Language of document : ECLI:EU:T:2021:695

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (neuvième chambre)

13 octobre 2021 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure de déchéance – Marque de l’Union européenne verbale INSTINCT – Absence d’usage sérieux de la marque – Importance de l’usage – Appréciation globale des éléments de preuve – Article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement (CE) n° 207/2009 [devenu article 58, paragraphe 1, sous a), du règlement (UE) 2017/1001]  »

Dans l’affaire T‑1/20,

M. I. Industries, Inc., établie à Lincoln, Nebraska (États-Unis), représentée par Mes M. Montañá Mora et S. Sebé Marin, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par MM. J. Ivanauskas et V. Ruzek, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Natural Instinct Ltd, établie à Camberley (Royaume-Uni), représentée par M. A. Newman, Mmes E. Yates, J.-M. Fearnley, solicitors, et M. J. Moss, barrister,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la cinquième chambre de recours de l’EUIPO du 28 octobre 2019 (affaire R 178/2019-5), relative à une procédure de déchéance entre Natural Instinct et M. I. Industries,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre),

composé de Mmes M. J. Costeira, présidente, M. Kancheva et T. Perišin (rapporteure), juges,

greffier : Mme J. Pichon, administratrice,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 2 janvier 2020,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 13 mars 2020,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 13 mars 2020,

vu la mesure d’organisation de la procédure du 16 novembre 2020 et la réponse de la requérante déposée au greffe du Tribunal le 2 décembre 2020,

à la suite de l’audience du 19 mars 2021,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 19 juillet 2006, la requérante, M. I. Industries, Inc., a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne a' l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié, lui-même remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal INSTINCT.

3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 31 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Aliments et friandises pour animaux domestiques ».

4        La demande a été publiée au Bulletin des marques communautaires no 2/2007 du 15 janvier 2007 et la marque a été enregistrée le 26 juillet 2007 sous le no 5208418.

5        Le 3 novembre 2015, l’intervenante, Natural Instinct Ltd a déposé, sur le fondement de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009 [devenu article 58, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001], une demande en déchéance de la marque de l’Union européenne verbale INSTINCT pour l’ensemble des produits couverts par ladite marque.

6        Le 15 avril 2016, la requérante a produit une série d’éléments de preuve afin d’établir l’usage sérieux de la marque contestée.

7        La requérante a également fait référence à l’arrêt du 15 février 2017, M. I. Industries/EUIPO – Natural Instinct (Natural Instinct Dog and Cat food as nature intended) (T‑30/16, non publié, EU:T:2017:77), rendu dans le cadre d’une procédure d’opposition entre les mêmes parties concernant, notamment, la marque contestée en tant que marque antérieure. Par ledit arrêt, le Tribunal a annulé la décision de la chambre de recours pour autant qu’elle concluait à l’absence de l’usage sérieux de la marque contestée au cours de la période comprise entre le 11 février 2008 et le 10 février 2013.

8        Par décision du 26 novembre 2018, la division d’annulation a accueilli la demande en déchéance en prononçant la déchéance de la marque contestée pour l’ensemble des produits visés au point 3 ci-dessus à compter du 3 novembre 2015. La division d’annulation a conclu que les éléments de preuve produits par la requérante étaient insuffisants pour établir un usage sérieux de la marque contestée, la requérante n’ayant pas démontré l’importance de l’usage de la marque contestée pendant la période pertinente, c’est-à-dire entre le 3 novembre 2010 et le 2 novembre 2015.

9        Le 24 janvier 2019, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 66 à 71 du règlement 2017/1001, contre la décision de la division d’annulation.

10      Par décision du 28 octobre 2019 (ci-après la « décision attaquée »), la cinquième chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours.

11      En premier lieu, la chambre de recours a relevé que les éléments de preuve pertinents pour établir l’importance de l’usage de la marque contestée consistaient en trois déclarations sous serment signées par A, directeur financier de la requérante et une déclaration sous serment signée par B, propriétaire et PDG de la société Cats’ Country, distributeur des produits de la requérante en Allemagne, accompagnée d’une facture s’inscrivant dans la période pertinente – facture datée du 4 avril 2012 pour un montant total de 33 euros.

12      En deuxième lieu, la chambre de recours a observé que les déclarations sous serment signées par A ne faisaient référence à aucune vente spécifique sous la marque contestée dans l’Union européenne au cours de la période pertinente. La chambre de recours a également observé que les factures mentionnées et jointes à ces déclarations ne concernaient pas la période pertinente.

13      En troisième lieu, la chambre de recours a considéré que, bien que les produits de la requérante aient été expédiés dans l’Union durant la période comprise entre 2008 et 2010, il n’existait aucun élément de preuve attestant la vente effective de ces produits sous la marque contestée durant la période pertinente, à l’exception d’une seule facture datée du 4 avril 2012 pour un montant de 33 euros, ce qui était manifestement insuffisant pour démontrer un usage sérieux.

14      En quatrième lieu, la chambre de recours a relevé que les éléments de preuve soumis ne faisaient état ni de volumes conséquents ni de ventes fréquentes au cours de la période pertinente.

 Conclusions des parties

15      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO et l’intervenante aux dépens.

16      L’EUIPO et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur la détermination du droit matériel applicable

17      Compte tenu de la date d’introduction de la demande de déchéance en cause, en l’occurrence le 3 novembre 2015, qui est déterminante aux fins de l’identification du droit matériel applicable, le présent litige est régi par les dispositions matérielles du règlement no 207/2009 (voir, en ce sens, arrêts du 6 juin 2019, Deichmann/EUIPO, C‑223/18 P, non publié, EU:C:2019:471, point 2, et du 3 juillet 2019, Viridis Pharmaceutical/EUIPO, C‑668/17 P, EU:C:2019:557, point 3). Par ailleurs, dans la mesure où, selon une jurisprudence constante, les règles de procédure sont généralement censées s’appliquer à la date à laquelle elles entrent en vigueur (voir arrêt du 11 décembre 2012, Commission/Espagne, C‑610/10, EU:C:2012:781, point 45 et jurisprudence citée), le litige est régi par les dispositions procédurales du règlement 2017/1001.

