Language of document : ECLI:EU:T:2013:20

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

16 janvier 2013 (*)

« Marque communautaire – Procédure de nullité – Marque communautaire verbale STEAM GLIDE – Motif absolu de refus – Caractère descriptif – Article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement (CE) nº 207/2009 »

Dans l’affaire T‑544/11,

Spectrum Brands (UK) Ltd, établie à Manchester (Royaume-Uni), représentée par M. S. Malynicz, barrister,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté initialement par M. D. Botis, puis par M. G. Schneider et enfin par MM. Schneider et A. Folliard-Monguiral, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

Koninklijke Philips Electronics NV, établie à Eindhoven (Pays-Bas), représentée par Me L. Alonso Domingo, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’OHMI du 14 juillet 2011 (affaire R 1289/2010‑1), relative à une procédure de nullité entre Koninklijke Philips Electronics NV et Spectrum Brands (UK) Ltd,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de MM. N. J. Forwood (rapporteur), président, F. Dehousse et J. Schwarcz, juges,

greffier : Mme S. Spyropoulos, administratrice,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 12 octobre 2011,

vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 27 mars 2012,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 15 mars 2012,

à la suite de l’audience du 16 octobre 2012,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 28 juin 2006, Salton Europe Ltd, devenue par la suite Russell Hobbs Ltd, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal STEAM GLIDE.

3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 9 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Fers à repasser électriques ; fers à repasser électriques plats ; fers à repasser électriques pour le repassage de vêtements ; pièces et accessoires pour tous les produits précités ».

4        Le 22 mai 2008, le signe en cause a été enregistré en tant que marque communautaire, sous le numéro 5167382.

5        Le 12 janvier 2009, l’intervenante, Koninklijke Philips Electronics NV, a introduit auprès de l’OHMI, au titre de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 40/94 [devenu article 52, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009], une demande visant à faire déclarer la nullité de la marque communautaire en cause aux motifs, notamment, que cette marque avait été enregistrée en violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94 [devenu article 7, paragraphe 1, sous b) et article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009].

6        Par décision du 1er juin 2010, la division d’annulation de l’OHMI a rejeté la demande en nullité. En substance, elle a considéré que le signe en cause, considéré globalement, n’était ni descriptif ni dépourvu de caractère distinctif.

7        Le 13 juillet 2010, l’intervenante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’annulation.

8        Par décision du 14 juillet 2011 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’OHMI a fait droit à ce recours, a annulé la décision de la division d’annulation et a déclaré nulle la marque communautaire en cause. En substance, elle a motivé sa décision comme suit :

–        les produits en cause étant des appareils ménagers et le signe en cause étant composé de mots anglais, le public pertinent est celui des consommateurs moyens, considérés comme étant informés, attentifs et avisés, du Royaume‑Uni, de l’Irlande et de Malte (point 15) ;

–        l’expression « steam glide » est descriptive au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, car : i) elle est composée de deux termes anglais qui renvoient tous deux directement à la nature et à la destination des produits en cause (points 20 à 24) ; ii) il n’y a rien d’inhabituel, notamment sur le plan de la syntaxe, dans la combinaison des termes « steam » et « glide » (points 25 et 27) ; iii) dans l’ensemble, par conséquent, l’expression « steam glide » constitue une indication immédiate, directe et facile à comprendre, du fait que les fers à repasser en cause émettent de la vapeur et glissent en douceur sur les vêtements et cette expression ne crée pas une impression qui soit suffisamment éloignée de celle produite par la simple combinaison des significations données par les éléments dont elle est composée, en ce qui concerne ces produits (point 28) ;

–        le signe en cause est banal et dépourvu de caractère distinctif pour les produits en cause, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, étant donné que le consommateur moyen le percevra comme une référence aux fers à repasser qui se déplacent sans difficulté lorsqu’ils sont actionnés (points 32 à 34).

9        La demande de marque STEAM GLIDE a été transférée à la requérante, Spectrum Brands (UK) Ltd, le 18 juillet 2011. Ce transfert a été inscrit au registre des marques communautaires le 14 octobre 2011.

 Conclusions des parties

10      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI et l’intervenante aux dépens.

11      L’OHMI et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

12      Au soutien de son recours, la requérante invoque deux moyens, respectivement tirés d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 et d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du même règlement.

 Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009

13      Ce moyen se subdivise en deux branches.

 Sur la première branche

14      Par la première branche du premier moyen, la requérante fait essentiellement grief à la chambre de recours d’avoir mal apprécié, au regard de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, le sens et la syntaxe du signe en cause et de ses éléments constitutifs, ainsi que la prétendue aptitude dudit signe à décrire les produits en cause de façon immédiate et directe.

