Language of document : ECLI:EU:T:2022:600

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

5 octobre 2022 (*)

« Fonction publique – Personnel de la BEI – Évaluation de la performance – Promotion – Recours administratif – Procédure spéciale applicable aux décisions d’évaluation – Règle de concordance entre le recours administratif et la requête subséquente – Intensité du contrôle – Obligation de motivation – Droit d’être entendu – Erreur manifeste d’appréciation – Responsabilité »

Dans l’affaire T‑311/21,

SV, représenté par Me L. Levi, avocate,

partie requérante,

contre

Banque européenne d’investissement (BEI), représentée par Mmes K. Carr et G. Faedo, en qualité d’agents, assistées de Me B. Wägenbaur, avocat,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

composé, lors des délibérations, de MM. S. Gervasoni (rapporteur), président, L. Madise et J. Martín y Pérez de Nanclares, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la phase écrite de la procédure,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 270 TFUE et sur l’article 50 bis du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, le requérant, SV, demande, d’une part, l’annulation de son document de performance 2019 ainsi que des décisions subséquentes adoptées dans le cadre de la procédure spéciale de recours administratif applicable aux décisions d’évaluation de la Banque européenne d’investissement (BEI) et, d’autre part, la réparation des préjudices qu’il aurait subis de ce fait.

I.      Antécédents du litige

2        Le requérant est entré au service de la BEI en [confidentiel] (1), sur la base d’un contrat à durée indéterminée, en tant que personnel de conception de fonction F. En 2019, il occupait le poste de juriste de fonction E dans la division [confidentiel] du département [confidentiel] » de la direction générale (DG) des affaires juridiques.

3        En 2017, à l’issue de l’exercice d’évaluation annuelle, le profil de performance du requérant a été qualifié de « performant ». Le requérant a obtenu la note de mérite B+, qui correspond à une très bonne performance, a progressé d’un échelon et a bénéficié d’une prime individuelle.

4        En 2018, le profil de performance du requérant a été qualifié de « surperformant ». Le requérant a obtenu la note de mérite A, qui correspond à une performance exceptionnelle, a progressé de deux échelons et a bénéficié d’une prime individuelle.

5        Dans le document de performance 2019, la réalisation de chaque objectif et la démonstration de chaque compétence du requérant ont été considérées conformes aux attentes, à l’exception de la compétence « Aptitude au changement », pour laquelle la note « Supérieure aux attentes » lui a été attribuée. Globalement, la performance du requérant a été considérée, en ce qui concerne les objectifs, d’une part, et les compétences, d’autre part, conforme aux attentes. Le profil de performance du requérant a été qualifié de « performant ».

6        Dans ses commentaires du 15 janvier 2020 sur le document de performance 2019, le supérieur hiérarchique du requérant, chef de division, a indiqué qu’il s’était entretenu avec celui-ci le 10 janvier 2020. Il a exposé que le requérant avait pris en charge un plus petit nombre de nouvelles transactions pour se concentrer sur ses tâches transversales et a apporté des précisions sur lesdites tâches. Il a indiqué, s’agissant des transactions, de quelle manière le requérant avait fourni une contribution précieuse et joué un rôle déterminant dans la transaction [confidentiel]. Il a indiqué : « Nous avons discuté de la collaboration et avons remarqué les efforts [du requérant] pour améliorer la collaboration, efforts qui [portent] leurs fruits […] » (ci-après le « commentaire sur la collaboration »).

7        En ce qui concerne l’année 2019, le requérant a obtenu la note de mérite B, c’est-à-dire « correspond à toutes les attentes ». Il n’a pas eu de progression d’échelon et n’a pas bénéficié d’une prime individuelle.

8        Le 18 mai 2020, le requérant a adressé à la directrice générale des affaires juridiques une demande de recours « Membre du personnel – DG » en ce qui concerne le résultat de l’évaluation de sa performance, dans le cadre de la procédure spéciale applicable aux décisions d’évaluation prévue par les dispositions d’exécution du 26 mars 2020 relatives au recours administratif (ci-après les « dispositions d’exécution »). Il a estimé que, pour l’année 2019, sa note de mérite, l’absence de prime individuelle et le commentaire sur la collaboration ne reflétaient pas sa performance. Il a fait valoir qu’il avait excédé ses objectifs du point de vue quantitatif en atteignant neuf objectifs et en réalisant des tâches supplémentaires non prévues par ses objectifs. Il a estimé qu’il avait excédé ses objectifs du point de vue qualitatif en accomplissant continuellement ses missions à un niveau supérieur à celui de juriste de fonction E, en particulier dans le cadre de la transaction [confidentiel]. Il a indiqué que le commentaire sur la collaboration était trompeur, étant donné qu’il impliquait qu’un besoin d’améliorer ladite collaboration persistait. Il a demandé à ladite directrice générale de modifier le commentaire sur la collaboration dans le sens suivant : « nous avons discuté de la promotion [du requérant] au niveau D, qui peut être attendue au plus tard lors du cycle de performance 2020 ». Il a également demandé à cette directrice générale de lui attribuer la note « Supérieure aux attentes » en ce qui concerne la plupart des objectifs et toutes les compétences, à savoir la note de mérite A, cinq échelons supplémentaires et, dans le cas où une prime individuelle ne pourrait lui être accordée pour des raisons procédurales ou budgétaires, que soit considérée sa promotion à une fonction plus élevée.

9        Le 26 juin 2020, la directrice générale des affaires juridiques a informé le requérant que, après s’être entretenue avec lui le 27 mai, puis le 25 juin 2020, et avoir consulté le chef de division et la directrice du département [confidentiel], elle avait décidé de confirmer le rapport d’évaluation 2019 et de ne pas modifier les récompenses liées à cette évaluation (ci-après la « décision de la directrice générale des affaires juridiques »). Elle a expliqué que, en dépit de la bonne performance du requérant en 2019, il n’y avait pas suffisamment d’éléments pour conclure qu’une erreur majeure d’appréciation avait été commise en lui attribuant la note de mérite B. Elle a estimé que, compte tenu de l’évaluation relative de sa performance, la hiérarchie du requérant n’avait pas considéré que ce dernier avait eu une année 2019 exceptionnelle, beaucoup de juristes de la DG des affaires juridiques ayant montré une performance très forte. Elle a estimé que le nombre d’objectifs du requérant, en lui-même, n’était pas un indicateur de « surperformance », que, même s’il avait atteint ses objectifs, la progression avait été plus lente qu’attendu en ce qui concerne deux objectifs importants et que sa charge de travail avait dû être réduite dans d’autres domaines pour lui permettre d’atteindre ces objectifs. Elle a estimé que si le travail du requérant sur la transaction [confidentiel], qui était particulièrement difficile, avait été très apprécié, il n’était pas inhabituel pour des collègues de son niveau d’ancienneté de travailler sur des transactions complexes. Elle a estimé que l’évaluation des compétences du requérant reflétait l’appréciation de son responsable, selon laquelle d’autres collègues de son groupe de pairs avaient fait preuve d’un plus grand engagement et d’une plus grande disposition à accepter une charge de travail supplémentaire, et que, à cet égard, le requérant n’avait pas eu une performance supérieure à celle de ses collègues. Elle a estimé qu’il n’y avait pas lieu de modifier le commentaire sur la collaboration.

10      Le 25 août 2020, le requérant a introduit un recours administratif contre le document de performance 2019, sur le fondement de l’article 41 du règlement du personnel applicable aux agents déjà en service au 30 juin 2013 (ci-après le « règlement du personnel I ») et du point 4.3 des dispositions d’exécution. Il a indiqué qu’il ne prétendait pas avoir eu une année exceptionnelle, mais qu’il avait eu une performance supérieure à la moyenne et aurait mérité à tout le moins la note de mérite B+. Il a demandé, outre l’annulation de la décision de la directrice générale des affaires juridiques, l’annulation du commentaire sur la collaboration ou son remplacement par les termes « [e]n reconnaissance positive du travail chargé [du requérant] dans le domaine de la collaboration, je note les efforts fructueux que [celui-ci] a faits dans ce domaine », le remplacement de sa note de mérite B par, à tout le moins, la note de mérite B+ et un réexamen indépendant du résultat de l’évaluation de sa performance, incluant une appréciation du respect des exigences d’évaluation objective et transparente prévue par les lignes directrices de la procédure d’évaluation de la performance du personnel pour 2019, mises à jour en dernier lieu en décembre 2019 (ci-après les « lignes directrices ») et une appréciation des raisons objectives de la décision de ne pas le promouvoir à la fonction D, en particulier dans une perspective « à travail égal, salaire égal ».

11      Le 22 février 2021, la directrice générale du personnel a rejeté le recours administratif du requérant comme non fondé (ci-après la « décision de la directrice générale du personnel »).

II.    Conclusions des parties

12      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler le document de performance 2019 ;

–        annuler la décision de la directrice générale des affaires juridiques ainsi que la décision de la directrice générale du personnel ;

–        condamner la BEI à la réparation de son préjudice matériel ainsi que de son préjudice moral estimé ex æquo et bono à 5 000 euros ;

–        condamner la BEI aux dépens.

13      La BEI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner le requérant aux dépens.

III. En droit

A.      Sur les conclusions en annulation

1.      Sur l’objet des conclusions en annulation

14      Selon la jurisprudence, des conclusions en annulation formellement dirigées contre la décision de rejet d’un recours administratif au sens de l’article 41 du règlement du personnel I ont pour effet de saisir le Tribunal de l’acte contre lequel ce recours administratif a été présenté lorsqu’elles sont, en tant que telles, dépourvues de contenu autonome (voir, en ce sens et par analogie, arrêts du 17 janvier 1989, Vainker/Parlement, 293/87, EU:C:1989:8, point 8, et du 6 avril 2006, Camós Grau/Commission, T‑309/03, EU:T:2006:110, point 43).

15      En l’espèce, les conclusions tendant à l’annulation de la décision de la directrice générale des affaires juridiques et celles tendant à l’annulation de la décision de la directrice générale du personnel, adoptées dans le cadre de la procédure spéciale de recours administratif applicable aux décisions d’évaluation, telle que prévue par le point 4 des dispositions d’exécution, ont un contenu autonome et ne se confondent pas avec le document de performance 2019 pour deux raisons.

16      En premier lieu, tant la décision de la directrice générale des affaires juridiques que la décision de la directrice générale du personnel, même si elles confirment le document de performance 2019, ont un objet plus large que ce document.

17      En effet, dans sa décision, la directrice générale des affaires juridiques a rejeté la demande de recours « Membre du personnel – DG », par laquelle le requérant lui demandait non seulement de modifier le document de performance 2019, mais également, premièrement, de lui attribuer la note de mérite A, laquelle ne figure pas dans le document de performance 2019, deuxièmement, de lui octroyer cinq échelons supplémentaires et, troisièmement, dans le cas où une prime individuelle ne pourrait lui être accordée pour des raisons procédurales ou budgétaires, que soit considérée sa promotion à une fonction plus élevée.