18      Par suite, en l’espèce, en ce qui concerne les règles de fond, il convient d’entendre les références faites par la chambre de recours dans la décision attaquée ainsi que par les parties dans leurs écritures aux articles 18 et 58, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001, comme visant respectivement les articles 15 et 51, paragraphe 1, sous a), d’une teneur identique du règlement no 207/2009.

 Sur le fond

19       À l’appui de son recours, la requérante soulève un moyen unique, tiré de la violation de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009 lu conjointement avec l’article 15 du même règlement.

20      Ce moyen vise à contester la conclusion de la chambre de recours selon laquelle les éléments de preuve déposés par la requérante n’étaient pas suffisants pour démontrer un usage sérieux de la marque contestée au cours de la période pertinente. La requérante soutient que la chambre de recours n’a pas procédé à une appréciation globale des preuves déposées par la requérante et, par conséquent, a effectué une appréciation erronée de l’importance de l’usage de la marque contestée.

21      L’analyse de la requérante repose, en substance, sur trois branches. La première est tirée de ce que la chambre de recours aurait exclu de l’appréciation de la preuve de l’usage certains éléments de preuve ne relevant pas de la période pertinente. La deuxième est tirée de ce que la chambre de recours n’aurait pas procédé à une évaluation globale de l’ensemble des preuves produites. La troisième est tirée de ce que la chambre de recours n’aurait pas tenu compte des conclusions de l’arrêt du 15 février 2017, Natural Instinct Dog and Cat food as nature intended (T‑30/16, non publié, EU:T:2017:77).

22      À titre liminaire, il convient de rappeler qu’en l’espèce la demande en déchéance, ayant été déposée par l’intervenante le 3 novembre 2015, la période de cinq années, visée à l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009, s’étend, ainsi que l’a relevé à juste titre la chambre de recours au point 21 de la décision attaquée, du 3 novembre 2010 au 2 novembre 2015. Il n’y a pas lieu de remettre en cause ce constat, celui-ci n’étant pas contesté par les parties et, au demeurant, étant exempt d’erreur.

23      Afin de prouver l’usage sérieux de la marque contestée, la requérante, au cours de la procédure administrative devant l’EUIPO, a notamment produit :

–        trois factures datées du 22 septembre 2008, du 4 octobre 2009 et du 24 septembre 2010, émises par la société Nature’s Variety, établie aux États-Unis, indiquant que des produits sous la marque contestée ont été vendus à la société Cats’ Country domiciliée en Allemagne ;

–        un ensemble de trois déclarations sous serment de A affirmant que les factures susmentionnées ont été émises à l’attention de la société Cats’ Country, distributeur d’aliments pour chats et chiens en Allemagne, précisant que la requérante est la société mère de Nature’s Variety, émetteur des factures susmentionnées, et expliquant que les problèmes de livraison ont mis un frein à la réussite commerciale des produits vendus sous la marque contestée ;

–        une déclaration sous serment de B, distributeur allemand des produits de la marque contestée, confirmant les déclarations de A et confirmant également l’indépendance de l’activité de la société Cats’ Country par rapport à la requérante ;

–        une facture datée du 4 avril 2012 concernant la vente de 15 boîtes de produits portant la marque contestée à un particulier pour un total de 33 euros, annexée à la déclaration sous serment de B ;

–         des impressions tirées du site Internet « www.amazon.co.uk » concernant des offres de vente de produits de la marque contestée par des distributeurs tiers destinées aux consommateurs britanniques proposées sur le site Internet d’Amazon, datées des années 2015 et 2016 ;

–        une liste des produits de la marque contestée disponibles sur Internet ciblant les consommateurs britanniques en 2014 ;

–        une feuille de calcul des ventes réalisées sur le marché britannique au cours des années 2015 et 2016, qui, selon la requérante, a été fournie par Amazon.

24      Il résulte du considérant 10 du règlement no 207/2009 que le législateur a considéré que la protection de la marque antérieure n’est justifiée que dans la mesure où celle-ci est effectivement utilisée. En conformité avec ce considérant, l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009 prévoit que le titulaire de la marque de l’Union européenne est déclaré déchu de ses droits, sur demande présentée auprès de l’EUIPO ou sur demande reconventionnelle dans une action en contrefaçon, si, pendant une période ininterrompue de cinq ans, la marque n’a pas fait l’objet d’un usage sérieux dans l’Union pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée et s’il n’existe pas de justes motifs pour le non-usage.

25      Selon l’article 15, paragraphe 1, du règlement no 207/2009, « si, dans un délai de cinq ans à compter de l’enregistrement, la marque de l’Union européenne n’a pas fait l’objet par le titulaire d’un usage sérieux dans l’Union pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée, ou si un tel usage a été suspendu pendant un délai ininterrompu de cinq ans, la marque de l’Union européenne est soumise aux sanctions prévues à ce règlement, sauf juste motif pour le non-usage ».

26      En ce qui concerne les critères d’appréciation de l’usage sérieux, en vertu de la règle 22, paragraphes 3 et 4, du règlement (CE) no 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d’application du règlement (CE) no 40/94 du Conseil sur la marque communautaire (JO 1995, L 303, p. 1) [devenu article 10, paragraphes 3 et 4, du règlement délégué (UE) 2018/625 de la Commission, du 5 mars 2018, complétant le règlement 2017/1001, et abrogeant le règlement délégué (UE) 2017/1430 (JO 2018, L 104, p. 1)], applicable aux demandes en déchéance en vertu de la règle 40, paragraphe 5, dudit règlement (devenu article 19, paragraphe 1, du règlement délégué 2018/625), la preuve de l’usage doit porter sur le lieu, la durée, l’importance et la nature de l’usage qui a été fait de la marque contestée et se limite à la production de pièces justificatives comme des emballages, des étiquettes, des barèmes de prix, des catalogues, des factures, des photographies, des annonces dans les journaux, ainsi qu’aux déclarations écrites visées à l’article 78, paragraphe 1, sous f), du règlement no 207/2009.