15      Avant de répondre aux deux griefs plus spécifiquement avancés par la requérante au soutien de son argumentation, il convient de rappeler que, aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, sont refusées à l’enregistrement « les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci ».

16      En interdisant l’enregistrement en tant que marque communautaire de tels signes ou indications, l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 poursuit un but d’intérêt général, lequel exige que les signes ou indications descriptives des caractéristiques des produits ou des services pour lesquels l’enregistrement est demandé puissent être librement utilisés par tous. Cette disposition empêche, dès lors, que de tels signes ou indications soient réservés à une seule entreprise en raison de leur enregistrement en tant que marque, alors que d’autres entreprises pourraient vouloir décrire leurs propres produits en employant précisément les termes enregistrés comme marque [voir arrêt de la Cour du 23 octobre 2003, OHMI/Wrigley, C‑191/01 P, Rec. p. I‑12447, point 31, et la jurisprudence citée, et arrêt du Tribunal du 30 novembre 2011, Hartmann/OHMI (Complete), T‑123/10, non publié au Recueil, point 19, et la jurisprudence citée].

17      Ainsi, des signes et des indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner des caractéristiques des produits ou des services pour lesquels l’enregistrement est demandé sont, en vertu du règlement n° 207/2009, réputés inaptes, de par leur nature même, à remplir la fonction d’origine de la marque, à savoir celle d’identifier l’origine commerciale des produits ou des services en cause, afin de permettre ainsi au consommateur qui acquiert les produits ou les services que la marque désigne de faire, lors d’une acquisition ultérieure, le même choix, si l’expérience s’avère positive, ou de faire un autre choix, si elle s’avère négative, sans préjudice de la possibilité d’acquisition d’un caractère distinctif par l’usage, prévue par l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 207/2009 [voir arrêt OHMI/Wrigley, précité, point 30 ; arrêt du Tribunal du 2 avril 2008, Eurocopter/OHMI (STEADYCONTROL), T‑181/07, non publié au Recueil, point 35, et la jurisprudence citée].

18      Comme la chambre de recours l’a relevé au point 16 de la décision attaquée, les signes et les indications visés par la disposition précitée sont ceux qui peuvent servir, dans un usage normal du point de vue du public pertinent, pour désigner soit directement, soit par la mention d’une de leurs caractéristiques essentielles les produits ou les services pour lequel l’enregistrement est demandé [arrêt de la Cour du 20 septembre 2001, Procter & Gamble/OHMI, C‑383/99 P, Rec. p. I‑6251, point 39 ; voir également arrêt du Tribunal du 26 novembre 2003, HERON Robotunits/OHMI (ROBOTUNITS), T‑222/02, Rec. p. II‑4995, point 34, et la jurisprudence citée].

19      L’appréciation du caractère descriptif d’un signe ne peut donc être opérée que, d’une part, par rapport aux produits ou aux services concernés et, d’autre part, par rapport à la perception présumée d’un consommateur moyen de la catégorie des produits et des services en cause, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé [voir arrêt du Tribunal du 22 novembre 2011, LG Electronics/OHMI (DIRECT DRIVE), T‑561/10, non publié au Recueil, point 18, et la jurisprudence citée].

20      Par ailleurs, l’enregistrement d’une marque communautaire est exclu dès lors que ladite marque est descriptive dans l’une des langues officielles de l’Union européenne (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 19 septembre 2002, DKV/OHMI, C‑104/00 P, Rec. p. I‑7561, point 40).

21      Pour qu’un signe tombe sous le coup de l’interdiction énoncée par la disposition précitée, il faut qu’il présente avec les produits ou les services en cause un rapport suffisamment direct et concret de nature à permettre au public concerné de percevoir immédiatement, et sans autre réflexion, une description des produits ou services en cause ou d’une de leurs caractéristiques (arrêt du Tribunal du 20 juillet 2004, Lissotschenko et Hentze/OHMI (LIMO), T‑311/02, Rec. p. II‑2957, point 30 ; voir également arrêt du Tribunal du 22 juin 2005, Metso Paper Automation/OHMI (PAPERLAB), T‑19/04, Rec. p. II‑2383, point 25, et Complete, précité, point 21, et la jurisprudence citée).

