Language of document : ECLI:EU:T:2014:231

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (troisième chambre)

8 avril 2014 (*)

« Procédure – Taxation des dépens »

Dans l’affaire T‑12/12 DEP,

Laboratoires CTRS, établis à Boulogne-Billancourt (France), représentés par Mmes M. Utges Manley et M. Vickers, solicitors,

partie requérante,

soutenus par

République tchèque,

par

République française,

et par

Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord,

parties intervenantes,

contre

Commission européenne, représentée par MM. E. White et L. Banciella, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande de taxation des dépens à la suite de l’arrêt du Tribunal du 4 juillet 2012, Laboratoires CTRS/Commission (T‑12/12, non publié au Recueil),

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de MM. S. Papasavvas, président, N. J. Forwood et E. Bieliūnas (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Faits, procédure et conclusions des parties

1        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 12 janvier 2012, la requérante, les Laboratoires CTRS, a introduit un recours tendant à faire constater une carence de la Commission européenne en ce que celle-ci se serait illégalement abstenue d’adopter une décision définitive quant à la demande d’autorisation de mise sur le marché (ci-après l’« AMM ») du médicament « Orphacol – Acide cholique ». À titre subsidiaire, ce recours visait à obtenir l’annulation de la décision de la Commission, contenue dans une lettre du 5 décembre 2011, de ne pas accorder à la requérante ladite autorisation.

2        Par acte séparé déposé le même jour que la requête, la requérante a introduit une demande de procédure accélérée au titre de l’article 76 bis du règlement de procédure du Tribunal. Par décision du 8 février 2012, le Tribunal a fait droit à cette demande.

3        Par ordonnance du 18 avril 2012, le président de la cinquième chambre du Tribunal a admis l’intervention de la République tchèque, de la République française et du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord au soutien des conclusions de la requérante.

4        Le 23 avril 2012, la Commission a informé le Tribunal que le comité permanent des médicaments à usage humain devait se réunir le 8 mai suivant pour discuter d’un nouveau projet de décision de la Commission refusant l’AMM pour le médicament Orphacol.

5        Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience du 24 avril 2012. La clôture de la procédure orale a été prononcée à l’issue de cette audience.

6        Par lettre du greffe du Tribunal du 22 mai 2012, les parties ont été informées que l’arrêt devait être prononcé le 7 juin 2012.

7        Par lettre du 25 mai 2012, la Commission a informé le Tribunal qu’elle avait adopté, ce même jour, une décision refusant l’AMM pour le médicament Orphacol.

8        Par ordonnance du 4 juin 2012, le Tribunal a décidé, conformément à l’article 62 du règlement de procédure, d’ordonner la réouverture de la procédure orale afin de permettre aux parties de prendre position sur cet élément nouveau.

9        À l’exception de la République française, toutes les parties ont déposé leurs observations quant aux conséquences à tirer de l’adoption de la décision de la Commission du 25 mai 2012. Par décision du 19 juin 2012, le Tribunal a clos de nouveau la procédure orale.

10      Par arrêt du 4 juillet 2012, Laboratoires CTRS/Commission (T‑12/12, non publié au recueil), le Tribunal a rejeté comme irrecevable la demande en carence formulée par la requérante. Par ailleurs, il a décidé qu’il n’y avait plus lieu de statuer sur la demande en annulation formulée à titre subsidiaire dans la mesure où, par la décision du 25 mai 2012 portant refus d’AMM, la Commission avait procédé au remplacement de la décision de refus contenue dans la lettre du 5 décembre 2011. Enfin, le Tribunal a condamné la Commission à supporter les dépens de la requérante eu égard aux circonstances exceptionnelles de l’affaire.

11      Par lettre du 20 septembre 2012, la requérante a demandé à la Commission de lui régler le montant de ses dépens qu’elle a chiffré à 210 676,26 euros. Par lettre du 18 octobre 2012, la Commission a contesté ce montant et proposé le versement d’une somme de 33 021 euros pour régler cette question. Par lettre du 21 décembre 2012, la requérante a rejeté la proposition de la Commission et formulé une nouvelle demande portant sur un montant révisé de 119 926,20 euros. Par lettre du 22 janvier 2013, la Commission a refusé de payer le montant demandé par la requérante et proposé de verser la somme de 40 896 euros.

