Language of document : ECLI:EU:T:2000:258

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

8 novembre 2000 (1)

«Fonctionnaires - Rémunération - Affectation dans un pays tiers - Adaptation des coefficients correcteurs - Effet rétroactif - Récupération du trop-perçu»

Dans l'affaire T-44/97,

Piera Ghignone, Helga Glassl, Colette Jemaa, Enrica Massucco,

Giovanni Di Maio, René Franquinet, Klaus-Dietrich Jagstaidt, Michel Perillat, fonctionnaires du Conseil de l'Union européenne, demeurant à Genève (Suisse),

Jacques Brodin, fonctionnaire du Conseil de l'Union européenne, demeurant à Tannay (Suisse),

Servatius van Thiel, fonctionnaire du Conseil de l'Union européenne, demeurant à Nyon (Suisse),

Ettore Zamproni, fonctionnaire du Conseil de l'Union européenne, demeurant à Bellevue (Suisse),

Monique Weygandt, Léo Geboers, David Hollister, fonctionnaires du Conseil de l'Union européenne, demeurant à New York (États-Unis d'Amérique),

représentés initialement par Mes J.-N. Louis, T. Demaseure et A. Tornel, avocats au barreau de Bruxelles, puis par Mes Louis et Demaseure, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de la Société de gestion fiduciaire SARL, 13, avenue du Bois,

parties requérantes,

contre

Conseil de l'Union européenne, représenté par M. J.-P. Jacqué, directeur au service juridique, et Mme T. Blanchet, membre du même service, en qualité d'agents, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. E. Uhlmann, directeur général de la direction des affaires juridiques de la Banque européenne d'investissement, 100, boulevard Konrad Adenauer,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d'annulation des bulletins de rémunération des requérants pour les mois de mai et de juin 1996,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE

DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (deuxième chambre),

composé de MM. J. Pirrung, président, J. Azizi et A. Potocki, juges,

greffier: M. G. Herzig, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de la procédure orale du 5 avril 2000,

rend le présent

Arrêt

Cadre juridique et factuel

1.
    L'annexe X du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après le «statut») contient des dispositions particulières et dérogatoires applicables aux fonctionnaires des Communautés européennes affectés dans un pays tiers. Selon l'article 11 de cette annexe, la rémunération de ces fonctionnaires est payée enfrancs belges en Belgique et affectée du coefficient correcteur applicable à la rémunération des fonctionnaires affectés dans cet État. Ce coefficient s'élève toujours à 100 (voir l'article 3, paragraphe 3, quatrième tiret, de l'annexe XI du statut).

2.
    Cependant, l'article 12, premier alinéa, de l'annexe X du statut dispose:

«Sur demande du fonctionnaire, l'autorité investie du pouvoir de nomination peut décider de payer la rémunération, en tout ou en partie, en monnaie du pays d'affectation. Elle est alors affectée du coefficient correcteur du lieu d'affectation et convertie selon le taux de change correspondant.»

3.
    L'article 13 de l'annexe X du statut prévoit:

«En vue d'assurer dans toute la mesure du possible l'équivalence du pouvoir d'achat des fonctionnaires indépendamment de leur lieu d'affectation, le Conseil fixe tous les six mois les coefficients correcteurs visés à l'article 12.

[...]

Toutefois, lorsque la variation du coût de la vie mesurée d'après le coefficient correcteur et le taux de change correspondant s'avère supérieure à 5 % depuis la dernière adaptation pour un pays donné, la Commission décide des mesures d'adaptation intermédiaire de ce coefficient et en informe le Conseil dans les plus brefs délais.»

4.
    Le coefficient correcteur est un facteur mathématique reflétant le coût de la vie dans le lieu d'affectation par rapport au coût de la vie à Bruxelles. Il est égal à la parité économique (c'est-à-dire le rapport entre le coût, à une période déterminée, d'un même panier de biens et de services en devises locales dans le pays d'affectation et en francs belges à Bruxelles) divisée par le taux de change officiel et multipliée par 100.

5.
    Deux types d'enquête sont menés en vue d'établir les parités économiques, à savoir des enquêtes «spatiales» de prix («place to place») et des enquêtes «temporelles» («time to time»). Les enquêtes «spatiales» sont réalisées tous les trois à six ans, par l'Office statistique des Communautés européennes (Eurostat). Elles visent à recueillir le prix d'un certain nombre de produits et de services correspondant à la «structure de consommation moyenne» des ménages déterminée par une enquête spécifique sur le budget des familles des fonctionnaires en poste au lieu d'affectation concerné à ce moment donné. Eurostat décompose le total des dépenses en groupes majeurs, tels que les produits alimentaires et les boissons, l'habillement, les transports, etc., et, à l'intérieur de ces groupes, en «positions élémentaires», correspondant à différents types de produits ou de services, tels que le riz, le café, les machines à laver, la réparation de chaussures, etc. Des prix deproduits et de services considérés comme représentatifs sont relevés dans des points de vente du lieu d'affectation et comparés aux prix des mêmes produits et services à Bruxelles (voir la brochure explicative sur les coefficients correcteurs applicables à la rémunération des fonctionnaires de la Commission affectés dans les pays tiers, établie par Eurostat et la direction générale «Relations extérieures: Europe et nouveaux États indépendants, politique étrangère et de sécurité commune, service extérieur» de la Commission en août 1996, p. 6 et 7).

6.
    Les enquêtes «temporelles» sont destinées à prendre en compte régulièrement l'évolution du coût de la vie entre chaque enquête «spatiale». Dans les pays disposant d'un office statistique fiable et développé (tels que les États-Unis, le Japon, la Suisse, etc.), ce dernier envoie régulièrement à Eurostat des indices de prix détaillés qui permettent d'actualiser les résultats de la dernière enquête «spatiale».

7.
    Eurostat est assistée par une association sans but lucratif de droit luxembourgeois, dénommée EuroCost, qui a été créée par la Commission avec pour principale activité le calcul des coefficients correcteurs. EuroCost assure, notamment, les enquêtes sur le terrain et la majeure partie du travail informatique. La qualité des travaux d'EuroCost est contrôlée par Eurostat.

8.
    Conformément au système décrit ci-dessus, l'équivalence du pouvoir d'achat entre les différents lieux d'affectation et Bruxelles ne peut être mesurée qu'a posteriori. L'adaptation des coefficients correcteurs a donc un effet rétroactif.

9.
    Le 5 octobre 1995, le Conseil a adopté le règlement (CE, Euratom, CECA) n° 2356/95, portant fixation des coefficients correcteurs applicables à partir du 1er janvier 1994 aux rémunérations des fonctionnaires des Communautés européennes affectés dans les pays tiers (JO L 241, p. 1).

10.
    Le 25 mars 1996, le Conseil a adopté les règlements (Euratom, CECA, CE) nos 577/96, 578/96 et 579/96, portant fixation des coefficients correcteurs applicables, respectivement, à partir du 1er juillet 1994, du 1er janvier 1995 et du 1er juillet 1995, aux rémunérations des fonctionnaires des Communautés européennes affectés dans les pays tiers (JO L 83, p. 1, 4 et 7, ci-après les «règlements litigieux»).

