Language of document : ECLI:EU:T:2007:99

ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre)

29 mars 2007 (*)

« Aides d’État – Prix de vente d’un terrain – Décision ordonnant la récupération d’une aide incompatible avec le marché commun – Erreurs dans le calcul de l’aide – Obligations de la Commission relatives au calcul de l’aide – Droits du bénéficiaire de l’aide – Règlement (CE) n° 659/1999 – Article 13, paragraphe 1 »

Dans l’affaire T-366/00,

Scott SA, établie à Saint-Cloud (France), représentée par Sir Jeremy Lever, QC, MM. G. Peretz, J. Gardner, barristers, R. Griffith et M. Papadakis, solicitors,

partie requérante,

soutenue par

République française, représentée par MM. G. de Bergues, S. Seam et F. Million, en qualité d’agents,

partie intervenante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par MM. G. Rozet et J. Flett, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation partielle de la décision 2002/14/CE de la Commission, du 12 juillet 2000, concernant l’aide d’État mise à exécution par la France en faveur de Scott Paper SA/Kimberly-Clark (JO 2002, L 12, p. 1),

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (première chambre),

composé de MM. J. D. Cooke, président, R. García-Valdecasas et Mme I. Labucka, juges,

greffier : Mme C. Kristensen, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 25 octobre 2006,

rend le présent

Arrêt

 Faits à l’origine du litige

1        En 1969, la société de droit américain Scott Paper Co. a racheté la société de droit français Bouton Brochard et créé une société distincte, Bouton Brochard Scott SA, laquelle a repris les activités de Bouton Brochard. Bouton Brochard Scott a été rebaptisée Scott SA en novembre 1987. Cette dernière avait pour activité la production de papier à usage sanitaire et domestique au cours de la période pertinente pour la présente affaire.

2        Le 31 août 1987, la ville d’Orléans (France), le département du Loiret (France) et la requérante ont conclu un accord portant sur la vente à cette dernière d’un terrain de 48 hectares dans la zone industrielle de La Saussaye et sur la redevance d’assainissement qui devait être calculée selon un taux préférentiel (ci-après l’« accord Scott »). Cet accord prévoyait que le département du Loiret et la ville d’Orléans contribueraient pour un maximum de 80 millions de francs français (FRF) (12,2 millions d’euros) aux travaux d’aménagement du site en faveur de la requérante.

3        La réalisation des études et des travaux nécessaires à l’aménagement du terrain en cause a été confiée à la société d’économie mixte pour l’équipement du Loiret (ci-après « Sempel »). Il ressort d’une convention du 12 septembre 1987 conclue entre le département du Loiret, la ville d’Orléans et Sempel (ci-après la « convention Sempel ») que la ville d’Orléans a cédé 68 hectares à Sempel pour un franc symbolique. Par ailleurs, il ressort de l’article 4 de l’accord Scott, ainsi que de l’article 12 de la convention Sempel, que cette dernière vendrait le terrain de 48 hectares et une usine-entrepôt (ci-après le « terrain litigieux ») à Scott pour 31 millions de FRF (4,7 millions d’euros), soit un prix de 65 FRF/m2.

4        En novembre 1996, la Cour des comptes française a publié un rapport public intitulé « Les interventions des collectivités territoriales en faveur des entreprises ». Par ce rapport, elle entendait attirer l’attention sur un certain nombre d’aides éventuelles octroyées par les collectivités territoriales françaises en faveur de certaines entreprises, et en particulier sur le transfert du terrain litigieux de la zone industrielle de La Saussaye à la requérante.

5        À la suite de la publication de ce rapport, la Commission a reçu une plainte, par lettre datée du 23 décembre 1996, concernant les conditions préférentielles auxquelles la ville d’Orléans et le département du Loiret auraient vendu le terrain litigieux à la requérante et le tarif de la redevance d’assainissement dont cette dernière aurait bénéficié.

6        Par lettre du 17 janvier 1997, la Commission a demandé des informations complémentaires aux autorités françaises. Il s’en est suivi un échange de correspondance entre les autorités françaises et la Commission, entre janvier 1997 et avril 1998, dans le cadre duquel les autorités françaises ont partiellement fourni les informations et précisions demandées, notamment, par lettres du 17 mars, du 17 avril et du 29 mai 1997. Le 8 août 1997, la Commission a demandé de nouveau des précisions aux autorités françaises. La Commission a reçu des informations complémentaires de celles-ci le 3 novembre 1997 et du plaignant le 8 décembre 1997, le 29 janvier 1998 et le 1er avril 1998.

7        Par lettre du 10 juillet 1998, la Commission a informé les autorités françaises de sa décision du 20 mai 1998 d’ouvrir la procédure prévue à l’article 88, paragraphe 2, CE et les a invitées à présenter leurs observations et à répondre à certaines questions (ci-après la « décision d’ouverture de la procédure »). Dans cette lettre, la Commission a également demandé aux autorités françaises d’informer la requérante de l’ouverture de la procédure ainsi que du fait qu’elle pourrait avoir à rembourser toute aide illégalement perçue. Les parties intéressées ont été informées de l’ouverture de la procédure et ont été invitées à faire valoir leurs observations éventuelles sur les mesures en cause, par la publication de la lettre susvisée au Journal officiel des Communautés européennes du 30 septembre 1998 (JO C 301, p. 4).

8        La requérante a été informée de la décision d’ouverture de la procédure par appel téléphonique des autorités françaises du 30 septembre 1998. Par lettre du 23 novembre 1998, la requérante a présenté des observations sur la décision d’ouverture de la procédure.

9        Par lettre du 25 novembre 1998, les autorités françaises ont également présenté des observations sur la décision d’ouverture de la procédure.

10      Après avoir pris connaissance des observations des autorités françaises et des tiers, la Commission a de nouveau procédé à des demandes d’informations complémentaires auprès des autorités françaises. Celles-ci n’ayant répondu que partiellement, la Commission leur a enjoint, le 8 juillet 1999, en application de l’article 10, paragraphe 3, du règlement (CE) n° 659/1999 du Conseil, du 22 mars 1999, portant modalités d’application de l’article [88] du traité CE (JO L 83, p. 1), de lui fournir les informations nécessaires. Le 15 octobre 1999, les autorités françaises ont répondu partiellement à cette demande.

11      Lors d’une réunion du 7 décembre 1999 entre une délégation française, y compris des représentants de Scott, et la Commission, cette dernière a autorisé ladite délégation, à titre exceptionnel, et dans l’intérêt de la procédure, à fournir des renseignements complémentaires avant la fin décembre 1999.

12      Par lettre du 24 décembre 1999, la requérante a présenté des observations complémentaires à la suite de la réunion du 7 décembre 1999. Le 12 janvier 2000, la Commission a informé la requérante qu’elle refusait d’accepter ladite lettre en ce qu’elle avait été déposée en dehors du délai prévu par la décision d’ouverture de la procédure, à savoir le 30 octobre 1998.

13      Les autorités françaises ont transmis des renseignements complémentaires à la Commission les 10 janvier et 21 février 2000.

14      Les actions de la requérante ont été rachetées par Kimberly-Clark Corp. (ci-après « KC ») en janvier 1996. KC a annoncé la fermeture de l’usine en janvier 1998. Les actifs de l’usine, à savoir le terrain et la papeterie, ont été rachetés par Procter & Gamble (ci-après « P & G ») en juin 1998.

 Décision attaquée

15      Le 12 juillet 2000, la Commission a adopté la décision 2002/14/CE, concernant l’aide d’État mise à exécution par la France en faveur de Scott Paper SA/KC (JO 2002, L 12, p. 1, ci-après la « décision attaquée »). À la suite de l’introduction du présent recours (voir point 23 ci-après), la Commission a notifié, le 2 mars 2001, un corrigendum de la décision attaquée à la République française. L’article 1er et les considérants 172, 217 et le considérant 239, sous b), a), de la décision attaquée ont ainsi été corrigés. 

16      La décision attaquée, dans sa version modifiée, prévoit :

« Article premier

L’aide d’État sous forme du prix préférentiel d’un terrain et d’un tarif préférentiel de la redevance d’assainissement, que la France a mise à exécution en faveur de Scott, pour un montant de 39,58 millions de FRF (6,03 millions d’euros) ou, en valeur actualisée, de 80,77 millions de FRF (12,3 millions d’euros), en ce qui concerne le prix préférentiel du terrain […], est incompatible avec le marché commun.

Article 2

1. La France prend toutes les mesures nécessaires pour récupérer auprès de son bénéficiaire l’aide visée à l’article 1er et déjà illégalement mise à sa disposition.

2. La récupération a lieu sans délai conformément aux procédures du droit national, pour autant qu’elles permettent l’exécution immédiate et effective de la présente décision. L’aide à récupérer inclut des intérêts à partir de la date à laquelle elle a été mise à la disposition du bénéficiaire, jusqu’à la date de sa récupération. Les intérêts sont calculés sur la base du taux de référence utilisé pour le calcul de l’équivalent-subvention dans le cadre des aides à finalité régionale. » 

17      Pour le calcul de la valeur de l’aide, la Commission a considéré que le terrain non aménagé de 68 hectares avait été acquis par les autorités françaises entre 1975 et 1987 pour un prix de 10,9 millions de FRF (1,7 million d’euros) (considérants 15 et 170 de la décision attaquée).

18      À ce montant, la Commission a ajouté le coût total supporté par Sempel selon le bilan de liquidation « Z.1 La Saussaye & La Planche », en date du 26 juillet 1993 (ci-après le « bilan de liquidation de Sempel »), pour les opérations d’aménagement du terrain, à savoir 140,4 millions de FRF (21,4 millions d’euros), pour parvenir à un montant de 151,3 millions de FRF (23,1 millions d’euros) (considérants 168 à 170 de la décision attaquée).

19      Ensuite, la Commission a retranché 51,3 millions de FRF (7,9 millions d’euros) correspondant au coût financier des emprunts contractés par Sempel, au remboursement de la TVA sur les opérations d’aménagement du terrain, ainsi qu’au coût d’un collecteur public d’eaux usées, les autorités françaises ayant démontré qu’il n’était pas destiné exclusivement à Scott mais bénéficiait à l’ensemble de la collectivité (considérant 171 de la décision attaquée).

20      Selon la Commission, le coût de l’opération de vente du terrain litigieux s’élevait par conséquent à 100 millions de FRF (15,2 millions d’euros). La Commission a estimé que le coût de l’opération qui se rapporte directement à Scott est de 48/68 du montant de 100 millions de FRF (15,2 millions d’euros), soit 70,588 millions de FRF (10,76 millions d’euros), en ce que cette dernière a seulement acheté 48 des 68 hectares du terrain en cause.

21      Enfin, la Commission a déduit de ce montant la somme de 31 millions de FRF (4,7 millions d’euros) que Sempel avait reçue de Scott pour parvenir à une perte nette pour les autorités françaises d’environ 39,58 millions de FRF (6,03 millions d’euros), ou, en valeur actualisée, 80,77 millions de FRF (12,3 millions d’euros).

22      Le calcul de la valeur de l’aide peut être résumé comme suit :

Désignation (en millions de FRF)

Total (en millions de FRF)

Coûts du terrain (terrain initial de 10,9 et aménagement de 140,4)

151,3

Déductions (coût financier des emprunts de Sempel de 29,4; remboursement de la TVA de 8,3; collecteur public d’eaux usées de 13,6)

- 51,3

Coût de l’opération (151,3 - 51,3)

100

Coût de la vente à Scott (48/68 du coût de l’opération)

70,588

Prix payé par Scott

- 31

Montant de l’aide

39,588

 Procédure et conclusions des parties

23      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 30 novembre 2000, la requérante a introduit le présent recours.