12      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 4 juin 2013, la requérante a introduit, sur le fondement de l’article 92, paragraphe 1, du règlement de procédure, une demande de taxation des dépens par laquelle elle a invité le Tribunal à fixer le montant des dépens récupérables dont le remboursement incombe à la Commission à 209 345 euros, majoré du montant des frais exposés aux fins de la présente procédure.

13      Par mémoire déposé au greffe le 19 juillet 2013, la Commission a conclu, en utilisant le taux de change proposé par la requérante, à ce qu’il plaise au Tribunal de fixer le montant des dépens récupérables à 33 021 euros.

 En droit

14      Aux termes de l’article 92, paragraphe 1, du règlement de procédure, s’il y a contestation sur les dépens récupérables, le Tribunal statue par voie d’ordonnance non susceptible de recours à la demande de la partie intéressée, l’autre partie entendue dans ses observations.

15      Selon l’article 91, sous b), du règlement de procédure, sont considérés comme dépens récupérables « les frais indispensables exposés par les parties aux fins de la procédure, notamment les frais de déplacement et de séjour et la rémunération d’un agent, conseil ou avocat ». Il découle de cette disposition que les dépens récupérables sont limités, d’une part, à ceux exposés aux fins de la procédure devant le Tribunal et, d’autre part, à ceux qui ont été indispensables à ces fins (voir ordonnance du Tribunal du 28 juin 2004, Airtours/Commission, T‑342/99 DEP, Rec. p. II‑1785, point 13, et la jurisprudence citée).

16      Selon une jurisprudence constante, le juge de l’Union n’est pas habilité à taxer les honoraires dus par les parties à leurs propres avocats, mais à déterminer le montant à concurrence duquel ces émoluments peuvent être récupérés auprès de la partie condamnée aux dépens. En statuant sur la demande de taxation des dépens, le Tribunal n’a pas à prendre en considération un tarif national fixant les honoraires des avocats, ni un éventuel accord conclu à cet égard entre la partie intéressée et ses agents ou conseils (voir ordonnance Airtours/Commission, précitée, point 17, et la jurisprudence citée).

17      Il est également de jurisprudence constante que, à défaut de dispositions de droit de l’Union de nature tarifaire, le Tribunal doit apprécier librement les données de la cause, en tenant compte de l’objet et de la nature du litige, de son importance sous l’angle du droit de l’Union ainsi que des difficultés de la cause, de l’ampleur du travail que la procédure contentieuse a pu causer aux agents ou aux conseils intervenus et des intérêts économiques que le litige a représentés pour les parties (voir ordonnance Airtours/Commission, précitée, point 18, et la jurisprudence citée).

18      C’est à la lumière de ces éléments qu’il convient d’apprécier le montant des dépens récupérables en l’espèce.

19      En premier lieu, s’agissant de l’objet et de la nature du litige, de son importance sous l’angle du droit de l’Union et des difficultés de la cause, il y a lieu de rappeler que, par son recours, la requérante invoquait deux moyens.

20      Par son premier moyen, elle demandait au Tribunal de constater la carence de la Commission. La requérante faisait en effet valoir que la Commission était dans l’obligation de prendre une décision définitive conforme à la procédure d’examen prévue par le règlement (UE) n° 182/2011 du Parlement européen et du Conseil, du 16 février 2011, établissant les règles et principes généraux relatifs aux modalités de contrôle par les États membres de l’exercice des compétences d’exécution par la Commission (JO L 55, p. 13).

