Language of document : ECLI:EU:T:2011:207

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

11 mai 2011 (*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire verbale FLACO – Marque nationale verbale antérieure FLACO – Motif relatif de refus – Identité des produits – Article 8, paragraphe 1, sous a) et b), du règlement (CE) n° 207/2009 – Requête de preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure introduite pour la première fois devant la chambre de recours – Article 42, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 207/2009 et règle 22 du règlement (CE) n° 2868/95 »

Dans l’affaire T‑74/10,

Flaco‑Geräte GmbH, établie à Gütersloh (Allemagne), représentée par MM. Wirtz, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. A. Folliard‑Monguiral, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI ayant été

Jesús Delgado Sánchez, demeurant à Socuellamos (Espagne),

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l’OHMI du 23 novembre 2009 (affaire R 86/2009‑2), relative à une procédure d’opposition entre M. Jesús Delgado Sánchez et Flaco‑Geräte GmbH,

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de M. O. Czúcz, président, Mme I. Labucka et M. D. Gratsias (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 16 février 2010,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 14 juin 2010,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et ayant dès lors décidé, sur rapport du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 5 novembre 2004, la requérante, Flaco‑Geräte GmbH, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal FLACO.

3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent, notamment, de la classe 7, au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, en particulier, à la description suivante : « Machines à traire et accessoires, équipements automatiques pour traire ; machines automatiques de lavage d’appareils pour traire ».

4        La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 36/2005, du 5 septembre 2005.

5        Le 2 décembre 2005, M. Jesús Delgado Sánchez (ci-après l’« opposant ») a formé opposition, au titre de l’article 42 du règlement n° 40/94 (devenu article 41 du règlement n° 207/2009), à l’enregistrement de la marque demandée, notamment pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée sur la marque espagnole verbale FLACO, enregistrée le 5 novembre 1993 sous le numéro 1691943 pour les produits relevant de la classe 7 au sens de l’arrangement de Nice et correspondant à la description suivante : « Machines agricoles pour le bétail ».

7        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous a) et b), du règlement n° 40/94 [devenu article 8, paragraphe 1, sous a) et b), du règlement n° 207/2009].

8        Le 17 novembre 2008, la division d’opposition a accueilli l’opposition en ce qui concerne la demande d’enregistrement de marque communautaire pour les produits visés au point 3 ci-dessus. Elle a considéré, à cet égard, que les marques en conflit étaient identiques et que les produits couverts par elles étaient identiques ou similaires, de sorte qu’il existerait un risque de confusion entre ces marques. La division d’opposition a rejeté l’opposition pour les autres produits visés par celle‑ci.

9        Le 13 janvier 2009, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 57 à 62 du règlement n° 40/94 (devenus articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009), contre la décision de la division d’opposition.

10      Le 9 mars 2009, la requérante a déposé un mémoire exposant les motifs de son recours, conformément à l’article 59, troisième phrase, du règlement n° 40/94 (devenu article 60, troisième phrase, du règlement no 207/2009). Ce mémoire, reçu par l’OHMI le lendemain, 10 mars 2009, contenait, notamment, une requête de preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure.

11      Par décision du 23 novembre 2009 (ci-après la « décision attaquée »), notifiée le 15 décembre 2009, la deuxième chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours et confirmé la décision de la division d’opposition.

12      En particulier, la chambre de recours a considéré, d’une part, qu’était irrecevable la requête de preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure, au motif qu’elle avait été présentée pour la première fois devant elle. Elle a estimé, d’autre part, que les signes en conflit étaient identiques et qu’ils couvraient des produits identiques ou fortement similaires.

13      S’agissant des produits litigieux, elle a considéré que la description en espagnol des produits couverts par la marque antérieure, « maquinaria agrícola ganadera », a été correctement traduite en anglais, par l’opposant, par les termes « agricultural cattle machinery » (machines agricoles pour le bétail), lesquels sont suffisamment larges pour couvrir les « machines à traire et accessoires, équipements automatiques pour traire ; machines automatiques de lavage d’appareils pour traire » visés par la demande d’enregistrement de marque.

14      Par ailleurs, selon la chambre de recours, à supposer même que les « machines automatiques de lavage d’appareils pour traire » ne soient pas incluses, contrairement aux « machines à traire », dans les « machines agricoles pour le bétail » visées par la marque antérieure, il est incontestable que lesdites machines automatiques et ces dernières sont néanmoins similaires, dans la mesure où les premières sont complémentaires des « machines à traire », s’adressent au même consommateur, suivent les mêmes filières commerciales et ont une origine et des points de vente identiques. La chambre de recours a ajouté que, en tout état de cause, l’identité des signes compenserait le faible degré de similitude entre les produits. Elle a conclu qu’un risque de confusion entre les marques en cause était inévitable dans l’esprit des consommateurs pertinents dans les milieux agricoles en Espagne.

