Language of document : ECLI:EU:T:1999:302

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

1er décembre 1999 (1)

«Directive interdisant l'utilisation de substances ß-agonistes dans les spéculations animales - Règlement limitant à certaines indications thérapeutiques la validité de limites maximales de résidus de médicaments vétérinaires - Recours en annulation - Recevabilité - Principe de proportionnalité»

Dans les affaires jointes T-125/96,

Boehringer Ingelheim Vetmedica GmbH

et

C. H. Boehringer Sohn,

sociétés de droit allemand, établies à Ingelheim am Rhein (Allemagne), représentées par Mes Denis Waelbroeck et Denis Fosselard, avocats au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg en l'étude de Me Ernest Arendt, 8-10, rue Mathias Hardt,

parties requérantes,

soutenues par

Fédération européenne de la santé animale (Fedesa), association de droit belge, établie à Bruxelles, représentée par Me Alexandre Vandencasteele, avocat au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg en l'étude de Me Ernest Arendt, 8-10, rue Mathias Hardt,

et

Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord, représenté par Mme Lindsey Nicoll, du Treasury Solicitor's Department, en qualité d'agent, assistée de M. David Lloyd Jones, barrister, du barreau d'Angleterre et du pays de Galles, ayant élu domicile à Luxembourg au siège de l'ambassade du Royaume-Uni, 14, boulevard Roosevelt,

parties intervenantes,

contre

Conseil de l'Union européenne, représenté par Mme Moyra Sims-Robertson et M. Ignacio Díez Parra, conseillers juridiques, en qualité d'agents, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Alessandro Morbilli, directeur général de la direction des affaires juridiques de la Banque européenne d'investissement, 100, boulevard Konrad Adenauer,

partie défenderesse,

soutenu par

Stichting Kwaliteitsgarantie Vleeskalverensector (SKV), fondation de droit néerlandais, établie à La Haye (Pays-Bas), représentée par Mes Gerard van der Wal, avocat près le Hoge Raad der Nederlanden, et Laura Paret, avocat au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg en l'étude de Me Aloyse May, 31, Grand-rue,

et

Commission des Communautés européennes, représentée par M. Xavier Lewis, membre du service juridique, en qualité d'agent, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Carlos Gómez de la Cruz, membre du service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,

parties intervenantes,

ayant pour objet une demande d'annulation partielle de la directive 96/22/CE du Conseil, du 29 avril 1996, concernant l'interdiction d'utilisation de certaines substances à effet hormonal ou thyréostatique et des substances â-agonistes dans les spéculations animales et abrogeant les directives 81/602/CEE, 88/146/CEE et 88/299/CEE (JO L 125, p. 3), ainsi qu'une demande en indemnité,

et T-152/96,

Boehringer Ingelheim Vetmedica GmbH

et

C. H. Boehringer Sohn,

parties requérantes,

soutenues par

Fédération européenne de la santé animale (Fedesa),

partie intervenante,

contre

Commission des Communautés européennes,

partie défenderesse,

soutenue par

Stichting Kwaliteitsgarantie Vleeskalverensector (SKV)

et

Conseil de l'Union européenne,

parties intervenantes,

ayant pour objet une demande d'annulation partielle du règlement (CE) n° 1312/96 de la Commission, du 8 juillet 1996, modifiant l'annexe III du règlement (CEE) n° 2377/90 du Conseil établissant une procédure communautaire pour la fixationdes limites maximales de résidus de médicaments vétérinaires dans les aliments d'origine animale (JO L 170, p. 8),

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE

DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (deuxième chambre),

composé de MM. A. Potocki, président, C. W. Bellamy et A. W. H. Meij, juges,

greffier: Mme B. Pastor, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de la procédure orale du 12 mai 1999,

rend le présent

Arrêt

Faits à l'origine du litige et cadre réglementaire

1.
    Les ß-agonistes sont des substances utilisées principalement pour le traitement des troubles respiratoires, tant pour les hommes que pour les animaux.

2.
    Le chlorhydrate de clenbutérol (ci-après «clenbutérol») est un composé chimique relevant de la catégorie des ß-agonistes qui sert d'ingrédient actif à certains médicaments. En médecine vétérinaire, ses effets thérapeutiques sont les suivants:

-    action bronchospasmolytique (dilatation des bronches provoquée pour faciliter la respiration en cas d'infection des voies respiratoires supérieures);

-    stimulation cardiaque des équidés et des bovins;

-    induction de la tocolyse chez les vaches parturientes (relâchement de l'utérus provoqué pour faciliter le vêlage).

3.
    La première requérante, Boehringer Ingelheim Vetmedica Gmbh (ci-après «BI Vetmedica»), développe et commercialise des médicaments vétérinaires. Elle est une filiale en propriété exclusive de la seconde requérante, C. H. Boehringer Sohn (ci-après «Boehringer»), qui est l'une des vingt premières sociétés pharmaceutiques mondiales.

4.
    BI Vetmedica est, avec Agraria Pharma GmbH (ci-après «Agraria»), la seule entreprise pharmaceutique de l'Union européenne qui produit et commercialise des médicaments vétérinaires contenant un ß-agoniste, à savoir le clenbutérol, pour le traitement des affections respiratoires des animaux de rente (animaux destinés à la commercialisation et dont la chair et les produits sont consommés par l'homme).Toutefois, Agraria ne commercialisant son médicament contenant du clenbutérol que sur le marché allemand, son chiffre d'affaires sur ce produit serait très faible. Les requérantes déclarent, quant à elles, assurer «près de 97 % des ventes de médicaments vétérinaires tombant sous le coup de l'interdiction des ß-agonistes» prévue par la directive 96/22/CE du Conseil, du 29 avril 1996, concernant l'interdiction d'utilisation de certaines substances à effet hormonal ou thyréostatique et des substances â-agonistes dans les spéculations animales et abrogeant les directives 81/602/CEE, 88/146/CEE et 88/299/CEE (JO L 125, p. 3, ci-après «directive 96/22»), et «environ 99 % des ventes dans l'Union européenne des médicaments vétérinaires concernés» par le règlement (CE) n° 1312/96 de la Commission, du 8 juillet 1996, modifiant l'annexe III du règlement (CEE) n° 2377/90 du Conseil établissant une procédure communautaire pour la fixation des limites maximales de résidus de médicaments vétérinaires dans les aliments d'origine animale (JO L 170, p. 8, ci-après «règlement n° 1312/96»). Selon les indications fournies par les requérantes en réponse aux questions écrites du Tribunal, leurs ventes de médicaments vétérinaires contenant du clenbutérol dans les États membres (tous usages et tous produits confondus) représentaient un chiffre d'affaires de 13 528 063 DM en 1995.

5.
    BI Vetmedica et ses filiales fabriquent et distribuent ces médicaments vétérinaires, dans la plupart des États membres, en vertu d'autorisations délivrées par les autorités nationales compétentes, sous les marques commerciales Ventipulmine, Spasmobronchal, Ventipulmine-TMPS et Planipart, elles aussi déposées dans la plupart de ces États. Toutefois, le Planipart, destiné à l'induction de la tocolyse chez les bovins, reste autorisé et n'est pas concerné par la présente procédure. Le brevet dont les requérantes étaient titulaires et qui leur conférait le monopole de l'exploitation du clenbutérol est venu à expiration en 1988.

6.
    Bien que les ß-agonistes ne soient pas des hormones de croissance, ils sont également connus, depuis les années 80, pour leurs effets anabolisants. Administrés à fortes doses, nettement supérieures à celles indiquées pour les traitements thérapeutiques, ils provoquent un important «effet de redistribution», consistant en un ralentissement de la synthèse du tissu adipeux et en une moindre dégradation des protéines. Leur utilisation par les éleveurs permet donc d'obtenir des animaux présentant un rapport viande/graisse élevé. Il est ainsi estimé que la teneur en viande d'un animal peut augmenter de 10 à 26 %, tandis que sa teneur en graisse peut baisser de 10 à 30 %.

7.
    Il est constant que, dans la pratique, les médicaments vétérinaires à base de clenbutérol commercialisés par les requérantes ne peuvent pas être utilisés de façon rentable en vue d'obtenir cet «effet de redistribution», eu égard à leur conditionnement et à leur faible teneur en clenbutérol par rapport à leur coût.

8.
    Néanmoins, il est également avéré que certaines firmes et certains particuliers se livrent au commerce du clenbutérol et d'autres ß-agonistes en tant que produitschimiques de base, sous la forme de poudres et de liquides fortement concentrés, produits à faible coût, aux fins de l'engraissement artificiel des bovins.

9.
    L'administration aux animaux de ß-agonistes, à des doses supérieures à celles prescrites à des fins thérapeutiques, peut provoquer certains effets secondaires nuisibles à leur santé, notamment des troubles de la régulation de la température et des systèmes endocriniens, une accélération du rythme cardiaque et de la sudation, des tremblements musculaires et une moindre résistance au stress. De plus, la viande est de moins bonne qualité; elle devient plus sombre, moins tendre et moins savoureuse en raison de la diminution des graisses intramusculaires.

10.
    Bien que les ß-agonistes autorisés dans la Communauté européenne soient des produits sûrs lorsqu'ils sont utilisés, à des fins thérapeutiques, pour les hommes ou pour les animaux, il est démontré que leur emploi en tant que facteurs de croissance des animaux de rente peut entraîner certains risques pour la santé humaine. Les résidus de ß-agonistes présents dans la viande d'animaux traités à des doses massives, non thérapeutiques, ont notamment provoqué un certain nombre de cas d'intoxication alimentaire chez l'homme, les principaux symptômes étant une accélération du rythme cardiaque, des migraines aiguës, des tremblements et palpitations, de la nervosité, une baisse de la pression artérielle et une tétanie musculaire pendant plusieurs jours. D'après les indications fournies par le Conseil, les pays les plus touchés seraient l'Espagne (135 cas d'intoxication en 1990, 200 cas en 1992 et 136 cas en 1994), la France (22 cas en 1990) et l'Italie (62 cas en 1996).

11.
    Il ressort des indications fournies par les parties en réponse aux questions écrites du Tribunal que, dès avant l'adoption de la directive 96/22, la mise sur le marché et l'utilisation de médicaments vétérinaires contenant du clenbutérol pour le traitement des troubles respiratoires des bovins n'étaient pas autorisées dans un certain nombre d'États membres (Danemark, Finlande, France, Grèce et Suède) et d'États tiers (Argentine, Australie, Canada, États-Unis et Nouvelle-Zélande). Les requérantes ont toutefois précisé que, pour diverses raisons, elles n'avaient jamais cherché à obtenir une telle autorisation dans ces pays. Quant à l'Argentine, elle aurait cherché à préserver son accès au marché de la Communauté.

12.
    L'opinion publique dans les États membres s'est montrée très préoccupée par les effets sur la santé humaine des résidus de ß-agonistes trouvés dans la viande destinée à la consommation humaine. De nombreux articles ont paru dans la presse, tant dans les revues spécialisées que dans les quotidiens, et divers rapports ont été publiés dont, en octobre 1993, sous les auspices du Parlement européen, un rapport d'information élaboré par Schuman Associates.

13.
    Dans le cadre d'une vaste enquête menée dans les États membres, entre 1990 et 1992, sur l'utilisation abusive des ß-agonistes, la Commission a notamment constaté que, dans la pratique, la détection des fraudes, notamment en ce qui concerne l'emploi du clenbutérol, était rendue plus difficile en raison de l'existence des médicaments commercialisés par les requérantes. En effet, lorsqu'il était constatéque du clenbutérol avait été administré à un animal, l'éleveur se justifiait en indiquant qu'il avait utilisé légalement un de ces médicaments.

14.
    Le 21 avril 1993, la Commission a présenté ses constatations dans une communication au Conseil et au Parlement sur le contrôle des résidus dans la viande [COM (93) 167 final], dans laquelle elle a notamment exprimé l'avis suivant (au paragraphe 30):

«La question est de savoir si une interdiction totale, y compris pour des usages thérapeutiques, constituerait un progrès sensible dans la lutte contre l'usage impropre des ß-agonistes. Les responsables du contrôle dans les États membres s'accordent pour dire que l'usage impropre des ß-agonistes constitue aujourd'hui un problème grave et que leur mise au ban permettrait d'établir plus aisément le but illicite de leur emploi. Bien qu'elle répugne généralement à proposer le retrait du marché d'un médicament à usage thérapeutique, la Commission considère qu'une interdiction totale des ß-agonistes, sauf pour le traitement thérapeutique des chevaux et des animaux de compagnie, faciliterait sensiblement la tâche des contrôleurs. Cette prise de position de la Commission est aussi influencée par l'existence de produits de substitution pour les usages thérapeutiques.»

15.
    La Commission a présenté au Conseil, le 14 octobre 1993, la proposition de règlement (CEE) concernant l'interdiction d'utilisation de certaines substances à effet hormonal et thyréostatique et des substances ß-agonistes dans les spéculations animales (JO C 302, p. 8), prévoyant, notamment, l'interdiction totale de la mise sur le marché des substances ß-agonistes en vue de leur administration aux animaux de toute espèce, à l'exception d'une utilisation à des fins thérapeutiques au profit des équidés et des animaux carnivores domestiques.

16.
    Dans divers courriers adressés aux membres et aux services de la Commission ainsi qu'aux autorités compétentes des États membres, les requérantes ont soutenu que l'interdiction de leurs médicaments vétérinaires contenant du clenbutérol diminuerait le bien-être des animaux et priverait BI Vetmedica de son droit, officiellement reconnu, de fabriquer et de commercialiser ces médicaments. Elles ont, en outre, fait valoir que d'autres mesures moins restrictives que l'interdiction totale préconisée et, notamment, la mise en oeuvre effective, par les États membres, des mesures de contrôle déjà prévues par la directive 81/851/CEE du Conseil, du 28 septembre 1981, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives aux médicaments vétérinaires (JO L 317, p. 1, ci-après «directive 81/851»), dans sa rédaction résultant de la directive 90/676/CEE du Conseil, du 13 décembre 1990, modifiant la directive 81/851 (JO L 373, p. 15, ci-après «directive 90/676»), suffiraient à combattre l'utilisation abusive du clenbutérol et des autres ß-agonistes.