18      De même, dans sa décision, la directrice générale du personnel a rejeté le recours administratif, par lequel le requérant sollicitait non seulement l’annulation de la décision de la directrice générale des affaires juridiques en tant, en substance, qu’elle confirmait le document de performance 2019, mais également, en premier lieu, le remplacement de sa note de mérite par, à tout le moins, la note de mérite B+ et, en second lieu, le réexamen indépendant du résultat de l’évaluation de sa performance, incluant une appréciation des raisons objectives de ne pas le promouvoir à la fonction D.

19      En second lieu, le premier moyen du recours, relatif à l’intensité du contrôle exercé par l’autorité compétente dans le cadre du recours « Membre du personnel – DG », d’une part, et du recours administratif, d’autre part, tend à contester de manière spécifique la légalité de la décision de la directrice générale des affaires juridiques et celle de la directrice générale du personnel.

20      Dans l’hypothèse où le Tribunal accueillerait le premier moyen du recours, il pourrait être conduit, le cas échéant, à annuler la décision de la directrice générale des affaires juridiques ou celle de la directrice générale du personnel et à prononcer un non-lieu à statuer en ce qui concerne les conclusions à fin d’annulation du document de performance 2019 (voir, en ce sens et par analogie, ordonnance du 21 septembre 2015, De Nicola/BEI, T‑848/14 P, EU:T:2015:719, point 40).

21      Par suite, les conclusions en annulation doivent être regardées comme dirigées contre les trois décisions expressément mentionnées par le requérant dans la requête et dans la réplique (ci-après les « décisions attaquées »), étant précisé que, dans le cadre de l’examen de la légalité du document de performance 2019, il est nécessaire de prendre en considération la motivation de la décision de la directrice générale des affaires juridiques et celle de la décision de la directrice générale du personnel, ces motivations étant censées coïncider avec celle du document de performance 2019 en ce qui concerne le contenu de ce document, qu’elles confirment (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 30 avril 2019, Wattiau/Parlement, T‑737/17, EU:T:2019:273, point 43 et jurisprudence citée).

2.      Sur la recevabilité des conclusions à fin d’annulation de la décision de la directrice générale des affaires juridiques 

22      La BEI émet des doutes quant à la recevabilité du recours en tant qu’il est dirigé contre la décision de la directrice générale des affaires juridiques. Elle estime qu’un acte qui revêt un caractère purement confirmatif par rapport à un acte antérieur devenu définitif ne peut faire l’objet d’un recours en annulation au titre de l’article 263 TFUE. En tout état de cause, ladite décision ne serait pas une décision autonome ou distincte du document de performance 2019 et, par suite, ne pourrait pas être contestée de manière isolée.

23      Le requérant conteste cette argumentation.

24      Selon une jurisprudence constante, un acte qui ne contient aucun élément nouveau par rapport à un acte antérieur constitue un acte purement confirmatif de celui-ci et ne saurait de ce fait avoir pour effet d’ouvrir, en faveur du destinataire de l’acte antérieur, un nouveau délai de recours (arrêt du 10 décembre 1980, Grasselli/Commission, 23/80, EU:C:1980:284, point 18, voir également, en ce sens, arrêt du 18 octobre 2007, Commission/Parlement et Conseil, C‑299/05, EU:C:2007:608, points 28 et 29).

25      Un recours contre une décision confirmative est irrecevable seulement si la décision confirmée est devenue définitive à l’égard de l’intéressé, faute d’avoir fait l’objet d’un recours contentieux introduit dans les délais requis. Dans le cas contraire, la personne intéressée est en droit d’attaquer soit la décision confirmée, soit la décision confirmative, soit l’une et l’autre de ces décisions (voir, en ce sens, arrêts du 18 décembre 2007, Weißenfels/Parlement, C‑135/06 P, EU:C:2007:812, point 54 ; du 31 mai 2017, DEI/Commission, C‑228/16 P, EU:C:2017:409, point 35, et du 10 mars 2021, AM/BEI, T‑134/19, EU:T:2021:119, point 28).

26      Il ressort de la jurisprudence rappelée aux points 24 et 25 ci-dessus que le caractère purement confirmatif ou non d’un acte se rattache à la question du délai de recours contentieux.

27      Or, en l’espèce, la BEI n’établit ni même n’allègue que le document de performance 2019, lequel a été confirmé par la décision de la directrice générale des affaires juridiques, est devenu définitif à l’égard du requérant, faute d’avoir fait l’objet d’un recours introduit dans les délais requis.

28      En ce qui concerne l’argument subsidiaire de la BEI selon lequel la décision de la directrice générale des affaires juridiques ne peut pas être contestée de manière isolée, étant donné qu’il ne s’agit pas d’une décision autonome ou distincte du document de performance 2019, il convient de constater que, pour les motifs indiqués au point 25 ci-dessus, cet argument ne peut pas remettre en cause la recevabilité des conclusions tendant à l’annulation de la décision de la directrice générale des affaires juridiques.

29      Il convient de préciser au surplus que la jurisprudence rappelée au point 14 ci-dessus ne fait pas obstacle à ce que la partie requérante conteste de manière spécifique, comme en l’espèce, la régularité de la procédure dans le cadre de la demande de recours « Membre du personnel – DG » (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 19 juin 2015, Z/Cour de justice, T‑88/13 P, EU:T:2015:393, point 144).

30      En cas d’annulation de la décision de rejet de la demande de recours « Membre du personnel – DG » par le Tribunal, il appartient à la BEI de réexaminer le résultat de l’évaluation de la performance dans le cadre de ce recours en veillant à la régularité de la procédure précontentieuse (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 16 mai 2017, CW/Parlement, T‑742/16 RENV, non publié, EU:T:2017:338, point 60).

31      Par conséquent, les conclusions à fin d’annulation de la décision de la directrice générale des affaires juridiques sont recevables.

3.      Sur les moyens du recours

a)      Sur le premier moyen, tiré de ce que le document de performance 2019 n’a pas été soumis à un contrôle entier dans le cadre de la demande de recours « Membre du personnel – DG » et du recours administratif

32      Le requérant soutient que, en vertu des dispositions d’exécution, le directeur général concerné et le directeur général du personnel disposent d’un pouvoir de contrôle entier de l’évaluation de la performance. Ce pouvoir serait confirmé par le fait que ces autorités ont la possibilité de modifier le résultat de cette évaluation, en vertu des paragraphes 18 et 33 à 35 de ces dispositions d’exécution. S’agissant du recours administratif, selon le paragraphe 11 des dispositions d’exécution, le directeur général du personnel procéderait à un contrôle entier de l’acte contesté.

33      Le requérant fait valoir que ni la directrice générale des affaires juridiques ni la directrice générale du personnel n’ont procédé à un contrôle entier de l’évaluation de sa performance. Il ajoute qu’il ne peut être exclu qu’un contrôle entier aurait mené à un résultat différent.

34      Le requérant fait valoir que, dans le cadre de la demande de recours « Membre du personnel – DG », la directrice générale des affaires juridiques a explicitement indiqué que son contrôle était limité à celui de l’erreur manifeste d’appréciation. Selon lui, les termes de la décision de ladite directrice générale montreraient que cette dernière s’est bornée en général à se référer à l’évaluation de son supérieur hiérarchique et à vérifier si cette évaluation était plausible. Il estime que cette directrice générale n’a pas comparé sa performance avec celle de ses collègues et n’a pas pris en compte les commentaires qu’il a présentés à l’appui de sa demande de recours. 

35      De la même façon, le requérant estime que, dans le cadre du recours administratif, la directrice générale du personnel s’est généralement référée à l’appréciation de son supérieur hiérarchique ou de la directrice générale des affaires juridiques et n’a pas réapprécié l’évaluation de sa performance à la lumière de ses commentaires. La directrice générale du personnel aurait indiqué à tort qu’un membre du personnel contestant l’évaluation de sa performance doit démontrer l’existence d’une erreur manifeste d’appréciation, d’un vice de procédure ou d’une erreur de fait.

36      La BEI estime que le moyen n’est pas fondé.

37      Il y a lieu d’examiner le premier moyen en ce qui concerne la décision de la directrice générale des affaires juridiques, d’une part, et la décision de la directrice générale du personnel, d’autre part.

38      En premier lieu, l’article 22 du règlement du personnel I dispose :

« Chaque membre du personnel fait l’objet d’une appréciation annuelle qui lui est communiquée. La procédure à suivre pour cette appréciation est fixée par une décision intérieure. »

39      Les dispositions d’exécution, qui précisent le dispositif de recours administratif prévu par l’article 41 du règlement du personnel I, comportent un point 4, intitulé « Procédure spéciale applicable aux décisions d’évaluation », lequel comporte un point 4.2, intitulé « Recours membre du personnel – DG » et un point 4.3, intitulé « Recours administratif ».

40      Il ressort des paragraphes 18 et 19 des dispositions d’exécution que la demande de recours « Membre du personnel – DG » est une voie informelle et facultative permettant de contester auprès du directeur général concerné le résultat de l’évaluation de performance à la suite de la communication du premier bulletin de salaire incluant la prime de performance accordée dans le cadre de l’exercice d’évaluation.

41      Il ressort du paragraphe 24 des dispositions d’exécution que le directeur général concerné a le pouvoir de modifier lui-même le résultat de l’évaluation de performance. Un tel pouvoir tend à démontrer qu’il exerce un contrôle entier sur le résultat de l’évaluation de la performance (voir, en ce sens, arrêt du 27 avril 2012, De Nicola/BEI, T‑37/10 P, EU:T:2012:205, points 41 et 42).

42      Il ressort par ailleurs des paragraphes 20 et 21 des dispositions d’exécution que, dans le cadre de la demande de recours « Membre du personnel – DG », ladite demande doit contenir tous les éléments justificatifs et que, par ailleurs, le directeur général concerné et le membre du personnel se réunissent obligatoirement, le ou les évaluateurs de l’agent pouvant assister à cette réunion.

43      Dans ces conditions, étant donné que le directeur général concerné a le pouvoir de modifier lui-même le résultat de l’évaluation de la performance et que les règles procédurales lui permettent de disposer à cette fin de l’ensemble des éléments nécessaires, il convient de considérer que le contrôle auquel procède le directeur général concerné à cet égard est un contrôle entier.

44      En l’espèce, le requérant fait valoir que la directrice générale des affaires juridiques n’a pas procédé à un contrôle entier du résultat de l’évaluation de sa performance.

45      Il ressort certes de la décision de la directrice générale des affaires juridiques que cette dernière a indiqué qu’elle « ne consid[érait] pas qu’il y a[vait] suffisamment d’éléments pour conclure qu’une erreur majeure d’appréciation a[vait] été faite en attribuant la note de performance B ».

