Language of document : ECLI:EU:T:2014:584

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)

26 juin 2014 (*) (1)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire verbale GULBENKIAN – Marque nationale notoire, nom commercial et logos nationaux antérieurs Fundação Calouste Gulbenkian – Motifs relatifs de refus – Preuve de l’existence des droits antérieurs – Article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphes 4 et 5, du règlement (CE) n° 207/2009 – Article 90, sous a), du règlement de procédure »

Dans l’affaire T‑541/11,

Fundação Calouste Gulbenkian, établie à Lisbonne (Portugal), représentée par Mes G. Marín Raigal, P. López Ronda et G. Macias Bonilla, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par Mme V. Melgar, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

Micael Gulbenkian, demeurant à Oeiras (Portugal), représenté par Mes J. Pimenta et A. Sebastião, avocats,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l’OHMI du 15 juillet 2011 (affaire R 1436/2010‑2), relative à une procédure d’opposition entre la Fundação Calouste Gulbenkian et M. Micael Gulbenkian,

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

composé de MM. S. Frimodt Nielsen (rapporteur), président, F. Dehousse et A. M. Collins, juges,

greffier : M. J. Plingers, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 10 octobre 2011,

vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 23 février 2012,

vu le mémoire en réponse de l’intervenant déposé au greffe du Tribunal le 16 février 2012,

vu le mémoire en réplique déposé au greffe du Tribunal le 26 juin 2012,

vu la décision du 20 août 2012 autorisant l’intervenant, à sa demande, à plaider en portugais lors de l’audience,

vu les observations écrites déposées par la requérante au greffe du Tribunal les 25 avril, 27 juin et 26 août 2013,

vu les observations écrites déposées par l’OHMI au greffe du Tribunal les 27 mai et 2 octobre 2013,

vu les questions écrites du Tribunal à la requérante,

vu les observations déposées par la requérante au greffe du Tribunal le 10 janvier 2014,

à la suite de l’audience du 13 février 2014, à laquelle l’intervenant, dûment convoqué, ne s’est pas présenté,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 17 novembre 2005, l’intervenant, M. Micael Gulbenkian, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal GULBENKIAN.

3        Les produits et les services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 4, 33, 35 à 37, 41, 42 et 44 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 4 : « Combustibles, pétrole (brut ou raffiné), huiles et graisses industrielles et lubrifiants » ;

–        classe 33 : « Boissons alcooliques (à l’exception des bières) » ;

–        classe 35 : « Conseil, conseil dans le domaine de la prestation de services de gestion (administration d’affaires) ; appui institutionnel et réseaux d’appui et macroéconomie et technologies de l’information, tous ces services étant liés aux affaires » ;

–        classe 36 : « Assurances ; affaires financières ; affaires monétaires ; affaires immobilières » ;

–        classe 37 : « Équipements de stations-service (postes d’approvisionnement en essence) » ;

–        classe 41 : « Services d’éducation » ;

–        classe 42 : « Services de conseils techniques dans les domaines de l’agriculture, de l’élevage, de la sylviculture, de la chasse et de la conservation de la nature et du développement rural ; élaboration d’études et de projets, conseil, services de conseil dans le domaine de l’ingénierie, notamment pour l’industrie de la transformation, de l’industrie du traitement, de l’industrie du pétrole et du gaz, énergie, environnement, transports, entreprises de travaux publics, services d’ingénierie et expertises liées à la gestion et aux projets, qualité, maintenance et matériels, sécurité industrielle et récupération d’installations, à savoir gestion de la qualité et entreprises de construction » ;

–        classe 44 : « Services de santé ».

