Language of document : ECLI:EU:T:2007:277

ARRÊT DU TRIBUNAL (chambre des pourvois)

12 septembre 2007 (*)

« Pourvoi – Fonction publique – Fonctionnaires – Pensions – Annulation en première instance de décisions de la Commission portant calcul des annuités de pension – Transfert des droits à pension nationaux »

Dans l’affaire T‑20/07 P,

ayant pour objet un pourvoi formé contre l’arrêt du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (première chambre) du 14 novembre 2006, Chatziioannidou/Commission (F‑100/05, non encore publié au Recueil), et tendant à l’annulation de cet arrêt,

Commission des Communautés européennes, représentée par M. D. Martin et Mme K. Herrmann, en qualité d’agents,

partie requérante,

l’autre partie à la procédure étant

Eleni Chatziioannidou, fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Auderghem (Belgique), représentée par MS. Pappas, avocat,

partie demanderesse en première instance,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (chambre des pourvois),

composé de MM. B. Vesterdorf, président, M. Jaeger, J. Pirrung, M. Vilaras et H. Legal, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend le présent

Arrêt

1        Par son pourvoi introduit au titre de l’article 9 de l’annexe I du statut de la Cour de justice, la Commission demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (première chambre) du 14 novembre 2006, Chatziioannidou/Commission (F‑100/05, non encore publié au Recueil, ci‑après l’« arrêt attaqué »), par lequel celui-ci a annulé ses décisions des 30 novembre 2004 et 20 février 2005 portant calcul des annuités de pension de la requérante à la suite du transfert vers le régime communautaire de l’équivalent actuariel des droits à pension acquis par celle-ci en Grèce (ci-après les « décisions litigieuses »).

 Cadre juridique

 Règlements relatifs à l’euro

 Règlement (CE) nº 1103/97

2        Aux termes du considérant 4 du règlement (CE) nº 1103/97 du Conseil, du 17 juin 1997, fixant certaines dispositions relatives à l’introduction de l’euro (JO L 162, p. 1), « il est nécessaire, dans le fonctionnement du marché commun et pour le passage à la monnaie unique, d’établir la sécurité juridique pour les citoyens et les entreprises dans tous les États membres, en ce qui concerne certaines dispositions relatives à l’introduction de l’euro, bien avant l’entrée dans la troisième phase ; […] l’établissement précoce de la sécurité juridique permettra aux citoyens et aux entreprises de se préparer dans de bonnes conditions ».

3        Aux termes du considérant 7 du règlement n° 1103/97, « selon un principe général du droit, la continuité des contrats et autres instruments juridiques n’est pas affectée par l’introduction d’une nouvelle monnaie ; […] le principe de liberté contractuelle doit être respecté ; […] le principe de continuité doit être compatible avec toute convention entre les parties en ce qui concerne l’introduction de l’euro ; […] en vue de renforcer la sécurité et la clarté du droit, il convient de confirmer explicitement que le principe de la continuité des contrats et autres instruments juridiques s’applique entre les anciennes monnaies nationales et l’euro et entre l’écu au sens de l’article 109 G du traité et tel que défini par le règlement (CE) n° 3320/94 et l’euro ; […] cela signifie en particulier que, pour les instruments à taux d’intérêt fixe, l’introduction de l’euro ne modifie pas le taux d’intérêt nominal payable par le débiteur ; […] les dispositions relatives à la continuité ne peuvent atteindre leur objectif, qui est de fournir la sécurité juridique et la transparence pour les agents économiques, en particulier les consommateurs, qu’à condition d’entrer en vigueur le plus rapidement possible ».

4        Aux termes de l’article 1er du règlement n° 1103/97, on entend par « instruments juridiques » aux fins de l’application dudit règlement « les dispositions législatives et réglementaires, actes administratifs, décisions de justice, contrats, actes juridiques unilatéraux, instruments de paiement autres que les billets et les pièces, et autres instruments ayant des effets juridiques ».

5        Aux termes de l’article 3 du règlement n° 1103/97 :

« L’introduction de l’euro n’a pas pour effet de modifier les termes d’un instrument juridique ou de libérer ou de dispenser de son exécution, et elle ne donne pas à une partie le droit de modifier un tel instrument ou d’y mettre fin unilatéralement. La présente disposition s’applique sans préjudice de ce dont les parties sont convenues. »

 Règlement (CE) n° 974/98

6        Aux termes de l’article 1er du règlement (CE) nº 974/98 du Conseil, du 3 mai 1998, concernant l’introduction de l’euro (JO L 139, p. 1), on entend par « instruments juridiques » aux fins de l’application dudit règlement « les dispositions législatives et réglementaires, actes administratifs, décisions de justice, contrats, actes juridiques unilatéraux, instruments de paiement autres que les billets et les pièces, et autres instruments ayant des effets juridiques ».

7        Aux termes de l’article 14 du règlement n° 974/98, « [l]es références aux unités monétaires nationales qui figurent dans des instruments juridiques existant à la fin de la période transitoire doivent être lues comme des références à l’unité euro en appliquant les taux de conversion respectifs ».

 Statut des fonctionnaires des Communautés européennes

8        Aux termes de l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après le « statut »), « le fonctionnaire qui entre au service des Communautés après avoir :

–        cessé ses activités auprès d’une administration, d’une organisation nationale ou internationale, ou

–        exercé une activité salariée ou non salariée,

a la faculté, au moment de sa titularisation, de faire verser aux Communautés, soit l’équivalent actuariel, soit le forfait de rachat des droits à pension d’ancienneté qu’il a acquis au titre des activités visées ci-dessus.

En pareil cas, l’institution où le fonctionnaire est en service détermine, compte tenu du grade de titularisation, le nombre des annuités qu’elle prend en compte d’après son propre régime au titre de la période de service antérieur sur la base du montant de l’équivalent actuariel ou du forfait de rachat. »

9        Aux termes de l’article 4, paragraphe 4, des dispositions générales d’exécution de l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut, telles que modifiées par décisions de la Commission des 4 février 1972 et 16 mars 1977 (Informations administratives n° 789, du 16 avril 1993, ci-après les « DGE »), « [l]e montant transféré au compte des Communautés dans une monnaie autre que le franc belge, est – pour la détermination du nombre d’annuités – converti en francs belges conformément aux modalités suivantes : […] pour le fonctionnaire titularisé après le 31 décembre 1971 […] le montant transféré est [converti] sur la base du taux actualisé moyen fixé par la Commission pour la période du 1er janvier 1972 jusqu’à la date de titularisation du fonctionnaire ».