 Conclusions des parties

15      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

16      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

17      À l’appui de son recours, la requérante invoque deux moyens tirés, premièrement, de la violation de l’article 42, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 207/2009 et, deuxièmement, de la violation de l’article 8, paragraphe 1, du même règlement.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 42, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 207/2009

18      La requérante expose que, devant la division d’opposition, elle n’a pas demandé à l’opposant d’apporter la preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure au motif qu’il existait, depuis 1996, un litige entre elle et l’opposant et qu’une procédure de règlement de ce litige était en cours. Cela aurait été uniquement après avoir réalisé que ladite procédure n’aboutirait pas que la requérante aurait décidé, devant la chambre de recours, d’introduire sa requête de preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure par l’opposant.

19      Conformément à l’article 42, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 207/2009, ce n’est que lorsque le demandeur en a fait la requête que le titulaire d’une marque antérieure qui a formé opposition est appelé à apporter la preuve que, au cours des cinq années qui précèdent la publication de la demande de marque communautaire, la marque antérieure a fait l’objet d’un usage sérieux sur le territoire où elle est protégée pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée et sur lesquels l’opposition est fondée, ou qu’il existe de justes motifs pour le non-usage.

20      Il résulte de l’article 132, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009, que la division d’opposition est compétente pour toute décision concernant l’opposition à une demande d’enregistrement d’une marque communautaire. Il s’ensuit qu’elle est également compétente pour statuer, en premier ressort, sur une requête de preuve de l’usage présentée conformément à l’article 42, paragraphes 2 ou 3, du règlement n° 207/2009.

21      Aux termes de la règle 22, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d’application du règlement n° 40/94 (JO L 303, p. 1), telle que modifiée, une telle requête n’est recevable que si elle est présentée pendant le délai précisé, conformément à la règle 20, paragraphe 2, du règlement n° 2868/95, par l’OHMI au demandeur de la marque, pour présenter ses observations sur les observations de l’opposant.

22      Sans qu’il soit nécessaire d’examiner, dans le cadre de la présente affaire, si, et sous quelles conditions, la division d’opposition peut tenir compte d’une requête de preuve de l’usage de la marque antérieure invoquée à l’appui d’une opposition, présentée devant elle après l’expiration du délai évoqué ci‑dessus, il ressort de la jurisprudence que, en tout cas, une telle requête ne peut être présentée pour la première fois devant la chambre de recours [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 22 mars 2007, Saint-Gobain Pam/OHMI – Propamsa (PAM PLUVIAL), T‑364/05, Rec. p. II‑757, point 41, et du 18 octobre 2007, AMS/OHMI – American Medical Systems (AMS Advanced Medical Services), T‑425/03, Rec. p. II‑4265, points 109 et 114].

23      En effet, selon cette jurisprudence, la requête de preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure ajoute à la procédure devant la division d’opposition la question spécifique et préalable de l’usage sérieux de la marque antérieure et, en ce sens, modifie le contenu de l’opposition. Or, il appartient à la division d’opposition de statuer, en premier ressort, sur l’opposition, telle que définie par les différents actes et demandes procéduraux des parties, y compris, le cas échéant, la requête de preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure. La chambre de recours est uniquement compétente pour statuer sur les recours formés à l’encontre des décisions des divisions d’opposition et non pour statuer elle‑même, en première instance, sur une nouvelle opposition. Admettre le contraire impliquerait l’examen, par la chambre de recours, d’une demande tout à fait spécifique, liée à des considérations juridiques et factuelles nouvelles et sortant du cadre de la procédure d’opposition, telle que soumise et traitée par la division d’opposition (voir, en ce sens, arrêts PAM PLUVIAL, point 22 supra, points 37 à 39, et AMS Advanced Medical Services, point 22 supra, points 111 à 113).

24      Dès lors qu’il est constant, en l’espèce, que la requête de preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure a été présentée pour la première fois par la requérante devant la chambre de recours, c’est donc à bon droit, comme le fait valoir l’OHMI, que la chambre de recours a conclu à l’irrecevabilité de ladite demande.

25      Les motifs invoqués par la requérante et tirés de l’existence d’une procédure de règlement de différend en cours sont à cet égard dénués de pertinence, ainsi que la chambre de recours l’a relevé à juste titre.