11.
    Les règlements litigieux ont été adoptés sur la base de nouvelles enquêtes «spatiales» effectuées en 1993. Les coefficients correcteurs fixés pour New York, à partir du 1er juillet 1994, et pour la Suisse, à partir du 1er juillet 1995, ont connu une baisse sensible par rapport aux coefficients antérieurs.

12.
    Conformément au règlement n° 2356/95 et aux règlements litigieux, le coefficient correcteur applicable aux rémunérations des fonctionnaires affectés en Suisse a évolué comme suit:

à partir du:        1.1.1994            135,84

            1.7.1994            134,02

            1.1.1995            134,55

            1.7.1995            119,65

13.
    Selon les mêmes textes, le coefficient correcteur applicable aux rémunérations des fonctionnaires affectés à New York a été fixé comme suit:

à partir du:        1.1.1994            122,73

            1.7.1994             98,12

            1.1.1995             93,63

            1.7.1995             83,51

14.
    L'article 2, troisième et quatrième alinéas, des règlements litigieux prévoit la récupération du trop-perçu de rémunération dans les termes suivants:

«Pour la période comprise entre le 1er juillet 1995 et la date de la décision du Conseil fixant les coefficients correcteurs applicables à partir du 1er juillet 1995, les institutions procéderont aux ajustements rétroactifs négatifs des rémunérations en cas de baisse due à ces coefficients correcteurs.

Ces ajustements rétroactifs impliquant une récupération du trop-perçu ne pourront toutefois porter que sur une période de six mois au maximum précédant la décision de fixation, et cette récupération pourra s'étaler sur une période de douze mois au maximum à compter de la date de cette décision.»

15.
    Les fonctionnaires du Conseil affectés dans un pays tiers sont informés de la possibilité, en cas de baisse des coefficients correcteurs, de la récupération du trop-perçu tant par une note qui leur est adressée par l'autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l'«AIPN») lors de leur affectation que par l'indication suivante, figurant depuis juillet 1995 sur leurs bulletins de rémunération:

«Conformément à l'article 12 de l'annexe X du statut, les coefficients correcteurs applicables dans les pays tiers sont fixés tous les six mois sur proposition de la Commission. En vertu des dispositions de l'article 13, il en résulte des ajustements rétroactifs (positifs ou négatifs) de la rémunération reprise sur ce décompte. En conséquence, ces ajustements conduiront à des rappels en cas de hausse ou à des récupérations du trop-perçu en cas de baisse.»

16.
    L'article 12, paragraphe 2, des dispositions générales d'exécution de l'annexe X du statut, adoptées par le Conseil le 19 décembre 1988 (non publiées), prévoit que, sauf dans des cas dûment justifiés, les décisions de l'AIPN relatives au paiement total ou partiel des rémunérations dans la monnaie du pays d'affectation ne peuvent être modifiées, sur demande du fonctionnaire, introduite au moins deux mois à l'avance, qu'au 1er janvier et au 1er juillet.

17.
    Les requérants sont des fonctionnaires du Conseil de l'Union européenne affectés, les uns, au bureau de liaison de Genève, les autres, à celui de New York. Ils avaient opté pour le paiement d'une partie importante de leur rémunération en monnaie du pays d'affectation.

18.
    Ayant appris qu'une réduction des coefficients correcteurs était envisagée, les requérants affectés à New York ont demandé, en février 1996, que l'essentiel de leur salaire soit versé en francs belges à partir du mois de mars 1996. Le Conseil a fait droit à cette demande.

19.
    Les bulletins de rémunération du mois de mai 1996 des fonctionnaires affectés dans les pays tiers ont été établis en application des règlements litigieux. Lors de l'établissement des bulletins de rémunération des requérants du mois de juin 1996, il a été procédé à une retenue au titre de la récupération du trop-perçu, étalée sur une période de douze mois.

20.
    Le 21 juin 1996 les requérants affectés à Genève ont introduit une «demande de motivation en vue d'une réclamation». Ils ont demandé à être informés de façon complète et détaillée sur les éléments ayant amené l'AIPN à réviser le coefficient correcteur pour la Suisse à la baisse. Ils ont conclu: «Faute de quoi nous demandons de considérer cette communication comme une réclamation au titre de l'article 90, paragraphe 2, basée sur l'absence de motivation du bulletin de paiement et son annexe du mois de mai 1996 en ce qui concerne le nouveau montant figurant sous la rubrique 'coefficient correcteur‘ en liaison avec la partie de la rémunération payée en francs suisses.» Cette demande a été reçue par l'AIPN le 24 juin 1996.

21.
    Par note du 22 octobre 1996, le secrétaire général du Conseil a répondu que ses services n'avaient fait qu'appliquer les règlements litigieux. Il a ajouté:

«Suite à ce qui précède, je regrette de devoir vous signaler que je ne puis [...] réserver une suite favorable à votre contestation, que je traite donc comme [une] réclamation au titre de l'article 90, paragraphe 2, du statut, conformément à l'énoncé dans la page 4, point 10, de votre lettre. En effet, ne disposant pas de moyen de satisfaire votre 'demande de motivation‘, je donne suite à votre indication selon laquelle, faute d'un tel moyen, votre note est à considérer comme une réclamation.»

22.
    Auparavant, le 14 août 1996, tous les requérants avaient introduit, sous la signature de leur conseil, une réclamation au titre de l'article 90, paragraphe 2, du statut, qui a été enregistrée au secrétariat général du Conseil le 20 août 1996.

23.
    Par décision du 13 novembre 1996, reçue par les requérants le 15 novembre suivant, le secrétaire général du Conseil, en sa qualité d'AIPN, a rejeté la réclamation du 14 août 1996 en rappelant que les requérants affectés en Suisse avaient déjà introduit une réclamation, datée du 21 juin 1996. L'AIPN a doncconsidéré la réclamation introduite le 20 août 1996 comme ampliative de celle du 21 juin à laquelle il avait déjà été répondu le 22 octobre 1996.

Procédure et conclusions des parties

24.
    Par requête déposée au greffe du Tribunal le 3 mars 1997, les requérants ont formé le présent recours. La procédure écrite s'est terminée le 14 octobre 1997.

25.
    Par décision du Tribunal du 6 juillet 1999, le juge rapporteur a été affecté à la deuxième chambre, à laquelle l'affaire a, par la suite, été attribuée.

26.
    Le juge M. Meij étant empêché de siéger pour l'examen de l'affaire, le président du Tribunal a décidé, le 22 février 2000, de le remplacer par le juge M. Azizi.

27.
    Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (deuxième chambre) a décidé d'ouvrir la procédure orale. Conformément à l'article 64, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, les requérants ainsi que la Commission ont été invités à produire certains documents. Il a été satisfait à ces demandes dans le délai imparti.

28.
    Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal à l'audience du 5 avril 2000.