27      Ainsi qu’il ressort de la jurisprudence, une marque fait l’objet d’un usage sérieux lorsqu’elle est utilisée, conformément à sa fonction essentielle qui est de garantir l’identité d’origine des produits et des services pour lesquels elle a été enregistrée, aux fins de créer ou de conserver un débouché pour ces produits et services, à l’exclusion d’usages à caractère symbolique ayant pour seul objet le maintien des droits conférés par la marque (voir arrêt du 31 janvier 2019, Pandalis/EUIPO, C‑194/17 P, EU:C:2019:80, point 83 et jurisprudence citée). De plus, la condition relative à l’usage sérieux de la marque exige que celle-ci, telle qu’elle est protégée sur le territoire pertinent, soit utilisée publiquement et vers l’extérieur [voir arrêt du 4 juillet 2014, Construcción, Promociones e Instalaciones/OHMI – Copisa Proyectos y Mantenimientos Industriales (CPI COPISA INDUSTRIAL), T‑345/13, non publié, EU:T:2014:614, point 21 et jurisprudence citée].

28      L’appréciation du caractère sérieux de l’usage de la marque doit reposer sur l’ensemble des faits et des circonstances propres a' établir la réalité de l’exploitation commerciale de celle-ci, en particulier les usages considérés comme justifiés dans le secteur économique concerné pour maintenir ou créer des parts de marché au profit des produits ou des services visés par la marque, la nature de ces produits ou de ces services, les caractéristiques du marché, l’étendue et la fréquence de l’usage de la marque [voir arrêt du 10 septembre 2008, Boston Scientific/OHMI – Terumo (CAPIO), T‑325/06, non publié, EU:T:2008:338, point 30 et jurisprudence citée]. Ainsi, un faible volume de produits ou de services commercialisés sous ladite marque peut être compensé par une forte intensité ou une certaine constance dans le temps de l’usage de cette marque et inversement [voir arrêt du 15 septembre 2011, centrotherm Clean Solutions/OHMI – Centrotherm Systemtechnik (CENTROTHERM), T‑427/09, EU:T:2011:480, point 28 et jurisprudence citée].

29      En outre, selon la jurisprudence, l’usage sérieux d’une marque ne peut être démontré par des probabilités ou des présomptions, mais doit reposer sur des éléments concrets et objectifs qui prouvent une utilisation effective et suffisante de la marque sur le marché concerné [voir arrêt du 23 septembre 2009, Cohausz/OHMI – Izquierdo Faces (acopat), T‑409/07, non publié, EU:T:2009:354, point 36 et jurisprudence citée]. Dès lors, il convient de procéder à une appréciation globale qui tient compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce et qui implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte [arrêt du 8 juillet 2004, MFE Marienfelde/OHMI – Vétoquinol (HIPOVITON), T‑334/01, EU:T:2004:223, point 36].

30      Par ailleurs, l’article 51 du règlement no 207/2009 n’exige pas un usage continu et ininterrompu de la marque contestée pendant la période pertinente, mais uniquement un usage sérieux au cours de celle-ci [voir arrêt du 3 octobre 2019, 6Minutes Media/EUIPO – ad pepper media International (ADPepper), T‑668/18, non publié, EU:T:2019:719, point 77 et jurisprudence citée].

31      Quant à l’appréciation de l’importance de l’usage qui a été fait d’une marque contestée, il convient de tenir compte, notamment, du volume commercial de l’ensemble des actes d’usage, d’une part, et de la durée de la période pendant laquelle les actes d’usage ont été accomplis ainsi que de la fréquence de ces actes, d’autre part [voir arrêt du 8 novembre 2007, Charlott/OHMI – Charlo (Charlott France Entre Luxe et Tradition), T‑169/06, non publié, EU:T:2007:337, point 36 et jurisprudence citée].

32      La question de savoir si un usage est quantitativement suffisant pour maintenir ou créer des parts de marché pour les produits ou les services protégés par la marque dépend ainsi de plusieurs facteurs et d’une appréciation au cas par cas. Les caractéristiques de ces produits ou de ces services, la fréquence ou la régularité de l’usage de la marque, le fait que la marque est utilisée pour commercialiser l’ensemble des produits ou des services identiques de l’entreprise titulaire ou simplement certains d’entre eux, ou encore les preuves relatives à l’usage de la marque que le titulaire est à même de fournir, sont au nombre des facteurs qui peuvent être pris en considération (voir, en ce sens, arrêt du 11 mai 2006, Sunrider/OHMI, C‑416/04 P, EU:C:2006:310, point 71).

33      En outre, le chiffre d’affaires réalisé ainsi que la quantité de ventes de produits sous la marque contestée ne sauraient être appréciés dans l’absolu, mais doivent l’être par rapport à d’autres facteurs pertinents, tels que le volume de l’activité commerciale, les capacités de production ou de commercialisation ou le degré de diversification de l’entreprise exploitant la marque ainsi que les caractéristiques des produits ou des services sur le marché concerné. De ce fait, il n’est pas nécessaire que l’usage de la marque contestée soit toujours quantitativement important pour être qualifié de sérieux. Un usage même minime peut donc être suffisant pour être qualifié de sérieux, à condition qu’il soit considéré comme justifié, dans le secteur économique concerné, pour maintenir ou créer des parts de marché pour les produits ou services protégés par la marque. Ainsi, il n’est pas possible de fixer a priori, de façon abstraite, quel seuil quantitatif devrait être retenu pour déterminer si l’usage a ou non un caractère sérieux, de sorte qu’une règle de minimis, qui ne permettrait pas à l’EUIPO ou, sur recours, au Tribunal, d’apprécier l’ensemble des circonstances du litige qui leur est soumis, ne saurait être fixée [voir arrêt du 7 juillet 2016, Fruit of the Loom/EUIPO – Takko (FRUIT), T‑431/15, non publié, EU:T:2016:395, point 26 et jurisprudence citée].

