Language of document : ECLI:EU:T:2016:544

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

27 septembre 2016 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne verbale luvo – Marque de l’Union européenne verbale antérieure luvo – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Similitude des produits et des services – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑449/15,

Satkirit Holdings Ltd, établie à Douglas (Île de Man), représentée par Me M. Vanhegan, barrister,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme E. Sliwinska et M. J. Crespo Carrillo, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO ayant été

Advanced Mailing Solutions Ltd, établie à East Kilbride, (Royaume‑Uni),

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l’EUIPO du 21 mai 2015 (affaire R 877/2014-2), relative à une procédure d’opposition entre Advanced Mailing Solutions et Satkirit Holdings,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé, lors des délibérations, de MM. S. Gervasoni (rapporteur), faisant fonction de président, L. Madise et Z. Csehi, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 30 juillet 2015,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 8 décembre 2015,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties principales dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 5 octobre 2012, la requérante, Satkirit Holdings Ltd, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1).

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal luvo.

3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 9 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Téléphones portables ; tablettes ; ordinateurs ; dispositifs de communication portables ».

4        La demande de marque de l’Union européenne a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 215/2012, du 12 novembre 2012.

5        Le 12 février 2013, Advanced Mailing Solutions Ltd a formé opposition au titre de l’article 41 du règlement n° 207/2009, à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était notamment fondée sur la demande de marque de l’Union européenne verbale antérieure luvo, enregistrée le 3 octobre 2013 sous le numéro 10587624 pour les services compris dans les classes 35 et 42 et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 35 : « Publicité ; gestion des affaires commerciales ; administration commerciale ; travaux de bureau ; enchères (vente aux -) ; traitement de l’information » ;

–        classe 42 : « Services scientifiques et technologiques ainsi que services de recherches et de conception y relatifs ; conception et développement d’ordinateurs et de logiciels ».

7        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition fondée sur la demande de marque de l’Union européenne antérieure était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

8        Le 28 janvier 2014, la division d’opposition a fait droit à l’opposition et rejeté la demande de marque pour tous les produits visés au point 3 ci-dessus.

9        Le 28 mars 2014, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’opposition, seulement en tant que celle-ci avait accueilli l’opposition pour les produits suivants relevant de la classe 9 : « téléphones portables ; tablettes ; dispositifs de communication portables », ladite décision n’étant pas contestée en ce qui concerne les « ordinateurs ».

10      Par décision du 21 mai 2015 (ci-après la « décision attaquée »), la deuxième chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours. Dans un souci d’économie de la procédure, elle a examiné l’opposition en tant que celle-ci était fondée sur la seule marque verbale de l’Union européenne antérieure luvo, en ce qui concerne les services de « conception et développement d’ordinateurs et de logiciels », relevant de la classe 42. En particulier, elle a estimé, s’agissant des produits visés par la marque demandée et des services de « conception et de développement de logiciels » visés par la marque antérieure, que le public pertinent était composé du grand public et des professionnels et, s’agissant des services de « conception et de développement d’ordinateurs » de la marque antérieure, que le public pertinent était le public professionnel (points 39 et 40 de la décision attaquée). En ce qui concerne le niveau d’attention du public pertinent, la chambre de recours a estimé nécessaire, en présence de consommateurs professionnels et du grand public, de prendre en considération le degré d’attention le moins élevé de ces deux groupes, à savoir un niveau d’attention variant entre un niveau normal et un niveau supérieur à la normale (points 42 et 44 de la décision attaquée) et, s’agissant des services principalement destinés aux professionnels, elle a estimé que ces derniers faisaient preuve d’un niveau d’attention élevé (point 43 de la décision attaquée).

11      La chambre de recours a ensuite constaté que les deux signes en conflit étaient identiques (point 45 de la décision attaquée). Puis, elle a estimé que, bien que les produits visés par la marque demandée et les services visés par la marque antérieure ne relèvent pas de la même classe, ceux-ci étaient similaires dès lors qu’il existait entre eux une complémentarité fonctionnelle, une identité du public pertinent et une identité des canaux de distribution (point 58 de la décision attaquée). La chambre de recours a, en outre, considéré que la marque antérieure avait un caractère distinctif normal pour les services en cause (point 59 de la décision attaquée). Compte tenu de l’identité des signes en cause et du fait qu’elle a considéré les produits et services en cause comme similaires, la chambre de recours a conclu qu’une part importante du public pertinent, faisant preuve d’un niveau d’attention élevé, pourra être amenée à croire que ces produits et services proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement et qu’il existait, par conséquent, un risque de confusion (points 61 et 62 de la décision attaquée).