10      Par décision du 28 avril 2004, la Commission a abrogé les DGE et adopté de nouvelles dispositions générales d’exécution des articles 11 et 12 de l’annexe VIII du statut, tel que modifié par le règlement (CE, Euratom) n° 723/2004 du Conseil, du 22 mars 2004 (JO L 124, p. 1). Ces nouvelles dispositions générales d’exécution prévoient, en leur article 7, paragraphe 3, que le montant transféré aux Communautés dans une monnaie autre que l’euro est, pour la détermination du nombre d’annuités, converti en euros sur la base du taux mensuel fixé par la Commission pour l’exécution du budget pour le mois d’enregistrement de la demande. Elles énoncent également, en leur article 11, paragraphe 1, qu’elles entrent en vigueur le 1er mai 2004 et, en leur article 11, paragraphe 2, que les DGE restent applicables pour les demandes introduites avant le 1er mai 2004.

 Faits à l’origine du litige

11      Les faits qui sont à l’origine du litige sont énoncés dans l’arrêt attaqué dans les termes suivants :

« 13      La requérante, de nationalité grecque, a été recrutée à la Commission en qualité de fonctionnaire stagiaire le 1er juin 2002 et titularisée le 1er mars 2003.

14      Le 7 avril 2004, elle a sollicité, au titre de l’article 11, paragraphe 2, du statut et [des] DGE, le transfert, vers le régime communautaire, des droits à pension acquis, avant son entrée en service à la Commission, auprès de deux organismes de pension en Grèce (TEVE et IKA).

15      Par une note du 30 novembre 2004, le service compétent de la Commission a communiqué à la requérante la bonification d’annuités qui résulterait du transfert de ses droits acquis auprès de TEVE. Par une note du 16 février 2005, le même service l’a informée de la bonification relative aux droits acquis auprès d[’]IKA. Ces bonifications ont été calculées à partir des montants transférables notifiés par TEVE (12 053,76 euros) et IKA (68 000,26 euros).

16      Le 10 mars 2005, la requérante a introduit une réclamation à l’encontre de ces notes, dans laquelle elle faisait valoir, notamment, que l’introduction de l’euro ne pouvait avoir légalement pour effet d’écarter l’application de l’article 4, paragraphe 4, des DGE.

17      Le 7 juillet 2005, l’AIPN a rejeté cette réclamation. »

12      Le 13 octobre 2005, Mme Chatziioannidou a introduit un recours en annulation devant le Tribunal contre les décisions litigieuses.

13      Le recours a initialement été enregistré au greffe du Tribunal sous le numéro T‑387/05.

14      Par ordonnance du 15 décembre 2005, le Tribunal, en application de l’article 3, paragraphe 3, de la décision 2004/752/CE, Euratom du Conseil, du 2 novembre 2004, instituant le Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (JO L 333, p. 7), a renvoyé l’affaire devant le Tribunal de la fonction publique. Le recours a été enregistré au greffe du Tribunal de la fonction publique sous le numéro F‑100/05.

 Sur l’arrêt attaqué

15      À l’appui de son recours, Mme Chatziioannidou a notamment invoqué un moyen tiré de la violation de l’article 3 du règlement n° 1103/97 ainsi que des principes de sécurité et de continuité juridiques par les décisions litigieuses.

16      Le Tribunal de la fonction publique a accueilli ce moyen pour les motifs suivants :

« 34      Il ressort des productions écrites de la Commission et des précisions que sa représentante a apportées lors de l’audience que la lettre de l’article 4, paragraphe 4, des DGE n’a pas été modifiée le 1er janvier 2002, à la fin de la période transitoire d’introduction de l’euro. La Commission a en effet estimé être dans l’obligation, à compter de cette date, sans même adopter un texte modifiant la lettre dudit paragraphe, de constater que cette disposition était, en vertu de l’article 14 du règlement n° 974/98, rendue inapplicable aux demandes de transfert de droits à pension acquis dans les États membres ayant adopté l’euro.

35      La Commission n’a pas seulement soutenu que l’introduction de l’euro avait eu pour effet de modifier les modalités de calcul des annuités de pension auxquelles les sommes transférées donnent droit. Pour justifier légalement son changement de pratique, elle a également fait valoir qu’elle était dans une situation de compétence liée et était donc tenue d’abandonner le mécanisme du taux de change moyen qu’elle avait jusqu’alors appliqué, celui-ci étant frappé de caducité.

36      Or, en estimant que la suppression de ce mécanisme était inévitablement liée à l’introduction de l’euro, la Commission a méconnu les dispositions du règlement n° 1103/97 qui visent à garantir que l’introduction de l’euro s’effectue, au nom du principe de sécurité juridique, dans la plus grande neutralité possible.

37      En effet, ainsi que la Cour l’a dit pour droit, il ressort des considérants 4 et 7, ainsi que de l’article 3 du règlement n° 1103/97, que ce règlement, conformément aux principes de sécurité juridique et de continuité des contrats et autres instruments juridiques, ‘vise à assurer que le passage à la monnaie unique s’effectuera sans affecter les engagements déjà souscrits par les citoyens et les entreprises’ (voir, en ce sens, arrêt [de la Cour du 14 septembre 2004,] Verbraucher-Zentrale Hamburg [, C‑19/03, Rec. p. I‑8183], point 31). La Cour, au point 51 du même arrêt, a considéré que ledit règlement avait également fixé un ‘impératif de neutralité du passage à l’euro’. C’est à la lumière de ces considérations que la Cour a, dans l’arrêt Verbaucher-Zentrale Hamburg [, précité], estimé que les opérations d’arrondissage des sommes d’argent après leur conversion en euros devaient avoir la plus grande précision possible.

38      Contrairement à ce que soutient la Commission, le règlement n° 1103/97 n’a pas pour seul objet de garantir le maintien des engagements contractuels souscrits par les citoyens et les entreprises, à l’exclusion des engagements contractuels souscrits par les collectivités publiques. En effet, l’impératif de neutralité du passage à l’euro fixé par ce règlement, illustré notamment par ses dispositions visant à obtenir une grande précision dans les opérations de conversion monétaire liées à l’introduction de l’euro, ne serait pas respecté si les collectivités publiques, tant au niveau national qu’au niveau communautaire, pouvaient invoquer le seul passage à la monnaie unique pour modifier leurs pratiques ou leurs réglementations. De même, aucune des dispositions dudit règlement ne permet de considérer que les employeurs publics, quels qu’ils soient, auraient été déliés de l’obligation d’assurer que le passage à l’euro s’effectue sans affecter, notamment, leurs relations avec leurs agents.

39      Il résulte ainsi des buts poursuivis par le règlement n° 1103/97 que les institutions communautaires devaient s’efforcer de garantir que l’introduction de l’euro soit le plus neutre possible, notamment sur le contenu de la réglementation applicable à leurs agents.