34      En effet, dans l’interprétation de la notion de l’usage sérieux, il convient de prendre en compte le fait que la ratio legis de l’exigence selon laquelle la marque contestée doit avoir fait l’objet d’un usage sérieux ne vise ni à évaluer la réussite commerciale, ni à contrôler la stratégie économique d’une entreprise ou encore à réserver la protection des marques à leurs seules exploitations commerciales quantitativement importantes (voir arrêt du 7 juillet 2016, FRUIT, T‑431/15, non publié, EU:T:2016:395, point 27 et jurisprudence citée).

35      Toutefois, plus le volume commercial de l’exploitation de la marque est limité, plus il est nécessaire que le détenteur de la marque apporte des indications supplémentaires permettant d’écarter d’éventuels doutes quant au caractère sérieux de l’usage de la marque concernée (voir arrêt du 7 juillet 2016, FRUIT, T‑431/15, non publié, EU:T:2016:395, point 28 et jurisprudence citée).

36      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner si c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que les éléments de preuve présentés par la requérante ne démontraient pas l’usage sérieux de la marque contestée pour les produits pour lesquels elle était enregistrée au cours de la période pertinente.

 Sur la première branche, tirée de ce que la chambre de recours aurait exclu de l’appréciation de la preuve de l’usage certains éléments de preuve ne relevant pas de la période pertinente

37      La requérante reproche à la chambre de recours d’avoir écarté les éléments de preuve qui ne relèvent pas de la période pertinente. En se reposant sur les principes établis par la jurisprudence, la requérante soutient que ces éléments de preuve doivent au contraire être pris en compte, car ils peuvent contribuer à étayer davantage l’usage sérieux de la marque contestée sur le marché pendant la période pertinente.

38      En particulier, la requérante fait valoir que la chambre de recours aurait dû prendre en compte, dans l’appréciation de la continuité de l’usage de la marque sur le marché, la facture du 24 septembre 2010, antérieure à la période pertinente, ainsi que les offres de vente de produits publiées sur les sites Internet « Amazon.co.uk » et « Amazon.de », postérieures à la période pertinente.

39      En premier lieu, en ce qui concerne la facture du 24 septembre 2010, la requérante fait valoir que cette facture démontre la vente, par l’entremise de sa filiale Nature’s Variety, à la société Cats’ Country de 1 895 boîtes d’aliments pour animaux de compagnie portant la marque contestée pour un montant de 37 630 dollars américains.

40      Selon la requérante, cette facture, en conjonction avec la déclaration sous serment de B affirmant que tous les produits de la marque contestée acquis en 2010 ont été commercialisés jusqu’en avril 2012, et la facture du 4 avril 2012 recensant les dernières unités de produits de la marque contestée vendus par la société Cats’Country, contribuent à démontrer que cette dernière a distribué des aliments pour animaux de compagnie portant la marque contestée sur le marché allemand jusqu’au 4 avril 2012, soit pendant les deux premières années de la période pertinente.

41      En deuxième lieu, en ce qui concerne les offres de vente de produits publiées sur les sites Internet « Amazon.co.uk » et « Amazon.de », la requérante soutient que, bien que les extraits des sites Internet d’Amazon contenant des offres de vente de produits de la marque contestée destinées aux marchés britannique et allemand soient postérieurs à la période pertinente, ils permettent d’étayer davantage l’importance de l’usage de la marque contestée en montrant que cet usage s’est prolongé au-delà de la période pertinente et que l’usage de la marque contestée n’était pas un simple usage symbolique, mais au contraire un usage visant à acquérir une position commerciale sur le marché pertinent.

42      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

43      À cet égard, il convient de relever que l’interprétation de la décision attaquée par la requérante est erronée dans la mesure où si la chambre de recours a, au point 25 de la décision attaquée, effectivement estimé que les éléments de preuve ne concernant pas la période pertinente ne pouvaient étayer l’importance de l’usage de la marque contestée, elle a néanmoins, à juste titre, pris en compte, aux points 27 et 28 de la décision attaquée, ces éléments de preuve dans le cadre de son évaluation globale des éléments de preuve produits.

44      Certes, la durée de vie commerciale d’un produit s’étendant généralement sur une période donnée, et la continuité de l’usage faisant partie des indications à considérer pour établir que l’usage était objectivement destiné à créer ou à conserver une part de marché, les pièces ne relevant pas de la période pertinente, loin d’être dépourvues d’intérêt, doivent être prises en compte et évaluées conjointement avec les autres éléments, car elles peuvent apporter la preuve d’une exploitation commerciale réelle et sérieuse de la marque [arrêt du 16 juin 2015, Polytetra/OHMI – EI du Pont de Nemours (POLYTETRAFLON), T‑660/11, EU:T:2015:387, point 54].

45      Il ressort de la jurisprudence que la prise en considération de tels éléments de preuve portant sur un usage fait avant ou après la période pertinente est possible, en ce qu’elle permet de confirmer ou de mieux apprécier la portée de l’utilisation de la marque antérieure ainsi que les intentions réelles du titulaire au cours de cette période. Cependant, de tels éléments de preuve ne peuvent être pris en considération que si d’autres éléments de preuve portant, eux, sur la période pertinente ont été produits [voir arrêt du 30 janvier 2020, Grupo Textil Brownie/EUIPO – The Guide Association (BROWNIE), T‑598/18, EU:T:2020:22, point 41 et jurisprudence citée].

46      Or, en l’espèce, ainsi que le souligne à juste titre l’EUIPO, à l’exception d’une unique facture datée du 4 avril 2012 pour un montant de 33 euros, jointe à la déclaration de B et de la feuille de calcul d’Amazon, indiquant la vente de 18 articles portant la marque contestée (voir point 59 ci-dessus), la requérante n’a fourni aucun autre élément de preuve faisant référence aux ventes effectivement réalisées durant la période pertinente.