4        La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 7/2007, du 19 février 2007.

5        Le 18 mai 2007, la requérante, la Fundação Calouste Gulbenkian, a formé opposition au titre de l’article 42 du règlement n° 40/94 (devenu article 41 du règlement n° 207/2009), à l’enregistrement de la marque demandée pour l’ensemble des produits et des services visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée sur la marque notoire et les droits antérieurs suivants :

–        la marque notoire Fundação Calouste Gulbenkian, désignant les produits et les services suivants : « Arts (arts plastiques et musique) ; œuvres de philanthropie (santé et développement humain) ; science (recherche et promotion) ; éducation (soutien et développement) ; services de management et services techniques en rapport avec l’industrie du pétrole » (ci-après la « marque notoire ») ;

–        le nom commercial Fundação Calouste Gulbenkian, utilisé dans l’ensemble des domaines mentionnés au premier tiret ci-dessus (ci-après le « nom commercial ») ;

–        les enregistrements portugais nos 5351 et 5352 (ci-après les « logos »), désignant l’ensemble des produits et des services mentionnés au premier tiret ci-dessus et constitués du signe graphique suivant :

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7        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 4, du règlement n° 40/94 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 4, du règlement n° 207/2009].

8        Le 28 mai 2010, la division d’opposition a partiellement fait droit à l’opposition sur le fondement de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, considérant qu’il existait un risque de confusion entre la marque notoire et la marque demandée en ce qui concerne les services d’éducation, relevant de la classe 41, et les services de santé, relevant de la classe 44.

9        La division d’opposition a, par ailleurs, rejeté l’opposition en tant qu’elle était fondée sur l’article 8, paragraphe 4, du règlement n° 207/2009. À cet égard, d’une part, la division d’opposition a considéré que la requérante n’avait pas rapporté la preuve que les logos remplissaient l’ensemble des conditions prévues à l’article 8, paragraphe 4, du règlement n° 207/2009, en particulier la condition selon laquelle les signes doivent donner à leur titulaire le droit d’interdire l’utilisation d’une marque plus récente. D’autre part, elle a estimé que la requérante n’avait pas davantage rapporté la preuve que le nom commercial avait été utilisé, avant la date à laquelle la demande d’enregistrement visant la marque demandée avait été présentée, dans le domaine de la science (recherche et promotion) ou des services de management et services techniques en rapport avec l’industrie du pétrole.

10      Le 27 juillet 2010, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’opposition.

11      Par décision du 15 juillet 2011 (ci-après la « décision attaquée »), la deuxième chambre de recours de l’OHMI a partiellement fait droit au recours de la requérante, en ce qui concerne les services d’élaboration d’études et de projets ainsi que de conseil, relevant de la classe 42, et rejeté le recours pour le surplus.

12      En premier lieu, en ce qui concerne l’étendue du litige dont elle était saisie, la chambre de recours a estimé que la requérante, qui demandait l’annulation de la décision de la division d’opposition dans son ensemble, n’était pas recevable à demander l’annulation de ladite décision en tant que celle-ci, en accueillant l’opposition en ce qui concerne les services d’éducation, relevant de la classe 41, et les services de santé, relevant de la classe 44, lui était favorable.

13      La chambre de recours a également indiqué que, puisque l’intervenant ne contestait pas la décision de la division d’opposition en ce qui concerne lesdits services, cette dernière décision était, dans cette mesure, devenue définitive. Enfin, la chambre de recours a également relevé que l’intervenant ne contestait pas les appréciations de la division d’opposition selon lesquelles l’existence et l’usage de la marque notoire étaient établis en ce qui concerne les arts (arts plastiques et musique), les œuvres de philanthropie (santé et développement humain) et les services d’éducation (soutien et développement). Elle en a déduit que ces appréciations n’étaient plus en litige.

14      En deuxième lieu, en ce qui concerne le risque de confusion, la chambre de recours a estimé que la requérante n’avait pas apporté la preuve de l’utilisation de la marque notoire en ce qui concerne la science ainsi que les services de management et les services techniques en rapport avec l’industrie du pétrole. La chambre de recours ayant, ensuite, constaté que les produits et les services visés par la marque demandée qui relevaient des classes 4, 33, 35, 36, 37 et 42 ne présentaient aucune similitude avec les services pour lesquels l’usage de la marque notoire avait été établi, elle a conclu qu’il n’existait aucun risque de confusion entre la marque demandée et la marque notoire en ce qui concerne lesdits produits et services.