40      La Commission fait cependant valoir qu’elle était tenue de se conformer à l’article 14 du règlement n° 974/98 et de constater que l’inapplicabilité de l’article 4, paragraphe 4, des DGE était une conséquence économique et logique inévitable de l’introduction de l’euro.

41      Toutefois, ces arguments ne sont pas susceptibles d’être accueillis.

42      En effet, l’article 14 du règlement n° 974/98 ne saurait être interprété en ce sens qu’il permettrait de déroger aux buts susmentionnés du règlement n° 1103/97. Cet article a pour seul objet de faciliter la transition matérielle vers l’euro. En prévoyant que les références aux unités monétaires nationales figurant dans les instruments juridiques existant à la fin de la période transitoire doivent être lues comme des références à l’euro, cet article vise à dispenser les auteurs d’instruments juridiques de toute obligation de reformulation et d’adoption de nouveaux instruments pour les seuls besoins du passage à l’euro.

43      Ainsi que l’a soutenu le représentant de la requérante à l’audience, l’article 14 du règlement n° 974/98 ne peut, compte tenu du règlement n° 1103/97, avoir pour finalité ni même pour effet d’habiliter les auteurs d’instruments juridiques à tirer parti de l’adoption de l’euro pour modifier le fond du droit applicable. Si cet article était interprété en ce sens qu’il leur permet de modifier la législation sans adoption de nouveaux textes, il créerait une situation d’incertitude sur le droit en vigueur, ce qui serait en contradiction avec l’objectif de sécurité juridique poursuivi par le règlement n° 1103/97.

44      Dans le présent litige, la Commission n’a d’ailleurs pas été en mesure d’indiquer, en réponse aux questions du Tribunal lors de l’audience, selon quelles modalités la modification de la portée juridique de l’article 4, paragraphe 4, des DGE avait été portée à la connaissance du personnel.

45      C’est donc à tort que la Commission a estimé, sur la base de l’article 14 du règlement n° 974/98, être dans l’obligation de modifier la portée juridique de l’article 4, paragraphe 4, des DGE.

46      En outre, la Commission ne peut valablement prétendre que la suppression du mécanisme du taux de change moyen aurait été la conséquence inévitable de l’introduction de l’euro.

47      En effet, ainsi que l’indique à juste titre la requérante dans son mémoire en réplique, l’introduction de l’euro à compter du 1er janvier 2002 ne pouvait avoir d’incidence sur le calcul des taux de change entre le franc belge et les autres monnaies nationales pour la période antérieure à cette date. Il est manifeste que l’adoption de l’euro n’a pu rétroactivement faire disparaître l’évolution passée des parités entre les monnaies des États membres ayant par la suite adopté la monnaie unique.

48      Le mécanisme du taux de change moyen actualisé avait précisément pour but de corriger les effets des fluctuations monétaires enregistrées au cours de l’ensemble de la période pendant laquelle le fonctionnaire concerné avait cotisé auprès d’un régime national de pension. Il avait pour objet de représenter le plus fidèlement possible, jusqu’à la date de la titularisation de ce fonctionnaire, la valeur en francs belges des sommes transférées, qui étaient exprimées en monnaie nationale.

49      Certes, l’adoption de l’euro a rendu sans objet, pour l’avenir, les opérations de conversion jusqu’alors pratiquées entre le franc belge et les monnaies nationales. Toutefois, la raison d’être du mécanisme du taux de change moyen actualisé pour les périodes antérieures au 1er janvier 2002 n’a pas disparu à compter de cette date.

50      Quant à l’argument, présenté à l’audience comme étant ‘de bon sens’ par la représentante de la Commission, tiré de ce que, à la date de la demande de transfert de la requérante, postérieure au 1er janvier 2002, l’opération de conversion en euros d’un montant transféré exprimé en euros, était inconcevable, il ne peut être retenu.

51      En effet, l’objet même du mécanisme du taux de change moyen actualisé était d’opérer une conversion monétaire du montant transféré sur l’ensemble de la période de cotisation au régime national. L’article 4, paragraphe 4, sous b), quatrième alinéa, des DGE prévoyait ainsi seulement à titre dérogatoire, à la demande de l’agent, que le montant à transférer pouvait être converti sur la base du taux actualisé en vigueur à la date du transfert. La Commission ne pouvait donc, en méconnaissance de la lettre même de l’article 4, paragraphe 4, des DGE considérer, à partir du 1er janvier 2002, que la période pertinente pour les opérations de conversion était limitée à la date de la demande de transfert, toujours postérieure à la date d’introduction de l’euro.

52      La suppression du mécanisme du taux de change moyen actualisé n’était donc pas une conséquence inévitable de l’introduction de l’euro (voir, par analogie, à propos de la suppression, lors du passage à l’euro, du système de taux spéciaux de conversion applicables au transfert de rémunération des agents de la Banque européenne d’investissement, l’arrêt du Tribunal [...] du 6 mars 2001, Dunnett e.a./BEI, T‑192/99, Rec. p. II‑813, points 94 à 96).

53      D’ailleurs, il ressort de ses écrits, en particulier des points 31 à 33 de son mémoire en défense, que la Commission avait l’intention, pour des raisons indépendantes du passage à l’euro, notamment de caractère budgétaire, de remettre en cause ledit mécanisme.

54      Enfin, l’argument de la Commission, tiré de ce que le calcul de la valeur financière réelle des contributions versées par la requérante aux régimes de pension grecs relèverait de la seule compétence des autorités nationales administrant ces régimes et de ce que ces montants étaient exprimés en euros lors de leur communication à la Commission, n’est pas davantage susceptible d’être accueilli.

55      En effet, d’une part, ces montants ne pouvaient qu’être exprimés en euros lors de leur transmission, après le 1er janvier 2002, aux services de la Commission, la période transitoire d’introduction de l’euro ayant pris fin à cette date. D’autre part, ainsi que la requérante l’a indiqué, la Commission appliquait, avant le 1er janvier 2002, le taux de change moyen actualisé dans tous les cas, y compris lorsque ces actifs étaient libellés en francs belges par les organismes nationaux de retraite concernés, de manière à garantir l’égalité de traitement entre tous les fonctionnaires sollicitant le transfert de droits à pension. La détermination par la Commission du nombre d’annuités de pension communautaire ne pouvait donc dépendre, pour les années pendant lesquelles des fluctuations monétaires existaient entre le franc belge et les monnaies nationales, de calculs effectués exclusivement au niveau national quant à la valeur des actifs transférés.

56      De telles opérations de conversion monétaire au niveau communautaire ne constituent d’ailleurs pas une ingérence dans les compétences des autorités nationales. Ainsi que le Tribunal [...] l’a déjà jugé, l’opération de conversion des actifs transférés en annuités de pension communautaires incombe aux autorités administratives communautaires (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal [...] du 15 décembre 1998, Bang-Hansen/Commission, T‑233/97, RecFP p. I‑A‑625 et II‑1889, point 38, et du 18 mars 2004, Radauer/Conseil, T‑67/02, RecFP p. I‑A‑89 et II‑395, points 28 à 31).