29.
    Les requérants concluent à ce qu'il plaise au Tribunal:

-    annuler leurs bulletins de rémunération du mois de mai 1996, en ce qu'ils font, pour la première fois, application des règlements litigieux;

-    annuler leurs bulletins de rémunération du mois de juin 1996, en ce qu'ils imputent une retenue à titre de récupération d'un trop-perçu de traitement en application des règlements litigieux;

-    condamner la partie défenderesse aux dépens.

30.
    Le Conseil conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

-    écarter du dossier deux notes internes établies par son service juridique, produites par les requérants en annexe à leur réplique;

-    déclarer le recours irrecevable en ce qui concerne Mmes Ghignone, Glassl, Jemaa, Massucco, et MM. Brodin, Di Maio, Franquinet, Jagstaidt, Perillat, Van Thiel et Zamproni;

-    déclarer l'ensemble des moyens non fondés et rejeter le recours;

-    condamner les requérants aux dépens.

Sur la recevabilité

Arguments des parties

31.
    Le Conseil estime que le recours est irrecevable en ce qui concerne les requérants affectés au bureau de Genève, parce qu'il a été introduit hors délai. Il aurait été précisé dans la «demande de motivation en vue d'une réclamation» introduite par ces requérants le 21 juin 1996 et reçue par l'AIPN le 24 juin 1996 que cette dernière était priée de traiter cette communication comme une réclamation au titre de l'article 90, paragraphe 2, du statut si elle ne fournissait pas les renseignements demandés. L'AIPN ayant répondu à cette réclamation le 22 octobre 1996, le recours introduit le 3 mars 1997 serait tardif. Le fait qu'une nouvelle réclamation ait été présentée par les mêmes requérants, avec d'autres, ne saurait faire courir un nouveau délai.

32.
    Les requérants affectés à Genève estiment que leur recours est recevable. Ils sont d'avis que le Conseil a illégalement requalifié leur demande du 21 juin 1996 de réclamation. Ils estiment que, même si la requalification était justifiée, les deux réclamations qu'ils ont introduites successivement devaient être traitées comme une seule réclamation. Ils ajoutent que, dans sa réponse du 13 novembre 1996, l'AIPN a indiqué qu'elle avait considéré leur réclamation du 14 août 1996 comme ampliative de celle introduite en date du 21 juin 1996 sans en contester la recevabilité.

33.
    À l'audience, les requérants affectés à Genève ont encore indiqué que la réponse de l'AIPN datée du 22 octobre 1996 leur était parvenue postérieurement à la décision de rejet, datée du 13 novembre 1996, qu'ils ont reçue le 15 novembre suivant.

Appréciation du Tribunal

34.
    Conformément à l'article 91, paragraphe 3, du statut, le recours doit être formé dans un délai de trois mois, qui court à partir du jour de la notification de la décision prise en réponse à la réclamation au titre de l'article 90, paragraphe 2, du statut.

35.
    Il résulte d'une jurisprudence constante qu'il appartient à la partie qui se prévaut de la tardiveté d'une requête de faire la preuve de la date à laquelle la décision a été notifiée (arrêt de la Cour du 5 juin 1980, Belfiore/Commission, 108/79, Rec. p. 1769, point 7, et ordonnance du Tribunal du 16 décembre 1998, Rentzos/Parlement, T-93/98, RecFP p. I-A-635 et II-1923, point 33).

36.
    En l'espèce, la date à laquelle la décision datée du 22 octobre 1996 a été notifiée aux requérants affectés à Genève ne ressort pas du dossier. À l'audience, cesrequérants ont soutenu, sans être contredits par le Conseil, que cette date était postérieure au 15 novembre 1996.

37.
    Il n'est pas nécessaire d'examiner la question de savoir si ce point a été soulevé tardivement au regard de l'article 48, paragraphe 2, du règlement de procédure. En effet, le recours des requérants affectés à Genève doit être considéré comme recevable, indépendamment de la date à laquelle la décision du 22 octobre 1996 a été notifiée.

38.
    Certes, il y a lieu de qualifier le document du 21 juin 1996 de réclamation au titre de l'article 90, paragraphe 2, du statut, dirigée contre les bulletins de rémunération des requérants du mois de mai 1996. Cette interprétation est justifiée, notamment, par la dernière phrase de ce document, selon laquelle les requérants souhaitaient que leur note soit considérée comme une réclamation si l'AIPN ne leur fournissait pas les informations sollicitées.

39.
    La réclamation du 21 juin 1996 a cependant été suivie d'une deuxième réclamation, datée du 14 août 1996. Or, il ressort de l'arrêt du Tribunal du 17 mai 1995, Kratz/Commission (T-10/94, RecFP p. I-A-99 et II-315, points 19 et 20), que des réclamations successives, introduites dans le délai statutaire contre le même acte, sont recevables.

40.
    Les deux réclamations formées par les requérants affectés à Genève ont fait l'objet de deux décisions de rejet successives et les requérants ont respecté le délai de recours pour ce qui est de la seconde de ces décisions. Dans ces conditions, le recours contre cette seconde décision ne saurait être considéré comme irrecevable que si celle-ci doit être considérée comme un acte purement confirmatif de la première décision de rejet. Tel est le cas lorsque la seconde décision ne contient aucun élément nouveau par rapport à la première décision (voir, par analogie, arrêt du Tribunal du 21 octobre 1998, Vicente-Nuñez/Commission, T-100/96, RecFP p. I-A-591 et II-1779, points 37 à 43).

41.
    Or, la seconde réclamation du 14 août 1996 a une portée plus grande que celle du 21 juin 1996. D'une part, elle vise non seulement les bulletins de rémunération des requérants du mois de mai 1996, mais également ceux du mois de juin 1996. D'autre part, elle est fondée sur d'autres moyens. Le Conseil lui-même a reconnu cette différence en qualifiant la seconde réclamation d'«ampliative». Il y a donc lieu de considérer la décision de rejet datée du 13 novembre 1996 comme une nouvelle décision, adoptée après réexamen de la première décision à la lumière de la réclamation ampliative.

42.
    Par conséquent, le délai de recours est à calculer à partir de la notification de la seconde décision de rejet, intervenue le 15 novembre 1996. Il s'ensuit que le recours des requérants affectés à Genève est recevable.

Sur la demande du Conseil visant à ce que certains documents soient écartés du dossier

Arguments des parties

43.
    Le Conseil s'oppose à la production, en annexe de la réplique, de certains documents internes de l'institution concernant les relations entre le secrétariat général et les directeurs des bureaux de Genève et de New York. Il souligne que ces documents ont été adressés à leurs destinataires en leur qualité de responsables administratifs et non de réclamants. Il estime que ces documents ne devaient pas être produits sauf à la suite d'une demande du Tribunal. Le Conseil s'oppose plus particulièrement à la production de certaines notes établies par son service juridique. Il est d'avis que ce service est en droit d'attendre, dans le traitement de ses notes internes, la même confidentialité que celle qui s'attache aux communications entre un avocat et un de ses clients. Le Conseil demande dès lors au Tribunal d'écarter les pièces en cause du dossier.