47      S’agissant de l’argument de la requérante selon lequel il ressort de la facture du 24 septembre 2010, en conjonction avec la déclaration sous serment de B et la facture du 4 avril 2012, que tous les produits distribués par la requérante ont effectivement été vendus durant la période pertinente, il convient d’observer, à l’instar de l’EUIPO et l’intervenante, qu’il n’est pas possible de déterminer quelle proportion desdits produits a effectivement été vendue au cours de ladite période et donc d’établir le volume de ces ventes. Ainsi que le souligne l’intervenante, il incombait à la requérante de prouver l’importance de l’usage au cours de la période pertinente et de produire des éléments de preuve indiquant combien de ces 1 895 unités avaient été vendues par la société Cats’ Country au cours de la période pertinente. Or, les seuls documents faisant référence aux ventes effectivement réalisées durant la période pertinente sont la facture datée du 4 avril 2012, pour un montant de 33 euros et de la feuille de calcul d’Amazon, indiquant la vente de 18 articles portant la marque contestée (voir point 59 ci-dessus).

48      Par ailleurs, force est de constater que, en l’absence d’autres éléments de preuve suffisants pour démontrer un usage sérieux de la marque contestée pendant la période pertinente, les extraits des sites Internet d’Amazon ne sauraient être considérés comme apportant la preuve d’une exploitation commerciale réelle et sérieuse de la marque contestée.

49      En effet, il ressort de la jurisprudence citée au point 44 et 59 ci-dessus que, bien que les éléments de preuve ne relevant pas de la période pertinente puissent être considérés et évalués conjointement avec d’autres éléments afin d’étayer davantage la preuve d’une exploitation commerciale réelle et sérieuse de la marque, cela ne signifie pas que la preuve de l’usage sérieux de la marque contestée peut être fondée sur les seuls éléments de preuve ne relevant pas de la période pertinente. En effet, une conclusion différente aboutirait à dénier toute signification à l’exigence de prouver un usage sérieux pendant la période pertinente.

50      Par ailleurs, ainsi que le font valoir l’EUIPO et l’intervenante, les offres de vente de produits portant la marque contestée sur des sites Internet, postérieures à la période pertinente, ne contiennent aucune référence à de véritables ventes, à leur volume ou à leur intensité et ne prouvent pas que ces produits ont effectivement été vendus durant la période pertinente. Par conséquent, ces éléments ne sauraient étayer la conclusion selon laquelle l’usage de cette marque durant la période pertinente a atteint une importance suffisante pour être considéré comme sérieux.

51      Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en prenant en compte l’ensemble des éléments de preuve produits et en estimant qu’ils ne permettaient pas d’établir l’usage sérieux de la marque au cours de la période pertinente au motif que ces éléments de preuve ne font état ni de volumes conséquents ni de ventes fréquentes au cours de la période pertinente.

52      Par conséquent, il convient d’écarter la première branche du moyen unique soulevé par la requérante comme étant non fondée.

 Sur la deuxième branche, tirée de ce que la chambre de recours n’aurait pas procédé à une évaluation globale de l’ensemble des preuves produites

53      La requérante fait valoir que la chambre de recours n’a pas apprécié, dans leur ensemble, les preuves produites par la requérante aux fins de l’examen de l’importance de l’usage de la marque contestée au cours de la période pertinente et s’est essentiellement concentrée sur les déclarations sous serment de A et de B. Selon la requérante, en se fondant sur une appréciation partielle des preuves fournies par la requérante, la chambre de recours a violé manifestement le principe de l’appréciation globale des preuves.

54      En particulier, la requérante soutient que la chambre de recours aurait dû prendre en compte d’autres documents qui se rattachent à la période pertinente, notamment les impressions d’extraits du site Internet « Amazon.co.uk », qui montrent que des produits portant la marque contestée ont été proposés sur le marché britannique pendant la période pertinente, ainsi que la feuille de calcul fournie par Amazon qui prouve l’existence de ventes d’aliments pour animaux de compagnie portant la marque contestée pendant la période comprise entre le 3 janvier 2015 et le 6 février 2016.

55      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

56      À cet égard, il convient de relever que même si certains des éléments en provenance d’Amazon relèvent de la période pertinente, leur valeur probante est insuffisante pour dissiper les doutes sur l’usage sérieux de la marque contestée.

57      En effet, ainsi que le souligne à juste titre l’EUIPO, les extraits provenant du site Internet « Amazon.co.uk » montrent simplement que les produits en question ont été mis en vente, sans pour autant prouver qu’ils ont effectivement été vendus et sans donner aucune information sur le volume d’éventuelles ventes.

58      Il importe également de préciser que, comme le relève l’EUIPO, même à supposer que certains des produits auraient effectivement été vendus sur l’internet durant la période pertinente, les extraits du site Internet « Amazon.co.uk », qui ne quantifient pas le volume des ventes, ne permettent pas, de ce fait, d’établir l’existence d’un volume de ventes suffisant.

59      En outre, il convient de constater, à l’instar de l’EUIPO, que la feuille de calcul, même à supposer qu’elle provienne d’Amazon, comme l’affirme la requérante, ne saurait prouver un volume de ventes suffisant dès lors qu’elle ne mentionne la vente que de 18 articles portant la marque contestée au cours de la fin de la période pertinente. En effet, eu égard à la nature des produits en cause, qui sont des produits de consommation courante, et à leur prix modeste, un tel volume de vente ne peut pas être considéré comme suffisant pour prouver l’usage sérieux de la marque contestée [voir, en ce sens, arrêt du 30 avril 2008, Rykiel création et diffusion de modèles/OHMI – Cuadrado (SONIA SONIA RYKIEL), T‑131/06, non publié, EU:T:2008:135, point 54].