24      Par requête déposée au greffe le 4 décembre 2000, enregistrée sous la référence T‑369/00, un recours ayant également pour objet une demande d’annulation de la décision attaquée a été introduit par le département du Loiret.

25      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 5 avril 2001, la République française a demandé à intervenir dans la présente procédure à l’appui des conclusions de la requérante.

26      Par ordonnance du président de la cinquième chambre élargie, du 10 mai 2001, la République française a été admise à intervenir à l’appui des conclusions de la requérante.

27      À la demande de Scott, le Tribunal a décidé de se prononcer dans un premier temps sur la question de la prescription soulevée par Scott en application de l’article 15 du règlement no 659/1999 avant tout débat au fond.

28      Par ses arrêts du 10 avril 2003, le Tribunal a rejeté les recours introduits par Scott et par le département du Loiret dans la mesure où ils étaient fondés sur la violation par la Commission de l’article 15 du règlement n° 659/1999, et les dépens s’y rapportant ont été réservés (arrêts du 10 avril 2003, Scott/Commission, T‑366/00, Rec. p. II‑1763, et Département du Loiret/Commission, T‑369/00, Rec. p. II‑1789). Il a été décidé de poursuivre les procédures pour le surplus.

29      Dans l’attente de l’arrêt de la Cour sur le pourvoi introduit par Scott contre l’arrêt Scott/Commission, point 28 supra, le Tribunal a suspendu la procédure dans la présente affaire ainsi que dans l’affaire T-369/00.

30      Par arrêt du 6 octobre 2005, Scott/Commission (C‑276/03 P, Rec. p. I‑8437), la Cour a rejeté le pourvoi introduit par Scott contre l’arrêt du 10 avril 2003, Scott/Commission, point 28 supra.

31      Par lettre du 10 novembre 2005, le Tribunal a invité les parties à présenter leurs observations sur la reprise de la procédure à la lumière de l’arrêt du 6 octobre 2005, Scott/Commission, point 30 supra. Dans sa réponse du 24 novembre 2005, la requérante a confirmé que les seuls moyens et arguments restant à trancher étaient ceux ayant trait à l’aide d’État sous la forme du prix prétendument préférentiel du terrain litigieux acheté par la requérante sur le site industriel de la Saussaye, ainsi qu’à l’application par la Commission d’intérêts composés dans l’ordre de récupération.

32      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal a décidé de rouvrir la procédure orale et, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure, a invité les parties à répondre par écrit à une série de questions. Il a été déféré à cette demande.

33      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal à l’audience du 25 octobre 2006.

34      Dans ce contexte, la requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler l’article 2 de la décision attaquée, dans la mesure où il concerne l’aide accordée sous la forme du prix préférentiel d’un terrain visé à son article 1er ;

–        condamner la Commission aux dépens.

35      La République française, intervenant au soutien de la requérante, conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner la Commission aux dépens.

36      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens ;

–        à titre subsidiaire, condamner les parties à supporter leurs propres dépens.

 En droit

37      À l’appui de son recours, la requérante invoque quatre moyens. Le premier moyen est tiré d’une violation des droits procéduraux, le deuxième d’une violation du principe d’égalité de traitement, le troisième d’une violation du principe de protection de la confiance légitime et le quatrième de l’appréciation erronée de l’aide.

38      Il convient d’examiner d’abord la recevabilité des annexes de la requête et ensuite d’examiner directement le quatrième moyen.

 Sur la recevabilité des annexes de la requête

 Arguments des parties

39      La Commission critique le fait que la requérante se fonde sur des documents qui ne faisaient pas partie de la procédure administrative devant elle. Selon la Commission, les annexes suivantes de la requête sont irrecevables : l’annexe 6 (article paru dans le journal Les Échos du 31 mars-1er avril 2000), l’annexe 13 (lettre de l’avocat de Scott du 24 décembre 1999 à la Commission) et l’annexe 19 (lettre de l’avocat de Scott du 24 mars 2000 à un membre du cabinet de M. Monti, membre de la Commission).

40      Par ailleurs, la Commission relève que l’annexe 23 de la requête (l’offre initiale de la ville d’Orléans à la requérante) a été communiquée, en partie, à la Commission en tant qu’annexe à la lettre des autorités françaises du 7 janvier 2000. Toutefois, plusieurs pages auraient été omises. L’annexe 23 de la requête comporterait les pages manquantes. Au vu du fait que ce serait la première fois que ces pages ont été communiquées à la Commission, elles seraient irrecevables. La Commission ajoute que le Tribunal pourrait, dans les circonstances de l’espèce, tenir juridiquement compte de certains éléments exposés dans ce document.

41      La requérante affirme, en ce qui concerne l’article paru dans le journal Les Échos (voir point 39 ci-dessus), qu’il est recevable au motif qu’il n’a pas été publié avant la fin de la période pendant laquelle elle était autorisée à soumettre des éléments matériels.

42      Quant aux lettres du 24 décembre 1999 et du 24 mars 2000 (voir point 39 ci-dessus), elles auraient dû faire partie de la procédure administrative devant la Commission et elles ont été refusées à tort par celle-ci.

43      S’agissant de l’annexe 23 de la requête (voir point 40 ci-dessus), la requérante prétend qu’elle ignorait que le gouvernement français n’avait fourni à la Commission qu’une copie incomplète de ce document. Or, la Commission ne devrait pas être en droit d’exclure des éléments s’il apparaît que les éléments matériels fournis à la Commission par l’État membre sont erronés ou incomplets.

 Appréciation du Tribunal

44      Il importe de relever, à titre liminaire, que les pièces que la Commission considère comme irrecevables ont été valablement annexées à la requête et font donc partie du dossier devant le Tribunal. Par voie de conséquence, leur recevabilité n’est pas en soi en cause ici. En effet, la Commission fait essentiellement valoir que les pièces en cause ne devraient pas être prises en considération par le Tribunal dans son appréciation de la légalité de la décision attaquée au motif qu’elles ne faisaient pas partie du dossier de la Commission au cours de la procédure administrative.

45      Il convient de rappeler que la légalité d’une décision de la Commission en matière d’aides d’État s’apprécie en fonction des éléments d’information dont la Commission pouvait disposer au moment où elle a arrêté celle-ci (arrêts de la Cour du 10 juillet 1986, Belgique/Commission, 234/84, Rec. p. 2263, point 16, et du 11 septembre 2003, Belgique/Commission, C‑197/99 P, Rec. p. I‑8461, point 86). Ainsi que la Commission l’a relevé à juste titre, cela a pour conséquence que la requérante ne saurait se prévaloir d’arguments factuels inconnus de la Commission et non signalés au cours de cette procédure (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 6 octobre 1999, Kneissl Dachstein/Commission, T‑110/97, Rec. p. II‑2881, point 102).

46      Toutefois, il ne ressort pas de cette jurisprudence que des preuves présentées par le bénéficiaire d’une aide dans un recours en annulation ne sauraient être prises en compte aux fins de l’appréciation de la légalité de la décision attaquée si elles ont été valablement présentées à la Commission lors de la procédure administrative avant l’adoption de la décision litigieuse et si cette dernière les a exclues pour des raisons injustifiées.

47      Il y a donc lieu d’examiner chacune des annexes en cause.

48      En ce qui concerne l’article paru dans le journal Les Échos (voir point 39 ci-dessus), il est constant qu’il n’a pas été communiqué à la Commission au cours de la procédure administrative. Dès lors, il ne saurait être pris en compte aux fins de l’appréciation de la légalité de la décision attaquée.

49      S’agissant de l’offre initiale de la ville d’Orléans à la requérante (voir point 40 ci-dessus), il n’est pas contesté que la République française a transmis certaines pages de ce document à la Commission lors de la procédure administrative en tant qu’annexe à sa lettre du 7 janvier 2000, mais en omettant certaines autres pages, et ce sans en informer la Commission. Cette omission n’était pas évidente à la lecture des pages fournies. Par voie de conséquence, il ne saurait être reproché à la Commission de ne pas avoir demandé à la République française de fournir les pages manquantes, et la légalité de la décision attaquée ne peut pas être appréciée à la lumière du contenu de ces pages.

50      Quant à la lettre de l’avocat de Scott à la Commission du 24 mars 2000 (voir point 39 ci-dessus), et ainsi que Scott l’a admis en réponse aux questions écrites du Tribunal, elle concerne la question de la prescription. Étant donné que le Tribunal a déjà traité cette question (voir points 27 et 28 ci-dessus), l’objection soulevée à l’encontre de cette lettre est inopérante aux fins du présent arrêt.

51      Il convient ensuite d’examiner la lettre de l’avocat de Scott à la Commission du 24 décembre 1999 (voir point 39 ci-dessus). La Commission a refusé de prendre cette lettre en compte au motif qu’elle provenait d’une tierce partie et avait été déposée hors du délai prévu par la décision d’ouverture de la procédure (voir point 12 ci-dessus).

52      Il importe de rappeler à cet égard que la procédure de contrôle des aides d’État est, compte tenu de son économie générale, une procédure ouverte vis-à-vis de l’État membre responsable, au regard de ses obligations communautaires, de l’octroi de l’aide (arrêt de la Cour du 24 septembre 2002, Falck et Acciaierie di Bolzano/Commission, C‑74/00 P et C‑75/00 P, Rec. p. I‑7869, point 81).

53      Dans le cadre de cette procédure, les intéressés autres que l’État membre responsable de l’octroi de l’aide ne sauraient donc prétendre eux-mêmes à un débat contradictoire avec la Commission, tel que celui ouvert au profit dudit État. Ils ont donc essentiellement un rôle de source d’information pour la Commission (voir arrêt du Tribunal du 8 juillet 2004, Technische Glaswerke Ilmenau/Commission, T‑198/01, Rec. p. II‑2717, point 192, et la jurisprudence citée).

54      À cet égard, aucune disposition de la procédure de contrôle des aides d’État ne réserve, parmi les intéressés, un rôle particulier au bénéficiaire de l’aide. Il y a d’ailleurs lieu de rappeler que la procédure de contrôle des aides d’État n’est pas une procédure ouverte « à l’encontre » du bénéficiaire des aides qui impliquerait que ce dernier puisse se prévaloir de droits aussi étendus que les droits de la défense en tant que tels (arrêt Falck et Acciaierie di Bolzano/Commission, point 52 supra, point 83). Toutefois, bien que le bénéficiaire de l’aide n’ait pas le statut de partie à la procédure, la jurisprudence lui a reconnu certains droits procéduraux qui visent à lui permettre de fournir des informations à la Commission et de faire valoir ses arguments (arrêt du 6 octobre 2005, Scott/Commission, point 30 supra, point 34).

55      En l’espèce, il est constant que Scott a été invitée à présenter ses observations lors de la procédure formelle d’examen conformément à l’article 88, paragraphe 2, CE et à l’article 6, paragraphe 1, du règlement n° 659/1999, et qu’elle a fait usage de cette possibilité en soumettant, le 23 novembre 1998, des observations détaillées à la Commission (voir point 8 ci-dessus).

56      Toutefois, il ne résulte pas de la jurisprudence rappelée aux points 52 à 54 ci-dessus que la Commission est en droit de méconnaître toute autre observation des bénéficiaires d’une aide après l’expiration du délai prévu par la décision d’ouverture de la procédure formelle d’examen. En revanche, il ressort de la jurisprudence qu’il incombe à la Commission d’examiner de façon diligente et impartiale le dossier dans le cadre de l’article 88 CE (voir arrêt de la Cour du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink’s France, C‑367/95 P, Rec. p. I‑1719, ci-après l’« arrêt Sytraval », point 62, et arrêt du Tribunal du 6 mars 2003, Westdeutsche Landesbank Girozentrale et Land Nordrhein-Westfalen/Commission, T‑228/99 et T‑233/99, Rec. p. II‑435, points 167 et 168). Il s’ensuit que la Commission pourrait être tenue, dans certaines circonstances, de prendre en compte les observations du bénéficiaire d’une aide après l’expiration du délai prévu par la décision d’ouverture.