21      Par son second moyen, invoqué à titre subsidiaire, la requérante demandait l’annulation de la décision de refus d’AMM de la Commission. D’une part, elle faisait valoir que cette décision était contraire au règlement n° 182/2011. D’autre part, la requérante faisait valoir que, en tout état de cause, les motifs de cette décision de refus étaient erronés ou insuffisants au regard des règles de l’Union applicables à la mise sur le marché de médicaments. À cet égard, premièrement, le recours invitait le Tribunal à apprécier si la Commission avait pu, sans commettre d’erreur, considérer que la requérante n’avait pas démontré que l’acide cholique était d’un usage médical bien établi au sens de l’article 10 bis de la directive 2001/83/CE du Parlement européen et du Conseil, du 6 novembre 2001, instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain (JO L 311, p. 67). Deuxièmement, selon la requérante, la Commission avait erronément considéré que, lorsqu’une autorisation était demandée sur le fondement de l’article 10 bis de la directive 2001/83, le demandeur ne pouvait pas simultanément se prévaloir des dispositions relatives aux « circonstances exceptionnelles » de l’article 14, paragraphe 8 du règlement (CE) n° 726/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 31 mars 2004, établissant des procédures communautaires pour l’autorisation et la surveillance en ce qui concerne les médicaments à usage humain et à usage vétérinaire, et instituant une Agence européenne des médicaments (JO L 136, p. 1). Troisièmement, la requérante contestait la conclusion de la Commission selon laquelle l’octroi d’une AMM aurait porté atteinte aux objectifs du règlement (CE) n° 1901/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2006, relatif aux médicaments à usage pédiatrique, modifiant le règlement (CEE) n° 1768/92, les directives 2001/20/CE et 2001/83 ainsi que le règlement n° 726/2004 (JO L 378, p. 1) et à la protection de l’innovation.

22      Dans ses observations sur la demande de procédure accélérée déposée par la requérante, la Commission a souligné que les points de droit qui faisaient l’objet de la présente procédure étaient « essentiels » pour l’application des règles de l’Union européenne relatives à l’autorisation de mise sur le marché des médicaments. Cette analyse a d’ailleurs été confirmée par les demandes d’intervention déposées par trois États membres.

23      Le Tribunal estime par conséquent que le litige était d’une importance élevée sous l’angle du droit de l’Union.

24      S’agissant des difficultés de la cause, la complexité factuelle alléguée par la requérante ne saurait être retenue dans la mesure où le recours ne portait pas sur des questions médicales ou techniques.

25      Cependant, comme le reconnaît la Commission dans ses observations sur la demande de taxation des dépens, cette affaire soulevait des questions juridiques nouvelles relatives à l’interprétation du règlement n° 182/2011 et, plus généralement, aux règles de droit de l’Union relatives à l’autorisation de mise sur le marché de médicaments.

26      Le manque de précédents jurisprudentiels, relatifs aux dispositions de droit de l’Union pertinentes en l’espèce ou relatifs à des circonstances semblables, a entraîné, chez la requérante, une plus grande incertitude quant à l’issue du recours et a ainsi pu conduire à une analyse plus approfondie que d’ordinaire.

27      Ainsi, l’affaire présentait une complexité certaine, mais insuffisante pour justifier le renvoi à une formation élargie.

28      Compte tenu de ce qui précède, la complexité et la difficulté de l’affaire doivent être considérées comme moyennes.

29      En deuxième lieu, s’agissant de l’intérêt économique du litige pour la requérante, cette dernière fait valoir qu’elle est une petite société pharmaceutique qui se concentre sur le développement et la fabrication de produits pharmaceutiques. Bien qu’elle n’avance pas d’éléments chiffrés, elle invoque les conséquences financières de l’impossibilité de commercialiser l’Orphacol résultant de la décision de refus d’AMM, eu égard, en particulier, à l’impact d’une telle impossibilité sur ses capacités à développer des médicaments qui requièrent un investissement considérable.

30      Dans la mesure où les allégations de la requérante ne sont pas contestées par la Commission dans ses observations sur la demande de taxation des dépens, le Tribunal estime qu’il ne saurait être nié que l’affaire présentait un intérêt économique important pour la requérante.

31      En troisième lieu, en ce qui concerne l’ampleur du travail que la procédure contentieuse a pu causer aux conseils de la requérante et le montant des honoraires réclamés par cette dernière, il y a d’abord lieu de rappeler qu’il appartient au juge de l’Union de prendre en considération le travail objectivement indispensable à l’ensemble de la procédure contentieuse. Il importe également de rappeler que la possibilité pour le juge de l’Union d’apprécier la valeur du travail effectué dépend de la précision des informations fournies (voir ordonnance Airtours/Commission, précitée, point 30, et la jurisprudence citée).

32      Si, en principe, la rémunération d’un seul agent, conseil ou avocat est recouvrable, il se peut que, suivant les caractéristiques propres à chaque affaire, au premier rang desquelles figure sa complexité, la rémunération de plusieurs avocats puisse être considérée comme entrant dans la notion de « frais indispensables » au sens de l’article 91, sous b), du règlement de procédure (voir ordonnance de la Cour du 6 janvier 2004, Mulder e.a./Conseil et Commission, C‑104/89 DEP, Rec. p. I‑1, point 62, et la jurisprudence citée).