60      Dès lors, il convient d’examiner, conformément à la jurisprudence précitée, si le très faible volume de ventes a pu être compensé par une forte intensité ou une certaine constance dans le temps de l’usage de cette marque. À ce titre, il y a lieu de préciser que, par une mesure d’organisation de la procédure, adoptée sur le fondement de l’article 89 du règlement de procédure du Tribunal, la requérante a été invitée à fournir au Tribunal des éclaircissements en ce qui concerne le contenu et les dates des extraits tirés des sites Internet d’Amazon figurant dans le dossier de l’EUIPO.

61      À cet égard, force est de constater que, s’agissant des extraits du site Internet « Amazon.de », la requérante n’a pas démontré que ces éléments de preuve relevaient de la période pertinente. S’agissant des extraits du site Internet « Amazon.co.uk », même s’il apparaît que certains extraits relèvent de la période pertinente, à savoir du 3 novembre 2010 au 2 novembre 2015, ceux-ci montrent simplement que les produits en question ont été mis en vente, sans pour autant prouver qu’ils ont effectivement été vendus et sans donner d’informations sur le volume d’éventuelles ventes.

62      Par ailleurs, ainsi que l’a soutenu l’intervenante lors de l’audience, il convient de relever que les évaluations figurant dans les extraits en question concernent les revendeurs plutôt que les produits en cause. Il importe également de préciser que, lors de l’audience, en réponse à une question du Tribunal, la requérante a réitéré sa position exprimée dans sa réponse à la mesure d’organisation de la procédure, selon laquelle il était plus que probable que certaines évaluations aient été réalisées pendant la période pertinente. Toutefois, elle n’était pas en mesure d’affirmer avec certitude le nombre d’évaluations réalisées pendant la période pertinente.

63      Or, selon la jurisprudence citée au point 29 ci-dessus, l’usage sérieux d’une marque ne peut être démontré par des probabilités ou des présomptions, mais doit reposer sur des éléments concrets et objectifs qui prouvent une utilisation effective et suffisante de la marque sur le marché concerné.

64      Il convient également de rappeler que selon la jurisprudence citée au point 35 ci-dessus, plus le volume commercial de l’exploitation de la marque est limité, plus il est nécessaire que le détenteur de la marque apporte des indications supplémentaires permettant d’écarter d’éventuels doutes quant au caractère sérieux de l’usage de la marque concernée.

65      Or, en l’espèce, la requérante n’a pas apporté d’indications supplémentaires permettant d’écarter les doutes quant au caractère sérieux de l’usage de la marque contestée.

66      Ainsi, les éclaircissements fournis par la requérante ne sont pas de nature à remettre en cause l’appréciation de la chambre de recours, au point 29 de la décision attaquée, selon laquelle les éléments de preuve produits ne permettent pas d’établir l’usage sérieux de la marque contestée au cours de la période pertinente au motif que ces éléments de preuve ne font état ni de volumes conséquents ni de ventes fréquentes au cours de la période pertinente.

67      Dès lors, conformément à la jurisprudence citée aux points 31 et 32 ci-dessus et eu égard aux caractéristiques des produits en cause, au faible volume commercial de l’ensemble des actes d’usage de la marque contestée ainsi qu’à la fréquence limitée de cet usage, il y a lieu de conclure que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur d’appréciation en considérant que les preuves produites par la requérante n’étaient pas suffisantes pour prouver l’usage sérieux de la marque contestée.

68      Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de rejeter l’argumentation de la requérante, selon laquelle la chambre de recours n’a pas procédé à une évaluation globale de l’ensemble des preuves produites, et d’écarter ainsi la deuxième branche du moyen unique de la requérante comme étant non fondée.

 Sur la troisième branche, tirée de ce que la chambre de recours n’a pas tenu compte des conclusions de l’arrêt du 15 février 2017, Natural Instinct Dog and Cat food as nature intended (T30/16)

69      La requérante soutient que la chambre de recours n’a pas tenu compte des conclusions auxquelles est parvenu le Tribunal dans son arrêt du 15 février 2017, Natural Instinct Dog and Cat food as nature intended (T‑30/16, non publié, EU:T:2017:77), ni de la jurisprudence selon laquelle la preuve de l’usage sérieux d’une marque, n’impose pas que la preuve de l’usage s’étende à toute la période pertinente.

70      En particulier, la requérante reproche à la chambre de recours de n’accorder aucun poids aux informations contenues dans la déclaration sous serment de B et ainsi de ne pas tenir compte des conclusions du Tribunal dans son arrêt du 15 février 2017, Natural Instinct Dog and Cat food as nature intended (T‑30/16, non publié, EU:T:2017:77).

71      À cet égard, la requérante souligne que le Tribunal, dans son arrêt du 15 février 2017, Natural Instinct Dog and Cat food as nature intended (T‑30/16, non publié, EU:T:2017:77), a expressément considéré que la déclaration sous serment de B devait être appréciée comme une preuve émanant d’un tiers et qu’à ce titre il s’agissait d’une preuve suffisante pour attester certains faits. Selon la requérante, la chambre de recours aurait dû conclure à ce que la déclaration de B démontre non seulement les ventes, par la requérante, à la société Cats’ Country de produits portant la marque contestée de 2008 à 2010, mais aussi les ventes de 1 895 boîtes de produits, pendant une partie de la période pertinente, c’est à dire jusqu’en avril 2012, sur le marché allemand et que cet élément de preuve doive être considéré comme une preuve suffisante de ces faits.

72      En outre, la requérante soutient que, dans son arrêt du 15 février 2017, Natural Instinct Dog and Cat food as nature intended (T‑30/16, non publié, EU:T:2017:77), le Tribunal a conclu que les éléments de preuve déposés par la requérante dans le cadre du recours qui lui est soumis, à savoir la déclaration sous serment de B accompagnée de la facture du 4 avril 2012 et les déclarations sous serment de A avec les factures de 2008 à 2010, démontraient que la requérante avait vendu des produits de la marque contestée à la société Cats’ Country et que ces produits avaient été commercialisés par la société Cats’ Country sur le marché allemand jusqu’au 4 avril 2012.