 Conclusions des parties

12      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée et rejeter l’opposition ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens de la présente procédure et de la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO.

13      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

14      La requérante invoque plusieurs griefs qui peuvent être analysés comme venant au soutien d’un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. En premier lieu, elle reproche à la chambre de recours d’avoir défini le public pertinent de manière erronée. En deuxième lieu, elle fait grief à la chambre de recours d’avoir commis une erreur de droit sur la charge de la preuve de la similitude des produits et des services en cause. En troisième lieu, elle lui reproche de s’être méprise sur la portée du recours formé contre la décision de la division d’opposition, en ayant comparé les services couverts par la marque antérieure avec les ordinateurs. En quatrième lieu, la requérante estime que la chambre de recours a commis une erreur de droit en ne tenant pas compte des facteurs pertinents pour apprécier le caractère similaire des produits et des services en cause. En cinquième lieu, la chambre de recours aurait commis une erreur d’appréciation et aurait insuffisamment motivé la décision attaquée s’agissant du caractère complémentaire des produits et des services en cause. Enfin, en sixième lieu, la chambre de recours aurait commis une erreur d’appréciation et aurait insuffisamment motivé la décision attaquée s’agissant de l’analyse des canaux de distribution.

15      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

16      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

17      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

18      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14 , point 42 et jurisprudence citée].

19      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’apprécier si c’est à juste titre que la chambre de recours a estimé qu’il existait, en l’espèce, un risque de confusion entre les signes en conflit.

 Sur le public pertinent

20      Il ressort d’une jurisprudence constante que, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir arrêt du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, EU:T:2007:46, point 42 et jurisprudence citée].

21      En l’espèce, la chambre de recours a constaté à juste titre, au point 28 de la décision attaquée, et il n’est au demeurant pas contesté par la requérante, que, l’opposition étant fondée sur une marque antérieure de l’Union européenne, le territoire pertinent pour apprécier le risque de confusion était celui de l’ensemble de l’Union européenne.

22      La chambre de recours a par ailleurs estimé, s’agissant des services de « conception et de développement d’ordinateurs » visés par la marque antérieure, que le public pertinent était le public professionnel (point 39 de la décision attaquée), ce que la requérante ne conteste pas, à tout le moins pour une partie du public pertinent.

23      S’agissant des produits visés par la marque demandée relevant la classe 9 (téléphones portables ; tablettes ; dispositifs de communication portables), contrairement à ce que relève la requérante, la chambre de recours a considéré qu’ils étaient destinés à la fois au grand public et aux professionnels (point 40 de la décision attaquée), ce qu’il convient également de valider.

24      S’agissant des services de « conception et de développement de logiciels » de la marque antérieure, la requérante soutient que ceux-ci ne s’adresseraient qu’à des professionnels et que la chambre de recours a estimé, à tort, que le public pertinent était composé du grand public et des professionnels. Il convient de relever, à cet égard, ainsi que l’a indiqué à juste titre la chambre de recours au point 39 de la décision attaquée, que, si les services de conception et de développement de logiciels nécessitent une certaine expertise dans le domaine des technologies de l’information, ceux-ci regroupent cependant des services si larges qu’ils peuvent être destinés à la fois au public spécialisé ou professionnel, mais également au grand public [voir, en ce sens, arrêt du 27 mars 2014, Oracle America/OHMI – Aava Mobile (AAVA MOBILE), T‑554/12, non publié, EU:T:2014:158, points 25 et 27].

25      Enfin, il y a lieu de constater que la chambre de recours a estimé à juste titre, s’agissant des produits et des services destinés à des consommateurs professionnels et au grand public, qu’il convenait de prendre en considération un niveau d’attention variant entre un niveau normal et un niveau supérieur à la normale (points 42 et 44 de la décision attaquée) et, s’agissant des services principalement destinés aux professionnels, un niveau d’attention élevé (point 43 de la décision attaquée).

 Sur la comparaison des produits et des services

26      Aux points 46 à 58 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que, bien que les produits visés par la marque demandée et les services couverts par la marque antérieure ne relèvent pas de la même classe, ceux-ci étaient similaires, dès lors qu’il existait entre eux une complémentarité fonctionnelle, une identité du public pertinent et une identité des canaux de distribution.

27      La requérante conteste ces appréciations portées par la chambre de recours dans la décision attaquée, relatives à la comparaison entre, d’une part, les produits relevant de la classe 9 couverts par la marque demandée, à savoir les « téléphones portables ; tablettes ; dispositifs de communication portables » et, d’autre part, les services relevant de la classe 42 couverts par la marque antérieure, à savoir les services de « conception et développement d’ordinateurs et de logiciels ».