57      En particulier, aucune disposition du règlement n° 659/1999, notamment son article 6, ne s’oppose à ce que la Commission accepte de telles observations. En effet, cet article permet à la Commission de proroger le délai de présentation des observations par les parties intéressées dans des cas dûment justifiés.

58      Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la qualification d’aide requiert que toutes les conditions visées à l’article 87, paragraphe 1, CE soient remplies (arrêts de la Cour du 21 mars 1990, Belgique/Commission, dit « Tubemeuse », C‑142/87, Rec. p. I‑959, point 25, et du 24 juillet 2003, Altmark Trans et Regierungspräsidium Magdeburg, C‑280/00, Rec. p. I‑7747, point 74). La Commission est ainsi tenue de vérifier l’existence d’un réel avantage pour le bénéficiaire de la mesure qui l’aurait prétendument favorisé. Or, dans le cas d’espèce, l’existence d’un tel avantage a été vivement contestée au cours de la procédure d’enquête. Ainsi, la détermination de la valeur du terrain litigieux a fait l’objet de nombreux échanges entre les autorités françaises, Scott et la Commission. Dans ces circonstances, la Commission ne peut se retrancher derrière une lecture formaliste de ses obligations en matière d’aides d’État pour refuser au bénéficiaire de l’aide la possibilité de faire valoir ses observations sur un aspect controversé de l’examen en rejetant des informations fournies dans un délai qu’elle a elle-même fixé (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 22 février 2006, Le Levant 001 e.a./Commission, T‑34/02, Rec. p. II‑267, point 96).

59      En effet, bien que la procédure de contrôle des aides d’État soit une procédure ouverte vis-à-vis de l’État membre responsable, et malgré l’obligation de ce dernier de coopérer pleinement avec la Commission et de lui fournir toutes les informations demandées, la Commission ne saurait méconnaître le fait qu’un éventuel ordre de récupération pourrait avoir des conséquences financières importantes pour le bénéficiaire de l’aide. De plus, la Commission ne saurait présumer, en demandant la production de preuves et en évaluant celles-ci, qu’il existe un intérêt commun à l’État membre et au bénéficiaire, en particulier en ce qui concerne le calcul de la valeur de l’aide. Compte tenu du fait que l’aide est remboursée à l’État membre concerné et non à la Communauté, la Commission ne saurait supposer que l’État membre a eu comme objectif de minimiser le montant recouvré pour faire en sorte que le bénéficiaire soit traité de manière équitable.

60      Dans le cas d’espèce, la Commission a été amenée à examiner une prétendue aide d’État presque dix ans après son octroi en 1987. En outre, Scott, le bénéficiaire de l’aide, a été achetée par KC en 1996 et a ensuite vendu le terrain litigieux à P & G en 1998 (voir point 14 ci-dessus). Il s’agit donc d’une affaire dans laquelle les informations concernant la valeur de l’aide n’étaient pas faciles à obtenir.

61      La Commission cherchait toujours à éclaircir les faits en l’espèce lors de la réunion du 7 décembre 1999 avec la délégation française, y compris les représentants de Scott. Elle a ainsi pris la décision « dans l’intérêt de la procédure » (considérant 11 de la décision attaquée) d’autoriser la production de renseignements complémentaires avant la fin du mois de décembre 1999. Les parties ont des appréciations divergentes sur le point de savoir si la Commission a autorisé les seules autorités françaises à fournir des informations complémentaires ou si cette offre était adressée à la délégation dans son ensemble, dont les représentants de Scott. Or, la Commission n’a pas démontré qu’elle avait, de façon explicite, limité son offre aux seules autorités françaises lors de la réunion en question. En tout état de cause, c’est en donnant suite à cette offre que Scott a envoyé sa lettre du 24 décembre 1999 à la Commission.

62      Le Tribunal considère que la décision de la Commission de rejeter cette lettre était disproportionnée et contradictoire. Premièrement, au vu du fait que la Commission était prête à accepter des informations complémentaires à la suite de la réunion en cause et jusqu’au 31 décembre 1999, il n’y avait aucune raison, dans ces circonstances, d’établir une distinction selon la source de ladite information en rejetant la lettre au simple motif qu’elle émanait du bénéficiaire de l’aide et non des autorités françaises. Il convient de relever à cet égard que, lors de l’audience, la Commission a confirmé que, si le contenu de la lettre du 24 décembre 1999 avait figuré sur papier à en-tête du gouvernement français, elle aurait accepté le document en question et l’aurait pris en compte en arrêtant la décision attaquée. La Commission ne saurait, d’une part, permettre au bénéficiaire d’une aide de participer à la réunion au cours de laquelle elle autorise la fourniture d’informations complémentaires et, d’autre part, lui interdire par la suite de fournir de telles informations. Deuxièmement, la réaction de la Commission était contradictoire en ce qu’elle a accepté des informations assez similaires émanant des autorités françaises le 7 janvier et le 21 février 2000 (voir point 13 ci-dessus), à savoir bien après l’échéance du délai du 31 décembre 1999 fixé lors de la réunion du 7 décembre 1999.

63      Dans ces circonstances, les motifs de rejet de la lettre de la requérante du 24 décembre 1999 ne sont pas valables. Cette lettre peut donc être invoquée par la requérante pour contester la légalité de la décision attaquée, puisque son contenu a été présenté à la Commission dans un délai que cette dernière avait elle-même imposé avant la fin de la procédure administrative et six mois avant l’adoption de la décision attaquée.

 Sur le quatrième moyen, tiré de l’appréciation erronée de l’aide

 Arguments des parties

64      En premier lieu, la requérante avance que la Commission a fait une erreur dans son appréciation de la valeur du terrain litigieux. En particulier, l’approche adoptée par la Commission serait erronée en ce que cette dernière s’est fondée sur le coût du terrain non aménagé et des aménagements pour l’État membre, en supposant que les coûts en question, dont le montant de 31 millions de FRF versé à Sempel a été déduit, représentaient la valeur de la prétendue subvention.

65      S’agissant de la valeur du terrain non aménagé, la requérante estime que les dépenses engagées par la ville d’Orléans jusqu’à douze ans avant la date à laquelle le terrain lui a été cédé ne fournissent pas une indication fiable sur la valeur du terrain non aménagé en 1987. La requérante, renvoyant à sa lettre du 24 décembre 1999 et à la lettre de la République française du 21 février 2000, soutient que la Commission aurait dû se fonder sur le contrôle fiscal selon lequel le terrain non aménagé ne valait, en fait, que 5,55 FRF/m2 en 1987 ou en 1988.

66      S’agissant de l’argument de la Commission selon lequel elle pouvait ne pas tenir compte du contrôle fiscal, en ce qu’il a été effectué six ans après la cession en cause, la requérante souligne que ledit contrôle se rapporte à la valeur du terrain non aménagé à un moment qui est pertinent aux fins de la procédure en matière d’aides d’État et qu’il est fondé sur une évaluation réalisée à cette époque. La requérante ajoute que l’évaluation du terrain utilisée aux fins du contrôle fiscal était appropriée dans le cadre de l’examen de la prétendue aide d’État en ce qu’il était manifestement dans l’intérêt des autorités fiscales de fixer une valeur du terrain qui soit la plus élevée possible afin de réduire les coûts d’amortissement de l’usine qu’elle était susceptible de faire valoir pour le calcul de ses futurs impôts sur le revenu.

67      La requérante précise que l’erreur manifeste d’appréciation alléguée n’est pas constituée par l’erreur commise par la Commission en ne tenant pas compte de l’évaluation de 1988 utilisée au cours du contrôle fiscal de 1993. L’erreur invoquée tiendrait plutôt au fait que la Commission s’est fondée sur des données qui étaient manifestement peu convaincantes alors que la requérante aurait fourni des renseignements alternatifs valables que la Commission n’aurait pas examinés.

68      Selon la requérante, dès lors que la ville d’Orléans possédait le terrain en cause depuis 1975 (considérant 15 de la décision attaquée), il ne s’agissait pas d’un cas où, en vertu d’un contrat conclu entre un organe étatique et une entreprise devant recevoir une aide d’État, l’organe étatique consentait à acquérir le terrain pour le céder à l’entreprise à un prix inférieur à son prix d’achat. Dans un tel cas, l’évaluation de toute aide d’État serait effectuée sur la base du coût d’acquisition du terrain pour l’organe étatique. En revanche, dans le cas d’espèce, la Commission aurait dû déterminer la valeur du terrain à la date à laquelle il a été cédé à Scott.

69      En ce qui concerne les coûts de l’aménagement du terrain, la Commission aurait assimilé à tort les coûts supportés par Sempel pour l’aménagement du terrain à la valeur de l’aide. Or, il ressortirait de l’accord Scott que les collectivités locales étaient convenues que Sempel effectuerait des travaux sur le site pour un montant maximal de 80 millions de FRF. Compte tenu de ce plafond, la supposition de la Commission selon laquelle 48/68 de chaque franc dépensé par Sempel créaient un avantage pour la requérante serait manifestement erronée et inéquitable.

70      De plus, les coûts supportés par Sempel auraient pu être gaspillés ou engagés pour réaliser des travaux qui n’étaient ni demandés par Scott ni dans l’intérêt de celle-ci. Ils auraient également pu représenter des travaux d’infrastructure correspondant à ceux qui sont normalement fournis sur le budget de l’État et ne pas constituer, dès lors, une aide (voir considérants 168 et 169 de la décision attaquée).

71      La requérante ajoute que le terrain litigieux lui a été cédé pour 31 millions de FRF (soit 64 FRF/m2). Selon la requérante, il s’agit du prix du marché. Elle fait observer à cet égard que, en 1998, P & G a acheté le terrain de 48 hectares en cause et l’usine au prix réel du marché, à savoir 27,653 millions de FRF. Le prix payé par P & G fournirait une meilleure indication sur la valeur du terrain litigieux en 1987 que les éléments que la Commission a choisis de prendre en compte.

72      En second lieu, la requérante prétend que la Commission a commis des erreurs manifestes d’appréciation dans le calcul du montant de l’aide.

73      Il y aurait eu notamment une erreur de calcul dans la décision attaquée corrigée par la Commission après l’introduction de la requête (voir point 15 ci-dessus).

74      Par ailleurs, la Commission aurait commis une erreur manifeste d’appréciation en fixant le taux d’intérêt à 5,7 % aux fins du calcul de la valeur actuelle de l’aide concernant le terrain litigieux. Dans la mesure où la Commission évaluait le coût de cette aide pour l’État, elle aurait dû retenir le taux d’intérêt supporté en France par des organes relevant effectivement du secteur public comme Sempel, à savoir un taux inférieur au montant que le secteur privé paie pour ses emprunts.

75      En premier lieu, la Commission souligne que la requérante ne conteste pas qu’elle a respecté les règles générales relatives aux injonctions de fournir des informations (voir article 13 du règlement n° 659/1999 et arrêt de la Cour du 13 avril 1994, Allemagne et Pleuger Worthington/Commission, C‑324/90 et C‑342/90, Rec. p. I‑1173, point 26). La Commission ajoute qu’elle n’était pas obligée de communiquer l’injonction directement à la requérante étant donné que la procédure des aides d’État se déroule exclusivement entre la Commission et l’État membre. La requérante aurait eu l’occasion de présenter ses observations à la suite de la décision d’ouverture de la procédure et, en tout état de cause, elle aurait eu la possibilité de fournir les informations manquantes à la suite du communiqué de presse concernant l’injonction de fournir des informations. De surcroît, comme il sera démontré ci-après, la Commission insiste sur le fait que l’absence desdites informations n’est pas un problème important en l’espèce.