46      Une telle indication, considérée isolément, tend à indiquer que la directrice générale des affaires juridiques a procédé à un contrôle restreint de la note de mérite attribuée au requérant.

47      Toutefois, il convient d’examiner de manière globale, en tenant compte de l’ensemble des pièces du dossier, si la directrice générale des affaires juridiques a effectivement exercé un contrôle satisfaisant aux exigences d’un contrôle entier (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 10 juillet 2014, Telefónica et Telefónica de España/Commission, C‑295/12 P, EU:C:2014:2062, points 47 et 59).

48      Or, il convient de constater que, dans le cadre du recours informel prévu par le point 4.2 des dispositions d’exécution, la directrice générale des affaires juridiques n’a pas utilisé les termes d’« erreur manifeste d’appréciation », lesquels correspondent généralement à la notion de contrôle restreint, et, par ailleurs, n’a utilisé les termes d’« erreur majeure d’appréciation » qu’à une seule occasion, sans affirmer de manière générale que son contrôle était limité à celui de l’erreur manifeste d’appréciation. De ce point de vue, la présente affaire diffère de celle ayant donné lieu à l’arrêt du 27 avril 2012, De Nicola/BEI (T‑37/10 P, EU:T:2012:205, point 55), dans laquelle le comité du recours avait considéré, en des termes dépourvus d’ambiguïté et de manière générale « qu’une note [ne] peut être modifiée qu’en cas d’erreur manifeste dans l’évaluation des prestations d’un noté ». En outre, étant donné que, dans la demande de recours « Membre du personnel – DG », le requérant avait demandé que lui soit octroyée la note de mérite A plutôt que la note B, l’écart entre la note attribuée au requérant et celle qu’il sollicitait était important, ce qui est susceptible d’expliquer les termes d’« erreur majeure d’appréciation » utilisés par la directrice générale des affaires juridiques au sujet de la note de mérite attribuée au requérant.

49      Par ailleurs, il ressort des motifs de la décision de la directrice générale des affaires juridiques que cette dernière a apprécié elle-même la performance du requérant. Ainsi, ladite directrice générale ne s’est pas bornée à se référer à l’appréciation du chef de division et de la directrice du département [confidentiel], dont il était d’ailleurs légitime qu’elle tienne compte. Elle a qualifié de manière directe la performance du requérant en lui indiquant qu’« [il avait] eu une bonne performance en 2019 », que « [son] travail et [sa] contribution [étaient] appréciés non seulement par [elle], mais aussi par [son] chef de division et [sa] directrice » et qu’« [il avait] eu une bonne performance, ce qui [était] reflété par [la] note [B] et par les commentaires de [ses] responsables dans le document [de performance] ».

50      De même, la directrice générale des affaires juridiques n’a pas méconnu son pouvoir de modifier le résultat de l’évaluation de la performance, non seulement en ce qui concerne la note de mérite, mais aussi, de manière significative, et sans faire référence à une quelconque limitation de son contrôle, en ce qui concerne un commentaire particulier. Elle a ainsi indiqué au requérant que, « [e]n ce qui concerne [la] demande de changer [le commentaire sur la collaboration], [elle avait] décidé de ne pas faire de changements » et que, « [e]n conséquence, [elle pensait] qu’il [était] justifié d’aborder ce point dans le document [de performance 2019] ».

51      La directrice générale des affaires juridiques a, contrairement à ce que soutient également le requérant, comparé la performance de ce dernier à celle de ses pairs, ainsi qu’il ressort des références à l’évaluation relative, aux « collègues juristes » et aux « autres collègues ». Elle a notamment indiqué : « [j]e comprends que, de votre point de vue, vous ayez l’impression d’avoir eu une année chargée et productive mais par exemple, d’autres collègues, même lorsqu’ils étaient occupés, étaient toujours prêts à assumer une part des nouveaux travaux qui arrivaient ».

52      En ce qui concerne l’argument du requérant selon lequel la directrice générale des affaires juridiques n’a pas pris en compte les commentaires présentés à l’appui de sa demande de recours, il convient de considérer qu’un contrôle entier n’implique pas de répondre à l’intégralité des commentaires présentés à l’appui d’une telle demande et que, en l’espèce, ladite directrice générale a suffisamment répondu auxdits commentaires, tant en ce qui concerne les objectifs, notamment leur nombre et la transaction [confidentiel], qu’en ce qui concerne les compétences, notamment s’agissant du commentaire sur la collaboration.

53      Enfin, le caractère entier du contrôle exercé en l’espèce par la directrice générale des affaires juridiques est corroboré par la procédure suivie dans le cadre de la demande de recours « Membre du personnel – DG ». Ainsi, il ressort de la décision de la directrice générale des affaires juridiques que cette dernière s’est entretenue à deux reprises avec le requérant et qu’elle a également consulté tant le chef de division que la directrice du département [confidentiel].

54      Par suite, en dépit de l’utilisation maladroite des termes d’« erreur majeure d’appréciation » dans la décision de la directrice générale des affaires juridiques, termes qui ne reflètent pas le degré de contrôle exercé par cette dernière, le requérant n’est pas fondé à soutenir que le résultat de l’évaluation de sa performance n’a pas fait l’objet d’un contrôle entier dans le cadre de la demande de recours « Membre du personnel – DG ».

55      En second lieu, il ressort du paragraphe 33 des dispositions d’exécution que, dans le cadre du recours administratif prévu par la procédure spéciale applicables aux décisions d’évaluation, le directeur général du personnel procède à « un contrôle » du résultat de l’évaluation de performance.

56      À cet égard, les termes du paragraphe 33 des dispositions d’exécution diffèrent de ceux du paragraphe 11 de ces mêmes dispositions, lequel concerne le recours administratif dans le cadre de la procédure générale et mentionne que le directeur général du personnel procède à un « contrôle entier » de l’acte ou de la décision contesté. Cette différence tend à démontrer que le contrôle exercé par le directeur général du personnel dans le cadre de la procédure spéciale applicable aux décisions d’évaluation est plus limité que le contrôle entier auquel il procède dans le cadre de la procédure générale.

57      Par ailleurs, il ressort des paragraphes 34 et 35 des dispositions d’exécution que, si le directeur général du personnel peut modifier le résultat de l’évaluation de la performance, ce pouvoir est très encadré, puisqu’il ne peut pas procéder lui-même à une telle modification. En effet, d’une part, ledit directeur général doit consulter préalablement le directeur général concerné, d’autre part, la modification de l’évaluation de performance est effectuée, sur la base d’une recommandation du directeur général du personnel, par le directeur général concerné, qui soumet ensuite pour accord l’évaluation de performance modifiée au directeur général du personnel.

58      Le pouvoir de modification très encadré dont dispose le directeur général du personnel en matière d’évaluation de la performance lui permet d’exercer un contrôle restreint sur le résultat de l’évaluation de la performance. En effet, après avoir considéré que le résultat de l’évaluation de la performance est entaché d’une erreur manifeste d’appréciation, le directeur général du personnel peut recommander au directeur général concerné de procéder aux modifications nécessaires afin que l’évaluation de la performance ne soit plus entachée d’une telle erreur et vérifier ensuite, avant de donner son accord, que l’évaluation modifiée est conforme à sa recommandation. Ainsi, le directeur général du personnel ne substitue sa propre appréciation à celle du directeur général concerné que dans l’hypothèse d’une erreur manifeste d’appréciation, au terme d’un dialogue avec le directeur général concerné.

59      Le caractère restreint du contrôle exercé par le directeur général du personnel sur le résultat de l’évaluation de la performance est cohérent avec la jurisprudence selon laquelle, d’une part, en ce qui concerne les agents soumis au statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut »), compte tenu de la nature du rapport de notation, qui exprime l’opinion librement formulée des notateurs et non pas l’appréciation de l’autorité investie du pouvoir de nomination, l’introduction d’une réclamation formelle au sens de l’article 90 n’apparaît pas comme un préalable nécessaire à l’introduction d’un recours contentieux (arrêt du 3 juillet 1980, Grassi/Conseil, 6/79 et 97/79, EU:C:1980:178, point 15), d’autre part, étant donné que l’autorité investie du pouvoir de nomination ne connaît pas nécessairement la situation précise de chaque agent, son contrôle des appréciations portées par les notateurs sur les agents notés peut se limiter à celui de l’erreur manifeste (arrêt du 10 septembre 2009, van Arum/Parlement, F‑139/07, EU:F:2009:105, point 56).

60      S’il ressort de la jurisprudence que, en vertu d’anciennes dispositions relatives aux recours portés devant le comité de recours de la BEI, ledit comité devait procéder à un contrôle entier des rapports d’évaluation (arrêts du 27 avril 2012, De Nicola/BEI, T‑37/10 P, EU:T:2012:205, point 50 ; du 16 septembre 2013, De Nicola/BEI, T‑618/11 P, EU:T:2013:479, point 37, et du 18 décembre 2015, De Nicola/BEI, F‑82/12, EU:F:2015:166, point 50), il convient de constater que les termes des dispositions d’exécution diffèrent des anciennes dispositions relatives aux recours portés devant ce comité, notamment en ce qu’elles prévoient que le directeur général du personnel ne peut pas modifier lui-même le résultat de l’évaluation de la performance.

61      Par suite, eu égard aux termes des dispositions d’exécution, il convient de considérer que, dans le cadre de la procédure spéciale applicable aux décisions d’évaluation, le directeur général du personnel dispose d’un pouvoir de contrôle restreint sur le résultat de l’évaluation de la performance.

62      Le requérant n’est donc pas fondé à soutenir que le directeur général du personnel a méconnu les dispositions d’exécution en ne procédant pas à un contrôle entier de la décision de la directrice générale des affaires juridiques.

63      Le premier moyen doit donc être écarté.

b)      Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation et du point 3.4 des lignes directrices

64      Le requérant soutient que, selon la jurisprudence, les rapports d’évaluation doivent être suffisamment motivés pour permettre à l’agent de comprendre l’évaluation et de formuler des observations, notamment lorsque l’évaluation connaît une régression par rapport à celle de l’année antérieure. Il indique que, selon le point 3.4 des lignes directrices, la discussion relative à l’évaluation de la performance entre le supérieur hiérarchique et l’agent doit être documentée dans le document de performance. Il estime que la BEI a manqué à son obligation de motivation et méconnu les lignes directrices.

65      D’une part, le requérant fait valoir que, alors qu’il avait expliqué à son supérieur hiérarchique que ses réalisations en matière d’objectifs et ses compétences devaient être évaluées comme supérieures aux attentes et qu’il devait obtenir la note de mérite A, le document de performance 2019 ne mentionne pas cette discussion et n’explique pas pourquoi son supérieur hiérarchique a retenu une évaluation moins favorable.