57      Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que la décision par laquelle la Commission a estimé que l’article 4, paragraphe 4, des DGE était devenu inapplicable en raison de l’introduction de l’euro est illégale.

58      Par conséquent, les décisions litigieuses, prises en application de ladite décision, sont elles-mêmes illégales et, dès lors, sans qu’il soit besoin d’examiner l’autre moyen de la requête, doivent être annulées. »

17      En conséquence, le Tribunal de la fonction publique a annulé les décisions litigieuses.

 Sur le pourvoi

18      Par mémoire déposé au greffe du Tribunal le 26 janvier 2007, la Commission a formé le présent pourvoi.

19      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler l’arrêt attaqué ;

–        rejeter le recours de Mme Chatziioannidou ;

–        décider que chacune des parties supportera ses propres dépens afférents à la présente instance et à celle engagée devant le Tribunal de la fonction publique.

20      Mme Chatziioannidou conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le pourvoi comme non fondé et faire droit à ses conclusions présentées en première instance ;

–        condamner la Commission aux dépens du pourvoi.

21      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (chambre des pourvois) a constaté qu’aucune demande de fixation d’une audience n’avait été présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et a décidé, en application de l’article 146 du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure.

22      Au soutien de son pourvoi, la Commission invoque un moyen unique, tiré du non-respect du droit communautaire par le Tribunal de la fonction publique. Ce moyen est pris, en substance, d’une violation des règlements nos 1103/97 et 974/98 ainsi que des DGE.

23      Mme Chatziioannidou conteste le caractère fondé de ce moyen unique et soutient le raisonnement suivi dans l’arrêt attaqué par le Tribunal de la fonction publique.

 Sur la première branche du moyen, tirée de la violation du règlement n° 1103/97

 Arguments de la Commission

24      La Commission fait grief au Tribunal de la fonction publique d’avoir donné, aux points 38 et 39 de l’arrêt attaqué, une interprétation manifestement erronée au règlement n° 1103/97.

25      La Commission rappelle qu’il ressort de l’ensemble des motifs et des dispositions du règlement n° 1103/97 que celui-ci vise à assurer que le passage à la monnaie unique s’effectue sans affecter les engagements déjà souscrits par les citoyens et les entreprises (arrêt Verbraucher-Zentrale Hamburg, point 16 supra, point 31).

26      Selon la Commission, il découle expressément du règlement n° 1103/97 et, en particulier, de ses considérants 4 et 7 que, au titre du principe général de la continuité des contrats, l’introduction de l’euro ne peut avoir pour effet de modifier les termes d’une relation, contractuelle ou découlant d’autres instruments juridiques, existant à la date de cette introduction.

27      La Commission soutient que, à la date d’introduction de l’euro, elle n’avait aucune relation contractuelle avec Mme Chatziioannidou, celle-ci n’ayant été recrutée en qualité de fonctionnaire stagiaire que le 1er juin 2002. La Commission prétend en outre que, à supposer même que le règlement n° 1103/97 vise à préserver la continuité de relations autres que contractuelles, la même conclusion s’imposerait à défaut d’existence d’une quelconque relation entre la Commission et l’intéressée au 1er janvier 2002, date de l’introduction de l’euro.

28      La Commission soutient, par ailleurs, que l’impératif de neutralité du passage à l’euro concerne des opérations telles que la fixation de règles relatives aux opérations de conversion. Or, il ne serait pas contestable, ni d’ailleurs contesté, selon elle, que le passage à l’euro, lors du transfert de droits à pension acquis dans un État membre, n’a entraîné aucune modification ou diminution des droits transférés par des fonctionnaires avant ce passage à l’euro.

29      La Commission estime, ensuite, que soutenir, comme le fait le Tribunal de la fonction publique, que l’impératif de neutralité du passage à l’euro signifie que les institutions communautaires ne pourraient pas modifier leurs réglementations, en ce compris le statut, ne trouve aucun appui ni dans la lettre du règlement n° 1103/97 ni même dans son esprit.

30      Enfin, la Commission avance que le règlement n° 1103/97 vise seulement la protection des agents économiques, ce que ne seraient à l’évidence pas les institutions communautaires lorsqu’elles adoptent des réglementations concernant le transfert des droits à pensions de leurs agents, les relations entre la Commission et l’intéressée étant fondées sur une réglementation, le statut, et nullement sur une relation contractuelle.

 Appréciation du Tribunal

31      Premièrement, il y a lieu de rappeler que l’article 3 du règlement n° 1103/97 prévoit que l’introduction de l’euro n’a pas pour effet de modifier les termes d’un instrument juridique ou de libérer ou de dispenser de son exécution.

32      L’article 1er du règlement n° 1103/97 définit les « instruments juridiques » comme étant, aux fins de l’application dudit règlement, les dispositions législatives et réglementaires, les actes administratifs, les décisions de justice, les contrats, les actes juridiques unilatéraux, les instruments de paiement autres que les billets et les pièces et les « autres instruments ayant des effets juridiques ».

33      Par ailleurs, dans son arrêt du 18 janvier 2007, Estager (C‑359/05, non encore publié au Recueil), la Cour a considéré qu’« il ne saurait faire de doute que le montant d’une taxe […] constitue un ‘terme d’un instrument juridique’ au sens de l’article 3 du règlement n° 1103/97 » auquel s’appliquent le principe de continuité des instruments juridiques et l’objectif de neutralité du passage à l’euro au sens des règlements nos 1103/97 et 974/98 (points 25 et 26 de cet arrêt).

34      S’appliquant également aux dispositions législatives et réglementaires ainsi qu’aux actes à caractère administratif, en vertu de l’article 1er du règlement n° 1103/97, ce règlement ne saurait dès lors être interprété comme se limitant à imposer un principe de continuité des contrats. Il prévoit, en revanche, un impératif de neutralité du passage à l’euro – lequel se traduit, notamment, dans le domaine contractuel, par un principe de continuité des contrats – qui s’impose pour l’ensemble des instruments juridiques qui relèvent de son champ d’application.

35      C’est en substance ce qu’expose le Tribunal de la fonction publique aux points 36 et 38 de l’arrêt attaqué.

36      Il convient dès lors d’écarter l’argumentation de la Commission par laquelle celle-ci, se référant à l’arrêt Verbraucher-Zentrale Hamburg, point 16 supra, entend cantonner le principe de continuité à la seule continuité des contrats. En effet, cette affaire, à l’occasion de laquelle la Cour a rappelé que ce principe résultait du règlement n° 1103/97, concernait l’application dudit règlement à une question relevant du domaine contractuel. Il ne saurait donc en être déduit que le principe de continuité ne s’applique qu’à ce seul domaine.