15      En troisième lieu, en ce qui concerne l’application de l’article 8, paragraphe 4, du règlement n° 207/2009, la chambre de recours a confirmé l’appréciation de la division d’opposition selon laquelle la requérante n’avait pas rapporté la preuve de l’utilisation du nom commercial dans le domaine des services de management et des services techniques en rapport avec l’industrie du pétrole.

16      En outre, contrairement à la division d’opposition, la chambre de recours a estimé que la requérante avait apporté la preuve d’une utilisation antérieure à la date de présentation de la marque demandée du nom commercial dans le domaine de la biomédecine, mais non dans celui de la science en général. En conséquence, la chambre de recours a estimé qu’il existait un risque de confusion entre le nom commercial et la marque demandée pour les services d’élaboration d’études et de projets ainsi que de conseil, relevant de la classe 42.

17      Enfin, la chambre de recours a confirmé l’appréciation de la division d’opposition selon laquelle la requérante n’avait pas rapporté la preuve que les logos donnaient à leur titulaire le droit d’interdire l’utilisation d’une marque plus récente. En tout état de cause, la chambre de recours a observé que les éléments de preuve fournis par la requérante, étant les mêmes que ceux qu’elle avait examinés s’agissant du nom commercial, ne lui permettraient pas d’obtenir un résultat plus favorable.

18      En quatrième lieu, la chambre de recours a écarté comme inopérants les arguments de l’intervenant selon lesquels, d’une part, il était titulaire de droits antérieurs à ceux invoqués par la requérante et, d’autre part, le terme « gulbenkian » constituait son nom de famille.

19      En cinquième lieu, la chambre de recours a exercé son pouvoir « discrétionnaire » de ne pas prendre en considération les éléments de preuve fournis par la requérante pour la première fois durant la procédure de recours, en raison de ce que ces éléments nouveaux se bornaient à corroborer les preuves fournies en temps utile devant la division d’opposition.

 Conclusions des parties

20      Compte tenu de ses réponses à des questions écrites qui lui ont été posées par le Tribunal et des précisions qu’elle a apportées lors de l’audience, dont il a été pris acte, la requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        à titre principal, réformer la décision attaquée en accueillant intégralement son opposition ;

–        à titre subsidiaire, annuler la décision attaquée dans la mesure où la chambre de recours n’a pas fait droit à son opposition ;

–        condamner l’OHMI et l’intervenant aux dépens afférents à la présente procédure ainsi qu’aux procédures d’opposition et de recours devant l’OHMI.

21      L’OHMI et l’intervenant concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur la recevabilité

 Sur les fins de non-recevoir de l’OHMI visant la recevabilité de certains chefs de conclusions formulés dans la requête

22      Il convient de constater, à titre liminaire, que, en réponse à des questions écrites qui lui avaient été adressées avant l’audience ainsi qu’à des questions orales qui lui avaient été posées lors de l’audience, la requérante a précisé que sa demande de réformation et d’annulation de la décision attaquée ne visait celle-ci qu’en tant que la chambre de recours n’avait pas intégralement fait droit à son opposition et dans cette seule mesure. De plus, la requérante a retiré ses demandes tendant à ce que le Tribunal enjoigne à l’OHMI de procéder à un nouvel examen des éléments de preuve, d’adopter une nouvelle décision prenant en compte ces éléments et de rejeter la marque demandée. En outre, la requérante a confirmé que sa demande tendant à ce que le Tribunal « examine et prenne en compte les documents déposés durant les procédures d’opposition et de recours devant l’OHMI en ce qui concerne la renommée de la marque antérieure » constituait un moyen présenté au soutien de sa demande de réformation et d’annulation de la décision attaquée et non un chef de conclusions autonome.

23      Il s’ensuit que la portée des conclusions de la requérante dont le Tribunal est saisi dans le présent litige est celle rappelée au point 20 ci-dessus.

24      Dès lors, il n’y a plus lieu de statuer sur les fins de non-recevoir que l’OHMI tire de ce que la requérante n’est recevable ni à contester la décision attaquée en tant que celle-ci a fait droit à son opposition ni à demander au Tribunal de lui adresser des injonctions.