17.
    A cet égard, les requérantes se sont plus particulièrement référées à l'article 50 quater de la directive 81/851, telle que modifiée par la directive 90/676, aux termes duquel:

«Les États membres veillent à ce que les propriétaires ou le responsable d'animaux de rente puissent justifier de l'acquisition, de la détention et de l'administration de médicaments vétérinaires contenant les substances énumérées à l'article 1er, paragraphe 5 [il s'agit notamment des ß-agonistes] [...]

Ils peuvent notamment exiger la tenue d'un registre contenant au moins les indications suivantes:

a) date;

b) identification du médicament vétérinaire;

c) quantité;

d) nom et adresse du fournisseur du médicament;

e) identification des animaux traités.»

18.
    Les requérantes se sont également référées à l'article 1er, paragraphe 5, de la directive 81/851, telle que modifiée par la directive 90/676, aux termes duquel:

«Les États membres prennent toutes mesures utiles afin que seules les personnes habilitées par leur législation nationale en vigueur possèdent ou aient sous contrôle un médicament vétérinaire ou une substance susceptible d'être utilisée comme médicament vétérinaire et présentant des propriétés anabolisantes [...]

Les États membres établissent une liste de producteurs et distributeurs autorisés à posséder des substances actives susceptibles d'être utilisées dans la fabrication des médicaments vétérinaires ayant les propriétés visées au premier alinéa. Ces personnes doivent tenir des registres détaillés de toutes les transactions portant sur les substances qui peuvent être utilisées dans la fabrication de médicaments vétérinaires et tenir ces registres à la disposition des autorités compétentes à des fins de contrôle durant une période d'au moins trois ans.»

19.
    Par lettre du Conseil du 28 octobre 1993, le Parlement a été consulté sur la proposition de règlement en cause, en application de l'article 43 du traité CE (devenu, après modification, article 37 CE).

20.
    Dans son rapport du 1er mars 1994, la commission de l'agriculture, de la pêche et du développement rural du Parlement a proposé d'autoriser la mise sur le marché des ß-agonistes en vue de leur administration par un vétérinaire à des fins thérapeutiques. La commission de l'environnement, de la santé publique et de laprotection des consommateurs du Parlement ne s'est toutefois pas ralliée à cet avis et n'a proposé que des amendements mineurs à la proposition de règlement du Conseil.

21.
    Sans nouvelle consultation du Parlement, le Conseil a adopté, le 29 avril 1996, sur la base de l'article 43 du traité, la directive 96/22, dont l'article 2, sous b), prévoit que les États membres veillent à interdire «la mise sur le marché de substances ß-agonistes en vue de leur administration aux animaux dont la chair et les produits sont destinés à la consommation humaine». Les points 5 à 9 des considérants de la directive 96/22 exposent:

«(5)    considérant que les résultats de l'enquête réalisée par la Commission de 1990 à 1992 dans les États membres montrent une large disponibilité des substances ß-agonistes dans le milieu de l'élevage, favorisant ainsi leur usage illégal;

(6)    considérant que l'usage impropre des substances ß-agonistes peut présenter un danger sérieux pour la santé humaine; qu'il convient, dans l'intérêt du consommateur, d'en interdire la détention, l'administration aux animaux de toutes les espèces et la mise sur le marché à cette fin [...];

(7)    considérant toutefois que l'administration de médicaments à base de substances ß-agonistes peut être autorisée, à des fins thérapeutiques parfaitement définies, pour certaines catégories de bovins, les équidés et les animaux de compagnie;

(8)    considérant par ailleurs qu'il est nécessaire d'assurer à tous les consommateurs les mêmes conditions d'approvisionnement en viandes et en denrées alimentaires dérivées tout en leur fournissant un produit répondant au mieux à leurs soucis et à leur attente; que, eu égard aux sensibilités des consommateurs, les possibilités d'écoulement des produits en question ne peuvent qu'en bénéficier;

(9)    considérant qu'il convient de maintenir l'interdiction des substances hormonales à des fins d'engraissement; que, si l'administration de certaines substances peut être autorisée dans un but thérapeutique ou zootechnique, elle doit être strictement contrôlée afin d'éviter tout détournement d'utilisation».

22.
    L'article 3 de la directive 96/22 dispose que les États membres veillent à interdire:

«a)    l'administration à un animal d'exploitation [...] des substances ß-agonistes;

b)    la détention sur une exploitation, sauf sous contrôle officiel, d'animaux visés au point a), ainsi que la mise sur le marché ou l'abattage, en vue de laconsommation humaine, d'animaux d'exploitation [...] qui recèlent des substances visées au point a) ou dans lesquels la présence de telles substances a été constatée, sauf si la preuve peut être fournie que les animaux en question ont été traités conformément aux articles 4 et 5;

    [...]

d)    la mise sur le marché des viandes des animaux visés au point b);

e)    la transformation des viandes visées au point d)».

23.
    L'article 4, paragraphe 2, de la directive 96/22 prévoit que, par dérogation aux articles 2 et 3, les États membres peuvent autoriser:

«2.    l'administration à des fins thérapeutiques de médicaments vétérinaires autorisés contenant:

    i)    du trembolone allyle, par voie orale, ou de substances ß-agonistes à des équidés ou à des animaux de compagnie, pour autant qu'ils soient utilisés conformément aux spécifications du fabricant;

    ii)    des substances ß-agonistes, sous forme d'injection pour l'induction de la tocolyse chez les vaches parturientes.

    Cette administration doit être effectuée par un vétérinaire ou, dans le cas des médicaments vétérinaires visés au point i), sous sa responsabilité directe; le traitement doit faire l'objet d'un enregistrement par le vétérinaire responsable, comprenant au moins les renseignements visés au point 1.

    La détention par l'exploitant de médicaments vétérinaires contenant des substances ß-agonistes susceptibles d'être utilisées aux fins de l'induction de la tocolyse est interdite».

24.
    L'article 1er, paragraphe 2, sous b), de la directive 96/22 définit le «traitement thérapeutique» comme «l'administration, en application de l'article 4 de la présente directive, à titre individuel, à un animal d'exploitation, d'une des substances autorisées en vue du traitement, après examen de l'animal par un vétérinaire, d'un trouble de la fécondité, [...], et, dans le cas de substances ß-agonistes, en vue de l'induction de la tocolyse chez les vaches parturientes, ainsi que du traitement des troubles respiratoires et de l'induction de la tocolyse chez les équidés élevés à d'autres fins que la production de viande».

25.
    Aux termes de son article 14, la directive 96/22 devait être transposée en droit national au plus tard le 1er juillet 1997. Entre-temps, les règles nationales en la matière continuaient à s'appliquer dans le respect des dispositions générales du traité.

26.
    En vue de renforcer les contrôles effectués par et dans les États membres, le Conseil a, par ailleurs, adopté la directive 96/23/CE, du 29 avril 1996, relative aux mesures de contrôle à mettre en oeuvre à l'égard de certaines substances et de leurs résidus dans les animaux vivants et leurs produits et abrogeant les directives 85/358/CEE et 86/469/CEE et les décisions 89/187/CEE et 91/664/CEE (JO L 125, p. 10). En vertu de son article 3, la filière de production des animaux et des produits primaires d'origine animale doit être surveillée «en vue de la recherche des résidus et des substances visés à l'annexe I». Les ß-agonistes sont inclus dans cette annexe. Le règlement (CE) n° 894/96 du Conseil, du 29 avril 1996, modifiant, en matière de sanctions, le règlement (CEE) n° 805/68 portant organisation commune des marchés dans le secteur de la viande bovine (JO L 125, p. 1), prévoit également des sanctions renforcées pour les producteurs dans le cas où des substances interdites ou des substances autorisées utilisées illégalement sont mises en évidence lors du contrôle d'un animal ou trouvées dans une exploitation.

27.
    Le règlement (CEE) n° 2377/90 du Conseil, du 26 juin 1990, établit une procédure communautaire pour la fixation des limites maximales de résidus de médicaments vétérinaires dans les aliments d'origine animale (JO L 224, p. 1, ci-après «règlement n° 2377/90»).

28.
    En application de ce règlement, la Commission fixe la limite maximale de résidus (ci-après «LMR»), définie à l'article 1er, paragraphe 1, sous b), dudit règlement comme la teneur maximale en résidus résultant de l'utilisation d'un médicament vétérinaire «que la Communauté peut accepter comme légalement autorisée ou qui est reconnue comme acceptable dans ou sur des denrées alimentaires».

29.
    Le règlement n° 2377/90 prévoit que les substances pharmacologiquement actives utilisées dans des médicaments vétérinaires, après l'évaluation des risques qu'elles comportent pour la santé publique, doivent être inscrites sur l'une des quatre listes faisant l'objet des annexes suivantes:

-    à l'annexe I, les substances pour lesquelles une LMR peut être fixée (voir article 2);

-    à l'annexe II, celles pour lesquelles il n'apparaît pas nécessaire de fixer une LMR (voir article 3);

-    à l'annexe III, les substances, déjà utilisées à la date d'entrée en vigueur du règlement n° 2377/90 ou, à titre exceptionnel, non encore utilisées, pour lesquelles il n'est pas possible de fixer définitivement une LMR mais qui, à condition que leurs résidus, aux niveaux proposés, apparaissent sans risque pour la santé humaine, peuvent être assorties d'une LMR provisoire (voir article 4);

-    à l'annexe IV, les substances pour lesquelles, en raison de leur dangerosité, aucune LMR ne peut être fixée (voir article 5).

30.
    En vertu de l'article 14 du règlement n° 2377/90, à compter du 1er janvier 1997, l'administration à des animaux destinés à la production d'aliments de médicaments vétérinaires contenant des substances pharmacologiquement actives qui ne figurent pas aux annexes I, II ou III est, en principe, interdite dans la Communauté.

31.
    L'article 6 du règlement n° 2377/90 prévoit la procédure applicable aux fins de l'inclusion dans les annexes I, II ou III d'une nouvelle substance pharmacologiquement active.

32.
    Le règlement n° 2377/90 définit également, en son article 7, la procédure applicable aux substances pharmacologiquement actives dont l'utilisation est autorisée dans les médicaments vétérinaires à la date de son entrée en vigueur. Les personnes responsables de la mise sur le marché des médicaments vétérinaires concernés doivent veiller à ce que toute l'information nécessaire soit soumise à la Commission, dans le délai imparti (paragraphe 2). Après vérification, dans un délai de 30 jours, que l'information est présentée sous une forme correcte, la Commission la soumet immédiatement, pour examen, au comité des médicaments vétérinaires (ci-après «CMV»), qui est tenu d'émettre un avis dans les 120 jours (paragraphe 3). Au vu des observations formulées par le CMV, la Commission prépare, dans un délai maximal de 30 jours, un projet de mesures à prendre. Elle peut, en tant que de besoin, inviter la personne responsable de la mise sur le marché à fournir des informations supplémentaires au CMV (paragraphe 4). Le projet des mesures à prendre est «aussitôt» communiqué aux États membres ainsi qu'à la personne responsable de la mise sur le marché qui peut, à la demande du CMV, fournir à celui-ci des explications écrites ou orales (paragraphe 5). La Commission soumet «aussitôt» les mesures proposées au comité pour l'adaptation au progrès technique des directives relatives aux médicaments vétérinaires (paragraphe 6), composé des représentants des États membres et présidé par un représentant de la Commission. Aux termes de l'article 8 du règlement n° 2377/90, ce comité doit émettre son avis sur le projet dans un délai fixé par le président. La Commission adopte les mesures envisagées lorsqu'elles sont conformes à l'avis dudit comité [article 8, paragraphe 3, sous a)]. Lorsque les mesures envisagées ne sont pas conformes à cet avis, ou en l'absence d'avis, la Commission saisit le Conseil, qui se prononce à la majorité qualifiée [article 8, paragraphe 3, sous b)]. Si, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de la date à laquelle il a été saisi, le Conseil n'a pas arrêté de mesures, la Commission arrête les mesures proposées, sauf dans le cas où le Conseil se prononce à la majorité simple contre lesdites mesures [article 8, paragraphe 3, sous c)].

33.
    Le règlement (CEE) n° 2309/93 du Conseil, du 22 juillet 1993, établissant des procédures communautaires pour l'autorisation et la surveillance des médicaments à usage humain et à usage vétérinaire et instituant une agence européenne pour l'évaluation des médicaments (JO L 214, p. 1, ci-après «règlement n° 2309/93»),prévoit une procédure centralisée d'autorisation de mise sur le marché (ci-après «AMM») d'un médicament vétérinaire.

34.
    Il ressort de l'article 31, paragraphe 3, sous b), de ce règlement, que, dans le cas d'un médicament destiné à être administré à des animaux producteurs d'aliments, l'indication de la LMR pouvant être acceptée par la Communauté conformément au règlement n° 2377/90 est une condition nécessaire à la délivrance d'une AMM.

35.
    En vertu de l'article 34, paragraphe 2, du même règlement, le refus d'une AMM «constitue une interdiction de mettre le médicament vétérinaire concerné sur le marché dans toute la Communauté».

36.
    Conformément à l'article 7 du règlement n° 2377/90, BI Vetmedica a soumis à la Commission, le 20 juillet 1994, une demande en vue de la fixation de LMR pour le clenbutérol en ce qui concerne les bovins et les équidés. Par avis du 3 janvier 1996, le CMV a, pour des raisons de méthodologie scientifique, recommandé l'adoption de LMR provisoires, expirant le 1er juillet 2000.

37.
    La Commission a adopté, le 8 juillet 1996, le règlement n° 1312/96, par lequel elle fixe des LMR provisoires pour le clenbutérol, mais exclusivement aux fins thérapeutiques autorisées au titre de la directive 96/22, à savoir, dans le cas des bovins, uniquement pour l'induction de la tocolyse chez les vaches parturientes, et, dans le cas des équidés, pour l'induction de la tocolyse et le traitement des troubles respiratoires. Les sixième, septième et neuvième considérants du règlement n° 1312/96 exposent:

«considérant que, afin de permettre l'achèvement des études scientifiques, le chlorhydrate de clenbutérol doit être inséré à l'annexe III du règlement (CEE) n° 2377/90;

considérant que la directive 96/22/CE du Conseil, concernant l'interdiction d'utilisation de certaines substances à effet hormonal ou thyréostatique et des substances ß-agonistes dans les spéculations animales, interdit l'utilisation du clenbutérol chez tous les animaux d'élevage, sauf à certaines fins thérapeutiques spécifiques chez les équins et chez les vaches;

[...]

considérant que les mesures prévues au présent règlement sont conformes à l'avis du comité permanent des médicaments vétérinaires».

