Language of document : ECLI:EU:T:2012:195

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (troisième chambre)

24 avril 2012 (*)

« Concurrence – Marché des transformateurs de puissance –Lettre du comptable de la Commission – Refus d’accepter la constitution d’une garantie bancaire comme mode de couverture provisoire de l’amende – Disparition de l’intérêt à agir – Non-lieu à statuer »

Dans l’affaire T‑517/09,

Alstom, établie à Levallois-Perret (France), représentée par Mes J. Derenne et A. Müller-Rappard, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. A. Bouquet, N. von Lingen et Mme K. Mojzesowicz, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet, d’une part, une demande en annulation de la décision C (2009) 7601 final de la Commission, du 7 octobre 2009, relative à une procédure d’application de l’article 81 [CE] et de l’article 53 de l’accord EEE (Affaire COMP/F/39.129 – Transformateurs de puissance), imposant une amende à la requérante, et, d’autre part, une demande en annulation de la lettre du comptable de la Commission du 10 décembre 2009 refusant le dépôt d’une garantie bancaire comme moyen de recouvrement provisoire de cette amende,

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de M. O. Czúcz, Mme I. Labucka et M. D. Gratsias, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Antécédents du litige

1        Dans sa décision C (2009) 7601 final du 7 octobre 2009 (Affaire COMP/F/39.129 – Transformateurs de puissance) (ci-après la « décision imposant l’amende »), la Commission des Communautés européennes a constaté que la requérante, Alstom, avait enfreint les dispositions de l’article 81 CE et de l’article 53 de l’accord EEE et lui a infligé une amende de 16,5 millions d’euros.

2        Par lettre du 8 octobre 2009, la Commission a notifié cette décision à la requérante. Cette lettre de notification indiquait que lorsqu’un recours était introduit contre la décision imposant l’amende, le comptable de la Commission (ci-après le « comptable ») encaissait à titre provisoire les montants en question auprès du débiteur de l’amende ou demandait à ce dernier de constituer une garantie financière couvrant le principal et les intérêts.

3        Par lettre du 23 novembre 2009, le comptable a rappelé à la requérante que la date d’échéance du paiement, en l’occurrence le 11 janvier 2010, approchait. Il a indiqué les coordonnées bancaires pour le paiement de l’amende et a annexé à sa lettre une copie de la lettre de notification précitée.

4        En réponse à cette lettre du comptable, la requérante a informé celui-ci, par lettre du 3 décembre 2009, qu’elle avait décidé de contester la décision imposant l’amende et qu’elle envisageait de constituer une garantie bancaire. Elle a joint un modèle de garantie bancaire et a demandé au comptable de lui confirmer les modalités de sa constitution.

5        Par lettre du 10 décembre 2009 (ci-après la « lettre du comptable »), le comptable a répondu que, de son point de vue, une amende contestée devait en premier lieu être couverte par un paiement provisoire. L’éventuelle acceptation d’une garantie bancaire ne pouvait résulter que des faibles possibilités financières de l’entreprise en cause, ce qui n’aurait pas été le cas de la requérante. Le comptable a invité la requérante à verser le montant de l’amende pour la date de l’échéance.

 Faits et procédure

6        Par requête enregistrée au greffe du Tribunal le 21 décembre 2009, la requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision imposant l’amende ;

–        annuler la lettre du comptable ;

–        condamner la Commission aux dépens.

7        Le 8 janvier 2010, la requérante a envoyé une lettre au comptable, dans laquelle elle marquait son désaccord de principe avec le point de vue de celui-ci et à laquelle elle a annexé une garantie bancaire couvrant l’intégralité du montant de l’amende. Elle priait le comptable de lui confirmer formellement que suite à cette garantie, il n’allait être procédé à aucune mesure de recouvrement pendant la durée de la procédure judiciaire.

8        La Commission a réagi à la requête de la requérante par deux écrits distincts.

9        D’une part, elle a déposé un mémoire en défense, enregistré au greffe du Tribunal le 19 avril 2010, qui concerne la demande en annulation de la décision imposant l’amende.

10      D’autre part, elle a soulevé une exception d’irrecevabilité visant la demande en annulation de la lettre du comptable, enregistrée au greffe du Tribunal le 19 avril 2010. Dans cette exception d’irrecevabilité, la Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours en annulation de la lettre du comptable comme manifestement irrecevable ;

–        à titre subsidiaire, déclarer qu’il n’y a pas lieu de statuer ;

–        condamner la requérante aux dépens, ou, à titre subsidiaire, déclarer que chaque partie supportera ses propres dépens.

11      Par écrit enregistré au greffe du Tribunal le 18 juin 2010, la requérante a soumis ses observations sur l’exception d’irrecevabilité. Elle conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter l’exception d’irrecevabilité et inviter la Commission à présenter sa défense au fond ;

–        à titre subsidiaire, joindre l’examen de la recevabilité au fond de l’affaire et inviter la Commission à présenter sa défense au fond ;

–        condamner la Commission aux dépens.