37      Le premier grief avancé par la Commission ne saurait dès lors être retenu.

38      Deuxièmement, s’agissant du grief selon lequel l’impératif de neutralité du passage à l’euro n’aurait pas pour autant empêché la Commission de modifier sa réglementation, il convient de constater que, dans l’arrêt Estager, point 33 supra, la Cour a jugé ce qui suit :

« 32      [S]’il est vrai que […] les règlements nos 1103/97 et 2866/98 n’ont nullement porté atteinte à la compétence fiscale des États membres et à la faculté pour ces derniers d’augmenter le montant de leurs taxes, il n’en demeure pas moins que la conversion en euros du montant d’une taxe doit, dans des circonstances telles que celles du litige au principal, être effectuée dans le respect des dispositions prévues par le règlement n° 1103/97 ainsi que du principe de continuité des instruments juridiques et de l’objectif de neutralité du passage à l’euro.

33      Cela implique, notamment, des exigences de sécurité juridique et de transparence qui permettent de protéger la confiance des agents économiques dans l’introduction de l’euro. En effet, ainsi qu’il ressort du considérant 7 du règlement n° 1103/97, l’objectif des dispositions de ce même règlement relatives à la continuité des contrats et autres instruments juridiques est de fournir la sécurité juridique et la transparence pour les agents économiques.

34      Il en résulte que, lorsqu’il procède simultanément à la conversion en euros et à l’augmentation du montant d’une taxe, comme c’est le cas dans l’affaire au principal, un État membre doit veiller à ce que la sécurité juridique et la transparence pour les agents économiques soient garanties.

35      Le respect de ces exigences suppose notamment que lesdits agents puissent distinguer clairement dans les textes réglementaires en cause la décision des autorités de cet État membre d’augmenter le montant de la taxe de l’opération de conversion en euros de ce montant. »

39      La Cour a, en conséquence, jugé que « les règlements nos 1103/97 et 974/98 doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation nationale qui, lors de l’opération de conversion en euros du montant d’une taxe […] a porté celui-ci à un montant supérieur à celui qui aurait résulté de l’application des règles de conversion prévues par ces règlements, à moins qu’une telle augmentation respecte les exigences de sécurité juridique et de transparence garanties par lesdits règlements, ce qui implique que les textes réglementaires en cause permettent de distinguer clairement la décision des autorités d’un État membre d’augmenter ce montant de l’opération de conversion en euros dudit montant ».

40      Il convient de souligner que cette affaire concernait la modification d’une taxe établie avant l’introduction de l’euro, portant sur les quantités de farines, de semoules et de gruaux de blé tendre livrées ou mises en œuvre en vue de la consommation humaine, et s’appliquant à compter du 1er janvier 2002. La réglementation relative à cette taxe, établie avant l’introduction de l’euro, régissait par conséquent en l’espèce des situations nées après cette introduction.

41      Il découle donc de l’article 3 du règlement n° 1103/97 et de l’interprétation qu’en a donnée la Cour dans l’arrêt Estager, point 33 supra, que les dispositions législatives ou réglementaires, notamment visées par ce règlement, ne sont en rien modifiées du fait de l’introduction de l’euro et qu’elles s’appliquent de manière inchangée tant aux situations qu’elles régissaient avant l’introduction de l’euro qu’à celles qu’elles régissent après cette introduction. Il s’ensuit que le règlement n° 1103/97 ne requiert l’existence d’aucune relation, contractuelle ou non contractuelle, antérieure à l’entrée en vigueur de l’euro, pour que le principe de continuité s’applique aux situations régies par les instruments juridiques visés par cet article.

42      Par conséquent, si le législateur ou les autorités concernées entendent modifier les termes d’un instrument juridique relevant du champ d’application de l’article 3 du règlement n° 1103/97 ou libérer ou dispenser de son exécution, une modification explicite de cet instrument juridique doit être introduite (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 22 février 1989, Commission/France et Royaume-Uni, 92/87 et 93/87, Rec. p. 405, points 22 à 24).

43      Dans la présente affaire, la Commission devait donc, conformément au règlement n° 1103/97, appliquer de manière inchangée les dispositions de l’article 4, paragraphe 4, des DGE. En revanche, si elle entendait donner une autre portée à ces dispositions, il lui appartenait de modifier ces règles.

44      Or, il ressort des motifs non contestés de l’arrêt attaqué qu’elle n’avait pas modifié les dispositions de l’article 4, paragraphe 4, des DGE au moment où la demande de transfert a été introduite par Mme Chatziioannidou, c’est-à-dire le 7 avril 2004, la modification des DGE par la Commission n’étant intervenue que le 28 avril 2004 et les nouvelles DGE n’étant pas applicables aux demandes introduites avant le 1er mai 2004. Par ailleurs, la Commission a considéré que l’article 4, paragraphe 4, des DGE, telles que publiées aux Informations administratives du 16 avril 1993, devait, selon elle, être lu, à partir du 1er janvier 2002, à la lumière de l’article 14 du règlement n° 974/98 et qu’il n’y avait dès lors plus lieu d’appliquer – pour les seules monnaies des États membres ayant adopté l’euro – l’opération de change prévue à l’article 4, paragraphe 4, sous a) et b).

45      Le deuxième grief avancé par la Commission doit dès lors être rejeté. En effet, si la Commission pouvait modifier cette réglementation, il est en l’espèce établi qu’elle n’avait pas modifié formellement les anciennes DGE qu’elle a appliquées à la demande de transfert de Mme Chatziioannidou, son refus d’appliquer le mécanisme du taux de change moyen résultant uniquement de l’interprétation qu’elle estimait devoir donner aux dispositions de l’article 4, paragraphe 4, des DGE au regard de l’article 14 du règlement n° 974/98.

46      Troisièmement, la Commission soutient que le règlement n° 1103/97 ne prévoit qu’une protection des agents économiques, catégorie à laquelle n’appartiendraient pas les institutions communautaires lorsqu’elles adoptent des réglementations concernant leurs agents.

47      Par une telle argumentation, la Commission entend se prévaloir de ce que le règlement n° 1103/97 et, plus particulièrement, l’impératif de neutralité du passage à l’euro qu’il prévoit, n’assure pas sa propre protection, puisqu’elle ne serait pas un agent économique. Or, cette considération est étrangère à l’objet du litige, puisqu’il s’agit en l’espèce de savoir si une réglementation a été appliquée par la Commission à l’un de ses agents, ainsi que l’a retenu le Tribunal de la fonction publique, en violation des droits de ce dernier et des règles prévues par le règlement n° 1103/97. Le grief est dès lors dénué de pertinence.