66      D’autre part, le requérant indique que les motifs du document de performance 2019 sont insuffisants pour comprendre pourquoi les notes obtenues sont plus basses que celles de l’année précédente. La motivation serait principalement fondée sur une comparaison avec les pairs, ce qui équivaudrait à un défaut de motivation en ce qui concerne l’évaluation de sa performance en valeur absolue. La motivation serait insuffisante, étant donné notamment que des objectifs opérationnels similaires à ceux de l’année précédente auraient été notés moins favorablement en 2019 sans explication.

67      La BEI soutient que le moyen est irrecevable et, en tout état de cause, non fondé.

1)      Sur la recevabilité du moyen

68      La BEI soutient que le requérant n’a pas soulevé une telle argumentation au stade précontentieux et que ladite argumentation n’est pas étroitement liée au recours administratif, dans lequel le requérant a contesté le document de performance 2019 sur le fond et non pour des motifs procéduraux. Elle estime que, même si les moyens d’ordre public constituent une exception à la règle de concordance, le requérant ne soulève pas un défaut de motivation en tant que tel mais allègue qu’il existait une obligation particulière de motivation, étant donné que l’évaluation de la performance de 2019 était plus basse que celle de l’année précédente. Ce faisant, le requérant méconnaîtrait la jurisprudence selon laquelle le relevé d’office par le juge de l’Union ne concerne pas la violation d’une obligation particulière de motivation.

69       Le requérant conteste cette argumentation.

70      Selon une jurisprudence applicable par analogie, la règle de concordance entre le recours administratif, au sens de l’article 41 du règlement du personnel I, et la requête subséquente exige, sous peine d’irrecevabilité, qu’un moyen soulevé devant le juge de l’Union l’ait déjà été dans le cadre de la procédure précontentieuse, afin que l’autorité compétente ait été en mesure de connaître les critiques que l’intéressé formule à l’encontre de la décision contestée. Cette règle se justifie par la finalité même de la procédure précontentieuse, celle-ci ayant pour objet de permettre un règlement amiable des différends surgis entre les fonctionnaires et les agents en cause, d’une part, et l’administration, d’autre part. Il s’ensuit que, ainsi qu’il ressort également d’une jurisprudence constante, les conclusions présentées devant le juge de l’Union ne peuvent contenir que des chefs de contestation reposant sur la même cause que celle sur laquelle reposent les chefs de contestation invoqués dans la demande de recours, étant précisé que ces chefs de contestation peuvent être développés, devant le juge de l’Union, par la présentation de moyens et d’arguments ne figurant pas nécessairement dans la demande de recours, mais s’y rattachant étroitement (voir arrêt du 15 juillet 2015, Rouffaud/SEAE, T‑457/14 P, EU:T:2015:495, point 24 et jurisprudence citée).

71      Par ailleurs, des moyens d’ordre public peuvent, par exception à la règle de concordance rappelée au point 70 ci-dessus, être soulevés pour la première fois devant le juge de l’Union (arrêt du 8 septembre 2021, AH/Eurofound, T‑630/19, non publié, EU:T:2021:538, points 41 et 45).

72      En premier lieu, le moyen d’insuffisance de motivation étant d’ordre public, la seule circonstance qu’une critique de cette nature n’ait pas été soulevée au stade du recours administratif ne rend pas le troisième moyen irrecevable.

73      En second lieu, pour ce qui concerne l’argument du requérant tiré de l’obligation de motivation « renforcée » en cas de régression de la notation, il se rattache à l’obligation générale de motivation dont le respect peut également être examiné d’office par le juge.

74      Selon la jurisprudence, il n’appartient pas au juge, dans le cadre de son relevé d’office, de rechercher si les appréciations contenues dans ce rapport d’évaluation sont en régression par rapport à celles du rapport d’évaluation précédent (arrêt du 5 décembre 2006, Angelidis/Parlement, T‑424/04, EU:T:2006:376, point 91).

75      Toutefois, en l’espèce, pour étayer son argument relatif à une régression de sa notation, le requérant précise que, en 2018, sa performance a été considérée comme supérieure aux attentes pour trois des cinq objectifs, ce qui a abouti à la note globale « Supérieure aux attentes » en ce qui concerne les objectifs. Il indique que, en 2019, aucun de ses objectifs n’a fait l’objet de la note « Supérieure aux attentes » et sa note globale en matière d’objectifs a été « Conforme aux attentes ».

76      Dès lors, compte tenu des précisions apportées par le requérant, le Tribunal peut examiner si le document de performance 2019 est suffisamment motivé, sans avoir à rechercher d’office si les appréciations contenues dans ce document sont en régression par rapport à celles du document de performance de l’année précédente.

77      Le moyen est donc recevable, y compris en ce qui concerne l’argument tiré de ce que la notation du requérant est en régression par rapport à l’année précédente.

2)      Sur le bien-fondé du moyen

78      L’obligation de motivation, prévue notamment par l’article 41, paragraphe 2, sous c), de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et par l’article 296 TFUE, a pour but de permettre au Tribunal d’exercer son contrôle sur la légalité des décisions faisant grief et de fournir aux intéressés une indication suffisante pour savoir si ces décisions sont bien fondées ou si elles sont entachées d’un vice permettant d’en contester la légalité (arrêts du 26 novembre 1981, Michel/Parlement, 195/80, EU:C:1981:284, point 22, et du 28 février 2008, Neirinck/Commission, C‑17/07 P, EU:C:2008:134, point 50).

79      Il est suffisant, en principe, que le document de performance fasse état des traits saillants des prestations de la personne concernée en termes d’objectifs et de compétences (voir, en ce sens et par analogie, ordonnance du 23 juillet 2019, UC/Parlement, C‑196/19 P, non publiée, EU:C:2019:653, points 5 et 6, et arrêt du 13 septembre 2011, Nastvogel/Conseil, F‑4/10, EU:F:2011:134, point 70 et jurisprudence citée). Les évaluateurs n’ont pas l’obligation de spécifier dans le document de performance tous les éléments de fait et de droit pertinents à l’appui de leur évaluation (voir, par analogie, arrêt du 13 septembre 2011, Nastvogel/Conseil, F‑4/10, EU:F:2011:134, point 66).

80      Pour apprécier si un document de performance est suffisamment motivé, il y a lieu également de tenir compte de l’ensemble des informations ayant été portées à la connaissance de l’agent concerné, et pas seulement des informations figurant dans ledit document (voir, par analogie, arrêt du 13 septembre 2011, Nastvogel/Conseil, F‑4/10, EU:F:2011:134, point 61).

81      Il convient de constater que le document de performance 2019 mentionne les objectifs et les compétences, lesquels sont assortis de précisions sur leur nature et les indicateurs pertinents. Il mentionne, pour chaque objectif et compétence, l’appréciation de l’évaluateur, une évaluation globale de la réalisation des objectifs et de la démonstration des compétences, ainsi que le profil de performance. Il indique que, lors de l’entretien du milieu de l’année, l’atteinte des objectifs et la démonstration des compétences ont été considérés comme en bonne voie. Il précise, ainsi qu’il a été indiqué au point 6 ci-dessus, que le requérant a pris en charge un plus petit nombre de nouvelles transactions pour se concentrer sur ses tâches transversales et apporte des éléments sur plusieurs desdites tâches. Il comporte un commentaire relatif à la contribution du requérant dans la transaction [confidentiel] ainsi que le commentaire sur la collaboration.

82      Par ailleurs, ainsi qu’il a été indiqué au point 9 ci-dessus, la directrice générale des affaires juridiques a estimé, dans sa décision sur la demande de recours « Membre du personnel – DG », que, compte tenu de l’évaluation relative de sa performance au sein de la division, du département et de la DG, la hiérarchie du requérant n’avait pas considéré que ce dernier avait eu une année 2019 exceptionnelle, beaucoup de juristes de la DG des affaires juridiques ayant montré une performance très forte. Elle a précisé que, même si le requérant avait atteint ses objectifs, la progression avait été plus lente qu’attendu en ce qui concerne deux objectifs importants ([confidentiel] et [confidentiel]) et que la charge de travail du requérant avait dû être réduite dans d’autres domaines pour lui permettre d’atteindre ces objectifs. Elle a estimé qu’il n’était pas inhabituel pour des collègues du niveau d’ancienneté du requérant de travailler sur des transactions complexes, et souvent plusieurs fois par an. En ce qui concerne les compétences, elle a exposé que d’autres collègues de son groupe de pairs avaient fait preuve d’un plus grand engagement et d’une plus grande disposition à accepter une charge de travail supplémentaire, et que, à cet égard, le requérant n’avait pas eu une performance supérieure à celle de ses collègues. Elle a indiqué que, si le requérant considérait qu’il avait eu une année occupée et productive, d’autres collègues, même lorsqu’ils étaient occupés, s’étaient montrés toujours prêts à assumer une partie des tâches nouvelles. Elle a estimé qu’il n’y avait pas lieu de changer le commentaire sur la collaboration, qu’elle considérait comme un suivi justifié et encourageant de l’évaluation de l’année précédente. En réponse à l’argument du requérant selon lequel ce commentaire l’avait surpris, elle a indiqué que, en 2018, le chef de division avait encouragé le requérant à se concentrer sur le développement des compétences de collaboration et que la directrice du département [confidentiel] lui avait aussi indiqué au cours de l’année 2019 qu’il pouvait continuer à progresser en termes de compétences.

83      En premier lieu, dans la mesure où le requérant invoque une violation du point 3.4 des lignes directrices, laquelle prévoit que la discussion relative à l’évaluation de la performance doit être documentée dans le document de performance, il convient de considérer que, premièrement, ladite discussion est documentée, étant donné que le document de performance 2019 mentionne que l’entretien a eu lieu le 10 janvier 2020 et indique que le chef de division et le requérant ont discuté de la collaboration. Deuxièmement, le document en question, tel que précisé par la décision de la directrice générale des affaires juridiques, permet de comprendre les raisons pour lesquelles la performance du requérant, en ce qui concerne les objectifs et les compétences, n’a pas été considérée comme supérieure aux attentes et pourquoi le requérant n’a pas obtenu la note de mérite A. En effet, en ce qui concerne les objectifs, il en ressort que le requérant a pris en charge un plus petit nombre de transactions pour lui permettre de se consacrer à ses tâches transversales et que, dans le cadre de ces tâches transversales, certaines missions ont avancé moins rapidement que prévu, de sorte que sa charge de travail a dû être réduite dans d’autres domaines pour lui permettre de les mener à bien. En ce qui concerne les compétences, il en ressort que des collègues du requérant se sont montrés davantage prêts à prendre en charge une part de travail plus importante.

84      En second lieu, il résulte de la jurisprudence applicable aux fonctionnaires soumis au statut que le respect de l’exigence de motivation est d’autant plus important lorsque l’évaluation de la performance connaît une régression par rapport à la notation antérieure (voir arrêt du 12 juin 2002, Mellone/Commission, T‑187/01, EU:T:2002:155, point 27 et jurisprudence citée).