44.
    Les requérants font valoir que les chefs de délégation ont obtenu les documents litigieux non pas dans l'exercice de leur fonction, mais dans le cadre d'un échange de correspondance avec le secrétariat général en tant que porte-parole du personnel des délégations. Ils considèrent donc qu'il est légitime de les produire dans le cadre du présent litige.

Appréciation du Tribunal

45.
    Dans sa duplique, le Conseil n'a pas indiqué clairement quels sont les documents qui, parmi les 18 annexes de la réplique, devraient, selon lui, être écartés du dossier, sauf pour ce qui est de deux avis établis par le service juridique et produits en annexes 5 et 10. À l'audience, il a réitéré sa demande de voir écarter ces deux documents du dossier. Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que la demande du Conseil vise uniquement ces deux avis.

46.
    Ces deux avis avaient été demandés par la direction du personnel et de l'administration du secrétariat général du Conseil. Ils ont été transmis, par celle-ci, aux chefs des délégations du Conseil à Genève et à New York. Ces avis ne concernent pas directement la situation individuelle des chefs de délégation et des autres requérants, ni leur réclamation. Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que les chefs de délégation du Conseil ont reçu ces documents dans le cadre de l'exercice de leurs fonctions et non pas au titre de leur situation statutaire individuelle.

47.
    La nécessité d'accorder une protection particulière à des avis du service juridique d'une institution a été reconnue, d'une part, dans les conclusions de l'avocat général M. Jacobs sous l'arrêt de la Cour du 13 juillet 1995, Espagne/Conseil (C-350/92, Rec. p. I-1985, I-1988, point 35), et, d'autre part, dans l'ordonnance du présidentdu Tribunal du 3 mars 1998, Carlsen e.a./Conseil (T-610/97 R, Rec. p. II-485, points 45 à 47).

48.
    En effet, il serait contraire à l'intérêt public qui veut que les institutions puissent bénéficier des avis de leur service juridique, donnés en toute indépendance, d'admettre que de tels documents internes puissent être produits par des personnes autres que les services à la demande desquels ils ont été établis dans un litige devant le Tribunal sans que leur production ait été autorisée par l'institution concernée ou ordonnée par la juridiction.

49.
    Par conséquent, il y a lieu de faire droit à la demande du Conseil et d'écarter du dossier les deux avis du service juridique produits en annexes 5 et 10 à la réplique.

Sur le fond

Sur l'application des nouveaux coefficients correcteurs à partir des bulletins de rémunération du mois de mai 1996

50.
    À l'appui de leur demande visant à l'annulation des bulletins de rémunération du mois de mai 1996, portant pour la première fois application des nouveaux coefficients correcteurs, les requérants soulèvent une exception d'illégalité à l'égard des règlements litigieux. Ces derniers auraient été adoptés en violation de l'obligation de motivation et de l'article 13 de l'annexe X du statut. En outre, les requérants soutiennent qu'ils n'ont pas obtenu, malgré leur demande, suffisamment d'informations pour pouvoir vérifier si des erreurs manifestes ont été commises lors de la fixation de ces nouveaux coefficients et pour obtenir un contrôle juridictionnel à cet égard.

Sur la prétendue violation de l'obligation de motivation et sur le refus de communiquer aux requérants les informations demandées

- Arguments des parties

51.
    Dans leurs mémoires, les requérants avaient excipé de l'illégalité des règlements litigieux en faisant valoir qu'ils étaient insuffisamment motivés. À l'audience, ils ont reconnu qu'une motivation succincte des règlements portant fixation des coefficients correcteurs pouvait être suffisante (arrêt du Tribunal du 7 décembre 1995, Abello e.a./Commission, T-544/93 et T-566/93, RecFP p. I-A-271 et II-815, ayant fait l'objet d'un pourvoi rejeté par ordonnance de la Cour du 5 février 1998, Abello e.a./Commission, C-30/96 P, Rec. p. I-377). Ils ont cependant fait observer que, en l'absence d'informations détaillées sur la fixation des coefficients correcteurs en cause, ils se trouvent dans l'impossibilité de soulever utilement une exception d'illégalité à l'encontre des règlements litigieux. Cela empêcherait également le juge communautaire de contrôler, à titre incident, si ces règlements sont entachés d'erreurs manifestes. Selon les requérants, il résulte de l'obligation de motivationdes actes faisant grief, prévue par l'article 25, deuxième alinéa, du statut, qu'ils sont en droit d'obtenir les informations nécessaires pour pouvoir soumettre les règlements servant de base à des actes individuels à un contrôle incident de leur légalité. Les indications fournies par la partie défenderesse ne permettraient ni aux requérants d'examiner le bien-fondé des baisses sensibles des coefficients correcteurs et le respect du principe d'équivalence du pouvoir d'achat, ni au juge communautaire d'exercer son contrôle juridictionnel. Les requérants soulignent que la diminution des coefficients correcteurs était exceptionnellement grande en l'espèce sans que les motifs d'une telle diminution aient été clairement exposés.

52.
    Les requérants soulignent que l'AIPN n'a réservé aucune suite à leur demande formelle d'informations précises sur les éléments qui justifient que les coefficients correcteurs ont été fixés à de tels montants dans les règlements litigieux. À l'audience, ils ont fait valoir que cela est incompatible avec le droit d'accès aux documents garanti par le traité d'Amsterdam (article 255 CE).

53.
    Le Conseil est d'avis que les règlements litigieux sont suffisamment motivés. Il estime avoir correctement indiqué dans ses réponses aux réclamations qu'il ne pouvait établir un bulletin de paie qu'en conformité avec la réglementation en vigueur. Il considère que les requérants reprochent à l'AIPN, en substance, une violation du devoir de sollicitude, au motif qu'elle ne leur a pas fourni les informations demandées. Or, il n'appartiendrait pas à l'AIPN de donner une motivation à un règlement du Conseil. Cependant, tous les efforts possibles auraient été faits pour fournir aux intéressés les informations disponibles sur le mode de calcul des coefficients correcteurs. À l'audience, il a ajouté que l'AIPN a communiqué aux requérants toutes les informations dont elle disposait et qu'elle avait pu obtenir de la Commission.

- Appréciation du Tribunal

54.
    Il convient tout d'abord de rappeler que la motivation d'un règlement portant fixation des coefficients correcteurs dont sont affectées les rémunérations des fonctionnaires peut se borner à indiquer, d'une part, la situation d'ensemble qui a conduit à son adoption et, d'autre part, les objectifs généraux qu'il se propose d'atteindre et elle ne doit pas porter sur les aspects techniques des modalités de calcul (voir arrêt Abello e.a./Commission, cité au point 51 ci-dessus, point 89). La motivation des règlements litigieux, bien que succincte, est suffisante au regard de ces considérations.

55.
    Partant, l'exception d'illégalité tirée de l'insuffisance de motivation des règlements litigieux n'est pas fondée.

56.
    Il appartient ensuite au Tribunal de vérifier d'office si l'AIPN a respecté son obligation, prévue à l'article 25, deuxième alinéa, du statut, de motiver les actes individuels portant application des règlements litigieux à l'égard des requérants.