76      La Commission souligne qu’elle a cherché à déterminer la valeur du terrain non aménagé et des aménagements cédés à la requérante. Dans la mesure où la Commission se serait appuyée sur les coûts supportés par l’État membre, elle l’aurait fait parce qu’elle aurait constaté que cette approche donnait en l’espèce un indicateur fiable de la valeur probable du terrain litigieux cédé à la requérante.

77      S’agissant du terrain non aménagé, la Commission aurait cherché à établir sa valeur au 31 août 1987, date de conclusion de l’accord. Bien qu’elle n’ait pas appliqué sa communication 97/C 209/03 concernant les éléments d’aide d’État contenus dans des ventes de terrains et de bâtiments par les pouvoirs publics (JO 1997, C 209, p. 3) de manière rétroactive dans la décision attaquée, la Commission aurait appliqué son approche « systématique et logique » de l’article 87, paragraphe 1, CE, telle qu’elle l’a exposée dans ladite communication. La Commission souligne à cet égard que le terrain litigieux n’a pas été vendu dans le cadre d’une procédure d’offre inconditionnelle et qu’aucune évaluation indépendante du terrain litigieux n’a été réalisée lors de la vente à la requérante. Dans ces circonstances, la Commission soutient que le coût initial du terrain pour les pouvoirs publics représente un « indicateur important » de la valeur du terrain non aménagé.

78      Les autorités françaises auraient indiqué à la Commission à trois reprises au cours de la procédure que le coût moyen du terrain non aménagé, acquis entre 1975 et 1987, s’établissait à 15 FRF/m2 (note en bas de page n° 8 de la décision attaquée). Bien que ces autorités aient pu préciser, dans leur lettre du 3 novembre 1997, que 30 hectares auraient été acquis le 1er juillet 1975, 32,5 hectares le 13 décembre 1984 et 5,5 hectares le 18 septembre 1987, elles auraient choisi de ne pas fournir le prix de chacune de ces acquisitions. La Commission fait observer à cet égard que ni les actes de vente ni aucun autre document attestant les acquisitions successives des terrains non aménagés par la ville d’Orléans ne lui ont été présentés au cours de la procédure administrative. La Commission n’aurait pas été informée de la méthode utilisée pour le calcul du prix moyen de 15 FRF/m2. De plus, on ne connaîtrait pas avec précision les terrains qui, sur l’ensemble des 68 hectares acquis par la ville d’Orléans, auraient été finalement transférés à la requérante pour former la parcelle de 48 hectares. Dans ces circonstances, la Commission serait en droit de conclure que le prix indiqué de 15 FRF/m2 porte sur une période qui s’étend jusqu’en 1987 et, en conséquence, peut être considéré comme un indicateur suffisamment récent et donc fiable de la valeur minimale du terrain au moment de l’accord Scott.

79      De plus, selon le point 2.2 du procès-verbal de la séance du conseil municipal de la ville d’Orléans du 27 mai 1994, la valeur initiale du terrain non aménagé s’établirait à 10,9 millions de FRF, à savoir au prix « fort modéré » de 23 FRF/m2. Étant donné que ce procès-verbal a été établi antérieurement à la présente procédure par l’autorité qui avait elle-même octroyé l’aide incriminée, la Commission considère qu’il fournissait une base raisonnable et fiable pour déterminer la valeur du terrain non aménagé. La Commission ajoute qu’il ressort du document d’offre préparé par la ville d’Orléans pour la requérante que la « valeur du terrain [non aménagé] en mars 1987 [était de] 20 millions de francs » (soit 50 hectares à 40 FRF/m2).

80      Contrairement à ce que soutient la requérante, les autorités françaises n’auraient pas invoqué, dans leur lettre du 21 février 2000, une évaluation du terrain non aménagé à 5,55 FRF/m2 sur la base d’un prétendu contrôle fiscal. Selon la Commission, il s’agit simplement d’une information destinée à faciliter la compréhension d’un tableau, qui n’est étayée par aucune preuve documentaire, qui a trait à l’année 1993, environ six ans après l’accord Scott, et qui contredirait d’autres déclarations faites par les autorités françaises au cours de la procédure ainsi que la déclaration du conseil municipal de la ville d’Orléans dans ses délibérations de 1994. Il s’ensuivrait que la Commission n’aurait commis aucune erreur en choisissant de ne pas inférer du passage auquel renvoie la requérante qu’il était établi que la valeur du terrain non aménagé s’élevait à 5,55 FRF/m2.

81      La requérante ferait valoir pour la première fois dans sa réplique que la lettre du 24 décembre 1999 contiendrait une estimation du terrain non aménagé qui aurait été réalisée en 1988 (voir point 65 ci-dessus). Selon la Commission, les arguments factuels nouveaux contenus dans la réplique sont irrecevables au même titre que la lettre du 24 décembre 1999 elle-même. La Commission fait observer à cet égard que même cette lettre ne permet pas de déceler la moindre référence à une estimation qui aurait été réalisée en 1988.

82      Hormis le fait que ladite lettre serait irrecevable, la Commission soutient qu’elle doit être rejetée sur le fond. Premièrement, la requérante n’aurait fourni aucun document pour corroborer l’affirmation selon laquelle une telle estimation a été faite en 1988 sur la base de la valeur du terrain non aménagé en 1987 et elle n’aurait donné aucune précision concernant la loi ou la réglementation en vertu de laquelle une telle estimation est censée avoir été faite. Deuxièmement, la Commission estime que l’administration fiscale locale peut attribuer des valeurs symboliques et essentiellement fictives aux terrains afin d’apprécier leur assujettissement à l’impôt local, de telles valeurs n’ayant que peu ou pas de rapport avec la valeur marchande réelle des terrains. Troisièmement, et contrairement à ce que soutient la requérante, il n’y aurait aucun fondement pour conclure que l’administration fiscale aurait attribué au terrain une valeur aussi élevée que possible pour limiter au maximum la valeur des aménagements, réduire les coûts d’amortissement de la requérante et augmenter ainsi l’impôt à payer par cette dernière. Quatrièmement, la Commission considère qu’une estimation faite par l’administration fiscale n’exclut pas nécessairement tout élément d’aide d’État.

83      Par ailleurs, la Commission conteste l’affirmation de la requérante selon laquelle la ville d’Orléans possédait le terrain non aménagé depuis 1975. Ainsi que cela a été soulevé au point 78 ci-dessus, les autorités françaises auraient indiqué que 30 hectares auraient été acquis le 1er juillet 1975, 32,5 hectares le 13 décembre 1984 (un peu plus de deux ans avant l’offre faite à Scott) et 5,5 hectares le 18 septembre 1987, à savoir après la conclusion de l’accord Scott et de la convention Sempel. Dès lors, selon le raisonnement de la requérante elle-même (voir point 68 ci-dessus), il s’agirait d’une situation où la Commission avait raison de tenir compte du prix que l’État avait dû payer pour acquérir le terrain non aménagé. La Commission ajoute que la République française a choisi de ne communiquer à la Commission ni le détail de la partie du terrain finalement transférée à la requérante, ni la méthode de calcul du prix moyen.

84      Quant aux aménagements, la Commission aurait enjoint aux autorités françaises, par voie de décision, de lui fournir des explications circonstanciées ainsi que des documents indiquant en détail les travaux effectués par Sempel et leur coût réel. Ces renseignements n’auraient jamais été fournis à la Commission au cours de la procédure administrative.

85      De plus, aucune explication ne serait avancée par la requérante sur ce qu’elle estime être la véritable valeur des aménagements qui lui ont été cédés. Comme cela a été expliqué au point 77 ci-dessus, en l’absence d’une procédure d’offre appropriée ou d’une évaluation par un expert indépendant préalablement aux négociations précédant la vente, le coût pour l’État membre représente un bon indicateur de la valeur des aménagements cédés à la requérante, à savoir 89,1 millions de FRF. À cet égard, la Commission précise qu’elle a utilisé le bilan de liquidation de Sempel, c’est-à-dire la preuve documentaire la plus fiable (certifiée en l’occurrence) dont elle disposait, en déduisant les coûts financiers de Sempel, la TVA et les coûts d’infrastructures publiques en accord avec les autorités françaises (considérants 89 et 171 de la décision attaquée). Sur la base de ce bilan, la Commission aurait déterminé la valeur totale des aménagements. Contrairement à ce que soutient la requérante, la valeur des aménagements cédés à cette dernière dépendrait des travaux effectivement réalisés par Sempel, et non pas des termes de l’accord Scott.

86      La Commission fait observer que, d’après le procès-verbal de la séance du conseil municipal de la ville d’Orléans du 27 mai 1994, le coût total de l’opération pour la ville d’Orléans et le département du Loiret, terrain et aménagements compris, s’élevait soit à 84,482 274 millions de FRF, soit à 92,531 048 millions de FRF (point 2.2).

87      La Commission estime que le prix d’achat payé en 1998 par P & G (voir point 71 ci-dessus) ne donnait pas une meilleure indication de la valeur des aménagements réalisés en 1987 que les autres éléments de preuve qu’elle avait en sa possession et décrits dans la décision attaquée. La Commission attire l’attention sur le fait que, tout au long de la procédure, la requérante se plaint d’une certaine injustice au motif que KC aurait payé le prix fort lorsqu’elle a fait l’acquisition de Scott mais que, lorsque Scott a vendu les actifs, le prix d’achat n’intégrait aucun montant reflétant l’élément d’aide en cause. Cet argument reviendrait à admettre que le prix de vente à P & G reflétait une évaluation des actifs profondément influencée, d’entrée de jeu, par l’existence même de l’aide en cause. La Commission estime que la requérante ne peut pas avoir « le beurre et l’argent du beurre » : soit P & G aurait « payé » Scott pour l’aide, auquel cas il n’y aurait pas d’injustice à la récupérer auprès de Scott, soit le prix payé par P & G – et le prix auquel Scott pouvait vendre et était disposée à vendre – serait d’emblée profondément affecté par l’octroi de l’aide, auquel cas il ne pourrait en aucune façon servir de base au calcul de la véritable valeur du terrain et des aménagements en 1987.

88      La Commission rappelle en outre qu’elle a enjoint aux autorités françaises de lui fournir des informations plus circonstanciées (considérants 97 et 168 de la décision attaquée).

89      En second lieu, la Commission admet l’existence d’une erreur de calcul dans la décision attaquée (voir point 73 ci-dessus) et fait observer qu’elle a, en conséquence, pris des mesures nécessaires pour corriger ladite erreur (voir point 15 ci-dessus).

90      L’argument de la requérante selon lequel il y aurait eu un manque de cohérence dans l’approche de la Commission et qu’elle aurait dû utiliser le taux d’intérêt supporté par Sempel (voir point 74 ci-dessus) devrait être rejeté. La Commission aurait correctement utilisé le taux de 5,6 % prévu par sa communication concernant la méthode de fixation des taux de référence et d’actualisation pour le calcul du montant à rembourser en vertu d’un ordre de récupération portant sur une aide d’État illégale.