85      Certes, les lignes directrices ne comportent pas d’exigence particulière de motivation en cas de régression de la note de mérite par rapport à l’année précédente, ni a fortiori en cas de régression d’une appréciation relative à un objectif ou à une compétence spécifique. De ce point de vue, elles se distinguent de certaines dispositions internes applicables aux fonctionnaires soumis au statut (voir, en ce sens, arrêts du 6 février 1986, Castille/Commission, 173/82, 157/83 et 186/84, EU:C:1986:54, point 27 ; du 16 juillet 1992, Della Pietra/Commission, T‑1/91, EU:T:1992:91, point 29, et du 9 mars 1999, Hubert/Commission, T‑212/97, EU:T:1999:39, point 76).

86      Il ressort néanmoins des lignes directrices (pages 9 et 10) que l’obligation de motivation du document de performance est renforcée lorsque la performance d’un agent est considérée comme basse, en ce sens que ce dernier échoue à répondre aux attentes liées à un ou à plusieurs objectifs ou compétences. Dans un tel cas, le supérieur hiérarchique devrait faire mention dans le document de performance de ses observations et des actions destinées à remédier à un niveau de performance insuffisant.

87      Or, en l’espèce, étant donné que la performance du requérant n’a pas été considérée comme basse à l’égard d’un ou de plusieurs objectifs ou compétences, les lignes directrices n’imposaient pas d’obligation de motivation particulière.

88      En outre, même à supposer que la jurisprudence mentionnée au point 84 ci-dessus soit applicable par analogie aux agents de la BEI, alors que les lignes directrices ne prévoient pas une obligation de motivation particulière en cas de régression de la notation, il convient de considérer que le document de performance 2019 est suffisamment motivé à cet égard.

89      En effet, dans le document de performance 2018, la performance en matière d’objectifs avait été considérée comme supérieure aux attentes. L’évaluateur avait indiqué que, en termes de transactions, le requérant avait eu un quatrième trimestre très occupé, clôturant trois transactions.

90      En revanche, dans le document de performance 2019, la performance en matière d’objectifs a été considérée comme conforme aux attentes. Le chef de division a mentionné que le requérant avait pris en charge un plus petit nombre de transactions pour lui permettre de se concentrer sur les questions transversales. De plus, la directrice générale des affaires juridiques a précisé que les collègues du requérant avaient eu une performance très forte, que la progression de ce dernier avait été plus lente qu’attendu sur deux objectifs importants ([confidentiel] et [confidentiel]) et que sa charge de travail avait dû être réduite pour lui permettre d’atteindre ces objectifs.

91      De tels éléments sont suffisants pour comprendre les raisons pour lesquelles l’évaluation du requérant en matière d’objectifs a connu une régression par rapport à l’année précédente.

92      Il résulte de ce qui précède que le document de performance 2019 est suffisamment motivé.

93      Le moyen doit donc être écarté.

c)      Sur le sixième moyen, tiré de la violation du droit d’être entendu

94      Le requérant soutient que les membres du personnel ont le droit d’être entendus avant l’évaluation définitive de leur performance et doivent être mis en mesure de formuler leurs observations sur toutes les questions soulevées dans leur évaluation. Il estime qu’il n’a pas été mis en mesure d’exposer ses vues sur tous les aspects de l’appréciation de ses supérieurs et sur ses défauts allégués avant qu’une décision soit adoptée. Il fait valoir que le document de performance 2019 ne reflète pas l’entretien du 10 janvier 2020 et a constitué une surprise. Les arguments utilisés à son égard auraient été mentionnés pour la première fois dans la décision de la directrice générale des affaires juridiques.

95      La BEI estime que le moyen est manifestement non fondé.

96      Le droit d’être entendu, mentionné à l’article 41, paragraphe 2, de la charte des droits fondamentaux, garantit à toute personne la possibilité de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours de la procédure administrative et avant l’adoption de toute décision susceptible d’affecter de manière défavorable ses intérêts (arrêts du 22 novembre 2012, M., C‑277/11, EU:C:2012:744, point 87 ; du 26 juillet 2017, Sacko, C‑348/16, EU:C:2017:591, point 34, voir également, en ce sens, arrêt du 8 novembre 2018, QB/BCE, T‑827/16, EU:T:2018:756, point 47).

97      Il ressort des pièces du dossier que le requérant a été entendu à plusieurs reprises au cours de la procédure d’évaluation de sa performance.

98      Ainsi, le requérant a été associé au choix de ses objectifs, a discuté avec son responsable de l’évaluation de sa performance lors de l’entretien du milieu de l’année et a eu une discussion avec son chef de division dans le cadre de l’entretien du 10 janvier 2020.

99      En premier lieu, le requérant fait valoir que, lors de l’entretien du 10 janvier 2020, il a indiqué que sa performance se situait au niveau A et a énoncé les raisons d’une telle appréciation. Lors de cet entretien, le chef de division n’aurait soulevé aucune objection et aurait indiqué qu’une promotion au niveau D pouvait être espérée dans un délai de deux ans. Le document de performance 2019 ne refléterait pas ledit entretien et aurait constitué une surprise.

100    Toutefois, lors de l’entretien du 10 janvier 2020, le requérant a été mis en mesure de présenter des observations sur son évaluation en ce qui concerne chaque objectif et compétence et il indique d’ailleurs qu’il a effectivement fait part de son point de vue.

101    La circonstance, à la supposer établie, que, lors de l’entretien du 10 janvier 2020, le chef de division n’ait pas soulevé d’objections quant aux prétentions du requérant de se voir attribuer la note de mérite A, ne remet pas en cause le fait que le requérant a été suffisamment entendu avant l’adoption du document de performance 2019. À cet égard, il convient de relever que, selon les lignes directrices (pages 12 et 13), la note de mérite est attribuée à l’issue des « revues de direction (évaluation relative) », lesquelles ont lieu après l’entretien avec le supérieur hiérarchique. En outre, à supposer que le chef de division ait indiqué au requérant qu’il pouvait espérer une promotion au niveau D dans un délai de deux ans, le requérant n’expose pas en quoi une telle remarque serait en contradiction avec le document de performance 2019, lequel concerne la performance de l’année en cause.

102    En second lieu, le requérant fait valoir que des arguments tels que l’avancement des missions plus lent qu’attendu, la réduction de sa charge de travail et le manque d’engagement et de disposition à accepter une charge de travail supplémentaire ont été mentionnés pour la première fois dans la décision de la directrice générale des affaires juridiques.

103    Toutefois, il ressort de la décision de la directrice générale des affaires juridiques que, conformément au paragraphe 21 des dispositions d’exécution, le requérant a été reçu par la directrice générale des affaires juridiques le 26 mai 2020. Il ressort au surplus de ladite décision que le requérant a eu une nouvelle conversation avec cette dernière le 25 juin 2020.

104    Dans le cadre de la demande de recours « Membre du personnel – DG », le requérant a donc pu présenter, à l’écrit comme à l’oral, ses observations sur le document de performance 2019 ainsi que sur la note de mérite attribuée à l’issue de la revue de direction.

105    Les arguments de la décision de la directrice générale des affaires juridiques mentionnés au point 102 ci-dessus constituent des précisions en réponse à l’argumentation soulevée par le requérant dans la demande de recours « Membre du personnel – DG ». Ils sont cohérents avec la notation des objectifs et des compétences figurant dans le document de performance 2019, notamment avec la notation « Conforme aux attentes » en ce qui concerne les objectifs « [confidentiel] » et « [confidentiel] [service juridique] ». Au surplus, ces arguments interviennent dans un contexte factuel connu du requérant, étant donné que ce dernier reconnaît qu’il a été confronté à des difficultés et qu’il a dû en discuter avec son supérieur hiérarchique au mois d’octobre 2019.

106    Il convient, en outre, de constater que les circonstances de la présente affaire diffèrent de celles en cause dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 8 mars 2011, De Nicola/BEI (F‑59/09, EU:F:2011:19, points 178 à 181). En effet, en l’espèce, il ne ressort pas des pièces du dossier que l’entretien du 10 janvier 2020 a été très court, ni que le requérant n’a pas pu obtenir d’informations précises, avant cet entretien, sur les objectifs qui lui étaient fixés, ni encore que le requérant a fait connaître son opposition aux objectifs assignés lors dudit entretien.

107    En tout état de cause, selon une jurisprudence constante, une violation du droit d’être entendu n’entraîne l’annulation de la décision prise au terme de la procédure administrative en cause que si, en l’absence de cette irrégularité, la procédure pouvait aboutir à un résultat différent (voir arrêt du 18 juin 2020, Commission/RQ, C‑831/18 P, EU:C:2020:481, point 105 et jurisprudence citée).

108    Or, en l’espèce, il ne ressort pas des pièces du dossier que la procédure pouvait aboutir à un résultat différent si le chef de division avait indiqué au requérant, lors de l’entretien du 10 janvier 2020, que ce dernier était susceptible de se voir attribuer la note B plutôt que la note de mérite A, ou si la directrice générale des affaires juridiques avait invité le requérant à présenter ses observations, de manière formelle, au sujet des arguments mentionnés au point 102 ci-dessus, avant d’adopter sa décision dans le cadre de la demande de recours « Membre du personnel – DG ». Le requérant ne l’allègue d’ailleurs pas.

109    Le moyen doit donc être écarté.

d)      Sur le deuxième moyen, tiré de l’absence d’évaluation absolue des performances du requérant 

110    Le requérant soutient que, selon les lignes directrices, l’évaluation de la performance d’un membre du personnel est divisée en deux étapes successives : dans un premier temps, une évaluation absolue de la performance est effectuée par le supérieur hiérarchique et, dans un second temps, une revue de direction a lieu dans chaque DG et est fondée sur une comparaison avec les pairs. L’évaluation relative aurait lieu après l’évaluation absolue.

111    Le requérant estime que l’évaluation en matière d’objectifs et de compétences, figurant sous les titres « Objectif », « Compétences » et « Évaluation de fin d’année » du document de performance 2019, est absolue et individuelle. En revanche, la proposition d’un profil de performance, auquel s’ajoutent, pour les agents déjà en service au 30 juin 2013, une note de mérite ainsi que les éventuelles recommandations de récompenses liées à l’évaluation de la performance (augmentation de salaire et prime de performance) et les éventuelles propositions de promotion, relèveraient de l’évaluation relative de la performance.

112    Le requérant estime qu’il ressort des décisions attaquées que l’évaluation de la réalisation des objectifs et de ses compétences a été réalisée en termes relatifs et non en termes absolus, ce qui constituerait une violation des lignes directrices. Le requérant aurait été pénalisé par la comparaison de ses réalisations avec celles de ses pairs. L’évaluation en matière d’objectifs et de compétences serait donc illégale, ce qui affecterait également son profil de performance et les récompenses correspondant à son évaluation.