Procédure

38.
    Par requête déposée au greffe du Tribunal le 9 août 1996, les requérantes ont introduit un recours, enregistré sous le numéro T-125/96, qui a pour objet l'annulation partielle de la directive 96/22 et la réparation d'un préjudice.

39.
    Par requête déposée au greffe du Tribunal le 27 septembre 1996, les requérantes ont introduit un recours, enregistré sous le numéro T-152/96, qui a pour objet principal l'annulation partielle du règlement n° 1312/96.

40.
    Par demande séparée, déposée au greffe le 31 octobre 1996, le Conseil a, dans l'affaire T-125/96, soulevé une exception d'irrecevabilité au titre de l'article 114 du règlement de procédure.

41.
    Par ordonnance du 13 juin 1997, le Tribunal a, dans l'affaire T-125/96, admis l'intervention, d'une part, de la Fedesa et du Royaume-Uni, au soutien des conclusions des parties requérantes, et, d'autre part, de la Commission et de la SKV, au soutien des conclusions de la partie défenderesse. Par ordonnance du même jour, le Tribunal a, dans l'affaire T-152/96, admis l'intervention, d'une part, de la Fedesa, au soutien des conclusions des parties requérantes, et, d'autre part, de la SKV et du Conseil, au soutien des conclusions de la partie défenderesse.

42.
    Dans l'affaire T-125/96, les parties intervenantes ont déposé leurs observations écrites, limitées dans un premier temps à la recevabilité du recours en vertu du point 4 du dispositif de l'ordonnance précitée, respectivement les 8 octobre 1997 (Royaume-Uni), 10 octobre 1997 (Fedesa et Commission) et 24 octobre 1997 (SKV). A la suite d'une réunion informelle avec les parties qui s'est tenue le 9 novembre 1998, le Tribunal a invité celles-ci à préciser certains faits et a, par ordonnance du 19 novembre 1998, joint au fond l'exception d'irrecevabilité soulevée par le Conseil. La Fedesa, la SKV et la Commission ont déposé leurs observations écrites sur le fond de l'affaire le 5 mars 1999. Le Royaume-Uni a renoncé à déposer de telles observations. Par lettre enregistrée au greffe du Tribunal le 10 mars 1999, les parties requérantes ont renoncé à déposer un mémoire en réplique. La procédure écrite a dès lors été clôturée.

43.
    Dans l'affaire T-152/96, les parties intervenantes ont déposé leurs observations écrites, respectivement les 8 octobre 1997 (Conseil), 10 octobre 1997 (Fedesa) et 27 octobre 1997 (SKV).

44.
    Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (deuxième chambre) a décidé d'ouvrir la procédure orale dans les deux affaires et de poser certaines questions écrites aux requérantes, à la Commission et au Conseil, au titre de l'article 64 du règlement de procédure. Ces parties y ont répondu par lettres datées des 28 et 30 avril 1999. Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales du Tribunal lors de l'audience publique du 12 mai 1999.

45.
    Interrogées par lettre du greffe du 3 juin 1999, conformément à l'article 50 du règlement de procédure, les parties ont déclaré n'avoir aucune objection à ce que les affaires T-125/96 et T-152/96 soient jointes aux fins de l'arrêt.

Conclusions des parties dans l'affaire T-125/96

46.
    Les parties requérantes concluent à ce qu'il plaise au Tribunal:

-    annuler les articles 1er, 2, 3 et 4 de la directive 96/22, dans la mesure où ils interdisent la mise sur le marché de médicaments vétérinaires contenant des ß-agonistes en vue de leur administration à des fins thérapeutiques aux animaux dont la chair et les produits sont destinés à la consommation humaine;

-    condamner la Communauté à réparer le dommage qu'elles ont subi à la suite de l'adoption de l'acte attaqué;

-    ordonner aux parties de présenter au Tribunal, dans un délai raisonnable à compter de la date de l'arrêt, les chiffres correspondant au montant du dédommagement fixé d'un commun accord;

-    à défaut d'un tel accord, ordonner aux parties de présenter au Tribunal, dans le même délai, leurs conclusions accompagnées de chiffres précis;

-    ordonner le versement d'un intérêt au taux annuel de 8 % sur le montant exigible à compter de la date de l'arrêt;

-    condamner le Conseil aux dépens de l'instance.

47.
    La partie défenderesse conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

-    rejeter le recours comme manifestement irrecevable ou, à titre subsidiaire, comme non fondé;

-    condamner les requérantes aux dépens.

48.
    La Fedesa soutient les moyens et conclusions des parties requérantes, et demande la condamnation du Conseil aux dépens afférents à son intervention.

49.
    Le Royaume-Uni conclut à ce qu'il plaise au Tribunal rejeter l'exception d'irrecevabilité du recours en indemnité soulevée par le Conseil.

50.
    La SKV soutient les conclusions de la partie défenderesse et demande la condamnation des requérantes aux dépens afférents à son intervention.

51.
    La Commission soutient les conclusions de la partie défenderesse.

Conclusions des parties dans l'affaire T-152/96

52.
    Les parties requérantes concluent à ce qu'il plaise au Tribunal:

-    déclarer, conformément à l'article 184 du traité CE (devenu article 241 CE), que la directive 96/22, dans la mesure où elle interdit la mise sur le marché de médicaments vétérinaires contenant des ß-agonistes en vue de leur administration à des fins thérapeutiques aux animaux d'exploitation, est illégale et ne peut donc servir à justifier les restrictions prévues au règlement n° 1312/96;

-    annuler le règlement n° 1312/96 dans la mesure où il restreint la validité des LMR établies pour le clenbutérol à certaines utilisations thérapeutiques précises;

-    condamner la Commission aux dépens de l'instance.

53.
    La partie défenderesse conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

-    rejeter le recours comme irrecevable ou, à titre subsidiaire, comme non fondé;

-    condamner les requérantes aux dépens de l'instance.

54.
    La Fedesa soutient les moyens et conclusions des parties requérantes et demande la condamnation de la Commission aux dépens afférents à son intervention.

55.
    La SKV soutient les conclusions de la partie défenderesse et demande la condamnation des requérantes aux dépens afférents à son intervention.

56.
    Le Conseil conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

-    rejeter l'exception d'illégalité soulevée à l'égard de la directive 96/22 comme irrecevable ou, à titre subsidiaire, comme non fondée;

-    rejeter le recours comme irrecevable ou, à titre subsidiaire, comme non fondé;

-    condamner les requérantes aux dépens de l'instance.

Considérations liminaires quant à l'objet du litige et à la procédure

57.
    La demande en annulation partielle du règlement n° 1312/96, dans l'affaire T-152/96, a pour fondement essentiel l'exception d'illégalité soulevée à l'encontrede la directive 96/22, dont l'annulation partielle constitue, en partie, l'objet du recours dans l'affaire T-125/96. Par ailleurs, les arguments invoqués par les requérantes aux fins de contester la légalité de ladite directive sont, en substance, identiques dans les deux affaires.

58.
    Dans ces conditions, le Tribunal estime opportun de se prononcer d'abord sur la question, commune aux deux affaires, de la légalité de la directive 96/22 avant d'examiner les autres questions de recevabilité et de fond que soulèvent chacune d'elles.

Sur la légalité de la directive 96/22

59.
    Aux fins d'établir l'illégalité de la directive 96/22, les requérantes invoquent quatre moyens. Le premier est tiré de la violation du principe de proportionnalité, le deuxième de la violation des principes de sécurité juridique et de protection de la confiance légitime, le troisième de la violation du principe de bonne administration, et le quatrième de la violation de l'article 43 du traité CE.

Sur le premier moyen, tiré de la violation du principe de proportionnalité

Arguments des parties

60.
    Tout en reconnaissant que la directive 96/22, considérée dans son ensemble, peut avoir pour effet de protéger la santé humaine et la confiance des consommateurs, les requérantes font valoir que l'unique objectif des dispositions contestées est de permettre un contrôle plus aisé, par les autorités nationales, de l'utilisation illicite des ß-agonistes, en faisant en sorte que les agriculteurs ne puissent plus justifier la détection de résidus de ces substances dans les animaux par le fait qu'ils leur ont administré des médicaments vétérinaires en contenant.

61.
    Les requérantes admettent que le clenbutérol peut servir à des fins illicites d'engraissement du bétail. Elles insistent néanmoins sur le fait que seul le clenbutérol sous forme de produit chimique de base peut être employé à de telles fins, et que leurs médicaments vétérinaires ne peuvent être utilisés de manière abusive (voir point 7 ci-dessus).

62.
    Les requérantes soulignent, par ailleurs, l'innocuité, la qualité et l'efficacité unanimement reconnues de leurs médicaments vétérinaires contenant du clenbutérol. La Ventipulmine, en particulier, serait tenue par les spécialistes en médecine vétérinaire pour un médicament indispensable pour le traitement des maladies respiratoires affectant les bovins et les équidés. Il n'existerait, en effet, aucun produit de substitution aux propriétés équivalentes.

63.
    Dans les circonstances de l'espèce, les requérantes soutiennent qu'il est contraire au principe de proportionnalité de mettre ainsi en danger la santé des animaux,laquelle serait protégée par l'ordre juridique communautaire (voir l'article 36 du traité CE, devenu, après modification, article 30 CE), alors que la santé des personnes n'est pas en cause, au simple motif que le travail des organismes nationaux en serait facilité. Il serait également contraire audit principe, dans ces mêmes circonstances, d'infliger aux requérantes de graves pertes financières, de porter atteinte à leurs droits de propriété et d'affecter leur droit d'exercer une activité professionnelle ou commerciale (voir les arrêts de la Cour du 13 décembre 1979, Hauer, 44/79, Rec. p. 3727, point 32, du 11 juillet 1989, Schräder, 265/87, Rec. p. 2237, point 15, et du 10 janvier 1992, Kühn, C-177/90, Rec. p. I-35).

64.
    En outre, les requérantes font valoir que les restrictions aux droits fondamentaux imposées par les dispositions attaquées ne sont pas nécessaires pour que l'objectif poursuivi soit atteint. Elles se réfèrent, d'une part, à la procédure communautaire relative à l'établissement des LMR, et, d'autre part, aux articles 1er, paragraphe 5, et 50 quater de la directive 81/851, telle que modifiée par la directive 90/676 (voir points 17 et 18 ci-dessus), dont l'application rigoureuse, dans tous les États membres, permettrait de vérifier aisément si un animal a bien fait l'objet d'un traitement thérapeutique conformément aux instructions d'un vétérinaire, lui-même tenu d'en enregistrer les particularités dans un registre mis à la disposition des autorités compétentes.

65.
    A cet égard, les requérantes relèvent que, en 1990-1992, la plupart des États membres n'avaient pas encore arrêté les mesures d'application prévues par la directive 90/676. Par conséquent, il aurait été impossible, à cette époque, d'apprécier si des mesures de contrôle rigoureuses étaient suffisantes pour lutter efficacement contre l'utilisation illicite des ß-agonistes. En 1993, la Commission aurait toutefois reconnu devant le Parlement qu'elle avait «détecté une amélioration considérable dans l'application des contrôles sur le marché intérieur depuis son enquête de 1990-1992» (voir la communication du 21 avril 1993, précitée). En outre, il aurait été constaté dans plusieurs États membres une diminution sensible du nombre de tests positifs.

66.
    Les requérantes relèvent, de surcroît, qu'un système de contrôle efficace, basé sur les dispositions de la directive 81/851, telle que modifiée par la directive 90/676, existait déjà au Royaume-Uni, où le propriétaire d'un animal dont le contrôle a révélé qu'il contenait des résidus de ß-agonistes doit présenter dans les cinq jours une confirmation écrite du vétérinaire en ayant autorisé l'utilisation. L'efficacité de ce système serait démontrée par l'absence de détection de résidus de clenbutérol dans le cadre des contrôles réalisés par les autorités nationales. Les requérantes se réfèrent également à l'avis du 5 août 1993 de la Veterinary Medicines Directorate (direction des médicaments vétérinaires du ministère de l'Agriculture, de la Pêche et de l'Alimentation du Royaume-Uni), selon laquelle le système de contrôle britannique constitue «le moyen de surmonter les difficultés actuelles découlant de l'utilisation illégale de ß-agonistes».

67.
    Les requérantes font encore valoir que la directive 96/22 elle-même, notamment dans ses articles 8, 9 et 10, prévoit la mise en place d'un tel système de contrôle dans les hypothèses où l'administration de ß-agonistes a été autorisée, notamment pour l'induction de la tocolyse chez les vaches parturientes. Les institutions communautaires n'auraient pas expliqué pourquoi un tel système de contrôle était tenu pour suffisant dans certains cas et insuffisant dans d'autres.

68.
    Elles relèvent également que, dans les situations les plus fréquentes, l'utilisation thérapeutique légale de leurs produits contenant du clenbutérol n'entravera pas les travaux des organismes de contrôle. Il serait en effet aisé, dans la plupart des cas, de déterminer si des ß-agonistes ont été utilisés illicitement, par l'évaluation de la concentration de clenbutérol dans les résidus découverts lors du contrôle des animaux en cause.

69.
    La Fedesa soutient, en substance, les arguments des requérantes et ajoute que, d'après le troisième considérant du règlement n° 2309/93, il est nécessaire, dans l'intérêt de la santé publique, que les décisions d'autorisation de médicaments à usage humain ou vétérinaire soient prises sur la base des seuls critères scientifiques objectifs de la qualité, de la sécurité et de l'efficacité, à l'exclusion de toute considération économique ou autre.

70.
    Selon la Fedesa, ordonner le retrait d'un médicament vétérinaire du marché pour des raisons étrangères à ces trois critères conduirait à dissuader les entreprises du secteur pharmaceutique d'investir dans la mise au point et l'amélioration de leurs produits.