 Appréciation du Tribunal

91      La notion d’aide d’État présentant un caractère juridique et devant être interprétée sur la base d’éléments objectifs, le juge communautaire doit, en principe et compte tenu tant des éléments concrets du litige qui lui est soumis que du caractère technique ou complexe des appréciations portées par la Commission, exercer un entier contrôle sur la question de savoir si une mesure entre dans le champ d’application de l’article 87, paragraphe 1, CE (arrêts de la Cour du 16 mai 2000, France/Ladbroke Racing et Commission, C‑83/98 P, Rec. p. I‑3271, point 25, et du Tribunal du 17 octobre 2002, Linde/Commission, T‑98/00, Rec. p. II‑3961, point 40).

92      Constituent des avantages au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE des interventions qui, sous des formes diverses, allègent les charges grevant normalement le budget d’une entreprise et qui, par là, s’apparentent à une subvention (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 23 février 1961, De Gezamenlijke Steenkolenmijnen in Limburg/Haute Autorité, 30/59, Rec. p. 3, 39, et du 8 mai 2003, Italie et SIM 2 Multimedia/Commission, C‑328/99 et C‑399/00, Rec. p. I‑4035, point 35), telles que, notamment, la fourniture de biens ou de services à des conditions préférentielles (arrêt de la Cour du 20 novembre 2003, GEMO, C‑126/01, Rec. p. I‑13769, point 29 ; voir, également, arrêt de la Cour du 2 février 1988, Van der Kooy e.a./Commission, 67/85, 68/85 et 70/85, Rec. p. 219, points 28 et 29).

93      Appliqué au cas d’une vente de terrain à une entreprise par une entité publique, ce principe a pour conséquence que doit être déterminé si, notamment, le prix de vente n’aurait pas pu être obtenu par l’acquéreur dans des conditions normales de marché (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 6 mars 2002, Diputación Foral de Álava e.a./Commission, T‑127/99, T‑129/99 et T‑148/99, Rec. p. II‑1275, point 73). En déterminant le prix du marché, la Commission doit tenir compte du caractère aléatoire que peut revêtir la détermination, par nature rétrospective, de tels prix de marché (arrêt du Tribunal du 16 septembre 2004, Valmont/Commission, T‑274/01, Rec. p. II‑3145, point 45).

94      Il convient également de souligner que, selon une jurisprudence constante, l’objectif poursuivi par la Commission lorsqu’elle exige la récupération d’une aide illégale est de faire perdre à son bénéficiaire l’avantage dont il avait bénéficié sur le marché par rapport à ses concurrents et de rétablir la situation antérieure au versement de ladite aide (voir, en ce sens, arrêts de la Cour Tubemeuse, point 58 supra, point 66, et du 4 avril 1995, Commission/Italie, C‑348/93, Rec. p. I‑673, point 27). Ainsi, la récupération des aides illégales ne saurait constituer une sanction non prévue par le droit communautaire, même si elle est mise en oeuvre longtemps après l’octroi des aides en question (arrêts de la Cour du 17 juin 1999, Belgique/Commission, C‑75/97, Rec. p. I‑3671, point 65, et du Tribunal du 29 septembre 2000, CETM/Commission, T‑55/99, Rec. p. II‑3207, point 164). En d’autres termes, les décisions de la Commission dans le domaine des aides d’État ordonnant la récupération de celles-ci sont des mesures de rétablissement de la situation antérieure et n’ont pas un caractère pénal.

95      Toutefois, si la Commission décide d’ordonner la récupération d’un montant déterminé, elle doit, conformément à son obligation d’examen diligent et impartial d’un dossier dans le cadre de l’article 88 CE (arrêts Sytraval, point 56 supra, point 62, et Westdeutsche Landesbank Girozentrale et Land Nordrhein-Westfalen/Commission, point 56 supra, point 167), déterminer, d’une façon aussi précise que les circonstances de l’affaire le permettent, la valeur de l’aide dont l’entreprise a bénéficié. En rétablissant la situation antérieure au versement de l’aide, d’une part, la Commission est tenue de s’assurer que l’avantage réel de l’aide est éliminé et ainsi d’ordonner la récupération de la totalité de l’aide. Elle ne saurait, par souci de clémence pour le bénéficiaire, ordonner la récupération d’une somme inférieure à la valeur de l’aide reçue par ce dernier. D’autre part, la Commission n’est pas habilitée, pour marquer sa désapprobation en ce qui concerne la gravité de l’illégalité, à ordonner la récupération d’un montant supérieur à la valeur de l’aide reçue par le bénéficiaire.

96      Il convient d’ajouter, à cet égard, qu’il ne saurait être reproché à la Commission d’avoir effectué une évaluation approximative. En effet, s’agissant d’une aide non notifiée, il se peut que, dans les circonstances de l’affaire, et en particulier lorsqu’une longue période s’est écoulée depuis la vente d’un terrain, la Commission puisse avoir des difficultés pour établir la valeur exacte de l’aide. De telles circonstances peuvent être prises en considération afin d’apprécier la légalité de la décision de la Commission et, en particulier, la question de savoir si la Commission a mené la phase d’examen visée à l’article 88, paragraphe 2, CE d’une manière diligente. Il n’en demeure pas moins que la question essentielle concernant l’évaluation de l’aide est une question de fait sur laquelle le juge communautaire doit exercer un entier contrôle. Le seul fait que la Commission puisse être amenée à effectuer une évaluation approximative en raison des circonstances de l’affaire ne lui confère pas, pour autant, une marge d’appréciation en ce qui concerne la détermination du montant dont elle ordonne la récupération.

97      En l’espèce, la requérante insiste sur le fait que le prix qu’elle a payé pour le terrain litigieux, à savoir 31 millions de FRF, représentait la valeur du marché du bien en 1987, à la date de la conclusion de la convention Sempel.

98      Or, dans la décision attaquée, la Commission a conclu que les autorités françaises avaient vendu le terrain litigieux à Scott à un prix préférentiel et a fixé la valeur du terrain à 70,588 millions de FRF. La Commission a établi ce dernier montant non pas par rapport à une estimation du prix de l’éventuelle vente du terrain litigieux sur le marché en 1987, mais en se fondant sur les coûts exposés par les autorités publiques concernées (voir points 17 à 20 ci-dessus).

99      La Commission soutient qu’elle était habilitée à, voire obligée de, se fonder sur les coûts exposés par les autorités françaises. D’une part, cette approche donnerait une indication fiable de la valeur probable du terrain et des aménagements cédés à la requérante. D’autre part, la Commission souligne dans la décision attaquée (voir, notamment, considérants 97 à 99) que la République française n’a pas coopéré lors de la procédure administrative, qu’elle s’est comportée d’une manière dilatoire et, en particulier, qu’elle n’a pas fourni toutes les informations nécessaires aux fins de la détermination de la valeur de l’aide d’État, et ce malgré l’injonction de fournir des informations prise en vertu de l’article 10, paragraphe 3, du règlement n° 659/1999 (voir point 10 ci-dessus).

100    Dans ces circonstances, et à la lumière de la jurisprudence mentionnée aux points 91 à 95 ci-dessus, il incombe au Tribunal de vérifier si la Commission a procédé à l’examen du dossier en évaluant, avec toute l’attention requise, les éléments de fait en cause et, en particulier, d’apprécier si la valeur attribuée au terrain litigieux par la Commission dans la décision attaquée lors de l’évaluation du montant de l’avantage illégal correspond, avec une précision suffisante, au prix du marché en 1987.

101    Il y a lieu de rappeler, à titre liminaire, qu’il est constant que la Commission a fait une erreur matérielle en ce qui concerne le calcul du montant de l’aide dans la première version de la décision attaquée et qu’elle l’a corrigée à la suite de l’introduction du présent recours. Dans cette première version de la décision, la Commission a pris pour point de départ le coût de l’opération de vente de l’ensemble du site de 68 hectares, dont elle a déduit les 31 millions de FRF payés par la requérante. Ensuite, elle a multiplié la somme obtenue par 48/68 pour refléter le fait que Scott avait acheté seulement 48 hectares. Selon ce calcul, il existait une aide d’un montant de 48,7 millions de FRF (7,42 millions d’euros) soit, en valeur actualisée, de 100 millions de FRF (15,2 millions d’euros) en ce qui concerne le prix préférentiel du terrain litigieux.

102    Or, la Commission a effectué un calcul erroné en attribuant à Scott seulement 48/68 des 31 millions de FRF et non l’intégralité de la somme. Elle a admis cette erreur et, dans la version corrigée de la décision attaquée, elle a conclu que l’aide s’était élevée à 39,58 millions de FRF soit, en valeur actualisée, à 80,77 millions de FRF.

103    Cette erreur ayant été corrigée par la Commission après l’introduction du présent recours, elle ne saurait justifier à elle seule l’annulation de la décision attaquée. Elle suscite toutefois une double observation. Tout d’abord, il est permis de s’interroger sur les raisons ayant conduit la Commission, au cours de son enquête, à commettre une erreur de cette gravité. Ensuite, et surtout, la commission d’une telle erreur renforce la nécessité pour le Tribunal de contrôler méticuleusement tous les autres aspects du calcul de l’aide.

104    Il convient dès lors d’examiner l’approche retenue par la Commission dans la décision attaquée pour établir la valeur du terrain litigieux.

–       Sur les erreurs de méthode et de calcul dans la décision attaquée

105    Il importe de rappeler, tout d’abord, que, dans le cadre de l’appréciation de la valeur d’une aide sous la forme d’une vente d’un terrain à un prix prétendument préférentiel, le principe de l’investisseur privé opérant dans une économie de marché s’applique. Dès lors, la valeur de l’aide est égale à la différence entre ce que le bénéficiaire a en fait payé et ce qu’il aurait dû payer à l’époque dans des conditions normales de marché pour acheter un terrain équivalent auprès d’un vendeur du secteur privé.

106    Or, la Commission admet en l’espèce qu’elle s’est appuyée sur les coûts payés par les autorités françaises pour évaluer le montant de l’aide (voir point 76 ci-dessus). En effet, la Commission ne se fonde, dans la décision attaquée, sur aucune estimation directe et indépendante de la valeur du terrain litigieux sur le marché en 1987. Elle se fonde en revanche sur le coût du terrain litigieux tel qu’il a été payé par les autorités concernées. Bien que les coûts d’achat et d’aménagement puissent fournir une indication secondaire ou indirecte de la valeur du terrain litigieux, de tels éléments ne constituent pas la meilleure preuve de cette valeur. L’application du principe de l’investisseur privé implique, en effet, l’estimation du prix de vente qui aurait été obtenu pour le terrain litigieux si celui-ci avait été vendu au mois d’août 1987 dans des conditions normales de marché. Ce prix n’est pas nécessairement déterminé par les coûts exposés par le vendeur, puisqu’il est susceptible d’être influencé par de multiples facteurs, dont l’équilibre entre l’offre et la demande à l’époque de la vente. En d’autres termes, les coûts exposés par les autorités françaises pendant douze ans dans le cadre de l’achat du terrain non aménagé (voir point 17 ci-dessus) et de son aménagement ne représentent pas nécessairement sa valeur de marché au mois d’août 1987.

107    La Commission justifie son recours à une évaluation fondée sur les coûts exposés par les autorités françaises en avançant que, contrairement à son approche « systématique et logique » de l’article 87, paragraphe 1, CE telle qu’elle l’a ensuite exposée dans sa communication 97/C 209/03 concernant les éléments d’aide d’État contenus dans des ventes de terrains et de bâtiments par les pouvoirs publics, les autorités françaises n’ont pas vendu le terrain litigieux dans le cadre d’une procédure d’offre inconditionnelle et n’ont pas recouru à une évaluation indépendante du terrain litigieux lors de la vente à la requérante (voir points 77 et 85 ci-dessus). Dans ces circonstances, elle considère qu’elle pouvait, à juste titre, se fonder sur les coûts exposés par les autorités en question pour déterminer la valeur du terrain litigieux.