22      En ce qui concerne les signes constitués d’un néologisme ou d’un mot composé d’éléments dont chacun est descriptif des caractéristiques des produits ou des services pour lesquels l’enregistrement est demandé, il ressort de l’arrêt Procter & Gamble/OHMI, précité (point 43), qu’une expression, si elle évoque la fonction que les produits ou services en cause sont censés remplir, ne contrevient pas pour autant aux dispositions de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, si la juxtaposition des termes qui la composent, inhabituelle dans sa structure, ne constitue pas une expression connue de la langue en cause, soit, en l’occurrence, l’anglais, pour désigner de tels produits ou pour présenter leurs caractéristiques essentielles.

23      S’agissant de la disposition équivalente de l’article 3, paragraphe 1, sous c), de la première directive 89/104/CEE du Conseil, du 21 décembre 1988, rapprochant les législations des États membres sur les marques (JO 1989, L 40, p. 1), la Cour a par ailleurs jugé (arrêts du 12 février 2004, Koninklijke KPN Nederland, C‑363/99, Rec. p. I‑1619, point 104, et Campina Melkunie, C‑265/00, Rec. p. I‑1699, points 37 à 41) qu’une marque constituée d’un mot ou d’un néologisme composé d’éléments dont chacun est descriptif de caractéristiques des produits ou services pour lesquels l’enregistrement est demandé est elle-même descriptive des caractéristiques de ces produits ou services, au sens de ladite disposition, sauf s’il existe un écart perceptible entre le mot ou le néologisme et la simple somme des éléments qui le composent, ce qui suppose soit que, en raison du caractère inhabituel de la combinaison par rapport auxdits produits ou services, le mot crée une impression suffisamment éloignée de celle produite par la simple réunion des indications apportées par les éléments qui le composent, en sorte qu’il prime la somme desdits éléments, soit que le mot ou le néologisme est entré dans le langage courant et y a acquis une signification qui lui est propre, en sorte qu’il est désormais autonome par rapport aux éléments qui le composent [arrêt de la Cour du 25 février 2010, Lancôme/OHMI et CMS Hasche Sigle, C‑408/08 P, Rec. p. I‑1347, points 61 et 62 ; voir également arrêts du Tribunal PAPERLAB, précité, point 27, et du 21 septembre 2011, Nike International/OHMI (DYNAMIC SUPPORT), T‑512/10, non publié au Recueil, point 16, et la jurisprudence citée]. Dans ce dernier cas, il y a alors lieu de vérifier si le mot qui a acquis une signification propre n’est pas lui-même descriptif au sens de la même disposition.

24      Par ailleurs, pour que l’OHMI oppose un refus d’enregistrement sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, il n’est pas nécessaire que les signes et indications composant la marque visés à cet article soient effectivement utilisés, au moment de la demande d’enregistrement, à des fins descriptives de produits ou de services tels que ceux pour lesquels la demande est présentée ou des caractéristiques de ces produits ou de ces services. Il suffit, comme l’indique la lettre même de cette disposition, que ces signes et indications puissent être utilisés à de telles fins. Un signe verbal doit ainsi se voir opposer un refus d’enregistrement, en application de ladite disposition, si, en au moins une de ses significations potentielles, il désigne une caractéristique des produits ou services concernés [arrêt OHMI/Wrigley, précité, point 32 ; arrêt du Tribunal du 9 mars 2010, Euro-Information/OHMI (EURO AUTOMATIC CASH), T‑15/09, non publié au Recueil, point 39].

25      En l’espèce, s’agissant du public par rapport auquel il convient d’apprécier le motif absolu de refus en cause, la chambre de recours a considéré, au point 15 de la décision attaquée, qu’il était celui des consommateurs moyens, considérés comme étant informés, attentifs et avisés, du Royaume-Uni, de l’Irlande et de Malte.

26      Cette délimitation du public concerné n’est pas contestée et, au vu des considérations qui sont exposées dans la décision attaquée, il n’y a pas lieu de la remettre en cause dans la présente affaire. À cet égard, il importe de rappeler qu’il ressort de l’article 7, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009 que les motifs absolus de refus énoncés au paragraphe 1 sont applicables même s’ils n’existent que dans une partie de l’Union.

27      En ce qui concerne la compréhension par le public concerné de chacun des deux termes composant l’expression en cause et leur caractère descriptif pour ce public, la chambre de recours s’est fondée, au point 20 de la décision attaquée, sur la signification que l’Oxford English Dictionary donne aux termes « steam » et « glide ». Cette appréciation n’est pas contestée en tant que telle par la requérante.