71.
    En outre, en l'espèce, les vétérinaires se verraient eux-mêmes privés d'un médicament efficace, pour lequel il n'existe pas de produit de substitution véritable. La Fedesa se réfère sur ce point à l'avis du professeur Ungemach, de la faculté de médecine vétérinaire de l'université de Leipzig, d'après lequel une grave lacune thérapeutique découlera de l'interdiction de l'administration des ß-agonistes.

72.
    A tout le moins, la Fedesa soutient que, même si le Conseil était en droit de faire obstacle à l'utilisation d'une substance donnée à une fin thérapeutique spécifique qui ne présente aucun risque pour la santé publique, il ne pourrait y être autorisé que dans des cas exceptionnels, lorsqu'il apparaît que cette interdiction est le seul moyen d'empêcher certaines autres utilisations présentant un risque pour la santé publique. Selon la Fedesa, ces conditions ne sont pas remplies en l'espèce.

Appréciation du Tribunal

73.
    Le principe de proportionnalité est reconnu par une jurisprudence constante comme faisant partie des principes généraux du droit communautaire. En vertu de ce principe, les actes des institutions communautaires ne doivent pas dépasser la limite de ce qui est approprié et nécessaire à la réalisation des objectifslégitimement poursuivis par la mesure en cause, étant entendu que, lorsqu'un choix s'offre entre plusieurs mesures appropriées, il convient de recourir à la moins contraignante, et que les inconvénients causés ne doivent pas être démesurés par rapport aux buts visés (arrêts de la Cour du 13 novembre 1990, Fedesa e.a., C-331/88, Rec. p. I-4023, point 13, et du 5 mai 1998, Royaume-Uni/Commission, C-180/96, Rec. p. I-2265, point 96).

74.
    En ce qui concerne le contrôle judiciaire de ces conditions, il y a lieu de préciser que le législateur communautaire dispose en matière de politique agricole commune d'un pouvoir discrétionnaire qui correspond aux responsabilités politiques que les articles 40 du traité CE (devenu, après modification, article 34 CE) et 43 du traité CE lui attribuent. Par conséquent, seul le caractère manifestement inapproprié d'une mesure arrêtée en ce domaine, par rapport à l'objectif que l'institution compétente entend poursuivre, peut affecter la légalité d'une telle mesure (arrêts Schräder, précité, point 22, Fedesa e.a., précité, points 13 et 14, et Royaume-Uni/Commission, précité, point 97; arrêt du Tribunal du 13 décembre 1995, Exporteurs in Levende Varkens e.a./Commission, T-481/93 et T-484/93, Rec. p. II-2941, points 119 et 120).

75.
    En l'espèce, les requérantes ne mettent pas en cause la légitimité de l'interdiction de l'utilisation des ß-agonistes à des fins d'engraissement du bétail, eu égard à l'objectif de santé publique poursuivi par les institutions dans le cadre général de la directive 96/22. Elles estiment, toutefois, que le Conseil a violé le principe de proportionnalité en interdisant également, aux seules fins de faciliter les contrôles, l'utilisation de ces substances en vue de leur administration au bétail à des fins thérapeutiques.

76.
    La directive 96/22 relevant du domaine de la politique agricole commune, il convient de vérifier, en premier lieu, quel est l'objectif poursuivi par les mesures en cause, en deuxième lieu, si ces mesures n'ont pas un caractère manifestement inapproprié par rapport à cet objectif, en troisième lieu, si elles sont nécessaires à la réalisation de cet objectif et si des mesures alternatives moins restrictives n'étaient pas envisageables, et enfin, en quatrième lieu, si les inconvénients causés ne sont pas démesurés par rapport audit objectif.

77.
    S'agissant, en premier lieu, de l'objectif poursuivi par les mesures en cause, il convient de relever que, ainsi qu'il résulte de ses sixième et huitième considérants, la directive 96/22 vise, à la fois, la protection de la santé publique et la réalisation des buts de la politique agricole commune dans le cadre d'une organisation commune des marchés, en assurant à tous les consommateurs les mêmes conditions d'approvisionnement en viande et en denrées alimentaires dérivées, tout en répondant au mieux à leurs soucis et à leurs attentes. C'est à la lumière de ce double objectif qu'il convient d'apprécier la légalité des mesures en cause.

78.
    S'agissant, en deuxième lieu, de l'appréciation du caractère non manifestement inapproprié des mesures en cause, force est de constater que, du point de vue del'objectif de protection de la santé publique visé par le sixième considérant de la directive 96/22, une mesure d'interdiction d'un produit en raison des risques que son utilisation peut comporter est, par définition, propre à prévenir les dangers liés à cette utilisation. Il en va de même, en l'espèce, du point de vue de l'objectif énoncé au huitième considérant de la directive 96/22, puisque sa réalisation est intimement liée aux soucis et attentes des consommateurs en matière de santé publique.

79.
    Il convient d'ajouter que, dans un cas comme celui de l'espèce, où le produit en cause est susceptible de deux utilisations, l'une, en médecine vétérinaire, sans danger pour la santé publique, l'autre, à des fins d'engraissement du bétail, nocive pour l'homme, la question de savoir si l'interdiction doit s'étendre aux deux usages ne saurait être appréciée in abstracto, mais doit tenir compte de toutes les circonstances pertinentes, et notamment des possibilités d'abus et de fraude, des risques qui y sont liés et de l'efficacité des mesures de contrôle.

80.
    S'agissant, en troisième lieu, de l'appréciation du caractère nécessaire des mesures en cause et de l'existence éventuelle de mesures alternatives moins restrictives, il y a lieu de rappeler, tout d'abord, que des LMR provisoires ont été fixées pour les ß-agonistes, et, notamment, pour le clenbutérol, par le règlement n° 1312/96.

81.
    Il s'ensuit que l'utilisation de cette substance peut être considérée comme sans danger pour la santé humaine en deçà d'un certain seuil de résidus. En effet, aux termes de l'article 1er du règlement n° 2377/90, une LMR «se base sur le type et la quantité de résidus considérés comme ne présentant pas de risques d'ordre toxicologique pour la santé humaine». Aux termes de l'article 4 dudit règlement, une LMR provisoire ne peut être fixée qu'«à condition qu'il n'y ait pas de raison de penser que les résidus de la substance en question, au niveau proposé, présentent un risque pour la santé du consommateur».

82.
    Toutefois, l'établissement de LMR pour le clenbutérol ne saurait suffire, dans les circonstances de l'espèce, à assurer la protection de la santé publique. Il faudrait en effet que la présence de résidus de cette substance soit systématiquement analysée dans chaque aliment d'origine animale entrant dans la chaîne alimentaire.

83.
    Or, la mise en place d'un tel dépistage systématique étant exclue en pratique, ne serait-ce qu'en raison de son coût prohibitif, il y a lieu de rejeter l'argument selon lequel la seule fixation de LMR pour les ß-agonistes rendrait inutile l'adoption de toute autre mesure réglementant leur utilisation.

84.
    Il convient de rappeler, par ailleurs, que le Conseil devait exercer son pouvoir d'appréciation et assumer ses responsabilités politiques face à une situation particulièrement complexe et délicate.

85.
    D'une part, un certain nombre de considérations liées à la santé et au bien-être des animaux militaient en faveur d'un maintien de l'autorisation d'une utilisation thérapeutique des ß-agonistes, y compris pour les bovins. Ces considérations ont été émises non seulement par les requérantes, mais aussi par la Fedesa, la Fédération des vétérinaires européens, l'Union européenne des vétérinaires praticiens, l'Association des vétérinaires allemands, les professeurs Lekeux, de la faculté de médecine vétérinaire de l'université de Liège, et Ungemach, de la faculté de médecine vétérinaire de l'université de Leipzig, le comité vétérinaire permanent, la commission de l'agriculture, de la pêche et du développement rural du Parlement et par le Comité économique et social qui, dans son avis du 21 décembre 1993 (JO 1994, C 52, p. 30), a exprimé des réserves quant à la proposition de règlement de la Commission, du 14 octobre 1993, précitée.

86.
    En particulier, l'existence de produits de substitution d'une qualité, d'une innocuité et d'une efficacité équivalentes à celles des ß-agonistes, pour le traitement des troubles respiratoires des bovins, ne paraît pas établie en l'espèce (voir la lettre de la Fédération des vétérinaires européens au membre de la Commission M. Steichen du 12 octobre 1993, la lettre de l'Union européenne des vétérinaires praticiens à M. Steichen du 20 octobre 1993, et la lettre du président de la Deutsche Tierärtzteschaft eV au membre de la Commission M. Bangemann du 21 avril 1993, ainsi que les avis des professeurs Lekeux et Ungemach).

87.
    D'autre part, le Conseil avait à tenir compte de l'usage grandissant des ß-agonistes et autres substances à effet anabolisant dans l'élevage en substitution des hormones de croissance conventionnelles, à la suite des mesures d'interdiction et de contrôle adoptées à l'égard de ces produits tout au long des années 80; des risques nouveaux pour la santé publique qui en résultaient; de l'appel lancé par divers États membres, dès 1988, en faveur d'une action communautaire en la matière; de l'enquête menée par la Commission dans les États membres, de 1990 à 1992, sur l'application de la législation communautaire, dont les résultats avaient fait apparaître l'existence de risques graves pour la santé publique, liés à la large disponibilité des anabolisants; de l'avis du Parlement, dont la commission de l'environnement, de la santé publique et de la protection des consommateurs avait estimé, en 1994, qu'il convenait d'interdire les ß-agonistes dans les plus brefs délais pour des raisons impérieuses tenant à la santé publique; et de l'avis de responsables du contrôle dans les États membres, ainsi que de certains experts (voir le rapport Schuman Associates, cité au point 12 ci-dessus, et le rapport de la Conférence scientifique sur les facteurs de croissance dans la viande, du 17 janvier 1996, produit par le Conseil à la demande du Tribunal, aux termes duquel il n'était pas approprié d'utiliser les ß-agonistes en raison de leur risque potentiel pour la santé humaine et animale).

88.
    Dans l'évaluation des possibilités d'action qui s'offraient à lui, le Conseil devait, en particulier, faire porter son appréciation sur le point de savoir si une autorisation éventuelle de l'utilisation des ß-agonistes à des fins thérapeutiques, assortie de mesures de contrôle du type de celles proposées par les requérantes, était denature à empêcher l'usage clandestin de substances dont la nocivité à des doses massives, à des fins d'engraissement, est unanimement reconnue, ou si seule une interdiction assortie de dérogations très strictes pouvait efficacement être contrôlée et devait, dès lors, être imposée, bien que la Commission «répugne généralement à proposer le retrait du marché d'un médicament à usage thérapeutique».

89.
    A cet égard, les requérantes font plus particulièrement valoir qu'il est possible, moyennant la mise en place de contrôles appropriés, de distinguer aisément l'utilisation des ß-agonistes à des fins d'engraissement du bétail de leur utilisation à des fins thérapeutiques, de sorte que l'interdiction de l'une, en vue d'atteindre l'objectif que le Conseil entendait poursuivre, ne devait pas nécessairement entraîner l'interdiction de l'autre. Selon les institutions, au contraire, c'est précisément l'impossibilité ou la difficulté de faire la distinction entre ces deux usages, sauf à mettre en place un système de contrôles dont le coût serait prohibitif, qui justifie l'interdiction quasi totale de l'utilisation des ß-agonistes dans l'élevage des bovins imposée par la directive 96/22, la protection de la santé humaine et le rétablissement de la confiance des consommateurs devant, en l'espèce, primer toute autre considération, et notamment celles liées au bien-être des animaux ou aux droits de propriété des requérantes.

90.
    Au vu de la documentation scientifique produite devant le Tribunal, force est de reconnaître que les techniques actuelles de détection ne permettent pas de déterminer avec certitude si les résidus de ß-agonistes révélés lors du contrôle d'un animal ou de denrées alimentaires dérivées proviennent d'une dose administrée à des fins thérapeutiques la veille du contrôle, ou d'une dose administrée à des fins d'engraissement artificiel plusieurs jours auparavant.

91.
    Par ailleurs, il n'est pas manifeste que les mesures mises en oeuvre dans le cadre de la directive 81/851, telle que modifiée par la directive 90/676 (voir points 17 et 18 ci-dessus), suffisent pour empêcher toute utilisation abusive des produits en question.

92.
    A cet égard, il y a lieu de relever que la solution préconisée par les requérantes, qui consiste, ainsi qu'elles l'ont exposé à l'audience, à permettre aux éleveurs d'administrer eux-mêmes au bétail des médicaments vétérinaires à base de clenbutérol, sur prescription d'un vétérinaire mais en dehors de sa présence effective, par le fait même qu'elle impliquerait et justifierait la présence habituelle, sur une large échelle, de ces produits dans les fermes, rendrait plus malaisée la recherche de l'origine, licite ou illicite, des résidus de clenbutérol détectés lors d'un contrôle.

93.
    Il convient, du reste, d'observer que la directive 96/22, dans les cas où elle autorise l'administration, à des fins thérapeutiques, de substances à effet hormonal à des animaux d'exploitation ou de médicaments contenant des substances ß-agonistes à des vaches parturientes (voir article 4, paragraphes 1 et 2), impose que letraitement soit administré par un vétérinaire et fasse l'objet d'un enregistrement détaillé.

94.
    Or, toutes les parties s'accordent pour reconnaître que, s'agissant du traitement des troubles respiratoires des bovins, un tel système serait prohibitif, au point de dissuader les éleveurs d'y avoir recours. D'une part, en effet, les soins ne se résument pas, normalement, à une injection unique, mais nécessitent l'administration, par voie orale, d'une ou de plusieurs doses journalières, pendant plusieurs jours. D'autre part, les conditions d'élevage intensif ayant cours dans la Communauté et la nature infectieuse des troubles respiratoires les plus fréquents impliquent le traitement simultané d'un grand nombre d'animaux.

95.
    Force est de constater, en outre, que toute possibilité de justifier la présence de résidus de ß-agonistes, lors d'un contrôle, par une administration à des fins thérapeutiques, facilite l'utilisation abusive de ces substances par des éleveurs peu scrupuleux. Si elle permet indiscutablement d'atténuer le risque d'un tel usage, l'intervention obligatoire d'un vétérinaire n'est pas susceptible de l'éliminer totalement.