108    Or, le fait que les autorités françaises n’ont pas, en 1987, déterminé la valeur du bien par voie d’un appel d’offre ou sur la base d’une évaluation indépendante du terrain litigieux avant de le vendre à Scott ne dégage pas la Commission de sa propre obligation, lors de l’enquête dans le cadre de l’article 88, paragraphe 2, CE, de déterminer la valeur du bien sur la base de la méthode la plus fiable. En effet, contrairement à ce que la Commission soutient, elle n’a pas suivi l’approche systématique et logique énoncée dans la communication de 1997 mais a eu directement recours aux coûts historiques d’acquisition et d’aménagement du terrain litigieux exposés par les autorités françaises, sans avoir considéré l’opportunité de commander une évaluation indépendante (voir points 137 et 138 ci-après). 

109    Par ailleurs, même en supposant que la Commission était en droit de se fonder exclusivement sur les coûts exposés par les autorités concernées pour établir la valeur du terrain litigieux, le Tribunal considère que son approche de l’évaluation du terrain non aménagé est erronée en ce que, d’une part, elle a commis une seconde erreur de calcul à cet égard et que, d’autre part, elle s’est fondée sur des données imprécises quant aux coûts en question.

110    En premier lieu, dans la décision attaquée, la Commission constate que les 68 hectares en cause, « à l’époque des terrains agricoles, avaient déjà été acquis entre 1975 et 1987 par la ville [d’Orléans] pour un prix de 16 FRF/m2 (2,4 euros/m2), soit au total 10,9 millions de FRF (1,7 million d’euros) » (considérant 15). Elle se fonde, à cet égard, sur le point 2.2 du procès-verbal des délibérations du conseil municipal de la ville d’Orléans du 27 mai 1994. Toutefois, il ressort du procès-verbal en cause que la somme de 10,9 millions de FRF correspondait au coût du terrain non aménagé de 48 hectares cédé à Scott et non pas au terrain de 68 hectares. Dès lors, contrairement au calcul de la Commission, le coût du terrain non aménagé était de 23 FRF/m2, à savoir presque 50 % de plus que 16 FRF/m2. La Commission a ainsi commis une erreur de calcul.

111    Il en découle que la Commission n’aurait pas dû, en calculant le montant de l’avantage reçu par Scott, ventiler la somme de 10,9 millions de FRF entre le site de 48 hectares et le site de 20 hectares (considérant 170 de la décision attaquée), mais l’affecter dans son intégralité au site de 48 hectares. Le fait que cette erreur joue en faveur de Scott n’a pas pour effet de la rendre excusable. La Commission était obligée d’établir, dans la mesure du possible, la véritable valeur de l’aide en cause et d’en ordonner la récupération (voir la jurisprudence rappelée au point 95 ci-dessus).

112    Il s’ensuit que la Commission s’est trompée également dans la mesure où elle a considéré que son évaluation du terrain non aménagé de 16 FRF/m2 était corroborée par le prix moyen d’achat des 68 hectares de 15 FRF/m2 indiqué par les autorités françaises lors de la procédure administrative (considérant 15 de la décision attaquée et note en bas de page n° 8).

113    Si la Commission n’avait pas erronément conclu que le coût des 48 hectares était de 16 FRF/m2, il est permis de supposer qu’elle aurait remarqué la divergence importante entre les chiffres de 15 FRF/m2 et de 23 FRF/m2 et, en conséquence, se serait interrogée sur la fiabilité des informations concernant le coût du terrain non aménagé.

114    En second lieu, s’agissant de l’utilisation de données imprécises quant au coût du terrain non aménagé, la Commission s’est fondée, à tout le moins en partie, sur le prix moyen de 15 FRF/m2 payé par les autorités françaises pour les 68 hectares de terrain non aménagé achetés le 1er juillet 1975 (30 hectares), le 13 décembre 1984 (32,5 hectares) et le 18 septembre 1987 (5,5 hectares). En effet, la Commission a indiqué à plusieurs reprises lors de l’audience qu’elle avait retenu le prix moyen de 15 FRF/m2 comme valeur du terrain non aménagé.

115    Toutefois, la Commission n’a pas vérifié le prix d’achat de chacune des parcelles en cause. En revanche, elle a utilisé un prix moyen composé des coûts d’achat en 1975, 1984 et 1987, ce qui n’aboutit pas nécessairement à la valeur de marché du terrain non aménagé en 1987. En particulier, et contrairement à ce que soutient la Commission (voir point 78 ci-dessus), les coûts des parcelles de 30 et de 32,5 hectares, achetées respectivement en 1975 et 1984, ne représentent pas nécessairement la valeur du terrain non aménagé en 1987 selon le principe de l’investisseur privé. À cet égard, il convient de relever qu’il ressort de la communication de la Commission 97/C 209/03 concernant les éléments d’aide d’État contenus dans des ventes de terrains et de bâtiments par les pouvoirs publics que « [l]es coûts initiaux supportés par les pouvoirs publics pour l’acquisition d’un terrain et d’un bâtiment sont un paramètre de la valeur de marché sauf s’il s’est écoulé un laps de temps significatif entre l’achat et la vente de ce terrain et de ce bâtiment » [point II 2, sous d)]. Même en utilisant l’approche de la Commission telle qu’elle l’a exposée dans cette communication, la Commission n’était certainement pas en droit de recourir aux coûts d’achat de la parcelle achetée en 1975.

116    En revanche, le prix d’achat des 5,5 hectares achetés à l’époque de la vente litigieuse en 1987 aurait pu fournir une indication du prix de l’époque par mètre carré du terrain non aménagé en question sous réserve, bien entendu, de la vérification des circonstances, ainsi que des conditions afférentes à l’achat en question. Or, au lieu d’essayer d’obtenir cette information (voir, à cet égard, points 151 à 153 ci-après), la Commission s’est appuyée sur des informations secondaires.

117    De plus, le dossier n’indique pas quelle partie des 68 hectares a été vendue à Scott et, en particulier, quel est le rapport entre les trois parcelles achetées en 1975, 1984 et 1987 et les 48 hectares achetés par Scott en 1987.

118    La Commission souligne à plusieurs reprises dans ses écritures (voir point 79 ci-dessus), et en particulier dans ses réponses aux questions du Tribunal, que le chiffre de 10,9 millions de FRF mentionné dans le procès-verbal des délibérations du conseil municipal de la ville d’Orléans du 27 mai 1994 a trait à la valeur initiale « fort modérée » du terrain non aménagé de 48 hectares plutôt qu’à son prix. Mis à part le fait que la Commission a erronément considéré dans la décision attaquée que le montant de 10,9 millions de FRF se rapportait aux 68 hectares (voir point 110 ci-dessus), il convient de relever que le point 2.2 dudit procès-verbal constitue, en fait, un résumé très bref et sans explication détaillée du « coût de l’opération », notamment du montant de 10,9 millions de FRF pour l’achat du terrain non aménagé, qui était la « valeur initiale du foncier ». La Commission elle-même a indiqué dans la décision attaquée qu’il s’agissait du « prix d’achat » ou du « coût » du terrain non aménagé pour les autorités françaises (considérants 20, 157, 161 et 170).

119    En effet, la Commission ne disposait d’aucune indication concernant les circonstances dans lesquelles les trois parcelles formant un total de 68 hectares avaient été achetées par la ville d’Orléans. Les termes contractuels de ces achats restent également inconnus. En particulier, la Commission ne savait pas si chacune de ces parcelles avait été acquise par négociation ou à la suite d’un ordre d’expropriation pour cause d’utilité publique. S’il s’agit de cette dernière hypothèse, il est possible que le montant de 10,9 millions de FRF ait compris une indemnité d’expropriation pour les anciens propriétaires de ces terrains, y compris pour la cessation des activités agricoles sur les terrains en cause, ou d’autres coûts d’achat pour l’État, qui vont au-delà de la valeur de marché véritable du terrain non aménagé.

120    De surcroît, il convient d’observer qu’il ressort du dossier que la Commission a méconnu certains faits pertinents quant à l’évaluation des aménagements sur le terrain en cause. En particulier, selon l’accord Scott (voir points 2 et 3 ci-dessus), il était prévu que Scott payerait un prix de 31 millions d’euros pour le terrain litigieux, y compris la construction d’une usine de 30 000 m2. Or, selon le procès-verbal des délibérations du conseil municipal de la ville d’Orléans du 27 mai 1994, une « usine de 54 000 m2 environ a été construite (au lieu de 30 000 m2 initialement prévus) ». Cette divergence n’a pas été mentionnée dans la décision attaquée et n’a apparemment pas été prise en compte par la Commission dans l’examen du dossier. Si cette dernière avait tenu compte de ce fait, il est permis de supposer qu’elle aurait mis en cause la fiabilité de son évaluation du terrain litigieux par mètre carré.

121    En outre, il ressort de l’article 4 de l’accord Scott que la requérante s’est engagée à acheter le terrain litigieux pour 31 millions de FRF et que Sempel effectuerait des travaux sur le site pour un « montant maxim[al] de 80 [millions de FRF] ». Toutefois, selon le bilan de liquidation de Sempel envoyé par les autorités françaises à la Commission le 6 octobre 1999, le coût total supporté par Sempel pour les opérations d’aménagement du terrain s’est élevé à 140,4 millions de FRF. Le fait que les travaux d’aménagement ont coûté 140,4 millions de FRF au lieu du « montant maxim[al] de 80 [millions de FRF] » prévu par l’accord Scott, à savoir un dépassement de 75,5 %, aurait dû conduire la Commission à comprendre que les coûts supportés par Sempel ne représentaient pas nécessairement un élément reflétant la valeur de marché du terrain litigieux. À cet égard, et ainsi que Scott le reproche à la Commission, le bilan de liquidation de Sempel ne figure pas dans la décision d’ouverture de la procédure. La Commission aurait dû, à tout le moins, interroger Scott quant à la divergence entre le chiffre de 140,4 millions de FRF et le chiffre de 80 millions de FRF prévu par l’accord Scott.

122    Le dossier est muet sur le point de savoir si le dépassement des coûts ainsi exposés par Sempel résulte de la construction d’une usine presque deux fois plus grande que celle prévue à l’origine, ou s’il résulte de dépassements de coûts résultant de l’inefficacité de Sempel, ou encore de gaspillages non constitutifs d’une augmentation de la valeur du terrain. Interrogées sur ce point par le Tribunal lors de l’audience, les parties n’ont pas été en mesure de préciser si l’augmentation de la taille de l’usine résultait d’une volonté de conférer une aide d’État encore plus importante à Scott ou d’une quelconque erreur dans la construction de l’usine.

123    Il résulte de ce qui précède que la détermination par la Commission de la valeur de marché du terrain litigieux en 1987 était entachée d’erreurs.

–       Sur les informations ignorées par la Commission

124    Il convient de relever que, à la fin de la procédure formelle d’examen prévue à l’article 88, paragraphe 2, CE, soit au début de l’année 2000, la Commission était ou aurait dû être informée de plusieurs autres indications de la valeur de marché du terrain litigieux, y compris de l’existence d’autres évaluations de celui-ci. Toutefois, et malgré le fait qu’elle ne disposait que d’informations imprécises concernant les coûts d’achat du terrain non aménagé, la Commission ne s’est pas interrogée quant à l’éventuelle pertinence des indications en cause.