28      Cependant, tout en admettant que le terme « steam » est directement descriptif, voire banal par rapport aux produits en cause, la requérante soutient, dans un premier grief, que le terme « glide » est évocateur et qu’il fait naître des « associations plus qualitatives que descriptives ». Ce terme évoquerait en effet l’image d’un produit se déplaçant à la façon d’un planeur glissant au-dessus du tissu, sans le toucher, alors qu’en réalité les fers à repasser à vapeur fonctionnent toujours en contact avec le tissu. Dès lors, ledit terme inciterait l’imagination à créer une image mentale de suspension et de lévitation, qui en réalité n’existe pas.

29      Cette argumentation doit être rejetée. Certes, comme l’a fait valoir la requérante à l’audience, le terme « glide » est susceptible de revêtir plusieurs significations, différant entre elles par des nuances plus ou moins subtiles. Toutefois, comme la chambre de recours l’a relevé à juste titre au point 23 de la décision attaquée, ledit terme, lorsqu’il est spécifiquement associé aux produits en cause, décrit directement le mouvement du fer à repasser utilisé pour repasser des vêtements. Dans ce contexte, l’intervenante fait également observer à juste titre que, selon l’Oxford English Dictionary, le terme « glide » renvoie à un mouvement « sur une surface », et non au-dessus d’une surface, comme l’avance la requérante par référence à l’image d’un planeur. Ledit mouvement aisé du fer à repasser sur les vêtements, induit par la vapeur, correspondant à ce que le consommateur pourrait attendre d’un tel produit, la description de ce mouvement par le terme en question n’est donc pas « évocatrice » d’une irréalité planante, comme le prétend la requérante, mais clairement descriptive d’une caractéristique bien réelle des produits en cause.

30      Il y a donc lieu de conclure que chacun des termes qui composent l’expression « steam glide », pris isolément, est descriptif d’une caractéristique des produits en cause.

31      En ce qui concerne la combinaison des deux termes « steam » et « glide » dans l’expression « steam glide », la requérante soutient, dans un second grief, que la chambre de recours a conclu à tort que la structure de ladite expression n’avait rien d’inhabituel sur le plan de la syntaxe. Alors que le terme « steam » est, selon elle, généralement associé à un substantif, dans une combinaison « adjectif-substantif » (comme dans les exemples énumérés au point 22 de la décision attaquée, à savoir les combinaisons de mots « steam bakery », « steam bath », « steam box », « steam chamber », « steam chest », « steam coil », « steam kiln », « steam kitchen », « steam laundry », « steam oven », « steam pan », « steam pipe », « steam pot », « steam radiator », « steam table », « steam tank » et « steam tube »), la requérante fait valoir que le terme « glide » ne sera pas perçu comme un substantif, mais comme un verbe, « en tant qu’action de glisser, c’est-à-dire de ‘glissement à vapeur’ (steam glide) ». Il y aurait ainsi une « rupture immédiate » par rapport à la syntaxe ordinaire des combinaisons de mots comprenant le terme « steam ». En outre, l’expression en cause revêtirait un caractère très elliptique et les mots susceptibles d’en expliquer clairement le sens sembleraient manquer. Tout cela obscurcirait et perturberait l’aptitude dudit signe à fonctionner comme une simple énonciation descriptive. La requérante invoque, au soutien de cette argumentation, l’arrêt Procter & Gamble/OHMI, précité, et les conclusions de l’avocat général M. Jacobs sous l’arrêt OHMI/Wrigley, précité, Rec. p. I‑12449, points 18 à 22.

32      Cette argumentation doit également être rejetée. À cet égard, l’intervenante fait justement observer, d’une part, que la combinaison de termes tels que « steam » et « glide » n’a rien d’inhabituel en anglais. Elle expose ainsi, plus particulièrement, que, selon l’Oxford English Dictionary, le terme « glide » est également un substantif dans cette langue. De même, l’OHMI a fait observer, à l’audience, que le terme « glide » pouvait être utilisé en tant que substantif qualifiant un autre substantif, comme dans l’expression « dance glide ». Ainsi, même à suivre la thèse de la requérante, l’expression « steam glide » sera aisément perçue comme l’un des nombreux noms composés courants en anglais, dont des exemples sont cités par la chambre de recours au point 22 de la décision attaquée. L’intervenante ajoute, à juste titre encore, à cette liste l’expression « steam motion », assez courante en anglais, ainsi que l’attestent les extraits de publications joints en annexe au mémoire en réponse.