 Sur la recevabilité du moyen unique en tant que celui-ci est fondé sur la violation de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009 et de l’article 16, paragraphe 3, de l’accord sur les ADPIC ainsi que sur la recevabilité des éléments de preuve présentés pour la première fois devant le Tribunal

25      À l’appui de son recours, la requérante soutient que, indépendamment de la comparaison des produits et des services, la renommée de ses droits antérieurs est telle que, en vertu de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009, elle aurait dû conduire la chambre de recours à refuser l’enregistrement de la marque demandée dans son intégralité. La requérante se prévaut, à l’appui de cette argumentation, de plusieurs décisions de justice portugaises, devenues définitives. Par ailleurs, la requérante allègue la violation de l’article 16, paragraphe 3, de l’accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC), du 15 avril 1994 (JO L 336, p. 214), constituant l’annexe 1 C de l’accord instituant l’Organisation mondiale du commerce (OMC) (JO L 336, p. 3).

26      L’OHMI oppose à ces arguments une fin de non-recevoir et estime que les éléments de preuve présentés par la requérante pour la première fois devant le Tribunal sont également irrecevables.

27      Il convient de rappeler, à cet égard, que, aux termes de l’article 135, paragraphe 4, du règlement de procédure du Tribunal, les mémoires des parties ne peuvent modifier l’objet du litige devant la chambre de recours. Il s’ensuit que les parties au litige ne sauraient, sous peine d’irrecevabilité, demander au Tribunal de procéder à une appréciation d’éléments de fait ou de questions juridiques qui n’auraient pas été préalablement examinés par la chambre de recours (voir, en ce sens, arrêt du 5 juillet 2011, Edwin/OHMI, C‑263/09 P, EU:C:2011:452, points 71 à 74).

28      Or, l’OHMI fait valoir que la requérante n’a pas fondé son opposition sur l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009. Les allégations contraires de la requérante se trouvent, en outre, démenties par le dossier de la procédure devant l’OHMI, dont il résulte également que la requérante n’a invoqué la violation de l’article 16, paragraphe 3, de l’accord sur les ADPIC, cité au point 25 ci-dessus, ni devant la division d’opposition ni devant la chambre de recours. Par suite, les arguments tirés par la requérante de la violation desdites dispositions et de ce que la renommée de ses droits antérieurs aurait dû conduire la chambre de recours à accueillir intégralement son opposition, y compris pour des produits et des services non similaires, doivent être écartés comme irrecevables.

29      De plus, il ressort de la jurisprudence citée au point 27 ci-dessus qu’il convient d’écarter comme irrecevables les éléments de preuve produits par la requérante pour la première fois devant le Tribunal.

 Sur la recevabilité du moyen unique en tant que celui-ci est fondé sur la violation de l’article 8, paragraphe 4, du règlement n° 207/2009

30      L’OHMI fait valoir, en outre, que l’argument tiré par la requérante de la violation de l’article 8, paragraphe 4, du règlement n° 207/2009 n’est pas étayé dans la requête et doit, de ce fait, être écarté comme irrecevable.

31      Il convient toutefois de constater que la requérante se prévaut expressément, à l’appui de son recours devant le Tribunal, de la violation de l’article 8, paragraphe 4, du règlement n° 207/2009, disposition qu’elle a visée lors de la procédure devant l’OHMI à l’appui de son opposition en tant que celle-ci était fondée sur le nom commercial et les logos (voir point 6 ci-dessus). De plus, la requérante, dans le cadre du présent recours, rappelle que son opposition est fondée non seulement sur la marque antérieure, mais encore sur le nom commercial et les logos et vise l’ensemble de ces droits antérieurs par son argumentation. Dès lors, force est de constater que le moyen unique invoqué par la requérante, en tant que celui-ci est fondé sur la violation de l’article 8, paragraphe 4, du règlement n° 207/2009, est étayé par l’ensemble des arguments présentés dans le cadre du présent recours. Par suite, il convient d’écarter la fin de non-recevoir opposée par l’OHMI et tirée de ce que, en tant qu’il est fondé sur ladite disposition, le recours doit être rejeté comme irrecevable.