113    La BEI estime que ce moyen, à le supposer recevable, n’est pas fondé.

114    À titre liminaire, la BEI doute que le deuxième moyen respecte la règle de concordance entre la réclamation et la requête, telle que définie par la jurisprudence. Il appartiendrait au requérant de démontrer l’existence d’un lien étroit entre les moyens de la réclamation et ceux d’un recours devant le Tribunal. Le deuxième moyen serait entièrement nouveau par rapport au recours administratif.

115    Le requérant estime que le moyen est recevable. Il indique qu’il a critiqué, dans son recours administratif, le fait que l’évaluation absolue ne respectait pas les lignes directrices, à la fois du point de vue de la procédure et du fond. Dans le présent recours, il développerait ce même chef de demande avec des moyens et arguments qui lui sont étroitement liés.

116    En l’espèce, le requérant n’a pas soutenu, dans le cadre de sa demande de recours administratif, que son évaluation n’avait pas été effectuée en termes absolus.

117    Certes, il ressort de la demande de recours administratif que le requérant a sollicité un réexamen indépendant du résultat de l’évaluation de sa performance, y compris une appréciation de la manière dont les exigences d’une évaluation de la performance objective, juste et transparente, telles qu’elles sont intégrées dans les lignes directrices, ont été respectées (point 2). Il en ressort également que le requérant a présenté une argumentation selon laquelle l’évaluation absolue de sa performance en matière d’objectifs et de compétences n’avait pas été conduite de manière juste et objective (point 3, sous C).

118    Toutefois, même en examinant le recours administratif dans un esprit d’ouverture, le deuxième moyen ne peut être regardé comme se rattachant étroitement aux critiques développées dans le recours administratif, en particulier à celle relative au caractère injuste et subjectif de l’évaluation absolue des objectifs et des compétences du requérant. En effet, par cette dernière critique, le requérant a contesté la façon dont cette évaluation absolue avait été conduite sans jamais considérer explicitement ou implicitement que cette évaluation avait fait défaut. Si le requérant se réfère, dans la demande de recours administratif, aux lignes directrices, ce n’est pas pour tenter de démontrer qu’aucune évaluation absolue n’avait été conduite.

119    Cette conclusion est corroborée par le fait que, dans la décision rejetant le recours administratif, la BEI ne s’est pas prononcée sur la question de savoir si une évaluation absolue avait été conduite.

120    Par suite, en application de la jurisprudence rappelée au point 70 ci-dessus, le deuxième moyen doit être écarté comme irrecevable.

e)      Sur le quatrième moyen, tiré d’une erreur manifeste d’appréciation, de l’absence d’évaluation appropriée de la performance absolue du requérant, de la violation du devoir de bonne administration et du devoir de sollicitude ainsi que de la méconnaissance des lignes directrices

121    Le requérant soutient que l’évaluation de son supérieur hiérarchique, confirmée par la directrice générale des affaires juridiques et par la directrice générale du personnel, n’a pas pris en compte l’ensemble des facteurs pertinents et est entachée d’erreurs manifestes. Il fait valoir qu’il aurait à tout le moins dû recevoir la note de mérite B+.

122    En ce qui concerne l’évaluation des objectifs, le requérant fait valoir, en premier lieu, qu’il s’est vu attribuer un nombre d’objectifs très supérieur à la moyenne et que son travail supplémentaire n’a pas été pris en compte. Il soutient, en second lieu, que, en ce qui concerne l’évaluation de chacun des objectifs, il a manifestement dépassé les attentes en termes de qualité et de quantité et que, en ce qui concerne la ponctualité, la BEI a commis une erreur manifeste d’appréciation en considérant que ses missions avaient avancé plus lentement qu’attendu en ce qui concerne deux objectifs importants.

123    En ce qui concerne les compétences, le requérant estime que son évaluation aurait dû aboutir à l’attribution de la note « Supérieure aux attentes ». Il indique que lier la compétence « Engagement à l’égard de l’organisation » au seul critère de la disposition à accepter du travail supplémentaire est erroné, qu’il a travaillé sur un plus grand nombre de projets que ses pairs et qu’il a accepté de reprendre le travail d’une autre unité. En ce qui concerne la compétence « Collaboration », le commentaire sur la collaboration serait fallacieux, susceptible de mauvaise interprétation, erroné en fait, incohérent et inéquitable.

124    La BEI estime que le moyen doit être écarté.

125    Selon la jurisprudence, les évaluateurs jouissent du plus large pouvoir d’appréciation dans les jugements portés sur le travail des personnes qu’ils ont la charge de noter et il n’appartient pas au juge d’intervenir dans cette appréciation, sauf en cas d’erreur manifeste (arrêts du 1er juin 1983, Seton/Commission, 36/81, 37/81 et 218/81, EU:C:1983:152, point 23, et du 15 avril 2021, FV/Conseil, C‑875/19 P, non publié, EU:C:2021:283, point 65).

126    Une erreur peut seulement être qualifiée de manifeste lorsqu’elle est aisément perceptible et peut être détectée à l’évidence, à l’aune des critères auxquels le législateur a entendu subordonner l’exercice par l’administration de son pouvoir d’appréciation. Établir que l’administration a commis une erreur manifeste dans l’appréciation des faits de nature à justifier l’annulation de la décision prise sur la base de cette appréciation suppose donc que les éléments de preuve, qu’il incombe à la partie requérante d’apporter, soient suffisants pour priver de plausibilité les appréciations retenues par l’administration (voir arrêt du 24 septembre 2019, US/BCE, T-780/17, non publié, EU:T:2019:678, point 61 et jurisprudence citée).

127    Les lignes directrices mentionnent que, au cours de la revue de direction, destinée à assurer une comparaison entre les pairs, trois profils de performance peuvent être proposés : « Surperformant » (10 % des agents), « Performant » et « Sous-performant » (page 12). Elles précisent que, en plus du profil de performance, les agents soumis au règlement du personnel I reçoivent une note de mérite sur une échelle à cinq niveaux. Les profils « Surperformant » correspondent à la note A. Environ un tiers des agents avec un profil « Performant » reçoivent la note B+. La majorité des agents reçoit la note B et certains reçoivent la note C, lorsque la performance est généralement satisfaisante, mais qu’il existe des domaines à améliorer ou lorsque la performance est plus basse que la moyenne. Les profils « Sous-performant » reçoivent la note D (page 13).

1)      Sur les objectifs

128    En premier lieu, en ce qui concerne l’évaluation quantitative des objectifs considérés dans leur ensemble, le requérant fait valoir que le nombre d’objectifs fixés était très supérieur à la moyenne. Il estime que le fait qu’il a lui-même proposé ses objectifs n’est pas pertinent, étant donné que ces objectifs ont été validés par son supérieur hiérarchique. La directrice générale du personnel ne serait pas compétente pour décider de la pertinence et de la structure de ces objectifs. En tout état de cause, le requérant prétend que, parmi ses collègues ayant reçu une combinaison similaire d’objectifs relatifs à la politique et aux transactions, il a eu le plus grand nombre d’objectifs. En outre, selon lui, contrairement à ce qu’exigent les lignes directrices, l’évaluation n’a pas pris en compte le travail supplémentaire qu’il a effectué par rapport aux objectifs définis, notamment sa participation active à environ 20 projets.

129    À cet égard, s’il est constant que le nombre d’objectifs fixés au requérant pour l’année 2019 était supérieur à la moyenne, étant donné que le requérant s’était vu assigner neuf objectifs et que les lignes directrices prévoient que « le nombre d’objectifs individuels […] est généralement compris entre trois et sept objectifs à fixer en fonction de [la] fonction », la directrice générale des affaires juridiques a indiqué que le nombre d’objectifs n’était pas en lui-même un indicateur de surperformance. Elle a précisé que l’une des raisons pour lesquelles le requérant avait autant d’objectifs était qu’il avait lui-même proposé plusieurs de ces objectifs et que son poste, combinant à la fois du travail transactionnel et des tâches transversales, incluait une plus grande variété de tâches que celui d’autres collègues.

130    Par ailleurs, la directrice générale du personnel a indiqué que le nombre d’objectifs pris en compte pour l’évaluation de la performance du requérant devait être relativisé. Elle a précisé que deux objectifs étaient liés aux formations obligatoires et ne consistaient pas en plus de quatre heures de travail par an. Elle a indiqué que, pour d’autres membres du personnel, ces deux objectifs étaient regroupés en un seul objectif. Elle a ajouté que deux autres objectifs, liés aux présentations aux nouveaux arrivants au service juridique, d’une part, et à la DG de gestion et de restructuration des transactions, d’autre part, n’engendraient pas un volume de travail important et auraient pu être regroupés en un seul objectif. Elle a précisé que les deux objectifs « Conseil juridique sur les transactions [confidentiel] » et « Processus et procédures [service juridique – [confidentiel]] » étaient des objectifs que tout membre du personnel dans la division du requérant devait atteindre.

131    À cet égard, le requérant ne conteste pas que le nombre d’objectifs était lié à la nature de son poste qui, combinant travail transversal et travail transactionnel, était plus varié que celui de ses collègues. Il ne conteste pas davantage que, parmi neuf objectifs, deux induisaient un très petit nombre d’heures de travail et deux autres n’engendraient pas un volume de travail important.

132    Si le requérant fait valoir que la directrice générale du personnel n’est pas compétente pour décider de la pertinence et de la structure de ces objectifs, il n’en demeure pas moins qu’elle pouvait apprécier sa performance en tenant compte de la nature de son poste et du volume de travail induit par chaque objectif.

133    Par ailleurs, dans la mesure où le requérant fait valoir que, contrairement à ce qu’exigent les lignes directrices, l’évaluation de sa performance n’a pas pris en compte le travail supplémentaire qu’il a effectué par rapport aux objectifs, notamment sa participation à environ 20 projets, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, il suffit en principe que le document de performance fasse état des traits saillants de la performance de la personne concernée en termes d’objectifs et de compétences, conformément à la jurisprudence rappelée au point 79 ci-dessus.

134    Il ressort également des lignes directrices (page 11), lesquelles mentionnent que la performance « peut » être évaluée selon certains critères et que le supérieur hiérarchique prend en compte « d’autres facteurs pertinents, par exemple […] », que les critères et les facteurs pertinents prévus par les lignes directrices, notamment la disposition à accepter du travail supplémentaire, constituent une liste indicative que le supérieur hiérarchique est susceptible de prendre en compte dans le cadre de l’évaluation.

135    Par ailleurs, le document de performance mentionne, à tout le moins, une tâche qualifiée par le requérant de supplémentaire par rapport à ses objectifs, à savoir la mission « [confidentiel] ». Il mentionne d’ailleurs également la représentation du département [confidentiel] du service juridique au groupe de travail [confidentiel] et la réalisation de diverses formations et présentations, telles que la présentation [confidentiel].