125    Tout d’abord, dans la lettre du 24 décembre 1999 qui aurait dû être prise en considération par la Commission (voir points 51 à 63 ci-dessus), Scott a invoqué une évaluation du terrain non aménagé de 5,5 FRF/m2 établie par l’administration fiscale française à l’occasion de la vente du terrain par la ville d’Orléans à Sempel en 1987. Les autorités françaises ont, elles aussi, fait référence à cette évaluation dans la lettre du 21 février 2000 (voir point 13 ci-dessus). En 1993, l’administration aurait retenu cette évaluation quand Scott a fait l’objet d’un contrôle fiscal. Certes, et comme il a été indiqué par la Commission (voir point 82 ci-dessus), il ne va pas de soi que la valeur retenue dans le cadre d’un contrôle fiscal démontre la valeur marchande d’un terrain. Toutefois, il s’agit, à première vue, d’une évaluation du terrain non aménagé réalisée à l’époque par une autorité indépendante et sur laquelle la Commission aurait dû, à tout le moins, s’interroger. Or, la décision attaquée ne fait aucune référence au chiffre de 5,5 FRF/m2.

126    Scott a également invoqué, dans la même lettre, une expertise du terrain litigieux par le cabinet d’experts Galtier qui, en 1996, à une époque où la Commission n’avait pas encore ouvert l’enquête concernant les prétendues aides octroyées à Scott, aurait évalué à 40,6 millions de FRF le prix du terrain litigieux que Scott avait acheté à 31 millions de FRF à Sempel en 1987. Il convient de rappeler que, dans la décision attaquée, la Commission a estimé que ce terrain, tel qu’il avait été aménagé, valait 70,588 millions de FRF (voir point 20 ci-dessus). Scott a proposé, dans sa lettre du 24 décembre 1999, de fournir une copie du rapport Galtier à la Commission.

127    De plus, Scott a fait référence à une évaluation par le commissaire aux apports de Scott et de KC, désigné par le président du Tribunal de commerce de Nanterre, à qui il avait été demandé, conformément à la loi, d’attribuer une valeur marchande aux seuls actifs vendus à P & G (voir point 14 ci-dessus). Le commissaire aux apports aurait attribué une valeur encore plus faible que le cabinet Galtier aux actifs en cause. Scott a joint deux tableaux à sa lettre du 24 décembre 1999 qui résument les évaluations de plusieurs des actifs en cause.

128    Il convient d’ajouter que, dans la lettre du 21 février 2000, les autorités françaises ont également invoqué lesdites évaluations et ont joint les mêmes tableaux que ceux annexés à la lettre de Scott du 24 décembre 1999. Or, la Commission n’a ni demandé aux autorités françaises de fournir lesdites évaluations, ni interrogé ces mêmes autorités quant aux circonstances qui avaient donné lieu à leur établissement.

129    La Commission indique plusieurs raisons pour lesquelles elle n’a pas considéré que ces évaluations étaient pertinentes en l’espèce.

130    Dans ses écritures, ainsi que dans sa réponse aux questions posées par le Tribunal, elle fait valoir que Scott n’a pas avancé d’arguments dans le présent recours concernant l’absence des rapports en cause et que, en conséquence, le Tribunal ne peut annuler la décision attaquée à ce titre. De même, elle soutient que la requérante a invoqué l’évaluation par l’administration fiscale française seulement dans sa réplique et que son argument à cet égard serait donc irrecevable (voir point 81 ci-dessus).

131    Or, Scott a soulevé une erreur relative à l’appréciation par la Commission de la valeur du terrain litigieux et a souligné le manque d’attention de la Commission dans son examen du dossier (voir points 64 à 71 ci-dessus). La détermination de la valeur du terrain litigieux ayant été mise en cause, il incombe au Tribunal d’effectuer un contrôle entier sur cette question (voir point 91 ci-dessus). En outre, la requérante était en droit d’apporter des précisions à cet égard dans sa réplique, y compris en invoquant l’évaluation du terrain non aménagé par l’administration fiscale française.

132    Selon la Commission, l’existence de ces évaluations a été soulevée trop tardivement dans la procédure. Elle n’aurait même pas reçu les preuves documentaires nécessaires. Cette argumentation ne saurait être retenue. La Commission ayant permis à la délégation française de soumettre des observations après la réunion du 7 décembre 1999, elle était obligée d’examiner pleinement lesdites observations. La Commission, conformément à son obligation d’examen diligent et impartial d’un dossier dans le cadre de l’article 88 CE, aurait dû examiner les informations en cause et demander la production de ces évaluations que Scott avait proposé de soumettre.

133    La Commission prétend que les évaluations en cause n’auraient pas été utiles. D’une part, les aménagements auraient été « taillés sur mesure » pour Scott et les évaluations en cause ne constitueraient pas une base fiable pour le calcul de la valeur de l’aide octroyée à Scott. D’autre part, lesdites évaluations auraient été réalisées plusieurs années après la vente litigieuse et, dès lors, elles n’auraient pas pu indiquer, de manière fiable, la valeur du terrain litigieux.

134    Bien que les évaluations en cause n’aient pas été effectuées au moment de la vente litigieuse, elles pourraient être utiles en ce qu’elles constituent les seules évaluations, apparemment indépendantes, qui visent à fixer la valeur marchande du terrain litigieux en utilisant des méthodes d’évaluation communément acceptées. La Commission ne conteste pas que ces évaluations aient été effectuées par des experts indépendants et ne remet pas en cause les méthodes utilisées par le cabinet Galtier et le commissaire aux apports. Dans ces circonstances, la Commission aurait dû au moins examiner le contenu desdites estimations afin d’établir leur valeur probante.

135    Il importe de rappeler, à cet égard, que la phase d’examen visée à l’article 88, paragraphe 2, CE est destinée à permettre à la Commission d’avoir une information complète sur l’ensemble des données de l’affaire (voir arrêt Sytraval, point 56 supra, point 38, et la jurisprudence citée). Dès lors, la Commission doit s’entourer de tous les avis nécessaires pour être complètement éclairée sur l’ensemble des données de l’affaire avant de prendre sa décision (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 20 mars 1984, Allemagne/Commission, 84/82, Rec. p. 1451, point 13, et Sytraval, point 56 supra, point 39). Or, en l’espèce, la Commission a omis d’examiner des avis qui pourraient être probants pour établir la valeur du terrain litigieux.

136    Il convient d’ajouter que le fait que les autres évaluations du terrain litigieux ont été portées à la connaissance de la Commission avant l’adoption de la décision attaquée ne démontre ni que le montant de 31 millions de FRF payé par Scott était la valeur du marché ni que l’évaluation de la Commission était incorrecte. Ces autres évaluations sont pertinentes en ce que, au moment de l’adoption de la décision attaquée, la Commission était informée d’une série d’évaluations du terrain litigieux qui étaient contradictoires avec l’évaluation qu’elle avait effectuée. Étant donné que la Commission n’a pas pris les mesures nécessaires pour éliminer l’incertitude quant à cette évaluation, le Tribunal considère qu’elle n’a pas mené son enquête au titre de l’article 88, paragraphe 2, CE conformément à son obligation d’examen diligent et impartial.

137    Mis à part le fait que la Commission aurait dû demander la production des évaluations en cause, elle aurait pu utiliser d’autres moyens pour obtenir des informations nécessaires en l’espèce. Il convient de relever à cet égard que la Commission peut, sans d’ailleurs y être tenue, s’adjoindre le concours d’experts extérieurs (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 27 février 1997, FFSA e.a./Commission, T‑106/95, Rec. p. II‑229, point 102, et du 25 juin 1998, British Airways e.a. et British Midland Airways/Commission, T‑371/94 et T‑394/94, Rec. p. II‑2405, point 72). Dès lors, la Commission aurait pu ordonner une expertise concernant la valeur des terrains dans la localité en cause au mois d’août 1987. Une telle expertise aurait pu être particulièrement utile en l’espèce au vu du caractère aléatoire que peut revêtir la détermination, par nature rétrospective, du prix de marché de terrains par la Commission (voir point 93 ci-dessus).

138    Bien qu’une évaluation par un expert ait nécessairement eu lieu plus de dix ans après la vente litigieuse, un expert immobilier local, qui connaissait le marché en 1987, et en particulier les ventes de terrains équivalents dans des conditions normales de marché, aurait pu éclairer la Commission quant à l’existence ou non d’une correspondance entre de telles indications et la valeur estimée par la Commission.

139    Il importe également de rappeler que Scott et la République française, par leurs lettres respectives du 24 décembre 1999 et du 21 février 2000, ont informé la Commission que le terrain litigieux avait été vendu par Scott/KC à P & G en 1998 pour 27,6 millions de FRF (4,2 millions d’euros) afin de soutenir leur position selon laquelle le terrain litigieux valait 31 millions de FRF en 1987. La Commission ne conteste pas que la vente à P & G a eu lieu dans les conditions normales du marché. Une telle vente, quelques années après la vente litigieuse, aurait pu être un indicateur de la valeur du terrain litigieux.

140    Or, la Commission n’a même pas considéré qu’il y avait lieu de vérifier l’exactitude de ce chiffre (considérant 163 de la décision attaquée). La Commission a expliqué que, au vu des pertes liées à l’exploitation du site et de sa décision de fermer l’usine en janvier 1998, KC était prête à accepter un prix de vente inférieur. En particulier, KC avait déjà investi dans le site en question de sorte que ces coûts devaient, selon la Commission, être considérés avoir été versés à fonds perdus. KC se trouvait donc, en 1998, dans une situation très différente par rapport à celle des collectivités en 1987, qui savaient déjà que leur investissement se ferait au prix d’une perte de quelque 60 millions de FRF (9,2 millions d’euros) et les prix ne seraient dès lors pas comparables (considérants 164 à 166 de la décision attaquée).

141    Il convient de rappeler à cet égard que, selon la Commission, le terrain litigieux valait 70,588 millions de FRF en 1987. Même en supposant que KC ait été prête à accepter un prix bas pour ce terrain, il convient de relever que KC a, selon l’analyse de la Commission, vendu le terrain avec une perte de 42,9 millions de FRF, à savoir une perte correspondant à 60 % de la valeur du terrain litigieux. Dans ces circonstances, la Commission aurait dû examiner plus sérieusement le prix de vente de 27,6 millions de FRF en 1998, qui était, en tout état de cause, relativement proche de la valeur du terrain litigieux selon Scott. En effet, le fait que KC a reçu moins pour la vente du terrain litigieux en 1998 que ce que Scott avait payé en 1987, malgré l’augmentation générale des prix de l’immobilier, tend à rendre plus crédible le prix payé en 1987 par Scott comme prix de marché.

142    Il s’ensuit que la Commission a méconnu les informations qui auraient pu être utiles dans la détermination de la valeur de marché du terrain litigieux au mois d’août 1987.

–       Sur l’injonction de fournir des informations

143    La Commission soutient que, même si la valeur qu’elle a attribuée à l’avantage qui résultait du prix préférentiel du terrain litigieux était inexacte, elle était en droit, voire obligée, de la retenir en raison de la non-coopération et du manque d’informations plus précises de la part des autorités françaises. Dans ces circonstances, la Commission considère qu’elle était en droit d’adopter la décision sur la base des informations disponibles (considérants 97 à 99 de la décision attaquée).