57.
    Il est de jurisprudence constante que la motivation d'une décision faisant grief, prescrite par l'article 25, deuxième alinéa, du statut, a pour but, d'une part, de fournir à l'intéressé une indication suffisante pour apprécier le bien-fondé de cette décision et l'opportunité d'introduire un recours devant le Tribunal et, d'autre part, de permettre au juge communautaire d'exercer son contrôle sur la légalité de ladite décision (voir, par exemple, arrêt du Tribunal du 11 février 1999, Leite Mateus/Commission, T-21/98, RecFP p. I-A-25 et II-107, point 18).

58.
    S'agissant d'une décision par laquelle l'AIPN fait application d'un acte de portée générale à la situation individuelle d'un fonctionnaire, sans disposer d'aucun pouvoir d'appréciation à cet égard, la motivation peut se borner à une référence à l'acte normatif et à l'indication, dans la mesure de ce qui est nécessaire dans les circonstances du cas d'espèce, des raisons pour lesquelles l'AIPN estime que les conditions d'application dudit acte à ce fonctionnaire sont remplies. En revanche, l'AIPN n'est pas tenue, au titre de l'article 25, deuxième alinéa, du statut, d'expliquer les raisons ayant motivé l'adoption de l'acte normatif par le législateur communautaire.

59.
    En l'espèce, la décision de l'AIPN du 13 novembre 1996 rejetant la réclamation des requérants du 14 août 1996 indique clairement que les bulletins de rémunération en cause ont été établis en application des règlements litigieux. Étant donné que l'application de ces règlements aux rémunérations des requérants ne donnait lieu à aucun doute, cette motivation doit être considérée comme suffisante.

60.
    Ainsi, pour les motifs exposés ci-dessus au point 58, la thèse des requérants selon laquelle le Conseil aurait dû leur communiquer l'intégralité des données à la base de la fixation des coefficients correcteurs litigieux ne saurait être retenue.

61.
    Il ressort, en outre, du dossier que les institutions impliquées dans la procédure d'adoption des règlements fixant les coefficients correcteurs se sont efforcées de rendre cette procédure transparente pour les fonctionnaires concernés et de l'assortir de garanties procédurales.

62.
    D'une part, les propositions de règlement du Conseil portant fixation semestrielle des coefficients correcteurs sont présentées, avant leur transmission à la Commission, aux représentants des organisations syndicales et professionnelles des fonctionnaires dans le cadre des réunions du sous-groupe technique «Rémunérations hors-Union». Les propositions y sont examinées et discutées en détail afin d'obtenir, de la part de l'administration, toutes les explications techniques demandées par des représentants du personnel et justifiant l'évolution des coefficients correcteurs présentés. À la suite de ce dialogue, les organisations syndicales et professionnelles ont l'occasion de transmettre leur avis sur lesdites propositions.

63.
    D'autre part, la méthode de calcul des coefficients correcteurs, élaborée par Eurostat, est soumise à l'approbation des statisticiens des États membres qui se réunissent au sein d'un groupe technique («Groupe de l'article 64»).

64.
    Il convient d'ajouter qu'il ressort des pièces du dossier qu'Eurostat est engagé dans un effort constant de perfectionnement des méthodes statistiques en vue d'appréhender de la manière la plus appropriée possible le coût de la vie au lieu d'affectation des fonctionnaires communautaires, afin de garantir au mieux l'équivalence de leur pouvoir d'achat.

65.
    Dans ces conditions, ni le Conseil ni Eurostat n'étaient obligés de fournir aux requérants l'intégralité des données sur la base desquelles les calculs statistiques à l'origine des coefficients correcteurs ont été effectués (voir, en ce sens, arrêt Abello e.a./Commission, cité au point 51 ci-dessus, point 99).

66.
    Concernant l'argument avancé par les requérants à l'audience et tiré d'une violation du droit d'accès du public aux documents, garanti par l'article 255 CE, il n'est pas fondé. En effet, cette disposition, introduite par le traité d'Amsterdam, est entrée en vigueur le 1er mai 1999, donc postérieurement aux faits du présent litige. En revanche, la décision 94/90/CECA, CE, Euratom de la Commission, du 8 février 1994, relative à l'accès du public aux documents de la Commission (JO L 46, p. 58), était déjà applicable à l'époque de l'adoption des règlements litigieux et de la procédure précontentieuse. Les requérants, qui savaient que les informations qu'ils souhaitaient obtenir étaient à la disposition de la Commission, alors que l'AIPN du Conseil n'en disposait pas, n'ont cependant introduit aucune demande au titre de cette décision. Par conséquent, aucune violation des règles concernant l'accès du public aux documents n'a eu lieu à leur égard.

67.
    Il s'ensuit que les griefs tirés d'une violation de l'obligation de motivation et du refus de fournir des informations aux requérants doivent être écartés.

Sur le grief tiré d'une violation de l'article 13 de l'annexe X du statut

- Arguments des parties

68.
    Dans la réplique, les requérants font valoir que les règlements litigieux ont été adoptés en méconnaissance du principe d'équivalence du pouvoir d'achat des fonctionnaires, indépendamment de leur lieu d'affectation.

69.
    Le Conseil répond que le seul élément qui se dégage du dossier est que les requérants ne sont pas satisfaits des nouveaux coefficients. Selon le Conseil, il n'en résulte pas qu'il y ait lieu de conclure à une erreur manifeste d'appréciation.

- Appréciation du Tribunal

70.
    Le présent grief s'inscrit dans le cadre de l'exception d'illégalité, soulevée dans la requête. L'article 48, paragraphe 2, du règlement de procédure ne s'oppose donc pas à sa recevabilité. Cependant, le grief en cause n'est étayé par aucun élément concret, malgré le fait que les requérants disposaient d'informations qui auraient pu leur permettre de présenter une argumentation au soutien de celui-ci. En effet, les requérants ont demandé et obtenu certains renseignements concernant la fixation des coefficients correcteurs. Ainsi, les requérants affectés à Genève ont reçu deux documents établis par la Commission le 29 février et le 20 mars 1996 à l'intention de sa délégation à Genève, dont l'un est accompagné d'explications techniques fournies par Eurostat et de plusieurs listes faisant état des parités économiques pour huit groupes de produits ainsi que pour 173 positions élémentaires au 1er mai 1990 et 11 mars 1993. Les requérants affectés à New York, quant à eux, se sont procuré, par leurs propres moyens, des informations directement auprès d'Eurostat. En outre, il ressort des mémoires des requérants que ceux-ci connaissaient certaines critiques formulées à l'égard de la méthode de fixation des coefficients correcteurs par les représentants du personnel dans le cadre de la procédure d'adoption. Par conséquent, la condition prévue à l'article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure, selon laquelle les moyens invoqués doivent faire l'objet d'un exposé sommaire, n'est pas remplie. Il s'ensuit que ce grief doit être écarté.