136    Par suite, le nombre élevé d’objectifs fixés au requérant et sa participation à des projets supplémentaires ne démontrent ni que le requérant a eu une performance très supérieure à la moyenne ni que l’ensemble des facteurs pertinents n’ont pas été pris en compte dans le cadre de l’évaluation de sa performance.

137    En second lieu, en ce qui concerne l’évaluation de chacun des objectifs, le requérant estime qu’il a manifestement dépassé les attentes en termes de qualité et de quantité. Il affirme avoir effectué des prestations qui, selon les descriptions des fonctions de référence, sont supérieures à celles attendues d’un agent de fonction E et relèvent d’un agent de fonction D. En ce qui concerne la ponctualité, il soutient que la BEI a commis une erreur manifeste d’appréciation en considérant que ses missions avaient avancé plus lentement qu’attendu sur deux objectifs importants et que son volume de travail avait dû être réduit dans d’autres domaines pour lui permettre d’atteindre ces deux objectifs.

138    Toutefois, en premier lieu, en ce qui concerne l’objectif « Conseils juridiques sur les transactions [confidentiel] », mesuré à l’aune de « la qualité et de la ponctualité du conseil juridique, du nombre de transactions menées à bien (compte tenu du temps passé sur les questions transversales/relationnelles/ou autres) », le chef de division a mentionné que le requérant avait pris en charge un plus petit nombre de nouvelles transactions pour lui permettre d’accorder la priorité aux questions transversales et que, en ce qui concerne la transaction [confidentiel], le requérant avait fourni une contribution utile et avait joué un rôle décisif pour trouver une solution.

139    Le requérant souligne la complexité de la transaction [confidentiel] et le rôle déterminant qu’il a joué dans la conception et la mise en œuvre d’une solution innovante. Compte tenu du fait qu’il a consacré 13 % de son temps aux nouvelles transactions, celles qu’il a menées à bien en 2019 correspondraient à au moins quinze transactions, ce qui devrait conduire à lui attribuer la note de mérite A.

140    Néanmoins, il ressort des déclarations du requérant que ce dernier n’a finalisé que deux transactions en 2019, ce qui est très inférieur au nombre moyen de huit transactions signées par un juriste. En outre, le requérant n’a pas contesté la considération de la directrice générale des affaires juridiques selon laquelle il n’est pas inhabituel pour des juristes de son niveau d’ancienneté de traiter une, voire plusieurs transactions complexes chaque année. Il n’a pas non plus allégué que l’autre transaction qu’il a finalisée en 2019 était complexe et relevait du niveau de fonction D.

141    En second lieu, en ce qui concerne l’objectif relationnel « Formation [DG de gestion et de restructuration des transactions] », qui consiste à « préparer et fournir une formation sur le [confidentiel] [aux divisions de cette DG] », la circonstance que le requérant a une « bonne connaissance » du [confidentiel], comme il est exigé d’un agent de la fonction D, ne permet pas de démontrer que ses résultats ont manifestement excédé les standards ou les attentes en termes de qualité, de quantité ou de délai.

142    En ce qui concerne l’objectif « [confidentiel] », à savoir « conduire et coordonner le groupe de travail au niveau de la banque et du service juridique sur [confidentiel] », avec l’indicateur « Finalisation de la revue annuelle », le chef de division a précisé que cette tâche incluait la finalisation d’une nouvelle publication [dudit [confidentiel] en mars 2019 et le travail sur des commentaires reçus au cours de l’année 2019. La directrice générale des affaires juridiques a précisé que la progression avait été plus lente qu’attendu en ce qui concerne cet objectif et que la charge de travail avait dû être réduite dans d’autres domaines pour permettre au requérant de l’atteindre.

143    Si le requérant a fait valoir, en réponse à la décision de la directrice générale des affaires juridiques, que ses objectifs étaient fixés pour l’année civile, qu’il a atteint son objectif au 31 décembre 2019 et que son supérieur ne l’a pas informé que son travail avançait plus lentement qu’attendu, il reconnaît cependant qu’il a été confronté à des difficultés et qu’il a dû en discuter avec son supérieur hiérarchique au mois d’octobre 2019 afin de trouver des solutions permettant de surmonter lesdites difficultés.

144    En ce qui concerne l’objectif « Groupe de travail […] [confidentiel] », lequel consistait à représenter le département [confidentiel] du service juridique au sein de ce groupe de travail, l’attente étant « un taux de participation aux réunions […] d’au moins 75 %[ et une f]inalisation de la terminologie », le requérant fait valoir qu’il a dépassé cet objectif en termes de quantité, puisqu’il a assisté à 100 % des réunions du groupe de travail, et, en termes de qualité, puisqu’il a représenté le service juridique dans les comités internes et qu’il a maintenu des relations avec ses pairs d’autres institutions financières internationales, conformément à la fiche de poste du niveau D.

145    Toutefois, compte tenu du fait qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que la participation à 100 % des réunions du groupe de travail correspond à une performance particulièrement forte et que le fait de représenter le département [confidentiel] du service juridique correspond à l’objectif lui-même, le requérant n’avance pas d’élément en matière de quantité, de qualité ou de délai d’une importance telle qu’il priverait de plausibilité la notation afférente à cet objectif.

146    En ce qui concerne l’objectif transversal « Manuel [confidentiel] [du service juridique] », consistant à diriger le groupe de travail sur la mise à jour du manuel, avec l’indicateur « Finaliser la mise à jour […] », le chef de division a mentionné, dans le document de performance 2019, que ce manuel était désormais prêt à être approuvé par la direction. La directrice générale des affaires juridiques a indiqué que la progression avait été plus lente qu’attendu en ce qui concerne cet objectif.

147    Le requérant expose que, en ce qui concerne l’objectif transversal en cause, sa performance avait été qualifiée de supérieure aux attentes l’année précédente et que le manuel [confidentiel] a couvert pour la première fois de nouveaux domaines en 2019, grâce à l’implication d’un plus grand nombre de contributeurs. Il invoque le fait qu’il a développé une relation constructive avec un pair d’une autre institution, conformément aux activités attendues d’un agent de fonction D.

148    Toutefois, si le requérant fait valoir qu’il a terminé sa mission en novembre 2019, soit dans le délai fixé au 31 décembre 2019, il n’en demeure pas moins que l’approbation finale du manuel [confidentiel] n’a été donnée qu’en février 2020. Le requérant reconnaît qu’il a été confronté à des difficultés et qu’il a dû en discuter avec son supérieur hiérarchique au mois d’octobre 2019. S’il estime que ces difficultés étaient liées à son volume de travail excessif et qu’il a fait preuve de professionnalisme en discutant avec son responsable, il ne conteste pas les difficultés qu’il a rencontrées pour respecter les délais fixés.

149    En ce qui concerne l’objectif « Formation des nouveaux arrivants du service juridique », consistant à préparer et à fournir une formation aux nouveaux arrivants sur le manuel [confidentiel], l’indicateur étant la conduite de la formation, le requérant indique que, outre la formation proprement dite, son travail a dépassé les attentes, puisqu’il a guidé les nouveaux arrivants, souvent juristes.

150    Toutefois, une telle assertion, qui ne semble d’ailleurs pas porter sur la formation proprement dite, ne permet pas de considérer que l’appréciation de l’évaluateur est dépourvue de plausibilité.

151    Par suite, compte tenu, en particulier, du nombre de transactions finalisées par le requérant, du fait que certaines tâches transversales n’ont pas avancé aussi rapidement qu’attendu, du fait que sa charge de travail a dû être réduite dans certains domaines et de la très forte performance des autres juristes, l’appréciation globale de l’évaluateur selon laquelle les prestations du requérant en ce qui concerne les objectifs étaient conformes aux attentes n’est pas dépourvue de plausibilité.

2)      Sur les compétences

152    Le requérant estime que, en ce qui concerne les compétences, son évaluation aurait dû aboutir à l’attribution de la note « Supérieure aux attentes ». Il affirme avoir partagé ses connaissances, s’être montré constructif, disponible et avoir promu la réputation de ses collègues.

153    Le requérant indique que lier la compétence « Engagement à l’égard de l’organisation » au seul critère relatif à la disposition à accepter du travail supplémentaire, comme l’a fait la directrice générale des affaires juridiques, est erroné. Un tel critère, en ce qu’il reposait sur les heures supplémentaires effectuées, aurait méconnu les lignes directrices. Le requérant indique qu’il a mené à bien deux nouvelles transactions en 2019 en y consacrant 13 % de son temps de travail.

154    Le requérant indique que le commentaire sur la collaboration est fallacieux, susceptible de mauvaise interprétation, erroné en fait, incohérent et inéquitable. Il ne saurait être interprété comme une amélioration de la situation par rapport à l’année précédente, étant donné notamment que l’exercice d’évaluation annuelle ne prévoit pas qu’on établisse des liens avec des résultats d’évaluation de la performance antérieurs. Le requérant ajoute que, en 2020, ses compétences de collaboration ont été louées par son nouveau supérieur hiérarchique à la suite de son changement de division.

155    Toutefois, la directrice générale des affaires juridiques a considéré que, selon l’appréciation du responsable du requérant, d’autres collègues de son groupe de pairs avaient montré un plus grand engagement et une plus grande disposition à accepter une charge de travail supplémentaire et que, à cet égard, le requérant n’avait pas dépassé la performance de ses collègues dans ces compétences spécifiques. Elle a précisé que d’autres collègues, même occupés, s’étaient montrés encore prêts à accepter du travail supplémentaire.

156    Ce faisant, la directrice générale des affaires juridiques n’a pas méconnu les lignes directrices, selon lesquelles le nombre d’heures travaillées n’est pas un critère autonome d’évaluation de la performance (page 11), étant donné qu’elle ne s’est pas fondée sur le nombre d’heures travaillées, mais a tenu compte de la disposition à accepter davantage de travail. En outre, les éléments avancés par le requérant ne permettent pas de considérer que, en se fondant sur ce dernier élément, ladite directrice générale a commis une erreur manifeste dans l’évaluation de la compétence « Engagement envers l’organisation ». Ils ne permettent pas davantage de démontrer que, étant donné qu’il a travaillé sur un plus grand nombre de projets que ses pairs et accepté de reprendre le travail d’une autre unité, il a manifestement dépassé les attentes en termes de compétences.

157    En ce qui concerne la compétence « Collaboration […] : valoriser la contribution des autres », le chef de division a considéré que la performance du requérant était conforme aux attentes. Il a mentionné qu’il avait noté les efforts du requérant pour améliorer cette compétence, lesquels portaient leurs fruits.