12      Le comptable n’ayant procédé à aucune mesure d’exécution forcée de la décision imposant l’amende, le Tribunal a adressé à la Commission une question écrite, le 19 novembre 2010, l’invitant à préciser si elle acceptait formellement la garantie bancaire déposée par la requérante en tant que mode de couverture provisoire de l’amende infligée et si elle renonçait formellement à tout recouvrement provisoire de l’amende pour toute la durée de la procédure devant le Tribunal et, éventuellement, devant la Cour.

13      Dans sa réponse enregistrée au greffe du Tribunal le 7 décembre 2010, la Commission a confirmé qu’elle acceptait formellement la garantie bancaire constituée par la requérante en tant que mode de couverture provisoire de l’amende infligée et qu’elle renonçait formellement à tout recouvrement provisoire de l’amende pour toute la durée de la procédure devant le Tribunal et, éventuellement, devant la Cour.

14      La requérante a présenté des observations sur la réponse de la Commission dans le délai imparti.

15      Le 24 octobre 2011, l’affaire a été réattribuée à la troisième chambre.

 En droit

16      La présente ordonnance porte uniquement sur la demande de la requérante d’annuler la lettre du comptable.

17      Aux termes de l’article 113 de son règlement de procédure, le Tribunal peut à tout moment, d’office, les parties entendues, constater que le recours est devenu sans objet et qu’il n’y a plus lieu de statuer. Il résulte de l’article 114, paragraphe 3, du même règlement que, sauf décision contraire du Tribunal, la suite de la procédure est orale.

18      En l’espèce, les parties ayant été entendues (voir points 13 et 14 ci-dessus), le Tribunal s’estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier pour statuer sans poursuivre la procédure.

19      Il ressort d’une jurisprudence constante que la disparition de l’intérêt à agir de la partie requérante en cours d’instance entraîne qu’il n’y a plus lieu de statuer sur le recours (arrêt de la Cour du 7 juin 2007, Wunenburger/Commission, C‑362/05 P, Rec. p. I‑4333, point 42 ; ordonnance du Tribunal du 28 février 2012, Schneider España de Informática/Commission, T‑153/10, non encore publiée au Recueil, points 22 et 23 ; voir, en ce sens, ordonnance du Tribunal du 26 juin 2008, Gibtelecom/Commission, T‑433/03, T‑434/03, T‑367/04 et T‑244/05, non publiée au Recueil, points 47 et 48).

20      En effet, l’exigence selon laquelle la partie requérante est susceptible de tirer un bénéfice concret de la décision juridictionnelle mettant fin à l’instance est une condition nécessaire pour que le juge puisse exercer son office (ordonnance de la Cour du 11 octobre 2007, Wilfer/OHMI, C‑301/05 P, non publiée au Recueil, point 19, et ordonnance Schneider España de Informática/Commission, précitée, point 20).

21      L’intérêt de la partie requérante à obtenir une décision juridictionnelle s’apprécie eu égard à l’étendue des pouvoirs du juge, compte tenu de la voie de recours dans le cadre de laquelle celui-ci est saisi (ordonnance Schneider España de Informática/Commission, précitée, point 21).

22      Dans le cadre du présent recours, la requérante demande l’annulation de la lettre du comptable, par laquelle ce dernier a refusé le dépôt d’une garantie bancaire comme mode de couverture provisoire de l’amende imposée et lui a demandé de procéder à un paiement provisoire de celle-ci.

23      Or, il ressort du point 13 ci-dessus que, après le dépôt de la requête, la Commission a accepté formellement la garantie bancaire déposée par la requérante en tant que mode de couverture provisoire de l’amende infligée. Par ailleurs, elle a renoncé formellement à tout recouvrement provisoire de l’amende pour toute la durée de la procédure devant le Tribunal et, éventuellement, devant la Cour.

24      Par conséquent, l’annulation de la lettre du comptable n’est pas susceptible de procurer un bénéfice à la requérante. Elle n’a donc plus d’intérêt à agir à cet égard.

25      Dans ces conditions, et sans qu’il soit besoin d’examiner les arguments de la Commission tirés de l’irrecevabilité du recours, il convient de constater qu’il n’y a plus lieu de statuer sur la présente demande en annulation de la lettre du comptable (arrêt de la Cour du 12 juillet 2001, Commission et France/TF1, C‑302/99 P et C‑308/99 P, Rec. p. I‑5603, point 28 ; voir, par analogie, ordonnance de la Cour du 10 juin 1993, The Liberal Democrats/Parlement, C‑41/92, Rec. p. I‑3153, point 4).

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

ordonne :

1)      Il n’y a pas lieu de statuer sur la demande en annulation de la lettre du comptable de la Commission européenne du 10 décembre 2009 refusant le dépôt d’une garantie bancaire comme mode de couverture provisoire de l’amende imposée par la décision C (2009) 7601 final de la Commission, du 7 octobre 2009, relative à une procédure d’application de l’article 81 [CE] et de l’article 53 de l’accord EEE (Affaire COMP/F/39.129 – Transformateurs de puissance).

2)      Les dépens sont réservés.


Fait à Luxembourg, le 24 avril 2012.

Le greffier

 

      Le président

E. Coulon

 

      O. Czúcz


* Langue de procédure : le français.