28      À titre liminaire, il convient d’examiner le grief de la requérante tiré d’une erreur de la chambre de recours sur la portée du recours formé contre la décision de la division d’opposition. Il y a lieu de relever que, au point 35 de la décision attaquée, la chambre de recours a mentionné les ordinateurs parmi les produits de la marque demandée relevant de la classe 9, alors que la requérante n’avait contesté la décision de la division d’opposition qu’en ce qu’elle concernait les « téléphones portables ; tablettes ; dispositifs de communication portables ».

29      Cependant, cette mention des ordinateurs est sans influence sur la légalité de la décision attaquée. En effet, ainsi que le soutient à bon droit l’EUIPO, il est notoire que les « téléphones portables, tablettes et dispositifs de communication portables » constituent des petits ordinateurs portables qui permettent notamment à leurs utilisateurs d’accéder à Internet, de stocker des informations et d’exécuter des programmes et des applications. Ils constituent, par conséquent, avec les ordinateurs, un groupe suffisamment homogène pour qu’ils puissent être comparés ensemble avec les services couverts par la marque antérieure.

30      À titre principal, la requérante fait valoir que les produits et services en cause n’étaient pas similaires.

31      En premier lieu, la requérante fait grief à la chambre de recours d’avoir commis une erreur de droit sur la charge de la preuve de la similitude des produits et des services en cause, qui appartiendrait, selon elle, à l’opposante.

32      Il résulte de la règle 15, paragraphe 2, sous c), du règlement (CE) n° 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d’application du règlement n° 40/94 (JO 1995, L 303, p. 1), que l’acte d’opposition doit comporter, notamment, les motifs sur lesquels l’opposition est fondée. La règle 15, paragraphe 3, sous b), dudit règlement énonce que l’acte d’opposition peut contenir une description précise des motifs sur lesquels l’opposition est fondée et les preuves à l’appui. La règle 19, paragraphe 1, dudit règlement précise que l’EUIPO donne à l’opposante l’opportunité de présenter les faits, les preuves et les observations à l’appui de son opposition ou de compléter les faits, les preuves et les observations d’ores et déjà présentés conformément à la règle 15, paragraphe 3, dans un délai fixé par lui et qui doit être de deux mois au moins à partir de la date d’ouverture présumée de la procédure d’opposition conformément à la règle 18, paragraphe 1.

33      Il résulte des dispositions précitées que, dans le cadre d’une procédure d’opposition, la partie opposante a la faculté, et non l’obligation, d’apporter des preuves à l’appui de l’opposition, notamment en ce qui concerne la similitude des produits et des services en cause [arrêt du 9 février 2011, Ineos Healthcare/OHMI – Teva Pharmaceutical Industries (ALPHAREN), T‑222/09, EU:T:2011:36, points 16 et 17].

34      Il convient également de préciser que, contrairement à ce que prétend, en substance, la requérante, la Cour, dans son arrêt du 29 septembre 1998, Canon (C‑39/97, EU:C:1998:442), ne s’est aucunement prononcée sur la question de la charge de la preuve qui incomberait à l’opposante dans le cadre d’une procédure d’opposition. Au point 22 de cet arrêt, la Cour a uniquement mis en exergue l’obligation d’établir, aux fins de l’application de l’article 4, paragraphe 1, sous b), de la première directive 89/104/CEE du Conseil, du 21 décembre 1988, rapprochant les législations des États membres sur les marques (JO 1989, L 40, p. 1), une similitude entre les produits et les services en cause, même dans l’hypothèse où il existerait une identité avec une marque dont le caractère distinctif serait particulièrement fort.

35      Au vu de tout ce qui précède, il n’existe donc pas d’obligation pour la partie opposante, dans le cadre d’une procédure d’opposition, d’apporter des preuves relatives à la similitude des produits et des services en cause (arrêt du 9 février 2011, ALPHAREN, T‑222/09, EU:T:2011:36, point 22).

36      En deuxième lieu, la requérante estime que la chambre de recours a commis une erreur de droit en ne tenant pas compte des facteurs pertinents pour apprécier le caractère similaire des produits et des services en cause.

37      La requérante considère ainsi que la chambre de recours aurait dû examiner la nature des produits et des services en cause, leur destination et leur utilisation, leur caractère concurrent et identifier leurs utilisateurs finals, ce qu’elle n’aurait pas fait dans la décision attaquée.