71.
    Les griefs soulevés par les requérants à l'encontre de leurs bulletins de rémunération du mois de mai 1996 en ce qu'ils font application des coefficients correcteurs fixés par les règlements litigieux doivent donc être rejetés.

Sur l'application rétroactive des nouveaux coefficients et la récupération d'un trop-perçu de traitement à partir des bulletins de rémunération du mois de juin 1996

72.
    À l'appui de leur demande visant à l'annulation des bulletins de rémunération du mois de juin 1996, en ce qu'ils procèdent à une récupération d'un trop-perçu de salaire versé aux requérants pendant les mois précédents, ceux-ci invoquent trois moyens. Le premier est tiré de l'illégalité des règlements litigieux. À l'appui de ce moyen, les requérants allèguent, dans une première branche, une violation de l'article 13 de l'annexe X du statut et, dans une deuxième branche, une violation des principes de sécurité juridique, des droits acquis et de non-rétroactivité des dispositions réglementaires. Le deuxième moyen est tiré d'une violation de l'article 85 du statut. Le troisième moyen est pris d'une violation des articles 11 à 13 de l'annexe X du statut. Il convient d'examiner successivement la première branche du premier moyen puis, ensemble, la seconde branche du premier moyen et le deuxième moyen et, enfin, le troisième moyen.

Sur la violation de l'article 13 de l'annexe X du statut

- Arguments des parties

73.
    Les requérants rappellent que l'article 13 de l'annexe X du statut impose à la Commission, lorsque la variation du coût de la vie, mesurée d'après le coefficient correcteur et le taux de change correspondant, s'avère supérieure à 5 % depuis la dernière adaptation pour un pays donné, d'adopter des mesures d'adaptation intermédiaire dudit coefficient. En l'espèce, la Commission n'aurait pris aucune mesure d'adaptation intermédiaire. Il en résulterait que c'est illégalement que le Conseil a décidé de fixer la prise d'effet des règlements litigieux, respectivement, aux 1er juillet 1994, 1er janvier 1995 et 1er juillet 1995.

74.
    Les requérants font en outre valoir que le Conseil a été saisi, en temps utile, des propositions de la Commission aux fins de l'adaptation des rémunérations avec effet aux 1er janvier 1994, 1er janvier 1995 et 1er juillet 1995 pour les fonctionnaires affectés dans les pays tiers. Cependant, le Conseil n'aurait adopté les règlements litigieux que le 25 mars 1996. Les requérants sont d'avis que le retard dont le Conseil s'est ainsi rendu coupable s'oppose à ce que l'institution leur impose un quelconque remboursement - même s'il est limité dans le temps - à titre de récupération d'un trop-perçu.

75.
    Le Conseil souligne qu'il appartient à la Commission de prendre les mesures d'adaptation intermédiaire. L'absence de telles mesures n'a, selon le Conseil, aucune incidence sur la légalité de ses règlements d'adaptation.

76.
    En ce qui concerne l'adaptation prétendument tardive des coefficients correcteurs, le Conseil indique qu'il ne désire pas faire de commentaire sur le point de savoir s'il a été saisi en temps utile des propositions de la Commission. Il affirme cependant que ces propositions ont été adoptées sans retard inexcusable.

- Appréciation du Tribunal

77.
    Le grief tiré d'une prétendue violation de l'obligation incombant à la Commission, selon l'article 13 de l'annexe X du statut, de prendre, dans certaines conditions, des mesures d'adaptation intermédiaire des coefficients correcteurs est inopérant. En effet, le but de ces adaptations intermédiaires est de tenir compte, le plus vite possible, des variations du pouvoir d'achat des fonctionnaires en vue de raccourcir les périodes pendant lesquelles l'équivalence de ce pouvoir d'achat entre différents lieux d'affectation n'est pas assurée. Un manquement éventuel à l'obligation susvisée ne saurait donc faire obstacle à l'adoption ultérieure par le Conseil des règlements visant également à assurer l'équivalence du pouvoir d'achat par l'adaptation des coefficients correcteurs avec effet rétroactif.

78.
    De même, l'adoption prétendument tardive, par le Conseil, des règlements litigieux ne saurait être invoquée à l'appui d'une exception d'illégalité soulevée à l'égard deces actes. En effet, le législateur communautaire est tenu d'assurer l'équivalence du pouvoir d'achat des fonctionnaires entre Bruxelles et les autres lieux d'affectation dans les pays tiers en adaptant les coefficients correcteurs. Cette obligation ne s'éteint pas du seul fait qu'elle n'a pas été remplie dans les délais prévus par le statut. Par conséquent, à supposer même que les délais prévus à l'article 13 de l'annexe X du statut pour l'adaptation des coefficients correcteurs aient un caractère impératif et que le législateur communautaire ait manqué à son obligation d'adapter lesdits coefficients au moment prescrit, une telle violation des règles applicables n'affecterait pas la validité des règlements litigieux. Il convient d'ajouter que ni l'absence de mesures d'adaptation intermédiaire, ni le prétendu retard dans l'adoption des coefficients correcteurs litigieux n'ont porté préjudice aux requérants. En effet, comme la période de récupération du trop-perçu est, en application de l'article 2, quatrième alinéa, des règlements litigieux, limitée à six mois, celle-ci n'a concerné que les salaires versés à partir du mois de novembre 1995. Jusqu'au mois d'octobre 1995, les requérants ont donc profité d'un salaire fixé sur la base des anciens coefficients correcteurs dont le montant s'est situé à un niveau supérieur à celui qu'ils auraient pu percevoir en l'absence de la prétendue violation de l'article 13. Dans ces conditions, la seule éventualité que la réglementation ait été modifiée à une date postérieure à celle prévue selon l'annexe X du statut ne s'oppose pas à l'effet rétroactif de cette modification.

79.
    Le grief tiré d'une violation de l'article 13 de l'annexe X du statut doit donc être écarté.

Sur la violation des principes de sécurité juridique, des droits acquis et de non-rétroactivité et sur la violation de l'article 85 du statut

- Arguments des parties

80.
    Les requérants font valoir que les règlements litigieux ont été adoptés en violation des principes de sécurité juridique, des droits acquis et de non-rétroactivité des dispositions réglementaires. Ils contestent l'article 2, troisième et quatrième alinéas, des règlements litigieux qui impose aux institutions de procéder à des ajustements rétroactifs négatifs des rémunérations pour une période de six mois précédant l'adoption desdits règlements. Les bulletins de rémunération relatifs à la période de six mois précédant l'adoption des règlements litigieux constituent, selon les requérants, des actes légaux qui leur ont conféré des droits subjectifs. Selon la doctrine et une jurisprudence constante, un acte légal qui a créé des droits subjectifs ne pourrait être retiré.

81.
    Les requérants sont d'avis que les retards dont le Conseil s'est rendu coupable démontrent que le but à atteindre par les règlements litigieux n'exige pas que le point de départ de leur portée dans le temps soit fixé, à titre exceptionnel, à une date antérieure à leur publication. Le Conseil n'aurait pas rapporté la preuve quela confiance légitime des fonctionnaires affectés dans un pays tiers, et en particulier celle des requérants, ait été dûment respectée.