33      Il convient toutefois de tenir compte principalement du nombre total d’heures de travail pouvant apparaître comme objectivement indispensables aux fins de la procédure contentieuse, indépendamment du nombre d’avocats entre lesquels les prestations effectuées ont pu être réparties (voir ordonnance du Tribunal du 19 septembre 2010, Huvis/Conseil, T‑221/05 DEP, non publiée au Recueil, point 30, et la jurisprudence citée).

34      Ainsi, lorsqu’une partie décide de se faire représenter à la fois par un solicitor et par un barrister, il ne s’ensuit pas que les honoraires dus à l’un et à l’autre ne doivent pas être considérés comme des frais indispensables aux fins de la procédure au sens de l’article 91, sous b), du règlement de procédure. Pour procéder à la taxation des dépens dans ces circonstances, il incombe au Tribunal d’examiner la mesure dans laquelle les prestations effectuées par l’ensemble des conseils concernés étaient indispensables aux fins de la procédure contentieuse et de s’assurer que l’engagement des deux catégories de conseils n’a pas entraîné une duplication inutile des frais (voir, en ce sens, ordonnance Airtours/Commission, précitée, points 43 et 44).

35      En l’espèce, l’issue de la procédure contentieuse a certes été déterminée en partie par l’adoption, par la Commission, de la décision du 25 mai 2012 et non par les questions soulevées par la requérante. Cette circonstance n’est toutefois pas de nature à remettre en cause la charge de travail qui a été supportée par la requérante au cours de la procédure contentieuse. En effet, la décision de la Commission du 25 mai 2012 a été adoptée trois jours après l’envoi d’une lettre du Tribunal fixant la date du prononcé de l’arrêt, c’est-à-dire postérieurement à la première clôture de la procédure orale dans cette affaire.

36      La requérante souligne que ses conseils ont consacré, au total, 499,85 heures de travail à la procédure contentieuse dans cette affaire. Elle précise que cette affaire a fait intervenir un barrister, trois solicitors, à savoir un associé, un collaborateur senior et un collaborateur junior et, enfin, un solicitor stagiaire.

37      La requérante produit à cet égard les notes d’honoraires établies par le barrister pour un montant total de 37 815 livres sterling (GBP). Si ces notes d’honoraires ne précisent pas le nombre d’heures que ce barrister a consacré à l’affaire, la requérante souligne que les honoraires facturés correspondent approximativement à 126,05 heures de travail au taux horaire de 300 GBP.

38      Par ailleurs, les notes d’honoraires établies par le barrister fournissent une brève description des prestations effectuées dans le cadre du litige. Ces prestations sont, d’une part, la préparation et la rédaction de la requête en annulation et d’une demande de procédure accélérée ainsi que l’analyse des écritures de la Commission et, d’autre part, la préparation et la participation à l’audience du 24 avril 2012, ainsi que la participation à la rédaction d’une réponse de la requérante à une question du Tribunal. Le travail du barrister a donc concerné toutes les étapes de la procédure contentieuse.

39      En ce qui concerne le travail effectué par les trois solicitors et le solicitor stagiaire, la requérante souligne que le montant de leurs honoraires s’élève à 125 016 GBP. Cependant, la requérante ne produit pas de notes d’honoraires ni, a fortiori, les feuilles journalières sur la base desquelles des notes d’honoraires ont pu être établies. Les justificatifs produits par la requérante prennent en effet la forme de deux tableaux distincts.

40      Le premier tableau indique, sur une base mensuelle, le temps consacré à cette affaire par chacun des trois solicitors et par le solicitor stagiaire. Il en ressort que l’associé, le collaborateur senior, le collaborateur junior et le solicitor stagiaire ont travaillé respectivement 58,6 heures, 255 heures, 44,1 heures et 16,1 heures entre décembre 2011 et juin 2012.

41      Le second tableau décrit les tâches effectuées au cours des différentes étapes de la procédure devant le Tribunal. Ce travail couvre la préparation d’une requête en annulation et d’une demande de procédure accélérée, l’analyse du mémoire en défense et d’une réponse à une question écrite déposés par la Commission, la préparation de l’audience de plaidoiries, la plaidoirie proprement dite, l’analyse du projet de nouvelle décision de la Commission refusant l’AMM de l’Orphacol et la préparation d’une réponse à une question adressée par le Tribunal.