26      À supposer même que, par cette argumentation, la requérante entende faire valoir que, bien qu’ayant fait preuve de toute la vigilance nécessitée par les circonstances, elle n’a pas été en mesure d’observer le délai pour la présentation d’une requête de preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure devant la division d’opposition, il y a lieu de relever que, dans une telle hypothèse, la requérante devait présenter, devant la division d’opposition, une requête en restitutio in integrum, aux termes de l’article 81 du règlement n° 207/2009. En revanche, elle ne serait pas en droit de présenter sa requête de preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure pour la première fois devant la chambre de recours.

27      Le premier moyen doit donc être rejeté comme non fondé.

 Sur le second moyen, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009

28      La requérante soutient que les produits visés par la marque demandée et ceux couverts par la marque antérieure ne sont ni identiques ni similaires et qu’il ne peut pas y avoir de risque de confusion. Quand bien même les produits visés par les deux marques en conflit utiliseraient les mêmes canaux de distribution, ils ne seraient pas destinés au même public pertinent. Les premiers s’adresseraient aux producteurs de lait et les seconds aux éleveurs de bétail.

29      À cet égard, selon la requérante, la chambre de recours a traduit à tort les termes espagnols « maquinaria agrícola ganadera », qui désignent les produits couverts par la marque antérieure, par « machines pour le bétail en général » au lieu de « machines pour l’élevage de bétail ». Il ressortirait d’un extrait de la base de données terminologique interinstitutionnelle de l’Union européenne (IATE), produit par la requérante devant la chambre de recours, que les termes espagnols « zona ganadera » ou « region ganadera » peuvent être traduits par « zone d’élevage » et les termes « explotación ganadera » par « ferme d’élevage ». Par conséquent, les produits couverts par la marque antérieure seraient les seules « machines agricoles pour l’élevage de bétail ».

30      L’opposant se serait, d’ailleurs, référé aux produits couverts par la marque antérieure dans les mêmes termes, dans un mémoire complémentaire, du 2 décembre 2005, annexé à l’acte d’opposition.

31      La requérante ajoute que les « machines à traire et accessoires, équipements automatiques pour traire », visés par la demande d’enregistrement de marque, ne seraient pas identiques aux produits couverts par la marque antérieure, lesquels ne présenteraient pas non plus de similitude avec les « machines automatiques de lavage d’appareils pour traire » également visées par la demande d’enregistrement.

32      Selon la requérante, l’élevage de bétail impliquerait la production et la reproduction contrôlée du bétail et les machines pour l’élevage de bétail seraient conçues pour fournir une assistance dans ce domaine. L’activité d’élevage de bétail viserait également la transformation du bétail en denrées alimentaires ou en produits en cuir et impliquerait, donc, la production et la vente de cheptels. En revanche, une telle activité ne nécessiterait pas l’utilisation de machines à traire, lesquelles seraient utilisées pour la production du lait. Celle‑ci impliquerait l’utilisation de cheptels vivants pouvant être le produit de l’élevage de bétail, mais il serait peu probable que les gros producteurs laitiers, qui auraient besoin des produits visés par la marque demandée, seraient également des éleveurs de bétail, dans la mesure où la mise en place d’une infrastructure adéquate pour cette dernière activité imposerait un investissement supplémentaire considérable. Inversement, il serait, pour le même motif, peu probable que les éleveurs de bétail seraient intéressés par les produits utilisés pour la production du lait, tels que ceux couverts par la marque demandée.

33      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsqu’elle est identique à la marque antérieure et que les produits ou les services pour lesquels la marque a été demandée sont identiques à ceux pour lesquels la marque antérieure est protégée.

34      En outre, aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

35      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec. p. II‑2821, points 30 à 33, et la jurisprudence citée].

36      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du Tribunal du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, Rec. p. II‑43, point 42, et la jurisprudence citée].

37      En l’espèce, il n’est pas contesté que les signes en cause sont identiques, comme l’a constaté à juste titre la chambre de recours.

38      S’agissant de la comparaison des produits, il importe de rappeler que, selon une jurisprudence constante, pour apprécier la similitude entre les produits ou les services en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire. D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les canaux de distribution des produits concernés [voir arrêt du Tribunal du 11 juillet 2007, El Corte Inglés/OHMI – Bolaños Sabri (PiraÑAM diseño original Juan Bolaños), T‑443/05, Rec. p. II‑2579, point 37, et la jurisprudence citée].

39      Il ressort également de la jurisprudence que, lorsque les produits visés par la marque antérieure incluent les produits visés par la demande de marque, ces produits sont considérés comme identiques [voir arrêt du Tribunal du 24 novembre 2005, Sadas/OHMI – LTJ Diffusion (ARTHUR ET FELICIE), T‑346/04, Rec. p. II‑4891, point 34, et la jurisprudence citée].

