référence spécifique et directe à l’espèce ou à la destination des produits et des services visés par la marque contestée compris dans les classes 9, 38 et 42, dès lors que ces produits et services étaient globalement adaptés à un usage pour des chaussures.

51      Au soutien de cette conclusion, la chambre de recours a estimé que les éléments de preuve soumis par l’intervenante montraient que, à la date de la demande d’enregistrement, à savoir le 14 mars 2019, les chaussures incorporant des logiciels ou du matériel informatique constituaient un produit établi sur le marché en expansion de l’internet des objets. Elle a constaté que lesdits éléments contenaient plusieurs références à des « chaussures intelligentes » produites principalement par divers concurrents dans le secteur des chaussures de sport, qui comprenaient, notamment, « un ordinateur dans une chaussure », une connectivité sans fil et des puces intégrées avec une technologie de suivi connectée à une application spécifique.

52      Premièrement, la requérante estime que l’appréciation de la chambre de recours, énoncée au point 90 de la décision attaquée, selon laquelle les produits et services couverts par la marque contestée sont « globalement adaptés à un usage pour des chaussures », ne permettait pas d’identifier quelle est la caractéristique desdits produits et services retenue afin d’établir le caractère descriptif de la marque contestée. Cette appréciation serait trop « vague et nébuleuse » pour constituer une caractéristique au sens de la jurisprudence pertinente.

53      Toutefois, force est de constater que, au point 90 de la décision attaquée, la chambre de recours a précisé que le terme « footware » pouvait être perçu par le public pertinent comme une référence spécifique et directe à l’espèce ou à la destination des produits et des services couverts par la marque contestée.

54      Or, selon la jurisprudence, par l’emploi, à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, des termes « l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci » (voir point 45 ci-dessus), le législateur de l’Union a, d’une part, indiqué que ces termes devaient tous être considérés comme correspondant à des caractéristiques de produits ou de services et, d’autre part, précisé que cette liste n’était pas exhaustive, toute autre caractéristique de produits ou de services pouvant également être prise en compte [arrêt du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, EU:C:2011:139, point 49 ;voir, également, arrêt du 7 mai 2019, Fissler/EUIPO (vita), T‑423/18, EU:T:2019:291, point 42 et jurisprudence citée].

55      Il s’ensuit que l’argument de la requérante par lequel elle reproche à la chambre de recours de ne pas avoir défini une caractéristique qui pouvait être descriptive des produits et des services en cause ne saurait être accueilli, dès lors que la chambre de recours a identifié l’espèce ainsi que la destination desdits produits et desdits services comme des caractéristiques pertinentes auxquelles la marque contestée faisait référence, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001.

56      Deuxièmement, la requérante fait valoir que l’utilisation des produits et des services couverts par la marque contestée dans une chaussure ne saurait constituer une caractéristique centrale, importante ou pertinente desdits produits et desdits services. Elle estime que, même si un « matériel informatique pour la réception, le traitement et la transmission de données », des « logiciels utilisés pour permettre aux dispositifs électroniques de partager des données » ou un « service de télécommunication » ou « d’informatique en nuage » pouvaient être utilisés d’une manière qui se rapporte à une chaussure, il serait impossible de considérer que ce lien ténu constitue une caractéristique intrinsèque, permanente ou objective de ces produits et services.

57      Lors de l’audience, la requérante a admis que, s’agissant, à tout le moins, des matériels informatiques couverts par la marque contestée, l’utilisation avec une chaussure était une des destinations possibles, bien que la marque ne soit pas enregistrée pour des chaussures contenant un module informatique, mais pour le module lui-même.

58      Par ailleurs, elle fait valoir que la chambre de recours n’a pas tenu compte de la nature exacte des produits et des services en cause et que, s’il s’agissait réellement de produits intégrés dans des chaussures, ces produits relèveraient de la classe 25.

59      L’intervenante et l’EUIPO soulignent que les termes « espèce » et « destination » sont visés explicitement à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001 et que, du point de vue du législateur, ils sont, en soi, objectifs et inhérents à la nature du produit ou du service, ainsi qu’intrinsèques et permanents.

60      Certes, d’une part, le choix, par le législateur de l’Union, du terme « caractéristique » met en exergue le fait que les signes visés à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001 ne sont que ceux qui servent à désigner une propriété, facilement reconnaissable par le public pertinent, des produits ou des services pour lesquels l’enregistrement est demandé. Ainsi, un signe ne saurait être refusé à l’enregistrement sur le fondement de cette disposition que s’il est raisonnable d’envisager qu’il sera effectivement reconnu par le public pertinent comme une description de l’une desdites caractéristiques [voir, en ce sens, arrêts du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, EU:C:2011:139, point 50, et du 3 juillet 2013, Airbus/OHMI (NEO), T‑236/12, EU:T:2013:343, point 32].