33      D’autre part, l’OHMI relève, également à propos, que la combinaison du terme « steam » avec un verbe n’est pas inhabituelle en anglais, comme par exemple dans les expressions « steam clean », « steam wash » ou « steam iron ». La requérante ayant rétorqué, lors de l’audience, que dans ces diverses expressions les termes « clean », « wash » ou « iron » étaient directement descriptifs, à la différence, selon elle, du terme « glide », il suffit de renvoyer au rejet de ce postulat, déjà opéré au point 29 ci-dessus. En tout état de cause, cette question est sans pertinence aux fins d’apprécier si la structure de l’expression en cause est ou non inhabituelle sur le plan de la syntaxe.

34      Il résulte des considérations qui précèdent que, du point de vue de la syntaxe, la combinaison des termes « steam » et « glide » dans l’expression « steam glide » n’a rien d’inhabituel en anglais.

35      Le Tribunal estime, par ailleurs, qu’il n’existe pas d’écart perceptible entre ladite expression et la simple somme des termes qui la composent. Cette expression ne produit pas une impression suffisamment éloignée de celle produite par la simple réunion des indications apportées par lesdits termes, en sorte qu’elle ne prime pas la somme de ceux-ci. L’argumentation de la requérante doit dès lors être rejetée en application de la jurisprudence citée au point 23 ci-dessus.

36      En tout état de cause, ce qui importe est que l’expression « steam glide », associée aux produits en cause, soit susceptible de décrire directement et de façon concrète une des caractéristiques desdits produits, à savoir la faculté qu’ils ont de glisser en douceur sur les vêtements repassés, grâce à l’émission de vapeur. Tel étant effectivement le cas, l’argumentation de la requérante doit également être rejetée en application de la jurisprudence citée au point 24 ci-dessus.

37      Le Tribunal considère, de surcroît, que l’expression en cause ne revêt pas non plus un caractère elliptique particulièrement prononcé en anglais, dont le lexique comprend un nombre quasiment infini de noms composés (tels que par exemple « shopping bag », « sleeping bag », « doggy bag », etc). Rien ne s’oppose ainsi à ce qu’elle fasse l’objet d’une interprétation claire et directe par le public pertinent, lorsqu’elle est associée aux produits en cause.

38      Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que les deux griefs constitutifs de la première branche du premier moyen sont dénués de fondement. Ladite branche doit dès lors être rejetée comme non fondée.

 Sur la seconde branche

39      Par la seconde branche du premier moyen, la requérante reproche, en substance, à la chambre de recours de ne pas avoir expressément justifié son appréciation par référence à l’intérêt général qui sous-tend le motif absolu de refus visé à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, à savoir celui d’empêcher la monopolisation de signes descriptifs par des entités individuelles, et de ne pas avoir vérifié s’il était raisonnable de supposer que d’autres opérateurs pourraient avoir un intérêt à utiliser à l’avenir le signe en cause, en procédant à une analyse du marché des produits concernés.

40      Il suffit, pour rejeter cette argumentation, de rappeler que, si l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 poursuit un but d’intérêt général, lequel exige que les signes ou les indications descriptives des catégories de produits ou de services pour lesquelles l’enregistrement est demandé puissent être librement utilisés par tous (arrêt OHMI/Wrigley, précité, point 31), il n’en demeure pas moins que son application ne dépend pas de l’existence d’un impératif de disponibilité concret, actuel et sérieux au profit des tiers, de sorte qu’il convient uniquement d’examiner, sur la base de la signification pertinente du signe en question, s’il existe, du point de vue du public ciblé, un rapport suffisamment direct et concret entre le signe et les produits pour lesquels l’enregistrement est demandé [voir arrêt du Tribunal du 27 février 2002, Streamserve/OHMI (STREAMSERVE), T‑106/00, Rec. p. II‑723, points 39 et 40, et la jurisprudence citée ; arrêt du Tribunal du 12 avril 2011, Euro-Information/OHMI (EURO AUTOMATIC PAYMENT), T‑28/10, Rec. p. II‑1535, point 44].

41      La seconde branche du premier moyen doit donc être rejetée comme non fondée, et avec elle ledit moyen dans son intégralité.