73      Selon la requérante, les éléments de preuve auxquels le Tribunal se réfère dans son arrêt du 15 février 2017, Natural Instinct Dog and Cat food as nature intended (T‑30/16, non publié, EU:T:2017:77), concernent une période s’achevant le 4 avril 2012. Or, la période pertinente dans le cas d’espèce s’étend du 3 novembre 2010 au 2 novembre 2015. La requérante considère que la conclusion du Tribunal dans cet arrêt s’applique également en l’espèce et que, par conséquent, la chambre de recours a commis une erreur en ne tenant pas compte dudit arrêt dans la décision attaquée.

74      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

75      Il convient de constater que l’arrêt du 15 février 2017, Natural Instinct Dog and Cat food as nature intended (T‑30/16, non publié, EU:T:2017:77), a été rendu dans le cadre d’une procédure d’opposition entre les mêmes parties, procédure au cours de laquelle l’intervenante a demandé à la requérante de produire inter alia la preuve de l’usage de la marque contestée, enregistrée pour les produits relevant de la classe 31, au cours de la période comprise entre le 11 février 2008 et le 10 février 2013.

76      Dans son arrêt du 15 février 2017, Natural Instinct Dog and Cat food as nature intended (T‑30/16, non publié, EU:T:2017:77), le Tribunal a examiné si c’était à juste titre que la chambre de recours a considéré que les éléments de preuve présentés par la requérante ne démontraient pas l’usage sérieux de la marque contestée.

77      Dans ce contexte, le Tribunal a notamment examiné les trois factures datées du 22 septembre 2008, du 4 octobre 2009 et du 24 septembre 2010, les trois déclarations sous serments de A et la déclaration sous serment de B, éléments de preuve que la requérante a également déposé dans la présente procédure.

78      Il convient d’observer, ainsi que l’a souligné le Tribunal au point 29 de l’arrêt du 15 février 2017, Natural Instinct Dog and Cat food as nature intended (T‑30/16, non publié, EU:T:2017:77), que la chambre de recours, dans le cadre de la procédure d’opposition, s’était concentrée sur la nature de l’usage de la marque antérieure et, notamment, sur la question de savoir si celle-ci avait été utilisée publiquement et vers l’extérieur. Dans ce contexte, la chambre de recours, dans le cadre de la procédure d’opposition, avait relevé que la requérante n’avait pas été en mesure de fournir la moindre preuve, en-dehors des déclarations sous serment, démontrant que les produits livrés à la société Cats’ Country avaient effectivement fait leur entrée dans le marché allemand.

79      Cependant, le Tribunal a jugé, au point 55 de l’arrêt du 15 février 2017, Natural Instinct Dog and Cat food as nature intended (T‑30/16, non publié, EU:T:2017:77), que les éléments de preuve fournis par la requérante au cours de la procédure administrative, notamment les déclarations sous serment, les factures et la maquette de l’étiquette, démontraient que la requérante a vendu à la société Cats’ Country des produits portant la marque contestée de 2008 à 2010, que ces produits étaient commercialisés par la société Cats’ Country et que ces produits portaient la marque contestée. Partant, il en a conclu que les éléments de preuve présentés par la requérante permettaient de constater que les produits portant la marque contestée avaient effectivement trouvé leur place sur le marché allemand.

80      Par ailleurs, le Tribunal a considéré, au point 45 de l’arrêt du 15 février 2017, Natural Instinct Dog and Cat food as nature intended (T‑30/16, non publié, EU:T:2017:77), que la déclaration de B aurait dû être regardée comme émanant d’une source indépendante et que la valeur probante de ce document ne devait donc pas être considérée comme étant inférieure à celle d’un document émanant d’un tiers.

81      À cet égard, il convient de relever que, contrairement à ce que prétend la requérante, aucune conclusion dans la décision attaquée ne contredit, d’une manière ou d’une autre, l’arrêt du 15 février 2017, Natural Instinct Dog and Cat food as nature intended (T‑30/16, non publié, EU:T:2017:77).

82      En particulier, force est de constater que, dans son arrêt du 15 février 2017, Natural Instinct Dog and Cat food as nature intended (T‑30/16, non publié, EU:T:2017:77), le Tribunal, en procédant à une évaluation globale de l’ensemble des éléments probatoires à sa disposition, a conclu que la chambre de recours avait commis une erreur d’appréciation en considérant que ces éléments ne suffisaient pas pour prouver que les produits livrés à la société Cats’ Country « avaient effectivement fait leur entrée dans le marché allemand ». Dans ce contexte, le Tribunal a reproché à la chambre de recours d’avoir fait une appréciation partielle desdits éléments, en ce qu’elle n’aurait considéré comme pertinents que ceux permettant de prouver un usage de la marque antérieure orienté vers les consommateurs finaux.

83      En effet, ainsi que l’a souligné le Tribunal au point 56 de son arrêt du 15 février 2017, Natural Instinct Dog and Cat food as nature intended (T‑30/16, non publié, EU:T:2017:77), l’usage extérieur d’une marque n’équivaut pas nécessairement à un usage orienté vers les consommateurs finaux. Ainsi, le public pertinent auquel les marques ont vocation à s’adresser ne comprend pas uniquement des consommateurs finaux, mais également des spécialistes, des clients industriels et d’autres utilisateurs professionnels [voir, en ce sens, arrêt du 21 novembre 2013, Recaro/OHMI – Certino Mode (RECARO), T‑524/12, non publié, EU:T:2013:604, point 25 et jurisprudence citée].