38      Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, pour apprécier la similitude entre les produits ou les services en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire (arrêt du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 23). Ainsi que le fait valoir à juste titre l’EUIPO et que l’a également relevé la chambre de recours au point 49 de la décision attaquée, la liste de ces facteurs n’est cependant pas exhaustive. En effet, d’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les canaux de distribution des produits et des services concernés [voir arrêt du 11 juillet 2007, El Corte Inglés/OHMI – Bolaños Sabri (PiraÑAM diseño original Juan Bolaños), T‑443/05, EU:T:2007:219, point 37 et jurisprudence citée]. En outre, la circonstance que les produits ou services concernés sont fréquemment vendus dans les mêmes points de vente spécialisés est de nature à faciliter la perception par le consommateur concerné des liens étroits existant entre eux et à renforcer l’impression que la responsabilité de leur fabrication incombe à la même entreprise (arrêt du 11 juillet 2007, PiraÑAM diseño original Juan Bolaños, T‑443/05, EU:T:2007:219, point 50).

39      Or, en l’espèce, il ressort des points 38 à 44 et 53 à 58 de la décision attaquée que la chambre de recours, après avoir identifié le public pertinent, a examiné la nature des produits et des services en cause, leurs canaux de distribution ainsi que leur caractère complémentaire. Le grief manque donc en fait.

40      En troisième lieu, la requérante fait valoir que la chambre de recours aurait commis une erreur d’appréciation et aurait insuffisamment motivé la décision attaquée s’agissant du caractère complémentaire des produits et des services en cause.

41      Il convient de rappeler que les produits ou les services complémentaires sont ceux entre lesquels existe un lien étroit, en ce sens que l’un est indispensable ou important pour l’usage de l’autre, de sorte que les consommateurs peuvent penser que la responsabilité de la fabrication de ces produits ou de la fourniture de ces services incombe à la même entreprise (voir arrêt du 22 janvier 2009, easyHotel, T‑316/07, EU:T:2009:14, points 57 et 58 et jurisprudence citée).

42      En l’espèce, il ressort du point 53 de la décision attaquée que la chambre de recours a estimé que les services de « conception et développement d’ordinateurs et de logiciels » visés par la marque antérieure présentaient un lien avec les produits couverts par la marque demandée, à savoir les « téléphones portables ; tablettes ; dispositifs de communication portables », en ce sens que les premiers étaient importants pour les seconds et inversement.

43      La chambre de recours a en outre précisé, au point 54 de la décision attaquée, que le caractère complémentaire des produits et des services n’était pas suffisant à lui seul pour conclure à la similitude desdits produits et services, dès lors que, ces produits et services se rapportant à tous les domaines de la vie et de l’activité commerciale, de nombreux services étaient utilisés en association avec les produits en cause et vice versa.

44      Il convient de relever, à l’instar de la chambre de recours, que les services de « conception et développement d’ordinateurs et de logiciels » de la marque antérieure sont importants pour l’usage des « téléphones portables ; tablettes ; dispositifs de communication portables » et réciproquement [voir, en ce sens, arrêt du 29 septembre 2011, Telefónica O2 Germany/OHMI – Loopia (LOOPIA), T‑150/10, non publié, EU:T:2011:552, points 35 et 36]. Il existe donc un lien étroit entre les produits et services en cause, qui, ainsi que l’a constaté à bon droit la chambre de recours au point 55 de la décision attaquée, relèvent tous du domaine des technologies de l’information, les uns étant importants pour l’utilisation des autres et réciproquement, et, par conséquent, on observe une relation de complémentarité entre ces derniers, de sorte que les consommateurs peuvent penser que la responsabilité de leur fabrication et fourniture incombent à la même entreprise. Néanmoins, compte tenu du fait que de nombreux services sont importants pour l’utilisation des produits en cause et réciproquement, c’est à bon droit que la chambre de recours a estimé, au point 54 de la décision attaquée, que le caractère complémentaire des produits et des services n’était pas suffisant, à lui seul, pour conclure à la similitude desdits produits et services.

45      En outre, s’agissant de la motivation de la décision attaquée sur ce point, il y a lieu de rappeler que, aux termes de l’article 75, première phrase, du règlement n° 207/2009, les décisions de l’EUIPO doivent être motivées. L’obligation de motivation ainsi consacrée a la même portée que celle découlant de l’article 296 TFUE. Il est de jurisprudence constante que la motivation exigée par l’article 296 TFUE doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’auteur de l’acte de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle [voir arrêt du 15 novembre 2011, Abbott Laboratories/OHMI (RESTORE), T‑363/10, non publié, EU:T:2011:662, point 73 et jurisprudence citée].