48      Par ailleurs, même à supposer que, par cette argumentation, la Commission ait entendu soutenir que le règlement n° 1103/97 n’assurerait qu’une protection des agents économiques, catégorie à laquelle n’appartiendraient pas les agents des institutions, il y aurait également lieu d’écarter ladite argumentation.

49      En effet, il y a lieu de relever que la Commission ne définit pas ce qu’elle entend par « agents économiques ».

50      Il ressort toutefois des écritures de la Commission que celle-ci fait référence aux considérants 4 et 7 du règlement n° 1103/97, qui mentionnent les « entreprises » et les « consommateurs » dans le cadre de leurs relations contractuelles ainsi que les « citoyens ».

51      Il y a lieu d’observer à cet égard que la notion d’agents économiques n’apparaît qu’au considérant 7 du règlement n° 1103/97, où il est indiqué que « les dispositions relatives à la continuité ne peuvent atteindre leur objectif, qui est de fournir la sécurité juridique et la transparence pour les agents économiques, en particulier les consommateurs, qu’à condition d’entrer en vigueur le plus rapidement possible ».

52      Toutefois, si ce considérant a pour objet d’apporter une illustration du principe de continuité qu’établit le règlement n° 1103/97, la définition des « instruments juridiques » qui figure à l’article 1er du même règlement qui vise notamment les dispositions législatives et réglementaires, les actes administratifs et les « autres instruments ayant des effets juridiques » ne permet pas de conclure que le règlement n° 1103/97, et, en particulier, le principe de continuité qu’il établit, ne s’appliquerait pas aux relations entre les institutions et leurs agents, mais seulement à celles existant entre les agents économiques.

53      Une telle restriction ne figure en outre ni à l’article 1er ni à l’article 3 du règlement n° 1103/97. Par ailleurs, le considérant 4 du règlement se réfère plus largement à la notion de « citoyens ».

54      L’argumentation avancée par la Commission ne saurait dès lors prospérer.

55      Quatrièmement, la Commission allègue que l’impératif de neutralité, qui concerne, selon elle, des opérations telles que la fixation de règles relatives aux opérations de conversion, a été respecté dès lors que le passage à l’euro, lors du transfert de droits à la pension acquis dans un État membre, n’aurait entraîné aucune modification ou diminution des droits transférés par des fonctionnaires avant ce passage à l’euro.

56      Néanmoins, le Tribunal de la fonction publique n’a pas critiqué l’application des règles relatives aux taux de conversion et aux arrondis prévues par le règlement n° 1103/97 telle qu’elle aurait été opérée lors de la conversion en euros des montants qui étaient initialement libellés en drachmes grecques. Au demeurant, cette opération de conversion n’incombait pas à la Commission.

57      En revanche, le Tribunal de la fonction publique a constaté que la Commission n’avait pas appliqué le mécanisme du taux de change moyen actualisé, en dépit de l’absence de modification des dispositions de l’article 4, paragraphe 4, des DGE, et c’est pour cette raison qu’il a considéré que le principe de continuité prévu par l’article 3 du règlement n° 1103/97 avait été violé par la Commission.

58      L’argumentation de la Commission sur ce point ne saurait dès lors être accueillie.

59      Enfin, cinquièmement, la Commission soutient, en substance, que l’arrêt attaqué impliquerait que toute modification par les institutions de leur réglementation serait interdite, ce que ne prévoirait pas le règlement n° 1103/97.

60      Dans l’arrêt attaqué, le Tribunal de la fonction publique s’est limité à constater que la Commission avait donné une interprétation erronée aux dispositions de l’article 4, paragraphe 4, des DGE et n’a indiqué aucun motif qui impliquerait que la Commission se serait vu interdire la modification de sa réglementation.

61      Il suffit en outre de relever à cet égard qu’il est établi qu’une telle modification de la réglementation applicable a été opérée par la Commission après la demande de transfert de ses droits à pension introduite le 7 avril 2004 par Mme Chatziioannidou.

62      L’argumentation de la Commission ne saurait dès lors prospérer.

63      En conclusion, la première branche du moyen unique avancé par la Commission doit être rejetée.

 Sur la deuxième branche du moyen, tirée de la violation du règlement n° 974/98

64      Selon la Commission, le Tribunal de la fonction publique a rejeté l’argumentation de la Commission essentiellement au motif que « l’article 14 du règlement n° 974/98 ne saurait être interprété en ce sens qu’il permettrait de déroger aux buts susmentionnés du règlement n° 1103/97 » (point 42 de l’arrêt attaqué).

65      Or, selon la Commission, il découle de l’argumentation qu’elle a développée dans le cadre de la première branche de son moyen unique que la validité des décisions adoptées par la Commission à l’égard de Mme Chatziioannidou aurait dû être appréciée par le Tribunal de la fonction publique au regard du seul règlement n° 974/98.

66      La Commission estime que, depuis le 1er janvier 2002, date à laquelle a pris fin la période transitoire d’introduction de l’euro visée à l’article 1er du règlement n° 974/98, en application des dispositions précitées de l’article 14 dudit règlement, l’article 4, paragraphe 4, des DGE doit être lu comme suit : « le montant transféré au compte des Communautés dans une monnaie autre que l’euro est – pour la détermination du nombre d’annuités – converti en euros ».

67      La Commission considère en conséquence que cette dernière disposition, dans sa version en vigueur antérieurement au 1er janvier 2002, n’est plus applicable aux demandes de transfert de droits à pension à partir d’États membres, telle la Grèce, qui ont adopté l’euro.

68      Néanmoins, ainsi qu’il a été jugé aux points 33 à 35 ci-dessus, le règlement n° 1103/97 était applicable en l’espèce. C’est dès lors à bon droit que le Tribunal de la fonction publique a jugé que l’article 14 du règlement n° 974/98 ne saurait être interprété en ce sens qu’il permettrait de déroger aux buts susmentionnés du règlement n° 1103/97.

69      L’argumentation de la Commission ne saurait donc être accueillie et la deuxième branche du moyen doit, dès lors, être rejetée.

 Sur la troisième branche du moyen, tirée de la violation des DGE

70      La troisième branche du moyen est dirigée contre les points 48, 55 et 56 de l’arrêt attaqué et s’articule en quatre griefs.

 Sur le premier grief

71      La Commission soutient, en substance, que le point 55 de l’arrêt attaqué est erroné, tant en fait qu’en droit, en ce qu’il indique que la Commission aurait appliqué, même avant le 1er janvier 2002, le taux de change moyen actualisé, y compris lorsque les actifs étaient libellés en francs belges.