61      D’autre part, s’il est indifférent qu’une telle caractéristique soit essentielle ou accessoire sur le plan commercial, une caractéristique, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, doit néanmoins être objective et inhérente à la nature du produit ou du service ainsi qu’intrinsèque et permanente pour ce produit ou ce service (voir arrêt du 7 mai 2019, vita, T‑423/18, EU:T:2019:291, point 44 et jurisprudence citée).

62      Toutefois, il y a lieu de rappeler qu’il ressort de la jurisprudence citée au point 54 ci-dessus que par l’emploi, à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, des termes « l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci », le législateur de l’Union a, d’une part, indiqué que ces termes devaient tous être considérés comme correspondant à des caractéristiques de produits ou de services et, d’autre part, précisé que cette liste n’était pas exhaustive, toute autre caractéristique de produits ou de services pouvant également être prise en compte.

63      Ainsi, il convient de considérer que la jurisprudence citée aux points 60 et 61 ci-dessus, qui vise à définir le terme « caractéristique », trouve à s’appliquer, en principe, uniquement lorsqu’il est question de « toute autre caractéristique », à savoir d’une caractéristique qui n’est pas citée expressément par l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001.

64      Tel était le cas, notamment, dans les affaires invoquées par la requérante, à savoir celles ayant donné lieu aux arrêts du 7 mai 2019, vita (T‑423/18, EU:T:2019:291), et du 25 juin 2020, Off-White/EUIPO (OFF-WHITE) (T‑133/19, non publié, EU:T:2020:293), dans lesquelles il était question de savoir si la couleur d’un produit était susceptible de constituer une « autre caractéristique » au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001.

65      S’agissant de l’arrêt du 6 décembre 2023, bet365 Group/EUIPO (bet365) (T‑764/22, non publié, EU:T:2023:783), invoqué par la requérante lors de l’audience, il convient également de constater que les circonstances ayant donné lieu audit arrêt ne sont pas transposables au cas d’espèce, dès lors que la chambre de recours n’était pas parvenue à établir que le jeu et les paris constituaient une caractéristique « intrinsèque » et « inhérente à la nature » de certains des produits et des services visés.

66      Or, en l’espèce, la chambre de recours a considéré que le terme « footware » était descriptif à l’égard des produits et des services couverts par la marque contestée au motif qu’il renvoyait, notamment, à leur « destination », qui est une caractéristique explicitement énumérée par l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001.

67      Par ailleurs, s’agissant de l’appréciation, par la chambre de recours, du lien entre la marque contestée et les produits et services en cause, il convient de rappeler que, pour l’application de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, il suffit que le signe soit descriptif d’une des destinations possibles des produits et des services en cause qui est susceptible d’entrer en ligne de compte lors du choix opéré par le public pertinent et qui, dès lors, en constitue une caractéristique essentielle [voir arrêt du 8 juin 2022, Vitronic/EUIPO (Enforcement Trailer), T‑433/21, non publié, EU:T:2022:344, point 50 et jurisprudence citée].

68      Par conséquent, en l’espèce, il ne s’agit pas de déterminer si le lien qui existe entre la marque contestée et les produits et services désignés par cette marque constitue une caractéristique intrinsèque, permanente ou objective desdits produits et services, comme le soutient la requérante, dès lors que, conformément à la jurisprudence citée au point 67 ci-dessus, il suffit que le signe constituant cette marque soit descriptif d’une des destinations possibles des produits et des services en cause qui est susceptible d’entrer en ligne de compte lors du choix opéré par le public pertinent pour considérer qu’il en constitue une caractéristique essentielle.

69      Or, la requérante ne conteste pas que les produits relevant des classes 9, 38 et 42 peuvent être utilisés avec des chaussures ou des éléments de chaussures.

70      À cet égard, il y a lieu de considérer que le terme « footware », qui sera compris comme « footwear » (chaussures), est descriptif des logiciels et du matériel informatique destinés à transmettre, recevoir, traiter, sécuriser et stocker des données en relation avec des appareils électroniques et des systèmes automatisés de l’internet des objets, compris dans la classe 9, dès lors que ces produits sont destinés à faciliter l’interopérabilité, le partage de données, la communication et l’interaction de dispositifs, tels que les capteurs d’une chaussure connectée, et un smartphone. S’agissant des services de transmission de données compris dans la classe 38, il est raisonnablement concevable que le public anglophone pertinent considère que ces services se rapportent aux capteurs et systèmes portables basés sur des chaussures. Enfin, quant aux services compris dans la classe 42, à savoir, essentiellement, des services informatiques ou logiciels destinés à faciliter l’interopérabilité des dispositifs, la collecte, la gestion, la surveillance, le stockage et l’analyse de données, le bon fonctionnement des infrastructures permettant l’échange de données et la connexion aux réseaux et à l’internet des objets, ceux-ci sont destinés à faciliter l’interopérabilité, le partage de données, la communication et l’interaction de dispositifs tels que des capteurs intégrés dans des chaussures et les applications ou autres dispositifs traitant et analysant ces données.