158    Contrairement à ce que soutient le requérant, le commentaire sur la collaboration est suffisamment clair et, en ce qu’il fait référence aux efforts fructueux de celui-ci dans ce domaine, cohérent avec la notation « Conforme aux attentes ». Par ailleurs, ainsi que l’a indiqué la directrice générale des affaires juridiques, dans le document de performance de 2018, l’évaluateur avait encouragé le requérant à continuer à se concentrer sur le développement de la compétence de collaboration. Ladite directrice générale a également mentionné que, au cours de l’année 2019, la directrice du département [confidentiel] lui avait indiqué qu’il pouvait encore progresser en termes de compétences, ce que le requérant ne conteste d’ailleurs pas et ce qui tend à démontrer que le commentaire sur la collaboration n’est pas entaché d’une erreur de fait.

159    Si une appréciation telle que le commentaire sur la collaboration doit porter sur les prestations telles que démontrées lors de l’année faisant l’objet de l’évaluation, à savoir 2019, tel est le cas en l’espèce. En effet, en précisant que ce commentaire constituait un suivi encourageant par rapport à l’appréciation de l’année précédente, laquelle consistait précisément en une invitation à agir, la directrice générale des affaires juridiques n’a pas évalué la performance du requérant en se fondant sur ses prestations de l’année 2018.

160    Par suite, en dépit de l’appréciation positive portée en 2020 par le nouveau supérieur hiérarchique du requérant sur ses compétences de collaboration, les appréciations relatives aux compétences du requérant mentionnées dans les décisions attaquées ne sont pas dépourvues de plausibilité.

161    Dans ces conditions, compte tenu de ce qui été indiqué au point 151 ci-dessus en matière d’objectifs, la BEI n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en ce qui concerne le profil de performance et la note de mérite du requérant, ce dernier ayant d’ailleurs admis, dans le recours administratif, qu’il n’avait pas eu une année 2019 exceptionnelle.

162    Il résulte de ce qui précède que le moyen doit être écarté.

f)      Sur le cinquième moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation et dune erreur manifeste d’appréciation en ce qui concerne l’absence de promotion à la fonction D

163    Le requérant soutient qu’il remplit tous les critères pour bénéficier d’une promotion, tels que prévus par les lignes directrices. En outre, il estime que la BEI n’a pas motivé sa décision de ne pas le promouvoir. La motivation générale et abstraite fournie par la BEI ne permettrait pas de comprendre les raisons pour lesquelles il n’a pas été promu.

164    La BEI soutient que le moyen est manifestement non fondé.

165    Il convient d’examiner le grief tiré d’un défaut de motivation de l’absence de promotion à la fonction D, puis celui tiré d’une erreur manifeste d’appréciation entachant cette absence de promotion.

166    En premier lieu, l’article 23 du règlement du personnel I dispose que « [l]es promotions se font par l’accès à une fonction supérieure » et qu’« [e]lles sont décidées d’après le mérite professionnel ».

167    Les lignes directrices mentionnent, en leur point 3.4, intitulé « Évaluer la performance en fin d’année » (pages 12 et 13), que le responsable hiérarchique peut fournir des recommandations sur la question de savoir si un agent doit être considéré pour une promotion. Elles précisent que les notations d’objectifs et de compétences et les profils de performance servent de base pour les propositions de promotion.

168    Les lignes directrices mentionnent, en leur point 5, intitulé « Promotion liée à l’évaluation de la performance », qu’un agent peut être promu à un niveau fonctionnel supérieur en fin d’année dans le cadre de l’exercice d’évaluation de la performance s’il a une bonne performance dans ses fonctions actuelles, s’il a la capacité ou le potentiel d’être performant à un niveau supérieur, s’il a démontré sa motivation pour travailler à un niveau supérieur et s’il existe un besoin d’un agent à un niveau fonctionnel supérieur dans son équipe. Elles indiquent, par ailleurs, qu’une promotion au cours de l’exercice annuel d’évaluation des performances est soumise à des critères d’éligibilité.

169    En l’espèce, la directrice générale du personnel a indiqué que l’administration disposait d’une large marge d’appréciation en ce qui concerne les décisions relatives à la promotion et a rappelé le contenu du point 5 des lignes directrices. Elle a considéré que la promotion à un niveau plus élevé constituait une question de mérite, que la promotion récompensait la bonne performance soutenue et la démonstration de la capacité, du potentiel et de la motivation pour accepter de plus hautes responsabilités et qu’elle était subordonnée à l’existence d’un besoin d’un employé à un niveau plus élevé dans l’équipe. Elle a estimé que, étant donné que la BEI n’avait pas commis d’erreur en considérant que la performance du requérant en matière d’objectifs et de compétence était conforme aux attentes en 2019 et ne dépassait pas ces dernières, elle n’avait pas commis d’erreur en décidant de ne pas promouvoir le requérant.

170    Les motifs de la décision de la directrice générale du personnel permettent de comprendre que l’absence de promotion du requérant à la fonction D résulte du fait que la BEI a considéré que la performance de ce dernier en 2019 n’était pas supérieure aux attentes.

171    Si le requérant fait valoir que la décision de la directrice générale des affaires juridiques n’est pas motivée en ce qui concerne l’absence de promotion au niveau D, il convient de constater que, dans la demande de recours « Membre du personnel – DG », le requérant n’avait demandé à la directrice générale des affaires juridiques de « considérer » sa promotion à un niveau supérieur que dans l’hypothèse où « pour des raisons procédurales ou budgétaires » la prime individuelle ne pourrait lui être accordée. Compte tenu des conditions posées par le requérant à sa demande, à savoir l’existence de raisons procédurales ou budgétaires faisant obstacle à ce que lui soit octroyée une prime individuelle, le requérant n’est pas fondé à reprocher à ladite directrice générale, laquelle a décidé de confirmer le document de performance 2019 et n’a nullement invoqué de telles raisons, de ne pas avoir apporté plus de précisions en ce qui concerne sa promotion.

172    Par ailleurs, étant donné que la directrice générale du personnel a exposé, de manière suffisamment claire, que l’absence de promotion du requérant était fondée sur le fait que sa performance pour l’année 2019 n’était pas supérieure aux attentes, le requérant n’est pas fondé à soutenir que ladite motivation est générale et abstraite.

173    Le grief tiré de ce que la décision de ne pas promouvoir le requérant serait entachée d’un défaut de motivation doit donc être écarté.

174    En second lieu, pour évaluer le mérite d’un agent dans le cadre de la promotion liée à l’évaluation de la performance, telle que prévue par l’article 23 du règlement du personnel I et par le point 5 des lignes directrices, le président de la BEI dispose d’un large pouvoir d’appréciation et, dans ce domaine, le contrôle du juge de l’Union doit se limiter à la question de savoir si, eu égard aux voies et aux moyens qui ont pu conduire l’administration à son appréciation, celle-ci s’est tenue dans des limites raisonnables et n’a pas usé de son pouvoir de manière manifestement erronée (voir, par analogie, arrêt du 3 avril 2003, Parlement/Samper, C‑277/01 P, EU:C:2003:196, point 35).

175    À l’appui de son argumentation selon laquelle la BEI a commis une erreur manifeste d’appréciation en décidant de ne pas le promouvoir, le requérant fait valoir qu’il remplit les critères pour une promotion, étant donné que ses performances à son poste actuel sont bonnes, qu’il a l’aptitude et le potentiel pour travailler à un niveau supérieur et qu’il a continuellement exercé des responsabilités à un niveau plus élevé que celles afférentes à la fonction E. 

176    Toutefois, il ressort des décisions attaquées que la performance du requérant, qui a obtenu la note de mérite B, a été considérée comme conforme aux attentes, mais n’a pas dépassé les attentes en 2019. Il en ressort également que, en revanche, d’autres juristes de la DG des affaires juridiques ont montré une performance très forte en 2019.

177    Dans ces conditions, les éléments avancés par le requérant ne permettent pas de considérer que la BEI a commis une erreur manifeste d’appréciation en décidant de ne pas le promouvoir à l’issue de l’exercice d’évaluation de la performance.

178    Le moyen doit donc être écarté et, par suite, les conclusions en annulation doivent être rejetées.

B.      Sur les conclusions indemnitaires

179    Sous l’intitulé « Préjudice », le requérant soutient que l’annulation du document de performance 2019 implique le réexamen par la BEI de sa performance, de ses récompenses et de sa promotion. Il indique que, si le Tribunal considérait qu’un tel réexamen est impossible, il demande la réparation du préjudice matériel résultant de la perte de chance de se voir attribuer la note de mérite B+ ou A, l’augmentation de salaire liée à celle-ci, une prime individuelle correspondant à une performance plus élevée et une promotion à la fonction D.

180    En outre, le requérant fait valoir qu’il a subi un préjudice moral, étant donné que le document de performance 2019 et l’absence de récompense adéquate sont fondés sur une appréciation négative et manifestement erronée de sa performance et qu’il n’a pas été dûment entendu ni n’a reçu de motivation adéquate, ce qui l’a laissé dans une situation d’incertitude. Une annulation du document de performance 2019 ne serait pas suffisante pour réparer le préjudice causé à sa dignité et à son estime de soi ainsi que l’anxiété subie. Ce préjudice moral serait estimé ex æquo et bono à 5 000 euros.

181    La BEI conteste l’argumentation du requérant.

182    Selon une jurisprudence constante, les conclusions tendant à la réparation d’un préjudice matériel ou moral doivent être rejetées lorsqu’elles présentent un lien étroit avec les conclusions en annulation qui ont, elles-mêmes, été rejetées comme étant irrecevables ou non fondées (arrêts du 6 mars 2001, Connolly/Commission, C‑274/99 P, EU:C:2001:127, point 129 ; du 14 septembre 2006, Commission/Fernández Gómez, C‑417/05 P, EU:C:2006:582, point 51, et du 19 décembre 2019, HK/Commission, C‑460/18 P, EU:C:2019:1119, point 93).

183    En l’espèce, il résulte sans ambiguïté de la requête que les conclusions indemnitaires sont étroitement liées aux conclusions en annulation. Le requérant expose, d’ailleurs, que sa demande de réparation du préjudice matériel est présentée dans l’hypothèse où le Tribunal considérerait, après avoir annulé le document de performance 2019, que la BEI ne peut pas procéder au réexamen de sa situation. En ce qui concerne le préjudice moral, il indique que celui-ci résulte d’illégalités, à savoir l’existence d’une erreur manifeste d’appréciation, la violation du droit d’être entendu et la violation de l’obligation de motivation, qui correspondent à des moyens qu’il a soulevés à l’appui de ses conclusions en annulation.

184    Par suite, les conclusions en annulation étant rejetées par le Tribunal, il en va de même des conclusions indemnitaires et, par suite, du recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

185    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

186    Le requérant ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la BEI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      SV est condamné aux dépens.

Gervasoni

Madise

Martín y Pérez de Nanclares

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 5 octobre 2022.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.


1 Données confidentielles occultées.