72      D’une part, elle allègue qu’elle ne se souvient pas avoir dit cela lors de l’audience devant le Tribunal de la fonction publique et que cela ne figure pas dans les écritures de Mme Chatziioannidou. D’autre part, elle estime que cette affirmation est difficilement compréhensible, dès lors que l’application d’un taux de change moyen actualisé dans une telle hypothèse serait contraire à la lettre de l’article 4, paragraphe 4, des DGE.

73      Il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante de la Cour, il convient de rejeter d’emblée les griefs qui sont dirigés contre des motifs surabondants d’un arrêt du Tribunal, puisque ceux-ci ne sauraient entraîner son annulation (par exemple, ordonnance de la Cour du 25 mars 1996, SPO e.a./Commission, C‑137/95 P, Rec. p. I‑1611, point 47). En l’espèce, le grief avancé par la Commission apparaît dirigé contre des motifs qui sont sans influence sur le dispositif de l’arrêt attaqué.

74      Il est en effet indifférent, eu égard aux circonstances de l’espèce, de savoir quelle était la pratique de la Commission en ce qui concerne les montants transférés en francs belges.

75      En conclusion, ce grief doit être rejeté comme inopérant.

 Sur le deuxième grief

–       Arguments de la Commission

76      La Commission soutient que, contrairement à ce qu’affirme le Tribunal de la fonction publique au point 56 de l’arrêt attaqué, ce n’est pas, en l’espèce, la méthode de calcul du nombre d’annuités qui est en cause, mais uniquement la méthode de calcul du montant de l’équivalent actuariel ou du forfait de rachat transféré à la Commission par les autorités grecques.

77      Selon la Commission, il résulte de la jurisprudence que le calcul du montant de l’équivalent actuariel ou du forfait de rachat relève de la seule compétence de l’autorité nationale qui administre le régime de pensions antérieur de l’intéressé (arrêt Radauer/Conseil, point 16 supra, point 31). Selon la Commission, si Mme Chatziioannidou estimait que la méthode de calcul utilisée par les organismes grecs lui portait préjudice, il lui appartenait de saisir les tribunaux grecs en faisant valoir, le cas échéant, une violation du droit grec applicable. En revanche, en raison du partage de compétence reconnu par la jurisprudence tant de la Cour que du Tribunal dans l’application de l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII, Mme Chatziioannidou ne pouvait en faire grief à la Commission.

78      Selon la Commission, les fluctuations des différentes monnaies nationales pendant la période précédant l’introduction de l’euro représentent en effet des circonstances extérieures à son action et, par conséquent, elle ne saurait être tenue responsable d’une éventuelle diminution de la valeur des cotisations versées dans des monnaies faibles consécutivement à leur conversion en euros par la caisse de pension nationale en vertu de l’article 11, paragraphe 2, troisième alinéa, de l’annexe VIII du statut.

79      La Commission considère que le raisonnement adopté par le Tribunal de la fonction publique au point 48 de l’arrêt attaqué, selon lequel le maintien du mécanisme du taux de change moyen actualisé est indispensable, puisqu’il est destiné à garantir la valeur la plus fidèle en euros des sommes transférées, se heurte à la conception même du système des pensions communautaires, selon laquelle les fonctionnaires ne récupèrent pas toujours la contre-valeur exacte des cotisations versées, comme c’est le cas dans le cadre des régimes de pension fondés sur le principe de capitalisation.

80      La Commission se réfère à cet égard au point 74 de l’arrêt Radauer/Conseil, point 16 supra, dans lequel il a été jugé ce qui suit :

«       [J]usqu’au 1er janvier 1999, les rémunérations, pensions et autres droits pécuniaires des fonctionnaires et agents étaient exprimés en francs belges et [...], depuis cette date, ils le sont en euros. Lorsque, comme en l’espèce, le montant représentatif des droits à pension nationaux est transféré au compte des Communautés dans une autre monnaie, il est nécessaire de le convertir dans la monnaie utilisée dans le système communautaire, et ce, comme avancé à juste titre par le Conseil, afin de neutraliser les variations de valeur dans le temps entre ces deux monnaies. Certes, dans le cas présent, le forfait de rachat des droits à pension autrichiens du requérant a été converti en francs belges, et non en euros, alors que celui-ci avait présenté sa demande de transfert après le 1er janvier 1999. Toutefois, cette circonstance a été sans conséquence sur le calcul de sa bonification d’annuités, puisque, depuis le 1er janvier 1999, les taux de conversion entre l’euro et les monnaies des États membres ayant adopté l’euro, dont la Belgique, sont irrévocablement fixés. »

–       Appréciation du Tribunal

81      Il convient de rappeler que, dans son arrêt Radauer/Conseil, point 16 supra, le Tribunal a jugé ce qui suit :

« 28      [Il] convient de relever que le système de transfert de l’équivalent actuariel ou du forfait de rachat des droits à pension d’ancienneté acquis par un fonctionnaire au titre d’activités professionnelles antérieures à son entrée au service des Communautés, comme le prévoit l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut, comporte deux phases principales distinctes.

29      La première phase consiste en l’établissement de l’équivalent actuariel ou du forfait de rachat par l’autorité nationale ou internationale qui administre le régime de pensions auquel l’intéressé était affilié antérieurement à son entrée au service des Communautés. Le calcul de l’équivalent actuariel a pour fonction de capitaliser la valeur d’une prestation périodique future et éventuelle et résulte donc d’un calcul du capital correspondant à la pension, à laquelle l’intéressé aura droit dans le cadre du régime de pensions national ou international concerné, en y appliquant un intérêt d’escompte, en raison du caractère anticipé du versement par rapport à l’échéance, ainsi qu’un coefficient de réduction proportionné au risque de décès du bénéficiaire avant la date d’échéance et déterminé en fonction de l’âge de l’assuré et des taux de mortalité, les deux éléments étant calculés selon le temps appelé à s’écouler entre le moment de la liquidation de l’équivalent actuariel et celui de l’octroi de la pension. Le calcul du forfait de rachat peut se caractériser dans les régimes d’assurance de caractère contributif par l’addition des cotisations versées par l’assuré et éventuellement de celles versées par son employeur, cotisations auxquelles peuvent être ajoutés des intérêts (arrêt de la Cour du 18 mars 1982, Bodson, 212/81, Rec. p. 1019, points 7 et 8).

30      La seconde phase consiste en la conversion, par l’institution communautaire concernée, du capital correspondant à l’équivalent actuariel ou au forfait de rachat en annuités à prendre en compte dans le régime de pensions communautaire, annuités qui viendront s’ajouter à celles auxquelles le fonctionnaire aura droit en raison de ses activités auprès des Communautés.