71      Dès lors, c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu que le terme « footware » – lu comme « footwear » (chaussures) – fournissait des informations sur la destination des produits et des services couverts par la marque contestée et qu’il était descriptif de ceux-ci.

72      Par conséquent, la première branche du premier moyen doit être rejetée.

 Sur la deuxième branche du premier moyen

73      La requérante reproche, en substance, à la chambre de recours de ne pas avoir motivé son constat selon lequel la marque contestée était descriptive des différents produits et des services en cause. La chambre de recours aurait procédé à l’identification d’un lien général entre les produits et services désignés et le signe constituant la marque contestée, sans l’étayer par une analyse expliquant en quoi ce lien était direct et spécifique au regard de chacune des différentes catégories de produits et de services.

74      L’EUIPO et l’intervenante contestent l’argumentation de la requérante.

75      Lorsqu’elle procède à un examen des motifs absolus de refus, la chambre de recours est tenue d’indiquer, dans sa décision, la conclusion à laquelle elle aboutit pour chacun des produits et des services visés dans la demande d’enregistrement [voir, en ce sens, arrêts du 17 mai 2017, EUIPO/Deluxe Entertainment Services Group, C‑437/15 P, EU:C:2017:380, point 29, et du 23 septembre 2015, Reed Exhibitions/OHMI (INFOSECURITY), T‑633/13, non publié, EU:T:2015:674, point 45].

76      Toutefois, si la décision doit, en principe, être motivée pour chacun des produits ou des services concernés, l’autorité compétente peut cependant se limiter à une motivation globale lorsque le même motif de refus est opposé pour une catégorie ou un groupe de produits ou de services présentant entre eux un lien suffisamment direct et concret, au point qu’ils forment une catégorie ou un groupe de produits ou de services d’une homogénéité suffisante (voir arrêts du 17 mai 2017, EUIPO/Deluxe Entertainment Services Group, C‑437/15 P, EU:C:2017:380, point 31 et jurisprudence citée, et du 23 septembre 2015, INFOSECURITY, T‑633/13, non publié, EU:T:2015:674, point 46 et jurisprudence citée).

77      En l’espèce, il convient de constater que la chambre de recours a examiné le même motif de refus pour tous les produits et services pour lesquels la marque contestée avait été enregistrée, à savoir le caractère descriptif du signe constituant cette marque par rapport à la destination de ces produits et de ces services.

78      En outre, la chambre de recours a estimé que les produits compris dans la classe 9 étaient essentiellement des logiciels et du matériel informatique pour transmettre, recevoir, traiter, sécuriser et stocker des données en relation avec des appareils électroniques et des systèmes automatisés de l’internet des objets. S’agissant des services compris dans la classe 38, elle a estimé que ceux-ci étaient des services de télécommunications, y compris de transmission de données au moyen de réseaux de télécommunications, de réseaux de communications sans fil et de l’internet. S’agissant des services compris dans la classe 42, elle a considéré qu’ils étaient, essentiellement, des services informatiques ou logiciels destinés à faciliter l’interopérabilité des dispositifs, la collecte, la gestion, la surveillance, le stockage et l’analyse de données, le bon fonctionnement des infrastructures permettant l’échange de données et la connexion aux réseaux et à l’internet des objets.

79      Or, la requérante ne conteste pas, en substance, le fait que les produits et services en cause, tel qu’ils ont été regroupés par la chambre de recours, présentent une homogénéité suffisante entre eux, au sens de la jurisprudence citée au point 76 ci-dessus.

80      Interrogée à l’audience, la requérante renvoie à l’appréciation de la chambre de recours retenue aux points 90 à 94 de la décision attaquée et affirme que la motivation globale effectuée par la chambre de recours aurait été biaisée par la présomption selon laquelle le consommateur penserait à une chaussure connectée.

81      La requérante rappelle qu’aucun des produits et des services couverts par la marque contestée ne présente de lien direct avec des chaussures, dès lors qu’il s’agit de produits et de services pour la collecte, le stockage et l’échange de données ainsi que de services pour la gestion de réseaux et la transmission de données. Elle reproche ainsi à la chambre de recours de ne pas avoir établi un lien suffisant entre la marque contestée et ces différents produits et ces services et de s’être bornée à constater une relation vague avec les chaussures connectées.