82.
    Les requérants font ensuite valoir que les conditions dans lesquelles la répétition d'une somme indûment perçue est possible au titre de l'article 85 du statut ne sont pas réunies en l'espèce. D'une part, ils estiment que la rémunération qu'ils ont obtenue pendant la période de six mois précédant l'adoption des règlements litigieux leur a été versée conformément à la réglementation en vigueur à l'époque, de sorte qu'elle ne peut pas être considérée comme ayant été indûment perçue. D'autre part, ils soutiennent qu'ils ne pouvaient pas avoir connaissance de l'irrégularité du montant de la rémunération avant l'adoption des règlements litigieux.

83.
    Le Conseil expose qu'aucune confiance légitime ne peut exister dans le maintien des coefficients en vigueur et la non-récupération d'un trop-perçu de rémunération. Il estime que la fixation rétroactive des coefficients correcteurs poursuit un but légitime, à savoir le respect de l'équivalence du pouvoir d'achat.

84.
    Selon, le Conseil, il n'y a pas eu, en l'espèce, de retrait d'un acte administratif créateur de droits. Il souligne que la rémunération est liquidée sous réserve d'une modification du coefficient correcteur et qu'elle ne devient définitive qu'au moment de la fixation de ce coefficient. Aucune confiance légitime ne pourrait être créée par un acte qui fait mention expresse de l'éventualité d'un réajustement ultérieur.

85.
    Quant à l'article 85 du statut, le Conseil souligne qu'il ne saurait être question en l'espèce d'une irrégularité du versement, mais d'une correction prévue et organisée par le statut et la réglementation portant application de celui-ci.

- Appréciation du Tribunal

86.
    Si, en règle générale, le principe de la sécurité des situations juridiques s'oppose à ce que la portée dans le temps d'un acte communautaire voie son point de départ fixé à une date antérieure à sa publication, il est de jurisprudence constante qu'il peut en être autrement, à titre exceptionnel, lorsque le but à atteindre l'exige et lorsque la confiance légitime des intéressés est dûment respectée (arrêt de la Cour du 11 juillet 1991, Crispoltoni, C-368/89, Rec. p. I-3695, point 17).

87.
    En ce qui concerne les coefficients correcteurs, leur fixation rétroactive est expressément prévue, pour ce qui est de la rémunération des fonctionnaires affectés à l'intérieur des différents États membres, par l'article 3, paragraphe 1, de l'annexe XI du statut. Il est de jurisprudence constante que cet effet rétroactif est admissible (arrêt de la Cour du 23 janvier 1992, Commission/Conseil, C-301/90, Rec. p. I-221, point 29; arrêts du Tribunal du 11 décembre 1996, Barraux e.a./Commission, T-177/95, RecFP p. I-A-541 et II-1451, point 46, et du 7 juillet 1998, Telchini e.a./Commission, T-116/96, T-212/96 et T-215/96, RecFP p. I-A-327 et II-947, point 129).

88.
    À la différence des dispositions susvisées, l'article 13 de l'annexe X du statut ne prévoit pas expressément l'effet rétroactif de la fixation des nouveaux coefficients correcteurs pour les fonctionnaires affectés dans les pays tiers.

89.
    Toutefois, le principe d'égalité de traitement impose de faire rétroagir la prise d'effet des nouveaux coefficients correcteurs à la date à laquelle il est constaté que l'équivalence du pouvoir d'achat a cessé (voir arrêt Commission/Conseil, cité au point 87 ci-dessus, point 29). Or, le principe d'égalité de traitement, dont celui de l'équivalence du pouvoir d'achat est une expression, est à la base non seulement de l'article 64 du statut, concernant la fixation des coefficients correcteurs à l'intérieur de l'Union, mais également de l'article 13 de l'annexe X du statut relatif à la fixation des coefficients correcteurs pour les pays tiers (voir arrêt du Tribunal du 26 mai 1998, Costacurta/Commission, T-177/96, RecFP p. I-A-225 et II-705, point 47).

90.
    Il s'ensuit que le but à atteindre par la fixation des nouveaux coefficients correcteurs, à savoir le respect du principe d'égalité de traitement, exige que les règlements portant adaptation des coefficients correcteurs pour les pays tiers se voient attribuer un effet rétroactif.

91.
    En ce qui concerne, ensuite, le respect de la confiance légitime des fonctionnaires intéressés, il est de jurisprudence constante qu'un fonctionnaire ne peut se prévaloir du principe de protection de la confiance légitime pour s'opposer à la légalité d'une disposition réglementaire nouvelle, surtout dans un domaine dans lequel il est procédé à une constante adaptation en fonction des variations de la situation économique (voir arrêt du Tribunal du 22 juin 1994, Di Marzio et Lebedef/Commission, T-98/92 et T-99/92, RecFP p. I-A-167 et II-541, point 68). En l'espèce, le caractère variable dans le temps des coefficients correcteurs dont sont affectées les rémunérations des fonctionnaires affectés dans un pays tiers ressort clairement des dispositions de l'annexe X du statut.

92.
    Par conséquent, le grief tiré d'une violation des principes régissant l'effet rétroactif des actes normatifs n'est pas fondé.

93.
    En ce qui concerne la récupération du trop-perçu, la thèse des requérants selon laquelle les règlements litigieux ne respecteraient pas les principes régissant le retrait des actes administratifs ayant créé des droits subjectifs ne saurait être retenue. En effet, les bulletins de rémunération portent application, dans le cas individuel de chaque fonctionnaire, de la réglementation en matière de rémunération et ne peuvent donc créer de droits subjectifs autres que ceux qui découlent de cette réglementation. Or, en vertu de l'article 12 de l'annexe X du statut, les fonctionnaires affectés dans un pays tiers ayant opté pour le paiement en monnaie du pays d'affectation ont droit, chaque mois, au versement de leur rémunération, affectée du coefficient correcteur applicable le mois concerné. La récupération de la différence entre le montant auquel ils avaient droit et celui quia été effectivement versé sur la base de l'ancien coefficient correcteur est la conséquence de la fixation rétroactive des coefficients correcteurs, nécessaire pour assurer l'équivalence du pouvoir d'achat. Il s'ensuit qu'une disposition réglementaire qui confère expressément aux bulletins de rémunération un caractère provisoire, afin de pouvoir tenir compte de cette adaptation rétroactive des coefficients correcteurs, n'est pas contraire aux règles relatives au retrait des actes administratifs.

94.
    Les requérants ne sauraient non plus invoquer la protection de la confiance légitime pour s'opposer à l'introduction des dispositions relatives à la récupération du trop-perçu dans les règlements litigieux. En effet, l'absence de telles dispositions dans la réglementation antérieure ne saurait faire obstacle à ce que le législateur communautaire décide de modifier ce régime et d'introduire une récupération du trop-perçu (voir arrêt Telchini e.a./Commission, cité au point 87 ci-dessus, points 132 à 134).

95.
    Il s'ensuit que l'exception d'illégalité des dispositions relatives à la récupération du trop-perçu figurant dans les règlements litigieux n'est pas fondée.