 Sur le fond

 Sur l’étendue du présent litige

32      Il convient de rappeler que la division d’opposition a partiellement fait droit à l’opposition formée par la requérante à l’enregistrement de la marque demandée sur le fondement de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, estimant que la requérante avait établi l’existence de la marque notoire en ce qui concerne les arts (arts plastiques et musique), les œuvres de philanthropie (santé et développement humain) et l’éducation (soutien et développement). En conséquence, la division d’opposition a accueilli l’opposition pour les services visés par la marque demandée qu’elle a considérés comme similaires, à savoir les services d’éducation, relevant de la classe 41, et les services de santé, relevant de la classe 44 (voir point 8 ci-dessus).

33      Dans la décision attaquée, la chambre de recours a confirmé cette appréciation. Elle a en outre estimé que la requérante avait apporté la preuve que le nom commercial satisfaisait aux conditions prévues à l’article 8, paragraphe 4, du règlement n° 207/2009 et que son usage était établi dans le domaine de la biomédecine. En conséquence, elle a également accueilli l’opposition pour les services d’élaboration d’études et de projets ainsi que de conseil, relevant de la classe 42.

34      En revanche, la chambre de recours a considéré, à l’instar de la division d’opposition, que la requérante n’avait pas prouvé l’usage de la marque antérieure ni celui du nom commercial notamment en ce qui concerne les services de management et les services techniques en rapport avec l’industrie du pétrole.

35      Il y a lieu d’approuver les appréciations opérées par la chambre de recours dans la décision attaquée, au demeurant non contestées par la requérante, en ce qui concerne la détermination du public pertinent, la constatation selon laquelle les signes en conflit sont similaires, la constatation selon laquelle il n’existe pas de rapport de similitude entre les produits et les services visés par la marque demandée et ceux pour lesquels l’usage de la marque notoire et du nom commercial a été considéré comme établi par la chambre de recours ainsi que la constatation selon laquelle la requérante n’a pas démontré que les logos remplissaient les conditions prévues à l’article 8, paragraphe 4, du règlement n° 207/2009.

36      Il convient, en revanche, d’examiner les arguments par lesquels la requérante entend démontrer que la chambre de recours aurait dû admettre plus largement son opposition.

37      Ainsi, étant donné qu’il a été considéré (voir points 25 à 29 ci-dessus) que la requérante n’était pas recevable à présenter, pour la première fois devant le Tribunal, des arguments tirés de ce que la renommée de ses droits antérieurs aurait dû faire obstacle à l’enregistrement de la marque demandée indépendamment des produits et des services pour lesquels l’existence desdits droits antérieurs a été prouvée ni des éléments de preuve non produits durant la procédure devant l’OHMI, il convient d’examiner si la requérante est fondée à soutenir que c’est à tort que, au vu des éléments de preuve fournis en temps utile, la chambre de recours a estimé que l’utilisation de la marque notoire et du nom commercial en ce qui concerne les services de management et les services techniques en rapport avec l’industrie du pétrole n’était pas établie.

 Sur la preuve de l’utilisation de la marque notoire et du nom commercial s’agissant des services de management et des services techniques en rapport avec l’industrie du pétrole

38      À titre liminaire, il convient d’observer que, à l’appui de son argumentation, la requérante a présenté, pour la première fois devant le Tribunal, une série de documents dont elle reconnaît qu’ils n’ont pas été soumis à la chambre de recours (annexe A 8 : extraits d’une recherche effectuée sur Internet ; annexe A 9 : déposition de M. S. ; annexe A 10 : interviews accordées par le président de la requérante en 2009 et en 2010 ; annexe C 1 : extrait du site Internet de la société P.). Ces éléments de preuve ne sauraient être pris en compte par le Tribunal pour les raisons indiquées aux points 27 et 29 ci-dessus.

39      En outre, il convient d’écarter des débats les documents présentés par l’OHMI en annexe à son mémoire en réponse, dès lors que, premièrement, il ne s’agit pas de documents examinés par la chambre de recours et que, deuxièmement, il résulte de l’article 76, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009 que, dans une procédure concernant des motifs relatifs de refus d’enregistrement, l’examen est limité aux moyens invoqués et aux demandes présentées par les parties. Or, l’OHMI n’a pas la qualité de partie à une procédure d’opposition.