144    Il ressort de la jurisprudence que la Commission est habilitée à adopter une décision sur le fondement des informations disponibles lorsqu’elle est confrontée à un État membre qui ne satisfait pas à son devoir de collaboration et qui s’abstient de lui fournir les informations que celle-ci lui a demandées pour examiner la compatibilité d’une aide avec le marché commun (arrêts de la Cour du 14 février 1990, France/Commission, C‑301/87, Rec. p. I‑307, ci-après l’« arrêt Boussac », point 22, et Allemagne et Pleuger Worthington/Commission, point 75 supra, point 26). Toutefois, avant de prendre une telle décision, la Commission doit respecter certaines exigences procédurales. En particulier, elle doit enjoindre à l’État membre de lui fournir, dans un délai déterminé, tous les documents, informations et données nécessaires pour l’adoption d’une décision conforme aux exigences de l’article 88 CE. Ce n’est que si l’État membre omet, nonobstant l’injonction de la Commission, de fournir les renseignements sollicités que celle-ci a le pouvoir de mettre fin à la procédure et de prendre la décision constatant la compatibilité ou l’incompatibilité de l’aide avec le marché commun sur la base des éléments dont elle dispose (arrêt Boussac, précité, points 19 et 22). Ces exigences ont été reprises à l’article 5, paragraphe 2, à l’article 10, paragraphe 3, et à l’article 13, paragraphe 1, du règlement n° 659/1999. Ainsi, il ressort en particulier de l’article 10, paragraphe 3, de ce règlement que la décision enjoignant à l’État membre concerné de fournir des informations doit préciser la « nature des informations requises ».

145    Il convient également de rappeler que, selon l’article 6, paragraphe 1, du règlement n° 659/1999, « [l]a décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen récapitule les éléments pertinents de fait et de droit, inclut une évaluation préliminaire, par la Commission, de la mesure proposée visant à déterminer si elle présente le caractère d’une aide et expose les raisons qui incitent à douter de sa compatibilité avec le marché commun ». Par cette décision et sa publication au Journal officiel de l’Union européenne, l’État membre et les autres parties intéressées sont informés des faits sur lesquels la Commission entend fonder sa décision. Il en résulte que, si ces parties considèrent que certains faits repris dans la décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen sont inexacts ou erronés, ils doivent le faire savoir à la Commission durant la procédure administrative, sous peine de ne plus pouvoir contester ces faits dans le cadre de la procédure contentieuse (voir, en ce sens, en ce qui concerne l’État membre, arrêt de la Cour du 14 septembre 1994, Espagne/Commission, C‑278/92 à C‑280/92, Rec. p. I‑4103, point 31).

146    Or, conformément aux principes jurisprudentiels et réglementaires énoncés au points 144 et 145 ci-dessus, en l’absence d’informations contraires de la part des parties concernées, la Commission est habilitée à se fonder sur les faits, même erronés, dont elle dispose au moment de l’adoption de la décision finale, dans la mesure où les éléments de fait concernés ont fait l’objet d’une injonction de la Commission vis-à-vis de l’État membre de lui fournir les informations nécessaires. Si, en revanche, elle s’abstient d’enjoindre à l’État membre de lui transmettre des informations sur les faits qu’elle entend retenir, elle ne saurait, par la suite, justifier d’éventuelles erreurs de fait en faisant valoir qu’elle était fondée, au moment d’arrêter la décision mettant fin à la procédure formelle d’examen, à ne retenir que les éléments d’information dont elle disposait alors (arrêt du Tribunal du 19 octobre 2005, Freistaat Thüringen/Commission, T‑318/00, Rec. p. II‑4179, point 88).

147    Dès lors, si la Commission fonde une décision sur les informations disponibles concernant certains éléments de fait sans avoir, à cet égard, respecté les exigences procédurales reconnues par la jurisprudence et reprises dans le règlement n° 659/1999, le Tribunal peut exercer son contrôle sur la question de savoir si la prise en compte de ces éléments factuels a été susceptible de donner lieu à une erreur d’appréciation viciant la légalité de la décision attaquée (arrêt Freistaat Thüringen/Commission, point 146 supra, point 89).

148    De plus, le droit de la Commission de prendre sa décision sur des informations disponibles présuppose, cependant, que les informations dont elle dispose soient fiables.

149    En effet, la non-coopération d’un État membre n’a pas pour conséquence que le comportement de la Commission échappe à tout contrôle de la part du juge communautaire. La Commission doit utiliser tous ses pouvoirs pour obtenir, dans la mesure possible, les informations en cause et agir avec diligence. Au vu du fait qu’un ordre de récupération tel que celui en cause en l’espèce a des effets sur des tiers, la Commission doit utiliser tous les pouvoirs mis à sa disposition afin d’éviter que la non-coopération de l’État membre concerné ait des conséquences négatives et injustifiées sur de tels tiers (voir point 59 ci-dessus).

150    En l’espèce, la Commission n’était pas en droit d’adopter une décision sur la base des renseignements disponibles conformément à la jurisprudence et en vertu de l’article 13 du règlement n° 659/1999, en ce que les parties lui ont communiqué des informations contraires qu’elle a refusé de prendre en compte (voir points 125 à 128 ci-dessus).

151    De plus, force est de constater que la Commission n’a pas utilisé son pouvoir d’injonction afin de demander certaines informations pertinentes concernant la valeur de l’aide en l’espèce. En particulier, il n’a jamais été enjoint aux autorités françaises, par voie de décision portant injonction de fournir des informations arrêtée en vertu de l’article 10, paragraphe 3, du règlement n° 659/1999, de fournir des informations précises concernant les acquisitions du terrain non aménagé par la ville d’Orléans (voir points 114 à 119 ci-dessus).

152    Par lettre du 2 mai 1999, la Commission a demandé, de manière précise, aux autorités françaises de « fournir les différents contrats de ventes passés (incluant en particulier les prix de cession) entre la ville d’Orléans et les six entreprises ayant acheté des terrains sur les 20 hectares restants [Scott n’a acheté que 48 des 68 hectares] ». Dans son injonction de fournir des informations du 8 juillet 1999, la Commission a effectivement repris cette dernière formulation à l’article 1er, sous d). En revanche, la Commission n’a jamais enjoint aux autorités françaises de fournir les contrats de vente concernant les acquisitions du terrain non aménagé par la ville d’Orléans ou de préciser quelle partie des 68 hectares avait été transférée à Scott. En outre, la Commission n’a pas demandé de précisions concernant le prix d’achat des trois parcelles formant un total de 68 hectares achetées en 1975, 1984 et 1987, à savoir l’ « information essentielle » selon le mémoire en défense de la Commission elle-même.

153    En effet, la Commission a précisé à plusieurs reprises lors de l’audience que le prix d’achat de la troisième tranche en 1987, à la même époque que la vente litigieuse, aurait pu donner une indication très utile de la valeur du terrain, tout en soulignant que la République française et la requérante étaient responsables du fait que la Commission n’avait pas plus d’informations à cet égard (voir points 78 et 83 ci-dessus). Toutefois, la Commission aurait pu enjoindre à la République française de fournir des informations précises à cet égard et elle n’était pas en droit de se fonder sur le coût du terrain non aménagé sans avoir préalablement enjoint à l’État membre de fournir ces informations.

154    La Commission a enjoint à la République française de fournir tous « les documents, informations et données utiles pour [lui] permettre […] d’examiner la compatibilité avec l’article 87 [CE] de mesures consenties à l’entreprise Scott ». Toutefois, une demande formulée de façon aussi générale n’est pas suffisamment précise au sens de l’article 10, paragraphe 3, du règlement n° 659/1999.

155    Il s’ensuit que la Commission n’était pas habilitée à adopter une décision sur le fondement des informations disponibles en vertu de l’article 13, paragraphe 1, du règlement n° 659/1999.

–       Conclusion

156    Enfin, il y a lieu de souligner, de façon générale, que, à la fin de la procédure prévue à l’article 88, paragraphe 2, CE, la Commission était ou aurait dû être au courant de plusieurs indications divergentes quant à la valeur de marché du terrain litigieux. En ce qui concerne le terrain non aménagé, elle avait été informée par les autorités françaises du prix moyen d’achat de 15 FRF/m2. Elle a considéré que ce montant corroborait son calcul erroné, sur le fondement du procès-verbal des délibérations du conseil municipal de la ville d’Orléans du 27 mai 1994, d’un prix d’achat de 16 FRF/m2 (voir point 112 ci-dessus). En se fondant sur ce procès-verbal, elle aurait dû calculer une valeur de 23 FRF/m2 (voir points 110 à 112 ci-dessus). La Commission a également été informée d’une évaluation du terrain non aménagé de 5,5 FRF/m2 établie par l’administration fiscale française (voir point 125 ci-dessus). Il convient de relever à titre surabondant que, dans le cadre du présent recours, la Commission invite le Tribunal à tenir compte du fait qu’il ressort de l’offre initiale de la ville d’Orléans à la requérante que le terrain non aménagé valait en fait 40 FRF/m2 (voir point 79 ci-dessus).

157    S’agissant du terrain aménagé, il est constant que Sempel l’a vendu à Scott au prix de 31 millions de FRF. Le cabinet Galtier aurait évalué à un prix de 40,6 millions de FRF le terrain litigieux en 1996 et le commissaire aux apports lui aurait attribué une valeur encore plus faible (voir points 126 et 127 ci-dessus). Ensuite, le site aurait été vendu par KC à P & G en 1998 pour 27,6 millions de FRF (voir point 139 ci-dessus). Toutefois, comme il a été indiqué ci-dessus, la Commission n’a pas examiné ces évaluations et s’est bornée à se fonder sur les coûts pour l’État membre en estimant dans la décision attaquée que le terrain litigieux valait 70,588 millions de FRF.

158    Dans ces circonstances, le Tribunal considère qu’il y avait une incertitude importante quant à la valeur du terrain litigieux et que la Commission n’a pas mené la phase d’examen visée à l’article 88, paragraphe 2, CE d’une manière diligente et, en particulier, n’a pas procédé à un examen suffisamment approfondi de la valeur du terrain litigieux. De plus, il convient de relever que, au vu du temps qui s’était écoulé entre la date de la vente litigieuse et la décision attaquée, et plus précisément de l’imposition des intérêts sur le montant à récupérer, les conséquences des erreurs de la Commission sont particulièrement importantes pour le bénéficiaire de l’aide.

159    Partant, il y a lieu d’accueillir le quatrième moyen et d’annuler l’article 2 de la décision attaquée dans la mesure où il concerne l’aide accordée sous la forme du prix préférentiel du terrain litigieux, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres moyens et arguments soulevés par la requérante, dont la recevabilité de l’argument avancé concernant l’emploi d’un taux d’intérêt composé aux fins du calcul de la valeur actualisé de l’aide (voir point 31 ci-dessus).

 Sur les dépens

160    Dans son arrêt du 10 avril 2003, Scott/Commission, point 28 supra, le Tribunal a réservé les dépens.

161    Dans l’arrêt du 6 octobre 2005, Scott/Commission, point 30 supra, la Cour a jugé que chaque partie supporterait ses propres dépens afférents à la procédure de pourvoi.

162    Il appartient donc au Tribunal de statuer, dans le présent arrêt, sur l’ensemble des dépens afférents aux procédures devant le Tribunal.

163    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La défenderesse ayant succombé en l’essentiel de ses conclusions, il y a lieu de la condamner à supporter, outre ses propres dépens, les dépens exposés par la requérante, conformément aux conclusions de cette dernière.

164    La République française supportera ses propres dépens, conformément à l’article 87, paragraphe 4, premier alinéa, du règlement de procédure.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

déclare et arrête :

1)      L’article 2 de la décision 2002/14/CE de la Commission, du 12 juillet 2000, concernant l’aide d’État mise à exécution par la France en faveur de Scott Paper SA/Kimberly-Clark, est annulé dans la mesure où il concerne l’aide accordée sous la forme du prix préférentiel d’un terrain visé à son article 1er.

2)      La Commission supportera ses propres dépens et ceux exposés par la requérante afférents aux procédures devant le Tribunal.

3)      La République française supportera ses propres dépens afférents aux procédures devant le Tribunal.

Cooke

García-Valdecasas

Labucka

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 29 mars 2007.

Le greffier

 

      Le président

E. Coulon

 

      J. D. Cooke


* Langue de procédure : l’anglais.