96.
    En tout état de cause, les mesures de contrôle qui seraient nécessitées par l'application de dispositions moins restrictives, telles que celles préconisées par les requérantes, auraient un coût important, à la charge de la collectivité. Ce coût doit aussi être mis en balance avec le préjudice causé aux requérantes par l'interdiction de leurs médicaments vétérinaires à base de clenbutérol. Or, les éléments du dossier soumis au Tribunal ne permettent pas d'établir que, dans cette appréciation, la balance des intérêts penche en faveur des requérantes, compte tenu du préjudice relativement limité qu'elles ont subi à la suite de la mise en oeuvre de la directive 96/22 (voir point 107 ci-après).

97.
    Eu égard aux considérations qui précèdent, il convient de retenir que les requérantes ne sont pas parvenues à démontrer que le Conseil a commis une erreur manifeste d'appréciation en considérant que l'interdiction générale constituait la solution à laquelle il fallait donner la préférence du point de vue de la protection de la santé publique.

98.
    Il convient d'ajouter que, même si la protection de la santé publique l'emporte sur toute autre considération, la protection de la confiance des consommateurs est également importante.

99.
    Or, il est constant qu'au moins une partie de l'opinion publique et des professionnels concernés ainsi qu'un nombre important de membres du Parlement militaient en faveur d'une interdiction pure et simple des ß-agonistes, et que leurs inquiétudes n'auraient pas été apaisées par la mise en place de mécanismes de contrôle, aussi efficaces soient-ils d'un point de vue strictement opérationnel. Il est constant, également, que, dans beaucoup de pays de la Communauté, descampagnes d'information allant jusqu'à des appels au boycott des viandes aux hormones avaient été lancées dans le passé par les associations de consommateurs.

100.
    Dans ces circonstances et compte tenu de l'utilisation croissante des ß-agonistes à des fins d'engraissement artificiel du bétail, il ne saurait être considéré que le Conseil a commis une erreur manifeste d'appréciation en retenant que seule une mesure d'interdiction générale était de nature à rétablir la confiance des consommateurs.

101.
    Par ailleurs, l'argument tiré de la pratique traditionnelle de la Communauté en matière d'autorisation de produits pharmaceutiques [voir le préambule de la directive 65/65/CEE du Conseil, du 26 janvier 1965, concernant le rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives, relatives aux spécialités pharmaceutiques (JO 1965, 22, p. 369), les directives 81/851 et 81/852/CEE du Conseil, du 28 septembre 1981, relative au rapprochement des législations des États membres concernant les normes et protocoles analytiques, toxico-pharmacologiques et cliniques en matière d'essais de médicaments vétérinaires (JO L 317, p. 16), et le troisième considérant du règlement n° 2309/93] est sans pertinence, dès lors que ne sont nullement mises en cause, en l'espèce, l'innocuité, la qualité et l'efficacité des médicaments vétérinaires des requérantes, dans des conditions d'utilisation normales.

102.
    En ce qui concerne, en quatrième lieu, la proportionnalité au sens étroit du terme, c'est-à-dire la mise en balance des préjudices causés à des droits individuels et les avantages créés en contrepartie dans l'intérêt général, il y a lieu de relever que l'importance des objectifs poursuivis, à savoir la protection de la santé publique et le rétablissement de la confiance des consommateurs, est de nature à justifier des conséquences économiques négatives, même considérables, pour certains opérateurs (voir arrêt Fedesa e.a., précité, point 17), et que la préservation de la santé publique doit l'emporter sur toute autre considération (conclusions de l'avocat général M. Mischo sous l'arrêt Fedesa e.a., précitées, p. I-4051), et, notamment, celles liées au bien-être des animaux ou aux droits de propriété des requérantes.

103.
    S'agissant, plus particulièrement, de l'incidence des mesures en cause sur les intérêts économiques des requérantes, le Tribunal a rappelé, dans son arrêt du 29 janvier 1998, Dubois/Conseil et Commission (T-113/96, Rec. p. II-125, points 74 et 75), que si le droit au libre exercice des activités professionnelles fait partie des principes généraux du droit communautaire, ce principe n'apparaît toutefois pas comme une prérogative absolue, mais doit être pris en considération par rapport à sa fonction dans la société. Par conséquent, des restrictions peuvent y être apportées, à condition que ces restrictions répondent effectivement à des objectifs d'intérêt général poursuivis par la Communauté et ne constituent pas, au regard du but poursuivi, une intervention démesurée et intolérable qui porterait atteinte à la substance même du droit ainsi garanti (voir également les arrêts de la Cour du14 mai 1974, Nold/Commission, 4/73, Rec. p. 491, point 14, du 5 octobre 1994, Allemagne/Conseil, C-280-93, Rec. p. I-4973, point 78, et du 17 juillet 1997, Affish, C-183/95, Rec. p. I-4315, point 42).

104.
    En l'espèce, la déchéance partielle des AMM dont les requérantes sont titulaires, qui est une conséquence de la mise en oeuvre de la directive 96/22, ne porte pas atteinte à la substance même de leur droit de propriété sur leurs produits et marques.

105.
    En outre, cette déchéance est limitée à la fois géographiquement et matériellement. D'une part, en effet, les requérantes n'ont jamais obtenu ni même sollicité d'AMM pour leurs produits à base de clenbutérol dans un certain nombre d'États membres (Danemark, Finlande, France, Grèce et Suède: voir point 11 ci-dessus). D'autre part, les requérantes demeurent libres de commercialiser lesdits produits en dehors de la Communauté et, dans celle-ci, pour tous les usages thérapeutiques non interdits par la directive 96/22.

106.
    A cet égard, il convient de souligner que les requérantes font une interprétation erronée de la directive 96/22 lorsqu'elles soutiennent que celle-ci entraîne, de facto, l'interdiction de toute administration de ß-agonistes en vue du traitement des troubles respiratoires des équidés, aux motifs que ceux-ci seraient tous à considérer comme des animaux de rente, et qu'ils seraient donc visés par l'interdiction de l'article 2, sous b), de ladite directive. Cette interprétation, qui est rejetée tant par la Commission que par le Conseil, est incompatible avec les articles 1er, paragraphe 2, sous b), et 4, paragraphe 1, point 2, de la directive 96/22. Il ressort, en effet, de ces dispositions que l'interdiction de l'administration des ß-agonistes ne concerne pas le traitement des troubles respiratoires des équidés qui ne sont pas élevés spécifiquement aux fins de la production de viande. En revanche, le fait que les chevaux soient inclus dans la liste des espèces propres à la consommation humaine, au sens de la directive 64/433/CEE du Conseil, du 26 juin 1964, relative à des problèmes sanitaires en matière d'échanges intracommunautaires de viandes fraîches (JO 1964, 121, p. 2012), telle qu'amendée, est sans aucune pertinence aux fins de la présente question.

107.
    Il ressort également des indications fournies par les requérantes en réponse aux questions écrites du Tribunal que le chiffre d'affaires total réalisé par elles sur leurs ventes de médicaments vétérinaires contenant du clenbutérol dans les États membres (tous usages et tous produits confondus) est passé de 13 528 063 DM en 1995 à 12 283 756 DM en 1998, soit une baisse de l'ordre de 9,2 %, représentant 1 244 307 DM. La relative faiblesse de cette diminution s'explique, d'après les requérantes, par une hausse des ventes de leurs produits à base de clenbutérol pour équidés.

108.
    Dans les circonstances de l'espèce, les restrictions ainsi apportées à la valorisation économique de produits développés par les requérantes il y a plus de 20 ans, et qui ne sont plus protégés par un brevet, ne représentent pas un sacrifice démesuré ouintolérable par rapport aux objectifs d'intérêt général poursuivis par le législateur communautaire.

109.
    Il résulte de l'ensemble des considérations qui précèdent que le moyen tiré d'une violation du principe de proportionnalité doit être rejeté.

Sur le deuxième moyen, tiré de la violation des principes de sécurité juridique et de protection de la confiance légitime

Arguments des requérantes

110.
    S'estimant en droit de s'attendre à ce que le Conseil ne les prive pas de leur droit de commercialiser les médicaments vétérinaires en cause, les requérantes soutiennent que les dispositions attaquées sont contraires aux principes fondamentaux de protection de la confiance légitime et de sécurité juridique.

111.
    En effet, les institutions communautaires auraient toujours souligné que les seuls critères pertinents aux fins de déterminer si un médicament doit bénéficier d'une AMM sont la qualité, l'innocuité et l'efficacité du produit (voir article 41 de la directive 81/851), et refusé, jusqu'à présent, de prendre en considération d'autres éléments, de type socio-économique.

112.
    De même, dans son arrêt du 26 janvier 1984, Clin-Midy (301/82, Rec. p. 251, point 10), la Cour aurait indiqué que le Conseil, en adoptant la directive 65/65, du 26 janvier 1965, précitée, a voulu limiter les possibilités de refus, de suspension ou de retrait d'une telle autorisation aux seules raisons de santé publique prévues expressément par la directive (voir également l'arrêt de la Cour du 7 décembre 1993, Pierrel, C-83/92, Rec. p. I-6419).

113.
    Il en irait de même pour les médicaments vétérinaires. Les requérantes se réfèrent, en particulier, aux septième et huitième considérants de la directive 81/851, indiquant les cas dans lesquels l'AMM est refusée, et au troisième considérant de la directive 93/40/CEE du Conseil, du 14 juin 1993, modifiant les directives 81/851 et 81/852 concernant le rapprochement des législations des États membres relatives aux médicaments vétérinaires (JO L 214, p. 31), aux termes duquel un État membre ne peut refuser de reconnaître l'autorisation délivrée par un autre État membre que s'il estime que le produit en cause peut présenter un risque pour la santé des personnes ou des animaux ou pour l'environnement. Elles invoquent aussi les articles 5 et 8 a de la directive 81/851, telle que modifiée par les directives 90/676 et 93/40, du 14 juin 1993, précitée, ce dernier article prévoyant que le risque pour la santé humaine ou animale ou pour l'environnement s'apprécie exclusivement eu égard à la qualité, à l'innocuité et à l'efficacité des produits. Dans leur mémoire en réplique dans l'affaire T-152/96, les requérantes se réfèrent également à un exposé prononcé en décembre 1995 par le membre de la Commission M. Fischler, ainsi qu'au document COM (93) 220 final de laCommission, dans lequel la Commission aurait exposé qu'elle devait rejeter un amendement à sa proposition d'une directive du Conseil modifiant les directives 81/851 et 81/852, du 28 septembre 1981, précitée, proposé par le Parlement, au motif que cet amendement aurait introduit «lors du réexamen quinquennal de l'autorisation d'un médicament vétérinaire, des concepts peu clairs et qui semblent s'écarter des trois critères habituels de l'autorisation (qualité, sécurité, efficacité)».

114.
    Les requérantes font, dès lors, valoir que le Conseil a violé le principe de sécurité juridique, tel qu'il est notamment exprimé par l'adage «patere legem quam ipse fecisti», en s'écartant des critères habituels d'autorisation et en adoptant les dispositions attaquées dans le souci exclusif de faciliter les contrôles des autorités nationales compétentes, alors qu'aucun motif impérieux concernant l'intérêt général ne l'exigeait.

Appréciation du Tribunal

115.
    Le principe de sécurité juridique vise notamment à garantir la prévisibilité des situations et des relations juridiques relevant du droit communautaire (arrêt de la Cour du 15 février 1996, Duff e.a., C-63/93, Rec. p. I-569, point 20; arrêts du Tribunal du 21 octobre 1997, Deutsche Bahn/Commission, T-229/94, Rec. p. II-1689, point 113, et du 17 février 1998, Pharos/Commission, T-105/96, Rec. p. II-285, point 63).

116.
    En l'espèce, la directive 96/22 ne suscite aucun doute quant au droit qui sera applicable lors de sa mise en oeuvre. Le moyen tiré de la violation du principe de sécurité juridique doit, dès lors, être rejeté comme non fondé.

117.
    Quant au principe de protection de la confiance légitime, il peut être invoqué par tout particulier dans le chef duquel une institution communautaire a fait naître des espérances fondées (voir, par exemple, arrêt du Tribunal du 15 décembre 1994, Unifruit Hellas/Commission, T-489/93, Rec. p. II-1201, point 51). Néanmoins, il convient de rappeler également que les opérateurs économiques ne sont pas justifiés à placer leur confiance légitime dans le maintien d'une situation existante qui peut être modifiée dans le cadre du pouvoir d'appréciation des institutions communautaires, et cela spécialement dans un domaine comme celui des organisations communes des marchés (arrêts de la Cour du 15 juillet 1982, Edeka Zentrale, 245/81, Rec. p. 2745, point 27, et du 14 février 1990, Delacre, C-350/88, Rec. p. I-395, point 33; arrêt du Tribunal du 11 décembre 1996, Atlanta e.a./Conseil et Commission, T-521/93, Rec. p. II-1707, point 55). En outre, en l'absence d'assurances précises fournies par l'administration, personne ne peut invoquer une violation du principe de protection de la confiance légitime (arrêts Atlanta e.a./Conseil et Commission, précité, point 57, et Pharos/Commission, précité, point 64).

118.
    En l'espèce, les éléments avancés par les requérantes ne sauraient constituer de telles assurances. Dès lors que le Conseil est resté dans les limites de son pouvoird'appréciation, ainsi que le Tribunal l'a constaté dans le cadre de l'examen du premier moyen, il était en droit d'imposer, pour l'avenir, une interdiction comme celle en cause (voir également point 101 ci-dessus).

119.
    Le moyen tiré d'une violation du principe de protection de la confiance légitime doit, dès lors, être également rejeté.

Sur le troisième moyen, tiré de la violation du principe de bonne administration

Arguments des requérantes

120.
    Les requérantes soutiennent que les institutions communautaires ont violé le principe de bonne administration (voir arrêt de la Cour du 19 octobre 1983, Lucchini/Commission, 179/82, Rec. p. 3083) en adoptant, en 1996, une mesure fondée sur le résultat d'une enquête effectuée de 1990 à 1992, soit à une époque où les États membres n'avaient pas encore mis en oeuvre la directive 90/676, alors même que la Commission avait relevé, dans sa communication du 21 avril 1993, précitée, que, à la suite de la mise en oeuvre de ladite directive, la situation s'était améliorée.