40      Ensuite, il convient de relever que, à l’appui de son recours, la requérante fait une critique générale de l’appréciation des preuves effectuée par la division d’opposition et par la chambre de recours. Elle joint notamment, en annexe A 7 à la requête, un article qui lui a été consacré par un journal portugais en 2006, dont le titre prête à son président la phrase suivante : « Nous vendons 14 millions de barils de pétrole par an ».

41      Or, aux points 20 et 41 de la décision attaquée, la chambre de recours a mentionné plusieurs éléments de preuve, dont cet article, et a conclu de l’examen de ces preuves que la requérante opérait dans le domaine de l’industrie du pétrole par l’intermédiaire de sa filiale P. De plus, la chambre de recours n’a nullement exclu que le consommateur puisse établir un lien entre le nom commercial de la requérante et le secteur du pétrole.

42      En revanche, la chambre de recours a considéré qu’il n’existait aucun élément lui permettant de conclure que la requérante, que ce soit par l’intermédiaire de la société P. ou directement, offrait à des entreprises tierces des services de management et des services techniques en rapport avec l’industrie du pétrole, à savoir les services désignés par la requérante dans son acte d’opposition.

43      Or, force est de constater que la requérante n’a présenté aucun argument ni aucun élément de preuve déjà soumis durant la procédure devant l’OHMI permettant d’établir l’existence de la marque notoire ou l’utilisation du nom commercial pour les « services de management et services techniques en rapport avec l’industrie du pétrole », ce qui lui incombait, compte tenu de la manière dont elle a défini les droits antérieurs sur lesquels elle a fondé son opposition.

44      Dans ces conditions, la requérante n’est pas fondée à se plaindre de ce que la chambre de recours a considéré qu’elle n’avait démontré ni l’existence de la marque notoire en ce qui concerne les services en cause ni l’utilisation du nom commercial en rapport avec lesdits services.

45      En outre, l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle les produits et services visés par la marque demandée et pour lesquels l’opposition n’a pas été accueillie ne présentent aucune similitude avec les produits et les services pour lesquels l’existence des droits antérieurs dont elle est titulaire a été reconnue comme établie, au demeurant non contestée par la requérante, doit être approuvée.

46      Il s’ensuit que la requérante n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, pour les produits et les services visés par la marque demandée et ne présentant aucun degré de similitude avec les produits et les services pour lesquels ses droits antérieurs ont été établis, la chambre de recours a rejeté son opposition tant sur le fondement de l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009, s’agissant de la marque notoire, que sur celui de l’article 8, paragraphe 4, dudit règlement, s’agissant du nom commercial.

47      Par conséquent, il convient de rejeter le présent recours, sans qu’il soit nécessaire de statuer sur les arguments présentés par l’intervenant, aux conclusions duquel il est entièrement fait droit.

 Sur les dépens

48      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI et de l’intervenant.

49      Aux termes de l’article 90, sous a), du règlement de procédure, si le Tribunal a exposé des frais qui auraient pu être évités, il peut condamner la partie qui les a provoqués à les rembourser.

50      Il convient de condamner, en application de cette disposition, l’intervenant à rembourser les frais d’interprétation occasionnés par sa demande tendant à être autorisé à plaider en portugais lors de l’audience, à laquelle il ne s’est pas présenté. Ces frais, effectivement supportés par la Cour de justice de l’Union européenne, comportant la rémunération, les indemnités journalières ainsi que les frais de déplacement et d’hébergement de l’interprète free-lance auquel le Tribunal a eu recours, s’élèvent à un montant total de 1 807,48 euros.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      La Fundação Calouste Gulbenkian est condamnée aux dépens.

3)      M. Micael Gulbenkian est condamné à rembourser à la Cour de justice de l’Union européenne une somme de 1 807,48 euros, au titre de l’article 90, sous a), du règlement de procédure du Tribunal.

Frimodt Nielsen

Dehousse

Collins

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 26 juin 2014.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.


1 Le présent arrêt fait l’objet d’une publication par extraits.