40      Par ailleurs, les produits complémentaires sont ceux entre lesquels existe un lien étroit, en ce sens que l’un est indispensable ou important pour l’usage de l’autre, de sorte que les consommateurs peuvent penser que la responsabilité de la fabrication de ces produits incombe à la même entreprise. Par définition, des produits adressés à des publics différents ne peuvent pas présenter un caractère complémentaire (voir, en ce sens, arrêt easyHotel, point 36 supra, points 57 et 58, et la jurisprudence citée).

41      En l’espèce, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur, tout d’abord, en traduisant les termes espagnols désignant la marque antérieure, « maquinaria agrícola ganadera », par « machines agricoles pour le bétail » au lieu de « machines agricoles pour l’élevage de bétail », ensuite en considérant que ces termes ont une signification suffisamment large pour inclure les « machines à traire et accessoires, équipements automatiques pour traire ; machines automatiques de lavage d’appareils pour traire » visés par la marque demandée et enfin en estimant, dans l’hypothèse où les « machines automatiques de lavage d’appareils pour traire » ne seraient pas considérées comme incluses dans les produits couverts par la marque antérieure, que ces machines et ces dernières sont néanmoins similaires, dans la mesure où les premières sont complémentaires des « machines à traire », s’adressent au même consommateur, suivent les mêmes filières commerciales et ont une origine et des points de vente identiques.

42      À cet égard, en premier lieu, s’agissant de la prétendue erreur de traduction invoquée par la requérante, il importe de relever que pour justifier sa conclusion, figurant au point 21 de la décision attaquée, selon laquelle les termes espagnols « maquinaria agrícola ganadera » signifient « machines agricoles pour le bétail », la chambre de recours s’est fondée sur la définition de l’adjectif espagnol « ganadero(a) » donnée par le dictionnaire espagnol Vox Diccionario Avanzado de la Lengua Española. Selon ce dictionnaire, l’adjectif en question signifie « relativo al ganado » ce qui, d’après la chambre de recours (point 21 de la décision attaquée) se traduit par « relatif à des animaux domestiqués tels que bétail ». La requérante n’affirme pas que la chambre de recours a fait une lecture erronée de la définition donnée dans ce dictionnaire, pas plus qu’elle n’invoque un autre dictionnaire qui appuierait sa propre traduction de cet adjectif.

43      Cette considération de la chambre de recours n’est pas remise en cause par l’extrait de la base de données IATE, invoqué par la requérante. Celle-ci affirme dans sa requête qu’il ressortirait de cet extrait que le terme « ganadera » n’est pas employé « de manière restrictive comme adjectif correspondant à ‘bétail’, mais peut en outre être également utilisé, sur le plan conceptuel, pour désigner l’’élevage du bétail’ ». Il ressort ainsi de cette affirmation que l’adjectif espagnol en question peut aussi avoir une signification plus large que celle défendue par la requérante.

44      La lecture de l’extrait en question confirme cette dernière conclusion, dans la mesure où il en ressort, notamment, que les termes espagnols « explotación ganadera » peuvent être traduits en anglais par « cattle farm » (ferme pour le bétail), ce qui démontre que le terme espagnol « ganadera » ne fait pas exclusivement référence à l’élevage de bétail.

45      Les précédentes considérations ne sont pas non plus remises en question par le seul fait que l’opposant a, lui‑même, utilisé, dans un mémoire adressé à la division d’opposition et rédigé en anglais, les termes « cattle breeding agricultural machines » (machines agricoles pour l’élevage de bétail), pour se référer aux produits couverts par la marque antérieure. La chambre de recours était en droit de se fonder sur sa propre perception des produits couverts par les termes espagnols utilisés dans l’enregistrement de la marque antérieure et de choisir, ainsi, la traduction la plus appropriée de ces termes vers l’anglais, sans être aucunement liée par les termes utilisés par les parties elles‑mêmes.

46      C’est donc à juste titre que la chambre de recours a pu considérer que les produits couverts par la marque antérieure étaient les « machines agricoles pour le bétail ».

47      En second lieu, comme le soutient l’OHMI et ainsi que l’a relevé la chambre de recours au point 22 de la décision attaquée, l’intitulé « machines agricoles pour le bétail » est suffisamment large pour inclure les « machines à traire et accessoires, équipements automatiques pour traire ; machines automatiques de lavage d’appareils pour traire », visés par la demande de marque communautaire.