42      En l’espèce, la représentation de la requérante par plus d’un avocat peut certes être considérée comme indispensable aux fins de la procédure compte tenu, notamment, de la complexité moyenne du litige et de l’intérêt économique important de celui-ci pour la requérante.

43      Les documents produits par la requérante au soutien de sa demande de taxation des dépens permettent toutefois de constater que la requête, la demande de procédure accélérée et la réponse à une question écrite du Tribunal déposées par la requérante ont toutes été préparées par trois conseils, au moins. Par ailleurs, toutes les écritures déposées par la Commission ont été analysées par trois conseils. En outre, deux solicitors ont participé à chacune des conférences téléphoniques avec le barrister. Enfin, la préparation des documents annexés aux mémoires déposés par la requérante devant le Tribunal a été effectuée par deux personnes supervisées par une troisième.

44      Ainsi, l’utilisation combinée d’un barrister, de trois solicitors et d’un solicitor stagiaire a eu, en l’espèce, pour conséquence d’entraîner un chevauchement et une répétition des efforts entrepris ainsi qu’une multiplication des frais à tous les stades de la procédure contentieuse de sorte que le Tribunal ne saurait reconnaître la totalité des heures de travail réclamées comme objectivement indispensables aux fins de cette procédure.

45      Les heures de travail, dont le paiement est réclamé, apparaissent d’autant moins indispensables aux fins de la procédure contentieuse que la requérante admet avoir eu recours, d’une part, aux services d’un solicitor spécialiste de premier plan en droit pharmaceutique de l’Union et, d’autre part, aux services d’un barrister qui dispose d’une expertise spéciale dans le domaine du droit de l’Union. En effet, compte tenu de la spécialisation de ces représentants, il y a lieu de considérer qu’ils avaient une bonne connaissance du cadre juridique en cause dans la présente affaire.

46      Il convient également de relever que le cabinet de solicitors, auquel appartiennent les trois solicitors qui ont travaillé pour la requérante lors de la procédure contentieuse, a produit deux avis juridiques au cours de la procédure ayant conduit à l’adoption de la décision de la Commission portant refus d’AMM. La rédaction de ces deux avis a donc permis aux membres du cabinet de solicitors d’acquérir une connaissance approfondie du dossier qui pouvait être mise à profit lors de la procédure contentieuse. Il ressort d’ailleurs de ces avis juridiques que la requérante avait déjà avancé, devant la Commission, une partie des arguments qu’elle a ensuite présentés devant le Tribunal. Cette circonstance est donc de nature à avoir, en partie, facilité le travail des conseils de la requérante et réduit le temps consacré à la préparation de la requête (voir, en ce sens, ordonnance du Tribunal du 13 février 2008, Verizon Business Global/Commission, T‑310/00 DEP, non publiée au Recueil, point 42, et la jurisprudence citée).

47      L’urgence qu’il y avait à engager la procédure et le fait que l’affaire progressait à un rythme soutenu à la suite de la décision du Tribunal de faire droit à la demande de procédure accélérée n’a pas exercé d’influence sur le volume de travail indispensable aux fins de la procédure et ne saurait justifier le recours à une plus grande équipe d’avocats. En effet, comme le Tribunal l’a souligné aux points 45 et 46 ci-dessus, la requérante a fait appel aux services de deux conseils spécialisés et le cabinet de solicitors dans lequel travaille l’un de ces spécialistes a rédigé deux avis juridiques qui ont été adressés à la Commission avant le début de la procédure contentieuse.

48      Le temps consacré par les conseils de la requérante à la coordination avec les intervenants ne saurait enfin être considéré comme indispensable aux fins de la procédure dans la mesure où cette coordination n’a pas été demandée par le Tribunal (voir, en ce sens, ordonnance du Tribunal du 12 décembre 2008, Endesa/Commission, T‑417/05 DEP, non publiée au Recueil, point 47, et la jurisprudence citée).

49      Dans ces circonstances, il y a lieu de considérer que les heures consacrées à la préparation du recours vont largement au-delà de ce qui pourrait être considéré comme étant indispensable, au sens de l’article 91, sous b), du règlement de procédure.