96.
    La protection de la confiance légitime ne s'oppose pas non plus à l'application de ces dispositions aux requérants. En effet, il ressort clairement de la réglementation applicable (article 2, troisième et quatrième alinéas, du règlement n° 2356/95 et article 2, troisième et quatrième alinéas, des règlements litigieux) que les sommes qui ont été versées aux requérants n'étaient pas définitives et pouvaient être soumises à des modifications ultérieures. Il y a lieu d'ajouter que la possibilité d'ajustements rétroactifs et d'une récupération est mentionnée sur les bulletins de rémunération des requérants. Les requérants ne pouvaient donc manquer d'avoir connaissance du fait que la rémunération qui leur avait été versée pour un mois donné pouvait être différente de celle à laquelle ils avaient droit selon la réglementation applicable. À cet égard, le fait que le montant exact de la différence éventuelle n'était pas connu des fonctionnaires au moment du versement de leur salaire est sans incidence, étant donné que ce montant ne peut être déterminé qu'a posteriori, après l'adoption des nouveaux coefficients correcteurs, conformément à l'article 13 de l'annexe X du statut.

97.
    Il s'ensuit que la récupération du trop-perçu n'est pas non plus contraire à l'article 85 du statut, qui est une expression particulière du principe de protection de la confiance légitime (voir arrêt Telchini e.a./Commission, cité au point 87 ci-dessus, point 131).

Sur la violation des articles 11 à 13 de l'annexe X du statut

- Arguments des parties

98.
    Par leur troisième moyen, les requérants font valoir que la partie défenderesse aurait dû verser leur rémunération en francs belges et sur la base du coefficient correcteur applicable à la rémunération des fonctionnaires affectés en Belgique.

99.
    Ils soulignent que le versement de la rémunération en monnaie du pays d'affectation constitue une dérogation au régime général qui doit faire l'objet d'une interprétation stricte et qui présuppose que le fonctionnaire concerné en ait fait la demande. L'exercice du droit de faire cette demande implique, selon les requérants, que le fonctionnaire soit informé, en temps utile, de tous les éléments pouvant influencer son choix. Tel n'aurait pas été le cas en l'espèce.

100.
    Le Conseil estime que ce moyen repose sur une appréciation inexacte de la portée du choix offert par l'article 12, premier alinéa, de l'annexe X du statut. Le fondement de cette disposition serait non pas de permettre aux fonctionnaires en cause d'échapper à toute possibilité de récupération d'un trop-perçu, mais, s'ils le jugent utile, de disposer directement de leur rémunération en monnaie du pays d'affectation afin de faciliter leurs paiements dans ce pays.

101.
    Le Conseil fait remarquer que les fonctionnaires affectés à New York ont demandé à la première date possible (février 1996) que leur rémunération soit payée en francs belges, tandis que les fonctionnaires en poste à Genève, qui bénéficient d'un coefficient correcteur supérieur à celui de Bruxelles, ont continué à être rémunérés en monnaie de leur pays d'affectation. Il ajoute qu'il n'existe aucune obligation d'informer les fonctionnaires des moyens d'échapper à la rétroactivité de l'adaptation. Néanmoins, le Conseil aurait fait dès le mois de mai 1995 des démarches pour se procurer des informations relatives aux nouveaux coefficients correcteurs, mais avec des résultats infructueux.

- Appréciation du Tribunal

102.
    À titre liminaire, il convient de rappeler qu'il est normalement avantageux pour le fonctionnaire affecté dans un pays tiers de demander le paiement de sa rémunération en monnaie du pays d'affectation lorsque le coefficient correcteur fixé pour son lieu d'affectation est supérieur ou égal à 100. En revanche, lorsque ce coefficient est inférieur à 100, le paiement de la rémunération en francs belges est en principe plus favorable étant donné que, dans ce cas, le coefficient correcteur pour la Belgique est applicable. Cependant, même lorsque le coefficient correcteur pour le lieu d'affectation est légèrement inférieur à 100, le versement d'une partie du salaire en monnaie locale peut rester avantageux pour le fonctionnaire, parce qu'il lui permet d'éviter certains frais de change.

103.
    Étant donné que le coefficient correcteur fixé pour la Suisse est resté supérieur à 100 pendant la période couverte par les règlements litigieux, il convient d'interpréter le présent moyen en ce sens qu'il concerne uniquement la situation des requérants affectés à New York.

104.
    Le moyen est articulé en deux griefs distincts. D'une part, les requérants sont d'avis que l'AIPN est tenue de verser leur rémunération en francs belges et de l'affecter du coefficient correcteur pour la Belgique dès que ce mode de paiement leur est plus favorable que celui en monnaie locale. D'autre part, ils se plaignent de ne pas avoir été informés de la baisse des coefficients correcteurs en temps utile pour demander le paiement de leur rémunération en francs belges à partir du moment où cela devenait plus favorable pour eux.

105.
    Pour ce qui est du premier grief, il suffit de constater que l'AIPN ne saurait modifier le régime du versement du salaire en l'absence de demande de la part du fonctionnaire concerné. Par conséquent, ce grief doit être écarté.

106.
    Le second grief vise, en substance, à reprocher à l'AIPN un manquement à son devoir de sollicitude.

107.
    À ce sujet, il y a lieu de relever que le Conseil a pris des mesures pour se procurer des informations relatives aux nouveaux coefficients correcteurs et a transmis aux requérants les informations dont il disposait lui-même.

108.
    En outre, le Conseil a dérogé à la règle contenue à l'article 12, paragraphe 2, de ses dispositions générales d'exécution de l'annexe X du statut, selon lesquelles, sauf dans des cas dûment justifiés, les décisions de l'AIPN relatives au paiement total ou partiel des rémunérations dans la monnaie du pays d'affectation ne peuvent être modifiées, sur demande du fonctionnaire, introduite au moins deux mois à l'avance, qu'au 1er janvier et au 1er juillet. En l'espèce, le Conseil a permis aux fonctionnaires concernés d'opter en février 1996 pour un versement de la rémunération en francs belges avec effet au mois de mars 1996, limitant ainsi la période sur laquelle portait la récupération du trop-perçu.

109.
    Dans ces conditions, une violation du devoir de sollicitude du Conseil ne saurait être constatée en l'espèce.

110.
    Il s'ensuit que le troisième moyen des requérants n'est pas fondé.

111.
    Par conséquent, l'ensemble du recours doit être rejeté.

Sur les dépens

112.
    Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens s'il est conclu en ce sens. Toutefois, envertu de l'article 88 du même règlement, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci.

113.
    En l'espèce, chacune des parties supportera donc ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête:

1)    Les avis du service juridique du Conseil, produits par les requérants en annexes 5 et 10 de la réplique, sont écartés du dossier.

2)    Le recours est rejeté.

3)    Chaque partie supportera ses propres dépens.

Pirrung
Potocki
Azizi

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 8 novembre 2000.

Le greffier

Le président

H. Jung

A. W. H. Meij


1: Langue de procédure: le français.