121.
    Selon elles, les institutions communautaires auraient dû s'efforcer de corriger les failles constatées, en matière d'efficacité des mesures de contrôle, au cours de l'enquête de 1990 à 1992, et procéder à une nouvelle enquête afin d'évaluer l'effet de l'amélioration de ces mesures sur la situation du marché, avant de prendre des dispositions aussi radicales dans la directive attaquée.

Appréciation du Tribunal

122.
    Il convient de relever, tout d'abord, que les résultats de l'enquête réalisée par la Commission de 1990 à 1992, évoqués au cinquième considérant de la directive 96/22, ne sont que l'un des éléments dont le Conseil a tenu compte lors de l'adoption de cet acte. En particulier, le Conseil a également pris en considération l'avis et la résolution du Parlement, respectivement du 19 avril 1994 et du 18 janvier 1996, ainsi qu'il ressort du seizième considérant de la directive 96/22.

123.
    Le Conseil disposait également d'autres informations, et, notamment, des résultats de la conférence scientifique organisée par la Commission, du 29 novembre au 1er décembre 1995, sur les activateurs de croissance dans la production de viande.

124.
    Par ailleurs, les statistiques relatives aux cas d'intoxication montrent que ceux-ci persistaient en 1994 et même en 1996 (voir point 10, ci-dessus), de sorte que la mise en oeuvre de la directive 90/676 dans les divers États membres n'avait manifestement pas résolu tous les problèmes de santé publique liés à l'utilisation des ß-agonistes à des fins d'engraissement du bétail. Ainsi, à supposer même que les procédures nationales permettant de contrôler l'utilisation des ß-agonistes aientété améliorées, il paraissait encore justifié, en 1996, d'harmoniser au niveau communautaire les règles nationales régissant l'autorisation de ces produits, afin d'améliorer non seulement le niveau global de protection de la santé humaine, mais également la libre circulation des viandes et des produits provenant d'animaux auxquels ces substances ont été administrées (voir les articles 7, 8, 10 et 11 de la directive 96/22).

125.
    Dans ces conditions, le Conseil était en droit de décider qu'une mesure d'interdiction était le moyen le plus approprié pour protéger la santé humaine et apaiser les inquiétudes des consommateurs. Le troisième moyen doit, dès lors, être rejeté.

Sur le quatrième moyen, tiré de la violation de l'article 43 du traité

Arguments des parties

126.
    Les requérantes soutiennent que, en l'espèce, le Conseil a manqué à l'obligation, qui lui incombe en vertu de l'article 43 du traité, de consulter à nouveau le Parlement chaque fois que le texte finalement adopté, considéré dans son ensemble, s'écarte dans sa substance même de celui sur lequel le Parlement a déjà été consulté, à l'exception des cas où les amendements correspondent, pour l'essentiel, au souhait exprimé par le Parlement lui-même (voir arrêt de la Cour du 1er juin 1994, Parlement/Conseil, C-388/92, Rec. p. I-2067).

127.
    Premièrement, les requérantes exposent que le texte sur lequel le Parlement a été consulté prévoyait l'adoption d'un règlement, et non d'une directive, un tel choix ayant été justifié par la nécessité de veiller à une application immédiate et uniforme des interdictions envisagées. En donnant ultérieurement à la proposition la forme d'une directive, le Conseil en aurait ainsi modifié un élément essentiel.

128.
    Les conséquences du choix d'une directive seraient multiples, notamment en ce qu'il laisse une marge d'appréciation aux États membres. Les requérantes font ainsi valoir que l'article 4 de la proposition initiale prévoyait certaines exceptions à l'interdiction de l'administration des ß-agonistes, qui auraient été applicables dans l'ensemble de l'Union européenne, tandis que l'article 4 de la directive 96/22 prévoit simplement que les États membres peuvent autoriser, dans certaines circonstances, l'administration de ß-agonistes aux animaux dont la chair et les produits sont destinés à la consommation humaine. Il ne serait pas certain que les États membres mettront tous en oeuvre, et de la même manière, cette faculté de dérogation. De même, il n'existerait aucune certitude quant à l'homogénéité des mesures de transposition en ce qui concerne le système des sanctions (voir l'article 14, paragraphe 1, de la directive 96/22), alors que, dans la proposition soumise au Parlement, il était prévu que des modalités précises d'application du règlement proposé seraient adoptées au niveau communautaire.

129.
    Deuxièmement, les requérantes font valoir que la proposition de règlement initiale autorisait l'administration de ß-agonistes aux chevaux pour le traitement des troubles cardio-respiratoires, alors que, selon elles, la directive 96/22 entraîne, de facto, l'interdiction d'administrer des ß-agonistes dans ce cas.

Appréciation du Tribunal

130.
    Il convient de rappeler que la consultation régulière du Parlement dans les cas prévus par le traité constitue une formalité substantielle dont le non-respect entraîne la nullité de l'acte concerné. La participation effective du Parlement au processus législatif de la Communauté, selon les procédures prévues par le traité, représente, en effet, un élément essentiel de l'équilibre institutionnel voulu par letraité. Cette compétence constitue l'expression d'un principe démocratique fondamental, selon lequel les peuples participent à l'exercice du pouvoir par l'intermédiaire d'une assemblée représentative (voir, notamment, arrêts de la Cour du 10 juin 1997, Parlement/Conseil, C-392/95, Rec. p. I-3213, point 14, et du 11 novembre 1997, Eurotunnel e.a., C-408/95, Rec. p. I-6315, point 45).

131.
    Selon une jurisprudence constante, l'obligation de consulter le Parlement au cours de la procédure législative, dans les cas prévus par le traité, implique l'exigence d'une nouvelle consultation à chaque fois que le texte finalement adopté, considéré dans son ensemble, s'écarte dans sa substance même de celui sur lequel le Parlement a déjà été consulté, à l'exception des cas où les amendements correspondent, pour l'essentiel, au souhait exprimé par le Parlement lui-même (voir arrêts Parlement/Conseil, précité, point 15, et Eurotunnel e.a., précité, point 46).

132.
    En l'espèce, le Parlement a été consulté sur une proposition de règlement alors que le texte finalement adopté, sans nouvelle consultation, est une directive.

133.
    Toutefois, cette modification apportée à la forme de l'acte n'entraîne aucune altération de la substance même du texte sur lequel le Parlement a été consulté, au sens de la jurisprudence rappelée ci-dessus, et elle n'a d'ailleurs pas été mise en cause par le Parlement lui-même.

134.
    En effet, la proposition de règlement soumise pour avis au Parlement prévoyait le principe de l'interdiction de la mise sur le marché de ß-agonistes en vue de leur administration aux animaux de toute espèce, à l'exception des équidés et des animaux carnivores domestiques (article 2, paragraphe 2). En ce qui concerne, plus particulièrement, les animaux d'exploitation, à savoir les animaux, y compris les équidés, élevés dans une exploitation (article 1er), la proposition de règlement prévoyait notamment l'interdiction de leur administrer des ß-agonistes (article 3), sous réserve de la possibilité laissée aux États membres d'autoriser l'administration de telles substances aux équidés en vue du traitement des troubles cardio-respiratoires, par un vétérinaire ou sous sa responsabilité directe (article 4, point 3).

135.
    La directive 96/22 prévoit, quant à elle, le principe de l'interdiction de la mise sur le marché de substances ß-agonistes en vue de leur administration aux animaux dont la chair et les produits sont destinés à la consommation humaine à des fins autres que celles prévues à l'article 4, point 2 [article 2, sous b)]. Les animaux d'exploitation y sont définis comme dans la proposition de règlement (article 1er), et sont soumis aux mêmes interdictions d'administration des ß-agonistes (article 3). Par dérogation, les États membres peuvent autoriser l'administration, à des fins thérapeutiques, de ß-agonistes, par un vétérinaire ou sous sa responsabilité directe, d'une part, à des équidés, pour autant que ces produits soient utilisés conformément aux spécifications du fabricant, et, d'autre part, sous forme d'injection pour l'induction de la tocolyse chez les vaches parturientes (article 4, paragraphe 1, point 2). Le traitement thérapeutique est défini, dans le cas des équidés élevés à d'autres fins que la production de viande, comme l'administrationde substances ß-agonistes en vue du traitement des troubles respiratoires et de l'induction de la tocolyse [article 1er, paragraphe 2, sous b)]. Toutefois, le traitement thérapeutique reste interdit pour les chevaux de rente (article 4, paragraphe 2).

136.
    Il ressort ainsi de la comparaison des dispositions respectives de la proposition de règlement et de la directive 96/22 que la seule véritable différence réside dans la faculté laissée aux États membres, par la seconde, d'autoriser l'administration des ß-agonistes pour l'induction de la tocolyse chez les vaches parturientes. En revanche, aucune différence sensible n'apparaît pour ce qui concerne les équidés.

137.
    Or, l'inclusion, dans la directive, d'une dérogation visant l'induction de la tocolyse chez les vaches parturientes ne constitue pas une modification substantielle au sens de la jurisprudence précitée.

138.
    Par ailleurs, la proposition de règlement laissait elle aussi aux États membres la faculté de prévoir certaines exceptions ou dérogations à l'interdiction de principe (voir son article 4), de sorte que l'argument des requérantes fondé sur la différence entre un règlement et une directive est, en l'espèce, sans pertinence.

139.
    Il convient de relever encore que ni la proposition de règlement ni la directive 96/22 ne prévoient un régime uniforme de sanctions au niveau communautaire. Au demeurant, le Conseil observe à juste titre que l'harmonisation des sanctions en la matière est plus précisément réalisée par le règlement n° 894/96, du 29 avril 1996, précité.

140.
    Enfin, l'argument des requérantes selon lequel tous les chevaux seraient, de facto, visés par l'interdiction imposée par la directive 96/22 a déjà été déclaré inexact par le Tribunal (voir point 106 ci-dessus).

141.
    Il s'ensuit que le moyen tiré de la violation de l'article 43 du traité ne saurait être retenu.

142.
    Il résulte de l'ensemble des considérations qui précèdent que les quatre moyens invoqués par les requérantes aux fins d'établir l'illégalité de la directive 96/22 doivent être rejetés comme non fondés.

Sur la demande en annulation dans l'affaire T-125/96

143.
    Les quatre moyens invoqués par les requérantes à l'appui de leur demande en annulation de la directive 96/22 ayant été rejetés, cette demande doit, en tout état de cause, être déclarée non fondée, sans qu'il soit besoin de statuer sur l'exception d'irrecevabilité soulevée par le Conseil.

Sur la demande en indemnité dans l'affaire T-125/96

144.
    Les requérantes estiment que la responsabilité extracontractuelle de la Communauté est engagée du fait de l'adoption et de la mise en oeuvre des dispositions attaquées de la directive 96/22, et demandent la réparation du dommage qui en résulte pour elles.

145.
    Selon une jurisprudence constante, l'engagement de la responsabilité non contractuelle de la Communauté suppose la réunion d'un ensemble de conditions tenant à l'illégalité du comportement reproché aux institutions, à la réalité du dommage et à l'existence d'un lien de causalité entre le comportement allégué et le préjudice invoqué. En matière de responsabilité du fait d'actes de nature normative, le comportement reproché à la Communauté doit, de plus, constituer une violation d'une règle supérieure de droit protégeant les particuliers. Si l'institution a adopté l'acte dans l'exercice d'un large pouvoir d'appréciation, comme c'est le cas en matière de politique agricole commune, cette violation doit en outre être suffisamment caractérisée, c'est-à-dire revêtir un caractère manifeste et grave (voir, par exemple, arrêts du Tribunal Exporteurs in Levende Varkens e.a./Commission, précité, point 81, du 9 décembre 1997, Quiller et Heusmann/Conseil et Commission, T-195/94 et T-202/94, Rec. p. II-2247, points 48 et 49, et Pharos/Commission, précité, points 47 et 62).

146.
    En l'espèce, il a déjà été constaté, lors de l'examen des moyens avancés par les requérantes aux fins d'établir l'illégalité de la directive 96/22, que celle-ci ne viole aucune des règles de droit invoquées. La demande en indemnité étant fondée sur la prétendue violation de ces règles, elle doit, en tout état de cause, être rejetée comme non fondée, sans qu'il soit besoin de statuer sur l'exception d'irrecevabilité soulevée par le Conseil.

Sur la demande en annulation dans l'affaire T-152/96

Sur la recevabilité

Arguments des parties

147.
    A titre liminaire, la partie défenderesse s'interroge sur les raisons pour lesquelles Boehringer s'est jointe à sa filiale BI Vetmedica pour former le présent recours. En effet, il n'apparaîtrait pas de la description fournie par elle que Boehringer soit engagée directement dans la production et la commercialisation de médicaments vétérinaires contenant du clenbutérol.

148.
    La défenderesse soutient ensuite que le recours est irrecevable, les requérantes n'ayant, d'après elle, pas d'intérêt à l'action et n'étant ni individuellement ni directement concernées par le règlement n° 1312/96.

149.
    En premier lieu, la défenderesse fait valoir que le règlement n° 1312/96 ne porte atteinte à aucun droit juridiquement protégé des requérantes, ni à leurs marques déposées, ni à leurs brevets. En particulier, ce règlement n'entraînerait aucune déchéance des autorisations de fabriquer et de commercialiser le produit concerné, détenues par les requérantes, mais aurait au contraire pour effet de les maintenir en vigueur après le 1er janvier 1997, en faisant figurer le clenbutérol à l'annexe III au règlement n° 2377/90. La Commission soutient, par conséquent, que, après l'adoption du règlement n° 1312/96, les requérantes restent entièrement libres de poursuivre leurs activités de production et de commercialisation du clenbutérol.

150.
    La défenderesse soutient, par ailleurs, que les intérêts que les requérantes cherchent à protéger ne sont pas affectés par le règlement n° 1312/96 mais par la directive 96/22, qui limite l'emploi thérapeutique des ß-agonistes de la manière prévue à son article 4, paragraphe 2. D'après elle, les requérantes ne sauraient demander l'annulation d'un acte au titre de l'article 173 du traité CE (devenu, après modification, article 230 CE), en invoquant les prétendues répercussions d'un autre acte sur leur situation.