50      S’agissant du taux horaire de rémunération des conseils de la requérante, ce taux s’élève, d’après les chiffres hors TVA fournis par cette dernière dans sa demande de taxation des dépens, à 300 GBP pour le barrister, à 460 GBP pour l’associé, à 335 GBP pour le collaborateur senior, à 210 GBP pour le collaborateur junior et à 160 GBP pour le solicitor stagiaire.

51      Le Tribunal estime cependant que, en l’espèce, ces taux horaires apparaissent excessifs et que, s’agissant des plus élevés d’entre eux, ils sont supérieurs au taux approprié pour rémunérer les services d’un professionnel particulièrement expérimenté, capable de travailler de façon très efficace et rapide. En outre, il convient de rappeler que seuls sont considérés comme étant récupérables les frais indispensables à la procédure. Or, le fait de s’attacher les services de conseils facturant des taux horaires aussi élevés, quand bien même ces taux seraient justifiés par une expérience exceptionnelle de ce type de litige, ne saurait être considéré comme étant indispensable.

52      Eu égard à tout ce qui précède, les honoraires indispensables exposés par la requérante lors de l’instance relative au litige principal et de la présente instance doivent être évalués à 46 000 euros.

 Sur les débours

53      En ce qui concerne les débours d’avocats et les autres frais exposés par la requérante, le montant réclamé à la Commission s’élève à 4 671,51 GBP. Il conviendrait par ailleurs d’ajouter la somme de 850,84 euros au titre des frais de transport et de séjour de deux représentants de la direction de la requérante.

54      Le montant des frais de déplacement et de séjour exposés par la requérante pour les besoins de l’audience ne saurait cependant couvrir l’intégralité des frais correspondant au déplacement d’un barrister, de deux solicitors et de deux représentants de la direction de la requérante.

55      En effet, d’une part, s’agissant des frais liés au déplacement et au séjour à Luxembourg des conseils de la requérante, la présence de trois conseils de la requérante à l’audience ne peut être considérée indispensable. En revanche, et comme l’admet la Commission, la présence de deux conseils à l’audience pouvait être justifiée dans les circonstances de l’espèce.

56      D’autre part, s’agissant des frais liés au déplacement et au séjour des représentants de la direction de la requérante, il ressort de la jurisprudence que les frais exposés par une partie requérante pour assister en personne à l’audience de plaidoirie à Luxembourg, sans que sa présence ait été demandée par le Tribunal ou imposée par les circonstances, ne sauraient être en principe considérés comme ayant été indispensables aux fins de la procédure (voir, en ce sens, ordonnance du Tribunal du 2 juin 2009, Sison/Conseil, T‑47/03 DEP, Rec. p. II‑1483, point 52, et la jurisprudence citée).

57      Il convient toutefois de considérer que, dans les circonstances de l’espèce, la demande visant au paiement des frais liés au déplacement et au séjour de l’un des deux représentants de la direction de la requérante est justifiée.

58      Le Tribunal souligne encore qu’il n’est pas en mesure de vérifier le caractère indispensable de certains frais de transport et de séjour engagés par la requérante compte tenu de la mauvaise qualité des justificatifs produits ou de l’absence d’une mention essentielle, telle que la date, sur l’un de ces justificatifs. Le Tribunal relève également que la requérante produit des notes de frais dont les justificatifs attestent de dépenses effectuées antérieurement à la procédure devant le Tribunal.

59      Enfin, la requérante n’a fourni aucun justificatif de nature à établir la réalité et, a fortiori, le caractère indispensable des frais d’un montant de 2 336,46 GBP qui auraient été engagés au titre de la production de documents (impressions et photocopies).

60      Ces éléments d’appréciation conduisent par conséquent à retenir la somme de 3 000 euros au titre de l’ensemble des débours et des autres frais indispensables qui ont été exposés par la requérante.

61      Compte tenu de l’ensemble des considérations qui précèdent, le Tribunal estime qu’il sera fait une juste appréciation des dépens récupérables par la requérante au titre de la procédure devant lui, en fixant leur montant à 49 000 euros, lequel montant tient compte de toutes les circonstances de l’affaire jusqu’au moment de l’adoption de la présente ordonnance.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

ordonne :

Le montant total des dépens à rembourser par la Commission européenne aux Laboratoires CTRS est fixé à 49 000 euros.

Fait à Luxembourg, le 8 avril 2014.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       S. Papasavvas


* Langue de procédure : l’anglais.