48      Les produits visés par la marque demandée sont ainsi inclus dans ceux couverts par la marque antérieure et c’est donc à bon droit que la chambre de recours a conclu à l’identité desdits produits et qu’elle a, par conséquent, décidé de confirmer la décision de la division d’opposition, qui avait fait droit à l’opposition et rejeté la demande d’enregistrement présentée par la requérante.

49      À cet égard, il convient de préciser que la référence par la chambre de recours, au point 23 de la décision attaquée, à l’existence d’un risque de confusion dans l’esprit du public pertinent était superflue. En effet, il ressort de l’économie de l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009, que les situations visées au même paragraphe, sous b), ne sauraient inclure l’hypothèse qui est déjà énoncée au même paragraphe, sous a). Partant, s’agissant des marques en conflit identiques, couvrant des produits identiques, la demande d’enregistrement devait être rejetée conformément à l’article 8, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009, sans qu’il soit nécessaire d’examiner l’existence d’un risque de confusion, au sens du même paragraphe, sous b).

50      L’examen de l’existence éventuelle d’un tel risque n’était nécessaire que s’agissant de l’hypothèse, envisagée à titre subsidiaire par la chambre de recours, où les produits visés par la marque demandée « machines automatiques de lavage d’appareils pour traire » ne seraient pas inclus dans les produits couverts par la marque antérieure.

51      En ce qui concerne, précisément, cette hypothèse, il importe de constater que la requérante ne conteste pas que les « machines automatiques de lavage d’appareils pour traire » sont complémentaires des « machines à traire » et s’adressent au même consommateur, à savoir les producteurs laitiers.

52      La requérante admet au demeurant (voir point 28 ci‑dessus) que les produits visés par la marque demandée, qu’il s’agisse des « machines à traire » ou des « machines automatiques de lavage d’appareils pour traire », et ceux couverts par la marque antérieure peuvent suivre les mêmes canaux de distribution. Or cette circonstance est de nature à faciliter la perception par le consommateur concerné des liens étroits existant entre lesdits produits et à renforcer l’impression que la responsabilité de leur fabrication incombe à la même entreprise (voir, en ce sens, arrêt PiraÑAM diseño original Juan Bolaños, point 38 supra, point 50).

53      Il en résulte que les consommateurs concernés peuvent percevoir l’existence d’un lien étroit entre les « machines automatiques de lavage d’appareils pour traire » et les « machines à traire », ainsi que les « machines agricoles pour le bétail », et qu’ils peuvent donc être amenés à penser que la responsabilité de leur fabrication incombe à la même entreprise.

54      En outre, si la requérante conteste que les produits couverts par la marque antérieure et ceux visés par la marque demandée puissent être destinés au même consommateur, les premiers étant, selon elle, utilisés par les éleveurs de bétail et les seconds par les producteurs de lait, il importe de relever qu’elle n’apporte aucun élément de nature à démontrer que des consommateurs dans les milieux agricoles pertinents en Espagne ne pourraient pas être intéressés par les deux catégories de produits. Elle se contente de soutenir, sans même étayer son argumentation, qu’il serait peu probable que de gros producteurs laitiers aient besoin des produits couverts par la marque antérieure ou, inversement, que les éleveurs de bétail importants aient besoin des produits couverts par la marque demandée, au prétendu motif que la mise en place d’une infrastructure adéquate pour exercer une activité additionnelle, respectivement, d’élevage de bétail ou de production laitière, imposerait un investissement supplémentaire considérable.

55      Un tel argument ne permet toutefois pas d’écarter les hypothèses dans lesquelles un producteur laitier qui a également une activité d’élevage de bétail ou inversement un éleveur dont le bétail ou une partie de celui-ci produit du lait pourraient être intéressés à la fois par les produits visés par la marque demandée et ceux visés par la marque antérieure.

56      Par ailleurs, il convient de rappeler, en ce qui concerne le risque de confusion, qu’un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêt de la Cour du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, Rec. p. I‑5507, point 17, et arrêt du Tribunal du 14 décembre 2006, Mast‑Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, Rec. p. II‑5409, point 74].

57      En l’espèce, c’est donc à bon droit que la chambre de recours a conclu, s’agissant de l’hypothèse subsidiaire évoquée au point 50 ci‑dessus, à l’existence d’un risque de confusion, dès lors que l’identité des marques en cause compensera en tout état de cause le degré prétendument faible de similitude entre les produits.

58      Il ressort de l’ensemble des considérations qui précèdent que le second moyen n’est pas fondé et doit être rejeté, de même que le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

59      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Flaco-Geräte GmbH est condamnée aux dépens.

Czúcz

Labucka

Gratsias

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 11 mai 2011.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.