46      Contrairement à ce que soutient la requérante, en l’espèce, la chambre de recours a fait apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement qui l’a amenée à considérer, aux points 53 et 54 de la décision attaquée, que les produits et services en cause étaient complémentaires mais que cette circonstance n’était pas suffisante à elle seule pour conclure à la similitude desdits produits et services, ce qui a permis à la requérante de connaître les justifications de ladite conclusion et au Tribunal d’exercer son contrôle.

47      Enfin, en quatrième lieu, la requérante soutient que la chambre de recours aurait commis une erreur d’appréciation et aurait insuffisamment motivé la décision attaquée s’agissant de l’analyse des canaux de distribution.

48      La requérante fait ainsi valoir que les services couverts par la marque antérieure et les produits couverts par la marque demandée sont vendus dans des canaux de distribution différents, les produits relevant de la classe 9 étant généralement vendus dans des magasins, des grandes surfaces pour téléphones ou des sites Internet s’adressant au grand public, alors que les services de la classe 42 ne seraient généralement offerts que par des sociétés de services spécialisées, non présentes dans ces points de vente. Elle n’a cependant étayé cette allégation par aucun élément de preuve. Au demeurant, il importe de rappeler que les produits visés par la marque demandée ainsi que certains des services couverts par la marque antérieure sont utilisés à la fois par le grand public et des professionnels (voir points 22 à 25 ci-dessus) et que l’ensemble de ces produits et services relèvent du domaine des technologies de l’information (voir point 44 ci-dessus). Par conséquent, il y a lieu de considérer que la chambre de recours a relevé à bon droit au point 53 de la décision attaquée que les produits et services en cause étaient susceptibles d’avoir les mêmes canaux de distribution, dès lors qu’ils étaient fréquemment vendus dans les mêmes points de vente spécialisés, qu’il s’agisse d’endroits physiques ou de vente en ligne.

49      En outre, s’agissant de la motivation de la décision attaquée sur ce point, il importe de rappeler que, selon la jurisprudence, il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (arrêt du 21 octobre 2004, KWS Saat/OHMI, C‑447/02 P, EU:C:2004:649, point 65).

50      Or, en l’espèce, bien que la motivation de la décision attaquée relative à l’identité des canaux de distribution soit succincte, il ressort des autres points de la décision attaquée, relatifs notamment à la détermination du public pertinent (points 39 à 44 de la décision attaquée) et à l’appartenance des produits et des services en cause au domaine des technologies de l’information (point 55 de la décision attaquée), que la chambre de recours a fait apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement qui l’a amenée à considérer, au point 55 de la décision attaquée, que les canaux de distribution étaient identiques, ce qui a permis à la requérante de connaître les justifications de ladite conclusion et au Tribunal d’exercer son contrôle.

51      Il résulte de l’ensemble de ce qui précède qu’aucun élément ne permet de remettre en cause l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle les produits couverts par la marque demandée relevant de la classe 9 et les services couverts par la marque antérieure relevant de la classe 42 sont similaires.

  Sur la comparaison des signes

52      La chambre de recours a constaté à juste titre, au point 45 de la décision attaquée, et il n’est au demeurant pas contesté par la requérante que les deux signes en conflit étaient identiques.

  Sur le risque de confusion

53      L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 74].

54      En l’espèce, eu égard à la similitude des produits et des services en cause, à l’identité des signes en conflit et au regard du caractère distinctif normal de la marque antérieure, la chambre de recours a estimé à juste titre qu’il existait un risque de confusion entre les signes en conflit pour une part importante du public pertinent, faisant preuve d’un niveau d’attention élevé (point 61 de la décision attaquée).

55      Compte tenu de l’ensemble de ces éléments, la chambre de recours n’a pas méconnu l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 en considérant qu’il existait un risque de confusion entre les signes en conflit.

56      Pour l’ensemble de ces motifs, il y a lieu de rejeter le recours dans son intégralité, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de la demande de la requérante, énoncée dans le cadre de son premier chef de conclusions, visant à ce que le Tribunal rejette l’opposition [voir, en ce sens, arrêts du 22 mai 2008, NewSoft Technology/OHMI – Soft (Presto! Bizcard Reader), T‑205/06, non publié, EU:T:2008:163, point 70, et du 22 janvier 2009, easyHotel, T‑316/07, EU:T:2009:14, points 35 et 67].

 Sur les dépens

57      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Satkirit Holdings Ltd est condamnée aux dépens.

Gervasoni

Madise

Csehi

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 27 septembre 2016.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.