84      Le Tribunal a également souligné, au point 57 de son arrêt du 15 février 2017, Natural Instinct Dog and Cat food as nature intended (T‑30/16, non publié, EU:T:2017:77), que dans un marché tel que celui de l’Union, afin de créer ou de préserver des débouchés pour des produits de consommation courante, tels que ceux en cause en l’espèce, il est nécessaire, notamment, lorsqu’un fabricant de tels produits ne dispose pas d’un circuit de distribution propre, de s’adresser, par des actes commerciaux, à des professionnels du secteur, à savoir, notamment, à des revendeurs. Ainsi, il ne saurait être exclu par principe que l’usage d’une marque démontré par des actes commerciaux adressés uniquement à des professionnels du secteur concerné puisse être considéré comme étant un usage conforme à la fonction essentielle de la marque.

85      Ces considérations du Tribunal ne sont ni contestées, ni contredites par la chambre de recours dans le cas d’espèce.

86      Contrairement à ce que lui reproche la requérante, la chambre de recours a bien pris en considération l’arrêt du 15 février 2017, Natural Instinct Dog and Cat food as nature intended (T‑30/16, non publié, EU:T:2017:77). Elle n’a remis en cause ni la valeur probante de la déclaration de B, ce qui a été d’ailleurs réitéré par l’EUIPO lors de l’audience, ni la conclusion selon laquelle la requérante avait démontré, dans le cadre de la procédure d’opposition précédente, que les produits livrés à la société Cats’ Country avaient effectivement fait leur entrée dans le marché allemand, au cours de la période pertinente comprise entre le 11 février 2008 et le 10 février 2013 inclus.

87      En effet, comme il a été précisé au point 78 ci-dessus et souligné par l’EUIPO lors de l’audience, l’arrêt du 15 février 2017, Natural Instinct Dog and Cat food as nature intended (T‑30/16, non publié, EU:T:2017:77), s’est concentré sur la nature de l’usage de la marque antérieure et, notamment, sur la question de savoir si celle-ci avait été utilisée publiquement et vers l’extérieur, tandis que la décision attaquée de la présente affaire se concentre sur l’importance de l’usage de la marque contestée, dans la mesure où la durée, le lieu et la nature de l’usage ne sont pas contestés dans le cadre de la présente procédure.

88      De surcroît, ainsi que le relèvent à juste titre l’EUIPO et l’intervenante, la période pertinente dans l’affaire qui avait été examinée par le Tribunal dans l’arrêt du 15 février 2017, Natural Instinct Dog and Cat food as nature intended (T‑30/16, non publié, EU:T:2017:77), à savoir du 11 février 2008 au 10 février 2013, est différente de la période pertinente dans le cas d’espèce, à savoir du 3 novembre 2010 au 2 novembre 2015.

89      Par ailleurs, la conclusion du Tribunal au point 55 de l’arrêt du 15 février 2017, Natural Instinct Dog and Cat food as nature intended (T‑30/16, non publié, EU:T:2017:77), est notamment fondée sur les trois factures émises à l’attention de la société Cats’ Country datées des 22 septembre 2008, 10 avril 2009 et 24 septembre 2010, lesquelles s’inscrivent toutes en-dehors de la période pertinente en l’espèce.

90      Or, les éléments de preuve qui ont été considérés comme suffisants pour démontrer que les produits livrés à la société Cats’ Country avaient effectivement fait leur entrée dans le marché allemand dans le cadre de la procédure d’opposition ayant donné lieu à l’arrêt du 15 février 2017, Natural Instinct Dog and Cat food as nature intended (T‑30/16, non publié, EU:T:2017:77), ne sauraient être considérés comme suffisants pour démontrer un usage sérieux dans le cadre de la présente procédure de déchéance.

91      En effet, l’arrêt du 15 février 2017, Natural Instinct Dog and Cat food as nature intended (T‑30/16, non publié, EU:T:2017:77), étant notamment fondé sur des éléments de preuve antérieurs à la période pertinente de la présente affaire, ne saurait être invoqué utilement pour prouver un usage sérieux de la marque contestée du 3 novembre 2010 au 2 novembre 2015.

92      Certes, tel qu’il ressort de la jurisprudence et ainsi qu’il est soutenu par la requérante, il suffit qu’une marque ait fait l’objet d’un usage sérieux pendant une partie de cette période pour qu’elle échappe aux sanctions prévues par l’article 15, paragraphe 1, du règlement no 207/2009 [voir, en ce sens, arrêt du 16 décembre 2008, Deichmann-Schuhe/OHMI – Design for Woman (DEITECH), T‑86/07, non publié, EU:T:2008:577, point 52].

93      Toutefois, s’agissant des éléments de preuve concernant pour partie la période pertinente, il convient de rappeler, comme indiqué au point 47 ci-dessus, que ces éléments, ainsi que ceux produits dans le cadre de la présente instance, ne permettent pas de démontrer un usage sérieux de la marque contestée pendant une partie de la période pertinente, à l’exception d’une unique facture datée du 4 avril 2012 pour un montant de 33 euros et d’une feuille de calcul d’Amazon, indiquant la vente de 18 articles portant la marque contestée, lesquelles ne sauraient être considérées comme suffisantes pour prouver l’usage sérieux de la marque contestée, au vu de la nature et du prix des produits en cause, conformément à la jurisprudence citée aux points 31, 32 et 59 ci-dessus.

94      Par conséquent, il y a lieu de conclure que la chambre de recours a dûment pris compte des conclusions de l’arrêt du 15 février 2017, Natural Instinct Dog and Cat food as nature intended (T‑30/16, non publié, EU:T:2017:77), ainsi que de la jurisprudence selon laquelle la preuve de l’usage sérieux d’une marque n’impose pas que la preuve de l’usage s’étende à toute la période pertinente.

95      Dès lors, il convient d’écarter, en tout état de cause, la troisième branche du moyen unique soulevé par la requérante.

96      Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de rejeter le moyen unique soulevé par la requérante et, partant, le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

97      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombée, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      M. I. Industries, Inc. est condamnée aux dépens.

Costeira

Kancheva

Perišin

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 13 octobre 2021.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.