151.
    En deuxième lieu, la défenderesse fait valoir que les requérantes ne sont pas individuellement concernées par le règlement n° 1312/96, celui-ci étant, d'après elle, une mesure d'application générale qui concerne une situation évaluée de manière objective.

152.
    Le fait que les requérantes détiennent une grande part du marché des produits à base de clenbutérol ne permettrait pas, en soi, de les distinguer d'autres personnes également affectées par la mesure en cause, comme Agraria. En outre, le clenbutérol ne jouissant plus de la protection d'un brevet, d'autres entreprises pourraient légalement le fabriquer et obtenir des AMM, auquel cas le règlement n° 1312/96 leur serait applicable au même titre qu'aux requérantes. Ainsi, celles-ci ne se trouveraient pas, au regard du règlement attaqué, dans une situation qui les caractérise par rapport à tout autre opérateur économique (voir arrêt du Tribunal du 7 novembre 1996, Roquette Frères/Conseil, T-298/94, Rec. p. II-1531, point 42).

153.
    En troisième lieu, la défenderesse fait valoir que les requérantes ne sont pas directement concernées par le règlement n° 1312/96, faute d'un lien de causalité entre cette mesure et le préjudice prétendument porté à leurs droits. En effet, en fixant des LMR, ce règlement n'affecterait directement que les éleveurs et les vétérinaires. En revanche, il n'affecterait la position des requérantes sur le marché et la rentabilité de leurs produits que de manière indirecte et hypothétique.

154.
    Enfin, la défenderesse estime que les requérantes, qui cherchent en réalité à obtenir l'annulation du règlement n° 1312/96 au motif qu'il ne fixe pas de LMR pour le traitement des maladies respiratoires des bovins, auraient dû introduire un recours en carence au titre de l'article 175 du traité CE (devenu article 232 CE).

155.
    Le Conseil et la SKV soutiennent, en substance, les arguments développés par la Commission.

156.
    Pour ce qui est de la question de savoir si les requérantes sont individuellement concernées, la SKV fait plus particulièrement valoir que le fait qu'elles ont obtenu l'autorisation de mettre sur le marché certains médicaments vétérinaires contenant du clenbutérol n'est pas suffisant pour leur conférer certains droits spécifiques qui les caractériseraient par rapport à d'autres personnes pouvant elles aussi obtenir ces autorisations. En particulier, les requérantes ne se trouveraient pas dans la situation très exceptionnelle qui était celle de la requérante dans l'affaire ayant donné lieu à l'arrêt de la Cour du 18 mai 1994, Codorniu/Conseil (C-309/89, Rec. p. I-1853).

157.
    Les requérantes soutiennent que leur recours en annulation du règlement n° 1312/96 est recevable, dès lors qu'il vise à contester des mesures qui les affectent et les concernent directement et individuellement.

Appréciation du Tribunal

- Sur l'intérêt de BI Vetmedica à agir

158.
    Il résulte d'une jurisprudence constante que constituent des actes ou décisions susceptibles de faire l'objet d'un recours en annulation au sens de l'article 173 du traité les mesures produisant des effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts du requérant, en modifiant de façon caractérisée la situation juridique de celui-ci (voir, à titre d'exemple, ordonnance du Tribunal du 16 juillet 1998, Ca'Pasta/Commission, T-274/97, Rec. p. II-2927, point 24).

159.
    En l'espèce, les dispositions attaquées du règlement n° 1312/96 produisent de tels effets vis-à-vis de BI Vetmedica, dès lors que, eu égard à la réglementation en vigueur (voir l'article 14 du règlement n° 2377/90), la restriction de la validité des LMR pour le clenbutérol à certaines indications thérapeutiques précises équivaut à une interdiction de l'utilisation de ce produit pour toute autre indication thérapeutique, et donc à un retrait partiel des AMM dont cette requérante dispose dans un certain nombre d'États membres.

160.
    Il y a lieu de rejeter également l'argument de la Commission selon lequel les intérêts de BI Vetmedica sont affectés par la directive 96/22 plutôt que par le règlement n° 1312/96. En effet, selon la thèse de la Commission elle-même, le règlement n° 1312/96 produit des effets juridiques indépendants de ceux entraînés par la directive 96/22. Comme BI Vetmedica le relève à juste titre, les dispositions en cause dudit règlement, dans la mesure où elles restreignent la validité des LMR qu'elles établissent à certaines indications thérapeutiques spécifiques, continueraient d'ailleurs à affecter sa situation juridique même en cas d'annulation, de retrait ou de défaut de transposition de la directive 96/22. Il convient d'ajouter que le règlement n° 1312/96 est entré en vigueur le 60e jour suivant celui de sa publicationau Journal officiel des Communautés européennes, le 9 juillet 1996, alors que la date limite impartie aux États membres pour la transposition en droit interne de la directive 96/22 est le 1er juillet 1997. Il s'ensuit que BI Vetmedica a un intérêt distinct à obtenir l'annulation du règlement n° 1312/96.

- Sur la question de savoir si BI Vetmedica est individuellement concernée

161.
    Aux termes de l'article 173, quatrième alinéa, du traité, toute personne physique ou morale peut former un recours contre les décisions qui, bien que prises sous l'apparence d'un règlement, la concernent directement et individuellement. Selon une jurisprudence constante, le critère de distinction entre un règlement et une décision doit être recherché dans la portée générale ou non de l'acte en question. Un acte a une portée générale s'il s'applique à des situations déterminées objectivement et s'il comporte des effets juridiques à l'égard de catégories de personnes envisagées de manière générale et abstraite (ordonnance de la Cour du 24 avril 1996, CNPAAP/Conseil, C-87/95 P, Rec. p. I-2003, point 33; arrêts du Tribunal du 10 juillet 1996, Weber/Commission, T-482/93, Rec. p. II-609, point 55, et du 8 juillet 1999, Eridania e.a./Conseil, T-158/95, non encore publié au Recueil, point 54).

162.
    En l'espèce, le règlement n° 1312/96 fixe des LMR provisoires pour le clenbutérol, tout en restreignant la validité de ces LMR à certaines indications thérapeutiques spécifiques. De telles dispositions s'appliquent à des situations déterminées objectivement et comportent des effets juridiques à l'égard de catégories de personnes envisagées de manière générale et abstraite, à savoir les entreprises pharmaceutiques qui produisent du clenbutérol, ainsi que les prescripteurs et utilisateurs de cette substance. Dès lors, le règlement n° 1312/96 revêt, par sa nature et sa portée, un caractère normatif et ne constitue pas une décision au sens de l'article 189 du traité CE (devenu article 249 CE).

163.
    Toutefois, il n'est pas exclu qu'une disposition qui, par sa nature et sa portée, a un caractère général, puisse concerner individuellement une personne physique ou morale, lorsqu'elle atteint celle-ci en raison de certaines qualités qui lui sont particulières ou d'une situation de fait qui la caractérise par rapport à toute autre personne et, de ce fait, l'individualise d'une manière analogue à celle dont le destinataire d'une décision le serait (arrêt de la Cour du 15 février 1996, Buralux e.a./Conseil, C-209/94 P, Rec. p. I-615, point 25; arrêts du Tribunal du 17 juin 1998, UEAPME/Conseil, T-135/96, Rec. p. II-2335, point 69, et Eridania e.a./Conseil, précité, point 56).

164.
    Par conséquent, il y a lieu de vérifier si, en l'espèce, BI Vetmedica est atteinte par le règlement litigieux en raison de certaines qualités qui lui sont particulières ou s'il existe une situation de fait qui la caractérise, au regard de ce règlement, par rapport à toute autre personne.

165.
    A cet égard, il importe de relever que le règlement n° 1312/96 a été adopté à la suite d'une demande formelle de fixation de LMR pour le clenbutérol introduite par BI Vetmedica (voir point 36 ci-dessus), et sur la base de son dossier, conformément aux dispositions du règlement n° 2377/90. Ce dernier prévoit en outre expressément l'association de BI Vetmedica, en tant que responsable de la mise sur le marché des médicaments vétérinaires concernés, à la procédure d'établissement des LMR (voir, par analogie, arrêts du Tribunal du 27 avril 1995, CCE de la Société générale des grandes sources e.a./Commission, T-96/92, Rec. p. II-1213, points 30 et 31, et ordonnance du Tribunal du 18 février 1998, Comité d'entreprise de la Société française de production e.a./Commission, T-189/97, Rec. p. II-335, points 36 et 37). Ainsi, le projet des mesures à prendre lui a été communiqué et le CMV était en droit de lui demander des informations complémentaires (voir point 32 ci-dessus).

166.
    Il convient d'ajouter que, si l'inclusion d'une substance dans l'une des annexes du règlement n° 2377/90, à la demande de la personne responsable de sa mise sur le marché, prend la forme d'un règlement (voir l'article 8, paragraphe 3, dudit règlement), le rejet d'une telle demande revêt, quant à lui, celle d'une décision dans la pratique de la Commission [voir, par exemple, la décision C (96) 1374 final de la Commission, du 22 mai 1996, rejetant la demande de la société Lilly Industries Ltd visant à l'inclusion du somidobove, une somatotropine bovine de recombinaison (BST), dans l'annexe II au règlement n° 2377/90].

167.
    Or, dans son arrêt du 25 juin 1998, Lilly Industries/Commission (T-120/96, Rec. p. II-2571, ci-après «arrêt Lilly»), le Tribunal a jugé que la requérante avait qualité pour attaquer une telle décision, en dépit de la jurisprudence de la Cour selon laquelle, si un particulier demande à la Commission d'adopter un règlement et si la Commission refuse de le faire, la décision négative indiquant le refus doit être considérée, aux fins de l'annulation, comme un acte normatif de portée générale, même si le refus n'est adressé qu'à la personne concernée (arrêts de la Cour du 8 mars 1972, Nordgetreide/Commission, 42/71, Rec. p. 105, du 17 mai 1990, Sonito e.a./Commission, C-87/89, Rec. p. I-1981, et du 24 novembre 1992, Buckl e.a./Commission, C-15/91 et C-108/91, Rec. p. I-6061). Le Tribunal a en effet considéré (au point 59 de l'arrêt Lilly) que cette affaire différait de celles ayant donné lieu à cette jurisprudence en ce que la Commission ne disposait pas d'un pouvoir discrétionnaire pour décider si elle donnait suite ou non à la demande d'adoption d'un règlement mais se trouvait obligée de statuer sur la demande en vertu de l'article 6 du règlement n° 2377/90.

168.
    Il convient de reconnaître que la personne responsable de la mise sur le marché, qui a introduit une demande de fixation de LMR, est tout autant concernée par les dispositions d'un règlement assortissant la validité de ces LMR de certaines limites, comme c'est le cas en l'espèce, qu'elle le serait par un refus.

169.
    BI Vetmedica a ainsi établi l'existence d'un ensemble d'éléments constitutifs d'une situation particulière qui la caractérise, au regard de la mesure en cause, parrapport à tout autre opérateur économique, et peut dès lors être considérée comme individuellement concernée par cette mesure.

- Sur la question de savoir si BI Vetmedica est directement concernée

170.
    Il découle de la jurisprudence de la Cour que l'existence d'un lien direct requiert que la mesure communautaire incriminée produise directement des effets sur la situation juridique du particulier et qu'elle ne laisse aucun pouvoir d'appréciation aux destinataires chargés de sa mise en oeuvre, celle-ci ayant un caractère purement automatique et découlant de la seule réglementation communautaire sans application d'autres règles intermédiaires (voir, par exemple, arrêt de la Cour du 5 mai 1998, Glencore Grain/Commission, C-404/96 P, Rec. p. I-2435, point 41).

171.
    Ces conditions sont réunies en l'espèce, en ce que le règlement attaqué ne nécessite aucune mesure de transposition en droit national et s'impose directement à tous les opérateurs concernés.

172.
    Par ailleurs, il convient de rejeter l'argument de la Commission selon lequel les requérantes auraient dû engager un recours en carence plutôt qu'un recours en annulation. Il découle en effet de la jurisprudence de la Cour que l'article 175 du traité vise la carence par l'abstention de statuer ou de prendre position et non l'adoption d'un acte différent de ce que les intéressés auraient souhaité ou estimé nécessaire (arrêts de la Cour du 13 juillet 1971, Deutscher Komponistenverband/Commission, 8/71, Rec. p. 705, point 2, et Nordgetreide/Commission, précité; ordonnance de la Cour du 9 juillet 1991, Control Union/Commission, C-250/90, Rec. p. I-3585, point 16).

173.
    Il ressort de l'ensemble des considérations qui précèdent que le recours de BI Vetmedica est recevable.

- Sur la qualité pour agir de Boehringer

174.
    Il est vrai que Boehringer, qui s'est jointe «pour autant que de besoin» (voir la page 2 de la requête) au recours introduit par sa filiale BI Vetmedica, ne produit ni ne commercialise aucun des médicaments vétérinaires concernés par le règlement n° 1312/96.

175.
    Toutefois, s'agissant d'un seul et même recours, il n'y a pas lieu de vérifier si elle a qualité pour agir, dès lors que le recours introduit par BI Vetmedica est, en tout état de cause, recevable, ainsi qu'il ressort des considérations qui précèdent (voir arrêt de la Cour du 24 mars 1993, CIRFS e.a./Commission, C-313/90, Rec. p. I-1125, point 31; arrêts du Tribunal du 27 avril 1995, ASPEC e.a./Commission, T-435/93, Rec. p. II-1281, point 72, et du 15 septembre 1998, European Night Services e.a./Commission, T-374/94, T-375/94, T-384/94 et T-388/94, Rec. p. II-3141, point 61).

Sur le fond

Arguments des parties

176.
    Dans leur requête, les requérantes invoquent deux moyens à l'appui de leur recours en annulation du règlement n° 1312/96. Le premier est tiré d'une ingérence illégale dans l'exercice de leurs droits de propriété et de libre exercice d'une activité professionnelle ou commerciale, le second, d'une insuffisance de motivation. Ces deux moyens sont sous-tendus par une même exception tirée de l'illégalité de la directive 96/22, laquelle priverait de base et de motivation juridiques adéquates la restriction apportée par le règlement n° 1312/96 à la validité des LMR fixées pour le clenbutérol.