 Sur le second moyen, tiré d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009

42      La requérante fait grief à la chambre de recours de ne pas avoir procédé à une analyse appropriée tenant dûment compte des critères pertinents applicables au motif absolu de refus énoncé à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. Premièrement, la chambre de recours n’aurait pas apprécié le caractère distinctif du signe en cause à la lumière de la fonction essentielle de la marque. Deuxièmement, la chambre de recours n’aurait pas examiné le caractère distinctif des produits en cause du point de vue du consommateur concerné. Troisièmement, la chambre de recours n’aurait pas procédé à un examen indépendant des motifs de refus respectivement énoncés à l’article 7, paragraphe 1, sous b), et à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009. Quatrièmement, la chambre de recours n’aurait pas pris en compte l’intérêt général qui sous-tend le motif de refus énoncé à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. Cinquièmement, enfin, la chambre de recours n’aurait pas examiné la marque en cause dans son ensemble.

43      À cet égard, il convient de rappeler que, aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sont refusées à l’enregistrement les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif.

44      La notion d’intérêt général sous-jacente à cette disposition se confond, à l’évidence, avec la fonction essentielle de la marque qui est de garantir au consommateur ou à l’utilisateur final l’identité d’origine du produit ou du service désigné par la marque, en lui permettant de distinguer sans confusion possible ce produit ou ce service de ceux qui ont une autre provenance (voir arrêt de la Cour du 8 mai 2008, Eurohypo/OHMI, C‑304/06 P, Rec. p. I‑3297, point 56, et la jurisprudence citée).

45      Selon une jurisprudence constante, chacun des motifs de refus d’enregistrement énumérés à l’article 7, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009 est indépendant des autres et exige un examen séparé. En outre, il convient d’interpréter lesdits motifs de refus à la lumière de l’intérêt général qui sous-tend chacun d’entre eux. L’intérêt général pris en considération lors de l’examen de chacun de ces motifs de refus peut, voire doit, refléter des considérations différentes, selon le motif de refus en cause (voir arrêt de la Cour du 15 septembre 2005, BioID/OHMI, C‑37/03 P, Rec. p. I‑7975, point 59, et la jurisprudence citée).

46      S’agissant du second moyen, il convient toutefois de rappeler également que, selon une jurisprudence constante, il suffit qu’un des motifs absolus de refus énumérés à l’article 7, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009 s’applique pour qu’un signe ne puisse pas être enregistré comme marque communautaire [voir ordonnance de la Cour du 13 février 2008, Indorata-Serviços e Gestão/OHMI, C‑212/07 P, non publiée au Recueil, points 27 et 28, et la jurisprudence citée ; voir également arrêts du Tribunal du 21 janvier 2009, giropay/OHMI (GIROPAY), T‑399/06, non publié au Recueil, point 45, et du 2 mai 2012, Universal Display/OHMI (UniversalPHOLED), T‑435/11, non publié au Recueil, point 41, et la jurisprudence citée].

47      Or, en rejetant le premier moyen du présent recours, le Tribunal a validé l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle le motif absolu de refus énoncé à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 s’appliquait en l’espèce.

48      Dans ces conditions, il n’apparaît pas nécessaire de se prononcer sur le second moyen d’annulation pour statuer sur le fond du recours [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 2 février 2012, skytron energy/OHMI (arraybox), T‑321/09, non publié au Recueil, point 48].

49      À titre surabondant, il convient de rappeler qu’il existe un certain chevauchement entre les champs d’application respectifs de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 et de l’article 7, paragraphe 1, sous c), de ce même règlement, la seconde de ces dispositions se distinguant toutefois de la première en ce qu’elle ne couvre qu’une circonstance particulière dans laquelle un signe n’est pas de nature à distinguer les produits ou les services d’une entreprise de ceux d’autres entreprises (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, non encore publié au Recueil, point 47). Dès lors, une marque verbale, qui est descriptive des caractéristiques de produits ou de services, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, est, de ce fait, nécessairement dépourvue de caractère distinctif au regard de ces mêmes produits ou services, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du même règlement [voir arrêt du Tribunal du 29 mars 2012, Kaltenbach & Voigt/OHMI (3D eXam), T‑242/11, non publié au Recueil, point 39, et la jurisprudence citée].

50      Dans ces conditions, et compte tenu des conclusions de l’examen du premier moyen, le second moyen apparaît manifestement non fondé.

51      Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que le présent recours doit être rejeté dans son intégralité.

 Sur les dépens

52      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

53      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner à supporter, outre ses propres dépens, les dépens de l’OHMI et de l’intervenante, conformément aux conclusions de ces parties.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Spectrum Brands (UK) Ltd supportera, outre ses propres dépens, les dépens exposés par l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) et par Koninklijke Philips Electronics NV.

Forwood

Dehousse

Schwarcz

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 16 janvier 2013.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.