31      Il importe de souligner d’emblée que les deux décisions relatives, d’une part, au calcul de l’équivalent actuariel ou du forfait de rachat et, d’autre part, à la conversion de ces actifs en annuités se situent dans des ordres juridiques différents et relèvent chacune de contrôles juridictionnels propres. Ainsi, les modalités de calcul du montant de l’équivalent actuariel ou du forfait de rachat relèvent de la seule compétence de l’autorité nationale ou internationale qui administre le régime de pensions antérieur de l’intéressé (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 9 novembre 1989, Bonazzi-Bertottilli e.a./Commission, 75/88, 146/88 et 147/88, Rec. p. 3599, point 19, et arrêt du Tribunal du 15 décembre 1998, Bang-Hansen/Commission, T‑233/97, RecFP p. I‑A‑625 et II‑1889, point 39). Ce montant fait ensuite l’objet d’une réappréciation par l’institution communautaire concernée, et ce en fonction des règles valables pour le système de pensions communautaire. Dès lors que ces deux opérations reposent sur des données et des facteurs d’appréciation différents en ce qui concerne les antécédents des intéressés, leurs perspectives d’avenir, le niveau des contributions, la nature et le montant des prestations, il est tout à fait possible que la détermination des annuités à prendre en compte pour la pension communautaire aboutisse à un nombre différent de celui des annuités prises en compte par l’autorité nationale ou internationale (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 6 octobre 1983, Celant e.a./Commission, 118/82 à 123/82, Rec. p. 2995, point 28, et arrêt du Tribunal du 10 novembre 1999, Kristensen e.a./Conseil, T‑103/98, T‑104/98, T‑107/98, T‑113/98 et T‑118/98, RecFP p. I‑A‑215 et II‑1111, point 34). »

82      En l’espèce, Mme Chatziioannidou n’a contesté ni l’application faite par la République hellénique des taux de conversion ni le fait que le montant transféré par les autorités grecques l’ait été en euros. Elle a, en revanche, reproché à la Commission de ne pas avoir appliqué, pour la période antérieure à l’introduction de l’euro, le mécanisme du taux de change actualisé moyen.

83      C’est donc à tort que la Commission soutient que ce qui est en cause en l’espèce, c’est la méthode de calcul du montant de l’équivalent actuariel ou du forfait de rachat transféré à la Commission par les autorités grecques, et non la méthode de calcul du nombre d’annuités.

84      C’est en effet lors de la détermination du nombre d’annuités à prendre en compte dans le système communautaire, opération qui incombe à la Commission, que le mécanisme du taux de change actualisé moyen doit être appliqué en vertu des dispositions de l’article 4, paragraphe 4, des DGE.

85      C’est au demeurant ce que confirme le point 30 de l’arrêt Radauer/Conseil, point 16 supra.

86      Or, la Commission a refusé d’appliquer ce mécanisme en raison, selon elle, des contraintes que lui imposait le règlement n° 974/98, sans prendre en considération le règlement n° 1103/97.

87      Or, ainsi qu’il a été jugé aux points 31 à 63 ci-dessus, c’est à bon droit que le Tribunal de la fonction publique a considéré que la Commission avait commis une erreur de droit en parvenant à cette conclusion.

88      Par ailleurs, il y a lieu de relever, premièrement, que, dans l’arrêt attaqué, le Tribunal de la fonction publique n’affirme pas, contrairement à ce qu’allègue la Commission, que le mécanisme du taux de change moyen est indispensable pour garantir la valeur la plus fidèle en euros des sommes transférées. Le Tribunal de la fonction publique se contente, en effet, d’expliquer la fonction du mécanisme du taux de change moyen, sans se prononcer sur son caractère indispensable ou non.

89      Deuxièmement, contrairement à ce que soutient la Commission, le Tribunal de la fonction publique n’affirme pas que le mécanisme du taux de change moyen doit conduire à ce que les fonctionnaires récupèrent la contre-valeur exacte des cotisations versées.

90      Troisièmement, il convient de prendre en considération le point 49 de l’arrêt attaqué, dans lequel le Tribunal de la fonction publique indique, à bon droit, que, « certes, l’adoption de l’euro a rendu sans objet, pour l’avenir, les opérations de conversion jusqu’alors pratiquées entre le franc belge et les monnaies nationales », mais que « la raison d’être du mécanisme du taux de change moyen actualisé pour les périodes antérieures au 1er janvier 2002 n’a pas disparu à compter de cette date ».

91      Le point 48 de l’arrêt attaqué n’est dès lors pas erroné en droit.

92      En conclusion, le deuxième grief ne saurait être accueilli.

 Sur le troisième grief

93      La Commission estime que, dans le cas d’espèce, les organismes compétents grecs avaient transféré au compte des Communautés un montant déjà libellé en euros. Le recours exclusif à l’euro et l’absence d’application d’un taux de change moyen actualisé ne seraient dès lors pas le fait de la Commission, mais celui des autorités nationales.

94      Dans une telle situation, il n’aurait plus appartenu à la Commission de procéder, à nouveau, à une conversion vers le franc belge et d’appliquer un taux de change moyen actualisé.

95      À cet égard, il importe de souligner que l’obligation d’appliquer le mécanisme du taux de change actualisé moyen n’a pas été supprimée par l’entrée en vigueur des règlements nos 1103/97 et 974/98 et qu’elle incombe à la Commission et non aux autorités grecques. Le fait que le montant transféré à la Commission l’ait été en euros est, dès lors, sans incidence sur l’obligation incombant à celle-ci.

96      Il en résulte que le troisième grief ne saurait être accueilli.

 Sur le quatrième grief

97      La Commission soutient enfin, dans le cadre d’une série de considérations à caractère économique supposées étayer son argumentation, que, les justifications économiques de l’application du mécanisme du taux de change moyen ayant disparu en raison de la stabilisation à long terme des parités monétaires, le principe même de l’article 4, paragraphe 4, des DGE est devenu sans objet.

98      Toutefois, à supposer que la disparition de l’utilité du mécanisme du taux de change moyen soit avérée, celle-ci n’est pas de nature, en droit, à se substituer à son abrogation ou à sa modification formelle.

99      Il s’ensuit que le quatrième grief de la troisième branche ne saurait être retenu, de même partant que la troisième branche en son entier.

100    Il découle de l’ensemble de ce qui précède que le pourvoi doit être rejeté.

 Sur les dépens

101    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 144 de celui-ci, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Mme Chatziioannidou ayant conclu à la condamnation de la Commission aux dépens et celle-ci ayant succombé en ses conclusions, il y a lieu de la condamner aux dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (chambre des pourvois)

déclare et arrête :

1)      Le pourvoi est rejeté.

2)      La Commission est condamnée aux dépens.

B. Vesterdorf

M. Jaeger

J. Pirrung

M. Vilaras

 

      H. Legal

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 12 septembre 2007.

Le greffier

 

      Le président

E. Coulon

 

      B. Vesterdorf


* Langue de procédure : le français.