82      Or, il convient de constater que cet argument n’est pas de nature à remettre en cause le classement opéré par la chambre de recours afin de regrouper les produits et les services en cause en trois catégories.

83      En effet, ledit argument relève de l’analyse du caractère descriptif de la marque contestée, examiné dans le cadre de la première branche du premier moyen, et n’est donc pas de nature à remettre en cause la motivation globale effectuée par la chambre de recours.

84      Dans ces circonstances, il y a lieu de considérer que la chambre de recours pouvait, sans violer l’obligation de motivation qui lui incombait, après avoir effectué un examen global couvrant l’ensemble des produits et des services concernés par la demande en nullité, établir une seule conclusion, fondée sur un même motif de refus, se rapportant à tous ces produits et ces services.

85      Il s’ensuit que la chambre de recours a bien procédé à un examen du caractère descriptif de la marque contestée par rapport à l’ensemble des produits et des services concernés, contrairement à ce que soutient la requérante.

86      Dès lors, il convient de rejeter la deuxième branche du premier moyen et, partant, ce moyen dans son ensemble.

 Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l’article 95, paragraphe 1, du règlement 2017/1001

87      La requérante reproche à la chambre de recours d’avoir affirmé, au point 35 de la décision attaquée, que la question du caractère usuel de la marque contestée pourrait être analysée à un stade ultérieur, alors que le recours devant elle ne portait pas sur un tel motif. La requérante rappelle que les motifs invoqués à l’appui du recours déposé par l’intervenante contre la décision de la division d’annulation se limitaient au caractère descriptif et à l’absence de caractère distinctif. Ainsi, en affirmant qu’elle pourrait analyser à un stade ultérieur le caractère usuel de la marque contestée, la chambre de recours aurait violé l’article 95, paragraphe 1, du règlement 2017/1001.

88      L’EUIPO et l’intervenante contestent l’argumentation de la requérante.

89      La chambre de recours a précisé, au point 35 de la décision attaquée, que la question du caractère non distinctif ou usuel de la marque contestée au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et d), du règlement 2017/1001 pourrait être examinée après l’analyse de l’éventuel caractère descriptif. Après avoir constaté que la marque contestée était descriptive au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, elle a finalement considéré qu’il n’était pas nécessaire d’analyser d’autres motifs invoqués par l’intervenante.

90      À cet égard, il convient de rappeler que l’article 95, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 prévoit ce qui suit :

« Au cours de la procédure, l’[EUIPO] procède à l’examen d’office des faits ; toutefois, dans une procédure concernant des motifs relatifs de refus d’enregistrement, l’examen est limité aux moyens invoqués et aux demandes présentées par les parties. Dans les procédures de nullité engagées en vertu de l’article 59, l’[EUIPO] limite son examen aux moyens et arguments soumis par les parties. »

91      En l’espèce, les motifs de recours formulés par l’intervenante visaient les motifs de refus énoncés à l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement 2017/1001.

92      Toutefois, la chambre de recours a accueilli le recours uniquement sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, ce qui permet de constater qu’elle a effectivement limité son examen aux moyens et arguments soumis par les parties.

93      Ainsi, le seul fait d’avoir mentionné la possibilité de procéder à une analyse sous l’angle de l’article 7, paragraphe 1, sous d), du règlement 2017/1001 ne saurait suffire à remettre en cause le fait que la chambre de recours a effectivement limité son examen aux moyens et aux arguments soumis par les parties, quand bien même l’intervenante ne se serait pas prévalue d’un tel motif de nullité.

94      La chambre de recours n’ayant pas procédé à une analyse de la marque contestée sous l’angle de l’article 7, paragraphe 1, sous d), du règlement 2017/1001, il convient de relever qu’elle n’a pas pu commettre d’erreur de droit au regard de l’article 95, paragraphe 1, dudit règlement, et que dès lors, le troisième moyen de la requérante doit être rejeté.

95      Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, aucun des moyens invoqués par la requérante au soutien de ses conclusions ne devant être accueilli, il y a lieu de rejeter le premier chef de conclusions de la requérante tendant à l’annulation de la décision attaquée et, par voie de conséquence, son deuxième chef de conclusions aux fins de réformation de ladite décision.

 Sur les dépens

96      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

97      La requérante ayant succombé et une audience de plaidoiries ayant eu lieu, il convient de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Nike Innovate CV est condamnée aux dépens.

Spielmann

Brkan

Gâlea

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 12 juin 2024.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.