177.
    Dans son mémoire en intervention, la Fedesa fait valoir, en outre, que, en limitant la validité des LMR pour un médicament vétérinaire à certaines indications thérapeutiques spécifiques, la Commission a excédé le pouvoir qui lui est conféré au titre du règlement n° 2377/90, celui-ci ne prévoyant pas une telle possibilité.

178.
    En réponse à cet argument, la Commission soutient, dans son mémoire en défense, qu'elle devait tenir compte des interdictions de commercialisation et d'emploi ainsi que des dérogations figurant dans la directive 96/22.

179.
    Invitées par le Tribunal à se prononcer sur les conséquences qu'il convient éventuellement de tirer, dans la présente affaire, de l'arrêt Lilly, les requérantes ont fait valoir en substance, dans leur réponse du 28 avril 1999, un argument identique à celui soulevé par la Fedesa dans son mémoire en intervention. Quant à la Commission, elle a notamment soutenu, dans sa réponse du 28 avril 1999, d'une part, que l'arrêt Lilly n'était pas pertinent aux fins de la présente espèce, et, d'autre part, que, dans leur recours, les requérantes n'ont invoqué aucun moyen tiré d'une violation du règlement n° 2377/90.

Appréciation du Tribunal

180.
    Il a été jugé ci-dessus que les divers moyens invoqués par les requérantes aux fins d'établir l'illégalité de la directive 96/22 ne pouvaient être retenus. Il s'ensuit que l'exception d'illégalité soulevée par elles doit, en tout état de cause, être rejetée comme non fondée, sans qu'il soit besoin de statuer sur l'irrecevabilité de ladite exception, soulevée par la Commission et le Conseil.

181.
    Les deux moyens sur lesquels les requérantes fondent leur recours en annulation du règlement n° 1312/96 doivent, dès lors, être eux aussi rejetés comme non fondés, pour autant qu'ils s'appuient sur la prétendue illégalité de la directive 96/22.

182.
    Il reste néanmoins à examiner si la Commission a excédé le pouvoir qui lui est conféré au titre du règlement n° 2377/90 en limitant la validité des LMR pour un médicament vétérinaire à certaines indications thérapeutiques spécifiques, commele soutiennent la Fedesa dans son mémoire en intervention et les requérantes dans leurs réponses aux questions écrites du Tribunal.

183.
    Cette argumentation ne saurait être considérée comme irrecevable au motif qu'elle n'a pas été invoquée initialement par les requérantes. En effet, il découle de la jurisprudence de la Cour et du Tribunal que les articles 37, troisième alinéa, du statut (CE) de la Cour et 116, paragraphe 3, du règlement de procédure, ne s'opposent pas à ce que l'intervenant présente des arguments nouveaux ou différents de ceux de la partie qu'il soutient, dès lors que ces arguments ne modifient pas le cadre du litige et que l'intervention vise toujours au soutien des conclusions présentées par cette dernière (voir arrêts de la Cour du 23 février 1961, De Gezamenlijke Steenkolenmijnen in Limburg/Haute Autorité, 30/59, Rec. p. 1, 37, et du 8 juillet 1999, Chemie Linz/Commission, C-245/92 P, non encore publié au Recueil, point 32; arrêts du Tribunal du 8 juin 1995, Siemens/Commission, T-459/93, Rec. p. II-1675, point 21, et du 25 mars 1999, Forges de Clabecq/Commission, T-37/97, non encore publié au Recueil, point 92).

184.
    En l'espèce, l'argumentation développée par la Fedesa ne modifie pas le cadre du litige tel qu'il est défini par la requête. En effet, à supposer établi l'excès de pouvoir allégué dans le cadre de cette argumentation, il en résulterait nécessairement une ingérence illégale dans l'exercice des droits de propriété et de libre exercice d'une activité professionnelle ou commerciale des requérantes, ainsi que celles-ci le soutiennent dans le cadre de leur premier moyen d'annulation. Cette argumentation porte, dès lors, sur les moyens invoqués par ces dernières, de sorte qu'elle doit être examinée par le Tribunal.

185.
    Afin d'apprécier le bien-fondé de ladite argumentation, il convient de rappeler que l'administration de médicaments vétérinaires à des animaux producteurs d'aliments peut entraîner la présence de résidus de substances pharmacologiquement actives dans les denrées alimentaires obtenues à partir des animaux traités (voir le premier considérant du règlement n° 2377/90). La réglementation communautaire prévoit donc, pour protéger la santé publique, une procédure de fixation des LMR admissibles pour ces médicaments (voir le deuxième considérant du règlement n° 2377/90). Aux termes de l'article 1er, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 2377/90, cette LMR est définie comme:

«la teneur maximale en résidus, résultant de l'utilisation d'un médicament vétérinaire (exprimée en mg/kg ou en ìg/kg sur la base du poids frais), que la Communauté peut accepter comme légalement autorisée ou qui est reconnue comme acceptable dans ou sur des denrées alimentaires.

Cette limite se base sur le type et la quantité de résidus considérés comme ne présentant pas de risques d'ordre toxicologique pour la santé humaine, tels qu'exprimés par la dose journalière admissible (DJA), ou sur la base d'une DJA temporaire utilisant un facteur de sécurité additionnel. Elle tient compte égalementd'autres risques concernant la santé publique ainsi que des aspects de technologie alimentaire».

186.
    Il ressort des articles 2 à 7 du règlement n° 2377/90 que la procédure de fixation de LMR, éventuellement provisoires, pour une substance pharmacologiquement active, dépend uniquement de la question de savoir si les résidus de la substance en question, au niveau proposé, constituent un risque pour la santé du consommateur.

187.
    En revanche, l'article 6, paragraphe 1, du règlement n° 2377/90 ne subordonne pas l'inclusion d'une substance dans une des annexes I à III de ce règlement à la condition que le produit contenant cette substance puisse être directement utilisé et mis sur le marché.

188.
    A cet égard, le Tribunal a déjà jugé, dans l'arrêt Lilly, que la procédure de fixation d'une LMR au titre du règlement n° 2377/90 est autonome et distincte des procédures de délivrance des AMM prévues par la directive 81/851 et le règlement n° 2309/93 (voir point 88 de l'arrêt Lilly).

189.
    Le Tribunal a également relevé (au point 89 de l'arrêt Lilly) que ces deux dernières réglementations, régissant respectivement la délivrance des autorisations nationales et communautaires de mise sur le marché de médicaments vétérinaires, prévoient expressément le refus d'une AMM d'un produit, lorsque l'utilisation de celui-ci est interdite par d'autres dispositions du droit communautaire (voir articles 11, premier alinéa, point 3, de la directive 81/851, et 33, premier alinéa, point 3, du règlement n° 2309/93).

190.
    Au contraire, le règlement n° 2377/90 ne contient aucune disposition autorisant la Commission à tenir compte d'une interdiction de commercialisation pour refuser de fixer une LMR (point 90 de l'arrêt Lilly).

191.
    Le Tribunal a conclu (au point 92 de l'arrêt Lilly) que la Commission ne pouvait pas légalement fonder sa décision refusant la fixation d'une LMR pour le somidobove, une somatotropine bovine de recombinaison (BST), sur l'existence du moratoire sur la BST.

192.
    De même, en l'espèce, dans le cadre de la procédure de fixation d'une LMR pour le clenbutérol en application du règlement n° 2377/90, la Commission ne pouvait pas légalement fonder la limitation de la validité de cette LMR sur les dispositions de la directive 96/22.

193.
    Cette considération n'est pas affectée par la circonstance que, à l'instar du règlement n° 2377/90, la directive 96/22 a pour objectif la protection de la santé publique, alors que, dans l'affaire ayant donné lieu à l'arrêt Lilly, le moratoire sur la BST avait été instauré pour des motifs de nature socio-économique. En effet, en relevant incidemment cette circonstance, au point 91 de l'arrêt Lilly, le Tribunal n'apas entendu constater l'existence d'une dérogation implicite au principe énoncé au point 90 de l'arrêt.

194.
    A cet égard, il convient de souligner, encore une fois, que la procédure de fixation de LMR établie par le règlement n° 2377/90 est strictement limitée à la détermination du seuil en deçà duquel les résidus d'un produit donné, présents dans ou sur les denrées alimentaires, peuvent être considérés comme ne présentant aucun danger pour la santé humaine. Si les institutions estiment néanmoins avoir d'autres raisons d'interdire la mise sur le marché du produit en question, il leur incombe d'agir par la voie appropriée, telle que, en l'espèce, par l'adoption de la directive 96/22.

195.
    Au demeurant, l'article 15 du règlement n° 2377/90 dispose que celui-ci ne préjuge en aucune manière l'application de la réglementation communautaire interdisant l'utilisation dans les élevages de certaines substances à effet hormonal, et qu'aucune de ses dispositions ne préjuge les mesures prises par les États membres pour empêcher l'utilisation non autorisée de médicaments vétérinaires. Ainsi, la limitation introduite par le règlement n° 1312/96, en cause, n'était nullement nécessaire pour assurer ou préserver l'effet utile de la directive 96/22, puisque ce règlement ne pouvait en aucun cas préjuger les mesures prises par les États membres en vue de la mise en oeuvre de ladite directive.

196.
    Force est de constater, par ailleurs, qu'aucune disposition du règlement n° 2377/90 n'autorise la Commission à limiter à certaines indications thérapeutiques les LMR d'un médicament vétérinaire admissibles dans les aliments d'origine animale. Une telle limitation ne saurait davantage être justifiée par les exigences de sauvegarde de la santé publique qui sous-tendent le règlement n° 2377/90. Lesdites exigences se bornent à déterminer le seuil maximal admissible de concentration de résidus d'une substance dans les aliments destinés à la consommation humaine, quelle que soit l'indication thérapeutique en vue de laquelle ladite substance a été prescrite. Il va de soi, en effet, que les résidus d'une substance pharmacologiquement active présents dans les aliments d'origine animale ne sont pas plus ou moins dangereux pour la santé, à un certain niveau de concentration, selon que ladite substance a été administrée en vue de telle ou telle indication thérapeutique. Il s'ensuit que les LMR pour une substance pharmacologiquement active donnée ne sauraient être déterminées en fonction des propriétés ou indications thérapeutiques, le cas échéant multiples, de cette substance (voir, par analogie, arrêt de la Cour du 29 avril 1999, Standley e.a., C-293/97, p. I-2603, point 34).

197.
    Il convient d'ajouter que le règlement n° 1312/96 préjuge les mesures prises par les États membres pour empêcher l'utilisation non autorisée de médicaments vétérinaires, en violation de l'article 15, paragraphe 2, du règlement n° 2377/90, dès lors que les limites à la validité des LMR pour le clenbutérol qu'il impose subsisteraient même en cas d'annulation, de retrait ou de modification des dispositions pertinentes de la directive 96/22.

198.
    Il résulte de ce qui précède que, en limitant la validité des LMR fixées pour le clenbutérol à certaines indications thérapeutiques spécifiques pour les bovins et les équidés, dans le règlement n° 1312/96, la Commission a excédé les pouvoirs qu'elle exerce au titre du règlement n° 2377/90.

199.
    Il y a lieu, en conséquence, d'annuler le règlement n° 1312/96, conformément aux conclusions des requérantes, pour autant qu'il restreint la validité des LMR qu'il fixe pour le clenbutérol à certaines indications thérapeutiques spécifiques pour les bovins et les équidés.

Sur les dépens

200.
    Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. Aux termes de l'article 87, paragraphe 3, du règlement de procédure, le Tribunal peut répartir librement les dépens ou décider que chaque partie supportera ses propres dépens si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs. Le recours dans l'affaire T-125/96 ayant été rejeté, tout comme l'exception d'illégalité soulevée dans l'affaire T-152/96, le Tribunal fera une juste application de ces dispositions à l'égard des parties principales en décidant que les requérantes supporteront, dans l'affaire T-125/96, les dépens du Conseil ainsi que leurs propres dépens, et, dans l'affaire T-152/96, la moitié de leurs propres dépens. Dans cette dernière affaire, la Commission supportera, outre ses propres dépens, la moitié des dépens des requérantes.

201.
    Le Royaume-Uni, la Commission et le Conseil supporteront les dépens exposés par eux en tant que parties intervenantes, en application de l'article 87, paragraphe 4, premier alinéa, du règlement de procédure.

202.
    La partie intervenante Fedesa supportera les dépens afférents à son intervention dans l'affaire T-125/96, et la moitié des dépens exposés par elle dans l'affaire T-152/96, l'autre moitié étant à la charge de la Commission.

203.
    Quant à la partie intervenante SKV, le Tribunal estime qu'il sera fait une juste application de l'article 87, paragraphe 4, second alinéa, du règlement de procédure en laissant à sa charge ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête:

1)    Les affaires T-125/96 et T-152/96 sont jointes aux fins du présent arrêt.

2)    Le règlement (CE) n° 1312/96 de la Commission, du 8 juillet 1996, modifiant l'annexe III du règlement (CEE) n° 2377/90 du Conseil établissant une procédure communautaire pour la fixation des limites maximales de résidus de médicaments vétérinaires dans les aliments d'origine animale, est annulé, pour autant qu'il restreint la validité des LMR qu'il fixe pour le clenbutérol à certaines indications thérapeutiques spécifiques pour les bovins et les équidés.

3)    Les recours sont rejetés pour le surplus.

4)    Dans l'affaire T-125/96, les parties requérantes et la Fédération européenne de la santé animale (Fedesa), pour ce qui concerne son intervention, sont condamnées à supporter chacune ses propres dépens ainsi que les dépens du Conseil. Le Royaume-Uni, la Commission et la Stichting Kwaliteitsgarantie Vleeskalverensector (SKV) supporteront chacun ses propres dépens.

5)    Dans l'affaire T-152/96, la Commission supportera, outre ses propres dépens, la moitié des dépens des parties requérantes et de la Fédération européenne de la santé animale (Fedesa), l'autre moitié restant à leur charge. Le Conseil et la Stichting Kwaliteitsgarantie Vleeskalverensector (SKV) supporteront chacun ses propres dépens.

Potocki
Bellamy
Meij

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 1er décembre 1999.

Le greffier

Le président

H. Jung

A. Potocki


1: Langue de procédure: l'anglais.